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Reykjavik
c DOSSIER – ISLANDE
Jean-Luc Fournier Jean-Luc Fournier
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Reykjavik Micro-capitale, méga plaisir…
La plus septentrionale des capitales de la planète offre le spectacle d’une petite ville cool, aérée, colorée et très paisible. En Islandais, son nom signifie « La baie des fumées », nom donné par les fondateurs stupéfaits de la vapeur qui s’échappait alors des nombreuses sources thermales. Entre océan et proches montagnes volcaniques, Reykjavik regorge de richesses artistiques et culturelles, surtout dans l’art contemporain, en s’avérant vite familière, et c’est un énorme avantage…
Les statistiques historiques parlent. Ici, au bord de la péninsule de Reykjanes, il n’y avait pas 600 habitants à la fin du XVIIIe siècle quand l’autorité danoise, dont dépendait alors l’actuelle Islande, accorda le statut de ville à Reykjavik, lui conférant du coup, dans cette colonie insulaire, le rôle de capitale.
En 1980, ils étaient 80 000. Aujourd’hui, la capitale islandaise compte 133 000 habitants (240 000 pour l’agglomération totale) soit près des deux tiers de la population totale du pays, 370 000 habitants.
Un élément de comparaison qui parlera, lui aussi : l’Eurométropole de Strasbourg et ses 33 communes comptent plus de 505 000 habitants…
La capitale islandaise est presque comme une énorme carte postale. Non loin des premiers volcans et des montagnes environnantes, elle s’étend face à l’océan le long d’une large baie fermée par le Mont Esja.
La ville s’enorgueillit d’un petit quartier historique (mais ici, l’histoire est très récente, ne comptez pas y admirer de très vieilles pierres…) et son front de mer est ourlé d’immeubles modernes à l’image du fameux Harpa dont nous reparlerons, prolongés par un port encore actif où fleurissent aussi les quartiers branchés et festifs ainsi que de vastes entrepôts superbement reconvertis en musées, lieux de vie et boutiques plutôt luxueuses.
Rien n’oppresse dans ces rues-là et si les transports en commun (ni métro ni tram dans cette petite ville), essentiellement des bus, quadrillent bien la ville, ils sont presque inutiles pour le visiteur qui n’usera que très parcimonieusement ses semelles pour passer d’un quartier à un autre. À bien des égards, Reykjavik sait se laisser découvrir tendrement…
Comme un fanal incontournable, le petit centre-ville de la capitale islandaise est dominé par la célèbre Hallgrímskirkja, cette spectaculaire église luthérienne, à l’immanquable flèche de béton qui s’élève à 75 mètres. Terminée en 1986, son architecture est remarquable et gracieuse, évoquant irrésistiblement les colonnes de basalte des plus spectaculaires sites islandais. Des rues nombreuses y convergent, donnant autant de perspectives aux innombrables photographes. Est-ce voulu ou cela correspond-il à une raison historique précise, on ne sait pas, mais l’orientation de cette flèche audacieuse et de sa façade très minérale fait que le soleil la lèche latéralement de flanc à flanc, durant toute sa course quotidienne. Lesdits photographes sont donc
L’incontournable Hallgrímskirkja
un peu à la peine pour leurs réglages (on ne peut pas avoir à la fois le soleil dans le dos et la façade frontale devant l’objectif). Les vues de nuit, avec l’éclairage splendide du bâtiment, font découvrir la Hallgrímskirkja dans toute sa sobre beauté…
Sur la majestueuse place au pied de la Hallgrímskirkja trône la statue d’Éric le Rouge, le célèbre norvégien bien connu par les amateurs de la série Vikings, qui a été banni d’Islande aux environs du premier millénaire.
De là partent plusieurs rues tranquilles qui permettent de rejoindre très vite les deux principales artères commerçantes de la ville, Bankastræti prolongée par Laugavegur et Skólavörðustígur, où l’on trouve aussi les principaux restaurants ou bars très fréquentés dès 17h…
Tout est à deux pas : au bord de l’océan, il y a cette vaste promenade où s’est échouée Sólfar, (le voyageur du soleil, en Islandais) une fine et élégante sculpture réalisée en acier qui évoque irrésistiblement la silhouette d’un bateau viking qui se dirige droit vers le soleil couchant…
À deux cent mètres, le bloc de verre et d’acier du Harpa, une gigantesque salle de concert-palais des congrès, se dresse telle une massive vigie contemporaine. L’élégance de l’architecture extérieure n’a rien à envier à un aménagement intérieur d’une rare majesté. Ses opposants ont tenté en vain d’accréditer l’idée que ses proportions sont complètement surdimensionnées pour les besoins d’une aussi faible population. Peine perdue, un référendum a tranché, le Harpa a été terminé, quitte à provoquer une substantielle rallonge sur les impôts locaux. À l’intérieur, le complexe abrite quatre salles de concert dont l’une de 1800 places à l’acoustique renommée dans le monde entier, et une infinie variété d’espaces d’expositions,
Le Harpa Un kaléidoscope de couleurs
le tout sublimé par un formidable kaléidoscope de plus de 10 000 vitres en nid d’abeilles qui, orientées au sud, reflètent une lumière irréelle à certains moments de la journée. Du grand art architectural, incontestablement…
Plus à l’ouest, dans le prolongement du port traditionnel, c’est le quartier de Kvosin, bien rénové, qui abrite musées, galeries d’art, boutiques et restaurants. Il fait bon y flâner le nez au vent et les jetées, quand le soleil se couche, s’embellissent d’une belle lumière qui fait irrésistiblement penser à celle de certains tableaux du norvégien Edvard Munch qui savait si bien peindre les clartés nordiques. (lire les pages 14 à 17 dans ce même numéro)
Dans ce même quartier ou pas loin, on découvre aussi trois attractions dont les Islandais (et leurs visiteurs…) sont très friands : le Saga Museum où on peut se balader parmi les grandes figures historiques islandaises, Whales of Island (les baleines d’Islande) qui reproduit le plus souvent à leur taille réelle les cétacés de l’Atlantique-nord et surtout, l’extraordinaire Fly Over Iceland : installé dans une sorte de nacelle géante devant un gigantesque écran semi-sphérique, les pieds ballants (au-dessus d’un vide… inexistant) vous vous envolez bientôt tel un oiseau migrateur pour un voyage au-dessus de ce pays fantastique. Volcans, geysers, splendides pics rocheux, vertigineuses plongées dans des gorges de basalte… se succèdent devant vos yeux ébahis. L’illusion est parfaite (jusqu’aux micro-gouttes d’eau qui viennent vous asperger quand vous traversez les nuages… et votre siège qui s’incline ou se redresse en fonction de mouvements de la caméra). Fly Over Iceland est bien plus qu’une attraction, c’est une expérience… On le répète, Reyjavik se parcourt quasi entièrement à pied, tranquillement. Deux, voire trois jours ici se dégustent comme un vrai privilège tant la ville, et ses habitants, se laissent facilement conquérir.
Ces derniers entretiennent un art de vivre assez remarquable. Comme l’ensemble de ceux que nous avons rencontrés nous l’ont dit (lire les pages suivantes), tous cultivent cette espèce de coolitude qui finit vite par déteindre sur vous. Tout cela se vérifie à partir de la fin de l’après-midi : les rues centrales de la capitale islandaise s’animent, les restaurants et bars sont alors tous ouverts. Dehors, on picole et on rigole à qui mieux mieux, c’est alors toute une jeunesse qui profite de la vie et même cette satanée météo (« S’il pleut, attends cinq minutes, ça va passer » dit le célèbre proverbe local) ne fait fuir personne.