Dossier pedagogique Farnace

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dossier pédagogique saison 2011-2012

farnace antonio vivaldi

En deux mots Farnace, vaincu, veut entraîner dans sa chute son épouse, fille des vainqueurs, et son propre fils, que sa mère protège. Entre amours filiales et questions d’honneur, la raison l’emportera.

Contacts Flora Klein • tél + 33 (0)3 88 75 48 54 • courriel • fklein@onr.fr Hervé Petit • tél + 33 (0)3 88 75 48 79 • courriel • hpetit@onr.fr Opéra national du Rhin • 19 place Broglie BP 80 320 • 67008 Strasbourg Photo www.benoitpelletier-diabolus.fr

www.operanationaldurhin.eu


nouvelle production

farnace antonio vivaldi

18 05 10 06 opéra

strasbourg ve 18.05 20 h di 20.05 15 h ma 22.05 20 h je 24.05 20 h sa 26.05 20 h

Direction musicale George Petrou

Farnace Max Emanuel Cencic

Mise en scène et chorégraphie Lucinda Childs

Berenice Mary Ellen Nesi

décors et costumes Bruno de Lavenère Lumières David Debrinay

Photo Alain Kaiser

Dramma per musica en trois actes Livret d’Antonio Maria Luchini Créé le 10 février 1727 au Teatro Sant’Angelo de Venise

la sinne mulhouse ve 08.06 20 h di 10.06 17 h

Tamiri Ruxandra Donose Selinda Carol Garcia Gilade Vivica Genaux Aquilio Emiliano Gonzalez Toro Pompeo Daniel Behle

Ballet de l’OnR Chœurs de l’OnR Concerto Köln GbR Ed. Parnassus ARTS Productions, 2012

conférence Sophie Roughol Farnace, chronique d’un désamour ve 18.05 18 h 30 Strasbourg Opéra Entrée libre Langue : italien surtitré en français et en allemand Durée approximative : 2 h 45 (durée ne tenant pas compte des entractes)

Conseillé à partir de 12 ans : collège et lycée


L’argument Acte I Farnace, roi du Pont, vaincu, est chassé d’Heraklea, capitale de son royaume. Il ordonne à son épouse Tamiri de tuer leur fils puis de se donner la mort. La mère de Tamiri, Berenice, Reine de Cappadoce, est alliée de Pompeo contre Farnace. Il lui a enlevé sa fille, ce pour quoi elle veut sa mort. Selinda, sœur de Farnace, est tenue prisonnière par le Romain Aquilio. Elle le séduit, lui et l’autre capitaine de Berenice, Gilade. Tamiri cache son fils dans le mausolée des rois du Pont pour le faire échapper à la mort. Berenice veut empêcher sa fille de mettre fin à ses jours, en l’affrontant. Arrive Pompeo au milieu du conflit. Acte II Selinda joue encore de sa séduction sur Gilade et Aquilio pour s’assurer de leur aide. Berenice constate que son capitaine est amoureux. Elle a lancé ses gardes à la recherche de Farnace et de son fils. Tamiri arrive à temps pour empêcher son époux désespéré de se suicider. Il lui reproche de ne pas lui avoir obéi. Elle prétend pourtant avoir éliminé leur fils. Farnace se cache à l’arrivée de Berenice. Comme elle a ordonné la destruction du mausolée, Tamiri est contrainte de lui livrer son fils. Prise sur le fait, sa mère et son époux la répudient. Dans le palais royal, Selinda implore Gilade de sauver son neveu et propose à Farnace son aide. Gilade et Aquilio l’ont en effet aidé à s’introduire dans le lieu. Les capitaines implorent la clémence de Berenice et Pompeo. Ce dernier confie l’enfant à Aquilio. Acte III Dans la plaine d’Héraklea Berenice, Gilade, Pompeo, Aquilio sont accompagnés des troupes romaines. Farnace est introuvable, aussi Berenice demande-t-elle la mort de son fils à Pompeo, en échange de la moitié de son royaume. Tamiri propose la récompense équivalente contre la vie de son enfant. Selinda entraîne Gilade à trahir Berenice et demande à Aquilio d’éliminer Pompeo. Farnace, masqué, va tenter, mais sans succès, d’assassiner Pompeo à l’aide d’Aquilio. Berenice indentifie Farnace et le fait enchaîner, mais il est libéré par les capitaines qui tentent à leur tour d’éliminer Berenice et Pompeo. Pompeo sauve alors la reine, Farnace sauve Pompeo, et la clémence finit par être accordée à tous.

Les personnages Farnace roi du Pont, fils et successeur de Mithridate / contre-ténor Berenice reine de Cappadoce, ennemie de Farnace et mère de Tamiri / mezzo-soprano Tamiri épouse de Farnace, fille de Berenice / mezzo-soprano Selinda sœur de Farnace / mezzo-soprano Gilade capitaine de Berenice / mezzo-soprano Pompeo chef des victorieuses troupes romaines, allié de Berenice / ténor Aquilio capitaine de Berenice qui reteint en prison Selinda / ténor

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L’opéra fétiche du « prete rosso » Genèse de l’œuvre Ultime décennie d’activité lyrique de Vivaldi, les années 1730 débutent par un trou noir dans la biographie du compositeur. Omniprésent sur les scènes italiennes depuis 1713, il disparaît en effet des théâtres de la péninsule après la création d’Atenaide à Florence au mois de janvier 1729 pour n’y reparaître que deux ans et quatre mois plus tard, le 4 mai 1731, avec la reprise de son Farnace au Teatro Omodeo de Pavie. Durant ces longs mois, l’activité théâtrale du prete rosso dans son pays est au point mort, même si plusieurs de ses œuvres sont reprises, sans doute en dehors de son contrôle, dans des petits théâtres de Vénétie. L’hyperactif compositeur-impresario n’a pas pour autant abdiqué ses ambitions lyriques. Mais son horizon est devenu autrichien. Depuis qu’il a rencontré Charles VI à Trieste au mois de septembre 1728 et qu’il s’en est fait un protecteur de choix, son ambition l’aimante vers Vienne, cœur et poumon d’une vie musicale idéalisée, où il s’imagine pouvoir enfin épanouir son art à l’écart des contraintes commerciales du marché péninsulaire. Vivaldi s’est approché de ce rêve en s’attachant les faveurs de l’empereur, grand amateur de musique qui, selon un témoignage contemporain, lui aurait davantage parlé « en deux semaines qu’il ne parle à ses ministres en deux ans ». Il est hautement probable qu’une invitation à Vienne ait suivi cette rencontre et de fait, le trou noir biographique des années 1729-1731 est éclairé par plusieurs lueurs au dessus de l’Europe Centrale : tout d’abord, le 30 septembre 1730, Giovanni Battista Vivaldi, père du compositeur, obtient d’être relevé pour un an sa charge de violoniste dans l’orchestre de la Basilique de S. Marco de Venise, afin de pouvoir accompagner un fils « in Germania », très certainement Antonio, le seul de ses enfants susceptible d’entreprendre un tel voyage ; puis, quelques mois plus tard, peut-être sur la route de Vienne, Vivaldi donne son Farnace à Prague ; de nouveau, à l’automne 1730 et au printemps 1731 (sur la route du retour vers Venise ?), il crée sur la même scène deux nouveau opéras, Argippo et Alvilda regina dei Goti. Ainsi, quoique la preuve définitive fasse encore défaut, il semble fort probable que le compositeur se rendît à Vienne au cours de cette même année. Un indice déterminant en ce sens sera d’ailleurs fourni par le livret du Farnace de Pavie, dans lequel Vivaldi se réclamera du patronage de deux nouveaux protecteurs viennois : le duc François de Lorraine, futur époux de l’impératrice Marie-Thérèse, et le prince du Liechtenstein. En ce début d’année 1731, Vivaldi n’a cependant pas encore tiré un trait sur Venise. Ses regards convergent en effet à nouveau vers les théâtres de sa ville natale, et c’est selon une méthode éprouvée qu’il va préparer minutieusement son rétablissement dans la Sérénissime par une série d’étapes sur la terre ferme : Pavie avec la représentation de son Farnace au printemps 1731, Mantoue avec la reprise du même opéra et la création de Semiramide au Théâtre Archiducal durant le carnaval de 1732, et enfin Vérone, avec la création de La Fida ninfa au cours du même carnaval, préluderont ainsi à son retour au Teatro S. Angelo à l’automne 1733, célébré par la création de Motezuma. Dans un tel contexte biographique, le Farnace de Pavie, dont la partition est conservée dans le fonds Giordano 36 de la Bibliothèque nationale de Turin, s’impose comme un puissant symbole, inaugurant la longue liste des chefs-d’œuvre de haute maturité qui jalonnent l’ultime période créatrice du théâtre lyrique vivaldien. Mais le manuscrit turinois fait également figure de symbole en constituant l’unique version complète parvenue jusqu’à nous d’un opéra auquel Vivaldi témoigna son profond attachement. Entre 1727 et 1738, six versions distinctes de Farnace sortirent en effet de la plume vivaldienne, faveur dont aucun autre de ses drammi, pas même les œuvres à succès et à reprises que furent Armida al campo d’Egitto ou La Costanza trionfante, ne bénéficia jamais. Sans conteste, au sein de l’œuvre lyrique vivaldienne, Farnace s’impose comme l’opéra fétiche du prete rosso. La rencontre de Vivaldi avec le livret du poète vénitien Antonio Maria Lucchini intervint probablement à Rome au cours du carnaval de 1724, à l’occasion de la création de l’œuvre au Teatro Alibert, sur une musique du Napolitain Leonardo Vinci. Le prete rosso, dont le Giustino triomphait au même moment dans la même ville sur la scène rivale du Teatro Capranica, vint probablement assister à l’une des représentations de ce premier opéra de Vinci donné hors de Naples, dont la distribution était dominée par le jeune prodige Farinelli. Plus que l’équilibre d’ensemble incertain d’une œuvre dramatiquement assez modeste, c’est probablement le riche potentiel psychologique des deux personnages formant le couple royal Farnace-Tamiri qui séduisit Vivaldi. La force des ressorts dramatiques sous-tendant à la fois leurs rapports et leur confrontation à l’ennemi fit sans doute passer le compositeur sur plus d’un défaut de ce livret bricolé par Lucchini. Un livret que l’abbé Conti devait estimer « passable », allant jusqu’à y relever la présence d’un « épisode contraire à toute vraisemblance 1 »… Il est vrai que Lucchini ne se distinguait guère comme orfèvre de son art mais relevait plutôt de la catégorie de l’honnête tâcheron, plus qu’à l’aise dans la réécriture d’œuvres anciennes que dans la création originale et cohérente d’un univers poétique et dramatique personnel. À l’époque de son service à


la Cour de Dresde, ses dons de librettiste devaient d’ailleurs faire l’objet de sérieuses réserves de la part du futur prince électeur de Saxe Frédéric Auguste II, lequel jugea préférable de le cantonner dans des tâches subalternes telles que l’écriture de textes de serenatas / sérénates ou de cantates. Lucchini n’en écrivit pas moins de nombreux livrets d’opéras ou d’oratorios, que mirent en musique des compositeurs aussi reconnus que Lotti, Albinoni, Porta ou Caldara, et Vivaldi collabora à deux reprises au moins avec lui, mettant successivement en musique deux de ses livrets originaux, Tieteberga et Dorilla in Tempe. Farnace pour sa part n’avait rien d’un livret original. Bien au contraire, Lucchini l’avait écrit en s’inspirant directement de La pace generosa, du poète Antonio Salvi. Si le compositeur ménage aux ensembles (plusieurs chœurs, un quatuor et un duo) et au récitatif accompagné de remarquables incursions, les airs n’en constituent pas moins la quintessence de sa partition, comme en témoigne la célèbre aria d’ombra de Farnace de l’acte II, « Gelido in ogni vena », reprise de Siroe re di Persia, composition d’une intensité sublime dont la ritournelle dissonante évoque le thème de l’Inverno des Quattro stagioni. Il en va de même du bouleversant « Combattono quest’alma » de Tamiri, composé pour Anna Giro, de l’air virtuose de Gilade au premier acte, « Nell’intimo del petto », dans lequel l’orchestre est soutenu sans interruptions (même respiratoires !) par deux cors en notes tenues jouant piano, ou encore l’air envoûtant de Selinda, « Al vezzeggiar d’un volto », accompagné par les seules cordes, en sourdine. En l’absence de témoignage ou d’archives, l’accueil réservé par Pavie à ce chef-d’œuvre vivaldien demeure un mystère. Le succès de l’entreprise de reconquête menée par Vivaldi dans les mois suivants laisse cependant à penser que ce premier pas fut aussi un succès. Quoiqu’il en fût, Vivaldi conserva à son Farnace son statut d’opéra fétiche tout au long de la décennie, le révisant à nouveau pour Mantoue en 1732, pour Trévise en 1737 et enfin pour Ferrare en 1738. Preuve de son attachement à une œuvre majeure de sa production lyrique, masquant la fragilité de sa trame dramatique derrière le majestueux flamboiement de sa musique, sublime et tendre. 1 Les lettres de l’abbé Antonio Conti à la comtesse de Caylus dont sont tirés les différentes extraits mentionnés dans ce texte sont préservées à la Bibliothèque Marciana de Venise. Elles ont fait récemment l’obejet d’une publication par les soins de Sylvie Mamy (Lettere da Venezia a Madame la Comtesse de Caylus, 1727-1729- Leo S.Olschki, , Florence, 2003 ).

Frédéric Delamea Texte paru dans l’enregistrement de Farnace, Naïve, 2008

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les décors

Une scénographie minimaliste imaginée par Bruno de Lavenère

Les contraintes du décor de Farnace sont liées à la présence de nombreux artistes sur scène. Outre les solistes et les artistes des Chœurs, c’est bien sûr aux danseurs du Ballet de l’OnR qu’il faut ménager un espace suffisant pour leurs prestations. De là, un parti-pris d’épurer le décor. Le traitement des surfaces a fait l’objet d’une attention toute particulière.

Les murs sont dorés à la feuille (gauche) pour leur conférer une brillance inégalée par la peinture. Un traitement de « vieillissement » leur donnera au final un air patiné (droite).

Les claustras : à partir d’un gabarit en métal, reproduit sur le support en élastomère acrylique teinté dans la masse, on a pu découper le dessin de ces parties, ajourées par la suite au cutter. Afin de consolider la structure fragilisée par la découpe, la plaque est collée (gauche) sur un filet (droite). Le modèle est reproduit en de nombreux panneaux qui constituent le fond de scène (ci-dessus).

La toile peinte de fond effet « nuages » (gauche), placée derrière un écran plastique appelé « cyclo », est rétroéclairée pour renforcer l’aspect lumineux (droite).

Maquettes de Bruno de Lavenère - Photos OnR

la toile de fond

les claustras

les murs

la forêt

Proposée sur la maquette (droite), la forêt se présente sous la forme d’un tulle garni d’ombres d’arbres en fond. à l’avant, un pendrillon « silhouette d’arbre » (milieu) garni de molleton noir (gauche) par notre chef tapissier.


Max Emanuel cencic

Hervé Petit : Quel est votre rapport à la musique baroque ? Max Emanuel Cencic : J’ai découvert la musique baroque de très bonne heure. Je jouais déjà du Bach dans mon enfance, et comme j’ai été membre des Petits Chanteurs de Vienne, j’ai grandi au milieu des pièces de musique des XVIIe et XVIIIe siècles. Cette musique fait donc partie de ma vie. H. P. : Le baroque mode d’emploi : comment briser tous les tabous et les idées reçues ? M.E. C. : Je pense qu’à l’époque baroque, les gens menaient une vie très dure. La mort et la souffrance étaient bien plus présentes qu’aujourd’hui. Voilà pourquoi on y célébrait la vie plus que jamais. Je crois donc que pour s’exprimer pleinement, la musique baroque exige de vraies émotions. La souffrance et la joie s’y côtoient de très près, et il faut que l’interprétation en tienne compte pour effacer toutes les présomptions d’infériorité artistique par rapport à la musique classique. H. P. : Qu’est-ce qui fait du chant baroque un genre contemporain ? M.E. C. : Rien, car nous ignorons ce que les chanteurs de l’époque baroque chantaient et comment ils le chantaient. Nous ne pouvons que faire des suppositions et créer aujourd’hui notre propre vision du baroque. Ce qui est indéniablement nouveau, c’est la voix de contre-ténor qui n’existait pas aux XVIIe et XVIIIe siècles comme aujourd’hui pour chanter les rôles de castrats. H. P. : Comment peut-on rendre un opéra baroque aussi populaire qu’il pouvait l’être à Venise au moment de sa création ? M.E. C. : Je crois qu’un bon opéra fait 50 % du succès. Mais l’autre moitié est du ressort de l’équipe d’artistes qui soustend ce succès. Les chanteurs, la mise en scène, et même ceux qui ne sont pas sur le plateau, le personnel de l’Opéra… tous contribuent à la réussite d’un opéra, qui est une œuvre d’art réalisée par de nombreuses personnes de talent.

On peut faire la comparaison avec les grands films actuels d’Hollywood : aucun film ne tient la route avec une seule vedette… Le succès dépend de toute une série de vedettes et de grands talents. Il me semble donc que c’est le bon mélange de talents et d’artistes qui rend le succès possible à tout moment. H. P. : Comment entre-t-on dans la peau du tyrannique Farnace ? M.E. C. : Ma foi... Dans cet opéra, Farnace n’est pas tyrannique. Il est fier, mais en même temps il est vaincu. Le terme de désespoir décrirait assez bien son état. Et c’est le désespoir qui le conduit au bord de la folie. Le désespoir est un sentiment que nous éprouvons tous, à un moment ou à un autre de notre vie. Un sentiment qui nous pousse à faire ou à dire des choses sans réfléchir, parce que nous perdons le contrôle. C’est plus ou moins l’état d’esprit de Farnace tout au long de cet opéra. H. P. : Comment traitez-vous le personnage de Farnace ? M.E. C. : Un roi déchu qui se bat désespérément pour son honneur et qui perd la raison. H. P. : Le baroque en un mot ? M.E. C. : Comment décrire une ère, une époque en une seule phrase ? C’est impossible. Il faudrait tenir compte de tant de choses pour rendre l’esprit de ce temps en quelques mots seulement... Le mieux qu’on puisse faire est d’essayer d’imaginer et de ressentir le baroque à travers l’héritage qu’il a laissé, dans la musique, la peinture, l’architecture et toutes les réalisations philosophiques ou scientifiques de cette époque. Traduit de l’anglais par Odile Demange, Février 2012.

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L’opéra au temps de vivaldi La naissance de l’opéra est parfois associée au plus ancien ouvrage connu : L’Orfeo de Monteverdi, donné en 1607 au Théâtre de la Cour de Vincent Ier de Mantoue. Mais il est rendu populaire en 1637, à Venise, avec la création de la première salle privée qui donne des spectacles du genre. Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, pas moins de seize salles vont ouvrir dans la ville, tellement l’engouement des Vénitiens est fort pour ce genre. On imagine le nombre d’ouvrages qu’il faut produire pour alimenter leurs programmations. Le rythme de la production d’opéras s’accélère au XVIIIe siècle. Le nombre des chanteurs n’excédait pas sept ou huit et l’orchestre devait être réduit au minimum : des cordes auxquelles on ajoutait selon les thèmes évoqués des cuivres, des percussions ou une flûte. Certes réduits par rapport à ce qui pouvait être développé pour les opéras de cour, les moyens étaient mis pour des décors ou des effets que les Vénitiens adoraient. Leur aptitude à s’enthousiasmer pour les prouesses vocales était forte, notamment celles des castrats, dont l’usage était courant à l’époque. Cette pratique perdurera jusqu’au XIXe siècle. Le dernier castrat connu, Alessandro Moreschi, est mort en 1922.

L’opéra baroque Il se caractérise globalement par une alternance de récitatifs et d’airs. Le récitatif, né au XVIe siècle, est une forme qui permet aux solistes d’exprimer des paroles et d’échanger des propos qui font avancer l’action dramatique de l’opéra. La mélodie est proche de la parole et de ses inflexions, elle est accompagnée du clavecin et, ou non, de la viole de gambe, c’est le recitativo secco, ou de l’orchestre dans le recitativo accompagnato. Dans le dernier cas, l’orchestre agit en ponctuant des phrases ou en effectue des nappes sonores qui renforcent le propos. L’air, ou aria, est une forme plus expressive, qui permet d’exprimer les sentiments du chanteur. L’orchestre y est également plus présent et renforce les mélodies.

l’orchestre baroque : des instruments particuliers

Le clavecin, le violon, l’alto, le violoncelle, la viole de gambe, la contrebasse, la trompette naturelle, le cor naturel, le hautbois, le basson, le théorbe, la guitare, les cymbales, les timbales.

À gauche : un théorbe À droite : quand un ange joue de la viole de gambe (Retable d’Issenheim, Matthias Grünewald, Colmar)


Le Pasticcio Le pasticcio est une pratique dans le domaine lyrique qui date du XVIIIe siècle et que l’on rencontre particulièrement en Italie. Elle consiste à intégrer soit des morceaux d’autres compositeurs dans un ouvrage, qu’ils aient été composés ou non pour celui-ci, soit de sa propre composition, mais déjà intégrés à des œuvres antérieures et reprises. On en change les paroles et le tour est joué. Ainsi, en utilisant des morceaux connus, on s’assure le succès de la nouvelle production. Les opéras n’étaient joués que peu de fois, parfois une seule, et l’identification des airs était difficile. Cette pratique est évidemment choquante de nos jours et sévèrement réprimée si le plagiat est avéré.

des compositeurs contemporains de vivaldi Johan Pachelbel (1652-1706) Marin Marais (1656-1728) Henry Purcell (1659-1695) Alessandro Scarlatti (1660-1725) François Couperin (1668-1733) Antonio Vivaldi (1678-1743) Georg Philip Telemann (1681-1767) Jean-Philippe Rameau (1683-1764) Domenico Scarlatti (1685-1757) Geog Friedrich Haendel (1685-1759) Jean-Sébastien Bach (1685-1750)

Les rôles « travestis » (Gilade) Il s’agit, dans le langage du théâtre, d’un rôle de femme interprété par un homme, ou l’inverse. L’existence de ces rôles a plusieurs explications, entre autres. Les rôles dans les débuts de l’opéra aux XVIIe et XVIIIe siècles étaient indifféremment distribués à des hommes ou à des femmes, selon leurs disponibilités du fait de la vitesse de production des opéras de l’époque. Les rôles écrits pour les hommes étaient souvent moins importants est leurs tessitures moins impressionnantes que celles des prima donas et des castrats aux voix considérées comme « angéliques ». Une autre raison est ce décret du pape Clément XII, qui régna de 1730 à 1740, interdisant aux femmes de se produire sur scène. Cette particularité n’est pas l’apanage de l’opéra, le théâtre en faisant usage depuis l’Antiquité. La pratique se poursuit dans l’histoire lyrique, les rôles de vieilles femmes étant parfois composés pour des ténors ou des contre ténors, et surtout, dans la musique classique et romantique, des rôles de jeunes hommes le sont pour des mezzo-sopranos, voire des sopranos. Orfeo dans Orfeo ed Euridice (1762) de Gluck est une mezzo, comme Cherubino des Nozze di Figaro (1786) de Mozart. Dans I Capuleti ei Montecchi (1830) de Vincenzo Bellini, le rôle de Roméo est attribué à une femme et dans Der Rosenkavalier (1874) de Richard Strauss, Octavian, jeune frère du Comte Rofrano, est une soprano, de même que, dans son Ariadne auf Naxos (1912), le rôle du compositeur est confié à une femme soprano.

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Mithridate de Jean Racine :

extrait de la Préface où il est question de « Pharnace » (« Farnace » en français) Il n’y a guère de nom plus connu que celui de Mithridate ; sa vie et sa mort font une partie considérable de l’histoire romaine, et sans compter les victoires qu’il a remportées, on peut dire que ses seules défaites ont fait presque toute la gloire de trois des plus grands capitaines de la république : c’est à savoir, de Sylla, de Lucullus et de Pompée. Ainsi je ne pense pas qu’il soit besoin de citer ici mes auteurs ; car, excepté quelque événement que j’ai un peu rapproché par le droit que donne la poésie, tout le monde reconnaîtra aisément que j’ai suivi l’histoire avec beaucoup de fidélité. En effet, il n’y a guère d’actions éclatantes dans la vie de Mithridate qui n’aient trouvé place dans ma tragédie. J’y ai inséré tout ce qui pouvait mettre en jour les mœurs et les sentiments de ce prince, je veux dire sa haine violente contre les Romains, son grand courage, sa finesse, sa dissimulation, et enfin cette jalousie qui lui était si naturelle, et qui a tant de fois coûté la vie à ses maîtresses. […] Xipharès était fils de Mithridate et d’une de ses femmes qui se nommait Stratonice. Elle livra aux Romains une place de grande importance, où étaient les trésors de Mithridate, pour mettre son fils Xipharès dans les bonnes grâces de Pompée. Il y a des historiens qui prétendent que Mithridate fit mourir ce jeune prince pour se venger de la perfidie de sa mère. Je ne dis rien de Pharnace, car qui ne sait pas que ce fut lui qui souleva contre Mithridate ce qui lui restait de troupes, et qui força ce prince à se vouloir empoisonner, et à se passer son épée au travers du corps pour ne pas tomber entre les mains de ses ennemis ? C’est ce même Pharnace qui fut vaincu depuis par Jules César, et qui fut tué ensuite dans une autre bataille.

Barroco Étymologiquement, le terme « baroque » vient du mot portugais « Barroco », la perle irrégulière. Le mot qui avait jusqu’à la Première Guerre mondiale une conotation péjorative, n’est pas usité au moment où le style se développe.

Pourquoi le Baroque ? En France et en Allemagne, à la fin du XVIe siècle, la Réforme protestante s’installe. La contre-Réforme est organisée par les catholiques à partir de Rome. La construction de nouvelles églises s’intensifie et colonnes torses, fresques peintes et dorures apparaissent. Majesté et puissance sont les maîtres des édifices qui voient le jour.

L’évolution On peut distinguer trois périodes dans l’histoire du Baroque : • le Maniérisme : transition entre la Renaissance et le Baroque • le Baroque « pur » du XVIIe siècle • le style Rococo et la mort du style baroque La tendance du style se fait jour tout d’abord dans la peinture, la sculpture et l’architecture, puis trouve une application dans la musique et la littérature.

Des peintres au service d’un style Dans la peinture, domaine privilégié du Baroque, on distingue trois courants : le Naturalisme, le Classicisme et le Baroque proprement dit. Le Naturalisme se manifeste entre 1600 et 1630. Outre Le Caravage, le plus connu dans le domaine avec des œuvres comme La Vocation ou Le martyre de Saint Matthieu, on compte également les frères Manfredid et Orazio Gentileschi. Le courant classique est caractérisé par les frères Carrache. Annibale est le grand rival du Caravage. Il réalise


les plafonds du Palais Farnese à Rome et de nombreuses fresques. Le courant baroque, qui se développe à partir de 1620, est encore plus théâtral que les précédents. Lanfranco en donne la preuve évidente avec la coupole de Sant’Andra dela Valle à Rome. Pierre de Cortone, quant à lui, utilise les plafonds en trompe-l’œil. Le Baciccia décore le Gesu et Andrea Pozzo réalise le plafond de Saint Ignace. Ce dernier courant est aussi marqué par Gianbattista Tiepolo, grand spécialiste des ciels et des paysages s’étendant à l’infini.

La sculpture et l’architecture Le Bernin domine la sculpture de l’époque. Il est révélé grâce au baldaquin de St Pierre (1624-1633) et travaille toute sa vie dans la basilique. Il sculpte les bustes dont ceux de Urbain VIII, Paul V, Louis XIV et son chef d’œuvre est La Transverbération de Sainte Thérèse. Il réalise des fontaines comme celles de la Place Navone à Rome et sculpte aussi La Vérité découverte par le Temps et L’Enlèvement de Proserpine (1621-1622). Il est aussi architecte. Son seul rival dans le domaine est Francesco Borromini. Mais on peut citer Pierre de Cortone, Maderno, Bramante, Fontana, Longhi le Jeune, Girolamo et Rainaldi.

La conquête du Baroque Malgré la récession dans l’Europe du XVIIe siècle, les puissances monarchiques s’engagent dans la construction de demeures prestigieuses. De l’Italie, le Baroque s’étend vers l’Espagne et le Portugal, puis vers la France et l’Angleterre. Suivent l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas puis la Pologne et la Russie. Séville et Madrid deviennent très vite les capitales du Baroque espagnol. Velasquez devient, en 1623, le portraitiste de la famille royale. Le Greco est un cas particulier, son style restant très proche du maniérisme. Rubens subit les influences italienne et espagnole. Van Dyck, son élève, apporte à l’art du portrait un souffle nouveau. Le sculpteur François Duquesnoy collabore avec Le Bernin. Le Baroque n’est pas une époque productive dans l’art hollandais, malgré la présence de deux grands peintres : Rembrandt et Vermeer. En Allemagne, c’est surtout le Sud, sous l’influence du catholicisme, qui offre au style son expression la plus importante. En Bohême et en Hongrie, la haute aristocratie constitue une clientèle intéressante pour les artistes italiens. L’empereur Rodolphe est lui-même collectionneur. Prague et Vienne deviennent à leur tour deux pôles d’art baroque. On cite volontiers Nicolas Paccassi, qui construit Schönbrunn et le château de Prague. En Allemagne, Balthazar Neumànn est chargé de la construction de la Résidence, un immense palais qui mélange les influences de Versailles et le style autrichien. Tiepolo vient y peindre le plafond de l’escalier de la salle impériale. La Pologne et la Russie présentent un autre domaine de l’art baroque, appelé « monde slave du Baroque », qui subit à la fois les influences italiennes et danubiennes. La France et l’Angleterre offrent une certaine résistance au Baroque. La cour de France donne le ton. Versailles, qui représente le Classicisme « à la Française », reste la norme de l’architecture, tandis que le Baroque s’installe dans les édifices et les arts religieux. Beaucoup d’artistes se situent entre ces deux courants artistiques, comme Georges de la Tour, les frères Le Nain, Philippe de Champaigne ou même Poussin, en peinture ; Girardon, Coysevox et Puget en sculpture ; Mansart enfin en architecture. En Angleterre, l’esprit protestant et puritain n’admet pas l’exubérance de ce nouveau style. Le seul véritable représentant du Baroque en Angleterre est l’architecte Christopher Wren, chargé en 1666 de reconstruire Londres après le grand incendie. C’est à lui que l’on doit la cathédrale Saint-Paul.

la littérature baroque En littérature baroque, on donne plus d’importance à la façon d’exprimer un contenu qu’au contenu lui-même. Ce système d’écriture, qui met du temps à se mettre en place, ne s’installe vraiment qu’à partir de 1620.

La musique Baroque On distingue trois phases : • la phase préparatoire, « premier Baroque », jusqu’à 1630 environ • le « Baroque médian » de 1630 à 1700 • le « dernier Baroque », jusqu’au milieu du XVIIIe siècle

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Lors de la première phase, la musique religieuse constitue le premier support de la musique Baroque. Monteverdi est considéré comme le premier compositeur de la période baroque, qui dure jusqu’à la mort de Jean-Sébastien Bach en 1750. On distingue trois domaines : la musique d’église, la musique de chambre et la musique de théâtre. La musique baroque est très rythmée, comporte des sauts d’intervalles parfois importants, et surtout beaucoup d’ornements. On distingue ordinairement quatre parties dans son évolution : • le premier Baroque (de 1580 à 1630) : les grands auteurs sont Monteverdi et Frescobaldi. L’opéra fait son apparition. Certains ensembles comportent plus de deux cents musiciens. • le Baroque médian (1630-1700) : les premiers auteurs-compositeurs français sont Lully et Couperin. À l’étranger se distinguent Purcell, Buxtehude et Scarlatti. • le dernier Baroque atteint son apogée avec Haendel et Bach. En France, Rameau est considéré comme le successeur de Couperin. Les Italiens Corelli, Torelli et Vivaldi étendent la forme du concerto à l’Europe. • le Rococo, style musical apparu vers 1720, se pose comme une réaction aux règles strictes de la composition musicale. Il existe deux Rococos, qui se veulent plus divertissants et moins exigeants que le Baroque proprement dit : le Rococo galant, qui dure du début de la régence à la mort de Louis XV, et le Rococo sensible, qui naît en Allemagne après la mort de Bach et dont Telemann est le principal représentant.

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séquence musicale par Laurence Grauwet

Version CD : Farnace, 1738 version, Diego Fasolis, Coro della Radiotelevisionene svizzera, Lugano, I Barocchisti, co-production with RSI-Rete, 2011 Due/Parnassus Arts Production Sydney sound recording, © 2011

remarques générales • Le livret, dont l’inspiration est puisée dans l’histoire antique. • L’orchestre baroque (petit effectif et instruments baroques) • L’orchestration et le choix de récitatifs différents selon les productions, en particulier concernant l’Acte III • La présence de ballets

composition de l’orchestre • Les bois : 2 hautbois, 1 basson • Les cuivres : 2 cors, 2 trompettes • Les percussions : timbales • Les cordes frottées : 8 violons, 2 altos, 2 violoncelles, 1 violone • Les cordes pincées : 2 clavecins, 1 luth

rôles principaux et catégories vocales • Farnace, roi du pont, contre-ténor • Berenice, reine de Cappadoce et mère de Tamiri, mezzo-soprano • Tamiri, reine et épouse de Farnace, mezzo-soprano • Selinda, sœur de Farnace, mezzo-soprano • Gilade, prince de sang royal et capitaine de Bérénice, mezzo-soprano • Pompeo, proconsul romain, ténor • Aquilio, préfet de la légion romaine, ténor

approche par thèmes de l’Œuvre et écoutes musicales Écoute 1 : Sinfonia, Cd 1, plages 1, 2, 3 Ouvrant l’opéra et rappelant l’ouverture à l’italienne, elle est constituée de trois parties (ou mouvements) indépendantes, régies par une alternance de tempos :

1. Tempo vif

Caractère fougueux : mouvement quasi perpétuel d’ostinatos rythmiques de doubles-croches, croches et noires. Les nuances changent de manière soudaine.

2. Tempo lent

Caractère rêveur, écriture changeante et raffinée : ornements dont trilles, une alternance des modes majeur et mineur créant des effets d’assombrissement ou d’éclairage, un mouvement descendant de quatre notes, dans le grave, en filigrane.

3. Tempo assez vif

Caractère dansant et apaisé, organisation en deux parties (AA/BB, B ressemblant à A), absence de doubles-croches.

Pratique musicale : polyrythmies ou jeux à faire pratiquer aux élèves à partir d’ostinatos repérés lors de l’écoute et de variations de nuances. DP Farnace 2011-2012 • 13


Écoute 2 : Aria de Farnace « Ricordati che sei », Acte I, scène 1 (plage 5) Notions à aborder : • La voix de contre-ténor ; • La virtuosité (vélocité et variation), le brio des vocalises mettant en lumière la technique du chanteur soliste • L’aria da capo : A B A’, entrecoupé de ritournelles instrumentales ; • La basse continue de l’accompagnement, au mouvement répétitif, joué par les clavecins et cordes graves ; • Les contrastes de caractère du rôle de Farnace : - autoritaire : « Souviens-toi que tu es reine, mère et épouse » - puis accablé : « Avant de subir la souffrance des chaînes de la servitude, oui, tu devras accomplir cette miséricordieuse cruauté ». Écoute 3 : Récitatif accompagné de Tamiri « O figlio, o troppo tardi », Acte 1, scène 10 (Cd 1, plage 22, jusqu’à 2’25) Notions à aborder : • Le récitatif accompagné : le chant de Tamiri est soutenu par le clavecin et le luth en notes égrainées ou arpégées, sur un fond de notes tenues des cordes, donnant une impression de temps suspendu ; • Les cadences conclusives ou suspensives ponctuant les phrases ; • L’intelligibilité du texte favorisée par le syllabisme (une note / une syllabe) et l’absence de vocalises. Écoute 4 : Aria d’Aquilio, « Alle minacce di fiera belva non… », Acte II, scène 2 (Cd 2, plage 4, jusqu’à 2’22) Notion à aborder : Le rôle descriptif, voire figuratif de la musique : « Le bon chasseur ne s’effraie pas des menaces d’une féroce bête sauvage : tendant son filet ou saisissant son arc, il l’attend prudemment au passage et lui donne la mort lorsqu’elle revient. »

Caractère épique de la chasse : cors prépondérants, intervalles de quarte, balancement tonique-dominante, vocalises conquérantes du ténor au phrasé détaché.

« L’amant tend aussi des pièges à la beauté dont il s’éprend, il souffre, soupire, attend avant de la prendre dans ses filets. »

Caractère plus lyrique, orchestration sans cors, gammes descendantes, phrasé lié, timbre adouci du soliste, « ralentissement » expressif.

Écoute 5 : Chœur « Coronata di Gigli, e di rose », Fin de l’Acte III (Cd 3, plage 20) Comment se termine l’Acte III ? En « happy end », dans une atmosphère légère Quel est le plan de ce choeur ? Un premier couplet est chanté par les voix de femmes et repris ensuite par les voix d’hommes. Un second couplet est interprété par l’ensemble du chœur. Écoute transversale Go Baroque, Beatles concerto grosso n°2, dans le style de Vivaldi, Les Beatles Prolongements • Arts du visuel : les théâtres à l’italienne • L’art baroque en Italie • La facture instrumentale à l’époque baroque

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antonio vivaldi (1678 - 1741) Lors de la première phase, la musique religieuse constitue le premier support de la musique Baroque. Il est né le 4 mars 1678 à Venise. Son père est barbier, mais aussi violoniste à la basilique Saint Marc depuis 1665. Antonio est l’aîné de neuf enfants, dont deux mourront fort jeunes. Il apprend le violon avec son père qu’il remplace ponctuellement à la basilique, tant il est doué. Ses parents le destinent aux ordres. En 1703, il est ordonné prêtre et engagé comme maître de violon à l’Ospedale della pieta, un hospice pour jeunes filles dont certaines reçoivent une éducation spécifiquement musicale. Il y est nommé maître de violon puis maître de composition. Il y « expérimente » beaucoup de ses œuvres, ayant destiné à son jeune public nombre de ses œuvres de l’époque. 1705 est l’année de ses premières éditions. Sa notoriété grandit. Ainsi le roi du Danemark assiste en 1708 à un de ses concerts. « Il prete rosso », le prêtre rouge, surnom donné en raison de sa chevelure rousse, impressionne autant par sa dextérité que par ses compositions. Après une période d’absence de l’Ospedale della pieta, il y retourne en 1711 et, en 1716, y est nommé « maestro di concerti ». Il y compose essentiellement de la musique religieuse. Sa popularité gagne l’Europe entière. En 1711, son éditeur devient le célèbre Étienne Roger, à Amsterdam, qui fait paraître son opus 3 L’Estro armonico, recueil de douze concertos pour violon, qui lui assure le succès dans une bonne partie de l’Europe du Nord. Même Jean Sébastien Bach en fera des transcriptions pour clavier. En 1714, il publie La Stravaganza, autre recueil de concertos pour violon. À partir de 1718, il voyage et compose entre autres dans le nord de l’Italie. De 1718 à 1720, il est à Mantoue, de 1723 à 1725 à Rome, où il joue par deux fois devant le pape, puis est à nouveau Vénitien de 1726 à 1728. Il aura là l’occasion de se consacrer au théâtre. Son opus 8 : Il cimento dell’armonia e dell’invenzione, dans lequel figurent Les Quatre Saisons, est dédié au comte Morzin. Le triomphe des Quatre Saisons est européen, y compris à Paris en 1725. L’opus 10 La Cetra est dédié en 1728 à l’empereur d’Autriche Charles VI, devant lequel il joue à Vienne en 1733. En 1738, il joue au théâtre Schouwburg à Amsterdam. De retour à Venise en mars, il apprend que son poste lui a été définitivement retiré. Après Dresde où il joue les fameux Concertos de Dresde, Vivaldi gagne Vienne en 1740 où il espère les faveurs de l’Empereur Charles VI. Le séjour à Vienne est court. Il y meurt le 28 juillet 1741 dans une relative pauvreté et dans l’oubli.

Les opéras de vivaldi Il prétendait, selon certaines sources, en avoir composé 94. Moins de 50 titres ont été identifiés dont subsistent une vingtaine de partitions, certaines par ailleurs incomplètes. De plus, le pasticcio, sorte de « recyclage » de morceaux composés pour un opéra et réutilisés dans un autre, brouille les comptes. Rajoutons à cela que les partitions étaient souvent uniquement manuscrites, pour réduire les coûts et parce qu’elles étaient la plupart du temps à usage unique, les opéras étant joués une seule fois…

Quelques titres parmi la profusion : Ottone in villa (1713), Orlando finto pazzo (1714), Nerone fatto Cesare (1715), Arsilda, regina di Ponto (1716), La costanza trionfante (1716), Tieteberga (1717), L’incoronazione di Dario (1717), Armida al campo d’Egitto (1718), Scanderbeg (1718), Il Teuzzone (1719), La verità in cimento (1720), Ercole sul Termodonte (1723), Il Giustino (1724), Il Tigrane (1724), Dorilla in tempe (1726), Orlando furioso (1727), Farnace (1727), Atenaide (1728), Argippo (1730), La finda ninfa (1732), Motezuma (1733), L’Olimpiade (1734), Bajazet (1735), Griselda (1735), Catone in Utica (1737), Rosmira fedele (1738) Un exemple de pasticcio : dans Nerone fatto Cesare, on cite Francesco Gasparini, Giuseppe Maria Orlandini, Antonio Pollarolo, Vivaldi lui-même, qui a « ré » intégré ses propres airs à cet ouvrage.

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Antonio Maria Lucchini Le librettiste est, comme Vivaldi, né à Venise en 1690, il y meurt en 1730, trois ans après avoir travaillé avec le compositeur de Farnace. Mais cette collaboration entre les deux artistes était précédée d’une autre en 1717 pour Tieteberga. Le livret de Farnace a quant à lui été écrit pour un autre compositeur, Leonardo Vinci qui le crée en 1724, et dont la distribution compte le célèbre Farinelli. Vivaldi en écrit, entre 1727 et 1738, six versions, ce qui en fait certainement son opéra fétiche. Mais Lucchini s’était lui-même inspiré de l’œuvre du poète Antonio Salvi, La Pace generosa, représentée en 1700 à Venise. Le librettiste écrit également pour Lotti, Albinoni, Porta ou Cadara.

biographies george petrou direction musicale Après ses études de piano au Conservatoire d’Athènes, il se perfectionne au Royal College et à la Royal Academy de Londres. Il est lauréat de prix internationaux en Angleterre, Italie, République tchèque et au Japon. George Petrou entame une carrière de chef d’orchestre après s’être souvent produit comme pianiste soliste en concert dans des salles prestigieuses telles que le Carnegie Hall de New York, Barbican Hall, Wigmore Hall et Queen Elisabeth Hall de Londres, à la Philharmonie de Berlin, au Rudolfinum de Prague, ainsi qu’aux principales radios européennes (BBC 3, Deutschland Radio, Radio Suisse Romande, Radio Tchèque…). En tant que chef d’orchestre, il se consacre au répertoire baroque, classique et romantique et à l’opéra. Parmi ses prestations récentes figurent Alceste de Gluck à Athènes, Giulio Cesare d’Haendel à Thessalonique, Tamerlano au Festival d’ Athènes, Anna Bolena de Donizetti et Orphée de Gluck à l’Opéra national de Grèce. Au cours de la saison 2009-2010, il dirige une nouvelle production d’Alkestis à l’Opéra de Leipzig, L’Isola disabitata et La Résurrection à Thessalonique, un concert avec Anna Caterina Antonacci au Conservatoire de Moscou, Emilia di Liverpool de Donizetti à l’Opéra national de Grèce, Il Tigrane à Saarbrücken et Theodora au Mégaron d’Athènes. Il dirige, en 2009, la première allemande d’Il Tigrane de Scarlatti à Saarbrücken. Il a dirigé également des oeuvres telles qu’Oreste et Arianna in Creta, Aci, Galatea e Polifemo d’Haendel ; Giustino et Judith triomphante de Vivaldi ; Il Ritorno di Ulisse in patria et Le Couronnement de Poppée de Monteverdi et L’Olimpiade de Paisiello. Récemment, il a dirigé Iphigénie en Aulide, Le Barbier de Séville et Il Trionfo di Clelia à Athènes, Semele à Bern, Phaeton de Lully à Saarbrücken. Il a enregistré chez MDG plusieurs opéras d’Haendel, récompensés par de nombreux prix. En 2012 et 2013, il enregistrera Alessandro d’Haendel, opéra qu’il dirigera au festival Haendel de Halle, au Theater an der Wien, au Théâtre royal de Versailles et au Festival Enescu de Bucarest.

lucinda childs mise en scène et chorégraphie Lucinda Childs est l’une des chorégraphes modernes les plus importantes des États-Unis. Elle entame sa carrière de chorégraphe et interprète en 1963 en tant que membre original du Judson Dance Theater à New York. Après avoir fondé sa propre compagnie en 1973, Mlle Childs collabore avec Robert Wilson et Philip Glass sur l’opéra Einstein on the Beach en 1976, en tant qu’artiste principale et chorégraphe solo. Lors des reprises postérieures (1984, 1992), elle chorégraphie les deux « Field Dances » et reprend le rôle d’artiste principale. Elle participe à cinq des spectacles majeurs de Wilson dont Maladie de la Mort d’après Marguerite Duras avec Michel Piccoli, I Was Sitting on my Patio This Guy Appeared I Thought I Was Hallucinating, Quartett de Heiner Müller, et l’opéra White Raven de Wilson and Glass. Depuis 1979, elle collabore avec nombre de compositeurs et designers, dont John Adams et Frank Gehry, sur une série de spectacles de grande envergure. Le premier est Dance, chorégraphié en 1979 sur une musique de Philip Glass et un décor/film de Sol LeWitt. C’est lors des répétitions d’Einstein que Childs et Glass conçoivent l’idée originale de cette œuvre qui fera école. Les tournées de Dance continuent aux États-Unis et en Europe, et l’œuvre est citée par le Wall Street Journal (2011) comme « l’une des plus grands réussites du XXe siècle ». Depuis 1981, Lucinda Childs reçoit de nombreuses commandes des compagnies de ballet et d’opéra les plus prestigieuses des États-Unis et d’Europe, qui vont donner naissance à, parmi d’autres, Tempo Vicino, pour le Ballet de Marseille en 2009, et Oceana pour le Ballet de Nice en 2011. Elle vient de remonter, à l’Opéra national de Montpellier, Einstein on the beach de Philipp Glass avec Bob Wilson (mars 2012). À partir de 1999, elle entame une étroite et régulière collaboration avec le Ballet de l’OnR avec Chamber Symphony et Dance en 2002. En 2004, elle crée sa version du Mandarin merveilleux, puis un diptyque Stravinsky : Le Rossignol et œdipus Rex en 2007. DP Farnace 2011-2012 • 16


Pour aller plus loin • Les débuts de l’opéra • Les castrats • Les rôles « travestis » (Gilade) • Vivaldi dans son époque • Les instruments de musique baroque, le rayonnement des instruments à archet, les luthiers célèbres • Venise et les arts au XVIIIe siècle, les fêtes vénitiennes • Figuralisme et expression descriptive • Actions et passions liées aux récitatifs et arias da capo • L’opera seria à l’époque baroque • Les rythmes pointés • Virtuosité des voix dans l’opéra baroque • L’ouverture à l’italienne • Histoire des arts : le style baroque dans l’architecture, la sculpture, la peinture • Lucinda Childs • Le pasticcio • Opéra et ballet • La naissance du ballet classique sous Louis XIV


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