Le Reporter sablais n°9 - 1er mars 2019

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SEL

Le Préfet valide la dernière dérogation pour yeu / noirmoutier Page 20

La guerre du sel atlantique camargue Page 14

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éolien

LE REPORTER SABLAIS

®

TOUTE LA VENDÉE

www.lereportersablais.com

N° 9 - 1er mars 2019

PLEINS FEUX SUR NOIRMOUTIER !

Les 1er et 15 du mois - 3€

Tourisme

Le Tourisme à Noirmoutier p. 4

noirmoutier Tour d’Horizon

interview

avec le maire NOËL FAUCHER Page 3

FOCUS noirmoutier

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noël

faucher maire de noirmoutier en l’Île

Statistiques: entreprises, pêche, côtes, productions locales... p. 2

Regroupement

Noirmoutier: débat sur un projet de regroupement des quatre communes en une seule p. 11


Focus

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Protection insulaire

62 kilomètres de côtes

Les digues doivent faire l’objet d’une attention permanente. Dans le cadre des PAPI, des travaux ont permis de rehausser à 5 mètres NGF leur hauteur (4,3 mètres avaient été atteints lors de la tempête Xynthia). Epis, enrochements, sable viennent compléter le dispositif.

Noirmoutier est une île sans relief - l’altitude maximale étant de 26 mètres - et qui compte 62 km de côtes dont 24 km de digues (construites avant 1850), 28 km de cordons dunaires et 10 km de côtes rocheuses.

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NOIRMOUTIER chiffres

15.046

66% 73% 9%

logements

L’image

ENTREPRISES

passage du gois: des horaires à respecter !

Le nombre d’entreprises actives est de 1389 sur l’île de Noirmoutier: - Commerce: 56% - Agriculture: 15% - Industrie: 12% - Construction: 9% - Administration: 8%

Part des résidences secondaires (moy. nat. : 10%) Part des propriétaires résidence principale.

TOURISME

9% en hiver et 2% l’été (chiffres 2010).

La capacité d’accueil est de 18.000 lits. L’île accueille sur son territoire 20 hôtels et 10 campings.

PONT OU GOIS ?

BALADES

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Sont à disposition des résidents et des touristes 80 km de pistes cyclables et 60 km de sentiers pédestres. Sans parler des nombreuses promenades le long des plages et des côtes rocheuses.

Les foulées du Gois Une épreuve sportive originale où les dernières foulées s’effectuent contre la mer montante!

© Photo: Photeau pour Le Reporter sablais

PRODUCTIONS LOCALES

huitres, sel, turbot, pommes de terre, bonnote.. Le Port de l’Herbaudière est le 2ème port vendéen. 2000 tonnes de produits de la pêche y sont débarqués chaque année. Huitres: 1800 tonnes d’huîtres fines sont produites par an ainsi que 500 tonnes de moules de bouchots. Ce sont 12.000 tonnes de pommes de terre qui sont

Château de Noirmoutier

Classé aux Monuments historiques en 1994. Ce château fort du 12ème siècle a été achevé en 1690. Son donjon a une hauteur de près de 20 mètres.

Dolmen de la Pointe de l’Herbaudière

Classé aux Monuments historiques en 1895. A l’origine, trois ou quatre tables. Le dolmen, très dégradé, est submergé lors des grandes marées.

récoltées tous les ans dont la célèbre et goûteuse bonnote. Noirmoutier est aussi connu pour son sel. L’île est le 3ème site de production français avec 140 tonnes de Fleur de sel et 2700 tonnes de sel de mer. A noter aussi un turbot produit en aquaculture qui détient un label rouge.

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ACCès

L’accès s’effectue soit par le pont qui est d’une longueur de 583 mètres de long ou par le Gois qui fait 4,3 jm (attention: chaussée submersible). En juillet/août, l’on dénombre 1,2 million de passages par le pont et 200.000 par le Gois.

Dolmen de la Table

Classé aux Monuments historiques en 1895. Il est situé en mer, sur le plateau de la Vendette, à 6 km à l’est de la côte attestant de l’affaissement de celle-ci.

Eglise St-Philbert de Noirmoutier-en-l’ïle Classée aux Monuments historiques en 1898. Ancienne abbatiale bénédictine au style à la fois roman et gothique fondée au 7ème siècle.. Crypte du 11ème siècle.


Interview

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les dossiers de noirmoutier

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tour d’horizon avec noël faucher

Noël Faucher, maire de Noirmoutier en l’Île

Les fameux mimosas de Noirmoutier - février 2019

L’île de Noirmoutier comprend quatre communes: Noirmoutier en l’Île, La Guérinière, l’Epine et Barbâtre. La superficie est de 48km2 et la population comprend 9630 habitants (2016). Noël Faucher est Maire de Noirmoutier en l’ïle et Président de la Communauté de Communes de l’île de Noirmoutier. Donc un interlocuteur incontournable pour nous parler de l’avenir de Noirmoutier et des dossiers importants en cours comme ceux du tourisme, de la défense contre la mer, du logement et des emplois saisonniers. Ainsi que du récent projet de regroupement administratif.

I Tourisme

Le Reporter sablais: Quelle est la politique globale menée pour Noirmoutier en matière touristique et les actions et promotions menées avec Vendée Expansion ? Noël Faucher: L’île de Noimoutier s’est engagée depuis 2012 sur une politique touristique. Il s’agissait de savoir quelle orientation donner à la stratégie touristique, quel type de public on allait essayé de conquérir, quels moyens seraient mis pour aller chercher

de nouveaux prospects. On s’est aperçu que l’on avait un segment de clientèle large mais qu’il ne s’agissait pas pour nous de choisir entre toutes les clientèles mais plutôt d’essayer d’améliorer l’ensemble de nos prestations pour répondre à l’ensemble des clientèles. Nous avons donc choisi de capitaliser sur nos points forts: sans chercher la comparaison de nos prestations avec celles de la Côte d’Azur, nous nous sommes appuyés sur nos authenticités: la gastronomie avec les produits des saveurs, les pistes cyclables avec les déplacements doux, le nautisme évidemment quand on est un territoire insulaire comme le nôtre, la Joconde de Noirmoutier qui est le Gois, et la destination famille. L’île de Noirmoutier a décidé de communiquer essentiellement sur « Le Goût des moments vrais. » LRS: C’est votre slogan ? NF: C’est notre slogan et chaque année on le décline avec un thème particulier, un

angle d’attaque, le vélo, la gastronomie etc… Cette année c’est la gastronomie sur laquelle on a choisi de capitaliser pour montrer que ce « Goût des moments vrais » se décline en de nombreux segments du territoire insulaire. L’idée repose sur un accueil des visiteurs dans les meilleures conditions quel que soit le moment de l’année où ils viennent. On sait aujourd’hui que l’amour du soleil - l’héliotropisme - n’est plus un élément suffisamment déterminant pour mobiliser les gens. On connaît les méfaits du soleil, on sait aussi que l’on n’est pas la Côte d’Azur, donc nous tablons sur nos espaces naturels, la biodiversité, nos produits. Nous avons une capacité à faire du tourisme expérientiel sur lequel on essaye de travailler fortement

(Note de la Revue: qui provient de l’expérience; il existe aussi un marketing expérientiel qui met en avant un service ou un lieu de vente impliquant l’utilisateur dans un scénario où la marque et ses produits sont mis en avant).

I Gastronomie

LRS: Puisque cette année c’est la gastronomie, dites-nous si un chef étoilé comme Alexandre Couillon, ça amène du monde à Noirmoutier? J’imagine que c’est dur à quantifier. NF: Oui, c’est une formidable notoriété, il est pile dans « Le Goût des moments vrais ». C’est ça aussi qui fait la richesse de Noirmoutier, c’est que cette communication là ne ment pas. On peut exprimer au travers d’un certain nombre d’examples - et Alexandre en fait partie - qu’il

“lE goût des moments vrais” “L’île de Noirmoutier a décidé de communiquer essentiellement sur « Le Goût des moments vrais. » Cette année c’est la gastronomie sur laquelle on a choisi de capitaliser pour montrer que ce « Goût des moments

vrais » se décline en de nombreux segments du territoire insulaire. L’idée repose sur un accueil des visiteurs dans les meilleures conditions quel que soit le moment de l’année où ils viennent.”


y a cette authenticité. Alexandre est un gars du pays, il a fait ses études au Lycées professionnel de Noirmoutier, il a fait son tour de France, il est allé chez de grands professionnels qui lui ont donné l’amour ce ce travail. Il a ensuite racheté le restaurant exploité précédemment par ses parents, il y a donc une vraie transmission familiale. Il est fortement amoureux de Noirmoutier car il pourrait aller ailleurs faire ses gammes et il serait accueilli avec tous les égards dus à son talent, parce que ce garçon est bourré de talent. Mais il a cette humilité qui fait la qualité des insulaires, il nourrit sa créativité des produits de la mer et de sa relation directe avec la terre et les producteurs locaux. C’est une formidable osmose et Alexandre, par sa notoriété, sa simplicité, par cette formidable qualité qui est la sienne de parler en bien de Noirmoutier, nous apporte une incroyable notoriété. Il a en plus été une locomotive pour tous les autres restaurateurs de l’île qui savent aujourd’hui que c’est possible, car c’est souvent ce dont on souffre dans nos territoires un peu éloignés, c’est que l’on a le sentiment que l’excellence que l’on voit n’est pas pour nous, pour plein de raisons. On s’autocensure, on s’autolimite. Mais lui a décuplé les énergies, libéré les freins et préventions qu’il pouvait y avoir, c’est remarquable. LRS: L’apport de son image, c’est certain, mais arrive-ton à quantifier cet apport par exemple avec des retombées médiatiques ? NF: Non, c’est impossible à quantifier, mais on voit par exemple qu’il a eu un reportage sur Netflix il y a quelques années, et aujourd’hui ce sont des personnes du monde entier qui viennent, des australiens, des américains, des brésiliens etc… Et j’ai des témoigages réguliers de personnes de Noirmoutier qui vont régulièrement à l’étranger et qui entendent parler de

Interview

Noirmoutier à travers Alexandre Couillon. La gastronomie est un patrimoine français, les gens y sont très attachés et sont prêts à faire beaucoup de kilomètres pour venir déguster un repas. Chaque fois que l’on parle de Noirmoutier à travers Alexandre Couillon, c’est un élément supplémentaire qui vient renforcer la visibilité de la marque. D’ailleurs on l’a fait citoyen d’honneur et il est un peu l’ambassadeur du territoire insulaire. Il en parle remarquablement bien, d’une façon naturelle. Laurent Boyer est aussi un très bon ambassadeur de Noirmoutier. LRS: Qu’esssayez-vous de faire évoluer dans votre démarche touristique? NF: Notre difficulté à Noirmoutier est que nous n’avons pas beaucoup d’équipements structurants parce que le territoire est peu urbanisé. Il y a peu de capacités à porter de gros projets urbains et donc on essaye de conserver ce que l’on a, on réhabilite les colonies de vacances quand on peut ou on accompagne l’hôtellerie à monter en gamme. En 2008, nous avions lancé une étude pour déterminer l’état de l’hôtellerie et mettre en place des moyens financiers pour des améliorations et réhabilitations. Sans lien direct avec notre politique touristique, beaucoup d’hôtels se sont vendus et ont été rachetés permettant ainsi des ouvertures à l’année. Nous avons aussi lancé une politique de promotion dynamique à travers les réseaux sociaux en se focalisant sur un public qui nous est accessible car nous n’avons pas les moyens financiers d’aller chercher une clientèle étrangère. LRS: Quelle est la provenance de vos visiteurs? NF: Notre population vient des Pays de la Loire et de la Région parisienne. On se focalise donc sur cette population en essayant de construire un lien de très grande proximité notamment

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avec nos résidents secondaires. Ça fonctionne plutôt pas mal car on voit qu’ils viennent de plus en plus en hors saison et même sur de nombreux week-ends dans l’année, ce qui confirme que la saisonnalité est un concept qui est en train, non pas de disparaître mais….de se réduire fortement. Les gens ne vont pas tous aux sports d’hiver - ils aiment la nature, la mer, ils en ont marre de la ville, ils veulent pouvoir respirer un air frais etc… Nous avons beaucoup de choses à leur apporter que ce soit à Noirmoutier ou sur le reste du littoral vendéen. Nous accompagnons nos professionnels le mieux possible afin qu’ils puissent donner le meilleur d’eux-mêmes à travers le recrutement de saisonniers formés via le Forum des Métiers et de l’Emploi. Nous les aidons par le biais de soutiens à l’hébergement et par le biais d’un élément essentiel, la marque « Ile de Noirmoutier » qui s’inscrit dans un ensemble de valeurs. « Le Goût des moments vrais » en fait partie, et on aspire à préserver cette marque auprès de nos professionnels pour que les clients aient le service qui correspondent à la marque qu’ils sont venus chercher. La notoriété passe par des territoires qui doivent se personnaliser à travers une marque, d’autant plus que les gens y sont attachés. L’Office

de tourisme de Noirmoutier fait un travail remarquable en ce sens, de promotion, de professionnalisation de l’ensemble de nos acteurs économiques et touristiques notamment auprès des hébergeurs qui pour une bonne partie sont des propriétaires de meublés, de chambres d’hôtes.

I Les à-côtés du Tourisme LRS: Menez-vous à Noirmoutier des actions fortes contre les moustiques ? NF: Nous sommes extrêmement vigilants vis à vis des moustiques, pas le tigre qui est plutôt concentré en sud-Vendée, mais pour tous les autres qui sont préjuciables aux individus car c’est un vrai enjeu économique et un enjeu sanitaire. Nous traitons les larves, et menons une action de prévention en expliquant aux citoyens ce qu’il faut faire et ne pas faire comme ne pas laisser d’eau stagnante etc… L’entente interdépartementale pour la démoustication a du plomb dans l’aile et nous espérons que le département de la Vendée va reprendre cette mission. LRS: Un jugement concernant un établissement qui venait de faire des investissements a conduit au blocage de son exploitation. Vous n’êtes bien sûr pas directement concerné.


Interview

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L’enseigne est Lullu la Moule. C’est bien sûr dommageable pour les exploitants. Quelle est la logique de ce jugement? NF: Il ne s’agit pas de dire si on les aime ou si on ne les aime pas, mais il y a des règles en France. Quand on est dans une zone ostréicole on ne peut avoir que des activités liées à l’ostréiculture, et quand on investit en imaginant que l’on va pouvoir forcer les portes, et bien on se heurte à de vraies difficultés. C’est un manque de précautions, de prévoyance et un manque de responsabilité. J’en suis navré pour eux mais ils se sont heurtés à deux écueils majeurs. L’activité n’était pas compatible avec le zonage, puisque le site est destiné à l’ostréiculture et pas à autre chose sinon ce n’est pas la peine d’avoir des règles d’urbanisme, et l’élément encore plus compliqué est le fait que nous sommes dans une zone à très gros risque dans le cadre du Plan de prévention des risques littoraux (PPRL). Il n’est donc pas possible d’accueillir du public au sein de ces bâtiments dans la zone dite de précaution donc avec un niveau d’eau en cas de submersion qui peut avoisiner les 2,50 à 3 mètres. Les services de l’Etat se sont emparés de ce sujet là, des procédures ont été diligentées et malheureusement pour eux il eût été plus pertinent d’obtenir l’ensemble des autorisations administratives avant de faire des travaux. C’est navrant car c’était un beau projet. Les plans locaux d’urbanisme sont faits pour structurer le territoire, pas pour embêter les gens, pour éviter les conflits d’usage et aussi être économe du denier public car on ne peut pas équiper de la même façon l’ensemble des territoires. Quand il y a tous types d’activités, il faut amener l’eau potable, l’électricité, l’assainissement, l’ensemble des réseaux, réaliser les voiries… il y a des secteurs aptes à ça et d’autres qui ne le sont pas. Les zones ostreicoles sont en bord de mer, dans les

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les dossiers de noirmoutier

marais, avec des polders, et ne sont pas destinées à accueillir ce genre d’activités. Noirmoutier comme la Vendée est une terre d’entreprise, une terre de projets, donc à chaque fois qu’on le peut on facilite le mieux possible les projets portés mais parfois il y a des impossibilités et ce n’est pas faute de vouloir mais la réglementation s’applique à tous et on ne va pas se perdre dans un délit de favoritisme. LRS: Le départ du Tour de France cycliste. Des retombées ou non ? NF: Un bonheur incroyable. Des retombées, oui, même si c’est toujours difficile à mesurer. Plusieurs types de retombées: le jour même un immense bonheur, une espèce de sentiment de quiétude, de sentiment de partage, d’euphorie tranquille de la part de tous ceux qui ont participé. Ce fut une très belle ambiance, les gens étaient ravis, il y avait une vraie convivialité, une situation décontractée et déjà pour ça c’était agréable. Une retombée directe pour ceux qui l’ont vécu sur place. La deuxième retombée, le jour de l’événement, c’est la présence de 15.000 personnes qui ont assisté au départ sur la commune de Noirmoutier en l’île, auquelles il faut ajouter les 30 à 35.000 personnes venus sur le parcours de Noirmoutier. Pour les autres retombées, c’est en terme de notoriété que l’on a pu le mesurer puisque pendant un an et demi nous avons eu chaque jour, en dehors des articles habituels, un article dans la presse quelle qu’elle soit qui a parlé de Noirmoutier et du Tour de France. Et puis on a pu constater cette année - cela a-t-il un lien car la météo a été extrêmement favorable - en septembre et octobre plus de monde que d’habitude à Noirmoutier. La répétition d’une destination dans la Presse fait qu’à un moment donné les gens ont envie d’y venir. Quant on parle d’une marque, ça imprègne

l’esprit des gens et on sait qu’il y a un retour. On le voit par exemple par l’étude des pics de consultation sur nos sites internet, par l’augmentation du trafic sur les réseaux sociaux et chaque fois qu’il y a une émission de télévision qui parle de l’île de Noirmoutier - des Racines et des Ailes a fait un carton - on voit exploser l’intérêt des gens via les connexions internet. Oui, il y a forcément un retour avec le Tour de France, c’est indubitable.

primo-accession et du logement est très largement déficitaire. On achète plutôt cher le foncier sur l’île de Noirmoutier, donc les coûts d’aménagement ne peuvent être répercutés sur les prix de vente.

I Le logement à Noirmoutier

LRS: Comment faites-vous pour loger tous les saisonniers dont vous avez besoin ? NF: Nous avons mis en place plusieurs actions sur l’île de Noirmoutier: de l’intervention directe, avec une résidence ouverte en 2014 de 30 logements du T1 au T2 pour jeunes actifs ayant un contrat de travail (durée de logement de 6 mois à 2 ans maximum).

LRS: Le logement est un réel problème en Vendée et bien plus sur le littoral. Quelles actions menez-vous en la matière? NF: Le logement est un enjeu important pour la commune de Noirmoutier en l’Île. Nous travaillons sur un projet de lotissement de 65 logements sur 2,5 hectares - ce qui représente une énorme emprise foncière pour nous car nous n’avons pas beaucoup d’espace - et qui permettra d’accueillir sur sa partie publique 30 familles en accession à la propriété, 24 familles en locatif et quelques familles en prêt social locationaccession (PLSA). Tout cela avance mais ce sont de gros dossiers qui monopolisent beaucoup d’argent public, le coût d’investissement de cette politique au bénéfice de la

LRS: 30 logements pour tout Noirmoutier, cela ne paraît pas beaucoup… ?! NF: Personne ne mesure réellement ce qu’est l’activité sur l’île de Noirmoutier! On a monté l’opération avec Vendée Habitat, et avec Agropolis qui est l’association gestionnaire de l’équipement. Ils imaginaient un taux d’occupation de 50%, n’ayant pas pris conscience que la saisonnalité sur l’île n’existe plus! Nous avons désormais une activité à l’année qui est réelle. Le taux d’occupation de la résidence avoisine les 90% et elle est donc saturée. Nous allons en construire une deuxième de même capacité, 30 logements, pour répondre aux besoins. Pour la très haute saison touristique, nous avons innové


Interview

avec l’ouverture en 2008 du bâtiment des Lutins comprenant 94 lits pour saisonniers avec un partenariat Commune de Noirmoutier en l’île, employeurs et salariés. Les employeurs louent les chambres à la commune et ensuite les mettent à disposition des salariés. Nous avons bien conscience que ce n’est pas suffisant mais nous répondons ponctuellement aux besoins. Enfin, une politique tarifaire a été mise en place dans nos campings municipaux afin d’en faciliter l’accès aux saisonniers à moindre coût. Une autre action a été menée mais sans grande réussite: un volet incitatif dans le cadre de l’amélioration de l’habitat. Des financements publics sont apportés pour améliorer l’habitat et en échange le logement rénové doit être mis à disposition de saisonniers ou d’apprentis. Mais ça ne fonctionne pas notamment car la location saissonnière est bien plus rentable pour les propriétaires ! Nous avons aussi travaillé avec les services de l’Etat au maintien du classement B1 zone tendue sur le foncier / Loi Pinel. Grâce à cela nous avons aujourd’hui des opérateurs qui viennent investir en Loi Pinel: un premier projet de 35 logements a obtenu le permis de construire et les travaux sont prévus en septembre, tandis qu’un deuxième de 25 logements est en cours d’obtention du permis de construire. Deux autres projets en résidence principale sont en réflexion. Dans un an environ, un gros projet d’hébergement va ouvrir ses portes avec une colonie et un centre d’hébergement qui ont fusionné pour devenir un Centre de vacances et nous avons un autre projet de restauration d’un hébergement collectif. Mais c’est vrai, l’on doit se battre, comme partout, pour créer des logements avec la problématique du prix du foncier qui explose.

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I Scot, dette et investissements LRS: Où en êtes-vous sur le projet de Scot, qui date de 2010, et pourquoi avoir créé le syndicat mixte Communauté de Communes de Noirmoutier, avec les Communautés de Communes de Challans-Gois et Océan-Marais de Monts? NF: Nous avons souhaité nous ouvrir au continent car un ensemble de problématiques concernent tout le territoire, et que les actions politiques conduites sur le continent ont une incidence certaine sur l’île de Noirmoutier, comme par exemple la politique du logement. Nous avons aussi la nécessité de travailler ensemble sur la politique du transport en commun car une partie de nos concitoyens vivent sur le continent mais travaillent sur l’île et que de nombreuses entreprises extérieures ont une activité à la journée sur l’île. Nous avons donc souhaité nous associer aux autres communautés de communes pour travailler sur le projet de Scot. L’enquête publique devrait

avoir lieu durant l’été avec une définition définitive du Scot à l’automne 2019. Cela a été plus long que prévu en raison de frontières mouvantes - la Loi NOTRe - et de modifications de périmètres: la CC de Palliau a fusionné avec Vie et Boulogne, et St-Christophe du Ligneron a intégré la CC de Challans-Gois. LRS: L’encours de votre dette a baissé de 10 à 4 millions d’€ entre 2011 et 2018, ce qui est satisfaisant, mais cela n’a-t-il pas une une influence négative sur les nécessaires investissements à réaliser? NF: Non, notre politique est restée dynamique depuis 2008 que ce soit sur la Communauté de Communes de Noirmoutier comme sur la commune de Noirmoutier qui avaient, l’une et l’autre, à peu près le même encours de dette. Concernant l’investissement, il n’a pas été réduit puisque nous avons gardé exactement le même niveau. L’encours a été réduit grâce à deux actions majeures: - la première a été d’optimiser nos coûts de fonctionnement

puisqu’il y avait matière à faire des économies sans dégrader le niveau de services à la population; - la deuxième étant d’avoir renouer les liens avec les financeurs que sont le département, la région et l’Etat. Compte-tenu de difficultés relationnelles, ces derniers avaient déserté la table des discussions avec les élus de l’île de Noirmoutier. J’ai beaucoup travaillé à une reprise des discussions qui pour moi sont essentielles et aujourd’hui nous sommes de nouveau assis à la table des discussions et respectés en tant que partenaire. Cela nous a permis d’avoir un niveau d’investissements conséquents. Nous sommes sur une fin de mandat, donc les programmes de travaux sont déjà largement engagés.

I Patrimoine, mise en valeur et réhabilitation

LRS: Quels travaux restent à réaliser? NF: Pour la commune de Noirmoutier en l’île, pour l’année 2019, des travaux liés au


Interview

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patrimoine avec les loges des Salorges - salle de spectacle de l’île - afin de permettre à cet équipement de continuer à présenter des spectacles de qualité et à rester ouvert. Le château de Noirmoutier du 12ème siècle qui nécessite de gros travaux de réfection, si on ne veut pas dépouiller le donjon de ses remparts! Le projet coûtera 5 millions d’€ sur plusieurs années. Le donjon a déjà été retapé à l’extérieur en 2006-07 après que les remparts se soient écroulés dans les années 2005-06. Il y a aujourd’hui de nouveaux signes d’inquiétudes. Et puis l’Eglise de Noirmoutier doit aussi faire l’objet d’un gros travail de réfection avec plus de 2 millions d’€ programmés. C’est lourd, très lourd à assumer, avec 3,6 hectares de bâtiments très âgés sur la Commune de Noirmoutier en l’île. Pour la Communauté de Communes, nous sommes en queue de programmation avec 700.000 € de travaux sur l’Hôtel Jacobsen - une bâtisse du 18ème siècle - qui a été restauré alors qu’il était dans un état fort préoccupant. Après la réalisation de la muséographie, il va ouvrir ses portes au mois de mai permettant ainsi de valoriser les patrimoines maritime et insulaire. L’idée est de faire partager la culture de la mer et de l’île au plus grand nombre afin que chacun soit aussi acteur de la protection de notre environnement en venant sur l’île de Noirmoutier. (*Note de la revue: il s’agit du berceau de la famille Jacobsen qui a été une famille de bâtisseurs à Noirmoutier: on leur doit la poldérisation, les digues et le système des écluses).

I Défense contre la mer

LRS: Noirmoutier est particulièrement sensibilisée aux problèmes de la défense contre la mer. Où en sont les travaux dans le cadre des Programmes d’Actions de Prévention des Inondations (PAPI)? Des actions

ont été menées, par exemple, à la pointe de la Fosse, au Perré des Sénégalais, à la Dune de l’Hommée. Les travaux vont-ils durer encore longtemps ? Des décennies ? NF: Par rapport à la défense contre la mer, oui, il va y avoir des travaux durant des décennies. Si le niveau de la mer monte tel qu’il nous est dit, on n’en finira jamais! Un travail permanent lié au réchauffement de la planète. Le PAPI de Noirmoutier a été validé en 2012 et il est toujours en cours pour un montant de 24 millions d’€ avec une grosse opération sur la fin du PAPI qui concerne la sécurisation des trois étiers autour du Port de Noirmoutier en l’Île. C’est une opération techniquement difficile qui donc prend un peu de temps. Sont en cours les travaux de restauration des digues du Gois et des Mattes, autour du site particulier du Gois et de Barbâtre*. (Note de la Revue: Ces travaux ont été programmés sur la période d’octobre 2018 à juin 2019. La Communauté de Communes de l’île de Noirmoutier poursuit son action - à travers les PAPI - de préservation de l’intégrité de l’île et de ses habitants. Le montant global de ce programme s’élève à 25 millions d’ € sur 20132021. Sur la façade Est de l’île, l’objectif est de rehausser l’ensemble des digues à 5 mètres NGF. Lors de la tempête Xynthia en 2010, le niveau d’eau avait atteint 4,2 mètres NGF. La consolidation des digues de Barbâtre est prévue en 2 phases pour un montant total de plus de 3 millions d’euros : 1/ 2013 – 2014 : digues de la Plaine, Grande Rouche, la Casie et Sébastopol 2/ 2018 – 2019 : digues du Gois et des Mattes). Nous sommes en train de finir le dispositif de sécurité sur la côte Est, soit 26 kms de digues à réhausser, les deux dernières à rehausser étant les digues du Gois et des Mattes.

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les dossiers de noirmoutier

C’est un travail passionnant, fascinant, compliqué avec beaucoup de réglementations et il faut déplorer que l’Etat ne sache pas exactement quel doit être le choix lorsque viennent se télescoper l’enjeu environnemental et l’enjeu de sécurité des personnes et des biens.

été réalisés à ce jour ! On a par contre la chance d’avoir localement des services de l’Etat qui sont très volontaires, notamment la DDTM et les services du Préfet et du sousPréfet.

LRS: Que voulez-vous dire? Pouvez-vous apporter des éclaircissements, des exemples? NF: Malheureusement encore, trop souvent l’enjeu environnemental et l’esthétisme viennent prendre le pas et porter préjudice à l’avancée des travaux. Par exemple, la nécessité d’arrêter les travaux quand il y a une période particulière ou pour préserver certaines espèces de plantes présentes dans des ouvrages de défense contre la mer etc… Tout ça ne nous facilite pas la tâche. Bref, les travaux avancent doucement, tranquillement. Je participe aux travaux de la Commision mixte inondations à Paris qui labellise et finance l’ensemble des PAPI de France. Un montant de 1,9 milliards d’€ d’autorisations de crédits ont été validés pour effectuer des travaux de défense contre la mer et de défense fluviale, or parce que les procédures réglementaires sont épouvantablement compliquées, depuis 2011 seuls 300 millions d’€ de travaux ont

LRS: Deux maires de Noirmoutier ont relancé le débat à propos d’un péage une écotaxe - sur le Pont de Noirmoutier. Le département de la Vendée semble considérer que la logique de taxes supplémentaires n’est pas dans l’air du temps. Quelle est votre position?

I Ecotaxe et péage sur le Pont de Noirmoutier

NF: Aujourd’hui ce n’est clairement pas un débat. C’est un sujet qui mérite une réflexion préalable, qui nécessite de bien mesurer le cadre juridique. Il n’y a pas d’exonération possible et le montant de la taxe est élevé puisqu’il peut aller de 4 à 60 €. C’est la loi qui fixe les tarifs mini et maxi en fonction du coût de perception de la taxe et de la recette qu’il faut récupérer pour assurer un certain nombre de missions qui découlent de la mise en place de la taxe, notamment le transport en commun qui est obligatoire. Ce n’est pas comme ça que les choses ont été présentées par les maires en question. C’est un sujet extrêmement complexe et d’importance pour l’avenir du territoire insulaire.


Il ne faut pas se méprendre, faire payer pour accéder à un territoire, cela réduit le nombre de personnes qui accèdent à celui-ci, cela crée une sélection parmi les visiteurs potentiels avec une incidence économique sur un certain nombre d’activités existantes aujourd’hui sur l’île de Noirmoutier. LRS: Vous pensez que cela peut être contre-productif pour le tourisme noirmoutrin? NF: Si on regarde que l’aspect stricto-sensu de recettes, certes il y aura X millions d’€ supplémentaires, mais si en contre partie il y a une baisse de l’activité économique, que des entreprises ferment, que des personnes n’ont plus d’activité, quel est l’intérêt? Sans compter les baisses de recettes directes, les personnes ne travaillant plus ne payant donc plus d’impôts. La stratégie touristique qui a été mise en place pour l’île de Noirmoutier vise à permettre à tous ceux qui aspirent à découvrir l’île de Noirmoutier de pouvoir le faire, quelle que soit leur condition et situation. Evidemment cette question de l’écotaxe n’est pas dans la stratégie touristique telle qu’elle a été définie. Tout peut se rediscuter, mais c’est un sujet qui nécessite vraiment un débat très approfondi d’autant plus que si c’était mis en place je suis convaincu que certaines activités touristiques liées à l’apport de personnes extérieures disparaîtront telles l’Aquarium Sealand, le Parc Océanile, l’île aux Papillons. Quelques activités phares, mais ce sera le cas aussi pour bien d’autres… LRS: L’hôtellerie, la restauration pourraient aussi être touchées… NF: Oui. Tous ceux qui ont une activité économique en lien avec le passage du continent vers Noirmoutier. En plus, une visite d’une journée peut très bien induire ensuite, pour des gens qui sont tombés sous le charme,

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un séjour plus long. Cela mérite une vraie grande réflexion.

I L’affaire des granulats

LRS: Une décision du Conseil d’Etat, défavorable aux opposants au projet d’exploitation de granulats marins près de l’île de Noirmoutier, vient de tomber. La Communauté de Communes de l’île de Noirmoutier était dans cette procédure ainsi que le Collectif Le Peuple des Dunes. Vous devez être déçu. Quels sont vos arguments pour contester ce projet de l’Etat? NF: Hélas le Conseil d’Etat ne nous a pas suivi. Les granulats marins, l’île de Noirmoutier y a toujours été hostile quelles qu’aient été les majorités qui se sont succédées. Le constat fait - certes pas scientifique - est que lorsque l’extraction de granulats marins de la zone du Pilier a été lancée, on a pu constater une érosion sur la partie nord-ouest de l’île de Noirmoutier, sur la pointe de l’Herbaudière et la plage de la Linière. De plus, selon les dires des marins-pêcheurs, un certain nombre de fonds ont évolué et un banc sableux à lançons - appâts qui servent pour les pêcheurs de bar - avait disparu. Enfin, force est de constater qu’il y a eu beaucoup plus d’extraction de sable au Pilier que la souille* autorisée, celle-ci étant alors devenue un piège à sable portant préjudice au transit hydrosédimentaire. L’île de Noirmoutier s’est construite progressivement sur le transit hydrosédimentaire avec l’apport sableux et des alluvions de la Loire, au fur et à mesure des millénaires. Nous sommes donc extrêmement sensibles sur ce sujet. (Note de la Revue: *la souille d’extraction est le creusement d’un fond plat ou l’arasement d’un banc de sable. L’extraction peut modifier les mouvements de l’eau (marée, courant, houle) et par suite les transports

sédimentaires qu’ils induisent. Elle peut donc modifier les fonds alentour et la côte avoisinante). LRS: Vous craignez donc des modifications qui ne soient pas maîtrisées? NF: On veut nous démontrer qu’il n’y a aucune incidence entre notre érosion côtière et l’extraction de granulats. Mais nous souhaitons faire valoir le principe de précaution: quand on ne sait pas, on ne fait pas! Ce principe de précaution s’applique souvent à terre mais beaucoup moins en mer. On a pu le constater à travers les difficultés que l’on a eu à se faire entendre de la part de l’Etat. Tant qu’il n’y a pas de vérité sur le sujet, il est préférable qu’il n’y ait plus d’autres sites d’extractions de granulats! Or, l’Etat a ouvert en catimini la possibilité d’extraction pour Cairnstrath. Certes, il y a une réduction de la superficie d’extraction de façon assez conséquente… LRS:…. oui de 14 à 5,6 km2 pour la zone SN2 et de 7 à 3,6 km2 pour la zone A. NF: Exactement. Mais ce n’est pas satisfaisant puisque tous les enseignements sur les modifications du Pilier n’ont pas été tirés et que l’on a du mal à obtenir la lumière sur la façon dont l’extracteur y travaillait. Nous souhaitons vraiment que les choses soient posées et bordées avant de prendre quelque risque que ce soit parce que la défense de

l’île de Noirmoutier contre la mer n’est pas une mince affaire et coûte beaucoup d’argent au contribuable. A Noirmoutier, nous sommes tous dans le même bateau… alors si la coque prend l’eau…. Nous avions donc engagé une procédure en Conseil d’Etat et nous avons été récemment débouté mais sur des motifs qui nous paraissent discutables. LRS: Avez-vous contacté des personnalités scientifiques qui auraient pu apporter un début de réponse sur le danger éventuel de ces extractions? NF: J’avais alerté Cédric Villani, le président de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST)* qui nous a fait une réponse à travers les éléments qu’il a collecté auprès des extracteurs. Evidemment les éléments des extracteurs sont plutôt favorables, donc lui aussi nous a dit que à la lumière de ce qu’il avait pu lire il ne voyaiat pas de difficultés particulières même s’il constatait que sur la méthodologie d’évaluation du risque il y avait certainement des choses à améliorer puisque tout n’était pas extrêmement précis. (*Note de la Revue: L’OPECST - composé de 18 députés et 18 sénateurs - a pour mission d’informer le Parlement français des conséquences des choix de caractère scientifique et


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technologique afin d’éclairer ses décisions. À cette fin, il recueille des informations, met en œuvre des programmes d’études et procède à des évaluations. Ses missions portent sur cinq grands thèmes: l’énergie et la politique énergétique, l’environnement et les risques naturels, les nouvelles technologies, les sciences de la vie - avec la bioéthique - et les biotechnologies, la politique de recherche et d’innovation avec l’interface science et société). LRS: Dans les deux décrets du 8 mars 2017* (JO du 10 mars 2017) accordant la concession de sables et graviers siliceux marins dite « Cairnstrath SN2 » (Vendée) conjointement et solidairement aux Sablières de l’Atlantique, à la Compagnie européenne de transport de l’Atlantique et à la Société des dragages d’Ancenis, il est fait mention de mesures d’observation de l’état environnemental avec un suivi périodique des incidences sur le trait de côte, les peuplements marins, les activités de pêche, le comportement des oiseaux…etc… Vous paraissez sceptique… NF: Il y a des choses intéressantes mais sur les ressources halieutique et benthique*. Nous, ce qui nous intéresse aussi, c’est l’incidence sur le trait de côte or cela n’est pas mesuré, pas mesuré du tout. On peut donc être inquiet. (*Note de la Revue: Les deux décrets (SN2 et A) comportent une annexe de cahiers des charges obligeant, avant l’exploitation, à un état environnemental puis pendant les deux premières années à un inventaire halieuthique, et un suivi environnemental périodique à trois ans et à cinq ans puis tous les cinq ans. Le point 3 de l’annexe mentionne: Le suivi environnemental périodique évalue l’impact des extractions sur les interactions éventuelles entre l’exploitation du site et le trait de côte).

*Les poissons benthiques vivent sur le fond des mers ou des océans. Ils ont un lien étroit et permanent avec le fond. Sole, plie et turbot vivent sur le sable ou la vase. Congre, rascasse ou mérou vivent sur les fonds rocheux. On les pêche avec un chalut de fond, un filet maillant, un filet trémail ou une palangre de fond). LRS: Il est prévu tous les ans un compte-rendu des concessionnaires sur l’activité et les suivis environnementaux auprès du Préfet de la Vendée et devant une commission de suivi, d’information et de concertation. Quels ont été les constats? NF: Il y a eu une première réunion à la Préfecture de la Vendée à propos de l’extraction du granulat de Cairnstrath. Les extracteurs eux-mêmes ont reconnu avoir été surpris par la force de la houle qu’ils n’avaient pas mesuré à cette intensité là. Dans leur modélisation et dans leurs certitudes, il y a donc déjà des paramètres qui ne sont pas exacts.

LRS: Quelles conséquences en tirez-vous? NF: nous allons surveiller cela de très près. Les élus de Noirmoutier ont décidé, par exemple, de faire procéder à un constat d’huissier sur le littoral ouest de l’île ce qui nous permettra d’avoir un état à l’instant zéro afin de pouvoir dans l’avenir, s’il y a des incidences, se retrouner contre les extracteurs ainsi que contre l’Etat.

I Les projets éoliens

LRS: Venons-en aux projets éoliens qui sont en cours dans les parages de l’île de Noirmoutier. En validation, il reste un dossier portant sur l’environnement. Quelle est votre position sur ce dossier qui inquiète aussi et qui, selon les opposants, crée une pollution visuelle? NF: Les projets éoliens, comme pour les extractions de granulats, sont des projets portés par l’Etat. L’incidence sur le trait de côte n’est pas le même. La difficile question est quel type d’énergie il faut utiliser? Ça reste un vaste

débat. On sait que l’Etat a pris des engagements vis à vis de l’Union européenne et donc ceux-ci doivent être tenus. LRS: Quelles promesses? Des ressources d’énergie différentes? NF: Il ne s’agit pas de promesses mais d’engagements. Cela a été signé il y a quinze ans, en 2005*, et porte sur l’obligation d’avoir un mix-énergétique et 21% de production d’énergie provenant des énergies renouvelables. (*Note de la Revue: Il s’agit de la loi du 13 juillet 2005 prévoyant un objectif de production de 10% des besoins énergétiques français à partir de sources d’énergie renouvelables à l’horizon 2010 et plus particulièrement une production intérieure d’électricité d’origine renouvelable à hauteur de 21% de la consommation en 2010. Ainsi qu’un parc éolien de 13 500 MW en 2010 (12 500 MW sur terre et 1 000 MW en mer) et de 17 000 MW en 2015 (13 000 MW sur terre et 4 000 MW en mer).


LRS: Et donc votre position? NF: Les élus de la Communauté de communes ont émis un avis de principe favorable au regard des éléments dont on dispose, bien évidemment, et en se basant sur l’incidence environnementale qui nous a été présentée. Nous avons cependant demandé qu’il ne soit pas porter préjudice à l’activité maritime et de la pêche, des éléments essentiels, et qu’il n’y ait pas d’autre parc! Car désormais ça suffit. Il ne faut pas industrialiser la mer! Beaucoup d’erreurs ont déjà été faites à terre pendant des dizaines d’années. Restons vigilants et ne reproduisons pas ces errements en mer parce qu’on ne connaît pas les incidences sous l’eau où on ne voit pas ce qui se passe. LRS: Certaines doléances ont cependant été prises en compte… NF: Oui, sur ces sites éoliens de Noirmoutier des modifications ont été effectuées. Il y a eu beaucoup d’échanges avec le milieu de la pêche. Ce qui nous intéressait sur ce projet par rapport au précédent était la réduction du nombre d’éoliennes passant de 84 à 62*. C’est un élement plutôt favorable même si les éoliennes seront un peu plus haute avec une puissance nominale plus importante. Il y a cependant une réduction de la surface, le site sera un peu plus éloigné du rivage, et surtout l’implantation des éoliennes a été modifiée afin de permettre aux pêcheurs de continuer à pêcher dans zone concernée par le parc. (*Note de la Revue: 62 éoliennes de 220 mètres de haut).

I Religion et vandalisme LRS: Au mois d’août 2018, à Noirmoutier, la vierge de la « Statue des missions » a été décapitée - ainsi que l’enfant Jésus -. Les deux têtes ont été retrouvées le 18 septembre

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2018 et vous avez donc voté 2000€ lors du Conseil municipal afin de prendre part aux frais de restauration. Ce vandalisme est très particulier et l’acte de couper des têtes reste étonnant. Pensez-vous que cette façon de procéder peut avoir une signification, d’autant plus que cela s’est produit il y a quelques jours dans une église de St-Gilles-Croix-de-Vie ? NF: Il s’agit d’une réalisation par une « Mission » en 1949, la statue ayant été financée par une mère pour remercier la Sainte-Vierge de lui avoir rendu ses quatre fils mobilisés durant la 2ème Guerre mondiale. Dans cette affaire il y a la dimension sacrée de l’art religieux mais aussi le drame qu’a subit cette famille par une violation de sa mémoire. Ce n’est pas acceptable. La statue est en cours de restauration et sera réinstallée, a priori au mois de mai. Nous avons soutenu les frais de restauration pour les raisons évoquées, en hommage à la famille et en soutien à l’émotion suscitée par cet acte minable. D’une manière plus générale, on peut toujours trouver des significations à tout. Qui peutêtre l’auteur de ce vandalisme? Une chose est sûre, il est insupportable de s’attaquer à des symboles religieux car quelles que soient les convictions des uns et des autres, la religion fait partie de l’Histoire de France. Qu’on le veuille ou non, la France a été la fille aînée de l’Eglise et on a une tradition chrétienne à laquelle il faut savoir souscrire et qu’il faut respecter - quelle que soit sa croyance - parce qu’elle fait partie de notre identité. C’est inscrit dans notre patrimoine culturel commun et l’on se doit de respecter ceux qui sont croyants. Cet acte, qui a suscité beaucoup d’émotions, est une vraie attaque, une vraie atteinte. Et il faut déplorer que la mobilisation de l’opinion et des autorités de l’Etat soit extrêmement faible - en tout cas sur le plan public - alors que si

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des symboles d’autres religions avaient été pris à partie, pris à mal, certains auraient eu une autre forme de réaction. Respectons l’ensemble de nos religions, la France ne reconnaît ni ne finance aucune religion mais elle est gardienne de toutes, donc il faut aussi rester vigilant par rapport à la religion chrétienne.

ISel: la guerre des labels LRS: Le sel de Noirmoutier…. NF:…..Le meilleur du monde…

LRS: Oui, certainement…..Où en est-on dans la « guerre » des labels, entre l’AOP et l’IGP et les demandes d’IGP Fleur de sel pour le sel de Camargue par les Salins du Midi? NF: Nous avons lancé une procédure auprès de l’Union européenne pour contester la décision qui avait été prise au niveau national et que l’on considère être une grave erreur: autoriser l’IGP Fleur de sel en Camargue. En effet, on porte atteinte au patrimoine tout en contrariant complètement la définition européenne de la Fleur de sel qui précise que les cristaux de sel formés au fil de l’eau sont récoltés manuellement. Or, ce n’est pas le cas de la Fleur de sel de Camargue où les cristaux ne sont pas récoltés en surface mais sont coulés et récoltés mécaniquement. Nous considérons donc qu’il s’agit d’une atteinte

aux producteurs locaux, au patrimoine et au savoir-faire de nos territoires, Noirmoutier, Guérande et Oléron principalement, ainsi qu’à bien d’autres en Vendée même si leur notoriété est moindre. Ceci n’est pas acceptable! Donc nous défendons ardemment la Fleur de sel de l’ïle de Noirmoutier d’autant plus que cette IGP va créer une confusion dans l’esprit du consommateur qui ne va plus pouvoir faire la différence entre le sel marin récolté à la main et artisanalement, d’avec le sel fin récolté d’une manière industrielle par les Salins du Midi. Une confusion souhaitée puisqu’on vient de l’apprendre, les Salins du Midi vient de déposer à l’INPI un nom de marque « Le Saunier de Noirmoutier » pour vendre de la Fleur de sel et du sel marin récolté sur l’île de Noirmoutier, mais évidemment avec la marque industrielle en arrièreplan des Salins du Midi. La Communauté de communes de Noirmoutier vient donc de lancer une procédure à ce sujet. Plus personne ne va rien y comprendre! Ça peut générer une vraie confusion, ça porte atteinte à nos producteurs qui font un vrai travail de maintien de ce savoir-faire artisanal et qui nous est précieux car cela développe l’économie de notre territoire et lui apporte une forte notoriété.


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LRS: Les salins du Midi représentent une force industrielle…. NF: Nous devons protéger et défendre notre marque, notre identité, celle de Noirmoutier, et nos producteurs. Il est insupportable que les fonctionnaires d’Etat français et ministres valident les désiderata du lobby très puissant des Salins du Midi, n’aient pas pris la mesure de la situation et ne comprennent pas la nécessité de faire preuve de vigilance en matière de labels. La Croatie, l’Espagne, le Portugal etc… plusieurs pays européens ont tous une définition identique de la Fleur de sel, et celle-ci ne correspond pas du tout à celle de la Fleur de sel de Camargue! Nous, on continuera jusqu’au bout, nous avons d’ailleurs émis une protestation auprès de l’Union européenne, et les sauniers ont dû déposer une requête auprès du Conseil d’Etat. LRS: Les producteurs de sel marin de la côte atlantique ont déposé une demande d’enregistrement auprès de l’INAO d’une « Spécialité traditionnelle garantie » pour la Fleur de sel » afin de protéger les productions artisanales et traditionnelles de sel récolté manuellement et à la surface de l’eau. Cette demande est toujours à l’étude et semble ne pas avancer….. NF: La « Spécialité traditionnelle Garantie » - portée par les sauniers de l’Atlantique fragiliserait fortement les demandes d’IGP en cours et réduirait leur intérêt. Il y a donc un risque qu’elle n’aboutisse pas…..

I Noirmoutier: à propos d’un projet de regroupement

LRS: Vous avez présenté récemment un projet de fusion ou de Regroupement des communes de Noirmoutier.

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les dossiers de noirmoutier

Pouvez-vous éclairer nos lecteurs sur vos objectifs et nous indiquer quel statut est envisageable? NF: Un regroupement ! En raison des évolutions, nous devons nous poser la question de savoir si notre organisation à Noirmoutier est la bonne par rapport à notre territoire et notre capacité à agir. En effet, on s’aperçoit qu’il y a un désengagement de plus en plus conséquent de l’Etat, que les recettes vont encore diminuer car l’Etat est en train de porter préjudice d’une façon incroyablement agressive à nos territoires avec la suppression de la taxe d’habitation que personne ne réclamait. Au début, tout le monde va se réjouir de payer moins d’impôts, mais beaucoup moins in fine quand on comprendra que cela s’accompagne de moins de services. Si au départ il y aura une compensation à l’euro près par l’Etat, c’est une évidence que la compensation sera gelée le jour où l’Etat aura décidé sans vergogne de reprendre ce qu’il a donné d’une main. On ne pourra s’y opposer et cela conduira à notre fragilité économique et à la perte d’autonomie de nos recettes.

Aujourd’hui sur l’île de Noirmoutier nous avons 5 structures publiques, 4 communes et une Communauté de Communes. L’investissement public est principalement porté par deux structures sur les cinq, la Communauté de Communes pour 50% et la ville de Noirmoutier en l’Île pour 25%. Ensemble, Barbâtre, L’Epine, et La Guérinière pour les 25% restants. Donc ces dernières ont très peu de moyens d’actions malgré les besoins. Noirmoutier en l’Île a un niveau d’équipements très supérieur aux communes de la même taille, en raison de la dynamique touristique dont elle a bénéficié. Mais le niveau de croissance n’est plus le même, les besoins sont de plus en plus conséquents et l’on nous demande d’assumer des missions nouvelles, par exemple celle concernant la santé. Rien que pour l’Ile de Noirmoutier c’est quand même 3,3 millions d’€ pour la Maison de santé, certes remboursés via les loyers des médecins mais nous en avons financer une partie et avons dû supporter un crédit. De plus, chaque année notre budget supporte 200.000 € - des sommes conséquentes - afin de faciliter la venue de médecins: hébergement, bourses d’études,

aides diverses et variées pour leurs installations. LRS: Quelles sont les autres problématiques qui vous amènent à réfléchir sur ce projet de regroupement? NF: L’on doit assumer un ensemble de missions, et apporter certains services publics, parce qu’on sait que sur l’île de Noirmoutier - comme sur tous les territoires littoraux le pouvoir d’achat de ceux qui y vivent n’est pas toujours en compatibilité avec le coût de la vie. Le foncier, par exemple, est extrêmement cher, et donc l’accession à la propriété pour les jeunes ménages est impossible si on ne les aide pas d’une manière ou d’une autre. Par ailleurs, force est de constater que l’ensemble des citoyens de l’île n’a pas un accès égal aux services publics car la majorité des services publics se situent sur la commune de Noirmoutier en l’île, des services auxquels les habitants de cette commune ont accès à moindre coût et de manière prioritaire. Les autres habitants de l’île les payent donc plus cher et ne bénéficient pas de cette priorité. Cela crée beaucoup d’interrogations et génère des disparités: ainsi, la commune de Noirmoutier en lîle est capable


d’apporter des financements pour les enfants qui partent en classe de neige tandis que les autres communes participent d’une façon moindre. Cela finit par générer des tensions et des incompréhensions de la part de la population. Et puis on a aussi certainement besoin d’un aménagement du territoire qui soit beaucoup plus homogène qu’il ne l’est aujourd’hui, avec des complémentarités à mettre en oeuvre dans le respect de nos identités. Donc, aujourd’hui, nous avons tout intérêt à nous poser la question: quelle pourrait être l’organisation administrative la plus efficace pour l’île de Noirmoutier? LRS: Et donc quelle pourrait être cette organisation administrative? NF: C’est relativement simple. D’une île avec 5 structures - la Communauté de communes et les 4 communes - on pourrait passer à 1 île et 1 seule structure. Avec une seule commune qui serait la commune de « L’île de Noirmoutier » - il n’y a pas de débat sur le nom - qui regrouperait les 4 communes de l’île et qui transformerait donc la Communauté de commune en une commune nouvelle. (Note: Noirmoutier n’a pas l’obligation d’avoir une Communauté de Communes en raison de l’exception d’insularité) LRS: Pas de « sous-décideurs » mais un seul décideur..? NF: Un seul décideur avec une répartition claire et nette et si c’est « L’île de Noirmoutier » qui décide cela devient beaucoup plus simple. Ce serait un regroupement de 4 communes qui se mettent ensemble, qui discutent de tout autour de la table, qui auront une position commune sur tous les sujets, la politique touristique, la politique économique, le logement, l’environnement etc… Cela réglera aussi certaines confusions: ainsi on peut avoir du mal à savoir qui assume telle

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ou telle compétence entre la Communauté de communes et chacune des communes. Par exemple, des associations dont la compétence porte sur l’ensemble du périmètre de l’île vont penser qu’elles doivent s’adresser à la Communauté de communes, or c’est la commune qui est compétente en matière de subventions sportives. Et comme c’est la commune de Noirmoutier en l’île qui a aujourd’hui le plus de moyens, l’immense majorité des associations sont basées sur cette commune… ce qui fait que l’on se retrouve avec une espèce de centralité subie. Tout cela nécessite une réflexion. LRS: Ce projet de regroupement est-il ancien et est-ce que les élus ou en tout cas les maires des autres communes sont d’accord. Qu’en est-il de L’Epine? NF: Nous avons organisé récemment une réunion avec 300 personnes. Il y avait des élus et des citoyens des 4 communes de l’île. J’ai été favorablement surpris de l’accueil qui a été reçu, de l’intérêt des citoyens et des élus. Personne n’a exprimé d’hostilité à part une personne qui pense que les communes de 400 habitants font le bonheur de la France… C’est sûr, ça coûte rien aux citoyens mais il n’y a aucun service dans ce genre de communes… Alors c’est un choix mais je pense que cette taille n’est pas la plus pertinente. Tous les autres, plus rationnels, ont été volontaires pour amorcer une discussion. Mais à partir d’éléments objectifs car c’est trop facile de dire que l’on est pour ou contre mais sans apporter d’arguments et de raisons. Une seule chose doit valoir lorsque l’on est un élu, c’est de tout mettre en oeuvre pour apporter le meilleur service qualité-prix à nos concitoyens. Si c’est l’organisation actuelle qui est la plus efficiente et la plus pertinente, conservonslà, si c’est une autre structure adoptons-là et travaillons

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ensemble. C’est une occasion unique de se fédérer à un moment où l’on a du mal à se retrouver, où l’on voit bien que chacun s’interroge, où l’on sait que les notions d’appartenance et de proximité sont fondamentales! Ce n’est pas Paris qui va apporter des solutions à nos problèmes locaux. On sait que la ruralité et les territoires périphériques sont oubliés par nos décideurs publics qui se focalisent uniquement sur les grandes villes. Il faut donc que l’on se prenne en main nousmêmes. Il faut optimiser nos financements, mieux rationnaliser notre façon de gérer et surtout notre façon de prendre des décisions. On parle de simplifications administratives. Et bien si celle-ci peut nous apporter plus d’efficacité, sautons sur l’occasion.

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Protection des espaces agricoles et naturels - Un exemple d’entreprise biotechnologique

LRS: Où en êtes-vous sur certains dossiers comme Hemarina et Pean*? (*Pean: Périmètre de Protection des espaces agricoles et naturels). NF: Le Pean est en stand-by, là aussi c’est un des éléments sur lequel il faut avoir une préoccupation parce que le Pean est un outil important

pour assurer la préservation des espaces agricoles, au sens large, l’agriculture, l’aquaculture, l’ostreiculture, bref tout le secteur primaire pour qui l’outil de travail est le foncier. On n’a pas réussi à se mettre d’accord sur l’île de Noirmoutier puisque deux maires ont refusé d’en débattre au sein de leur conseil municipal contre l’avis de tous, contre l’avis des professionnels, contre l’avis de l’ensemble des élus locaux qui s’étaient déjà prononcés. Ce n’est pas un mode de fonctionnement quand on est en démocratie. Il faut que les choses soient posées, d’autant qu’il s’agit de l’intérêt général. Le Pean, nous y croyons beaucoup, professionnels comme élus, parce que l’on voit qu’il y a une forte pression sur le foncier qui permet d’assurer les ressources alimentaires. Cette fonctionnalité est extrêmement importante pour nos territoires. J’espère que ce dossier du Pean pourra à un moment ou un autre être relancé. La question d’Hemarina* est un sujet également très important à nos yeux. Nous avons la chance d’avoir sur l’île une très belle société. (Note de la revue: Hemarina est une entreprise de culture de vers marins destinés à la transfusion sanguine. Le vers produisant une hémoglobine dépourvu de rhésus est donneur universel. Franck Zal, directeur général de cette société, est un chercheur issu


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les dossiers de noirmoutier

du CNRS. Il a réussi à mettre en évidence les propriétés de cette hémoglobine). Cela montre que nous avons une vraie capacité à attirer des entreprises innovantes sur notre littoral vendéen, et les biotechnologies sont certainement des projets d’avenir et une source d’emploi pour les prochaines décennies. LRS: L’entreprise est-elle soutenue par des financements publics? NF: Ce sont des financements principalement privés. Noirmoutier a participé à la remise en état du site pour pouvoir les accueilir du mieux possible et pour que l’entreprise soit rapidement opérationnelle. Mais sinon les financements proviennent de partenariats privés. Divers brevets* ont été déposés dont un produit phare pour la transfusion sanguine et pour des pansements permettant d’accélérer la cicatrisation, par exemple pour les plaies et ulcères des diabétiques. (Note de la revue: Hemarina a été fondée en 2007 sur la base de la demande d’un brevet du CNRS. Délivré en 2002 pour la France et en 2004 pour l’Europe, le CNRS a accordé une licence d’exploitation exclusive de ce brevet à Hemarina. L’activité de Hemarina est désormais protégée par 15 familles de brevets).

I Prochaines échéances

LRS: En tant qu’élu il y a de prochaines échéances. Qu’estce qui est prévu en 2020 pour les futures municipales? Et les prochaines législatives de juin 2022, vous vous projetez vers l’avenir ou cela vous paraît encore très loin? NF: Non, je ne me projette pas aujourd’hui parce que la situation est extrêmement difficile, parce qu’il y a beaucoup d’enjeux, parce qu’il n’y a plus de visibilité. Il faut désormais se concentrer sur le quotidien, il faut satisfaire les demandes

de nos concitoyens. Il y a une énorme angoisse du lendemain en ce moment, même si nous sommes dans un pays plutôt privilégié, sur des territoires assez favorisés. Il y a énormément d’inquiétude parce que tout est remis en cause. On ne pourra pas continuer comme ça, le mode de fonctionnement où on élisait quelqu’un pour 6 ans et on ne le jugeait que six ans après, c’est fini. Il faut travailler au quotidien avec les personnes, on doit repenser notre représentation car la relation entre les gouvernants et les gouvernés n’est plus la même. Et les citoyens ont autant d’informations que les élus aujourd’hui, ils souhaitent donc participer à l’élaboration des politiques et à l’action publique. C’est très positif mais c’est la tectonique des plaques, un moment fascinant, bouillonnant d’initiatives et d’énergies mais extrêmement inquiétant car, selon les orientations qui vont être prises, le meilleur ou le pire n’est pas totalement à exclure. Donc il faut être hyper vigilant. J’ai la chance d’être élu d’un super territoire. Il y a d’extraordinaires enjeux même s’il y a des tensions inhérentes à toute relation individuelle dans des moments difficiles, des tensions entre individus. Ça fait partie du jeu, ce n’est pas

grave, mais on a un territoire qui est fascinant, un potentiel incroyable, de beaux enjeux. Ce sont quand même de super beaux challenges LRS: En liaison avec le Conseil départemental de la Vendée. NF: Oui, il y a aussi le département de la Vendée qui doit se construire en tant que collectivité territoriale porteuse et garante de l’identité vendéenne, qui doit trouver sa place entre la Région d’un côté et les intercommunalités X-XL en train de se constituer, de l’autre. Je suis passionné par le Plan « Ambition maritime »* que je porte au niveau du département. (Note de la revue: le Plan « Ambition maritme » adopté en juin 2018 repose sur trois axes: l’innovation, l’aménagement et l’identité maritime. Il comprend une cinquantaine d’actions concrètes dont une trentaine de nouvelles, par exemple une vitrine sur le littoral dans le Havre du Payré classé site naturel remarquable. 96  millions d’euros seront engagés dont 53 millions pour les ports du Département dont les 4 grands ports de pêche et de commerce de la Vendée. Un label « Vendéoports » est prévu. Afin de financer ce grand projet sera lancée une Fondation

Vendée Globe). Il ne faut pas non plus trop se disperser d’autant plus que je suis aussi le président du Centre européen de prévention des risques d’inondations (Cepri). Toutes ces actions tournent autour de la mer et du littoral. LRS: Et de la prévention et de la sécurité propres au littoral avec l’épée de Damoclès du réchauffement climatique… NF: Il y a un énorme enjeu sur lequel je veux mettre toute mon énergie et tout ce qui me reste à vivre, c’est l’adaptation des territoires au réchauffement climatique parce que c’est un enjeu essentiel sur lequel on ne peut pas échouer « On passe ou on meurt » ! Donc il faut passer, donc il faut s’adapter, et cela va supposer beaucoup de courage, beaucoup de détermination parce que l’on n’est pas prêt, ni individuellement ni collectivement, à changer son mode vie. Pourtant il va falloir le faire. Donc avec tous ces enjeux, peu importe la place, il faut utiliser le principe de subsidiarité, il faut être présent là où on est le plus efficace. __________________ samedi 2 mars 2019 Propos recueillis par Philippe Brossard-Lotz


Fleur de Sel

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les dossiers de noirmoutier

© Le Reporter sablais

labels: la guerre du sel

Bruno Retailleau

Les tromperies vis-à-vis des consommateurs, la vacuité des contrôles sur les compétences et les diplômes dans certains secteurs, ainsi que le peu de vérifications qualité en France montrent un laisser-aller certain. Il suffit pour s’en convaincre de suivre quelques émissions télévisées traitant des compositions ou des origines du saucisson corse, du savon de Marseille ou de l’huile d’olive extra-vierge, voire même de certains vins de marque…. pour s’en convaincre. Il semble bien que dans certains cas – alimentation, beauté et esthétique, sport etc.. -, les tromperies sur la qualité, la composition ou les diplômes sont fréquentes et ce ne sont pas les quelques contrôles estivaux par la DGCCRF, médiatisés pour faire belle allure, qui changeront la donne. Pour contrer la contrefaçon, s’est développée progressivement l’institution de labels afin de tenter d’éclairer les consommateurs, mais les enjeux commerciaux liés à leur délivrance sont tels que chacun défend sa paroisse. Ainsi, il faut savoir qu’en 2016, les signes AOP, IGP et Label rouge représentaient un chiffre d’affaires d’environ 30 milliards

d’€ HT (au moment de la 1ère mise en marché) dont 21 milliards pour les vins et eaux de vie.

I Quelques éléments

pour s’y retrouver

En France, par l’Etat, mais aussi en Europe ont été mis en place des « signes » officiels permettant d’informer les consommateurs sur la qualité et l’origine: – garantie de l’origine (AOC et AOP ; IGP)

L’Appelation d’origine protégée (AOP) désigne un produit répondant à un cahier des charges précis et dont toutes les étapes de fabrication (production, transformation,

élaboration) sont réalisées dans une même zone géographique. Ces facteurs naturels et humains spécifiques confèrent au produit ses caractéristiques. C’est un signe européen qui protège le nom du produit dans toute l’Union européenne (Note de la revue: et qui a vocation à remplacer l’AOC national). Note de la Revue: Ici, tant la production que les autres étapes, donc l’ensemble des caractéristiques sont réalisées dans la même zone géographique et issues de cette même zone. On rejoint la notion de production issue d’un terroir avec des traditions intangibles. L’origine du produit alimentaire est certifiée et les étapes qui suivent relèvent d’un savoir-faire traditionnel assurant la qualité nécessaire et habituelle.

étape vers l’AOP et permet une protection de la dénomination sur le territoire français, en attendant son enregistrement et sa protection au niveau européen.

L’Indication géographique protégée (IGP) désigne un produit répondant à un cahier des charges précis et dont au moins une étape de fabrication (production, transformation, élaboration) est réalisée dans une zone géographique définie. Ces facteurs naturels et humains spécifiques confèrent au produit certaines de ses caractéristiques. C’est un signe européen qui protège le nom du produit dans toute l’Union européenne. – garantie de la qualité supérieur ( Label rouge)

L’Appelation d’origine contrôlée (AOC) désigne des produits répondant aux critères de l’AOP. Elle constitue une

Le label rouge est un signe français qui désigne des produits qui, par leurs conditions de production ou de fabrication, ont


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les dossiers de noirmoutier un niveau de qualité supérieure par rapport aux autres produits courants similaires. Par exemple, c’est un ODG (organisme de Défense et de Gestion) reconnu par l’INAO, qui assure depuis 1991 la gestion du Label Rouge « Sel Marin de l’Atlantique ».

L e s e l de Guérande « Le Guérandais » (coopérative « Les salines de Guérande ») est à ce jour le seul sel marin à pouvoir se prévaloir du Label Rouge pour le gros sel et le sel moulu (fin). Le sel de Guérande est strictement contrôlé par un organisme certificateur officiel (CERTIPAQ), dans le cadre de l’obtention du Label Rouge. – garantie d’une traditionnelle (STG)

recette

La spécialité traditionnelle garantie (STG) protège une recette traditionnelle.

– garantie du respect de l’environnement (Agriculture biologique).

L’Agriculture biologique garantit un mode de production et de transformation respectueux de l’environnement et du bien-être animal. Les règles qui encadrent le mode de production biologique sont les mêmes dans toute l’Europe, et les produits importés sont soumis aux mêmes exigences. Quels sont les acteurs ? L’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) instruit les demandes pour les signes AOP / AOC, IGP, le Label rouge et le STG; il supervise les contrôles et protège les produits contre les usurpations. La Direction générale de la Concurrence, de la consommation et de la Répression des Fraudes – DGCCRF (relevant du Ministère de l’Economie et des Finances) se doit de protéger le consommateur contre toute tromperie et lutte contre les fraudes (dans le secteur du sport, c’est l’Inspection de la Jeunesse et des Sports qui est censée assurer ces missions). Le Ministère de l’Agriculture

et de l’Alimentation définit la politique en matière de valorisation des produits agricoles ou alimentaires, et encadre le dispositif des signes d’identification de la qualité et de l’origine.

I Le sel et les signes (labels) On a vu plus haut qu’il ne fallait surtout pas confondre l’AOP et l’IGP et que des tolérances européennes liées à l’IGP et à son cahier des charges pouvaient entraîner des « aberrations » puisqu’aucune obligation de production dans la zone géographique n’était obligatoire. LE DANGER: La confusion entre l’AOP et l’IGP ne doit donc surtout pas être faite par les consommateurs! Or ceuxci feront sans doute souvent

labels et nuances Entre l’AOP et l’IGP, malgré l’obligation de suivre un cahier des charges précis, une nuance est d’importance: pour l’AOP toutes les étapes de fabrication doivent être réalisées dans une même zone géographique alors que pour l’IGP une seule étape de fabrication dans la zone géographique est nécessaire. Le produit mentionné est le plus souvent un produit agricole

ou une denrée alimentaire. Son but est, certes, de lutter contre la contrefaçon mais comme il n’exige qu’une seule des trois étapes, il laisse tout loisir concernant l’origine des matières premières utilisées si par exemple la transformation a lieu dans la zone géographique considérée. Pour le sel, c’est un ODG (organisme de Défense et de Gestion) reconnu par l’INAO, qui pour tâche de

gérer et contrôler le respect du cahier des charges de l’IGP. Il contribue également à la mission d’intérêt général de préservation et de mise en valeur des marais salants et des savoir-faire traditionnels de production Le sel de Guérande et la Fleur de sel de Guérande bénéficiant de l’IGP sont contrôlés par un organisme certificateur officiel (CERTIPAQ).

l’erreur de s’attacher davantage à un nom géographique pour des raisons familiales, historiques, d’image ou de sensibilité sans prêter attention au plus important, le signe luimême, AOP ou IGP. Ainsi, les tolérances liées à l’IGP – et selon certaines sources l’assouplissement récent concernant le cahier des charges – permettent aujourd’hui avec des porcs élevés dans différents pays européens de fabriquer un Jambon de Vendée ou du Saucisson corse avec un signe IGP! Sel et AOP: Pour le sel, le signe AOP a l’intérêt de garantir l’origine des matières premières et donc de respecter la notion de terroir tout en apportant la garantie nécessaire aux consommateurs, depuis l’origine des matières premières jusqu’au produit fini. (En 1992, les paludiers associés de la Société TRAD Y SEL ont soutenu un dossier A.O.C. auprès de l’INAO et du Ministère de l’Agriculture, mais sans l’obtenir.) Sel et IGP: En revanche, pour ce qui concerne la Fleur de sel, on peut constater que pour le signe IGP le cahier des charges autorise les opérations de tamisage et de séchage. Or, des producteurs de la profession considèrent que la Fleur de sel, produit « délicat et très fragile » ne doit pas être soumise à ce genre de contraintes mécaniques qui relève plus du conditionnement industriel


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Fleur de Sel

IGP de Guérande

qu’artisanal et traditionnel. De plus, ceux qui maintiendront la tradition pour ces opérations ne pourront en faire état! Enfin, il apparaît important de prendre en compte la spécificité de la récolte traditionnelle et manuelle avec des outils appropriés. Un exemple d’IGP: le sel de Guérande Le sel de Guérande est un sel de mer naturel et artisanal récolté à la main par les paludiers. Attachés à leur territoire et à leur métier, quelques paludiers décident d’opter pour la solidarité et créent en 1972 un groupement d’exploitants, le Groupement des Producteurs de Sel. Dans les années 80, les marais salants de Guérande étaient voués à disparaître pour être remplacés par des projets immobiliers et touristiques (une marina). Les paludiers résistent et transforment en 1988 leur groupement en coopérative dont le but est d’assurer une exploitation durable des marais salants et la promotion du sel artisanal et traditionnel (d’origine). Grâce à cette coopérative agricole, Les salines de Guérande avec 60 salariés, les paludiers – environ 210 paludiers exploitants – maîtrisent leur filière économique et gèrent donc la production, le conditionnement, le stockage et la commercialisation. Et l’équilibre de l’approvisionnement puisque selon les conditions météorologiques, un oeillet peut donner de 100 kg à 3 tonnes. En 2017, le chiffre d’affaires de la coopérative a été de 23 millions d’€. En 2012, le « Sel de Guérande» et la « Fleur de sel de Guérande» sont les premiers sels à obtenir le signe IGP. Cet IGP est à cheval sur deux départements, la LoireAtlantique et le Morbihan. Les délimitations sont: La Loire au Sud, l’Océan atlantique à l’Ouest, la Vilaine et le Canal de Nantes à Brest au Nord; les limites Est sont

celles de l’unité territoriale du Conseil Général de LoireAtlantique nommée « Bassin de Saint-Nazaire », de Guenrouët à Malville. Les paludiers de la Coopérative « Les Salines de Guérande » produisent un sel marin IGP qui est récolté manuellement, non lavé après récolte et sans ajout d’additifs. Bien que l’on aurait pu penser que tous les paludiers s’en seraient satisfaits, cela n’est pas le cas pour de petits producteurs traditionnels indépendants; en effet, certains considèrent que les adhésions, contrôles et cahiers des charges entraînent des coûts démesurés par rapport à l’intérêt recueilli et font donc la part belle aux grosses structures. L’IGP pour une zone géographique entraînant l’obligation de se faire labelliser par tous les producteurs de la zone sous 5 ans, certains avaient lancer une procédure d’opposition à l’IGP. Rappelons qu’historiquement de 1840 à 1960, les paludiers durent faire face à une crise due à la concurrence du sel de mine (à l’international) et

du sel de Méditerranée. Sans compter que le développement des achats de réfrigérateurs ont réduit à néant les utilisations de sel pour la conservation des aliments. La chute du nombre des paludiers s’en ressenti, ceux-ci passant de 600 à 900 paludiers en 1840 à seulement 248 en 1973. Dans les années 1970 à 1990, c’est le renouveau avec la coopérative et une société de négoce – qui deviendra totalement autonome en 1997 – ainsi que par la création en 1990 d’une Association pour la Promotion du sel de l’Atlantique (Aprosela). Mais malgré ce renouveau, le combat commercial continue contre les sels industriels. Le cahier des charges de l’IGP de Guérande Dans le paragraphe « Description du Produit » sont mentionnés les éléments suivants: « Le sel de Guérande et la fleur de sel de Guérande sont des sels marins récoltés manuellement provenant exclusivement des marais salants de la Presqu’île guérandaise. Ce sont des sels marins non raffinés et non lavés

après récolte. Ils sont constitués essentiellement de cristaux de chlorure de sodium, mais aussi naturellement d’autres sels minéraux et oligo-éléments. *Ces deux types de sel se forment lors de cristallisations en marais salants : – le sel gris dénommé « sel de Guérande» qui cristallise sur le fond des œillets * en argile naturelle de la Presqu’île guérandaise. – le sel blanc, plus léger, dénommé « fleur de sel de Guérande» qui cristallise en surface des œillets* en argile naturelle de la Presqu’île guérandaise Fleur de sel de Guérande La fleur de sel de Guérande est constituée de cristaux légers, fins et friables qui se forment à la surface de la saumure des œillets des salines productives en sel gris, sous l’influence de conditions climatiques favorables : vent et soleil. Elle se teinte parfois d’une légère couleur rosée due à la présence d’une algue microscopique (Dunaliella salina) et d’une flore bactérienne halophile. (…)


Fleur de Sel les dossiers de noirmoutier

– Sa production peut être inexistante même en présence de sel gris. Elle représente environ 5% de la production totale de sel de Guérande. Les cristaux de fleur de sel trop humides pouvant s’agglomérer, la fleur de sel peut être séchée après égouttage naturel afin d’améliorer la fluidité lors du conditionnement. – La fleur de sel se différencie du sel gris par sa cristallisation en surface des œillets des salines productives en sel gris et par sa couleur (blanche en raison de l’absence de contact avec le fond des œillets). (…) – L’ajout d’additif est interdit.

Les deux types de sel doivent répondre à des caractéristiques précises: (d’autres règles précises sont également prévues en terme de traçabilité et de conditionnement). (schéma 1 ci-contre) Le cahier des charges mentionne également la description de la méthode d’obtention: (schéma 2 ci-contre) L’utilisation du mode d’exploitation traditionnelle des salines permet une épuration naturelle des eaux et décantation des matières en suspension tout au long du circuit de l’eau jusqu’à l’arrivée dans les œillets où le sel et la fleur de sel sont récoltés. Cette façon de faire garantit la qualité de l’eau utilisée. Les salines sont constituées par un ensemble de bassins entrelacés de forme géométrique. Cette structure est due à des facteurs historiques et topographiques, liés aux propriétés des sols. La structure traditionnelle des salines doit être conservée. La fleur de sel est récoltée manuellement par écrémage à la surface des œillets des salines productives en sel gris à l’aide d’un outil spécifique

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adapté, la lousse* (opération dénommée «cueillette») avant qu’elle ne précipite au fond des bassins où elle n’est plus récoltée comme fleur de sel. La méthode de production repose sur des bases qui en font l’un des plus anciens agro-systèmes maritimes de tout le littoral atlantique français. Les paludiers de la Presqu’île guérandaise maîtrisent une technique qui leur a valu par le passé d’être appelés à Noirmoutier, dans le Morbihan et dans les Antilles pour aménager des salines à la «mode de Guérande», pour mettre en application leurs connaissances en matière de terrassement, d’hydraulique salicole (plus fines à Guérande qu’ailleurs en raison de données climatiques moins favorables) et de production de sel. (Sources: Aprosela / G. Buron) A l’initiative de quatre ministères (Agriculture, Culture, Ecologie et Tourisme), les marais salants de Guérande ont été officiellement proclamés « Site Remarquable du Goût » en 1995 pour le lien entre le sel de Guérande et le patrimoine culturel, environnemental et touristique des marais salants. La note salée de Bruno Retailleau C’est dans ce contexte que, le 6 septembre 2018, Bruno Retailleau a appelé l’attention du ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur l’impact qu’une reconnaissance de l’indication géographique protégée (IGP) pour « Sel et « Fleur de sel » de Camargue » aurait sur l’image de la « Fleur de sel » récoltée de façon traditionnelle, manuellement et à la surface de la saumure. En effet, la technique de récolte du sel de Camargue est différente de celle utilisée par les producteurs du Sel marin sur la Côte atlantique, notamment car en Camargue elle ne se fait pas à la surface. Si le projet « Fleur de sel de

Fleur de Sel

Camargue » bénéficiait d’une IGP, ajoute Bruno Retailleau, cela reviendrait à remettre en cause la dénomination « Fleur de sel » au détriment d’une méthode traditionnelle et reconnue du consommateur. Cette fleur de sel, moins pure, déprécierait à terme (l’image) du produit. Bruno Retailleau poursuit: « le 13 mai 2018, la demande d’enregistrement d’une IGP « Sel et Fleur de sel de Camargue » a été validée par le comité national de l’institut national des appellations d’origine (INAO). Or, son cahier des charges est en contradiction avec le cadre réglementaire définissant la fleur de sel dans plusieurs États membres de l’Union européenne. En effet, le cahier des charges de la « Fleur de sel de Camargue » précise que la fleur de sel n’est pas récoltée en surface, précisant que la fleur de sel cristallisée en surface est poussée par le vent vers le bord où elle s’accumule et tombe dans sa saumure originelle. » Des exemples de façons de produire dans d’autres pays européens comme l’Espagne ou le Portugal, mais aussi en Croatie, en Italie et en Slovénie sont fournis par Bruno Retailleau: « Au contraire, écrit-il, en Espagne, lorsque la couche flottante de sel cristallisé à la surface de l’eau des cristalloirs, par l’action exclusive du vent et du soleil est collectée manuellement et sans être lavée ou sans que soit ajouté un ingrédient, elle peut être appelée fleur de sel ». Il en est de même au Portugal, où la dénomination fleur de sel ne vaut que « lorsque le sel est collecté manuellement, quotidiennement et exclusivement de la couche cristalline surnageante de la solution saline dans les cristalloirs ». Cette appellation appelle les mêmes techniques en Croatie, en Italie et en Slovénie.

En France, une demande d’enregistrement d’une spécialité traditionnelle garantie « fleur de sel » a été déposée auprès de l’INAO par les producteurs de sel marin de la côte atlantique pour protéger les productions artisanales et traditionnelles de sel récolté manuellement et à la surface de l’eau ; cette demande est toujours à l’étude. Aussi, dans la mesure où l’homologation de cette IGP ne se fera que par un arrêté interministériel, Bruno Retailleau demande au Ministre de l’Agriculture et de l’alimentation de bien vouloir lui indiquer ce qu’il compte faire sur le dossier. Parallèlement à l’action de Bruno Retailleau, le Conseil départemental de la Vendée a voté une « Motion relative à l’appellation Fleur de Sel» . On précise ici que sont particulièrement concernés par le sujet les paludiers de l’Atlantique et notamment ceux de Noirmoutier (Vendée). Le département de la Vendée rappelle que le 13 mai 2018 la demande d’IGP pour « le sel et la fleur de sel de Camargue » a été validée par l’INAO, et que les conseillers départementaux s’inquiètent des conséquences pour les paludiers de l’Atlantique et donc ceux de Noirmoutier qui récoltent la fleur de sel par écrémage à la surface des oeillets des salines productives à l’aide d’un outil spécifique

adapté, la lousse. Or, précise le département, « la méthode de production du groupe industriel Salins (producteurs du sel camarguais) et la nature de ses produits ne sont en rien comparables à celles des producteurs de nos marais salants. » Il ajoute « que le cahier des charges de la « fleur de sel de Camargue » est en contradiction avec ces pratiques ancestrales puisque la fleur de sel n’y est pas récoltée en surface, celle-ci – cristallisée en surface – étant poussée par le vent vers le bord où elle s’accumule et tombe dans sa saumure originelle. » Les Conseillers départementaux de Vendée demandent donc au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation « de ne pas homologuer cette IGP « Fleur de sel de Camargue » mais (d’homologuer seulement) « Sel de Camargue » afin de ne pas déprécier ce produit de terroir de qualité et de ne pas mettre en péril l’activité économique des sauniers de l’Atlantique. » Nous écrivions plus haut qu’en 2016, les signes AOP, IGP et Label rouge représentaient un chiffre d’affaires d’environ 30 milliards d’€ HT (au moment de la 1ère mise en marché). La guerre des labels ne fait donc que commencer pour ces raisons. Elle suit la bataille des années 80, où le Groupement des Producteurs de Sel rencontra des difficultés avec son principal négociant


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(les Salins du Midi devenu Groupe Salins) et créa alors une coopérative « les Salines de Guérande » afin de pouvoir négocier et commercialiser sa production. Le groupe Salins – qui a fait la demande d’IGP pour la Fleur de sel de Camargue – a donc bien compris l’importance d’obtenir des IGP. Le groupe Salins qui possède la marque de sel de table La Baleine est dirigé par Hubert François (ex-Grands Moulins de Paris) et détient 15 sites de production en Camargue dont ceux d’Aigues-Mortes et des Salins de Giraud ainsi qu’à l’étranger, en Espagne, Italie, Tunisie, Sénégal….Le groupe comprend 1 500 personnes et réalise un CA de 300 millions d’euros.

Mais il possède aussi 170 hectares de marais salants à Guérande (sur les 2000 ha), ce qui lui permet de mentionner l’IGP Fleur de sel de Guérande sur des boîtes La Baleine en précisant sur son site : « Le sel La Baleine Guérande est récolté à la main dans les marais salants de Guérande par des paludiers indépendants selon un savoir-faire traditionnel.» Mais en Camargue, la Fleur de sel n’est pas récoltée de la même manière. Les paludiers de l’Atlantique entendent donc bien que soit prise en compte cette différentiation essentielle vis-àvis des consommateurs. Les IGP représentaient déjà en 2017, 42% des ventes pour seulement 26% des volumes. /

Extrait du dépôt de la demande d’enregistrement IGP Sel de Camargue et Fleur de Sel de Camargue


Dernières nouvelles

20 sel et paludiers

LES SALINS DU MIDI Déposent une nouvelle marque C’est le 21 décembre 2018 - donc très récemment et alors que des actions sont menées pour éviter différentes confusions supposées - (voir notre dossier central) - que la Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l’Est a effectué un dépôt à l’Institut national de la Propriété (INPI) pour la marque “Le Saunier de Noirmoutier”. On rappelera que c’est le 6 septembre 2018 que Bruno Retailleau avait

appelé l’attention du ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur l’impact qu’une reconnaissance de l’indication géographique protégée (IGP) pour “Sel et « Fleur de sel » de Camargue” (Salins du Midi) aurait sur l’image de la «Fleur de sel» récoltée de façon traditionnelle, manuellement et à la surface de la saumure. “La marque Le Saunier de Noirmoutier a été publiée le 11 janvier 2019 pour les produits Sel alimentaire sous toutes ses formes en provenance de l’île de Noirmoutier, sel de cuisine et sel de table en provenance de l’île de Noirmoutier, sel alimentaire, à savoir fleur de sel en provenance de l’île de Noirmoutier.” Numéro 4510476

Par arrêté du 6 mars 2019, le préfet de la Vendée, Benoît Brocart, a signé au bénéfice de réseau de transport d’électricité (RTE) une dérogation pour arrachage, enlèvement et transport de spécimens d’une espèce végétale protégée et pour perturbation intentionnelle de spécimens d’espèces animales protégées. Cette autorisation était nécessaire pour permettre à RTE de réaliser les travaux de raccordement électrique terrestre du parc éolien en mer au large des îles d’Yeu et de Noirmoutier. Il s’agit là de la dernière des dix autorisations sollicitées par la société des éoliennes en mer îles d’Yeu et de Noirmoutier (EMYN) et réseau de transport d’électricité (RTE) avant de pouvoir construire le projet de parc éolien en mer au large des îles d’Yeu et de Noirmoutier. Rappelons que les porteurs de projet ont déposé leurs premières demandes d’autorisation le 9 mai 2017.

© Le Reporter sablais

parc éolien yEU / nOIMOUTIER

Benoît Brocart, préfet de la Vendée

Cette décision vient donc marquer un terme à 22 mois d’instruction au cours desquels ont été consultés plusieurs collectivités territoriales, associations, comités, fédérations, services de l’État, commissions administratives, ainsi que le public qui a pu s’exprimer lors d’une enquête publique qui s’est tenue du 4 avril au 23 mai 2018 et lors de consultations du public dont la dernière a eu lieu du 5 au 25 février 2019. Avec une puissance totale de 496 MW, le parc doit produire en moyenne 2 000 GWh par an, soit la consommation électrique annuelle de 850 000 personnes.

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