NOTHING12

Page 1

#12


Rédaction Gabriel Loisy Laure Maugeais Laure Abouaf Maryneige Heller

Publication Mise en page Gabriel Loisy

Relecture

Elodie Fond Maryneige Heller

Couverture

Eric Héranval

Nous écrire contact@nothingmag.fr Copyright NOTHINGMag ©2014

// La reproduction même partielle des articles, textes et photographies parus dans ce numéro est interdite sans autorisation écrite préalable du représentant légal. La rédaction n’est pas responsable des textes, illustrations, photos publiés qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. Les documents reçus impliquent l’accord de l’auteur pour leur libre publication. Si vous trouvez des fautes d’orthographe dans les pages de ce numéro, merci de ne pas y prêter attention et de nous en excuser.

Suivez-nous sur les réseaux sociaux. @NOTHINGmag 2

#

/Nothingmag.fr


Sommaire p.04 | Edito p.06 | Jean-Marc Fiorese // Roms p.30 | Julien Minard // 36 vues sur le Japon p.42 | Bénédicte Guillon // Detours p.56 | Eric Héranval // Avant le feu p.70 | Hélène Veilleux // 38e parallèle nord p.87 | Liens p.87 | Nothing et vous

#

3


EDITO

L

e temps passe si vite, ce numéro sera déjà le dernier de l’année 2014! Déjà deux ans d’existence, 12 numéros et plus de 50 photographes nous ont fait confiance dans l’aventure NOTHING magazine. Nous souhaitons remercier tous les gens qui ont participé de près ou de loin au projet. L’année prochaine marquera un changement dans le contenu du magazine : des nouvelles rubriques vont voir le jour et un thème sera traité par numéro à travers le regard de plusieurs photographes. L’organisation d’événements et la création d’une version papier sont toujours d’actualité, nous espérerons les voir prendre forme en 2015 ! En attendant janvier, nous vous laissons découvrir les cinq auteurs du

4

#

numéro#12 : Jean-Marc Fiorese nous raconte sa rencontre avec une famille Rom, installée dans un campement de fortune en Ile-de-France ; Julien Minard, nous présente sa série “36 vues” sur le Japon ; Bénédicte Guillon, nous propose un détour à Bali avec son carnet de voyage ; Eric Héranval, sur le quotidien d’un village du Mali avant la guerre qui a propulsé le pays à la « une » des journaux ; Hélène Veilleux, clôturera ce numéro avec des photographies énigmatiques de “touristes” dans un des pays les plus fermés du monde, au-delà du 38e parallèle nord.

Bonne lecture


12

#

novembre - dĂŠcembre // 2014

#

5


Jean-Marc Fiorese

N

i professionnel, ni passionné, Jean-Marc est un photographe tout court : Il écrit avec la lumière. Sa profession le confronte aux réalités quotidiennes de populations aux cheminements très divers et lui permet de voir de près combien la vie particulière de chacun traversée par la vie collective est riche d’interactions. Réalités souvent très dures qui le poussent à réfléchir sur cette condition humaine. Il en résulte un chemin photographique où le réel guide un discours nécessairement subjectif mais dont il sent l’impérieuse nécessité. Régulièrement le besoin de calme et de solitude le conduit ailleurs, dans des espaces plus libres, apaisés, où la lenteur est reine. Cette lenteur qui caractérise sa photographie et qui le lie toujours à l’argentique. En 2003 il a participé à l’exposition collective sur l’après choc présidentiel de 2002 « Un an déjà ». En 2009 il a exposé son premier travail personnel « Alter Ego ».

6

#


#

7


Roms I

ssu d’une famille de l’immigration italienne du début du XXème siècle, la question de l’acceptation de l’autre m’a toujours interpellée. La peur de l’étranger (xénophobie) de cette période tend à se répéter aujourd’hui à l’égard des roms et je ne peux pas rester indifférent. Le sort des roms présentés souvent comme une communauté sauvage prête à tout me renvoie au sort abject qui était réservé à ma famille en son temps. Bien plus prêt de nous, Cela me renvoie aux ratonnades des années 1970 dont

8

#

j’entendais régulièrement les récits à la radio quand j’étais enfant, récits qui me faisaient peur parce que dans ma petite tête de gamin j’étais d’abord un fils d’immigré. Quand j’ai rencontré Adela et ses trois enfants la première fois sur le quai du RER à Ris Orangis en octobre 2012 j’ai décidé de raconter et donner à voir une part de leur humanité faite de bouleversements réguliers, contraint et forcé par nos élus, nos autorités et la xénophobie ambiante.


#

9


10

#


D

es marches creusées à même la terre boueuse du talus qui sépare le Périphérique de la bretelle d’accès à l’autoroute A1 porte de la Chapelle à Paris serpentent légèrement autour des arbres. En haut de ces marches une cabane faite de planches de récupération et trois tentes de campeurs occupent la petite parcelle de terrain au milieu duquel trône un petit buffet adossé à une armoire. Ce campement incongru n’est pas un décor de film décalé à la Kusturica, des gens y vivent comme ils peuvent.

Deux semaines plus tard, ce petit campement a été détruit et ses occupants expulsés. Ils sont roms, européens, leur pays, la Roumanie ou la Bulgarie, est membre de l’Union européenne. Nous sommes à Paris en Ile-de-France, la région la plus riche d’Europe et l’une des plus riches du monde. Nous sommes au 21ème siècle, au début du troisième millénaire et notre pays a basculé à gauche aux dernières élections présidentielles de 2012.

# 11


12

#


S

ur la ligne 12 du métro il est fréquent de voir des roms jouer quelques morceaux de musique et faire la manche en passant d’une voiture à l’autre tout au long du parcours. Il faut avouer que bien souvent leurs improvisations sonnent plutôt très faux. Au moment de demander une pièce, un ticket restaurant ou une cigarette, comme la plus part de ceux faisant la quête, ils doivent alors se confronter aux

regards méprisants de certains passagers ou pire, à l’absence de regard comme s’ils n’existaient pas. Mais parfois il y a de véritables artistes comme ces trois là qui mettent une ambiance de fête vraiment très revigorante et qui décrispent les visages taciturnes des passagers. C’est irrésistible.

# 13


C

ampement de roms, Ris Orangis dans l’Essonne. Il occupe un terrain enclavé entre la Nationale 7, une bretelle d’accès à une voie rapide, les voies de chemin de fer et un terrain de football. Ici, vit une trentaine de familles. Plusieurs associations et des bénévoles s’occupent d’elles, l’espace est plus structuré que dans les campements habituels. La mairie quant à elle est déterminée dans sa volonté de détruire ce campement et en expulser ses occupants. Le Maire en est même venu à adresser à chacun de ses administrés une lettre à leur sujet qui semble sortir d’un autre âge. Les préjugés et les intentions de ce

12 14

#

courrier font froid dans le dos. Le Maire a assuré ses administrés de sa « totale détermination » pour reprendre les termes de sa lettre immonde. Malgré cela les associations et les habitants du campement continuent à tout faire pour tracer un chemin vers un autre avenir difficile à construire mais pas impossible. A voir ce qui a déjà été fait, il y a des raisons d’y croire à condition que cesse cette stigmatisation insupportable et dont on ne sait pas où elle peut conduire, quoi que l’Histoire nous enseigne que les plaies s’ouvrent souvent sur de vieilles cicatrices…


13 # 15


16

#


# 17


18

#


D

ans le campement chez Adela et Georghe. Je croise régulièrement Adela le soir dans le RER. Je rentre du travail, elle ramène ses enfants de l’école de Viry-Châtillon. La Mairie de cette ville limitrophe et plus tolérante a maintenu leur scolarisation bien que la famille d’Adela ait dû se déplacer à Ris Orangis. Un de ces soirs, Ricardo, son fils de 8 ans, me donne une invitation à participer à une fête au campement destinée à rapprocher ces familles roms des habitants de la ville de Ris Orangis. Le 22 décembre. Le jour dit il tombe un léger crachin, il fait froid et l’air est très humide.

Adela me fait entrer dans son foyer, une cabane faite de planches de récupération, de fenêtres improvisées et d’un toit pas toujours étanche mais résistant tout de même. A l’intérieur, il fait chaud, l’air est sec. Le lieu, bien qu’uniquement fait et aménagé de matériaux et de mobilier de récupération, est rassurant et chaleureux. Adela s’active pour préparer le café car Il y a d’autres invités notamment Patricia l’institutrice de Ricardo en classe de CE1. On parle école et progrès des enfants. David l’ainé est sérieux, Ricardo est parfois trop dissipé dit-elle. Ricardo cherche à se justifier mais Patricia ne lâche rien.

# 19


20

#


G

are de Ris Orangis, 8h00. Sur le chemin de l’école. David, Ricardo et Dolari chaudement habillés attendent le RER qui, une fois de plus, n’est pas à l’heure. Ces gros retards à répétition mettent Adela dans l’embarras car ses enfants risquent encore une fois d’arriver après la sonnerie de l’école.

# 21


1

er avril 2013, l’arrêté municipal d’expulsion est affiché à l’entrée du campement. Il laisse vingt quatre heures aux roms pour quitter les lieux. Ce lundi se tient la réunion hebdomadaire entre les habitants du campement et les associatifs. L’heure est grave, les discussions ne portent plus sur les projets d’insertion auxquels cet arrêté met un terme brutalement mais sur l’organisation de ce départ. Les roms, très calmes, refusent

22

#

unanimement de s’opposer aux forces de l’ordre qui viendront les déloger. Au fil de la discussion il devient évident qu’il n’y a pas de solution, les pouvoirs publics ont l’intention de ne pas respecter leurs obligations après une telle expulsion, il faudra improviser avec les moyens du bord et tout le monde devra s’armer de beaucoup de courage. Les roms habituellement contraints de vivre au jour le jour devront vivre d’heure à heure.


21 # 23


24

#


M

ercredi 13 avril, 7h30 le matin. Au campement c’est l’heure habituelle des préparatifs pour emmener les enfants scolarisés à l’école mais à partir d’aujourd’hui ils n’y iront plus, les habitants du campement finissent d’empaqueter leurs affaires avec l’aide des associations et des bénévoles présents sur place depuis 4h30. Les pelleteuses, monstrueuses, arrivent chargées sur des convois exceptionnels. Le temps de les mettre en ordre de marche une compagnie de CRS lourdement équipée arrive à son tour. Le campement est rapidement encerclé et sur ordre une rangée serrée d’hommes s’avance depuis le fond du terrain vers la sortie, chaque

cabane est inspectée, personne ne doit rester derrière son passage. Une heure plus tard tous les roms sont à la rue, plus de trente familles, tout s’est passé sans opposition comme ils l’avaient promis. Les pelleteuses peuvent alors oeuvrer. Trois heures plus tard, il ne reste plus rien du campement, le maire de la ville aura tenu sa promesse « déterminée » comme il l’écrivait en janvier dernier : les roms dehors. La honte et la colère envahissent alors ceux qui croyaient que dans notre pays la xénophobie institutionnalisée était d’un autre âge.

# 25


26

#


# 27


28

#


# 29


Julien Minard N

é en 1978. Il est ingénieur en mécanique et agrégé en arts plastiques, matière qu’il enseigne depuis dix ans. Il s’intéresse à la photographie sous toutes ses formes depuis presque 20ans. Il aime la vibration toute particulière de l’argentique couleur et les expérimentations de labo en noir et blanc. Ses photographies se caractérisent par une approche documentaire distanciée et contemplative.

30

#


# 31


36 vues

32

#


Comment qualifierais-tu photographique?

ta

démarche

Je ne pratique la photographie qu’en voyage. Ce qui implique un dépaysement, et ne veut pas forcément dire aller à l’autre bout du monde. Être dans la démarche du photographe signifie pour moi être plus attentif à ce qui m’entoure. Comme si la photographie me permettait d’être davantage présent, de vivre pleinement une expérience. Je fais très peu de « photos souvenirs » pourtant, ce sont bien les à-côtés de la photo souvenir qui m’intéressent. D’où une certaine prédilection pour photographier les touristes, les gens qui regardent des paysages ou des sites grandioses plutôt que les sites eux-mêmes.

Je fais très peu de «photos souvenirs» pourtant, ce sont bien les à-côtés de la photo souvenir qui m’intéressent. était-ce la première fois que tu allais au Japon? Oui. Et j’y suis retourné depuis. Ce pays produit une forte fascination. J’ai pu retrouver ce que j’avais entrevu dans les oeuvres de la photographe Rinko Kawauchi, ou des cinéastes Kore-Eda, Kurosawa ou Imamura… Tu abordes des aspects différents de la vie au Japon: une démarche intentionnelle et réfléchie? Cela correspond à ce que l’on remarque dès l’arrivée dans ce pays : cette série en est le reflet. Je

tente de construire des micro-narrations à partir de scènes relativement banales, ou attendues au Japon (les arbres en fleurs, les ados en uniforme d’école ou les salarymen en costard-cravate …). Les images renvoient les unes aux autres et font souvent références aux souvenirs que j’avais de certaines scènes de films et qu’on retrouve dans la réalité. J’aime en photographie traduire de façon esthétique ce qui semble commun, voire sans intérêt. Le moyen-format argentique est l’outil idéal qui correspond à cette vision contemplative des choses. Ta série s’appelle “36 vues”. Pourquoi? Une référence à l’argentique? C’est une double référence : d’abord les « 36 vues du Mont Fuji », séries d’estampes des peintres japonais Hokusai, puis Hiroshige. Ces estampes, dont la fameuse « Vague », sont elles-mêmes très photographiques par leur composition, l’étagement des plans, le souci du détail et de la vie prise sur le vif. Une des plus célèbres photos de Jeff Wall, a Sudden Gust of Wind (after Hokusai), est un remake de l’une des estampes de la série des 36 vues. Il existe donc a priori une circulation entre l’art d’Hokusai, le plus grand peintre japonais, et la photographie. La deuxième référence, tout à fait opportune, est comme tu l’as remarqué, le rouleau 36 vues du film 135mm. Je ne l’utilise pas mais il évoque la photographie argentique. Propos recueillis par : Laure Abouaf

# 33


34

#


# 35


36

#


# 37


38

#


# 39


40

#


# 41


C

ette série photographique prend la forme d’un carnet de voyage où sont consignés des fragments de souvenirs, des lieux signifiants et des moments simples. Entre exotisme et familiarité, extérieurs et intérieurs, besoin d’exploration et besoin de repli, la photographe tente d’établir les multiples connections à travers une palette de ressentis sincère et nuancée.

42

#


DETOURS

Endroit o첫 un chemin change de direction # 43


Bénédicte Guillon N

ée en 1977, Bénédicte Guillon vit en région parisienne. Elle commence à prendre des photos avec son Smartphone en 2010 et participe à de nombreux projets collectifs autour de la photo mobile. Cela la mène naturellement à utiliser d’autres outils. Passant du reflex numérique au compact argentique, elle aime explorer les nouvelles voies que lui ouvre la découverte d’un nouvel appareil. Autodidacte et passionnée, elle s’inscrit dans une photographie d’auteur sincère et poétique.

44

#


# 45


46

#


Votre série « Détours » semble proche de la démarche photographique de Raymond Depardon dans ‘’Errance’’. Aviez-vous comme lui une ‘’quête’’ photographique ? Après quoi couriez-vous? C’est une très grande référence pour moi et un très grand compliment. Mais je pense avoir encore beaucoup de chemin et de travail avant d’oser même tenter de comparer mon travail au sien… « Errance » est le fruit d’une réflexion préalable solide et le résultat d’une démarche artistique exemplaire. Lorsque j’ai commencé à prendre les photos constituant la série, je n’avais pas de projet en tête. Certaines peuvent évoquer une idée d’errance, de balade hasardeuse sans l’intention d’intervenir avec les lieux que je traversais. Le point de vue y est très extérieur avec une distance assez éloignée des sujets. Mon intention lors de la constitution de la série était de rendre au plus près l’atmosphère qui régnait dans le souvenir que je pouvais avoir de ce voyage. Deux ans se sont écoulés et ces

photos sont ce qu’il me reste. J’ai également joint à cela des images plus personnelles, plus intimes, qui apportent un autre versant à la série. Car le voyage se fait aussi dans ces lieux où l’on reste, où l’on revient après une journée passée à explorer les alentours. Vous annoncez cette série comme un carnet de voyage. Où et dans quelles conditions avezvous voyagé? En effet, j’aime cette idée de carnet de voyage. Comme je le disais, je n’avais pas de projet spécifique, j’étais alors plus dans une prise de notes quotidienne, comme un carnet qui se remplit au fur et à mesure. Les photos ont toutes été prises à Bali, plus exactement dans un village de pêcheurs au nord de l’île. Je venais de passer plusieurs semaines à Singapour et à Jakarta. J’ai eu alors besoin de sortir des métropoles. Il y a toujours plusieurs phases dans un voyage, et je suis allée chercher à Bali une certaine solitude, un autre silence.

# 47


48

#


# 49


50

#


Vous parlez de fragments de souvenirs et de lieux signifiants. Que cela signifie-t-il? Les lieux signifiants sont des lieux où des connexions ont pu s’établir. On parle parfois de l’esprit des lieux, et je crois beaucoup en cela. Inexplicablement, l’équation se fait parfois, entre l’état dans lequel on peut se trouver à un moment donné, nos attentes aussi, et la façon dont le lieu semble répondre. La communication y est heureuse. C’est cela que j’ai essayé de rendre à travers ces fragments de souvenirs, que chacun peut assembler selon l’idée qu’il se fait du voyage. Vous nous livrez une version plutôt ‘’sombre’’ en noir et blanc dans votre série. Pourquoi ce choix esthétique? J’ai choisi ce noir et blanc car j’étais à la recherche d’une écriture traduisant l’atmosphère que je souhaitais retranscrire. Je voulais faire une série très personnelle, loin du documentaire ou de la photo de paysage classique. Il ne s’agissait pas de montrer un lieu mais le rapport que j’ai pu avoir avec ce dernier. Le côté « sombre » porte sûrement une part de mélancolie, de nostalgie aussi. Mais la solitude y est heureuse, et c’est ce qui a orienté mon choix sur ce type de noir et blanc.

# 51


52

#


# 53


54

#


# 55


Mali, avant le feu C

ette série, réalisée quatre ans avant les affrontements militaires qui ont propulsé le Mali à la « une » des journaux, propose de donner à voir cette vie quotidienne ordinaire, peu spectaculaire, banale. C’est le quotidien des habitants de Saré Guida.

56

#


# 57


Eric Héranval

P

hotographe freelance né en 1974, Eric Héranval travaille principalement à la fabrication de sujets au long cours. Ses thèmes de prédilection sont l’architecture, en ce qu’elle révèle les territoires et leur évolution ; la société du sport de masse et des loisirs (travail sur « la palestre ») ; et il pratique plus quotidiennement la photographie documentaire. Il varie ses dispositifs en fonction de ses sujets - de la chambre numérique au télémétrique 24x36. Eric Heranval vit et travaille à Marseille.

58

#


L

e village de Saré Guida, dans la région de Mopti (Mali), se trouve au cœur de la zone rouge. Celle où se sont affrontées les milices islamistes et les forces gouvernementales maliennes, aidées par l’armée française. Deux ans après le début de la prétendue guerre-éclair contre le terrorisme au Mali, la tension est aujourd’hui à son comble à Saré Guida, bien qu’aucune information n’en sorte. C’est la guerre. Quelques années plus tôt, avant les offensives des milices armées, ce n’était pas tant les visées politico-militaires de quelques militants religieux qui menaçaient Saré Guida, mais plutôt le manque de moyens des autochtones pour vivre. Avec 795 habitants, Saré Guida ne compte qu’un seul groupe électrogène, un puits,

une mosquée et deux télévisions (une couleur et une noir et blanc). Il n’y a pas d’école. Ce village agricole n’a vu défiler ni les 4x4 des humanitaires, ni les candidats en campagne, ni les retombées de la croissance économique du Mali. La vie quotidienne est rythmée par les récoltes de riz, les appels du muezzin et les errances des enfants du village, livrés à eux-mêmes lorsqu’ils ne sont pas réquisitionnés pour les récoltes. L’école la plus proche est à quatre kilomètres. Chaque jour, l’exode scolaire des dizaines d’enfants de Saré Guida dessine les images ancestrales d’une terre africaine où, pour de l’eau, pour une éducation ou pour des soins médicaux, les habitants marchent plusieurs kilomètres au cœur de la brousse, sous le soleil ardent et les pluies saisonnières.

# 59


60

#


# 61


62

#


# 63


64

#


# 65


66

#


# 67


68

#


# 69


Hélène Veilleux

N

é en 1978, Helene veilleux vit à Lyon. Photographe autodidacte, ses travaux explorent et interogent les espaces hetorotopiques, de l’etrange corée du nord en passant par les ruines radioactives de tchernobyl.

70

#


# 71


38e parallèle nord Touriste. ront collé contre la vitre du bus, les yeux grands ouverts pour capter chaque parcelle de la ville qui défile. Cramponnée à mon appareil photo, accumulant compulsivement des images de cartes postales avec le secret espoir de confronter enfin la réalité de cette capitale nichée au delà du 38e parallèle nord avec la somme des images, rumeurs et fantasmes qui m’habitent. Mais je ne suis qu’une touriste, et déjà le bus repart ….

F

72

#


# 73


74

#


# 75


76

#


# 77


78

#


# 79


80

#


# 81


82

#


# 83


84

#


# 85


102

#


Retrouvez tous les articles, infos, numéros, sur :

www.Nothingmag.fr Proposez vos reportages pour une publication dans NOTHING Magazine. // contact@nothingmag.fr

Jean-Marc Fiorese http://www.gardiendutemps.org Julien Minard

http://www.julienminard.com Bénédicte Guillon

http://benedicteguillon.format.com Eric Héranval

http://www.heranval.com Hélène Veilleux

http://ladentdeloeil.net # 103



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.