Lee UFAN (extrait)

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LEE UFAN Renaud Siegmann

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ISBN : 978-2-35278-081-6

SODIS : 718602 0

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N N A M G E I S D U A N E R S E T S I T R S

A South Korean artist, painter and universal sculptor, Lee Ufan belongs to a select circle of the greatest creators of our time. Lee Ufan is a visiting professor at the Ecole Nationale Superieure des Beaux-Arts in Paris, and he was the subject of a retrospective exhibition at the Galerie nationale du Jeu de Paume in 1997. Winner of the 2001 Praemium Imperiale in the category of painting, Lee Ufan represented his country at the 2007 Venice Biennale. In June 2011, an exhibition of new works will be dedicated to his career at the Guggenheim Museum in New York. A philosopher and scholar of classical tradition, Lee Ufan lives and works between Asia, Europe, and the United States. All in refined lines, his works in progress – in the deepest sense of the expression “work in progress” – is represented by the most prestigious international museums, as well as the most important private collections.

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The collection “Ateliers d'Artistes” has as it's objective the introduction of the reader to the core of the artistic act. It proposes to enable the rigorous and exalting enterprise of living in the work of the one who invents forms and objects, of following the creative process and learning how to read an oeuvre with insight. Each of the books of this collection is an invitation to such an undertaking. Abundantly illustrated with photographs that reveal the atmosphere of a site, each book relies on conversations which restitute the painter or sculptor's thoughts.

Artiste sud-coréen, peintre et sculpteur universel, Lee Ufan appartient au cercle très fermé des plus grands créateurs de notre temps. Lauréat du Praemium Imperial 2001 dans la catégorie peinture, Lee Ufan représente son pays à la Biennale de Venise 2007. Professeur invité à l’Ecole nationale supérieure des BeauxArts de Paris, il fait également l’objet d’une rétrospective à la Galerie du Jeu de Paume en 1997. Philosophe et lettré de tradition classique, Lee Ufan vit et travaille entre Paris, New York et Tokyo. Tout en formes épurées, son œuvre en progrès, au sens le plus profond de l’expression « work in progress », est aujourd’hui présent dans les plus prestigieux musées du monde, ainsi que les plus importantes collections privées.

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a collection “Ateliers d’Artistes” a pour objet d’introduire le lecteur au cœur de la création de l’artiste : vivre le travail de celui qui invente des formes et des objets, en suivre la démarche, apprendre à lire son œuvre représente la plus précieuse et la plus difficile des entreprises. C’est ce que propose chacun des livres de cette collection. Abondamment illustrés, ils dévoilent l’atmosphère d’un atelier ou d’un lieu autour d’entretiens qui restituent la pensée de l’artiste, peintre ou sculpteur.

P H O T O S : S H I G E O

A N Z A I ,

T H O M A S

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LEE UFAN


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LEE I N T E R V I E W : R E N A U D

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P H O T O G R A P H I E S : S H I G E O A N Z A I , T H O M A S

J O R I O N


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Interview Renaud Siegmann et Lee Ufan Ateliers de Lee Ufan, Paris, Kamakura. Conversation Renaud Siegmann and Lee Ufan Studios of Lee Ufan, Paris, Kamakura. © 2010 Thalia Édition, Paris

Éditeur : Publisher: Photographies de : Photographs of: Création graphique : Graphic design:

Corrections et relecture en français : French text proofreading: Traduction en anglais : English text translation: Corrections et relecture en anglais : English proofreading:

Remerciements à : Acknowledgements:

Thalia Édition, Paris

© 2011 Shigeo Anzai © 2011 Thomas Jorion Piero Brogi, Paris sxtn@free.fr

Pascal Abel

Sara Cvetkovski

Christiane Moulinier

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© Thalia Édition ISBN : 978-2-35278-081-6 : 718602 0 Imprimé en Italie par Grafiche Flaminia, Foligno (Union Européenne) Dépôt légal : février 2011


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INTRODUCTION

8 INTERVIEW

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INTERVIEW

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BIOGRAPHIE


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Renaud Siegmann

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South Korean artist, painter and universal sculptor, Lee Ufan belongs to a select circle of the greatest creators of our time. Born in 1936 in Kyonsangnamdo (South Korea), he embodies a man of timelessness. He is the antithesis of the star artist! Lee Ufan is a visiting professor at the Ecole Nationale Superieure des Beaux-Arts in Paris, and he was the subject of a retrospective exhibition at the Galerie nationale du Jeu de Paume in 1997. Winner of the 2001 Praemium Imperiale in the category of painting, Lee Ufan represented his country at the 2007 Venice Biennale. In June 2011, an exhibition of new works will be dedicated to his career at the Guggenheim Museum in New York. A philosopher and scholar of classical tradition, Lee Ufan lives and works between Asia, Europe, and the United States. He is the historical leader of the Mono-ha Group, literally “The School of Things”, which he founded in post-war Japan. Initially, he wanted to be a writer-philosopher, rather than a painter-sculptor. Half a century later, his visual language always speaks of the deep humanism that incites him. All in refined lines, his works in progress – in the deepest sense of the expression “work in progress” – is represented by the most prestigious international museums, as well as the most important private collections. By its metaphysical density rather than its controlled reduction, Lee Ufan’s art is anchored in Eastern philosophy, namely Zen. Neither exactly monochrome, nor exactly geometrical, his paintings are also distinguishable from Western minimalism, like his sculptures, which are as powerful as they are meditative. Renaud Siegmann

INTRODUCTION

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rtiste sud-coréen, peintre et sculpteur universel, Lee Ufan appartient au cercle très réservé des plus grands créateurs de notre temps. Né en 1936 à Kyonsangnamdo (Corée du Sud), il incarne l’homme de l’intemporel. C’est l’antithèse de l’artiste-star ! Professeur invité à l’École nationale supérieure des beauxarts de Paris, il fait l’objet d’une rétrospective à la Galerie nationale du Jeu de Paume en 1997. Lauréat du Praemium Imperial 2001, dans la catégorie peinture, Lee Ufan représente son pays à la Biennale de Venise 2007. En juin 2011, c’est au musée Guggenheim de New York qu’une exposition d’œuvres inédites consacre aujourd’hui sa carrière. Philosophe et lettré de tradition classique, Lee Ufan vit et travaille entre l’Asie, l’Europe et les États-Unis. Leader historique du Groupe Monoha, littéralement l’« École des choses » dont il fut l’initiateur dans le Japon de l’après-guerre, Lee Ufan voulut d’abord être écrivain-philosophe plutôt que peintre-sculpteur. Un demi-siècle plus tard, son langage plastique parle toujours de l’humanisme profond qui l’anime. Tout en formes épurées, son œuvre en progrès – au sens le plus profond de l’expression work in progress –, est représenté par les plus prestigieux musées internationaux, ainsi que dans les plus importantes collections privées. Par sa densité métaphysique, plutôt que sa réduction contrôlée, l’art de Lee Ufan s’ancre dans la philosophie asiatique, notamment le zen. Ni vraiment monochromes, ni vraiment géométriques, ses peintures se distinguent ainsi du minimalisme occidental, comme ses sculptures aussi puissantes que méditatives.

INTRODUCTION

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Renaud Siegmann : Ayant reçu une éducation lettrée qui comprenait les formes traditionnelles de la calligraphie, de la poésie et de la peinture, quelle place accordez-vous dans votre œuvre, à ces notions d’héritage philosophique et culturel ? Lee Ufan : Pour les artistes de ma génération, il était normal, dans des familles traditionnelles, de recevoir ce type d’éducation, d’étudier l’écriture au pinceau, l’anthologie des grands poètes chinois, japonais, coréens, etc. Mais quand on parle, en Occident, des artistes asiatiques, on s’aperçoit la plupart du temps qu’ils sont associés, par une sorte de réflexe culturel assez compréhensible, néanmoins interprétatif, à des formes de particularismes ethniques, une sorte de folklore extrême-oriental légèrement exotique… Au risque d’empêcher une lecture approfondie, pour ne pas dire élargie, de l’art d’aujourd’hui et de ses questions universelles.

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De quelle manière intégrez-vous cette notion d’universalité, ce langage dépouillé de tout régionalisme dans votre mode de pensée et de création ? À mes débuts, j’ai abordé différentes formes occidentales de l’art moderne et de l’art contemporain : dadaïsme, surréalisme, art informel, action painting. À l’époque, je n’avais aucun accès à ce type de création, si ce n’est par les catalogues d’exposition. En fait, ce sont ces œuvres qui m’ont ouvert à mon propre passé. Après ça, j’ai découvert Kandinsky, ses apports théoriques sur la ligne et le point. Là-dessus, j’ai travaillé ces modèles avec une mémoire gestuelle issue de ma formation classique, en essayant d’intégrer tous mes acquis, mes ressources plastiques dans un contexte plus contemporain. Ce qui pose aujourd’hui le problème suivant : comment aborder une œuvre marquée par l’héritage sensible de sa propre origine, dans un monde dominé par la vision occidentale des choses ?

A M E S D É B U T S , J ’ A I A B O R D É D I F F É R E N T E S F O R M E S O C C I D E N TA L E S

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How do you integrate this notion of universality, this language stripped of any regionalism, in your thinking and creativity? When I started, I approached various Western forms of art: Dadaism, Surrealism, Informal Art, action painting. At the time, I had no access to this type of creation, except through exhibition catalogs. In fact, these are the works that have opened me to my own past. After that, I discovered Kandinsky’s theoretical contributions on lines and points. I worked on these models with gestures from my memory, drawn from my classical education, trying to integrate all my previously acquired skills and visual resources in a more contemporary context. Today, this sets the following problem: how to approach a work marked by the legacy of its own origin in a world dominated by the Western view of things?

9 W H E N I S TA R T E D , I A P P R OA C H E D VA R I O U S W E S T E R N F O R M S

Renaud Siegmann: Having been educated in classical literature that included traditional forms of calligraphy, poetry, and painting, what place do you give to these notions of philosophical and cultural heritage in your work? Lee Ufan: For the artists of my generation, in traditional families, it was normal to get this type of education: studying how to write with a brush, studying Chinese, Japanese, and Korean poets, etc. But when we speak of Asian artists, in the West, most of the time we see that they are related, by a kind of cultural reflex which is quite understandable, but nevertheless interpretative, to forms of ethnic particularities, a slightly exotic type of Far Eastern folklore – at the risk of preventing a thorough, not to say expanded reading, contemporary art and its universal issues.


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What impact had the Mono-ha movement, which you led in post-war Japan, on your artistic expression? Upon arriving in Tokyo around 1956, I had intended to study philosophy, literature, and to become a writer. Also, I loved painting, but I didn’t have any ambitions beyond it. Meanwhile, I was interested in social and political issues in relation to my own divided country, which was later reunified, but under the power of a totalitarian regime. Simultaneously, the world was experiencing a wave of protests against the Vietnam War: May ‘68, the NonAligned Movement, the hippie movement, etc. Finally, there were lots of changes underway with the youth, between frustration and rebellion… This fervor, this atmosphere, this review called out to me. I asked myself how to re-transcribe this widespread awareness on an artistic level, beyond standards, conventions? It was in these circumstances that I started working on gestures, the body, and space and time. With other artists, I joined in founding the Mono-ha movement, literally “The School of Things”, which proposed to relearn how to see the world as it is, without subjecting it to a representation which is opposed to Man, but by focussing the visual reality of works on relations between their different components.

SEE THE WORLD AS IT IS

Quel impact le mouvement Mono-ha, dont vous avez été le chef de file dans le Japon de l’après-guerre, a-t-il eu sur votre expression artistique ? En arrivant à Tokyo vers 1956, j’avais le projet d’étudier la philosophie, la littérature, et de devenir écrivain. Par ailleurs, j’aimais peindre, mais sans avoir de vocation plus que cela. Parallèlement, je m’intéressais de près aux questions sociales et politiques, par rapport à mon pays divisé, qui fut ensuite réunifié. Mais sous le pouvoir d’un régime totalitaire. Simultanément, le monde entier connaissait une vague de contestation, contre la guerre du Vietnam, Mai 68, les Pays non-alignés, le mouvement hippie, etc. Enfin, il y avait tout un tas de changements en cours, dans la jeunesse, entre frustration et rébellion… Cette ferveur, cette ambiance, cette critique m’ont interpellé. Je me demandais de quelle manière pouvaiton retranscrire cette prise de conscience généralisée sur le plan artistique ? Au-delà des normes, des conventions ? C’est dans ces circonstances que j’ai débuté mon travail sur la gestualité, le corps, l’espace, le temps. Avec d’autres artistes, j’ai participé à la fondation du mouvement Mono-ha, littéralement l’« École des choses », qui proposait de réapprendre à voir le monde tel qu’il est, sans en faire l’objet d’une représentation qui l’opposerait à l’Homme. Mais en concentrant la réalité visuelle des œuvres sur leurs relations entre les différentes parties qui les composent.

VOIR LE MONDE TEL QU’IL EST

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Rooted in Asian philosophy – Zen, among others – these ideas have led your group to develop a nonconformist, minimalist style where void occupies a prominent place, and which prefers natural materials to manufactured ones… This juxtaposition of things, objects, and their meeting in my installations like a direct sensation is what I have named by the generic term Relatum, unchanged since 1972. Without me being truly aware, there was similar research going on in the United States with Land Art. In Europe, too: Italy, with Arte Povera, France, with the Support-Surface group. During the same period, there was a convergence of affinities and choices among artists from different backgrounds.

A CONVERGENCE OF AFFINITIES

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UNE CONVERGENCE D’AFFINITÉS

Ancrées dans la philosophie asiatique – le zen entre autres –, ces réflexions ont mené votre groupe à développer un style minimal où le vide occupe une place primordiale, et à utiliser de préférence des matériaux naturels, non fabriqués, anticonformistes… Cette confrontation des choses, des objets, leur rencontre dans mes installations comme une sensation directe, je l’ai surnommée par ce terme générique Relatum, inchangé depuis 1972. Sans en avoir réellement conscience, on observait des recherches similaires aux États-Unis avec le Land Art. En Europe aussi, en Italie avec l’Arte Povera, en France avec le groupe Support-Surface. Au cours de la même période, il existait une convergence d’affinités et de choix chez des artistes originaires d’horizons très différents.


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RÉALISER ENSEMBLE UN TRÈS BEAU PROJET

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Ouvert au printemps dernier sur l’île de Naoshima, dans le sud du Japon, votre musée monographique se veut-il en dehors de la globalisation ? Avant tout, j’aimerais redire que l’idée d’un musée entièrement consacré à mon œuvre me remplit de joie. Évidemment, tous les artistes rêvent de connaître cet événement une fois dans leur vie. En même temps, il n’est pas nécessaire que cela devienne une fin en soi ; j’entends un objectif spécial dont les artistes auraient forcément besoin ou qu’ils devraient absolument atteindre par ambition personnelle. En revanche, parce qu’un artiste, selon moi, doit pouvoir exercer son talent tout au long de son existence, pourquoi ne verrait-il pas un beau jour son propre musée sortir de terre ? Enfin, un lieu privilégié qui lui offrirait un point de vue sur son œuvre. Quelque chose qui s’imposerait plus exactement comme une preuve de son engagement artistique. Voilà ce qui compte ! Ce beau jour, que vous évoquez avec beaucoup de modestie, de quelle façon est-il arrivé pour vous ? Il y a trois ans environ, Soichiro Fukutake, président de Naoshima Art Museum Foundation, m’a contacté pour me proposer de construire mon propre musée. Ce à quoi j’ai réfléchi avec beaucoup d’attention ; je veux dire : à son concept, à cette idée. Bref, j’ai consulté un de mes très bons amis architectes qu’est Tadao Ando. À son tour, il a été magnifique, en me répondant d’accord sur le champ. Étant très proches depuis bien des années, cette proximité nous a permis de réaliser ensemble un très beau projet. Il faut dire que nous communiquons entre nous à merveille.


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How did “your day”, which you mention with great modesty, take place ? About three years ago, Soichiro Fukutake, President of the Naoshima Art Museum Foundation, contacted me to offer me to build my own museum. I thought about it very carefully: its concept, the idea. In short, I consulted one of my very good friends, the architect Tadao Ando. Presently, he was wonderful as he agreed with me on the spot. Being very close for many years let us realize this beautiful project together. I must say that we thoroughly understand each other.

19 REALIZE THIS BEAUTIFUL PROJECT TOGETHER

Opened last spring on Naoshima Island in southern Japan, has your monographic museum nothing to do with globalization? First of all, I’d like to say again that the idea of a museum entirely dedicated to my work fills me with joy. Obviously, all artists dream of experiencing this event once in their lives. At the same time, it is not necessary for this to become an end in itself. I mean a special objective that all artists would necessarily need or should absolutely be achieved by personal ambition. However, according to me, since an artist has to be able to exercise his talent throughout his life – why should he not see the day when his own museum starts ? Finally, a privileged place that would offer a perspective on his work. Something that would be imposed more precisely as a proof of his artistic commitment. That’s what counts!


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Is this a habit of yours, to keep up with this state of vigilance that we could compare to a principle of uncertainty? Basically, things never work as you want, or at least rarely. For example, when I paint a line, it’s bound to have some defect, a trepidation somewhere. There is always a detail that deviates from your original intent, something that is not absolutely perfect. Without remorse, these hesitations that escape me are all part of my creation. This is the concept from which I elaborate my painting and my sculpture. While my work gives an impression of simplicity and stripping, and of being very accessible, apparently direct, I try to focus my visual intervention in the most limited frame possible. Besides, I believe that art, and what I strive to achieve with my art, I do not in fact “make”. What I create, I do not create!

MY ART, I DO NOT IN FACT “MAKE”

Est-ce une habitude de vie chez vous de cultiver cet état de vigilance, qu’on pourrait comparer à un principe d’incertitude ? À la base, les choses ne fonctionnent jamais comme on veut, du moins rarement. Par exemple, quand je peins une ligne, il y a forcément un raté, un tremblement quelque part. Il y a toujours un détail qui s’écarte de votre intention première, quelque chose qui n’est pas absolument parfait. Sans être des repentirs, ces hésitations, qui m’échappent, font entièrement partie de ma création. C’est le concept à partir duquel j’élabore ma peinture et ma sculpture. Tandis que mon travail apparaît dans une impression de simplicité, de dépouillement, très accessible, apparemment direct ; j’essaie de cibler mon intervention plastique dans un cadre aussi limité que possible. D’ailleurs, je crois que l’art, ce que je tente de réaliser dans mon art, c’est ce que je ne fais pas… Ce que je crée, je ne le crée pas !

M O N A R T, C ’ E S T C E Q U E J E N E FA I S PA S

Tout s’est-il déroulé si parfaitement ? À vrai dire, je ne pense pas qu’on n’ait jamais eu le besoin de reprendre quoi que ce soit ou même d’y avoir songé un seul instant. Pourtant, c’est habituel, en ce qui me concerne, quand j’entreprends un projet - n’importe lequel -, de m’attendre à ce que ça n’aille pas droit, à un moment ou un autre. D’une certaine façon, je l’accepte, j’ai appris à l’accepter. Mais là, tout allait trop bien pour être vrai ; je n’arrivais pas y croire. Je me demandais à chaque seconde « Est-ce que ça va durer ? Est-ce vraiment sûr ? Ça marche trop bien ! »

Was everything so perfect ? Actually, I don’t know we ever needed to change anything or even think about it for a second. Yet, it is common for me when I begin a project, any project, to expect what may go wrong, at one time or another. Somehow, I accept it. I have learned to accept it. But with the museum, everything was too good to be true, I could not believe it. I was wondering every second, “Is it going to last? Is it really safe? It works too well!”


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DE SALLE

Like this artistic will, almost in reserve, is your museum conceived as putting your work and its own potential in a kind of abyss of time?

ROOM FOR SILENCE

À l’image de cette volonté artistique, de réserve presque, votre musée est-il conçu comme une mise en abîme de votre œuvre dans le temps et ses propres potentialités ? Mon musée, son architecture, cet espace d’exposition, constituent effectivement une expérience chronologique, renforcée par un sentiment d’abstraction qui sort volontairement de l’ordinaire. Disons, pas complètement spirituel. Mais à la fois inspiré du minimalisme. En clair, il ne s’agit pas de salles de méditation, mais plutôt de silence. Bien que ces deux états aient quasiment le même sens, n’est-ce pas? Dans cette manière qu’ils ont de dépouiller l’expérience de l’art du langage, tout en provoquant la rencontre avec une forme de vie abstraite. Pour ce qui est du cheminement au sein du musée proprement dit, j’utiliserais l’image d’une continuité, d’une relation entre les différents éléments en présence, très proche de ma démarche artistique. Quand on découvre le musée, on le vit de l’intérieur. Quand on en sort, on retrouve la vie normale.

SILENCE

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My museum, its architecture, and the exhibition space are actually a chronological experience, reinforced by a sense of abstraction that comes voluntarily out of the ordinary. Let’s say that it is not entirely spiritual, but inspired by minimalism at the same time. Clearly, it is not a room for meditation, but rather for silence. Although, these two states have almost the same meaning, haven’t they? In this way, they have to strip the artistic experience from its language while provoking an encounter with a form of abstract life. In terms of progression within the museum itself, I would use an image of continuity, a relation between the different elements, a presence which is very close to my artistic process. When you discover the museum, you live it from inside. When you exit, you find normal life again.


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Êtes-vous, pour ainsi dire, seul au monde, quand vous travaillez dans votre atelier ? Quand je me mets à l’œuvre, je peux dire que j’oublie complètement ma famille. Quand je travaille, j’ai besoin d’être entièrement seul. Du coup, j’oublie aussi qu’on m’appelle, j’oublie de manger. Je suis à ce point concentré, que je peux même oublier de parler pendant plusieurs jours. Y compris avec les membres de ma famille. Autant dire que j’en oublie ma propre vie. Et je peux dire que je suis comme un fou. Votre atelier symbolise-t-il pour vous un espace d’intériorité ? L’intériorité qu’offre l’atelier me semble d’autant plus nécessaire, qu’il faut sans cesse montrer son travail à l’extérieur, le confronter à la scène artistique. L’atelier est un abri, un refuge qui me permet de préserver, de protéger mon univers, malgré l’obligation d’exposer. Bien sûr, ces deux activités sont nécessaires, ce va-et-vient permanent entre l’atelier, les galeries, les musées. Maintenant, il y a les critiques, l’épreuve du public, le regard extérieur sur votre œuvre. Ce qui fait partie de mon travail, complètement. Après coup, je peux donc réagir dans l’atelier et pousser plus loin mes recherches.

Q U A N D J E T R AVA I L L E , J ’ A I B E S O I N D ’ Ê T R E E N T I È R E M E N T S E U L

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Are you, so to speak, alone in the world when you work in your studio? Ufan Lee: When I’m at work, I can say that I completely forget my family. When I work, I need to be absolutely alone. At once, I forget my own name, I forget to eat. I am so concentrated that I can even forget to speak for several days, not even with my own family members. Enough to say that I forget my own life. And I can say I’m like a madman. Does your studio symbolize a space for interiority for you? The interiority offered by the studio seems all the more necessary, that we should constantly show our work to the outside and to oppose it to the art scene. The studio is a shelter, a refuge that allows me to preserve, to protect my world, despite the obligation to display it. Of course, these two sorts of activities are necessary, and they go back and forth between the studio, the galleries, and the museums. Now, there are critics, the trial of the public, and the external perspective on your work. This is an integral part of my work. Retrospectively, I can therefore act in the studio and push my research further.

W H E N I WO R K , I N E E D TO B E A B S O L U T E LY A L O N E

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Combien d’existences vivezvous à la fois finalement ? C’est certain, je n’ai pas qu’une seule existence. Peut-être en ai-je deux, voire trois qui font face à mon être. Mais il me suffit de les ignorer, pour vivre avec elles en liberté. Donc, je vis ma vie personnelle et ma vie d’artiste en toute plénitude, effectuant des aller-retours permanents entre les deux.

What kind of space does your studio occupy in Japan? I designed my studio in Japan at my house, like a place to live. Not because I am an artist, but because first and foremost, I have a family. Therefore, I chose to put my studio under the roof of my home, because of my private life. Luckily, my family and my artistic life coexist in everyday life. When I am in my family, I can temporarily forget my life as an artist. When I live my life as an artist, I can temporarily forget my family life. In the end, how many lives do you lead simultaneously? Certainly, I do not have only one existence. Perhaps I have two or three. But it’s enough to ignore them, in order to live with them very freely. So, I live my personal life and my artistic life in all their fullness, making round trips between the two constantly.

C E R TA I N LY, I D O N OT H AV E O N LY O N E E X I ST E N C E

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Quel espace votre atelier occupe-t-il au Japon ? Mon atelier au Japon, je l’ai conçu chez moi, pareil à un lieu de vie. Non pas parce que je suis artiste, mais parce que j’ai une famille avant d’être artiste. Par conséquent, mon choix de placer mon atelier sous le toit familial, je l’ai pris par rapport à ma vie privée. Par chance, ma vie familiale et ma vie artistique cohabitent au quotidien. Lorsque je suis dans ma vie familiale, je peux oublier temporairement ma vie d’artiste. Lorsque je vis ma vie d’artiste, je peux oublier temporairement ma vie familiale.

C ’ E S T C E R TA I N , J E N ’ A I PA S Q U ’ U N E S E U L E E X I S T E N C E

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Entendez-vous l’éthique au sens d’un devoir moral ? Lorsqu’un artiste commence à s’exprimer, à vérifier ce qu’il représente, il se doit de rester fidèle avec ce qui est justement à l’œuvre dans son travail. C’est une frontière subtile que tous les artistes cherchent à repousser. Au risque de tout faire disparaître, s’ils repoussent cette limite trop loin. On peut dire qu’il s’agit d’une sorte de politique de création, où l’artiste doit aussi contrôler cette limite. Pour ne pas détruire l’œuvre en train de se faire. Cultiver cet équilibre entre l’art et l’éthique, c’est une possibilité dans l’existence, de trouver, peut-être, une voie d’accès à l’infini.

What happens once you start your work in the studio? It is as if one is raised by an energy, an inner strength. In itself, the workshop serves as a laboratory to see if these forces can get in touch and reproduce painted or sculpted forms. Perhaps is the studio the space in which they agree to collaborate with the artist. Sometimes I’m not very happy with the relationships that I establish. After all, an artist is a man, as history shows. So art is a real responsibility, and even a matter of ethics.

Do you mean “ethical” in the sense of a moral duty? When an artist begins to express himself, to verify what he represents, he must remain faithful to what is precisely going Quand savez-vous qu’une œuvre est achevée ? on in his work. It’s a fine line that all artists La fin est dite, très simplement. Et ce n’est pas de trop ! seek to push. At the risk of making everything disappear if they push the limit too far. We can say that this is a kind of policy of creation, where the artist must also control this limit, so as not to destroy the work in the making. Cultivating this balance between art and ethics is a possibility in our existence, perhaps to find a gateway into infinity.

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When did you know that your work is done? It ends at appointed time. And it’s not exaggerated!

ART IS A REAL RESPONSIBILITY

Que se passe-t-il une fois que vous démarrez votre travail dans l’atelier ? C’est comme si l’on était soulevé par une énergie, une force intérieure. En soi, l’atelier me sert de laboratoire, pour vérifier si ces forces peuvent se mettre en relation et procréer des formes peintes ou sculptées. Peut-être l’atelier constitue-t-il l’espace au sein duquel elles acceptent de collaborer avec l’artiste. Parfois, je ne suis pas très heureux avec les relations que je mets en œuvre. Après tout, un artiste n’est qu’un homme, l’histoire le démontre. Donc l’art, c’est une vraie responsabilité, et même une éthique.

L’ART, C’EST UNE VRAIE RESPONSABILITÉ

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42 According to you, does your practice of making art constitute as much a way of life as a way of creation? Like everyone else, I need a personal life, which I have decided for myself. For example, I travel a lot through my books, to project myself beyond my own being. Now, I chose this interiority of the workshop as an artist, as a kind of prison. It is in here that I lock myself, so that everything changes, where everything I saw on the outside can be reworked. As an artist, I need to feel like a prisoner inside this interior world that I have created for myself.

IN HERE THAT I LOCK MYSELF

Selon vous, la pratique de votre art constitue-t-elle autant un mode de vie qu’un mode de création ? Comme tout un chacun, j’ai besoin d’une vie personnelle, que j’ai décidée pour moi-même. Par exemple, je voyage beaucoup à travers les livres, pour me projeter en dehors de moimême. Maintenant, j’ai choisi cette intériorité de l’atelier en tant qu’artiste, comme une sorte de prison. C’est dans cet intérieur où je m’enferme moi-même, que tout se transforme, où tout ce je vis à l’extérieur peut-être retravaillé. En tant qu’artiste, j’ai besoin de me sentir prisonnier de cet intérieur que je me suis auto créé.

CET INTÉRIEUR OÙ JE M’ENFERME

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L ’ A I R Y E S T D I F F É R E N T, L ’ E S PA C E Y

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EST DIFFÉRENT

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Quelles différences y a-t-il pour vous entre Kamakura et Paris, où vous avez également un atelier au pied de Montmartre ? À première vue, tout se ressemble, les visages autour de moi sont les mêmes. En détail, ces deux endroits sont très différents, l’air y est différent, l’espace y est différent. À Paris comme à Kamakura, je reçois des visites dans mes ateliers, des amis, des confrères, des professionnels, des collectionneurs, parmi lesquels des Occidentaux, mais aussi des non-Occidentaux qui portent tel ou tel regard sur mon œuvre. Par curiosité, par intérêt, ces personnes, qui me sont plus ou moins proches, me posent des questions, parfois très pointues. À l’occasion, ces discussions peuvent devenir complexes. Pour moi, c’est une véritable confrontation, où je dois saisir d’autres formes de sensibilité. Ce que l’autre, face à moi, perçoit de mon travail à travers ses différentes remarques. Par rapprochement, j’essaie de nuancer mes propres ressentis pour rejoindre ces différentes manières de voir. C’est ainsi que j’ai pu élaborer, dans le temps, un jugement plus personnel sur mon œuvre.


T H E A I R I S D I F F E R E N T, T H E S PA C E I S D I F F E R E N T

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What differences are there for you between Kamakura and Paris, where you also have a studio at the foot of Montmartre? At first glance, everything looks the same, the faces around me are the same. Upon closer observation, these two places are very different, the air is different, the space is different. In Paris as in Kamakura, I receive visits in my studios, friends, colleagues, professionals, collectors, among whom Westerners, but also non-Westerners, who have this or that opinion on my work. Out of curiosity, out of interest, these people, who are more or less close to me, ask me questions that can sometimes be quite sharp. Occasionally, these discussions can become complex. For me it’s a real confrontation, where I have to seize other forms of sensitiveness to what the person facing me thinks of my work by way of their different remarks. In comparison, I try to shade my own feelings to reach an understanding of these different ways of seeing. In this way, I could elaborate over time a more personal judgment on my work.


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Do you have an example that illustrates this type of exchange? For example, François Pinault who follows my work closely confessed not to have the same vision as other collectors, who generally speak more about the motionless aspect of my painting. To describe it, he would underline, for his part, the physical relation that develops with the painting as it gets through your eyesight. To be more precise, he felt an energy circulating and being very closely conditioned by the patterns that I use in my paintings. And, beyond the pictorial language, this energy was acting for him without him having to express it verbally. Thus, he depicted a feeling rather than an idea about this organic force that runs through my canvasses and helps me in my work every day.

T H I S O R G A N I C F O R C E T H AT R U N S T H R O U G H M Y C A N VA S S E S

Avez-vous un exemple qui illustrerait ce type d’échanges ? Par exemple, François Pinault qui suit mon travail de près m’avouait ne pas avoir la même vision que d’autres collectionneurs, qui s’expriment plus généralement sur l’aspect immobile de ma peinture. Pour la décrire, il soulignait pour sa part la relation physique qui s’instaure avec elle, tandis qu’elle pénètre votre regard. Ce, précisant qu’il ressentait une circulation de l’énergie très étroitement conditionnée par les motifs que j’applique dans mes tableaux. Et qu’au-delà du langage pictural, cette énergie agissait pour lui sans qu’il soit nécessaire de l’exprimer verbalement. Ainsi voulait-il témoigner d’un sentiment plutôt que d’une idée, sur cette force organique qui traverse mes toiles et m’aide dans mon travail de tous les jours.

CETTE FORCE ORGANIQUE QUI TRAVERSE MES TOILES

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As for your paintings, where does this special use of a mix of colors and textures which you have always used come from? If I almost always use this mixed paining of blue-gray pigment and oil with only two, sometimes three strokes of the brush on my white backgrounds put together, it is in the interest of precision, knowing that in advance I calculate all the proportions of the imprints that I make on my canvasses, their positions, the distances between them, etc.. Depending on the size of the painting, I also select my brushes by their width and thickness. The relationship between proportions is harmony. Afterwards, let’s say, I stand before this or that canvas which already exists by itself, in order to face it. It is this faceto-face encounter, the relationship between the energy of the artist and the painting’s composition that will or won’t lead to the act of painting. It is in this intermediate space that I intervene to create my art in the same way as I use the medium, with my brushes, and my pigments on the canvas. perhaps

RELATIONSHIP BETWEEN PROPORTIONS IS HARMONY

Pour ce qui est de vos tableaux, d’où vient l’usage que vous faites depuis toujours de cette peinture très spéciale, mélangée dans ses couleurs et sa texture ? Si j’utilise presque toujours cette peinture mélangée de pigments bleu-gris et d’huile dont je n’applique qu’une ou deux, parfois trois empreintes sur mes fonds blancs unis, c’est pour des raisons de précision. Sachant que je calcule au préalable toutes les proportions des taches que je peins sur mes toiles, leurs positionnements, leurs écartements entre elles, etc. Selon les dimensions de mes toiles, je choisis également mes pinceaux selon leur largeur, leur épaisseur. Car l’harmonie, c’est le rapport des proportions. Ensuite, je me place, mettons, devant telle ou telle toile qui existe déjà par ellemême, pour lui faire face. Dans ce face-à-face, c’est la relation entre l’énergie de l’artiste et la composition du tableau qui entraîne ou non l’action de peindre. C’est dans cet espace intermédiaire que j’interviens pour créer mon art, dans l’usage même que je fais du médium, avec mes pinceaux et mes pigments sur la toile.

L’HARMONIE, C’EST LE RAPPORT DES PROPORTIONS

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Ce qui n’empêche pas votre style d’être profondément humain, dans vos installations comme dans vos peintures, créant par là même cet espace mental et sensible dans lequel le regard peut se projeter librement ? Ce qui s’imprime dans notre regard n’est pas l’œuvre, ce n’est pas l’art. L’art n’est pas visible, il se perçoit. Parce qu’on ne peut pas montrer un objet tel qu’il est entièrement, et surtout indépendamment de l’expérience qu’on en possède déjà. Ce qui m’intéresse, c’est de mettre en relation ce que je vois, et de faire vibrer cet espace, d’un point de vue relationnel, en fonction de son contexte de représentation. D’où l’importance du placement de chaque élément dans mes sculptures, de la composition de chaque toile dans ma peinture.

L ’ A R T N ’ E S T PA S V I S I B L E

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ART IS NOT VISIBLE

53 This does not prevent your style from being profoundly human, both in your installations and in your paintings, which in the same manner creates this mental and sensitive space where one can cast one’s view freely? What leaves the imprint in our eyes is not the work, not the art. Art is not visible, it is only perceptible. This is because we cannot show an object as it is fully, independently, and above all the experience we already have with it. What interests me is to relate to what I see, and to make this space vibrate, from a relational point of view, depending on its representational context. Hence the importance of the placement of each item in my sculptures, and the composition of each canvas in my painting.


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Qu’est-ce que signifie pour vous cette relation, du point de vue de l’expérience artistique ? Laissez-moi vous donner un exemple que j’ai pris à la nature. Un jour d’automne, alors que j’admirais les feuilles mortes éparpillées dans mon jardin de Kamakura, ému par ce spectacle, j’eus une idée. Je décidai de balayer mon jardin entièrement, puis je ramassai juste quelques feuilles, les dispersai à nouveau, et je n’en fus que plus réjoui. La véritable création ne s’exerce pas à partir de rien, mais en décalant ce qui est déjà là pour rendre plus évidente la fraîcheur du monde.

THE FRESHNESS OF THE WORLD

Comment définiriez-vous votre peinture ? Un de mes bons amis, qui est un marin chevronné, m’a dit un jour : « Ta peinture est pareille à une île dans l’océan ». Ce n’est pas de la figuration, parce que je ne peins pas ce que je vois. Mais je peins la relation qu’il y a entre moi et autrui. Et peutêtre n’existe-t-il pas d’autre choix. Quand on parle de choix, on parle déjà de quelqu’un d’autre, d’un tiers. Et ce tiers, pour moi, ce n’est pas un choix. En tout cas, pas un choix pour moi, mais plutôt pour cet autre. En réalité, on ne parle même plus de choix. Mais d’une attention, d’un dialogue, d’une relation qui s’instaure dans l’espace et le temps. C’est ça, le sens de ma peinture.

LA FRAÎCHEUR DU MONDE

54 How would you define your painting? A good friend of mine, a Marine veteran, once told me: “Your painting is like an island in the ocean”. This is not figurative, because I do not paint what I see – I paint the relationship that exists between me and others. And perhaps there is no other choice. When it comes to choice, there is already talk from someone else, a third party. And the third party, for me, is not a choice. In any case, not a choice for me, but for the other party. In reality, we do not even speak of choices, but of attention, dialogue, a relationship that develops in space and time. That is the meaning of my painting. What does this relationship mean to you, from the point of view of artistic experience? Let me give you an example I took from nature. One autumn day, while admiring the dead leaves scattered in my garden in Kamakura, moved by this sight, I had an idea. I decided to sweep my garden completely. Then I just gathered up a few leaves, scattered them again, and I was all the more happy. The actual creation is not exercised from nothing, but by shifting what is already there to make the freshness of the world more obvious.


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Y a-t-il une saison, une période de l’année que vous appréciez davantage que les autres ? Encore récemment, j’avais deux manières de travailler. L’une pendant le printemps et l’été, quand il fait bon pour faciliter les temps de séchage ; l’autre pendant l’automne et l’hiver, pour écrire, quand le temps est plus frais, plus sombre, plus calme. Quand j’écris, quand je réfléchis, je souffre de la chaleur. Aujourd’hui, ce cycle a changé. Parce que je voyage de plus en plus, je dois m’atteler à la tâche indépendamment de la saison du lieu, selon mes déplacements et les besoins de mes différentes activités. Quoique ma nature reste la même selon qu’il fasse plus chaud ou plus froid. Ce que je pense, ce que j’écris quand il fait frais, j’essaie toujours de le mettre en forme peinte et/ou sculptée quand il fait meilleur.

JE DOIS M’ATTELER À LA TÂCHE INDÉPENDAMMENT DE LA SAISON DU LIEU

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57 I HAVE TO WORK MY WAY REGARDLESS OF THE SEASON INSTEAD

Is there a season in the year that you enjoy more than another? Until recently, I had two ways of working. One during the spring and summer, when the weather is right for drying, and the other during the autumn and winter, for writing, when the weather is cooler, darker, and calmer. When I write, when I reflect, heat bothers me. Today, that cycle is changed. Because I travel more and more, I have to work regardless of the season and the place, according to my trips and the needs imposed by my various activities. Though, my nature stays the same regardless of what the weather is like. I think that what I write when it is cool, I always try to get is painted and/or carved form when the weather is warmer.


LA ET L’HOMME ENTRE CONDUCTEURS DES COMME

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NATURE

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Pour vos sculptures, quelle est votre méthode de création ? Pour mes sculptures, je parcours des carrières, je remonte des torrents, à la recherche de pierres de différentes formes, de différentes tailles que je ramasse ici et là. Pour les plaques d’acier, je fréquente les chantiers, les usines de fonderie. Quand je tombe sur des monolithes qui m’intéressent, j’ai le cœur en émoi. Au premier coup d’œil, j’ai déjà l’image de ce qu’elles peuvent donner associées avec telle ou telle plaque d’acier dans l’espace. Chez les fondeurs, c’est la même chose. Quand je vois des plaques d’acier se dessiner sous mes yeux, je les projette en rapport avec telle ou telle pierre. Après, je dessine dans l’atelier des croquis préparatoires, en fonction des images mentales que j’ai enregistrées pendant ces recherches. Ensuite, j’assemble les pierres et les plaques d’acier entre elles, comme des conducteurs entre l’Homme et la nature, de manière à augmenter leur singularité, à les faire exister plus intensément.


What is your method for creating your sculptures? For my sculptures, I browse through quarries and cross torrents, looking for stones of different shapes and sizes that I pick up here and there. For steel plates, I frequent construction sites and smelting plants. When I happen to find a monolith that interests me, I am moved. At the very first glance, I have the image of what they can give when associated with this or that steel plate in space. At the smelting works, it’s the same. When I see the steel plates taking shape before my eyes, I plan out a relation between them and a particular stone. Afterwards, I draw preparatory sketches in my studio, based on the mental images retained during these searches. Then, I arrange the stones and steel plates amongst themselves, like links between Man and Nature, so as to increase their individuality, making them exist more intensely.

LIKE LINKS BETWEEN MAN AND NATURE

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MES ŒUVRES NAISSENT ET S’ACHÈVENT DANS L’ATELIER

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Comment voyez-vous vos œuvres passer de l’atelier dans les différents espaces où celles-ci ont pour vocation d’être exposées au public ? En règle générale, mes œuvres naissent dans l’atelier et s’achèvent dans l’atelier. Parfois, celles-ci peuvent être complétées dans des espaces d’exposition où elles ont été installées au préalable, s’il est prévu, par exemple, qu’elles établissent une relation avec le public comme pour mes sculptures. Sinon, les œuvres qui sortent de l’atelier pour être exposées dans des musées ou des galeries, le fait de montrer mes travaux réalisés en atelier dans d’autres espaces, tout ça fait partie évidemment de mon travail. Il m’arrive toutefois de me sentir mal à l’aise, quand je pense à mes peintures ou mes sculptures dans un autre contexte que le mien. Mais c’est également un plaisir de voir d’autres personnes s’intéresser à mes œuvres, dès lors qu’elles saisissent les principes d’installation qui les régissent. Une fois le travail montré, critiqué, commenté, apprécié, je sens finalement une grande force en moi, et mes idées se renouvellent grâce à ça.


MY

WORKS

ARE

BORN

AND

COMPLETED

IN THE

STUDIO

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What do you feel when you see your works moving from the studio to different places to be exposed to the public? In general, my works are born and completed in the studio. Sometimes they may be completed in the places of exhibition where, if it is planned that way, they are set up in advance in order to establish a relationship with the public, as it is the case, for example, with my sculptures. Otherwise, the works which exit the studio to be exhibited in museums or galleries, the fact of displaying my works realized in the studio in another space – all of this obviously is part of my work. However, I sometimes feel uncomfortable when I think of my paintings and my sculptures in a different context than my own. But it is a pleasure to see other people interested in my works, when they understand the principles that guide the installation. Once the work is shown, reviewed, commented on, and enjoyed, I finally feel a great force in me and my ideas are renewed thanks to this.

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Do you consider those spaces for exhibition as an extension of your studio? It’s true! Thanks to my diverse experiences in various European and Asian museums, I developed the attitude of “reading” places. Many art critics consider that there is certain spirit of performance in my work. A kind of hidden performance. Even before the actual happening, a performance exploits a space, a time, a movement, in order to create the pulse of an event which takes place here and now. And my works are closely linked to this idea in essence. Like in the studio.

I DEVELOPED THE ATTITUDE OF “READING” PLACES

Considérez-vous ces espaces d’exposition comme des extensions de votre atelier ? C’est vrai ! Grâce à mes diverses expériences dans divers musées européens et asiatiques, j’ai pris l’habitude de « lire » les lieux. Beaucoup de critiques d’art estiment d’ailleurs, qu’il y a un certain esprit de performance dans mon travail. Comme une sorte de performance cachée. Sans aller jusqu’au happening, une performance exploite un espace, un temps, un mouvement, pour impulser la sensation d’un événement qui se tient ici et maintenant. Et mes œuvres y sont étroitement liées par essence. Comme dans l’atelier.

J’AI PRIS L’HABITUDE DE «LIRE» LES LIEUX

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How do you do this reading of places? I come to see the space once and a second time later, etc. At the end of a week, I have an idea of the plan according to which I will display my works. According the plan that I draft myself, I already have in my head the type of works I will exhibit, the stones, the metal plates I want to display in the space, as well as the paintings that could also be included.

I ALREADY HAVE IN MY HEAD THE TYPE OF WORKS I WILL EXHIBIT

Comment effectuez-vous cette lecture des lieux ? Je viens voir l’espace, une fois, puis une autre, etc. Au bout d’une semaine, j’ai une notion du plan selon lequel je vais installer mes œuvres. Selon ce plan que je dessine moi-même, j’ai déjà en tête le type de pièces que je vais exposer, les pierres, les plaques de métal que je souhaite disposer dans l’espace, ainsi que les peintures susceptibles de s’y inscrire.

J ’ A I D É J À E N T Ê T E L E T Y P E D E P I È C E S Q U E J E VA I S E X P O S E R

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À quoi correspond votre goût pour les collections d’objets anciens ? J’ai grandi dans une famille de culture traditionnelle, imprégnée de confucianisme. Ce qui fait qu’il y a toujours eu autour de moi de grands artistes, près desquels j’ai eu cette chance d’apprendre l’art. Avec la guerre, ma famille n’a pas pu continuer de vivre cette existence. C’est la nostalgie de mon enfance qui m’a donné l’envie de collectionner l’art ancien. Vraiment, j’ai longtemps collectionné ces œuvres avec passion. À la fin, je me suis rendu compte que c’était d’un niveau patrimonial très historique, du point de vue de l’héritage de la culture coréenne.

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What are your activities outside your studio and exhibitions? I find another part of my personality. In the city, I visit galleries, I meet with my friends in the cafés. This is it, I live my life, I forget what I used to be, I do not think of anything, neither of art, nor the artist.

What is your taste in collections of antique art? I grew in a family of a traditional culture, permeated with Confucianism. This means that there always used to be great artists around me, from whom I had the chance to learn about art. With the war, my family was not able to continue living in such a way. It is the longing for my childhood that gave me the desire to collect antique art. Truly, for a long period of time I used to collect these art objects with passion. Finally, I realized that it was about a very historical level of heritage from the point of view of the legacy of Korean culture.

I MEET WITH MY FRIENDS IN THE CAFÉS

Quelles sont vos activités en dehors de l’atelier et de vos expositions ? Je retrouve un autre pan de ma personnalité. En ville, je visite des galeries, je retrouve des amis dans des cafés. Voilà, je vis ma vie, j’oublie ce que j’étais avant, je ne pense plus à rien, ni à l’art, ni à l’artiste.

JE RETROUVE DES AMIS DANS DES CAFÉS

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Avez-vous des contacts avec d’autres grands collectionneurs dans le monde? J’ai côtoyé quelques grands collectionneurs en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. En matière d’art contemporain, je me réjouis de rencontrer ces personnalités provenant de l’industrie ou du monde des affaires et qui s’intéressent profondément à l’art. Lorsqu’ils s’invitent dans mon atelier, je découvre des gens très sobres, très humbles, qui ne parlent pas d’argent ou du marché de l’art. Ils regardent mon travail, ils m’aident à bouger mes tableaux, ceux que je souhaite leur montrer, ils les observent avec intérêt. C’est un privilège de partager cette sensibilité, cette attention que portent certains collectionneurs à des artistes qu’ils suivent avec fidélité.

Do you still collect ancient Asian art? No, I do not collect it any more, it has become too expensive. Ten or twenty years ago, it was still affordable, few enthusiasts were interested in. But around me, I keep ceramics, furniture, items which had always influenced me since my youth. By evolving in this atmosphere – which was not the case with other families – I felt I was the bearer of a kind of mission, as a duty to save a chapter of the history that I knew, in order to express the particular vision I have preserved in me.

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Do you have contacts with other great collectors in the world? I used to frequent some great collectors in Europe, in North America and in Asia. As far as Modern art is concerned, I have the pleasure to meet people coming from the worlds of industry and business and who are profoundly interested in art. When they come to my studio, I discover very sober, very humble personalities who do not talk about money or the art market. They watch my work, they help me move my paintings, and those I want to show them, they observe with interest. It is a privilege to share this sensitiveness, this attention distinctive to some collectors for the artists they follow faithfully.

IT IS A PRIVILEGE TO SHARE THIS SENSITIVENESS

Collectionnez-vous encore l’art ancien d’Asie ? Je ne collectionne plus, c’est devenu trop cher. Il y a dix ans, vingt ans, c’était abordable, peu d’amateurs s’y intéressaient. Mais je conserve autour de moi des céramiques, du mobilier, des pièces qui m’influencent toujours depuis ma prime jeunesse. En évoluant dans cette ambiance - ce ne fut pas le cas dans d’autres familles -, je me suis senti porteur d’une sorte de mission, comme un devoir de sauvegarder un chapitre de cette histoire que j’avais connue, pour en transmettre la vision particulière que j’en avais gardé.

C ’ E S T U N P R I V I L È G E D E PA R TA G E R C E T T E S E N S I B I L I T É

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La confrontation des choses, des objets, leur rencontre dans mes installations comme une sensation directe, je l’ai surnommée par ce terme inchangé depuis 1972 : Relatum.

La confrontation des choses, des objets, leur rencontre dans mes installations comme une sensation directe, je l’ai surnommée par ce terme inchangé depuis 1972 : Relatum.

BIOGRAPHY

BIOGRAPHIE

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1936 Né en Corée du Sud.

1969 Membre fondateur du mouvement Mono-ha.

2001 13e Præmium Imperiale, Catégorie Peinture, Tokyo.

2010 Ouverture du musée Lee Ufan, Naoshima.

2011 Rétrospective au Musée Guggenheim, New York.

1936 Born in South Korea.

1969 Founding member of the Mono-ha movement.

2001 13th Praemium Imperiale Category Painting Tokyo.

2010 Lee Ufan Museum opening, Naoshima.

2011 Retrospective at the Guggenheim Museum, New York.


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Shigeo Anzai

Shigeo Anzai

Peintre devenu photographe d’artistes, Shigeo Anzai est né au Japon en 1939. S’il prétend par esprit d’indépendance ne pas être un professionnel, « au sens où les gens me commandent certaines images et dans la manière où je les prends moi-même pour un travail », déclarait-il en 2007 dans une interview accordée au Japan Times consacrée à sa rétrospective au National Art Center de Tokyo : Anzaï, Personal Photo Archives (1970-2006), c’est qu’il ne dit pas tout non plus. La vérité, c’est que n’importe qui peut immortaliser des artistes célèbres. Les saisir, quand ils ne le sont pas encore, est une autre histoire. Ainsi Shigeo Anzai s’est fait connaître en photographiant, avant tout le monde, les futures stars du milieu de l’art international, de Richard Serra à Daniel Buren lors de la Xe Biennale de Tokyo en 1970, jusqu’à Bill Viola s’amusant avec des micros en 1978, Jean-Michel Basquiat dans une fête à Tokyo en 1985 ou encore Takashi Murakami souriant comme un jeune collégien en 1992. Sans oublier, depuis près de quarante ans, tous ses portraits de maîtres reconnus, japonais ou non, comme Joseph Beuys, Kishio Suga, Chuck Close et bien sûr Lee Ufan.

Né à Rome en 1963. Il commence sa carrière de directeur artistique en Italie, il vit et travaille à Paris depuis 1997. Il est l’initiateur de la collection « Ateliers d’artistes ».

Piero Brogi

Born in Rome in 1963. He began his career as an art director in Italy, he lives and works in Paris since 1997. He started the collection “Ateliers d’artistes".

THE DESIGNER

Piero Brogi

LE GRAPHISTE

Thomas Jorion Photographe autodidacte, Thomas Jorion, qui vit et travaille à Paris, est né en 1976. En rapport avec l’espace urbain, son travail s’intéresse de près aux lieux tombés en désuétude, bâtiments anonymes, espaces laissés à l’abandon, zones indifféremment en ruines ou en friches. Arpenteur singulier des non-lieux du monde et de l’histoire, parfois chargés du ressouvenir qui hantent ces images hors du temps, il voyage en quête des failles qui l’inspirent, audelà des frontières et des hommes.

THE PHOTOGRAPHERS

LES PHOTOGRAPHES

Peintre devenu photographe d’artistes, Shigeo Anzai est né au Japon en 1939. S’il prétend par esprit d’indépendance ne pas être un professionnel, « au sens où les gens me commandent certaines images et dans la manière où je les prends moi-même pour un travail », déclarait-il en 2007 dans une interview accordée au Japan Times consacrée à sa rétrospective au National Art Center de Tokyo : Anzaï, Personal Photo Archives (19702006), c’est qu’il ne dit pas tout non plus. La vérité, c’est que n’importe qui peut immortaliser des artistes célèbres. Les saisir, quand ils ne le sont pas encore, est une autre histoire. Ainsi Shigeo Anzai s’est fait connaître en photographiant, avant tout le monde, les futures stars du milieu de l’art international, de Richard Serra à Daniel Buren lors de la Xe Biennale de Tokyo en 1970, jusqu’à Bill Viola s’amusant avec des micros en 1978, Jean-Michel Basquiat dans une fête à Tokyo en 1985 ou encore Takashi Murakami souriant comme un jeune collégien en 1992. Sans oublier, depuis près de quarante ans, tous ses portraits de maîtres reconnus, japonais ou non, comme Joseph Beuys, Kishio Suga, Chuck Close et bien sûr Lee Ufan.

Thomas Jorion

Photographe autodidacte, Thomas Jorion, qui vit et travaille à Paris, est né en 1976. En rapport avec l’espace urbain, son travail s’intéresse de près aux lieux tombés en désuétude, bâtiments anonymes, espaces laissés à l’abandon, zones indifféremment en ruines ou en friches. Arpenteur singulier des non-lieux du monde et de l’histoire, parfois chargés du ressouvenir qui hantent ces images hors du temps, il voyage en quête des failles qui l’inspirent, audelà des frontières et des hommes.


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THE AUTHOR

Auteur, journaliste d’art, Renaud Siegmann est né à Paris en 1966. Après des études littéraires, il séjourne à Florence où il s’intéresse de près à l’art ancien et à l’art classique. Entre 1986 et 1990, il est le secrétaire particulier de Lucien Bodard (1914-1998) et participe à ses trois derniers romans sur la Chine : Les Grandes Murailles, Les Dix Mille Marches, et Le Chien de Mao. Chargé d’édition pour la galerie Artcurial dans les années 1990, il est responsable de la revue Aura sur l’art moderne. En 1996, il publie chez Parigramme son premier album « Je me souviens de Montmartre », sur la mémoire d’un quartier dont il est originaire depuis quatre générations. En 2000, il sort aux Editions Alternatives un nouvel ouvrage sur les courriers d’artistes. En 2008, il a signé une monographie d’artiste au Cercle d’Art, sur l’œuvre du créateur de mobilier Michel Haillard. Collaborateur à La Gazette Drouot depuis maintenant dix ans, on le connaît pour ses entretiens d’artistes Renaud Siegmann et de professionnels de l’art Auteur, journaliste d’art, Renaud Siegmann est né à contemporain. Diplômé ScienParis en 1966. Après des études littéraires, il séjourne ces-Po, il intervient également à Florence où il s’intéresse de près à l’art ancien et à à l’Institut des Etudes Supél’art classique. Entre 1986 et 1990, il est le secrétaire rieures des Arts sur l’Histoire particulier de Lucien Bodard (1914-1998) et participe du marché de l’art, de 1945 à à ses trois derniers romans sur la Chine : Les Grandes nos jours. Murailles, Les Dix Mille Marches, et Le Chien de Mao. Chargé d’édition pour la galerie Artcurial dans les années 1990, il est responsable de la revue Aura sur l’art moderne. En 1996, il publie chez Parigramme son premier album « Je me souviens de Montmartre », sur la mémoire d’un quartier dont il est originaire depuis quatre générations. En 2000, il sort aux Editions Alternatives un nouvel ouvrage sur les courriers d’artistes. En 2008, il a signé une monographie d’artiste au Cercle d’Art, sur l’œuvre du créateur de mobilier Michel Haillard. Collaborateur à La Gazette Drouot depuis maintenant dix ans, on le connaît pour ses entretiens d’artistes et de professionnels de l’art contemporain. Diplômé Sciences-Po, il intervient également à l’Institut des Etudes Supérieures des Arts sur l’Histoire du marché de l’art, de 1945 à nos jours.

L’AUTEUR

Renaud Siegmann


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LEE UFAN Renaud Siegmann

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ISBN : 978-2-35278-081-6

SODIS : 718602 0

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N N A M G E I S D U A N E R S E T S I T R S

A South Korean artist, painter and universal sculptor, Lee Ufan belongs to a select circle of the greatest creators of our time. Lee Ufan is a visiting professor at the Ecole Nationale Superieure des Beaux-Arts in Paris, and he was the subject of a retrospective exhibition at the Galerie nationale du Jeu de Paume in 1997. Winner of the 2001 Praemium Imperiale in the category of painting, Lee Ufan represented his country at the 2007 Venice Biennale. In June 2011, an exhibition of new works will be dedicated to his career at the Guggenheim Museum in New York. A philosopher and scholar of classical tradition, Lee Ufan lives and works between Asia, Europe, and the United States. All in refined lines, his works in progress – in the deepest sense of the expression “work in progress” – is represented by the most prestigious international museums, as well as the most important private collections.

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The collection “Ateliers d'Artistes” has as it's objective the introduction of the reader to the core of the artistic act. It proposes to enable the rigorous and exalting enterprise of living in the work of the one who invents forms and objects, of following the creative process and learning how to read an oeuvre with insight. Each of the books of this collection is an invitation to such an undertaking. Abundantly illustrated with photographs that reveal the atmosphere of a site, each book relies on conversations which restitute the painter or sculptor's thoughts.

Artiste sud-coréen, peintre et sculpteur universel, Lee Ufan appartient au cercle très fermé des plus grands créateurs de notre temps. Lauréat du Praemium Imperial 2001 dans la catégorie peinture, Lee Ufan représente son pays à la Biennale de Venise 2007. Professeur invité à l’Ecole nationale supérieure des BeauxArts de Paris, il fait également l’objet d’une rétrospective à la Galerie du Jeu de Paume en 1997. Philosophe et lettré de tradition classique, Lee Ufan vit et travaille entre Paris, New York et Tokyo. Tout en formes épurées, son œuvre en progrès, au sens le plus profond de l’expression « work in progress », est aujourd’hui présent dans les plus prestigieux musées du monde, ainsi que les plus importantes collections privées.

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L

a collection “Ateliers d’Artistes” a pour objet d’introduire le lecteur au cœur de la création de l’artiste : vivre le travail de celui qui invente des formes et des objets, en suivre la démarche, apprendre à lire son œuvre représente la plus précieuse et la plus difficile des entreprises. C’est ce que propose chacun des livres de cette collection. Abondamment illustrés, ils dévoilent l’atmosphère d’un atelier ou d’un lieu autour d’entretiens qui restituent la pensée de l’artiste, peintre ou sculpteur.

P H O T O S : S H I G E O

A N Z A I ,

T H O M A S

J O R I O N


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