2012/AUTOMNE - HIVER
Analyses LE MAGAZINE FINANCIER & LIFESTYLE
03 | Automne - Hiver 2012
DES SIGNAUX D’ESPOIR ET DE RELANCE, DE NOUVELLES PERSPECTIVES
HARD TIMES,NEW
OPPORTUNITIES
ANALYSES 03
LES QUESTIONS FRÉQUEMMENT POSÉES SUR
LA NOUVELLE FISCALITÉ EN BELGIQUE ET EN FRANCE THIRD PARTY FUNDS
PUILAETCO DEWAAY PRIVATE BANKERS
DES STRATÉGIES POUR UN HAUT RENDEMENT UN PETIT PAYS AUX GRANDES IDÉES
QATAR, LA PERLE DU GOLFE EN DIALOGUE AVEC MARLENE DUMAS ET THIERRY DE CORDIER
RÉTROSPECTIVE CONSTANT PERMEKE
AVANT-PROPOS
AVANT-PROPOS
L’EXPERTISE , LA PROXIMITÉ ET LA SOLIDITÉ Chers lecteurs, Voici déjà la troisième édition de notre magazine Analyses, le temps passe incroyablement vite ! Et si le temps semble défiler à la vitesse de l’éclair, c’est probablement parce que nous vivons une période extraordinaire, certes pas toujours facile mais tellement passionnante... Pour ne parler que des événements qui touchent directement notre activité, les bourses jouent au yo-yo, les marchés financiers semblent de plus en plus irrationnels et imprévisibles, le prix à payer pour la sécurité n’a jamais été aussi élevé, l’avenir de l’euro n’a jamais fait l’objet d’autant de spéculations... Tous nos repères habituels sont bousculés jour après jour. Avec beaucoup d’humilité, Puilaetco Dewaay essaie d’aider ses clients à traverser cette actualité chahutée. Ce nouveau numéro de notre magazine est en quelque sorte le reflet de la trilogie sur laquelle nous nous basons pour ce faire : l’expertise, la proximité et la solidité.
AVEC BEAUCOUP D’HUMILITÉ, PUILAETCO DEWAAY ESSAIE D’AIDER SES CLIENTS À TRAVERSER UNE ACTUALITÉ CHAHUTÉE.
L’expertise, parce que nous sommes convaincus que, de la même manière que seul un pilote expérimenté peut conduire une Formule 1 sous la pluie, seuls des experts peuvent gérer efficacement un patrimoine dans les circonstances actuelles. La parole a donc été donnée à nos experts financiers (situation macro-économique, analyses sectorielles, fonds maison et de tiers), à nos experts fiscaux (disposition anti-abus, cotisation de 4 %, fiscalité française) mais également à nos experts artistiques.
d’esprit à travers le témoignage de Fabienne Gijsel, la responsable de notre bureau de Waregem. La solidité, parce que pour nos clients, il est impératif que le banquier à qui ils confient leurs avoirs présente des gages de stabilité et de solvabilité. À ce sujet, nous sommes ravis d’appartenir depuis peu, via notre maison mère KBL European Private Bankers, à Precision Capital, une société luxembourgeoise représentant les intérêts d’un groupe d’investisseurs privés qataris de premier plan. En plus de nos ratios de solvabilité élevés, la vision à très long terme de Precision Capital nous permet de gérer la Banque et les avoirs de nos clients sans la pression des résultats à court terme, souvent source de prise de risques excessifs. Enfin, nous tenions à ouvrir ce numéro par un hommage à Monsieur Eric-Emmanuel Janssen, artisan de la naissance de Puilaetco qui, hasard de la vie, nous a quittés au moment même où l’arrivée de Precision Capital donnait un nouvel élan à notre groupe. Je vous souhaite une bonne lecture.
Thierry Smets, Administrateur Délégué Président du Comité de Direction de Puilaetco Dewaay
La proximité, parce que pour pouvoir offrir un service personnalisé, il nous semble indispensable de prendre les décisions au plus près de notre clientèle. Vous retrouverez cet état Automne - Hiver 2012 | Analyses | 3
TABLE DES MATIÈRES
SOMMAIRE ÿ p. 10
ÿ p. 40
ÿ p.58
ÿ p.74
FINANCE 03 05 06 10 26 30 32 36 40 44 48 54
58 62 66 70
Avant-propos | Thierry Smets Hommage | Eric-Emmanuel Janssen Editorial | Back to reality? Chronique financière | Macroéconomie Analyse sectorielle | Luxe Analyse sectorielle | Télécoms
Nos services | Fonds maison Nos services | Third party funds Nos services | L’abus fiscal Nos services | Cotisation supplémentaire à 4%
Editeur responsable Dominiek Vanwynsberghe Avenue Herrmann Debroux, 46 1160 Bruxelles.
Bureaux | Waregem Nos services | Conférences art
LIFESTYLE
Analyse sectorielle | Médias Analyse sectorielle | TIC
Réalisation Roularta Custom Media Concept Ben Herremans & Kaat Kerkhove Rédacteur en chef Ben Herremans Lay-out Marie Vannesche, Lien Huyghe Coordination Pieter Taelman, Dirk Rasschaert Textes Puilaetco Dewaay, Cantilis, Roularta Custom Media Régie Média Custom Regie Impression Roularta Printing
Nos services | Fiscalité française Nos services | Le Qatar, la perle du Golfe
76 80 84 88
Art | Métier d’expert Art | Portrait Rembrandt Bugatti Art | Rétrospective Constant Permeke Culture | Agenda
Green label Ce magazine est produit CO2 neutre Papier et impression sont achetés durables et l’émission de CO2 générée malgré tout par la production de ce magazine est compensée. Le magazine est imprimé CO2 neutre avec son utilisation de papier certifié FSC Souhaitez-vous réagir ? Puilaetco Dewaay Avenue Herrmann Debroux, 46 – 1160 Bruxelles e-mail : info@pldw.be www.pldw.be facebook : www.facebook.com/puilaetcodewaay
Analyses est une publication financière et lifestyle éditée sous la responsabilité de Danny Wittenberg, Chief Investment Officer, et de Christophe Van Canneyt, Responsable Obligations & Produits Structurés, de Puilaetco Dewaay SA – dont le siège social est établi à l’Avenue Herrmann Debroux, 46 à 1160 Bruxelles TVA BE 0403.236.126 L’information diffusée ne peut pas être considérée comme une offre ou une proposition d’achat ou de vente d’un quelconque instrument financier. La rédaction de ce magazine a été clôturée le 30 septembre 2012.
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HOMMAGE
HOMMAGE À ERIC-EMMANUEL JANSSEN, PREMIER PRÉSIDENT DU CONSEIL DE GÉRANCE DE PUILAETCO
L’ÂME
«C’EST QUI COMPTE» TEXTE © AMAURY de LAET DERACHE - PHOTO © JOHANNA DE TESSIÈRES
Eric-Emmanuel Janssen a été le premier Président de notre banque, il y a apporté sa vision et son enthousiasme. Nous souhaitions, par la présente, exprimer toute notre gratitude pour l’héritage qu’il nous a laissé.
A
ssocié-gérant de la société de bourse Puissant Baeyens, Poswick & Co, Eric-Emmanuel Janssen a œuvré activement mais tout en finesse à l’occasion de la fusion avec la société de bourse De Laet & Co pour donner naissance à Puilaetco en 1990. En tant que premier Président du Conseil de Gérance, il a été le ciment de l’intégration humaine entre les deux sociétés. Sous sa présidence, entre 1990 et 1996, Puilaetco a connu une forte croissance. C’est également à cette époque que Puilaetco fut la première société de bourse à adopter le statut bancaire.
UN CHEF D’ENTREPRISE PROFONDÉMENT HUMAIN Même après son départ, en tant que présidenthonoraire de Puilaetco, Eric-Emmanuel Janssen a continué à mener des réflexions
« LE CAPITAL HUMAIN EST L’ACTIF LE PLUS IMPORTANT DE LA BANQUE, TANT SON PERSONNEL QUE SES CLIENTS. »
stratégiques dans l’intérêt de la banque grâce aux nombreux contacts qu’il entretenait dans le monde financier et industriel belge. Il était avant tout un chef d’entreprise profondément humain qui s’intéressait aux autres, à tous ceux qui l’entouraient. « Le capital humain est l’actif le plus important de la banque, tant son personnel que ses clients », nous a-t-il encore rappelé très récemment. « C’est surtout l’âme de la société qui compte, l’âme que nous devons transmettre à nos collaborateurs et à nos clients. » Au nom du Conseil d’Administration, du Comité de Direction et de tous nos collaborateurs, nous tenions à le remercier tout simplement d’avoir fait ce magnifique voyage avec nous, tout en nous guidant avec sagesse sur la voie des objectifs ambitieux qu’il nous a fait partager.
ÿ ERIC-EMMANUEL JANSSEN. Un magnifique voyage avec Puilaetco. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 5
ÉDITORIAL
ÉDITORIAL
BACK TO PHOTOS © ROULARTA / REPORTERS AGENCY
DANNY WITTENBERG, Chief Investment Officer, Puilaetco Dewaay.
L’été 2012 s’est terminé sur une note positive pour la plupart des bourses. Un soulagement bienvenu par comparaison aux étés turbulents des années précédentes. C’est en partie surprenant dans la mesure où les causes de la brusque correction qui est intervenue au printemps – à savoir les problèmes en Grèce et en Espagne, ainsi que le ralentissement de l’activité économique dans de grandes parties du monde et en Europe en particulier – n’ont pas fondamentalement changé, à l’exception de quelques faibles lueurs d’espoir.
REALITY? C
e mouvement de reprise a été initié par les décisions du sommet européen des 28 et 29 juin, au cours duquel la volonté de parvenir à une union bancaire européenne, sous la surveillance centrale de la BCE, a été évoquée pour la première fois. Le sommet a également débouché sur d’autres points positifs, comme la mesure d’aide de 100 milliards d’euros aux banques espagnoles et le soutien conditionnel de la BCE aux pouvoirs publics en difficulté, en renfort du fonds de soutien FESF/MES. Au cours des semaines qui ont suivi le sommet, les décisions prises en bout de nuit se sont avérées pour le moins sujettes à interprétation, mais les politiques et chefs d’État n’ont pas entendu renoncer à leurs vacances planifiées de longue date pour faire la lumière sur celles-ci. Fort heureusement, Super Mario (Draghi, président de la BCE) est resté fidèle au poste pour proclamer au monde le 26 juillet dernier que la Banque centrale européenne ne reculerait devant rien et n’hésiterait pas à sortir le gros Bazooka pour sauver l’euro : « (...) The ECB is ready to do whatever it takes to preserve the euro, (...) and believe me, it will be enough ». Cette annonce a eu l’effet d’une douce mélodie aux oreilles des traders et des gestionnaires. Le président de la BCE était loin d’être le seul à tenir ce discours. En effet, les membres de la Banque centrale américaine et le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, sont montés au créneau à chaque fois qu’ils en ont eu l’occasion pour indiquer qu’ils étaient prêts à intervenir afin de stimuler la croissance
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économique, soutenus en cela par la baisse constante des chiffres de l’inflation. Bien que la politique monétaire y ait donc allègrement contribué, nous ne pouvons pas nier que les résultats saisonniers du T2 ont été d’un bon aloi relatif, et en tout état de cause nettement meilleurs que ceux qu’il convenait de craindre selon les attentes partagées. En dépit des conditions macroéconomiques et de crédit difficiles, les entreprises ont continué à publier de bons résultats, aidées en cela par le faible niveau des taux d’intérêt et du prix des matières premières, les restructurations et le rachat d’actions propres. Depuis la publication des chiffres du T2, le nombre de révisions positives des bénéfices est reparti à la hausse. LE TEMPS DE LA RÉFLEXION Tout en relativisant la situation comme il se doit, la réaction enthousiaste des marchés d’actions à ces développements peut se comprendre. Avant la hausse, la plupart des marchés d’actions étaient très bon marché, tant d’un point de vue historique que par comparaison aux autres classes d’actifs. Dans leur quête de placements sûrs, les investisseurs ont fui les actions comme la peste, ce qui s’est traduit par des positions en actions historiquement faibles et de très nombreuses positions «short», point de départ idéal pour les courts rallyes. Une partie de cette sous-évaluation est à présent gommée et les marchés d’actions sont au même niveau élevé qu’à la mi-mars, après que
ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ MARIO DRAGHI. La BCE n’hésiterait pas à prendre les mesures nécessaires pour sauver l’euro. les bourses aient été également dopées par un affaiblissement temporaire de la crise financière et la gigantesque intervention LTRO de 1.000 milliards d’euros opérée par la BCE. Le tout consiste à présent à savoir si les marchés n’ont pas réagi avec trop d’enthousiasme à ce cocktail de « bonnes nouvelles ». Il convient de se donner le temps de la réflexion, que nous pouvons alimenter en citant au passage les points d’attention essentiels suivants. • La situation économique reste préoccupante en Europe, la crise financière est toujours loin d’être finie. Les différences en termes de croissance économique, de compétitivité, de chômage, etc, entre les pays-clés et la périphérie restent importantes. Les mesures d’économie touchent essentiellement la classe moyenne de la population. L’agitation sociale n’est pas le ferment idéal de la croissance économique, laquelle reste nécessaire pour ramener les budgets à l’équilibre. • La violence verbale des banquiers centraux devra se convertir à un moment donné en
actions concrètes («show me the money»). Les marchés pourraient soudainement perdre patience s’il s’avérait que ces mêmes banquiers centraux se sont contentés de bluffer. • La mise en œuvre des décisions adoptées lors du sommet européen peut s’avérer risquée étant donné que les différentes parties ont leur propre interprétation des textes préliminaires. Le retour de vacances des politiques pourrait exacerber à nouveau le nombre de voix discordantes. Plusieurs de ces décisions doivent être approuvées par les parlements nationaux. En Allemagne, la Cour constitutionnelle doit également rendre un avis sur toute une série de décisions politiques. Certains pays européens, comme la Finlande et l’Autriche, sont fermement opposés à la mutualisation des dettes européennes tant qu’aucun mécanisme de contrôle satisfaisant n’aura été mis en place, et remettent dès lors en question le projet européen dans sa forme actuelle.
IL S’AGIT DE SAVOIR SI LES MARCHÉS N’ONT PAS RÉAGI AVEC TROP D’ENTHOUSIASME À UN COCKTAIL DE « BONNES NOUVELLES ». Automne - Hiver 2012 | Analyses | 7
ÉDITORIAL
ÿ HERMAN VAN ROMPUY LORS DU SOMMET DE JUIN. La volonté de parvenir à une union bancaire.
• Les États-Unis se préparent aux élections présidentielles. Jamais la polarisation entre les Républicains et les Démocrates n’a été aussi forte dans l’histoire du pays. Sont-ils en mesure de trouver un compromis sur la réduction de la dette et l’endiguement des déficits budgétaires astronomiques? La FED peut-elle intervenir sans être stigmatisée politiquement (un soutien monétaire serait en effet perçu comme un soutien à Obama)? • La hausse du marché n’a pas été portée par le grand public ou les investisseurs «à long terme» classiques tels que les assureurs et les fonds de pension, comme en témoigne le niveau historiquement bas des volumes traités au cours des mois estivaux. Cet argent volatil peut donc s’évaporer tout aussi rapidement qu’il est apparu. • Le prix du pétrole, après s’être brièvement évanoui, est en train de remonter en flèche suite aux problèmes d’offre en mer du Nord et aux tensions géopolitiques concernant l’Iran. Le prix du pétrole en euros vient d’atteindre un nouveau record historique. Le prix des denrées alimentaires menace à nouveau de crever le plafond suite aux mauvaises récoltes de maïs, de blé et de soja. L’augmentation du prix de ces matières premières est de nature à saper toute reprise économique timide et à raviver l’inflation. Les révoltes du printemps arabe sont un vague rappel des conséquences pouvant accompagner ce type de crises alimentaires.
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ÿ BARACK OBAMA MÈNE SA CAMPAGNE. La polarisation entre les deux partis n’a jamais été aussi forte.
Nous sommes convaincus qu’il nous faudra encore franchir des zones de turbulences sur les marchés. Les politiques continueront toujours à sortir de nouvelles mesures de leur chapeau, chacune d’entre elles constituant un modeste pas sur le long chemin qui devrait nous amener à davantage d’harmonisation politique, monétaire, bancaire et institutionnelle au sein de l’Europe. L’euro et la zone euro y trouveront finalement leur compte, même s’il en résultera une volatilité sur les marchés.
L’AUGMENTATION DU PRIX DES MATIÈRES PREMIÈRES EST DE NATURE À SAPER TOUTE REPRISE ÉCONOMIQUE TIMIDE ET À RAVIVER L’INFLATION.
ÿ POMPE À PÉTROLE À BAHREIN.
Le prix du pétrole a atteint un nouveau record historique.
CHRONIQUE FINANCIÈRE | MACROÉCONOMIE
MACROÉCONOMIE
LA LUTTE CONTRE LA CRISE ATTEINT DES
SOMMETS FOTO’S © ROULARTA/REPORTERS AGENCY
CHRISTOPHE VAN CANNEYT, Head of Fixed Income & Structured Products, Puilaetco Dewaay.
«If you’re going through hell, keep going.» C’est ce que Winston Churchill répondit avec son sens de la répartie habituel lorsqu’on lui demanda, lors d’un sombre jour de mai 1940, comment mettre un terme à la vague de défaites sur le front. Sa réponse pourrait tout aussi bien s’appliquer à la lutte contre la crise de l’euro, qui persiste depuis maintenant trois ans et qui, malgré une succession pratiquement sans fin de sommets, n’est manifestement pas endiguée.
A
u contraire, la situation semble avoir de nouveau empiré pendant l'été. Tout d’abord, Chypre a dû faire appel à une aide d’urgence de l’Union européenne. C’est ensuite l’Espagne qui a dû capituler et demander une aide pour ses banques en difficulté. Sans compter la saga grecque qui ressemble de plus en plus à la chronique d’une mort annoncée: le pays n’a pas réussi à maîtriser la situation pénible de ses finances publiques et a, depuis lors, fini par épuiser le capital patience de ses partenaires européens. Désormais, une éventuelle sortie de la Grèce de la zone euro n’est plus taboue et les départements d’analyse des banques, tout comme la BCE sans aucun doute, envisagent de plus en plus ce scénario. Néanmoins, la conclusion principale de ces analyses serait que malgré les arguments économiques en faveur d’une «grexit», cette sortie reviendrait à ouvrir une véritable boîte de Pandore financière, aux conséquences imprévisibles. Tant qu’il existe d’autres possibilités, telles que le rééchelonnement des dettes de la Grèce ou de son plan d’austérité, mieux vaut les épuiser. Ce qui nous amène à un autre dilemme récurrent posé par la crise : les dirigeants poli-
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tiques des États plus forts doivent vendre ces mesures à leur propre population. Les pays du Nord commencent à en avoir assez de devoir trinquer à cause de ce qu’ils perçoivent comme un refus des pays du Sud de payer eux-mêmes leurs excès du passé.
«IF YOU’RE GOING THROUGH HELL, KEEP GOING.» (WINSTON CHURCHILL)
ÿ LONDRES, OUVERTURE DES JEUX OLYMPIQUES. Un acteur joue le rôle de Winston Churchill (encart).
Mais en dépit de cette multitude d’ombres au tableau, il ne faut pas oublier qu’un certain progrès a été accompli dans plusieurs domaines dans la lutte contre la crise. Ainsi, le plan de sauvetage des banques espagnoles témoigne enfin de la prise de conscience qu’il est temps de rompre le cercle vicieux existant entre les banques et les pouvoirs publics. Les opérations de refinancement à long terme (LTRO) lancées au début de l’année par la BCE ont permis de conjurer une crise des liquidités du système bancaire européen. Et même en Allemagne, l’idée d’une mutualisation limitée des dettes européennes a gagné du terrain. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 11
CHRONIQUE FINANCIÈRE | MACROÉCONOMIE
ÿ BARACK OBAMA - MITT ROMNEY. Deux programmes radicalement opposés. Toutefois, les embûches politiques, juridiques et économiques jalonnant le chemin vers une solution restent à la fois nombreuses et considérables, tandis que la situation économique semble prendre une tournure défavorable. En effet, la propagation de la crise a plongé l’ensemble de l’Europe méridionale dans une profonde récession, entraînant désormais aussi dans son sillage les pays septentrionaux plus forts. Dans le reste du monde, la croissance ralentit également. En Chine, moteur de la croissance mondiale depuis quelque temps, il s’agit (du moins officiellement) d’un ralentissement volontaire afin de lutter contre le retour du spectre de l’inflation. Mais aux États-Unis, où le débat sur la dette et les déficits publics du pays s’intensifie à la veille des élections, on ne peut que s’inquiéter de plus en plus du ralentissement de la croissance. ÉTATS-UNIS : LE MOTEUR DE LA CROISSANCE TOUSSE Ces derniers mois, le temps n'est en effet
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pas au beau fixe sur la scène économique américaine. Après la récession consécutive à l’implosion de Lehman Brothers, le rythme de la croissance n’est jamais revenu à un niveau normal pour une période de reprise. En effet, la réduction nécessaire du taux d’endettement a restreint la marge financière des ménages, pourtant indispensable afin de stimuler fortement leur consommation. La reprise s’est donc enlisée dans le processus nécessaire de désendettement. Malgré tout, cette lente reprise a permis de créer suffisamment d’emplois (environ 150 000 postes/ mois en moyenne) pour réduire le taux de chômage de façon durable. Cette amélioration du marché du travail a timidement restauré la confiance, ce qui a tout de même débouché sur une augmentation limitée de la consommation et de l’activité économique. Malheureusement, il semble que cette légère reprise ne résiste pas à une combinaison d’évolutions intérieures et extérieures négatives. À l’extérieur, la crise européenne et le début du ralentissement de la croissance en
Asie ont mis un frein aux exportations américaines. Au niveau national, bon nombre de citoyens américains, inquiets du déficit budgétaire constamment élevé, sont peutêtre arrivés à la conclusion qu’il n’y a pas grand-chose de bon à attendre des pouvoirs publics sur le plus long terme. En effet, pour résorber les déficits, il est nécessaire soit d’augmenter les impôts, soit de rogner sur des services publics tels que les soins de santé et la sécurité sociale. Tout citoyen doué de bon sens se rendra de toute façon compte que son pouvoir d’achat diminuera à l’avenir et anticipera cette situation en épargnant davantage dès à présent. Et force est de constater que les ventes au détail ont effectivement dégringolé depuis le début du deuxième trimestre. La création d’emplois a également fortement reculé, provoquant une nouvelle augmentation du taux de chômage. Bref, le rythme de croissance déjà lent au départ a continué à s’affaiblir, faisant régresser l’économie à un niveau proche de la récession.
MACROÉCONOMIE | CHRONIQUE FINANCIÈRE
OBAMA PLAIDE POUR PLUS D’IMPÔTS, ROMNEY POUR MOINS. MAIS LEURS PROPOSITIONS RESTENT VAGUES.
UNE LUEUR D’ESPOIR SUR LE MARCHÉ DE L’IMMOBILIER Tout n’est pourtant pas noir aux États-Unis. Ainsi, le marché de l’immobilier, à l’origine
de toute la crise, montre de plus en plus de signes de reprise. Les activités de construction et les prix semblent progressivement remonter la pente, après s’être enlisés ces
VENTES AU DÉTAIL AUX ÉTATS-UNIS
dernières années. Cette évolution s’explique en partie par la façon dont la FED a artificiellement maintenu les taux d’intérêt à un niveau bas en proposant des rachats de prêts
TAUX DE CHÔMAGE AUX ÉTATS-UNIS
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ÿ IMMOBILIER AUX USA. Un rétablissement naissant. hypothécaires à titre d’aide, à tel point que les taux d’intérêt hypothécaires sur 30 ans ont atteint un seuil historique au cours du deuxième trimestre. Bien qu’embryonnaire, cette reprise est une bonne nouvelle aussi bien pour le consommateur que pour le secteur financier. En effet, elle met un terme à la diminution pro-
gressive de la valeur de l’actif principal des ménages, ce qui leur permet au moins de ne pas devoir se séparer d’un bien, parmi tous ceux qu’ils sacrifient afin d’essayer de rétablir la valeur nette de leurs actifs. Par ailleurs, cette reprise améliore également la qualité des actifs gérés par les banques, mettant également fin à la kyrielle de prêts non performants. Le nombre de défauts de paiement
PRIX DE L’IMMOBILIER AUX ÉTATS-UNIS
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de prêts hypothécaires diminue néanmoins, depuis quelque temps. UNE CROISSANCE TROP LENTE Bien que le marché de l’immobilier laisse entrevoir une lueur d’espoir, la nouvelle paralysie de l’économie au cours du deuxième trimestre est une mauvaise nouvelle en termes budgétaires, et ce à deux niveaux : il sera non
EMPRUNTS PROBLÉMATIQUES
MACROÉCONOMIE | CHRONIQUE FINANCIÈRE
seulement impossible de sortir facilement de l’impasse budgétaire, mais ce problème arrive en plus au mauvais moment, à savoir dans la dernière ligne droite avant les élections présidentielles. En effet, le monde politique n’a jusqu’à présent pas osé soumettre la population fortement touchée par la récession et la baisse des prix du logement à une majoration indispensable des impôts. Craignant que la reprise stagne complètement, l’équipe Obama a systématiquement reporté l’assainissement budgétaire aux calendes grecques. Pour l’exercice en cours (et pour la quatrième fois consécutive), les États-Unis vont également enregistrer un déficit budgétaire de plus de 1 000 milliards USD. Cette dette faramineuse ne pouvait être financée par les marchés de capitaux privés sans augmenter fortement les taux d’intérêt. C’est pourquoi une partie importante des déficits a été «monétarisée»: les obligations d’État ont été directement rachetées par la FED. Principale réponse politique à la crise de la dette aux États-Unis, ces opérations de
«quantitative easing» ont été menées dans l’espoir secret qu’à plus long terme, une reprise de plus en plus forte renforce les recettes publiques, de manière à ce que les déficits se résorbent d’eux-mêmes, à la suite de quoi le remboursement des obligations à la FED éliminerait l’excès de liquidités du système. La nouvelle paralysie de l’économie au cours du deuxième trimestre vient saper ce scénario parfait: la croissance de l’économie est tout simplement trop lente pour pouvoir évoluer vers un équilibre budgétaire. Dès lors, il y a fort à parier que la situation financière critique du pays deviendra l’enjeu des prochaines élections, d’autant plus que des décisions de taille devront être prises rapidement après le processus électoral. En effet, à l’été 2011, les démocrates et les républicains ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur l’augmentation du plafond maximal de la dette des États-Unis, à la suite de quoi le pays s’est retrouvé à 24 heures de la cessation de paiement. Conclu in extremis, un accord a prévu que le nouveau plafond de la dette serait calculé de manière à n’être atteint qu’après les élections, dans l’espoir
LES DETTES DES ÉTATS-UNIS N'ONT CESSÉ DE S'ACCUMULER. LA POPULATION SE REND COMPTE QU'ELLE VA DEVOIR PAYER LES POTS CASSÉS.
ÿ LA BOURSE DE NEW YORK. Il y a fort à parier que la situation financière critique du pays deviendra l’enjeu des prochaines élections.
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CHRONIQUE FINANCIÈRE | MACROÉCONOMIE
SUITE À LA DÉFAITE ÉLECTORALE DE SARKOZY, L’ALLEMAGNE DEVIENT DE PLUS EN PLUS POLITIQUEMENT ISOLÉE.
que le nouveau président, bénéficiant d’une fraîche légitimité démocratique, disposerait du capital politique nécessaire pour sortir de l’impasse. Une réelle nécessité, car si le plafond est atteint, des réductions des dépenses entreront automatiquement en vigueur. Par ailleurs, les avantages fiscaux votés sous la présidence Bush (et reconduits par Obama) expireront le 1er janvier 2013 pour les citoyens les plus riches. L’effet combiné de ce que l’on appelle le «fossé fiscal» est si néfaste que les États-Unis vont de nouveau être plongés dans une récession : l’organe budgétaire du Congrès a récemment calculé que dans ce cas de figure, l’économie américaine reculerait de pas moins de 2,9% au cours du premier semestre 2013. LA SITUATION BUDGÉTAIRE, UN ENJEU POLITIQUE La situation économique précaire du pays deviendra donc certainement l’enjeu des prochaines élections. Les options politiques proposées par les démocrates et les républicains à cet égard s’inscrivent entièrement dans la lignée de leurs recettes traditionnelles. Le candidat démocrate, Barack Obama, défend un rôle plus important de l’État dans l’économie : il prône une augmentation des impôts, surtout pour les Américains les
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plus aisés, ce qui permettrait de financer les investissements nécessaires. Son adversaire, Mitt Romney (et surtout son colistier très conservateur, Paul Ryan), est en faveur d’une diminution des impôts afin, selon lui, de stimuler l’économie de manière à réduire les déficits. Néanmoins, les programmes des deux camps brillent par leurs propositions de mesures vagues et il convient également de s’interroger sur leur faisabilité. Ainsi, il a déjà été calculé que si les propositions formulées par Paul Ryan sont mises en œuvre, les dépenses de tous les départements américains seraient, en 2020, même inférieures aux dépenses que représente actuellement le département de la Défense à lui seul… Quoi qu’il en soit, il reste également à savoir dans quelle mesure les plans tiennent compte de la réalité du vieillissement de la population et de l’augmentation de la dette publique. En effet, les États-Unis sont désormais aussi touchés par le phénomène du vieillissement de la population. La proportion des personnes âgées de plus de 65 ans par rapport à la population active va ainsi passer de 4,5/1 aujourd’hui à 2,5/1 en 2030. Sachant que bon nombre des
dépenses publiques actuelles sont affectées à des programmes populaires destinés aux seniors (surtout le programme de soins de santé «Medicare») et que cette catégorie de personnes va constituer un électorat de plus en plus puissant, l’on peut facilement comprendre que la diminution de ces programmes onéreux et insuffisamment financés ne sera pas chose aisée. Sans compter qu’avec une dette publique qui dépasse désormais 100% du PNB, l’augmentation inévitable des taux d’intérêt risque d’entraver le processus d’assainissement budgétaire. Bref, il semblerait que le calme relatif qui régnait aux États-Unis en comparaison avec la situation européenne touche à sa fin. La stratégie suivie jusqu’à présent afin de sortir de la crise a perdu de son efficacité à l’heure actuelle en raison d’évolutions extérieures négatives, mais aussi de la méfiance croissante au sein même des États-Unis vis-à-vis de l’accumulation des dettes du pays. La population se rend compte qu’elle va devoir payer les pots cassés. Les États-Unis ne sont donc manifestement pas parvenus à lutter contre le gonflement de leur dette gigantesque et seront donc finalement contraints de s’attaquer aux déséquilibres fiscaux. Nous ne pouvons qu’espérer qu’ils s’en sortiront
ÿ ANGELA MERKEL - NICOLAS SARKOZY. La fin d'un tandem. mieux que l’Europe qui offre toujours un triste spectacle dans sa lutte contre la crise… LA FIN DE «MERKOZY» Toujours en lutte contre la propagation de la crise, l’Europe ressemble parfois à s’y méprendre à un film de série B: plusieurs fois, il a semblé que l’on frôlait l’implosion totale, avant de parvenir à contourner le danger à la dernière minute pour, ensuite, se heurter à un nouvel obstacle. Tout a commencé par le suspense des élections en Grèce, où le parti anti-austérité Syriza a fait un grand bond en avant, mais a raté la majorité absolue de justesse. Les partis traditionnels ont ainsi pu former une coalition afin de poursuivre la mise en œuvre du plan d’austérité de l’UE, mais la cohésion de ce gouvernement est faible. Comme prévu, les élections en France ont été marquées par la victoire du candidat socialiste, François Hollande, bien que le président Sarkozy ait fortement grimpé dans les sondages les derniers jours. Sa défaite allait influencer le rapport de force en Europe et, par conséquent, la lutte contre la crise. En effet, avant les élections, François Hollande, qui décrochera plus tard aussi la majorité parlementaire, s’était montré particulièrement critique au sujet de la politique
d’austérité principalement imposée par l’Allemagne aux pays en difficulté. Selon lui, il était nécessaire d’offrir des perspectives à la population des pays concernés en mettant en œuvre une stratégie de croissance. Après sa victoire, il a rapidement obtenu le soutien de Rome et de Madrid non sans raison, ces deux pays ayant également fortement souffert du diktat de l’austérité décrété par l’Allemagne. La rupture du tandem « Merkozy » a de plus en plus isolé la politique allemande. Parallèlement, la lutte contre la crise s’est davantage concentrée sur une stratégie de croissance, une tendance déjà en marche depuis fin 2011. Une nouveauté cependant : afin de laisser suffisamment de temps à cette approche pour porter ses fruits, les pays du Sud, soutenus par la France, ont de plus en plus insisté sur la nécessité d’une politique monétaire et de mécanismes de la BCE plus souples, au grand dam de l’Allemagne et de ses alliés. LA CRISE S'INTENSIFIE : RETOUR AUX OPÉRATIONS LTRO L’Europe a de nouveau été douloureusement marquée par des positions opposées en matière économique et monétaire. Or, une vision faisant davantage l’unanimité s’impose. En effet, des nuages noirs se sont de nouveau amoncelés au-dessus de l’Europe.
Les premiers mois de l’année, la crise semblait être un tant soit peu sous contrôle grâce à une injection massive de liquidités opérée par le président de la BCE, Mario Draghi, dans le cadre de deux opérations LTRO. Lors de ces opérations, un total d’environ 1 000 milliards EUR a été prêté aux banques à un taux de 1% sur une période de trois ans, ce qui a permis à la BCE d’éviter une crise généralisée des liquidités dans le système bancaire européen. Ce résultat a signé le retour provisoire de l’optimisme quant à la capacité des pouvoirs publics à se financer: les liquidités des banques semblant être garanties, celles-ci réinvestiraient une partie de cet argent dans des titres d’État, ce qui maintiendrait le niveau des taux d’intérêt sur ces titres. Mais ce raisonnement s’est révélé erroné. Il est apparu de plus en plus clairement que le rythme de la croissance économique en Europe, surtout dans les pays vulnérables du Sud, avait fortement souffert des mesures d’austérité. Ce sont principalement les messages alarmants au sujet de la situation dramatique de l’économie espagnole qui ont suscité une inquiétude grandissante. Ce pays non compétitif sur le plan industriel n’a pu résister à l’arrivée simultanée d’un effondrement Automne - Hiver 2012 | Analyses | 17
LE PROCESSUS D’UNE SURVEILLANCE BANCAIRE EUROPÉENNE SOUS LA DIRECTION DE LA BCE EST ENFIN AMORCÉ. ÿ FRANÇOIS HOLLANDE. Un plaidoyer pour offrir des perspectives aux populations des pays en difficulté. du marché de l’immobilier, provoquant à son tour une crise bancaire d’envergure, et d’un assainissement budgétaire considérable. Les craintes selon lesquelles la crise bancaire espagnole risquait de conduire le pays à sa perte n’ont fait qu’augmenter. Par la suite, quand il s'est avéré que les finances des 17 communautés autonomes espagnoles étaient mal en point, la dernière once de confiance dans le pays s’est envolée. Les taux d’intérêt sur les titres d’État espagnols ont grimpé: début mai, le seuil des 6% a été franchi et à la mi-juin, le seuil de 7% considéré par les marchés comme le maximum absolu et viable a été atteint. À la suite de cette évolution, les taux d’intérêt sur les titres italiens ont également atteint des sommets inquiétants. Bref, au début des vacances d’été, nous étions manifestement revenus à la case «crise». Dans ce contexte, un nouveau sommet européen a été organisé les 28 et 29 juin. Étant donné les résultats souvent décevants de ce genre de réunions par le passé, celle-ci suscitait peu d’enthousiasme. Mais pour une fois, les décideurs politiques ont réussi à surprendre agréablement les marchés : de nouvelles idées intéressantes ont été formulées, surtout dans le domaine financier. Il a enfin été jugé nécessaire d’organiser une surveillance bancaire efficace au niveau européen sous la direction de la BCE. Certes, le chemin à parcourir reste long, mais le processus est enfin amorcé.
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Une mesure d’une importance primordiale pour les marchés: l’évolution vers une recapitalisation directe des banques par le fonds de soutien européen (mécanisme européen de stabilité, MES), où le fonds renoncerait par ailleurs à sa position de créancier privilégié (dans le cas de l’Espagne). On espérait
ainsi rompre enfin le cercle vicieux existant entre les finances publiques et les banques, une idée qui revêtait une importance particulière dans la situation espagnole. C’est pourquoi un plan de sauvetage de 100 milliards EUR a été élaboré pour les banques espagnoles.
ÉVOLUTION DES TAUX À 10 ANS EN ESPAGNE ET EN ITALIE
MACROÉCONOMIE | CHRONIQUE FINANCIÈRE
UNE ÉVENTUELLE SORTIE DE LA GRÈCE DE LA ZONE EURO N’EST PLUS TABOUE ET LES DÉPARTEMENTS D’ANALYSE DES BANQUES, TOUT COMME LA BCE SANS AUCUN DOUTE, ENVISAGENT DE PLUS EN PLUS CE SCÉNARIO.
Les marchés ont, dans un premier temps, été soulagés par ces décisions. UN PEUPLE DÉSESPÉRÉ, DES DIRIGEANTS DÉRAISONNABLES, UN PAYS DÉSEMPARÉ? Malheureusement, la joie fut de courte
durée. En effet, pour pouvoir être mis en œuvre, le plan doit d’abord surmonter plusieurs obstacles politiques et juridiques de taille. Au niveau politique, dès son retour au pays, Angela Merkel s’est fait taper sur les doigts : la presse l’a accusée d’avoir trop cédé aux demandes du Sud. C’est surtout la créa-
tion du MES qui lui a été reprochée, car elle aurait ainsi donné indirectement naissance aux Eurobonds, auxquels l’Allemagne est allergique. Et ils n’ont pas entièrement tort : le MES va emprunter de l’argent sur le marché des capitaux afin de venir en aide aux banques et aux pouvoirs publics en difficul-
ÿ HERMAN VAN ROMPUY - JOSÉ MANUEL BARROSO. Le sommet européen de fin juin a surpris de manière positive. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 19
CHRONIQUE FINANCIÈRE | MACROÉCONOMIE
«L’ESPAGNE OU L’ITALIE PEUVENT GAGNER LA COUPE MAIS PAS NOTRE RATING.» (LE PREMIER MINISTRE NÉERLANDAIS MARK RUTTE) ÿ BERLIN. La protestation allemande contre «une solidarité trop européenne». té, mais les pays participants devront, quant à eux, se porter garants du remboursement des montants empruntés par le MES. En réalité, ces pays supportent donc ensemble le risque découlant de l’aide financée par des capitaux du MES et non remboursée par la suite, ce qui revient de facto à un Eurobond. La presse allemande ne s’est pas montrée tendre vis-à-vis de cette étatisation des dettes privées, qui pèsera inévitablement aussi sur la notation de l’Allemagne. Dans d’autres pays également, des voix se sont élevées contre cette aide. Le jour de la finale de l’Euro 2012 disputée par l’Espagne et l’Italie, le parti néerlandais VVD (du premier ministre sortant Rutte) a ainsi publié ce gros titre sur son site Internet : « Ils peuvent avoir la coupe, mais ils n’auront pas notre notation. » Si la frustration provoquée par la défaite de l’équipe batave à la Coupe d’Europe n’est sûrement pas non plus étrangère à cette déclaration, il n’en reste pas moins que l’opinion publique dans les pays du Nord, fournisseurs de cette aide, s’oppose de plus en plus à ce qu’elle voit comme des flux d’argent incontrôlables vers des pays du Sud qui refusent toute réforme. Outre cette hostilité croissante des populations du Nord, l’opération de sauvetage se
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heurte à un autre obstacle majeur, d’ordre juridique. En Allemagne, une plainte a été déposée auprès de la Cour constitutionnelle contre la création du MES, approuvée par le Parlement le 26 juin 2012. En effet, lors de la création de l’union monétaire par le célèbre traité de Maastricht, une clause de non-renflouement (« no bail-out ») stricte avait explicitement été prévue, interdisant ainsi aux États membres de se porter garants à titre individuel pour les dettes d’autres États membres. L’objectif était d’inciter les États membres à faire preuve de suffisamment de discipline financière, car ils savaient que les autres pays ne leur sauveraient pas la mise. Mais cela n’a pas été le cas, comme les événements de ces dernières années l’ont largement démontré. Or, le rôle de bouée de sauvetage que doit jouer le MES est contraire au principe selon lequel chacun est responsable de ses propres dettes. C’est pourquoi les plaignants estiment que ce mécanisme est anticonstitutionnel, ce qui remet en question le fondement juridique des plans de sauvetage européens. Après un bref répit, les taux d’intérêt sur les titres espagnols et italiens se sont de nouveau envolés. Fin juillet, les taux d’intérêt à 10 ans ont atteint un pic de plus de 7,5% en Espagne, tandis que ceux de l’Italie ont de
nouveau dépassé les 6,5% (voir graphique). Personne ne semblait savoir où donner de la tête. La situation commençait à ressembler à ce qu’un chroniqueur médiéval écrivit en son temps à propos des Pays-Bas méridionaux: le peuple est désespéré, les dirigeants sont déraisonnables, le pays est désemparé. SUPER MARIO VIENT À LA RESCOUSSE Il était donc grand temps que la seule instance disposant encore de la capacité nécessaire pour intervenir rapidement et efficacement vienne à la rescousse : la BCE. Le président de la BCE, Mario Draghi, a fait savoir fin juillet, lors d’une conférence à Londres, que la BCE était prête à procéder à des acquisitions de soutien afin de contrôler le dérapage des taux dans les pays périphériques. Ce à quoi il a ajouté qu’il pouvait être cru sur parole lorsqu’il affirmait que «ce serait suffisant». Le marché a réagi de manière euphorique, entraînant une baisse des taux d’intérêt. Mais cette déclaration fracassante de Mario Draghi a naturellement mis ce dernier dans une position l’obligeant à concrétiser les grandes espérances qu’il a générées afin d’éviter un bain de sang sur le marché. Lorsqu’il a annoncé, après la réunion qui s’est tenue
MACROÉCONOMIE | CHRONIQUE FINANCIÈRE
début août, que la BCE était disposée à acquérir principalement les obligations à court terme des pays les plus touchés à condition que ceux-ci fassent une demande officielle de soutien, le marché a commencé par exprimer sa déception. Mais une seconde lecture de sa déclaration autorisait un optimisme prudent. Le marché s’est rendu compte que «Super Mario» s’y était pris de manière particulièrement finaude. En effet, en contraignant un pays à faire une demande officielle de soutien auprès du MES, celui-ci est tenu d’accepter les conditions qui assortissent une telle demande. Et en visant principalement les obligations à court terme, la BCE s’est également donné les moyens nécessaires pour mettre le pays sous pression s’il venait à relâcher ses efforts d’assainissement. En effet, dans l’hypothèse où la BCE suspendrait ses acquisitions, le pays serait très rapidement confronté à une nouvelle hausse des taux. Le président de la BCE n’avait donc nullement l’intention de donner un chèque en blanc aux pays les plus indigents, ce qui était probablement la seule manière de s’assurer du soutien des pays du Nord. Une étude réalisée en août a encore démontré la nécessité de cette approche, en révélant qu’à peine un quart des Allemands estiment que la Grèce
doit rester dans la zone euro ou continuer de bénéficier d’une aide de la part d’autres pays. Dès lors, ce n’est pas un hasard si Mario Draghi a adressé une lettre ouverte aux Allemands dans la revue financière «Die Zeit» afin de les rallier davantage à sa cause. TROUVER LE JUSTE MILIEU Le président de la BCE doit en effet jouer les funambules pour concilier des visions fondamentalement différentes de la politique monétaire, tout en permettant à la BCE d’assumer son rôle dans la poursuite de la lutte contre la crise. Berlin souhaite, dans le respect de la tradition de la Bundesbank, que la politique monétaire ait pour objectif pur et simple de lutter contre l’inflation. C’est pourquoi les banques centrales doivent aussi être totalement indépendantes des autorités politiques qui n’hésitent pas à promettre tout, en toutes circonstances. Les Allemands considéraient également que cette vision était bétonnée dans le traité européen et se sentent à présent roulés par la monétarisation rampante des dettes du Sud. En revanche, les pays du Sud (et principalement la France de tradition centraliste) conçoivent la politique financière comme un instrument soumis lui aussi aux autorités
MARIO DRAGHI DOIT CONCILIER DES VISIONS FONDAMENTALEMENT DIFFÉRENTES DE LA POLITIQUE MONÉTAIRE.
ÿ MARIO DRAGHI. Le marché s’est rendu compte que «Super Mario» s’y était pris de manière particulièrement finaude.
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CHRONIQUE FINANCIÈRE | MACROÉCONOMIE
ÿ EXKI. Triodos Bank steunt het concept van gezonde fastfood.
ÿ ATHÈNES - MADRID. Des protestations contre le projet européen. politiques. C’est pourquoi ils ne comprennent pas que les Allemands refusent catégoriquement de les aider et considèrent que leurs exigences constituent une forme d’ingérence dans leurs affaires internes et, partant, une violation de leur souveraineté. Ils semblent avoir oublié qu’en entrant dans la zone euro, ils ont renoncé de facto à cette souveraineté et que la demande d’aide implique l’obligation de procéder à des réformes douloureuses.
LE GRAND DRAME DE LA CRISE EST QUE L'EUROPE EST EN TRAIN DE PERDRE EN CRÉDIBILITÉ AUPRÈS DE NOMBREUX JEUNES. 22 | Analyses | Automne - Hiver 2012
Mario Draghi tente à présent de trouver une voie médiane pragmatique entre ces deux approches pour sortir de la crise en limitant autant que possible les dommages économiques. Il a bien conscience que le maintien du status quo est inefficace d’un point de vue économique, polarisant d’un point de vue politique et inacceptable d’un point de vue social. En effet, le grand drame de la crise est que l’Europe est en train de perdre en crédibilité auprès d’une grande partie des jeunes qui ne la voient désormais plus comme un projet noble et nécessaire en faveur de la paix et de la prospérité. Avec un taux de chômage de
25% en Espagne et en Grèce, et un taux de chômage des jeunes de plus de 50%, l’on atteint en effet les chiffres les plus sombres de la dépression des années 30. Cette absence totale de perspectives dans leur propre pays pousse de nombreux jeunes Irlandais, Grecs et Espagnols à émigrer afin de se construire un avenir meilleur, que ce soit dans les pays plus riches du Nord ou aux États-Unis, au Canada et en Amérique du Sud. Cette masse croissante de jeunes indignés nuit également à la stabilité et à la modération politiques. L’Allemagne en prend aussi de plus en plus conscience, comme en témoigne un article d’opinion qui a défrayé la chronique, publié fin mai par l’ancien ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fisher. C’est surtout la conclusion de cet article intitulé The threat of German amnesia qui a fait parler d’elle, dans la mesure où elle renvoyait ouvertement au passé allemand à l’époque de la guerre. En effet, il y affirmait explicitement que l’Allemagne devait prendre garde à ne pas provoquer la troisième destruction totale de l’Europe en un siècle, bien que ses intentions soient bonnes en l’occurrence...
LES TENSIONS SOCIALES INTENSIFIÉES PRÉOCCUPENT LES DÉCIDEURS CHINOIS, TRÈS ATTACHÉS AU CALME DU PAYS. UNE CROISSANCE CHINOISE LENTE MAIS PLUS ÉQUILIBRÉE Le reste du monde ne pouvait rester indifférent face à la situation critique en Europe et aux États-Unis. Le ralentissement de l’économie dans le monde occidental n’a pas tardé à influencer les performances du pays exportateur par excellence, la Chine, provoquant une nette diminution du rythme de croissance de l’économie chinoise. Alors que, par le passé, la croissance du pays a longtemps atteint un taux moyen de 10% par an, le rythme a dégringolé ces six derniers mois, s’élevant à un peu plus de 7%. L’on peut cependant se demander si les dirigeants chinois en sont réellement mécontents. En effet, l’époque où la Chine visait une croissance maximale semble révolue. Désormais, le pays poursuit l’objectif d’une croissance plus durable et plus équilibrée d’un point de vue qualitatif, afin d’assurer la pérennité et une meilleure répartition des fruits de la croissance. En effet, la Chine a été progressivement déstabilisée par le rythme effréné de la croissance ces vingt dernières années. Ce grand pays s’est, lui aussi, heurté à ses propres
Par ailleurs, le modèle financier à l’origine de la croissance effrénée a commencé à être remis en question, ce qui a fortement agité le marché de l’immobilier et la santé du système financier qui y est liée.
la croissance effrénée sur les plans social et environnemental doivent être atténués. À la grande surprise de l’Occident, le premier ministre Wen Jiabao a annoncé que l’objectif de croissance fixé dans le cadre du prochain plan quinquennal serait ramené à 7,5%, un pourcentage très modeste pour la Chine. Parallèlement, de nombreuses initiatives sont entreprises afin de lutter contre la pollution. Dans les coulisses, d’autres mesures sont probablement aussi adoptées pour améliorer un tant soit peu la situation sociale de nombreux Chinois, en toute discrétion. Cela dit, le pays n’exauce pas les souhaits politiques d’une partie de la population : les pouvoirs publics s’acharnent à maintenir leur monopole de l’information et du pouvoir.
Enfin, les tensions sociales se sont également intensifiées. Ce sont surtout ces événements qui ont dû préoccuper les décideurs chinois, très attachés au calme du pays. Les dirigeants chinois, qui seront presque tous remplacés dans les mois à venir, semblent s’être rendu compte qu’il est nécessaire de changer de cap si le parti veut conserver son monopole du pouvoir. Le rythme de la croissance doit diminuer et les effets négatifs provoqués par
Ce ralentissement de la croissance au sein du seul pôle de croissance restant de l’économie mondiale ne pouvait pas tomber plus mal pour certains pays occidentaux. Mais cette évolution présente tout de même des avantages : elle devrait contribuer à une augmentation moins rapide des prix de l’énergie et des matières premières, ce qui nous permettra également de garder les taux d’intérêt à un niveau bas sans difficulté. Et à long
limites en termes de main d’œuvre (surtout en termes de travailleurs très qualifiés, mais aussi de plus en plus de travailleurs moins qualifiés), d’espace de vie (les villes et la région côtière fortement peuplées et polluées), de logistique et de transport pour mener à bon port les énormes flux de marchandises et de matières premières. La croissance s’est dès lors de plus en plus souvent enlisée dans des pressions inflationnistes toujours plus régulières.
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ÿ USINE DE VOITURES EN CHINE. Le pays s'est heurté à ses propres limites, notamment en termes de main-d'oeuvre. terme, cette croissance certes plus lente, mais plus équilibrée s’avèrera probablement préférable à un cycle « boom-bust », où la croissance rapide est subitement suivie d’un effondrement. Les événements en Chine le démontrent d’ores et déjà : la croissance plus lente a fortement freiné le rythme de l’inflation, ce qui a permis aux autorités chinoises d’assouplir leur politique monétaire et, ce faisant, de compenser le ralentissement de l’économie mondiale. EN CONCLUSION Tout porte à croire que nous allons devoir nous contenter du conseil de Churchill et traverser encore quelque temps l’enfer de la crise avant d’entrevoir une lumière au bout du tunnel… Aux États-Unis, à l’aube des élections, les décisions qui s’imposaient depuis longtemps pour résoudre la pénible situation budgétaire et, surtout, concrétiser les promesses sociales non tenues, semblent enfin être à l’ordre du jour. Le débat en la matière ne se fera pas sans peine et les mesures qui seront prises en bout de course ne permettront de toute façon pas réellement d’améliorer les maigres performances de croissance de l’économie américaine. C’est pourquoi il sera nécessaire de conserver et, peut-être, de renforcer les incitants monétaires. La Chine a entretemps vu sa croissance
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diminuer, mais semble surtout s’y raccrocher pour remettre de l’ordre dans son pays et freiner la surchauffe. En Europe, la crise
continue de faire rage. Le point positif est que la lutte contre la crise progresse : on s’attaque désormais efficacement au cercle vi-
INFLATION EN CHINE
MACROÉCONOMIE | CHRONIQUE FINANCIÈRE
cieux et désastreux existant entre le système financier et les pouvoirs publics. Mais d’un autre côté, les décideurs n’arrivent toujours pas à se mettre d’accord sur la lutte globale contre la crise. La mutualisation plus que nécessaire d’au moins une partie des dettes du Sud reste un obstacle majeur pour les dirigeants européens. Mario Draghi tente de concilier les positions du Nord et du Sud, mais il reste à savoir s’il parviendra à trouver un compromis suffisamment vite pour éviter une débâcle généralisée. Il pensera certainement à une autre citation de Churchill, que nous paraphrasons: «Vous pouvez toujours compter sur les politiques pour prendre les bonnes décisions, mais uniquement après avoir épuisé toutes les autres possibilités…»
«VOUS POUVEZ TOUJOURS COMPTER SUR LES POLITIQUES POUR PRENDRE LES BONNES DÉCISIONS, MAIS UNIQUEMENT APRÈS AVOIR ÉPUISÉ TOUTES LES AUTRES POSSIBILITÉS…» (WINSTON CHURCHILL)
ÿ LE PREMIER MINISTRE WEN JIABAO. La Chine peut grandir plus lentement. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 25
ANALYSE SECTORIELLE | LUXE
LE SECTEUR DU LUXE FACE AU CYCLE ÉCONOMIQUE
C’EST DU
LUXE PHOTOS © ROULARTA / REPORTERS AGENCY
SANDRINE de MOERLOOSE, Financial Analyst, Puilaetco Dewaay.
Le secteur du luxe est l’un des plus exposés à la consommation privée et à l’accroissement du pouvoir d’achat dans les pays émergents. Alors que la part des dépenses en produits de luxe dans les pays émergents représentait en 1999 à peine 15% des ventes mondiales de l’industrie du luxe, on l’estime actuellement à 40% et certains prévisionnistes tablent sur une part de 60% d’ici la fin de cette décennie.
E
n 2011, le secteur du luxe a profité de l’engouement des investisseurs pour des valeurs ayant une large exposition aux marchés émergents, une robuste génération de cash-flows et surtout une forte capacité à faire progresser leur rentabilité par des augmentations de prix, une force qu’on appelle communément le «pricing power». La performance boursière du secteur au premier trimestre 2012 a bien été orientée, aidée par des publications de bonnes factures et des carnets de commandes bien remplis au salon mondial de l’horlogerie et de la bijouterie à Bâle (Suisse). Toutefois, à la mi-mars, le marché a commencé à s’inquiéter quant à un éventuel ralentissement de l’économie chinoise et a donc intégré certaines craintes de retournement de cycle. Plusieurs événements ont suscité certaines inquiétudes. On a tout d’abord assisté à une diminution des ventes à l’export de l’industrie horlogère suisse en avril, ce qui a rapidement posé la question de la pérennité d’une croissance à deux chiffres des ventes de certaines sociétés du luxe (Swatch, LVMH, Richemont, Hermès…). Ensuite sont arrivés d’autres événements comme le discours troublant de quelques distributeurs de grandes marques de luxe en Chine, la décision du gouvernement de Beijing (Pékin) d’interdire l’utilisation de l’argent public pour des achats
26 | Analyses | Automne - Hiver 2012
de luxe, des propos tenus par le Président de la marque Cartier quant aux perspectives de croissance des montres pour le haut de gamme et la vente de bijoux, ou encore une baisse de régime de la croissance des ventes de Burberry, comme en témoigne la publication récente de chiffres inférieurs aux attentes.
ÿ LVMH, RÉUNION DES ACTIONNAIRES. Le leader français est
en mesure de dégager de ses activités d’importants cash-flows se classant parmi les meilleurs de l’industrie.
LUXE | ANALYSE SECTORIELLE
LVMH EST UN DES RARES ACTEURS PRÉSENTS DANS PLUSIEURS MÉTIERS DU LUXE AVEC DES MARQUES PHARES AU «PRICING POWER» INÉGALÉ.
ÿ BÂLE, SALON MONDIAL DE L’HORLOGERIE ET DE LA BIJOUTERIE. Les carnets de commandes sont bien remplis.
ANALYSE SECTORIELLE | LUXE
EN TEMPS DE CRISE, LE «SOFT LUXURY» RÉSISTE MIEUX QUE LE «HARD LUXURY» DE PAR SA SENSIBILITÉ MOINDRE VIS-À-VIS DE LA CONJONCTURE.
ÿ BOUTIQUE DE LUXE EN CHINE. Le gouvernement interdit l’utilisation de l’argent public pour des achats de luxe.
SOFT OU HARD LUXURY? Aujourd’hui, les investisseurs sont partagés entre, d’une part, quelques signaux suggérant un éventuel ralentissement de la demande pour les articles de luxe et, d’autre part, la bonne performance financière affichée récemment par les leaders de l’industrie
ÿ Graphique : Soft Luxury companies - Slower growing but less cyclical
Source: BofA Merrill Lynch Global Luxury Goods Research estimates
28 | Analyses | Automne - Hiver 2012
(LVMH, Swatch). Face à ce constat, nous optons pour un comportement prudent en favorisant les sociétés dites de «soft luxury» au détriment de celles du «hard luxury». Si on analyse l’industrie du luxe, nombre de spécialistes font en effet une distinction entre ces deux segments. Le « soft luxury » englobe les produits de maroquinerie et les parfums commercialisés par une société comme LVMH. Le « hard luxury » est constitué d’acteurs spécialisés dans les montres et la joaillerie comme Swatch ou Richemont. Par le passé, on a observé qu’en temps de crise, le «soft luxury» résiste mieux que le «hard luxury» de par sa sensibilité moindre vis-à-vis de la conjoncture. En effet, les prix élevés dans le «hard luxury» expliquent qu’une décision d’achat est souvent plus difficile à prendre que pour le «soft luxury». En toute logique, les groupes de «soft luxury» sont ceux qui ont le moins souffert ces derniers mois; à l’inverse, en cas de rebond des marchés, ils ne performeront probablement pas autant que les valeurs de «hard luxury».
LUXE | ANALYSE SECTORIELLE
NOUS RESTONS ATTENTIFS À TOUT SIGNE TANGIBLE DE RETOURNEMENT DU CYCLE POUR L’INDUSTRIE DU LUXE.
ÿ
SWATCH. Selon le PDG Nick Hayek, « Le marché va devoir s’habituer à des chiffres de croissance décents dans le secteur du luxe. »
LA PRUDENCE EST DE MISE Pour rappel, à la fin du premier trimestre, le «hard luxury» a commencé à accuser le coup des inquiétudes liées à la crainte d’un ralentissement économique en Chine, un marché capital à l’exportation. Aujourd’hui, nous privilégeons le «soft luxury» en nous positionnant sur la société LVMH. Très solide financièrement, ce leader français est en mesure de dégager de ses activités d’importants cash-flows se classant parmi les meilleurs de l’industrie. LVMH est un des rares acteurs présents dans
plusieurs métiers du luxe avec des marques phares au «pricing power» inégalé. Louis Vuitton (qui représente près de 60% du résultat opérationnel du groupe) est sans nul doute la marque qui a permis à la société de traverser la dernière crise de 2008-09. Nous restons attentifs à tout signe tangible de retournement du cycle pour l’industrie du luxe. Comme Nick Hayek – PDG de Swatch – le disait: «Le marché va devoir petit à petit s’habituer à des chiffres de croissance décents
dans le secteur du luxe et accepter que les niveaux précédents ne soient pas tenables à long terme.» Si pour l’année 2012, les investisseurs demeurent relativement positifs au regard des dernières perspectives favorables exprimées lors des résultats du second trimestre, l’an prochain semble déjà intégrer un ralentissement de la croissance lié aux nombreuses incertitudes.
CONCLUSION
PRIVILÉGIER LES MARQUES ROBUSTES
ÿ
BERNARD FORNAS, PDG DE CARTIER. Les périodes de grande prospérité sont révolues, mais il ne faut pas être pessimiste pour autant. Au contraire.
Dans un contexte marqué par la forte volatilité des marchés et par les craintes relatives à l’évolution de la situation macro-économique, nous continuons à privilégier les entreprises aux marques très robustes ayant une présence géographique bien diversifiée, avec des bilans solides et générant des cash-flows récurrents.
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ANALYSE SECTORIELLE | TÉLÉCOMS
COMMENT SE POSITIONNER DANS LES
TÉLÉCOMS? PHOTOS © ROULARTA / REPORTERS AGENCY
SANDRINE de MOERLOOSE, Equity Analyst, Puilaetco Dewaay.
Depuis 2011, nous avons rétrogradé à une souspondération le secteur des télécommunications dans nos recommandations d’investissements. Malgré la faible valorisation de ce secteur, les problèmes structurels persistent, qu’il s’agisse de la réglementation en vigueur (ou celle à venir) concernant le prix des appels «roaming» entre opérateurs nationaux et étrangers, de l’endettement élevé (voire excessif) de ces sociétés ou encore de la compétition dans un marché en surcapacité.
D
e manière générale, l’activité de ces sociétés est fortement exposée à l’Europe. L’environnement macroéconomique actuel n’aide donc en rien les performances opérationnelles dans ce secteur. En outre, l’accroissement du niveau d’endettement est tel que, dans ce contexte, il finit par peser sur le bilan des sociétés télécoms.
nie mobile au monde – soit l’essentiel de son activité – mais qui offre également des services de téléphonie fixe, Internet, de télévision câblée et par satellite. La société possède des activités dans 11 marchés directement, ainsi que dans 19 autres pays via une participation dans VimpelCom (Russie), un des plus grands opérateurs dans les services de télécommunications.
Nombre de dividendes dans le secteur ont déjà connu une première vague de réduction, et une seconde risque de suivre prochainement. Avec un business en déclin, les sociétés télécoms ne sont plus capables de payer des dividendes aussi élevés que par le passé. Certaines sociétés comme Telefonica ont même décidé de suspendre totalement la distribution de leur prochain dividende, afin de pouvoir diminuer le poids de leur dette.
L’Europe représente à peine plus de la moitié de son chiffre d’affaires, dont la majorité est effectuée dans les pays nordiques (27% dans son marché domestique), moins affectés par les problèmes liés à la crise des dettes souveraines et à la récession en Europe. Une part non négligeable de ses revenus provient également de sa présence dans des pays émergents en Asie qui connaissent une pleine expansion des activités de télécommunications.
De plus, les sociétés de télécommunications ont un certain retard dans le déploiement de la fibre, une nouvelle technologie permettant une vitesse de transmission de données plus élevée dans le réseau fixe (téléphone, Internet…), ce qui va nécessiter des investissements importants, et donc avoir un impact négatif sur le cash disponible pour rémunérer les actionnaires. LA CROISSANCE DE TELENOR Le secteur des télécoms comporte des risques et des défis à relever dans le futur, avec en perspective une réduction de l’endettement et des dividendes à des niveaux plus soutenables, des investissements dans l’amélioration des réseaux de communication, un déploiement de la quatrième génération de réseaux mobiles... Ce secteur est donc en pleine période de mutation. Suivant cette réflexion, nous avons décidé d’ajouter une nouvelle action, Telenor, dans notre liste de valeurs recommandées. Telenor est une société norvégienne. C’est l’un des plus grands opérateurs de télépho-
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AVEC UN BUSINESS EN DÉCLIN, LES SOCIÉTÉS TÉLÉCOMS NE SONT PLUS CAPABLES DE PAYER DES DIVIDENDES AUSSI ÉLEVÉS QUE PAR LE PASSÉ.
ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ TÉLÉCOMMUNICATIONS. Le secteur est en pleine période de mutation. Contrairement à la majorité des opérateurs, Telenor est un des seuls, avec Telenet, à connaître encore de la croissance dans ses activités, et les perspectives des prochaines années restent positives. Dans le futur, cela devrait aussi lui permettre d’augmenter graduellement son dividende, qui a actuellement un rendement de 5%. De plus, sa forte exposition au marché mobile lui permet de participer à la transition du marché de la voix (appels téléphoniques) vers le data (Internet mobile), une activité plus rentable. Telenor a également un endettement parmi les plus faibles du marché, et celui-ci est géré en vue d’être encore diminué au fil du temps. Enfin, un investissement dans l’action Telenor permet une exposition à la couronne norvégienne (NOK), une devise « refuge » en ces temps de crise. L’ENDETTEMENT DE TELENET Telenet, qui était une de nos valeurs favorites dans le secteur, vient de quitter notre liste de valeurs recommandées. La société a annoncé mi-août qu’elle allait encore accroître son en-
dettement de 25%, alors qu’il était déjà à des niveaux équivalant au double de la moyenne sectorielle. Aucune acquisition n’est envisagée à court-moyen terme, mais ce financement leur servira plutôt à racheter 18% de leurs actions dans le marché au cours de 35 EUR, incluant 3,25 EUR/action de réduction de capital effectuée fin août. Cela va permettre à l’actionnaire principal de Telenet – Liberty Global – de porter sa participation
de 50% à 62% dans le capital, et ce sans verser de prime à l’actionnaire minoritaire. Etant donné que l’endettement de Telenet est très élevé, que les fonds propres sont négatifs et que notre objectif d’investissement est désormais atteint après la bonne performance boursière de l’action, nous préférons retirer cette valeur de notre liste de recommandations.
CONCLUSION
UNE VALEUR D’EXCEPTION Malgré de hauts dividendes offerts par ce secteur, les problèmes structurels, compétitifs et de régulation impactent négativement la majorité de ses valeurs. Une valeur sort néanmoins du lot : Telenor. Celle-ci arrive encore à allier croissance et rendement pour l’actionnaire, grâce à son développement dans des produits de nouvelle génération (télévision digitale, Smartphones…) et à sa présence dans des pays où le secteur des télécoms n’est pas encore arrivé à maturité (pays émergents).
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ANALYSE SECTORIELLE | MÉDIAS
UNE INDUSTRIE EN MUTATION
LES
MÉDIAS
PHOTOS © ROULARTA / REPORTERS AGENCY
MARC ERNAELSTEEN, Head of Equities, Puilaetco Dewaay.
En l’espace d’une dizaine d’années, l’industrie des médias a connu une véritable révolution avec l’émergence puis l’explosion d’Internet et de Google, l’apparition des réseaux sociaux (Facebook, YouTube, Twitter…), le développement de la télévision interactive ou encore la multiplication des canaux de communication. Le changement de certains modes de consommation, la fragmentation des audiences et la complexité croissante due à l’interactivité entre tous les différents acteurs engendrent une concurrence accrue dans l’industrie des médias. À cela s’ajoute une globalisation orientée vers les économies à «forte croissance» et un développement des activités numériques.
L
e numérique et les marchés émergents sont donc deux changements structurels qui révolutionnent l’industrie des médias, avec au final des gagnants et des perdants. Compte tenu de la «digitalisation» des médias, la publicité sur Internet a encore de beaux jours devant elle, même si la compétition est rude entre tous les acteurs. Ce constat est loin d’être démenti malgré un ralentissement de la croissance mondiale. Les médias traditionnels (TV, radio, presse…) accusent davantage le coup. Dans ce secteur des médias, seul le segment des agences de publicité est en mesure de bénéficier au mieux de la percée du numérique. Cette complexité nouvelle de l’univers média, l’interactivité avec les consommateurs et la multiplication des annonceurs, avec l’arrivée de nouveaux acteurs venus de pays émergents ou provenant des nouveaux supports médias, requièrent que les agences de publicité soient considérées comme «créatrices de valeurs» par les clients, eux-mêmes confrontés aux défis liés à Internet (e-commerce) et à la mondialisation. Une population grandissante découvre et sélectionne ce qu’elle veut, où et quand elle le veut. Les clients des agences de publicité sont aujourd’hui à la recherche d’idées créatives et surprenantes afin de s’exprimer dans un univers de la communication fragmenté, voire encombré. De la même manière, les clients ont besoin des plus grandes compétences tant dans l’utilisation de (nouvelles) technologies que pour l’interprétation de données afin que les idées ou messages captent précisément l’attention des personnes ciblées. C’est un métier qui fait appel à l’émotivité des gens.
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DES SERVICES DIVERSIFIÉS Pour répondre à cette demande de services publicitaires et de communication variés ainsi qu’aux besoins spécifiques de chaque client, les services offerts par les acteurs de ce secteur sont regroupés en trois catégories : la publicité classique, les agences spécialisées ou autres services de marketing, et le conseil et l’achat d’espaces publicitaires. La publicité classique se résume, selon une formule consacrée par Publicis, à penser «global» et à agir «local». C’est une nécessité pour les annonceurs car les marques sont aujourd’hui de plus en plus mondiales. La mission des agences de publicité et des réseaux est de trouver des idées qui sont à la fois assez universelles pour traverser les frontières tout en étant adaptables à chaque marché local, le consommateur pouvant s’approprier facilement et efficacement cette idée.
LE NUMÉRIQUE ET LES MARCHÉS ÉMERGENTS SONT DEUX CHANGEMENTS STRUCTURELS QUI RÉVOLUTIONNENT L’INDUSTRIE DES MÉDIAS.
ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ LE SALON IFA À BERLIN. La complexité nouvelle de l’univers média. Les agences spécialisées et services marketing (appelés SAMS dans le métier) consistent en un ensemble de moyens complémentaires ou de substitution à la publicité au sein d’une même campagne de communication, destinés à des groupes cibles ou produits spécifiques (notamment la communication liée au monde médical, institutionnelle ou financière, la stratégie de type événementiel, les relations publiques ou la construction d’une image de marque…) Cela comprend également les services interactifs de communication (création de sites Web, Intranet, conseil en marketing direct, expertise en réseaux sociaux de l’e-commerce, soit toute communication sur le Web ou mobile). Enfin, le conseil et l’achat d’espaces médias va proposer, à l’aide d’outils informatiques, d’une analyse de données quant aux comportements de consommateurs cibles et de mesures d’audiences des différents supports médiatiques pour le compte d’un client, une sélection optimale d’espaces publicitaires
ÿ E-READER VS. KIOSQUE TRADITIONNEL. Une concurrence accrue.
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ÿ CONNECTIVITÉ. Un développement fort des activités numériques (p.ex. : LinkedIn et Facebook)
(radio, TV, presse, Web…) avec un plan adapté à la stratégie commerciale du client. Il s’agit ici de convaincre les clients de la performance effective d’un investissement publicitaire. PERSPECTIVES ET PRÉCAUTIONS En termes de perspectives, dans un contexte de ralentissement de la croissance économique mondiale, notamment dû à la récession actuellement présente dans une bonne partie de la zone euro, nous estimons que les niveaux actuels de valorisation des agences de publicité incorporent déjà un tel scénario. Seul un coup d’arrêt brutal de l’activité mondiale comparable à celui de fin 2008 serait une surprise négative.
Par ailleurs, dans le segment des agences de publicité, il convient de prendre en considération pour chaque acteur, avant tout investissement : • sa stratégie d’exposition vers le numérique, sachant que ce type de média devrait représenter au moins 25% des budgets publicitaires d’ici les cinq prochaines années, • les options géographiques en Europe et aux USA, • et sa position vis-à-vis du développement de la consommation privée dans les pays émergents (un thème toujours d’actualité).
vité) se matérialise aussi par des acquisitions – la dernière en date étant l’offre de Dentsu (Japon) sur Aegis (UK) –, il convient d’évaluer correctement la capacité des acquéreurs à consolider et à intégrer en créant de la valeur pour l’actionnaire. Enfin, on vise la recherche d’une croissance rentable, ou plus précisément le niveau de marge bénéficiaire que les différents acteurs sont capables de réaliser et de maintenir, compte tenu des aléas conjoncturels et des mutations structurelles.
En outre, comme la stratégie de croissance dans cette industrie de la publicité (dont l’actif essentiel est le capital «humain» de créati-
CONCLUSION
DEUX LEADERS BIEN POSITIONNÉS
ÿ CAMPAGNE PUBLICITAIRE DE NIKE. Les agences publicitaires doivent penser « global » et agir « local ». 34 | Analyses | Automne - Hiver 2012
Avec un secteur des médias catalogué dans les «biens et services de consommation discrétionnaire» et qui en tant que tel ne représente que 2,5% du DJ Stoxx 600 pour l’Europe, dans lequel les agences de publicité comptent pour près d’un cinquième de l’indice sectoriel média, les deux leaders WPP (UK) et Publicis (France) méritent l’intérêt de l’investisseur car ils sont bien positionnés face aux défis de demain.
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ÿ INTERTEK. Une valeur qui mérite un intérêt certain.
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TIC | ANALYSE SECTORIELLE
TIC OU TEST, INSPECTION ET CERTIFICATION
UN SECTEUR QUI OFFRE
CROISSANCE ET VISIBILITÉ PHOTOS © ROULARTA/REPORTERS AGENCY
PHILIPPE VANMEERHAEGHE, Financial Analyst, Puilaetco Dewaay.
L’acronyme «TIC», qui signifie Test, Inspection et Certification, fait référence à un segment spécialisé du secteur plus large des biens et services industriels. L’usage veut que ce dernier soit divisé en trois soussecteurs, à savoir celui des Biens d’équipements (conglomérats industriels comme Siemens, Philips ou des acteurs spécialisés dans l’engineering), le Transport (comme Deutsche Post, DHL ou l’aéronautique avec EADS) et enfin celui des Services commerciaux & professionnels (comme les firmes Adecco, Securitas…). C’est donc dans ce dernier sous-secteur que l’on retrouve les sociétés actives dans le segment «TIC», qui englobe des acteurs comme Bureau Veritas, SGS, Intertek ou Eurofins.
F
ait marquant: ces quatre entreprises ont réalisé des performances boursières qui se sont clairement démarquées des valeurs industrielles classiques. A titre d’exemple, elles affichent depuis le début 2008 une performance moyenne (dividendes inclus) de 113% contre 3% pour l’indice sectoriel «Industrial Goods & Services» du DJ Stoxx600. Une performance interpellante dans un secteur qui a été délaissé par de nombreux investisseurs en raison de sa cyclicité et de l’environnement macroéconomique morose que nous connaissons actuellement. Mais comment expliquer cette différence de rendement et en quoi consiste ce secteur méconnu de certains investisseurs? LES ACTIVITÉS DU SECTEUR TIC Le secteur TIC comprend trois activités: 1. Les activités de Testing (évaluation), qui regroupent tous les tests et autres analyses de produits effectués en laboratoire afin d’assurer que ces derniers respectent les normes de santé, de sécurité et autres réglementations en vigueur avant d’être mis sur le marché. 2. Les activités d’Inspection, qui incluent les inspections et audits réalisés sur place par des professionnels, permettant ainsi d’assurer la conformité aux normes de bâtiments et d’équipements (ascenseurs) ou de contrôler l’état et le poids des marchandises du commerce mondial (transport routier et maritime).
LE MÉTIER DES SOCIÉTÉS ACTIVES DANS LE SECTEUR «TIC» EST ASSEZ RÉSISTANT AUX CYCLES CONJONCTURELS. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 37
ANALYSE SECTORIELLE | TIC
ÿ CONTRÔLES DE QUALITÉ, TESTS EN LABORATOIRE. Chaque société ou organisme professionnel est soumis à toute une série de procédures, règles et normes à respecter.
3. Les activités de Certification, qui permettent de prouver que les produits, processus, systèmes ou services sont bien conformes aux réglementations nationales ou internationales et autres normes de consommateurs (ISO, CE). DES EXIGENCES DE PLUS EN PLUS POUSSÉES L’histoire nous apprend qu’en 1878, différents négociants en céréales créent la London Corn Trade Association, qui permet la standardisation des documents nécessaires au transport des céréales et qui clarifie les exigences relatives à la qualité des grains afin d’éviter tout conflit. La conformité dans le monde du travail ne date donc pas d’hier.
LA CONFORMITÉ DANS LE MONDE DU TRAVAIL NE DATE PAS D’HIER. 38 | Analyses | Automne - Hiver 2012
Aujourd’hui, chaque société ou organisme professionnel est soumis à toute une série de procédures, règles et normes à respecter, mais également à demander, en gage de qualité, une certification à mettre en avant pour démontrer la qualité ou l’origine des produits vendus (comme pour le vin et ses AOC ou les
labels Bio plutôt tendance ces dernières années) ou de son mode de production (ISO). Par ailleurs, les exigences en termes de qualité et de sécurité sont devenues de plus en plus poussées et l’explosion du commerce international nécessite des contrôles plus fréquents et régulés pour s’assurer de la qualité et de la conformité des biens et services échangés à travers le monde. Les différents tests réalisés sur les produits alimentaires ou domestiques impliquent ainsi que les certifications utilisées dans le secteur de la construction sont des gages de qualité pour des consommateurs qui deviennent de plus en plus exigeants. Certaines de ces opérations peuvent être réalisées en interne, mais l’outsourcing est fréquemment utilisé (surtout en période difficile, pour une question de flexibilité des coûts). L’internationalisation des échanges commerciaux, les régulations ainsi que les contrôles imposés par les gouvernements ou organismes divers ont également soutenu les bénéfices de ces sociétés représentant un vecteur de croissance important.
TIC | ANALYSE SECTORIELLE
UN SUPPORT NON NÉGLIGEABLE Tout ceci explique notamment les belles performances boursières affichées par des valeurs comme SGS ou Bureau Veritas, mais aussi leur valorisation historique élevée pour un secteur industriel. Ainsi, le métier des sociétés actives dans le secteur «TIC» est assez résistant aux cycles conjoncturels, en raison du caractère réglementaire requis dans nombre d’activités. Ces éléments réunis apportent donc un support non négligeable à ces sociétés dans les périodes de crise et permettent d’assurer une croissance soutenue et saine tant en termes de chiffres d’affaires que de résultats. Un atout majeur qui explique en partie les niveaux de valorisation, avec un ratio cours/bénéfice de 21x en moyenne et un rendement sur dividendes de 1,8% (contre 13x et 3,4% respectivement pour le secteur industriel).
L’INTERNATIONALISATION DES ÉCHANGES COMMERCIAUX NÉCESSITE DES CONTRÔLES PLUS FRÉQUENTS ET RÉGULÉS.
CONCLUSION
CROISSANCE ET RÉSISTANCE Le secteur «TIC» mérite l’attention des investisseurs qui recherchent des sociétés alliant croissance et visibilité mais démontrant aussi une certaine résistance dans un contexte économique difficile. Leur valorisation historiquement élevée peut se justifier. Toutefois, comme l’écart observé vis-à-vis des autres valeurs industrielles s’est accentué récemment, nous sommes d’avis d’attendre une phase de consolidation pour entrer dans une de ces valeurs. Bureau Veritas (France), SGS (Suisse) ou encore Intertek (UK) méritent un intérêt certain.
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ÿ DANS LA TEMPÊTE.
Il est important de connaître les qualités et les limites du bateau.
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PUILAETCO DEWAAY SMALL & MID CAP EUROPE : CONVICTIONS ET PERFORMANCES TOUJOURS AU RENDEZ-VOUS
UN BATEAU FIABLE DANS LA TEMPÊTE PHOTOS © ROULARTA REPORTERS
MARC ENGELS, Head of Equity ty Funds, Puilaetco tco Dewaay.
Dans notre dernière parution d’Analyses, nous avions mis notre compartiment PLDW Small & Mid Cap Europe en avant. Nous avions à l’époque indiqué que, selon une analyse intéressante de Merrill Lynch, il fallait, entre autres, favoriser les valeurs de plus petites capitalisations pendant les phases de ‘recovery’ de marché.
S
elon le bureau d’études anglosaxon, ces valeurs ont historiquement mieux performé que les grandes capitalisations, qu’il est préférable de mettre en avant durant les phases de baisse de marché. Nous pensions à cette époque que nous étions en phase de retournement de tendance … ce qui s’est avéré un peu trop hardi ! Il y a certes eu des phases de retournement … mais également des phases de baisse assez prononcées. Comment le compartiment s’est-il donc comporté pendant les sept premiers mois bien perturbés de cette année ?
ché porteur, notre compartiment performe très bien. Cette surperformance correspond à son caractère haut-beta (effet d’amplification des tendances). Depuis lors, la dernière crise est passée par là et les performances ont nettement fondu pour atteindre +3,6% au 26 juin ! Comme cela s’est souvent produit depuis la création du compartiment en 1998, les périodes de baisse des indices sont pénalisantes en termes de performance.
ENVIRONNEMENT CHAHUTÉ, EXCELLENTE PERFORMANCE La première constatation est peut-être surprenante mais bien réelle : les performances sont toujours très nettement positives ! Malgré les turbulences, le sentiment de crise généralisé et le retour en force de la volatilité, le fonds parvient non seulement à battre les indices de référence, mais également à rester très nettement en positif.
LE COMPARTIMENT PLDW SMALL & MID CAP EUROPE PARVIENT NON SEULEMENT À BATTRE LES INDICES DE RÉFÉRENCE, MAIS ÉGALEMENT À RESTER TRÈS NETTEMENT EN POSITIF.
Le compartiment PLDW Small & Mid Cap Europe a très bien débuté l’année, avec un premier sommet atteint mi-mars et reconfirmé deux semaines plus tard, le 2 avril. A cette époque, la performance affichée était de +15,5%, soit plus de 6% au-dessus de celle de l’indice général du marché européen (Stoxx 600). Tout ceci était totalement en ligne avec nos anticipations car dans un mar-
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LES VALEURS DE QUALITÉ SONT ÉGALEMENT CELLES QUI PRÉSENTENT LE PLUS DE POTENTIEL À LONG TERME. ÿ PAS DE PANIQUE. Ne rien faire est parfois la meilleure décision à prendre.
Néanmoins, comme vous pouvez le constater sur le graphique ci-dessous, la surperformance est toujours restée intéressante et nettement positive. Malgré les tensions persistantes sur les marchés, le mois de juillet aura été un des meilleurs de 2012, de sorte que le PLDW Small & Mid Cap Europe s’est une nouvelle fois retrouvé aux avant-postes. Fin juillet, il affichait une hausse de 14% et surtout une surperformance de plus de 7% par rapport à l’indice Stoxx 600.
COMMENT GÉRONS-NOUS LA (LES) CRISE(S) ? Au cours du printemps dernier, les marchés d’actions sont redevenus très volatils, avec des fluctuations journalières parfois très étonnantes. Cette constatation est d’autant plus vraie pour certaines valeurs moins liquides que nous détenons. Comment réagissonsnous dans un tel environnement, comment gérons-nous cette volatilité accrue? En août 2011, nous avions déjà connu une situation assez similaire ; les recettes appliquées à cette époque sont bien évidemment restées d’actualité. Comme nous avons réalisé une analyse fondamentale stricte avant d’introduire ou d’augmenter le poids de chacune des va-
ÿ Graphique : performance au 31 juillet 2012 STOXX EUROPE 600 600 (EUR)
262,00
965820 / EU0009658202 / hors bourse Suisse
02/01
+1,05%
03.08.12 12:01:15
févr.
mars
Haute: 262,39 Ouverture: 259,38 Basse: 259,38 Clôture: 259,28
+2,72
avr.
mai
juin
juil.
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30/07
leurs qui composent le compartiment, nous n’avons pas de craintes majeures quant à la qualité intrinsèque du portefeuille. Si certains investissements paraissent néanmoins de qualité moindre, nous refaisons le travail d’analyse et, le cas échéant, nous vendons. Ces derniers mois, nous avons aussi attaché une attention particulière à la structure bilantaire des sociétés et à leur génération de cash-flow. Lorsque les banques ferment les robinets du crédit, il est impératif – en tout cas pour de plus petites valeurs – de pouvoir se reposer sur une structure financière très saine. Demander du crédit est, hélas, devenu excessivement délicat pour les moins solides. Par ailleurs, nous restons indubitablement convaincus que les valeurs de qualité sont également celles qui présentent le plus de potentiel à long terme. Dans la tempête, avoir un bateau fiable et en connaître les qualités et les limites est un excellent moyen pour éviter les catastrophes. Nous avons également toujours veillé à éviter de trop fortes pondérations, quitte à réduire les positions le cas échéant. Prendre des bénéfices n’est jamais une mauvaise idée, par contre se laisser emporter par le courant peut être très dangereux ! De cette manière, nous évitons de dépendre de manière inconsidérée de l’une ou l’autre action en particulier. C’est ainsi que nous avons régulièrement vendu des Gemalto. En effet, bien que nous restions confiants (voir plus bas), nous ne voulons pas que son poids dans le portefeuille devienne trop important. 3,5% de pondération nous semble un maximum, même pour une excellente valeur.
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En outre, nous évitons de réagir de manière épidermique. Vendre ou acheter dans la panique n’est jamais une bonne idée. Il faut savoir garder son sang-froid en toutes circonstances. Ne rien faire est parfois la meilleure décision à prendre ! Nous avons testé cette technique fin juillet lorsque le titre belge Thrombogenics a baissé de plus de 20% au cours de la journée du 24, sur base de rumeurs qui se sont finalement avérées sans fondement. En effet, deux jours après, le groupe recevait un avis positif des autorités américaines au sujet de son médicament vedette et le cours de l’action repartait nettement à la hausse. Globalement, beaucoup de gestionnaires d’actions de petites et moyennes capitalisations réagissent de cette manière, ce qui explique les volumes assez réduits qui sont traités en bourse pour le moment. Travailler avec des limites à l’achat et à la vente est aussi un bon moyen pour éviter de prendre des décisions inconsidérées car trop épidermiques. UNE COMPOSITION TOUJOURS AMBITIEUSE Les 10 principales positions du compartiment sont un assez bon reflet de notre vocation à trouver des acteurs de niches dans des marchés porteurs, des acteurs disposant d’un pricing power (capacité à facilement augmenter les prix de vente) ou générant d’excellentes marges/cash-flows (voir tableau en-dessous de la page). Dans notre top 10, nous retrouvons 3 valeurs technologiques, 3 valeurs parapétrolières, 2 valeurs industrielles et 2 dépendantes de la consommation privée. Gemalto est le leader mondial dans les cartes à puces utilisées dans l’identification électronique, les cartes bancaires et les cartes SIM. Au cours des 18 mois prochains, la plus forte
ÿ Tableau : Top 10 (poids dans le fonds) Gemalto N.V. Ingenico S.A. Technip S.A. Geberit A G Andritz Ag Dialog Semiconductor PLC Société BIC CGG Veritas Fugro N.V. Remy Cointreau S.A.
3,26% 2,36% _ 2,24% 2,20% _ 2,16% 2,11% _ 2,09% 1,98% _ 1,94% 1,88% _
PRENDRE DES BÉNÉFICES N’EST JAMAIS UNE MAUVAISE IDÉE, PAR CONTRE SE LAISSER EMPORTER PAR LE COURANT PEUT ÊTRE TRÈS DANGEREUX ! croissance viendra bien évidemment du passage annoncé aux Etats-Unis des cartes bancaires à bande magnétique vers les cartes à puces, dont la sécurité est bien plus élevée. Le deuxième pôle de croissance est l’avènement de la technologie NFC qui permettra d’effectuer des paiements en approchant son téléphone mobile d’une borne de paiement, dont un des fournisseurs est Ingenico. Ingenico est un des deux leaders mondiaux (le 2e est américain) des terminaux de paiements. A ce titre, la société française va aussi tirer un profit maximum des migrations attendues aux Etats-Unis vers les cartes à puces et dans le monde vers le NFC. La troisième valeur technologique est Dialog Semi. Ce groupe allemand est un acteur incontournable dans les puces de gestion de puissance que l’on retrouve dans les iPhone et iPad et, dans le futur, chez Samsung également. Cette puce est devenue de plus en plus importante, car il est crucial pour une tablette ou un smartphone de pouvoir offrir un maximum de confort d’utilisation en consommant un minimum d’énergie. Dans nos premières positions, nous retrouvons aussi, sans surprise, 3 valeurs parapétrolières; nous pensons en effet que ce secteur va tirer un profit maximal du besoin qu’ont les sociétés pétrolières intégrées à investir dans l’exploration de nouveaux gisements et dans la production de pétrole ou de gaz. Technip, CGG Veritas et Fugro sont ce qui se fait de mieux en Europe dans ce domaine.
Geberit est certes actif en Europe principalement, qui plus est dans le secteur de la construction. Mais le groupe suisse est passé maître dans le maintien des marges opérationnelles grâce à un formidable pricing power. Andritz est un groupe industriel autrichien avec des positions de leadership dans plusieurs niches de marché comme la production de turbines hydro-électriques (part de marché de 35%), d’usines de pâte à papier (duopole mondial avec Metso) et de métallurgie (numéro 2 mondial avec une part de marché de 30%). Grâce à son carnet de commandes, il offre une très forte visibilité. De plus, son bilan est très sain (pas de dettes) et le groupe est un gros générateur de cash-flow. BIC est connu de tous pour ses stylos, rasoirs jetables et briquets. Ce qui fait tout le charme de ce groupe est le niveau élevé de ses marges (pricing power et parts de marché élevées) et sa très forte génération de cash-flows. Sa performance boursière est aussi en tous points remarquable. Remy Cointreau est une histoire chinoise car tout son succès vient de la hausse impressionnante de la consommation de cognac haut de gamme en Chine. Cette évolution a engendré un triplement linéaire de son cours de bourse au cours des 3 dernières années. Des informations plus détaillées, en ce compris les Valeurs Nettes d’Inventaires, peuvent être retrouvées sur notre site www.puilaetcodewaay.be.
CONCLUSION En conclusion, même dans un environnement perturbé, le compartiment Small & Mid Cap Europe a réussi à tirer son épingle du jeu en offrant à ses investisseurs une performance hors-norme, fruit d’un travail pointu d’analyse et d’une diversification attractive.
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NOS SERVICES | THIRD PARTY FUNDS
À LA RECHERCHE DE RENDEMENTS…
UN TIENS VAUT MIEUX QUE DEUX TU L’AURAS PHOTOS © ROULARTA/REPORTERS
MARC-ANDRÉ LIZIN, Fund Analyst. OINE CHARLES-ANTOINE D D, de BELLEFROID, lio Fund & Portfolio Analyst.
« Plus valet in manibus avis unica quam dupla silvis. » Cette citation latine, qui signifie littéralement « Un oiseau dans la main vaut plus que deux dans les buissons », est mieux connue sous le proverbe français : « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. » Elle illustre à merveille la raison principale d’investir dans les instruments financiers qui offrent du rendement (yield). Il vaut mieux prendre ce qui est certain plutôt que d’espérer plus avec des incertitudes. Tout ce qui est distribué sous forme de dividendes ou de coupons est acquis pour l’investisseur.
E
tant donné le nombre croissant de retraités à travers le monde, la thématique du rendement est un sujet qui revient de plus en plus sur la table. Cependant, dans les conditions actuelles de marché, trouver des produits qui combinent à la fois protection du capital et « yield » élevé devient particulièrement difficile. En effet, les obligations gouvernementales offrent des taux historiquement bas et les dépôts en cash ne parviennent pas à suivre la cadence, pourtant actuellement assez faible, de l’inflation. De plus, la crise de la dette souveraine nous rappelle qu’il n’y a finalement aucun lieu sûr pour placer son argent.
LES CLASSES D’ACTIFS À HAUT DIVIDENDE OFFRENT SUR LE LONG TERME UN RAPPORT RENDEMENT/RISQUE ATTRACTIF.
NOMINAL AND REAL 10 YEAR TREASURY YIELDS
ÿ Le yield nominal est à un plus bas historique. Il est même inférieur à l’inflation, d’où le yield réel négatif et donc une perte de pouvoir d’achat pour l’investisseur.
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ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ LA SÉCURITÉ DANS LES HAUTEURS. Les dividendes offrent une protection supplémentaire à l’investisseur. Bon nombre d’investisseurs éprouvent donc les pires difficultés à remplir leurs objectifs de rendement. C’est pourquoi ils se tournent de plus en plus vers d’autres classes d’actifs telles que les obligations « high yield » ou encore les actions à haut dividende. Celles-ci permettent d’obtenir un yield nettement supérieur aux classes d’actifs obligataires traditionnelles. Ces classes d’actifs ne sont bien sûr pas dénuées de risques, cependant elles offrent un rapport rendement/risque assez attractif sur le long terme. En outre, plusieurs études ont démontré qu’elles ont historiquement mieux performé dans une économie à croissance « molle », telle que celle que nous observons actuellement. Il existe d’excellents fonds qui permettent de s’exposer de manière diversifiée à ces thématiques. LES ACTIONS DE BONNE QUALITÉ À HAUT DIVIDENDE Le calcul du rendement total d’un investissement en action provient de deux composantes : l’évolution de son cours de bourse ainsi que de la somme des dividendes versés. Une stratégie à haut dividende consiste à investir dans des actions de sociétés qui ont pour habitude de distribuer des dividendes élevés. Sur le long terme, ces derniers contribuent en effet pour une grande partie à la performance totale d’un investissement en action : une fois payé, le revenu des dividendes est acquis pour l’investisseur, ce qui n’est pas le cas pour le cours de bourse, qui fluctue au jour le jour.
Negative growth
Annualized returns: 10/90-6/91, 6/00-1/02, 9/07-6/09
Low growth
Annualized returns: 1/88-10/90, 6/91-9/93, 2/95-2/96, 8/02-9/07
High growth
Annualized returns: 9/93-2/95, 2/96-6/00, 1/02-8/02, 7/09-9/10
Source : étude BlackRock Asset Management
ÿ Par rapport aux autres classes d’actifs, les actions à haut dividende et les obligations
« high yield » offrent de bons résultats dans toutes sortes de contextes économiques, et principalement dans une économie à croissance molle.
Sur le long terme, cette classe d’actifs permet donc en théorie de combiner une croissance du capital ainsi qu’un yield supérieur aux classes d’actifs obligataires traditionnelles. En pratique, cependant, une stratégie à haut dividende n’est pas si facile à mettre en place. En effet, il ne suffit pas de choisir simplement les actions qui proposent les meilleurs dividendes. Se baser sur cette seule donnée peut même conduire à des erreurs importantes (le fameux « dividend trap »). Il suffit de se remémorer les années 2007-2008 : au plus haut de la bulle financière, les banques étaient considérées comme un investissement sûr car elles
offraient un dividende élevé et (soi-disant) stable. Les indices « high dividend » étaient donc largement investis dans le secteur financier. A la veille de la crise financière, ces indices avaient ainsi un positionnement très défavorable, ce qui leur a fait subir la même débâcle que le marché, voire même pire. Pas fameux pour une stratégie qui se veut « défensive ». Afin de refléter le vrai potentiel de la thématique, la stratégie haut dividende doit donc être gérée de manière active, avec des critères de sélection et de suivi très rigoureux.
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LA STRATÉGIE HAUT DIVIDENDE DOIT ÊTRE GÉRÉE DE MANIÈRE ACTIVE, AVEC DES CRITÈRES DE SÉLECTION ET DE SUIVI TRÈS RIGOUREUX. BlackRock Global Equity Income Le fonds BlackRock Global Equity Income est un fonds d’actions mondial qui a pour objectif de surperformer le marché en sélectionnant des actions d’excellente qualité qui offrent des dividendes supérieurs. Cependant, le gérant ne sacrifie pas la qualité pour obtenir du yield. Les critères de sélection sont nombreux : outre le dividende lui-même, le gérant est particulièrement attentif à son potentiel de croissance et surtout à sa pérennité. Ceci passe par un bilan sain et un modèle de gestion qui permet de générer des « cash flows » stables et élevés. En effet, sans cash, il est difficile d’imaginer qu’une société puisse accroître ou même maintenir son dividende de façon saine. Les sociétés qui s’endettent jusqu’au cou afin d’offrir un dividende ne font donc pas partie de l’univers du gérant. Par ailleurs, le mandat « global » du fonds lui permet de profiter des caractéristiques des sociétés à haut dividende de chaque région du monde. En effet, les sociétés américaines offrent en général un dividende moins élevé mais plus stable que les sociétés européennes (ces dernières étant souvent situées dans des secteurs plus cycliques). Quant aux sociétés des pays émergents, elles offrent géné-
CHARACTERISTICS Number of holdings Weighted average market cap.
PORTFOLIO MSCI ALL COUNTRY WORLD 55 2,444 $93.76bn $73.81bn Income that exceeds the average Yield objective yield on global stocks generally Current dividend yield (gross) 4.0% 2.9% 5 year dividend growth rate 9.9% 4.7% P/E (TTM) 14.6x 13.2x Beta 0.68 1.0 Standard deviation 14.43% 20.48% Higher dividend yield and dividend growth • Lower risk than the market Source : BlackRock Asset Management
ÿ Le fonds BlackRock Global Equity Income combine qualité et dividende supérieurs au marché. La volatilité du fonds est par ailleurs largement inférieure à celle du marché.
ralement un dividende élevé mais sont sujettes à la volatilité plus élevée de ces marchés. Au niveau sectoriel, le fonds s’oriente sur des secteurs réputés plus défensifs (ex : biens de consommation non-cyclique, pharma, etc.) Le fonds délivre actuellement un « dividend yield » moyen supérieur à celui du marché pour une croissance du dividende deux fois supérieure (voir tableau ci-dessus). Le fonds comprend des valeurs telles que Sanofi, Pfizer, Novartis, Nestlé, Vodafone, etc. BlackRock Global Equity Income est un excellent véhicule de placement pour les investisseurs qui souhaitent profiter des avantages de la thématique « haut dividende » à long terme via un fonds diversifié géré par une équipe dédiée. LES OBLIGATIONS D’ENTREPRISES À HAUT RENDEMENT La recherche de haut rendement peut également se faire au travers des obligations d’entreprises. Ces obligations, appelées « high yield bonds » (HY) en anglais, ont une
notation de crédit dite de qualité inférieure. Ces notations de crédit sont décernées par les agences de notation (Standard & Poor’s, Moody’s, Fitch,…) et reflètent le risque que l’émetteur ne paye pas ses intérêts ou fasse défaut sur le remboursement à échéance. Ce risque est compensé par un rendement supérieur par rapport aux obligations « investment grade ». Donc, dans des circonstances normales, plus une société est risquée, plus sa notation sera faible et plus le rendement de ses obligations sera élevé. Pourquoi investir dans le « high yield » ? Cette classe d’actifs est attrayante à plusieurs niveaux. • Tout d’abord, elle présente un ratio risque/ rendement attractif par rapport au marché des actions. Historiquement, les rendements offerts ont largement compensé pour le risque de défaut sur le long terme et ont offert un retour sur investissement proche de celui des actions mais avec une volatilité moindre. • Deuxièmement, elle est moins sensible aux variations des taux d’intérêt (duration plus faible) que les obligations « Investment grade ». Dans les circonstances actuelles, c’est un atout intéressant vu les taux d’intérêt
Comparaison entre les différents fonds High Yield:
BLUEBAY HY BOND
PIMCO GLOBAL HY
MUZINICH SHORT DURATION HY
AXA SHORT DURATION HY
Philosophie
Défensive & non-benchmarkée
Défensive & Benchmarkée
Défensive & non-benchmarkée
Défensive & non-benchmarkée
Géographie
Europe - Global
Global
US
US
Niveau de Duration
Normal
Normal
Faible
Faible
Rendement à maturité
7,34%
5,29%
3,8%*
3,69%*
Duration
2,57
3,19
1,26*
1,3 *
Rating moyen
BB
BB
BB-
B+
* Dans le cas des obligations à courte duration, nous prenons en compte les valeurs à la première date de rachat possible des obligations par l’émetteur.
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THIRD PARTY FUNDS | NOS SERVICES
historiquement bas, qui impliquent un risque plus élevé d’une remontée des taux. • Troisièmement, les spreads (écarts entre le rendement des obligations de sociétés et le taux sans risque) se sont récemment de nouveau détendus suite aux tensions autour de la zone euro. Le niveau actuel est attrayant au regard du taux de défaut observé. Nous pensons que ces taux de défaut vont rester maîtrisés car les sociétés ont généralement fortement diminué leur niveau d’endettement depuis la crise de 2008. • Enfin, elle apporte un effet de décorrelation, ce qui permet de réduire la volatilité du portefeuille. Cependant, le « high yield » présente également des risques que l’on ne peut ignorer. Comparée aux obligations de meilleure qualité, cette classe d’actifs est plus dépendante de l’évolution macroéconomique et des variations sectorielles. Nous préconisons l’investissement en HY au travers de fonds qui permettent un accès facile à la diversification du risque de crédit, ainsi que de bénéficier de l’expertise externe de spécialistes qui ont prouvé leur valeur ajoutée dans la sélection des obligations. Nous recommandons plusieurs véhicules d’investissement. Tous ont une approche défensive avec une emphase sur la captation de coupons/rendement plutôt que l’appréciation des prix. On peut distinguer dans notre sélection deux types de fonds: • les fonds à duration proche de l’indice de référence : BlueBay High Yield Bond et PIMCO Global High Yield, • les fonds à faible duration tels que Muzinich Short Duration High Yield et AXA Short Duration High Yield. Ces derniers se concentrent sur les obligations ayant une maturité plus courte. L’avantage principal est que la performance est moins dépendante des évolutions macroéconomiques et dépend plus des coupons, ce qui la rend plus stable et moins volatile. Evidemment, le rendement est moins élevé que sur les fonds à duration plus longue. Ces quatre véhicules peuvent chacun constituer le cœur d’une poche « high yield » dans un portefeuille diversifié. Au regard des conditions de marché, nous recommandons de se concentrer à l’heure actuelle sur le « short duration », qui est d’autant plus défensif.
US DOMESTIC HY DEFAULT RATES VERSUS US DOMESTIC HY SPREADS
Source : Crédit Suisse, Moody’s et BlueBay Asset Management
ÿ L’écart actuel entre les rendements du HY et le taux de défaut observé est l’une des raisons d’investir dans cette classe d’actifs.
COMPARAISON GRAPHIQUE DES FONDS HIGH YIELD SÉLECTIONNÉS AVEC LES ACTIONS, LES OBLIGATIONS D’ENTREPRISES DE QUALITÉ ET LES OBLIGATIONS GOUVERNEMENTALES EUROPÉENNES Normalized As Of 07/01/2005 Last Price Pimco Global High Yield Bond Fund - on 9/07/12 BlueBay High Yield Bond Fund - on 9/4/12 AXA IM Fixed Income Investment Strategies - US Short Duration High Yield - on 9/6/12 MSCI World Index - on 9/7/12 Bloomberg/EFFAS Bond Indices Euro Govt 3-5 Yr TR - on 9/7/12 iBoxx Euro Corporates Overall Performance Index
CONCLUSION La situation macroéconomique actuelle apporte de nombreuses incertitudes, notamment liées à la croissance molle voire négative dans la plupart des régions du monde, ainsi qu’à la crise de la dette en zone euro. Dans ces conditions, établir un scénario clair de l’évolution des marchés devient difficile. La thématique du rendement prend donc toute son importance. En outre, les taux d’intérêt (historiquement faibles) ne suffisent plus : les investisseurs doivent se tourner vers des classes d’actifs offrant un rendement supérieur, telles que les obligations « high yield » ou encore les actions alliant qualité et haut dividende. Ces classes d’actifs offrent en effet sur le long terme un rapport rendement/risque plutôt attractif étant donné le matelas de protection offert par le versement du coupon ou du dividende. L’architecture ouverte proposée par Puilaetco Dewaay vous permet d’accéder, de façon diversifiée, à des gestionnaires spécialisés. Votre banquier reste à votre disposition pour toute information complémentaire.
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NOS SERVICES | L’ABUS FISCAL
ÿ FINANCE TOWER,
BRUXELLES. Rarement une nouvelle disposition fiscale n’aura fait autant parler d’elle.
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L’ABUS FISCAL | NOS SERVICES
LA MESURE ANTI-ABUS EN MATIÈRE FISCALE
LA NOUVELLE ARME DE L’ADMINISTRATION PHOTOS © ROULARTA/THINKSTOCK
BRUNO FERRIER, ERRIER, Head of Estate state Planning.
Il faut bien le reconnaître, rarement une nouvelle disposition fiscale n’aura fait autant parler d’elle. Depuis sa publication le 6 avril 2012 au Moniteur belge (et même avant celle-ci), il ne se passe pratiquement pas une semaine sans qu’un article sur la disposition anti-abus ne soit rédigé et diffusé dans la presse quotidienne ou spécialisée. À tel point que certains se demandent ce qui peut encore être fait sans attirer les foudres de l’administration fiscale !
L
a nouvelle mesure anti-abus a en effet une portée générale puisqu’elle s’applique notamment aux dispositions du code des impôts sur les revenus, du code des droits de succession, du code des droits d’enregistrement, … Le but de la présente contribution n’est pas de ‘disséquer’ le texte de loi pour en faire ressortir les imperfections terminologiques, ni de relater les différentes controverses déjà constatées, mais au contraire d’essayer de tirer les éventuelles conséquences de cette nouvelle disposition sur les techniques de planification successorale. DÉFINITION DE LA NOTION D’ABUS FISCAL Le code des droits d’enregistrement et le code des droits de succession définissent la notion d’abus fiscal comme suit : « N’est pas opposable à l’administration l’acte juridique ni l’ensemble d’actes juridiques réalisant une même opération lorsque l’administration démontre (…) qu’il y a abus fiscal. Il y a abus fiscal lorsque le contribuable réalise, par l’acte juridique ou l’ensemble d’actes juridiques qu’il a posé, l’une des opérations suivantes : • une opération par laquelle il se place, en violation des objectifs d’une loi fiscale, en dehors du champ d’application de cette loi • une opération par laquelle il prétend à un avantage fiscal prévu par une disposition légale, dont l’octroi serait contraire aux objectifs de cette disposition et dont le but essentiel est l’obtention de cet avantage.
LA NOUVELLE MESURE ANTI-ABUS A UNE PORTÉE GÉNÉRALE PUISQU’ELLE S’APPLIQUE NOTAMMENT AUX DISPOSITIONS DU CODE DES IMPÔTS SUR LES REVENUS, DU CODE DES DROITS DE SUCCESSION, DU CODE DES DROITS D’ENREGISTREMENT … Automne - Hiver 2012 | Analyses | 49
NOS SERVICES | L’ABUS FISCAL
L’ABUS FISCAL, C’EST L’ABUS DU CHOIX DE LA VOIE LA MOINS IMPOSÉE. ÿ TROIS GÉNÉRATIONS. Quelles vont être les conséquences de la nouvelle disposition anti-abus sur les techniques de planification successorale?
Il appartient au contribuable de prouver que le choix de cet acte juridique ou de cet ensemble d’actes juridiques se justifie par d’autres motifs que la volonté d’éviter les droits d’enregistrement ou les droits de succession. Lorsque le redevable ne fournit pas la preuve contraire, l’opération est soumise à un prélèvement conforme à l’objectif de la loi, comme si l’abus n’avait pas eu lieu. » Il n’est donc pas question, par cette disposition, de lutter contre la fraude fiscale. L’abus fiscal vise au contraire une opération tout à fait légale, mais choisie abusivement par le contribuable. En somme, l’abus fiscal, c’est l’abus du choix de la voie la moins imposée. Cette disposition est applicable aux actes ou ensembles d’actes juridiques réalisant une même opération qui sont accomplis depuis le 1er juin 2012.
50 | Analyses | Automne - Hiver 2012
INTERPRÉTATION TÉLÉOLOGIQUE Pour qu’il y ait abus fiscal, il faut donc que le contribuable réalise l’une des 2 opérations reprises dans la définition en violation des objectifs de la loi fiscale. Reste à déterminer l’objectif d’une disposition fiscale, c’est-à-dire rechercher son interprétation téléologique. A cette fin, la consultation des travaux parlementaires permettra parfois d’en savoir plus. LE PRINCIPE DE STRICTE INTERPRÉTATION Ce principe d’interprétation téléologique n’est-il pas contraire au principe de stricte interprétation, applicable en matière fiscale ? Idéalement, l’objectif d’une disposition fiscale doit être contenu dans la disposition ellemême. La lecture de celle-ci doit permettre au contribuable de savoir ce qui est taxable, ce qui est exonéré, ce qui est déductible, ce qui ne l’est pas, …
Et à cet égard, l’administration fiscale reconnaît, dans sa circulaire du 4 mai 2012 sur l’abus fiscal, que « ce qui est clair ne s’interprète pas ». Cette maxime est en fait la traduction du principe constitutionnel de légalité de l’impôt selon lequel aucun impôt ne peut être établi que par une loi (au sens large du terme). Ce n’est donc que si le texte n’est pas clair qu’il faut vérifier l’intention du législateur. L’interprétation stricte d’un texte de loi l’emporte sur l’interprétation téléologique. APPLICATION SUBSIDIAIRE Dans cette même circulaire du 4 mai 2012, il est prévu que « la disposition générale antiabus est appliquée lorsque la méthode d’interprétation ordinaire, les dispositions techniques du code, les dispositions spéciales anti-évitement et la théorie de la simulation (fraude fiscale) ne sont d’aucun secours. L’administration peut donc appliquer la disposition générale anti-abus lorsque les autres moyens spécifiques n’auront pu l’aider suffisamment. »
L’ABUS FISCAL | NOS SERVICES
ÿ ADMINISTRATION. Le législateur veut, selon ses dires, augmenter la sécurité juridique de certaines opérations.
Une nouvelle circulaire (datée du 19 juillet 2012) confirme expressément le caractère subsidiaire de la mesure anti-abus. Une hiérarchie est donc ainsi établie : la mesure générale anti-abus n’interviendrait qu’en « dernier recours ». LES MOTIFS NON FISCAUX Quels sont les motifs non fiscaux que le contribuable peut invoquer pour justifier son opération ? La disposition est ici assez favorable au contribuable puisqu’elle autorise tous motifs autres que fiscaux. Ces motifs peuvent être économiques, financiers, familiaux ou personnels. Ils ne doivent même pas être principaux, essentiels ou déterminants. Cependant, selon l’administration, les motifs ne peuvent pas être à ce point négligeables que l’opération serait impossible s’il n’était pas tenu compte des motifs fiscaux. Ils ne devront pas non plus être trop généraux ou abstraits. Ils doivent par conséquent être réels !
LES EFFETS DE L’ABUS FISCAL L’opération abusive est inopposable à l’égard de l’administration fiscale. Par conséquent, l’opération sera soumise à un prélèvement conforme à l’objectif de la loi, comme si l’abus n’avait pas eu lieu. Par contre, les effets juridiques pour les parties ne changent pas ; les droits et obligations des parties subsistent. Une amende administrative peut-elle être réclamée au contribuable responsable d’un abus fiscal ? Normalement non puisque ce contribuable ne s’est pas rendu coupable de fraude fiscale. L’administration affirme cependant le contraire dans sa circulaire du 4 mai 2012. QUELQUES CAS PRATIQUES La circulaire du 19 juillet 2012 reprend une liste d’exemples d’opérations tantôt jugées a priori abusives, tantôt a priori non abusives. Nous examinons ci-dessous certains de ces exemples, lesquels ne reflètent cependant que la position défendue par l’administration fiscale.
ÿ TRANSPARENCE. Ce qui est clair ne s’interprète pas.
CE N’EST QUE SI LE TEXTE N’EST PAS CLAIR QU’IL FAUT VÉRIFIER L’INTENTION DU LÉGISLATEUR. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 51
LA DISPOSITION EST ASSEZ FAVORABLE AU CONTRIBUABLE PUISQU’ELLE AUTORISE TOUS MOTIFS AUTRES QUE FISCAUX. ÿ DONATION. En principe, les donations ne sont pas considérées comme constitutives d’un abus fiscal.
• Les donations au sens strict Ne sont en principe pas considérés comme constitutifs d’un abus fiscal : les dons manuels, les donations par virement bancaire, les donations devant notaire étranger, que ces donations portent sur la pleine propriété ou sur la nue-propriété, qu’elles soient accompagnées d’un pacte adjoint reprenant certaines conditions (résolutoires) ou charges, qu’elles soient enregistrées ou non. • Les clauses d’accroissement et de tontine Ces clauses ne sont normalement pas considérées comme abusives par l’administration fiscale. • Donations immobilières par tranches Le droit de donation est progressif par tranches (tout comme le droit de succession). Plus la valeur de l’objet donné est élevée, plus l’impôt sera élevé. Pour éviter que les contribuables n’éludent cette progressivité en scindant les donations (p. ex. : donation aujourd’hui de 20 % d’un immeuble, de 20 % supplémentaires 2 mois plus tard, etc., jusqu’à ce que l’immeuble soit entièrement donné), le code des droits d’enregistrement prévoit que pour déterminer le tarif applicable à une donation immobilière, la base imposable de celle-ci est ajoutée à la somme qui a servi de base de perception sur les donations déjà intervenues entre les mêmes parties, constatées par actes remontant à
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moins de 3 ans avant la date de la nouvelle donation. Autrement dit, si un contribuable donne aujourd’hui 20 % d’un immeuble et à nouveau 20 % moins de 3 ans après la première donation, il ne pourra pas bénéficier des tranches d’imposition les plus basses. Ce délai de 3 ans est en soi une mesure anti-abus. Puisqu’elle est spécifique, son application doit nécessairement l’emporter sur celle de la mesure générale anti-abus. La circulaire du 19 juillet 2012 confirme ce point de vue. • La technique du legs en duo Cette technique de testament résulte de l’article 64, alinéa 2 du Code des droits de succession, selon lequel on peut instituer légataire une personne sans que celle-ci ne doive payer d’impôt successoral, à condition qu’un autre légataire assume ses droits de succession. Le legs en duo permet de payer moins de droits de succession lorsque les légataires sont soumis à des taux d’imposition différents. Plus la différence de taux est importante, plus cette formule est intéressante. Un exemple type est celui du testateur sans héritier direct qui institue une fondation légataire universel et un neveu légataire particulier. Grâce à cette technique, le montant net perçu par le neveu sera en principe plus élevé que ce qu’il aurait perçu s’il avait été institué seul légataire.
Nous pensons ici aussi que la rédaction d’un tel testament ne peut être considérée comme fiscalement abusive, et ce pour deux raisons : – cette technique est un mode particulier de calcul des droits de succession. La charge qui est imposée (à la fondation dans notre exemple) ne porte pas sur les biens de la succession, mais sur le paiement des droits de succession ; – les travaux parlementaires reprennent expressément l’exemple du paiement des droits de succession par le légataire universel. Par conséquent, l’administration fiscale pourra difficilement affirmer que les objectifs de la loi ne sont pas respectés. La circulaire précise ici qu’il n’y aura pas abus fiscal si la fondation (dans notre exemple) en retire un avantage net substantiel (l’ajout de ce critère, de surcroît difficile à quantifier, est toutefois tout à fait contestable). • L’acquisition scindée (usufruit et nuepropriété) d’un bien (immeuble en général) précédée par une donation par l’usufruitier des fonds nécessaires au nupropriétaire pour lui permettre d’acheter la nue-propriété Le but de cette opération est de faire en sorte qu’au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devienne plein propriétaire sans devoir s’acquitter de droits de succession. Le code des droits de succession présume, en son article 9, que l’usufruitier est en fait
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ÿ POSSESSIONS FAMILIALES. En matière
de planification successorale, la disposition anti-abus devrait s’appliquer de manière exceptionnelle.
plein propriétaire (ce qui entraîne le paiement de droits de succession). Afin d’éviter un tel paiement, il appartient au nu-propriétaire de prouver qu’il a effectivement payé sa part du prix (correspondant à la valeur de la nue-propriété) lors de l’acquisition. L’article 9 du code des droits de succession est donc une mesure anti-abus spécifique, établie pour éviter que la nue-propriété
ÿ DONATION IMMOBILIÈRE. Le droit de donation est progressif par tranches.
soit mise au nom d’une personne alors que l’entièreté du prix d’achat est payée par l’usufruitier. Cette disposition devrait donc, conformément à ce que prévoit la circulaire du 4 mai 2012, l’emporter sur la disposition générale anti-abus (comme c’est le cas pour les donations immobilières par tranches, voir précédemment). Mais, très curieusement,
l’administration considère ici que la disposition générale s’applique en principe s’il y a unité d’intention – autrement dit, si dès le début, la donation d’argent est effectuée en vue d’acquérir la nue-propriété. La circulaire du 19 juillet 2012 stipule pourtant expressément que les principes d’interprétation, tels que prévus dans la circulaire du 4 mai 2012, sont d’application. L’administration se contredit donc.
CONCLUSION
L’OBJECTIF N’EST PAS ATTEINT En adoptant cette nouvelle disposition générale anti-abus, le législateur a voulu, selon ses dires, augmenter la sécurité juridique de certaines opérations. Les 2 circulaires qui ont suivi son adoption ont, paraît-il, le même objectif. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’objectif n’est pas du tout atteint ! Si le choix de la voie la moins imposée reste d’application, le contribuable veillera néanmoins à ne pas franchir la frontière (encore très floue) de l’abus fiscal. Bien que la preuve de cet abus soit à charge de l’administration fiscale, chaque contribuable gardera à l’esprit qu’il devra peut-être justifier son opération par des motifs non fiscaux réels. Cela étant dit, nous continuons de penser qu’en matière de planification successorale, la disposition anti-abus ne s’appliquera pas, si ce n’est dans des cas vraiment exceptionnels. L’avenir nous dira si nous avions raison. Quoi qu’il en soit, le département Estate Planning se tient à votre entière disposition pour répondre à toutes vos questions. N’hésitez pas à nous contacter !
NOUS CONTINUONS DE PENSER QU’EN MATIÈRE DE PLANIFICATION SUCCESSORALE, LA DISPOSITION ANTI-ABUS NE S’APPLIQUERA QUE DANS DES CAS EXCEPTIONNELS. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 53
NOS SERVICES | FONDS MAISON
ÿ INFORMATION. La loi
dispose que doivent être communiquées au PCC les informations concernant le montant des dividendes et des intérêts perçus, ainsi que l’identité des bénéficiaires de ces revenus.
54 | Analyses | Printemps - Été 2012
FISCALITÉ | NOS SERVICES
LA NOUVELLE LÉGISLATION SUR LE PRÉCOMPTE MOBILIER
LA COTISATION SUPPLÉMENTAIRE DE 4% PHOTOS © ROULARTA / THINKSTOCK
VINCENT HOVINE, Estate Planner, Puilaetco Dewaay.
Comme vous le savez certainement, le gouvernement a porté le taux du précompte mobilier sur les intérêts de 15% à 21%, et ce à partir du 1er janvier 2012. Les dividendes demeurent soumis au précompte mobilier de 25%, mais les dividendes d’actions bénéficiant du « précompte réduit » (actions avec strip VVPR) sont désormais imposables à 21% (contre 15% précédemment).
O
utre l’augmentation du taux du précompte mobilier, le gouvernement a également instauré une cotisation supplémentaire de 4% à charge de tout contribuable personne physique résidant en Belgique qui perçoit un montant annuel de revenus mobiliers (intérêts et dividendes) supérieur à 20.020 euros (montant pour l’exercice d’imposition 2013, revenus 2012). Cette cotisation supplémentaire de 4% s’applique, sauf exceptions, aux intérêts et aux dividendes soumis au taux de 21%. Les dividendes soumis au précompte mobilier de 25 % ne peuvent dès lors subir la cotisation de 4 %. La perception de la cotisation supplémentaire de 4% va de pair avec l’abandon du caractère libératoire du précompte mobilier. En effet, tout contribuable devra, à l’avenir, mentionner dans sa déclaration fiscale l’ensemble de ses revenus mobiliers, sauf si ceuxci ont subi, lors de leur encaissement et à sa demande, la cotisation de 4 %.
L’OBLIGATION DE COMMUNICATION À cette obligation de déclaration par le contribuable s’ajoute une obligation de communication des revenus mobiliers à charge du redevable du précompte mobilier (pour les revenus provenant de titres nominatifs) ou de l’opérateur économique (pour les revenus provenant de titres dématérialisés). Puilaetco Dewaay est à considérer comme
un opérateur économique pour tous les avoirs détenus au nom de ses clients. Cette communication sera effectuée à un point de contact central (ci-après dénommé « PCC »), logé au sein de l’administration fiscale. Afin de permettre à ses clients de satisfaire à leurs obligations de déclaration et d’apprécier si les revenus perçus dépassent le seuil de 20.020 euros, Puilaetco Dewaay adressera chaque année, à partir de 2013, une attestation mentionnant le montant des intérêts et des dividendes mobiliers encaissés au cours de l’année écoulée. En tout état de cause, le contribuable n’échappera pas à l’obligation de déclaration et de communication des dividendes précomptés à 25% puisque ceux-ci ne peuvent subir la cotisation supplémentaire de 4 %.
LA PERCEPTION DE LA COTISATION SUPPLÉMENTAIRE DE 4% VA DE PAIR AVEC L’ABANDON DU CARACTÈRE LIBÉRATOIRE DU PRÉCOMPTE MOBILIER. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 55
NOS SERVICES | FISCALITÉ
PUILAETCO DEWAAY ADRESSERA CHAQUE ANNÉE UNE ATTESTATION MENTIONNANT LE MONTANT DES INTÉRÊTS ET DES DIVIDENDES MOBILIERS ENCAISSÉS AU COURS DE L’ANNÉE ÉCOULÉE. QUESTIONS FRÉQUEMMENT POSÉES 1. Quelles sont les personnes concernées par la cotisation supplémentaire de 4% ? La cotisation ne s’applique qu’aux revenus perçus par les personnes physiques résidentes (habitants du Royaume), c’està-dire celles qui sont assujetties à l’impôt des personnes physiques en Belgique. Les personnes morales (telles que les sociétés, asbl,...) et les non-résidents échappent à son champ d’application. Les revenus recueillis par des sociétés civiles (ou « sociétés de droit commun ») sont soumis à la cotisation de 4% étant donné que ces sociétés ne disposent pas de la personnalité juridique ; à ce titre, les revenus sont, du point de vue fiscal, considérés comme perçus par les associés de ces sociétés. 2. La cotisation supplémentaire s’applique-t-elle à un indépendant qui recueille des intérêts et des dividendes sur ses comptes professionnels ? Les dispositions régissant la cotisation de 4% ne font pas de distinction selon que les revenus mobiliers sont perçus à titre privé ou dans le cadre des activités professionnelles de leur bénéficiaire. 3. Un compte est ouvert au nom d’un
56 | Analyses | Automne - Hiver 2012
ÿ INVESTMENT PORTFOLIO. La cotisation supplémentaire de 4% s’applique, sauf exceptions, aux intérêts et aux dividendes soumis au taux de 21%.
enfant mineur ou d’une personne incapable. Qui est habilité à exercer le choix pour l’application de la cotisation de 4 % ? C’est la personne légalement responsable qui exprime le choix (généralement un des parents, les deux parents, le tuteur, ou encore l’administrateur provisoire) pour le prélèvement de la cotisation de 4%. 4. Des avoirs sont détenus sur un compte ouvert en usufruit ou en nue-propriété. Par qui le choix s’opère-t-il ? C’est le bénéficiaire des revenus, c’està-dire la personne qui perçoit les intérêts ou les dividendes, qui est habilité à exprimer un choix pour la retenue de la cotisation de 4 %. Il s’agira en l’espèce de l’usufruitier. 5. Le choix à exprimer pour la retenue de la cotisation de 4% vaut-il pour toutes les institutions financières auxquelles vous avez confié la gestion d’un portefeuille-titres ? Est-il possible de prendre une position différente selon les institutions financières ? Le contribuable peut, par exemple, opter pour la retenue de la cotisation de 4% auprès de la Banque X et s’abstenir de demander un tel prélèvement chez Puilaetco Dewaay.
6. Qui est redevable de la cotisation supplémentaire ? Le redevable de la cotisation de 4 % dont vous avez demandé le prélèvement est l’intermédiaire financier qui paie les revenus en qualité d’opérateur économique. Pour les revenus provenant de titres nominatifs distribués par une société belge, il appartiendra à cette société de prélever, à la demande, la cotisation supplémentaire. A défaut, les devoirs de communication au PCC lui incomberont. 7. Quand la retenue de la cotisation supplémentaire doit-elle être effectuée ? Elle s’effectue en même temps que la retenue du précompte mobilier. 8. Sur quel montant la retenue à la source doit-elle être appliquée ? Le précompte mobilier doit-il être déduit de la base de calcul ? La cotisation est due sur les revenus bruts sans déduction du précompte mobilier belge. Exemple : un précompte mobilier (au taux de 21%) de 25,2 est retenu sur des revenus mobiliers de 120. La cotisation supplémentaire s’élève à 4,8 (soit 4% de 120). Seules les retenues à la source pratiquées à l’étranger (« net à la frontière ») peuvent
FISCALITÉ | NOS SERVICES
LES PERSONNES MORALES (TELLES QUE LES SOCIÉTÉS, ASBL,...) ET LES NON-RÉSIDENTS ÉCHAPPENT À SON CHAMP D’APPLICATION.
ÿ La cotisation supplémentaire de 4% est due sur les revenus bruts sans déduction du précompte mobilier belge.
être déduites de la base imposable de la cotisation. 9. Qui doit communiquer les informations au PCC ? Il s’agit des mêmes personnes que celles chargées de retenir la cotisation de 4% (cf. question 6). 10. Quelles sont les informations à communiquer au PCC ? La loi dispose que doivent être communiquées au PCC les informations concernant le montant des dividendes et des intérêts perçus, ainsi que l’identité des bénéficiaires de ces revenus.
13. Quel est l’impact des mesures relatives à la cotisation de 4 % sur le minimum exempté à l’impôt des personnes physiques « pour personne à charge » ? Le code des impôts sur les revenus contient une disposition prévoyant une exemption d’impôt pour personne à charge ; le montant de cette exemption dépend de l’importance du revenu imposable. Ce montant exempté est augmenté pour les contribuables ayant une personne à charge. Pour être considérée comme « personne à charge », celle-ci ne peut bénéficier de ressources annuelles supérieures à
2.990 euros (ce seuil varie selon certaines catégories de contribuables). Lorsque les parents ont la jouissance légale des revenus de leur enfant mineur, ces revenus sont cumulés avec les leurs. Les enfants dont les revenus imposables sont cumulés avec ceux de leurs parents sont considérés comme étant à charge et ce quel que soit le montant de leurs revenus. Par conséquent, le fait qu’un enfant mineur recueille des revenus mobiliers supérieurs à 20.020 euros n’a pas d’influence sur sa qualité d’enfant à charge.
11. Comment les informations sont-elles communiquées au PCC lorsque des revenus sont perçus par plusieurs titulaires d’un compte ? La communication des informations est effectuée au nom de chacun des co-titulaires du compte qui est soumis à la cotisation et pour la part qui le concerne. 12. Un compte est ouvert au nom d’un enfant mineur. Au nom de qui la communication au PCC est-elle effectuée ? La communication s’effectue toujours au nom du titulaire du compte, soit, en l’espèce, au nom du mineur.
ÿ INFORMATION & COMMUNICATION. À l’obligation de déclaration s’ajoute une obligation de communication.
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LES NOUVELLES FISCALES FRANÇAISES
MESURES
AYANT UN IMPACT SUR LE PATRIMOINE DES RÉSIDENTS BELGES PHOTOS © ROULARTA/REPORTERS
BERNARD d’URSEL, Senior Estate Planner, Puilaetco Dewaay.
En France, la nouvelle majorité tente de combler le déficit public par la recherche de recettes multiples. Les moyens utilisés sont manifestement orientés vers les détenteurs de grands patrimoines, qu’ils soient mobiliers ou immobiliers.
L
es débats de la campagne électorale française en matière de fiscalité ont laissé entendre l’adoption par la nouvelle majorité de mesures fiscales. Celles-ci commencent à voir le jour. Quelles sont les nouvelles dispositions qui affecteront les résidents belges ?
IMPÔT ET CONTRIBUTION EXCEPTIONNELLE SUR LA FORTUNE Les personnes physiques résidant en Belgique sont redevables de l’impôt sur la fortune au titre des biens situés en France. L’ISF est établi sur la valeur totale nette du patrimoine (certains biens échappent à la base imposable). Cet impôt a subi des changements depuis l’année dernière. Le bouclier fiscal avait été instauré afin de limiter la charge fiscale, tous impôts directs – y compris l’ISF – confondus, à 50% des revenus. Il était même possible dans certaines conditions d’obtenir la restitution de l’excédent d’ISF payé si les impôts directs représentaient un montant supérieur à 50% des revenus. Ce bouclier fiscal a été supprimé ; cette mesure s’appliquera au titre de l’ISF dû pour 2013. En juillet 2011, le gouvernement français avait fait modifier le barème de l’ISF. L’ISF était exigible à partir d’un seuil de 1.300.000 €, contre 800.000 € précédemment. Depuis lors, le barème de l’ISF s’établit comme suit : • de 1.3000.000 € à 3.000.000 € : 0,25 % • supérieur à 3.000.000 € : 0,50 %.
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POUR DES RAISONS BUDGÉTAIRES, LE NOUVEAU GOUVERNEMENT SOUHAITE INTRODUIRE UNE « CONTRIBUTION EXCEPTIONNELLE SUR LA FORTUNE ».
ÿ EAU TROUBLE. La législation fiscale française se caractérise par une complexité certaine. Les nouvelles mesures fiscales ne modifient pas l’ISF ni son barème applicable pour l’année 2012. Toutefois, pour des raisons budgétaires, le nouveau gouvernement souhaite introduire une « contribution exceptionnelle sur la fortune ». Cette nouvelle taxe se présente sous les apparences d’un impôt sur le capital sans porter le nom d’ISF. Toute personne (qu’elle réside en France ou à l’étranger) redevable de l’ISF, c’est-à-dire dont le patrimoine excède 1.300.000 €, sera tenue de payer cette contribution exceptionnelle. Celle-ci est calculée d’après le barème de l’ISF tel qu’il existait avant la modification législative effectuée en juillet 2011. Or, ce barème commence à 800.000 €. Son tarif est le suivant : • de 800.000 € à 1.310.000 € : 0,55 % • de 1.310.000 € à 2.570.000 € : 0,75 % • de 2.570.000 € à 4.040.000 € : 1% • de 4.040.000 € à 7.710.000 € : 1,3 % • de 7.710.000 € à 16.790.000 € : 1,65 % • supérieur à 16.790.000 € : 1,80 %
Cette nouvelle contribution est due en 2012. Les redevables de l’ISF qui sont établis hors de France devront déposer au plus tard pour le 15 novembre 2012 une déclaration à la contribution exceptionnelle sur la fortune au titre de l’année 2012. Ceux qui étaient encore domiciliés en France au 1er janvier 2012 mais qui ne le sont plus au 4 juillet 2012, seront redevables de cette contribution exceptionnelle sur les biens situés en France valorisés au 1er janvier 2012. Le montant de l’ISF dû, sans qu’il ne soit tenu compte des éventuelles réductions applicables, sera imputé sur cette contribution exceptionnelle ; l’excédent ne sera pas remboursé. Ceci revient ni plus ni moins à réinstaurer, avec effet rétroactif et sous couvert d’une autre dénomination, les barèmes de l’ISF tels qu’ils étaient en vigueur avant la modification législative de juillet 2011.
MODIFICATION EN MATIÈRE DE DROITS DE DONATION Deux changements majeurs interviennent en matière de droits de donation. Ils concernent d’une part l’abattement pour les enfants, d’autre part le délai de rappel. Abattement en matière de droits de donation Lorsque des parents effectuent en faveur de leurs enfants une donation imposable aux droits de donation français, un abattement de 159.325 € est applicable à chaque part donnée. En d’autres termes, si les père et mère effectuent une donation d’un bien immeuble situé en France à leurs trois enfants, six parts sont déterminées pour l’application des droits d’enregistrement. Sur chacune de ces six parts, un abattement de 159.325 € est appliqué. Ce montant fait l’objet d’une indexation annuelle. Dorénavant, cette somme est réduite à 100.000 € et ne fait plus l’objet d’une indexation.
Automne - Hiver 2012 | Analyses | 59
NOS SERVICES | FISCALITÉ FRANÇAISE
LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS REVOIT À LA HAUSSE LA FISCALITÉ DU PATRIMOINE ET DES REVENUS IMMOBILIERS. ÿ BERCY, MINISTÈRE DES FINANCES. Le nouveau gouvernement français tente de combler le déficit public par la recherche de recettes fiscales multiples.
Délai de rappel des donations antérieures Afin d’assurer la progressivité des droits de donation, la base imposable aux droits de donation des biens donnés est ajoutée à celle des biens ayant fait l’objet d’une donation il y a 10 ans entre les mêmes personnes. La nouvelle mesure vise à porter le délai de 10 ans à 15 années. Ceci obligera les futurs donateurs à attendre 15 ans au lieu de 10 avant d’effectuer de nouvelles donations si l’abattement a déjà été épuisé. Les donations de sommes d’argent en pleine propriété effectuées par des grands-parents âgés de moins de 80 ans à leurs petitsenfants âgés de plus de 18 ans sont exonérées de droits de donation à concurrence de 31.865 € tous les 10 ans. Ce délai est également porté à 15 ans. LE TAUX ORDINAIRE DE TVA Le taux ordinaire de TVA était de 21,20 %. Ce taux passe à 19,60 %, soit celui en vigueur avant mars 2012. Rappelons que la TVA est due sur l’acquisition de constructions neuves et qu’elle est également appliquée sur les terrains à bâtir.
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DISPOSITIONS AFFECTANT CERTAINS REVENUS IMMOBILIERS Les revenus provenant de la location de biens immeubles situés en France et les plusvalues réalisées lors de la vente de ces biens par des non-résidents français sont imposables à l’impôt sur le revenu français. Ces plus-values sont déterminées de la manière suivante : • la plus-value est égale à la différence entre la valeur de réalisation augmentée des charges au profit du vendeur et diminuée des frais de cession et le prix d’acquisition augmenté d’un forfait de 7,5 % pour tenir compte des frais d’acquisition et des dépenses de travaux éventuels. • pour les immeubles détenus depuis plus de cinq ans, la plus-value est diminuée d’un abattement équivalant à 2% par année de détention à partir de la cinquième année, de 4% au-delà de la 17e année et 8% audelà de la 24e année. L’abattement par année de détention implique l’effacement de la plus-value imposable pour des immeubles détenus depuis plus de
30 ans. La plus-value réalisée par des résidents belges est imposable au taux de 19 %. Une exonération existe en faveur de l’habitation détenue par des non-résidents qui ont été domiciliés en France pendant deux ans avant la cession et qui en ont eu la disposition depuis le 1er janvier de l’année précédant celle de la cession (soit une habitation qui n’était pas donnée en location). Ces règles sont déjà en vigueur depuis 2011. Le changement tient dans l’application d’une charge supplémentaire dans le chef des nonrésidents personnes physiques, à savoir les prélèvements sociaux qui n’étaient dus que dans le chef des résidents français. Ces prélèvements sociaux devraient s’élever à 15,5 %. Ceci a pour effet de porter la charge totale due sur la plus-value réalisée à près de 35 %. Les revenus locatifs de biens immeubles situés en France perçus par les non-résidents français n’échapperont pas non plus à l’application des prélèvements sociaux. Ces revenus pourront être diminués de frais, tels que les frais de syndic, les primes d’assurance et des intérêts d’emprunt.
FISCALITÉ FRANÇAISE | NOS SERVICES
DES MODIFICATIONS IMPORTANTES AFFECTENT LA MATIÈRE DES DROITS DE DONATION. ÿ VILLA À SAINT-TROPEZ. L’attrait du marché immobilier français va probablement connaître un frein.
INSTAURATION D’UNE TAXE DE 0,2% SUR L’ACQUISITION DE CERTAINS TITRES DE SOCIÉTÉS FRANÇAISES Durant l’été, la presse belge a présenté l’instauration d’une taxe de 0,2 % sur l’acquisition de titres de sociétés françaises. Cette taxe était déjà présente dans le code général des impôts français. Elle est comparable à notre taxe sur les opérations de bourse. Son taux de 0,1 % a été porté à 0,2 %. Ce nouveau tarif s’applique aux opérations effectuées à partir du 1er août 2012. Cette taxe touche les acquisitions de titres de sociétés établies en France dont la capitalisation boursière dépasse 1 milliard d’euros au 1er janvier de l’année d’imposition. Des exceptions sont cependant prévues, entre autres, pour les acquisitions effectuées dans le cadre d’une émission d’actions et pour les acquisitions d’obligations convertibles.
CONCLUSION
UNE NOUVELLE ORIENTATION La législation fiscale française se caractérise par une complexité certaine. Depuis plusieurs années, la tendance s’est accrue avec la volonté d’atteindre tous les aspects de la vie sociale et économique. La philosophie de la politique fiscale pourrait se comprendre si son but était limité à l’éparpillement raisonnable de la charge fiscale. Toutefois, les choix actuels sont à l’évidence dirigés vers une catégorie de personnes, voire certains types de biens. Ces orientations pourraient un jour se retourner contre les concepteurs de cette idéologie si elles devaient continuer à provoquer l’exode des grandes fortunes et le détournement des investisseurs privés ou professionnels du marché français. En effet, comme prévu, la nouvelle majorité tente de combler le déficit public par la recherche de recettes multiples. Les moyens utilisés sont manifestement orientés vers les détenteurs de grands patrimoines, qu’ils soient mobiliers ou immobiliers. L’attrait du marché immobilier français va probablement connaître un frein, sachant que non seulement les loyers mais également les plus-values pourront être atteints par des niveaux d’imposition approchant les 35 %. En Belgique, par contre, si les capitaux et les revenus qu’ils ont générés ont subi des soubresauts depuis quelques années, la fiscalité du patrimoine mobilier actuellement en vigueur est encore loin d’atteindre ce niveau.
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NOS SERVICES | LE QATAR, LA PERLE DU GOLFE
DES DÉBUTS MODESTES, DE HAUTES AMBITIONS
LE QATAR
UN PETIT PAYS AUX GRANDES IDÉES PHOTOS © ROULARTA / REPORTERS AGENCY
CHRISTOPHE VAN CANNEYT, Head of Fixed Income & Structured Products, Puilaetco Dewaay.
Dans le port de Doha – la capitale du Qatar –, en face du nouveau quartier des affaires de West Bay, se dresse une statue faisant référence au passé de la petite péninsule de 11.000 km². Il s’agit d’une gigantesque huître renfermant une perle, un rappel du temps où la pêche à la perle était à peu de choses près la seule activité de cette colonie britannique faiblement peuplée (moins de 40.000 habitants en 1950). Cette tradition de la pêche à la perle remonte d’ailleurs à l’époque gréco-romaine…
M
ais lorsque les Japonais ont mis au point une méthode pour produire des perles artificielles à bon marché en 1933, cette activité traditionnelle a brusquement pris fin et la région a sombré dans une pauvreté absolue. Cette situation a incité les Britanniques à accorder son indépendance au pays. Du pétrole avait bien été découvert dans la région en 1939, mais il semblait avoir très peu de valeur à ce moment. Le 3 septembre 1971, le Qatar est devenu indépendant et a pu suivre son propre chemin.
UNE FORMIDABLE IMPULSION À L’ÉCONOMIE Les Britanniques s’en mordront vite les doigts: l’explosion du prix du pétrole consécutive au premier et au deuxième chocs pétroliers (en 1973 et 1979) a permis au tout jeune pays d’entamer presque directement la première étape de son développement accéléré. Le Qatar n’est toutefois jamais devenu un acteur majeur de l’industrie pétrolière: ses réserves et sa production (environ 500.000 barils par jour) étaient trop faibles en comparaison avec celles des autres pays producteurs de pétrole. Par ailleurs, le repli des prix du pétrole dès 1985
ÿ Graphique : Réserves de gaz avérées fin 2009, en trillions de mètres cubes Russia Iran Qatar Turkmenistan Saudi Arabia US UAE Venezuela Nigeria Algeria Indonesia Iraq Australia China Malaysia Egypt Norway Kazakhstan Kuwait Canada 0 Source : BP statistical review
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ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ DOHA, QATAR. La « Perle du Golfe ». a provoqué pour la seconde fois une contraction sensible de l’économie du petit pays: le PNB par habitant a reculé de quelque 53% dans les années 80. Mais tout a changé lorsque d’énormes réserves de gaz ont été découvertes au large de la péninsule. Les réserves de gaz avérées du Qatar s’élèvent actuellement à plus de 25 trillions de m³, soit environ 15% des réserves mondiales, ce qui en fait la troisième plus grande réserve de gaz de la planète. C’est principalement l’exploitation méthodique de ce trésor gazier sous l’égide de l’Émir Hamad bin Khalifa al Thani, arrivé au pouvoir en 1995, qui a donné une formidable impulsion à l’économie du pays dès le milieu des années 90. Au cours des 15 années comprises entre 1996 et 2011, le PNB a été multiplié par 19 ! Ce résultat est essentiellement dû au développement des activités LNG (Liquefied Natural Gas, c’est-à-dire la liquéfaction du gaz naturel en vue de le transporter et de le
stocker plus facilement). Le Qatar a réalisé des investissements plus que substantiels dans des installations de liquéfaction du gaz, lequel a commencé à être acheminé par une flotte de 80 navires-citernes vers les marchés asiatiques, dont la croissance rapide les rendait avides d’énergie. Malgré son économie qui stagne depuis plusieurs années, le Japon reste un grand consommateur d’énergie et, ainsi, un gros client du Qatar. Le Japon, la Corée du Sud, l’Inde et Singapour représentent ensemble environ 60% des exportations du Qatar. LA DIVERSIFICATION DE L’ÉCONOMIE Cette situation a bien évidemment rendu l’émirat particulièrement dépendant du secteur du gaz et du pétrole. Celui-ci représentait plus de la moitié (51,7%) du PNB en 2010 et pas moins de 85,2% des recettes publiques. Ces pourcentages ont même encore progressé en 2011 compte tenu de l’augmentation de
la production de gaz naturel. Bien conscient de son passé où il dépendait fortement d’un secteur unique, le Qatar n’a pas l’intention de commettre à nouveau les mêmes erreurs. C’est ainsi que depuis quelques années, le pays manifeste une volonté claire et nette d’affecter les revenus de l’exploitation de ses réserves de gaz et de pétrole à une profonde diversification de son économie. Et à l’instar de l’exploitation des réserves de gaz, l’intention est de procéder de manière méthodique et structurée. En juin 2008, le secrétariat-général au développement a publié la Qatar National Vision 2030. Ce document formule les objectifs à long terme de développement du pays sur les plans humain, social, économique et environnemental. Des projets davantage concrets en vue d’une mise en œuvre à court terme peuvent être développés dans ce cadre général: le Qatar a récemment publié sa National Development Strategy 2011-2016, qui traduit la National Vision en objectifs opérationnels. Ce projet Automne - Hiver 2012 | Analyses | 63
NOS SERVICES | LE QATAR, LA PERLE DU GOLFE
LE PAYS MANIFESTE UNE VOLONTÉ CLAIRE ET NETTE D’AFFECTER LES REVENUS DE L’EXPLOITATION DE SES RÉSERVES DE GAZ ET DE PÉTROLE À UNE PROFONDE DIVERSIFICATION DE SON ÉCONOMIE.
ÿ FÊTE NATIONALE. Le Qatar : petit pays, grande puissance. 64 | Analyses | Automne - Hiver 2012
tactique entend principalement anticiper le recul attendu de la production de gaz et de pétrole en renforçant les secteurs de l’économie non liés aux hydrocarbures. Outre le renforcement de l’industrie (des efforts sont notamment déployés dans les domaines de l’engrais, du métal et de la pétrochimie) et du secteur des services (qui passe par un fort développement des secteurs financier et aéronautique – Qatar Airways a même été élue meilleure compagnie aérienne du monde à deux reprises), le pays souhaite aussi travailler au développement de son potentiel technologique et de connaissances. Le Qatar est toutefois trop petit et trop peu peuplé (il compte actuellement 1,7 million d’habitants, dont environ 200.000 Qataris) pour devenir une grande puissance industrielle. C’est pourquoi il vise également, à l’instar de la Norvège, à investir une part substantielle des revenus du gaz et du pétrole à l’étranger via un fonds d’État. La Qatar Investment Authority (QIA) a dès lors été créée en juin 2005: celle-ci a pour vocation d’investir les excédents publics croissants en actions (tant d’entreprises cotées en bourse que des private equity), obligations, immobilier et placements alternatifs. La holding investit aussi bien dans le pays qu’à l’étranger et suit à cet égard une stratégie opportuniste l’amenant à investir en Europe, aux ÉtatsUnis et dans les marchés émergents. L’objectif de cette stratégie de diversification est limpide: le Qatar souhaite, d’ici 2020, financer l’intégralité de son budget par des activités étrangères au secteur du gaz et du pétrole, ainsi que par les dividendes de la QIA. UN GÉANT FINANCIER EST NÉ Grâce à l’énorme capacité d’action du fonds (qui reçoit annuellement, d’après les estimations, entre 20 et 30 milliards USD de moyens à investir, ce qui en fait le plus grand investisseur au monde à l’heure actuelle), la QIA a acquis une liste impressionnante de participations en quelques années. Le fonds aurait acquis à ce jour pour environ 135 milliards USD de participations. Il est établi que la QIA dispose déjà de participations importantes en France, ce qui fait d’elle l’un des principaux actionnaires d’entreprises françaises de premier plan comme Lagardère, EADS (la société mère d’Airbus), Total, Vinci, Veolia, LVMH, Cegelec et Suez environnement. Outre ses participations dans des entreprises, elle est également propriétaire de nombreux biens immobiliers français prestigieux (notamment les hôtels Carlton à Cannes et Concorde-Lafa-
LE QATAR, LA PERLE DU GOLFE | NOS SERVICES
LE FONDS QIA AURAIT ACQUIS À CE JOUR POUR ENVIRON 135 MILLIARDS USD DE PARTICIPATIONS. ÿ DOHA, AL JAZEERA. La chaîne donne une voix aux opinions arabes. yette à Paris, ainsi que le Virgin Megastore sur les Champs-Élysées) et propriétaire à 100% du club de football du Paris Saint-Germain. Mais la QIA s’est également assurée d’une présence importante au Royaume-Uni grâce à des participations dans Barclays Bank, London Stock Exchange, Sainsbury, Cadbury, Schweppes et Shell. Elle a également acquis Harrods et pris une participation dans le Village Olympique de Londres. En Allemagne, elle est l’un des actionnaires principaux de Volkswagen et de l’entreprise de construction Hochtief, en Suisse du Crédit Suisse, en Espagne d’Iberdrola (et du club de football de Málaga). Aux États-Unis, le fonds a notamment participé au sauvetage de GM et a rejoint le groupe d’investissement qui a racheté les studios Miramax à la Walt Disney Company. En résumé, la liste de ses participations dans des entreprises «Blue chips» et dans l’immobilier de premier plan est quasi sans fin. UN POIDS LOURD DIPLOMATIQUE DANS UNE RÉGION AGITÉE Mais le Qatar ne se contente pas d’amasser des richesses: il les consacre aussi, dans une mesure croissante, à apporter davantage de stabilité au Moyen-Orient. Cette ambition s’est manifestée dès 1996, soit un an à peine après l’arrivée au pouvoir de l’Émir, lorsque celui-ci a recruté une équipe de journalistes du BBC Arabic
Service. Al Jazeera était née. C’est le premier émetteur à donner une voix à de nombreuses opinions arabes indépendamment des pouvoirs publics respectifs. Mais l’Émir joue aussi de plus en plus un rôle fondamental de médiateur entre les camps arabes fortement polarisés et leurs partisans respectifs en Orient (Russie, Chine) et en Occident (États-Unis). Il a ainsi joué un rôle crucial dans la conclusion d’un accord entre les factions palestiniennes rivales que sont le Hamas et le Fatah, lors du soulèvement libyen contre Kadhafi et dans la lutte contre le régime syrien (il fut le premier dirigeant arabe à fermer son ambassade à Damas et à sommer le président de partir). L’Émir ne peut toutefois pas être associé à un camp déterminé dans le cadre de ses efforts diplomatiques: c’est avant tout un homme pragmatique. Il fut ainsi également le premier à inviter le très controversé président iranien Ahmadinejad à un sommet des pays du Golfe, ce qui lui vaut souvent le surnom de «Kissinger arabe». UNE SOCIÉTÉ DE PLUS EN PLUS MODERNE C’est avec le même pragmatisme que se bâtit avec ardeur une société civile au Qatar. La première dame, la Sheikha Mozah, joue un rôle primordial à cet égard: par l’intermédiaire de la Qatar Foundation, elle coordonne de très nombreux efforts en vue de répondre aux
besoins sociaux et de donner corps à cette société, et se consacre particulièrement à l’amélioration de l’enseignement et à la construction de la société de la connaissance que doit devenir le Qatar. Ce pays dont le système scolaire était encore peu développé à l’époque de la naissance de l’Émir (1952) accueille aujourd’hui une dizaine d’universités américaines et européennes de premier plan (notamment Carnegie Mellon, Cornell, Northwestern University et HEC Paris). La fille de l’Émir, la Sheikha Mayassa, joue quant à elle un rôle essentiel dans le développement culturel du pays par l’intermédiaire du Museum of Islamic Art (MIA) qui s’est ouvert à Doha en 2008. Le superbe bâtiment conçu par I.M. Pei est déjà considéré par les connaisseurs comme l’un des plus grands musées de la planète. LA PERLE DU GOLFE Le Qatar s’est autoproclamé la «Perle du Golfe», faisant ainsi référence à son activité historique tout en rendant hommage à son développement économique. Bien que le Qatar soit un petit Etat en termes de superficie et de population, il joue de plus en plus dans la cour des grands sur les plans économique, financier et diplomatique. Ceci est la conséquence, dans une mesure non négligeable, de l’attitude pragmatique de sa classe dirigeante, qui veut jeter un pont entre la pensée occidentale et les riches traditions de l’Islam. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 65
BUREAUX | WAREGEM
RENCONTRE AVEC FABIENNE GIJSEL
LE SECRET D’UN TRAVAIL
PASSIONNANT
TEXTE ET PHOTOS © CANTILIS
En 2008, Fabienne Gijsel créait un tout nouveau bureau Puilaetco Dewaay à Waregem. Une région qui se distingue par ses entrepreneurs dynamiques et surtout industriels. Entretien avec une femme pleine d’énergie, passionnée par les secteurs du private banking et de l’entreprise, mais aussi de l’art et de la gastronomie.
F
abienne Gijsel a débuté sa carrière à la Banque Bruxelles Lambert en tant que licenciée en sciences économiques appliquées. Spécialisée dans le domaine bancaire et financier, elle était prédestinée à une carrière dans le monde bancaire. « Le secteur du private banking m’a toujours passionnée. En 1989, j’étais une des premières femmes à offrir des conseils en placement. Treize ans plus tard, j’ai rejoint la banque néerlandaise ABN AMRO avec deux collègues. » En Belgique, ce groupe bancaire était une PME. « Vous deviez être entreprenant tout en travaillant pour un groupe international doté d’une grande expertise. C’est ce qui nous a beaucoup plu. » La reprise en 2007 d’ABN AMRO Private Banking par Fortis a entraîné des changements. « À l’époque, j’étais membre du Comité de direction commercial. Pour moi, il était donc très clair que notre façon de travailler n’était plus garantie au sein de la nouvelle structure. Ce que je jugeais inacceptable pour notre clientèle. J’ai par conséquent tenté de trouver une solution avec Stefaan Vanden Berghe et Kurt Van Den Bossche. » C’est précisément cette équipe qui est à l’origine de Puilaetco Dewaay à Waregem. « Je voulais créer une banque offrant des services de haute qualité, adaptés aux besoins de chaque client. Jacques Peters, CEO de KBL epb, a décelé du potentiel dans cette vision. » Le 2 janvier 2008, le bureau de Waregem ouvre ses portes avec une équipe motivée.
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« La plupart d’entre nous travaillaient déjà ensemble depuis huit à dix ans. Cette ambiance familiale, je ne l’échangerais pour rien au monde », souligne Fabienne Gijsel.
« NOTRE TRAVAIL NOUS OCCUPE JOUR ET NUIT ET NOTRE APPROCHE EST CELLE D’UN BUREAU DE GESTION DE PATRIMOINE. »
ENGAGEMENT INDIVIDUEL DE PENSION | NOS SERVICES
ÿ FABIENNE GIJSEL, responsable du bureau Puilaetco Dewaay de Waregem. « Je voulais créer une banque offrant des services de haute qualité, adaptés aux besoins de chaque client. »
UN INVESTISSEMENT PERMANENT « Je dois le succès de notre bureau de Waregem aux nombreux clients fidèles qui nous ont fait grandir », explique Fabienne Gijsel. « Je connais certains d’entre eux depuis vingt ans. Je gère leur patrimoine avec l’équipe et suis souvent aussi leur personne de confiance. C’est ce qui rend ce travail si passionnant. » Dès le départ, Fabienne Gijsel a joué la carte de « l’équipe service à la clientèle. » « Trois personnes sont en permanence au courant du dossier de chaque client, ce qui leur permet de toujours conseiller efficacement et en connaissance de cause. »
D’après Fabienne Gijsel, c’est sans aucun doute leur excellent service et leur vision à long terme qui les rendent uniques. « Nous faisons bien plus que donner des conseils en matière d’investissement. Notre travail nous occupe jour et nuit et notre approche est celle d’un bureau de gestion de patrimoine. En cette époque d’incertitude, les gens cherchent en effet à diversifier leur patrimoine. Ainsi, outre les bons investissements, les conseils en matière de fiscalité et de gestion de patrimoine sont essentiels. C’est pourquoi nous utilisons un réseau de contacts étoffé pour réunir experts, clients et investisseurs dans un cadre professionnel – par exemple, lorsqu’un
client recherche un bon partenaire pour investir dans l’immobilier, ou lorsqu’il a besoin de conseils concernant des opportunités d’investissement ou dans le domaine de l’acquisition d’œuvres d’art. » L’équipe de Waregem s’investit également beaucoup dans la vie sociale locale. « Nous aimons faire des activités avec nos clients. Nous sommes toujours présents à la Waregem Koerse et au Tour des Flandres, mais nous organisons également pour nos clients des événements gastronomiques et culturels. Bref, nous apprécions les bonnes choses de la vie… », ajoute la responsable du bureau en riant. Elle-même se révèle être une fine Automne - Hiver 2012 | Analyses | 67
BUREAUX | WAREGEM
« TRAVAILLER EN ÉQUIPE DANS UN SEUL ET MÊME ESPACE NOUS APPORTE BEAUCOUP. » ÿ PUILAETCO DEWAAY, WAREGEM. « Dans cette région dynamique, nous possédons une clientèle d’entrepreneurs actifs dans de nombreux secteurs. »
connaisseuse en vins et une passionnée de gastronomie et d’art. UNE AMBIANCE DE TRAVAIL AGRÉABLE En entrant dans le bureau de Puilaetco Dewaay à Waregem, impossible d’y échapper : vous êtes surpris par une ambiance familiale, rehaussée d’art contemporain. Une composition vivante de six statues de bronze, réalisée par l’artiste allemand Thomas Schütte et intitulée « Sechs Geister » (traduit littéralement : « Six Spectres »), trône au milieu de l’espace de travail. « L’art contribue à une ambiance très agréable », explique Fabienne Gijsel. C’est d’ailleurs à cet endroit que se trouve son bureau, côtoyant ainsi ceux du reste de l’équipe. Un choix étonnant mais délibéré, semble-t-il. « Travailler en équipe dans un seul et même espace nous apporte beaucoup. Nous partageons les moments agréables ensemble, tout comme les tensions. Et nous n’avons pas besoin d’organiser de réunions pour savoir qui s’occupe de quoi. » UN SUCCÈS OUEST-FLANDRIEN « Puilaetco Dewaay est la seule banque privée de Waregem ; dans cette région dynamique, nous possédons une clientèle d’entrepreneurs actifs dans de nombreux secteurs. » Fabienne
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Gijsel se sent très à l’aise dans cet esprit d’entreprise. « Nous avons aussi bien des clients qui ont réussi à développer plusieurs entreprises que de jeunes entrepreneurs qui débutent leur carrière. Aujourd’hui encore, le choix d’implanter un bureau Puilaetco Dewaay dans la région reste judicieux. Cela
dit, nous continuons à poursuivre le même objectif : nous développer davantage avec nos clients existants et nos nouveaux clients, en conservant notre bonne réputation et en faisant preuve de professionnalisme dans tout ce que nous réalisons, dans l’atmosphère familiale à laquelle nous tenons tant. »
L’EXPERTISE DU QATAR Depuis le 31 juillet 2012, Puilaetco Dewaay fait partie, via KBL European Private Bankers, de Precision Capital, une entité luxembourgeoise qui représente les intérêts d’un investisseur éminent de l’Etat du Qatar. « En ces temps d’incertitude financière, cet acteur très stable offre une force d’action supplémentaire ainsi qu’une grande solvabilité », souligne Fabienne Gijsel. « Au cours des cinq dernières années, le Qatar a enregistré une dette publique d’environ 9% par rapport à son produit national brut (PNB) alors qu’en Belgique, elle est de 100%. La Belgique affiche des déficits budgétaires d’environ 3% tandis que le PNB augmente plus lentement. Résultat : le rapport dette/PNB se dégrade. En revanche, le Qatar présente un excédent budgétaire de 6% et une croissance du PNB comparable pour les années à venir, ce qui améliore encore le rapport dette/PNB. Les sources de revenus du Qatar sont essentiellement le pétrole et le gaz. Ces revenus sont investis dans d’autres branches économiques, ce qui témoigne d’une gestion rigoureuse des risques. Nous sommes très heureux de notre nouvel actionnaire. D’une part, nous pouvons faire appel à l’expertise d’un acteur international comme KBL epb, avec un actionnaire tout à fait solvable, et d’autre part, à Waregem, nous avons la possibilité de travailler d’une manière réellement adaptée aux souhaits du client. Ce qui est assez unique dans notre secteur! »
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ÿ JAN FABRE, L’homme
qui mesure les nuages.
CONFÉRENCES ART | NOS SERVICES
CONFÉRENCES ART PUILAETCO DEWAAY
LE MARCHÉ DE L’ART
CONTEMPORAIN PHOTOS © CHRISTIE’S IMAGES LIMITED
Toujours à la une de l’actualité, les prix réalisés par les œuvres d’art contemporain suscitent souvent les passions ! Clés de compréhension.
S
i les collectionneurs acquièrent de l’art d’abord par goût et parce qu’ils considèrent qu’il enrichit leur vie, il n’est pas antinomique qu’ils l’envisagent également comme un investissement financier permettant de diversifier leurs avoirs. Parmi les différentes catégories de collections, la collection d’art contemporain est fondamentalement différente car le «contemporain» en tant que tel s’envisage sur trois temps: le passé, le présent et le devenir. Il y a d’une part des artistes dont la production est limitée car ils sont décédés, et d’autre part des artistes en train de produire, dont l’œuvre est ouverte et dont le meilleur est peut-être encore à venir. Les œuvres des uns, devenues des «classiques», se raréfient, alors que les œuvres des autres peuvent passer de mode plus rapidement. LES PREMIÈRES VENTES PUBLIQUES Le marché de l’art contemporain s’articule autour de deux pôles, deux marchés. Le premier est celui des galeristes. Ils sont à la source, découvrent les artistes, lancent leurs carrières et les représentent sur le long terme. Le second est celui des ventes aux enchères qui organisent des ventes d’œuvres de «deuxième main».
LE MARCHÉ DE L’ART CONTEMPORAIN S’ARTICULE AUTOUR DE DEUX PÔLES. LE PREMIER EST CELUI DES GALERISTES, LE SECOND CELUI DES VENTES AUX ENCHÈRES.
LUXX | 19 Automne - Hiver 2012 | Analyses | 71
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ÿ VENTE AUX ENCHÈRES CHRISTIE’S.
LE CHOIX DES COLLECTIONNEURS SE CONCENTRE SUR LES PIÈCES DE QUALITÉ, QU’ILS ACQUIÈRENT EN FONCTION DE LEUR PASSION, DE LEUR CONNAISSANCE ET DE LEURS MOYENS. 72 | Analyses | Automne - Hiver 2012
Les premières ventes publiques d’artistes encore vivants ont eu lieu dans les années 50 et les grandes maisons de vente aux enchères n’ont commencé à organiser des ventes spécialisées d’art contemporain qu’en 1975. Les prestigieuses «ventes du soir» mettront en scène une sélection de «highlights» à partir de 1994. Rappelons qu’avant les premières ventes publiques, les valeurs des œuvres de ces artistes n’étaient pas connues du grand public: les transactions s’effectuaient entre marchands et collectionneurs et restaient donc dans la sphère privée. La renommée des artistes était alors plus question d’art que de cote! LE CONTEMPORAIN À LA FIN DU XXe SIÈCLE Dans les années 80, l’art contemporain devient populaire, les prix grimpent et les collectionneurs commencent à vendre. De manière générale, le krash boursier de 1987 n’affectera pas le marché de l’art et les enchères historiques vont se succéder dans
toutes les catégories, particulièrement dans l’art impressionniste et moderne. La crise financière asiatique du début des années 90 va quant à elle réellement toucher le marché de l’art: les spéculateurs se retirent et les investisseurs vendent rapidement et à perte. Il faudra attendre une dizaine d’années pour que les prix reviennent au niveau du boom des années 80. Malgré cette dernière décennie chahutée, l’art contemporain est finalement parvenu, à l’aube du XXIe siècle, à trouver sa place et à prendre une part de marché importante. LES ANNÉES 2000 ET LA MONDIALISATION A partir des années 2000, la globalisation du monde s’accélère, le marché de l’art se mondialise, de nouveaux acteurs et de nouvelles liquidités entrent en jeu. La demande s’accroît, les prix augmentent, ce qui encourage les collectionneurs à vendre. Tous les segments du marché de l’art en bénéficient. Mais avec la nouvelle crise financière de 2008, les inves-
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tisseurs se retirent à nouveau. Les vendeurs se réfèrent aux prix d’avant la crise et les acheteurs veulent faire de bonnes affaires. C’est l’art contemporain qui sera le plus touché. Pour redonner confiance aux acheteurs et aux vendeurs, les salles de ventes vont réagir en concentrant leur stratégie sur la qualité des œuvres proposées à la vente avec des estimations raisonnables. Par ailleurs, les acheteurs sont approchés de manière plus proactive et les salles de vente vont proposer plus de ventes privées. Dès 2010, le marché de l’art a retrouvé le niveau de 2007.
Trois facteurs peuvent expliquer la différence entre la crise des années 90 et celle de 2008: - L’augmentation du nombre de clients, de par la mondialisation et l’émergence de nouveaux marchés (Russie, Chine, Corée, Amérique du Sud, Inde, Moyen-Orient); - Une plus grande transparence du marché de l’art grâce au développement d’Internet, qui a facilité l’accès aux informations sur les prix et les transactions des œuvres. Cette transparence a engendré plus de rigueur et le marché en est devenu plus attractif; - Enfin, et c’est essentiel, les acheteurs sont plus investis et plus sélectifs.
LE MOT DE LA FIN Le choix des collectionneurs se concentre sur les pièces de qualité, qu’ils acquièrent en fonction de leur passion, de leur connaissance et de leurs moyens. Cette qualité recherchée est aussi une sécurité au niveau de l’investissement. La meilleure «spéculation» en art est très certainement celle que l’on fait sur ses propres choix, la preuve en est que les plus beaux succès de marché sont les ventes de collections qui ont été constituées par des collectionneurs investis dans leur passion (vente Ganz, Herbert, etc).
PROCHAINES CONFÉRENCES Le mobilier ancien et l’art contemporain ont été les premiers thèmes abordés dans le cadre du cycle «Conférences Art» 2012 proposé par Puilaetco Dewaay, en collaboration avec Christie’s. Nos prochaines conférences Art : Mardi 16 octobre: Art chinois Parallèlement au développement du commerce entre l’Europe et la Chine aux XVIIe et XVIIIe siècles, de nombreuses collections d’art chinois se sont constituées: porcelaines, ivoires, peintures, paravents... font dès lors partie du décor quotidien de nombreuses familles européennes. Par Leila de Vos van Steenwijk, spécialiste en art asiatique, directeur de Christie’s Amsterdam
ÿ MARK ROTHKO, ORANGE, RED, YELLOW. Cette œuvre réalisée en 1961 avait été acquise en 1967
Mardi 13 novembre: Bijoux – ventes historiques Si les bijoux de provenances prestigieuses ou signés par des joailliers renommés réalisent le plus souvent des prix très importants, une plus large variété de bijoux reflète un marché en pleine santé. Par Bernadette De Bruijn, directeur et spécialiste en joaillerie, Christie’s Amsterdam
par le vendeur. Elle a changé de main en mai 2012 pour 86.900.000 $.
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CONFÉRENCES ART PUILAETCO DEWAAY
LE MOBILIER
ANCIEN
TEXTE © SIMON DE MONICAULT, DIRECTEUR DES VENTES DE MOBILIER, CHRISTIE’S PARIS - PHOTOS © CHRISTIE’S IMAGES LIMITED
La tendance est connue de tous : le marché du mobilier ancien n’est pas en pleine croissance, et on est là dans le doux euphémisme. Néanmoins, derrière cette tendance indiscutable, la réalité du marché est beaucoup plus contrastée.
DES DÉCENNIES D’EUPHORIE Avant d’analyser le marché actuel, replongeons-nous un instant dans l’évolution de ce dernier durant les cinquante dernières années. Durant ces décennies, il a été incroyablement porteur. Dans le monde entier on pouvait constater l’engouement des collectionneurs pour le mobilier et les objets d’art anciens. Les décorateurs, que ce soit à New York, à Ryad, à Buenos Aires ou à Paris, installaient des décors dans le goût français où les boiseries Louis XV formaient un écrin pour les acquisitions des amateurs. Le XVIIIe siècle était alors universel et triomphant. Tellement triomphant que même les institutions s’étaient mises à le collectionner, dans l’espoir d’engranger de substantielles plusvalues. A cet égard, l’exemple du British Rail Pension Fund est le plus marquant : dans les années 70, la caisse de retraite des chemins de fer britanniques diversifie ses actifs en achetant des œuvres d’art parmi lesquelles, naturellement, des chefs-d’œuvre du mobilier du XVIIIe siècle. La retraite du cheminot investie en commodes Louis XV, l’image fait presque sourire...
LES ARBRES NE MONTENT PAS JUSQU’AU CIEL Après ces décennies de croissance, la première guerre du Golfe (1990-1991) marque une véritable rupture. Mais les raisons du déclin sont beaucoup plus larges. En premier lieu, le goût change. Les usages et la façon de se loger évoluent considérablement. Un certain nombre de meubles ne correspondent plus vraiment aux usages actuels : à une grande armoire, on préfèrera souvent un dressing sur mesure, à des canapés anciens, on en préfère de plus modernes, plus confortables et plus solides. La disparition de trop nombreux métiers d’art – en particulier les restaurateurs – est à la fois une cause et une conséquence du ralentissement du marché : les amateurs sont de plus en plus réticents à engager de grandes dépenses de restauration et préfèrent des meubles « prêts à l’emploi » ne demandant pas des mois de travail.
Autre illustration de cet engouement sans borne : le projet quasi-loufoque d’un richissime collectionneur, qui achète en 1977 le paquebot France pour y exposer une collection de mobilier et d’objets d’art du XVIIIe siècle. Inutile de préciser que le projet sera vite interrompu … Les prix sont en constante augmentation, en raison notamment de la force de frappe financière considérable de nouveaux musées et de nouveaux mécènes. L’inflation du prix des meubles les plus rares est ainsi associée, non sans raison, aux sommes considérables dépensées par le J. Paul Getty Museum de Malibu qui étoffe ses collections.
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ÿ COLLECTION HUBERT DE GIVENCHY.
Lustre en argent de la Maison de Hanovre.
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ÿ LE GRAND SALON. Vente Yves Saint Laurent et Pierre Bergé. Parallèlement, de nombreux grands collectionneurs sont plus portés vers l’art contemporain que vers les arts décoratifs des siècles passés. Alors que des décennies durant, au XXe siècle, de nombreux milliardaires enrichissaient les musées par des donations de meubles du XVIIIe siècle (à l’exemple de Pierpont Morgan à New York, de Gulbenkian à Lisbonne ou de Camondo à Paris), les collectionneurs d’aujourd’hui se focalisent plus sur la création actuelle. UN MARCHÉ CONTRASTÉ Le marché est donc très différent de celui des décennies passées. Plus que d’un marché, il convient de constater la coexistence de plusieurs marchés. Si les meubles ont souvent chuté, du moins en euros courants, les objets se maintiennent, d’une manière générale, beaucoup mieux. Ces derniers sont en effet plus aisés à placer et plus faciles à associer à des intérieurs contemporains. La provenance des œuvres est un critère de plus en plus pris en compte par les amateurs. Le prix de deux œuvres comparables est donc susceptible d’être très différent si l’une est associée à une provenance prestigieuse. On sera en effet plus enclin à acheter un meuble ancien s’il a appartenu à Hubert de Givenchy ou à Karl Lagerfeld – pour ne citer que deux grands noms de la Haute Couture.
Alors que le mobilier courant est de plus en plus abordable, les pièces de collections atteignent quant à elles des prix de plus en plus vertigineux. Le marché des chefs-d’œuvre se développe et résiste particulièrement. En effet, un certain nombre de collectionneurs ou d’institutions sont à la recherche de pièces maîtresses. Et lorsque l’œuvre est effectivement majeure, les prix semblent sans limites, à l’exemple du Badminton Cabinet. Ce spectaculaire et somptueux meuble de près de quatre mètres de haut, réalisé dans les années 1720 pour le duc de Beaufort, est vendu une première fois en juillet 1990 pour plus de 10 millions d’euros. Et lorsqu’il repasse sur le marché en 2004, il dépasse les 27 millions euros … DES TENDANCES ENCOURAGEANTES Le marché du mobilier et des objets d’art anciens est très favorable aux acheteurs. Ceux qui font l’acquisition de pièces modestes en valeur peuvent trouver des pièces quasiment moins chères que les meubles neufs. Ceux qui font l’acquisition de pièces plus importantes ont la satisfaction de pouvoir acheter des œuvres rares, de qualité, dans des budgets raisonnables. Parallèlement, on assiste à un intérêt croissant pour le mobilier ancien de la part des pays émergents. Ce mobilier est en effet
associé à un véritable âge d’or en Europe en termes de créativité et de talent. Enfin, et il faut s’en réjouir, une nouvelle génération de collectionneurs apparaît. Ces derniers sont guidés par une certaine lassitude d’un goût un peu trop uniforme, un peu trop mondialisé. Ils souhaitent s’entourer de quelques pièces de qualité. Et plus que jamais, le marché déborde d’opportunités pour ces amateurs.
ALORS QUE LE MOBILIER COURANT EST DE PLUS EN PLUS ABORDABLE, LES PIÈCES DE COLLECTIONS ATTEIGNENT QUANT À ELLES DES PRIX DE PLUS EN PLUS VERTIGINEUX. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 75
LIFESTYLE | MÉTIER D’EXPERT
RENCONTRE AVEC HENRY BOUNAMEAUX, PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE BELGE DES EXPERTS EN ŒUVRES D’ART
ÉVALUER UNE
ŒUVRE D’ART INTERVIEW PAR PUILAETCO DEWAAY - PHOTOS © ROULARTA/REPORTERS
Henry Bounameaux est juriste et historien de l’art. En 1993, il a fondé un cabinet d’expertise actif principalement en matière d’évaluation et de conseil dans le domaine des tableaux de maîtres anciens et modernes, ainsi qu’en art contemporain. Depuis 2006, il assure, en temps que président, la direction de la Chambre Belge des Experts en Œuvres d’Art et, depuis 2010, celle de la Confédération Européenne des Experts d’Art. Il est l’auteur de nombreux articles sur le marché de l’art.
Comment définissez-vous la valeur d’une œuvre d’art ? Henry Bounameaux : « LA valeur d’une œuvre d’art n’existe pas. Il en existe au moins deux, voire quatre si l’on prend en considération la valeur sentimentale et la valeur artistique ! Mais je pense que votre question porte plutôt sur la valeur patrimoniale de l’œuvre d’art. Comme les marchés financiers, le marché de l’art connaît deux valeurs, deux cours: un cours acheteur, la valeur d’acquisition, et un cours vendeur, la valeur de réalisation (ou valeur vénale). Il est très important de ne pas les confondre, d’autant que ces valeurs sont utilisées dans des contextes différents. » L’ÉCART ENTRE LES VALEURS Commençons alors par la valeur d’acquisition… HB : « La valeur d’acquisition correspond au prix que l’on pourrait payer dans le commerce d’art pour une œuvre comparable. Il doit s’agir d’une valeur raisonnable et non d’un prix surfait ou, au contraire, qui confine à la bonne affaire. Il faut l’envisager comme une estimation et donc plus comme un ordre de grandeur, une indication, qu’une vérité avec un grand ‘V’. Cette valeur d’acquisition est très importante dans deux situations : l’achat et l’assurance. Lorsque l’on souhaite acquérir une œuvre, il faut savoir si le prix demandé est réaliste. En matière d’assurances, les contrats les plus complets proposent une
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indemnisation en valeur d’acquisition (ou valeur de remplacement). Ceci donne la possibilité, en cas de sinistre, d’acheter une œuvre ou un objet d’art comparable avec un budget qui le permet. »
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ÿ VENTE PUBLIQUE D’OBJETS D’ART. Il existe une différence entre la valeur de réalisation et la valeur d’acquisition. Et la valeur de réalisation ? HB : « On se situe ici dans le cas inverse. Il faut se demander ce que vaut réellement l’œuvre, autrement dit s’interroger sur le montant que l’on pourrait obtenir de sa vente, à nouveau dans des conditions normales de marché. En matière patrimoniale, il s’agit de la valeur la plus importante, puisqu’elle correspond à ce que vous possédez vraiment. C’est la raison pour laquelle on privilégie cette valeur en matière de partage, que ce soit lors d’une donation ou d’une succession. » L’écart entre ces deux valeurs est-il important ? HB : « Oui, et il peut être conséquent. La différence entre la valeur de réalisation et la valeur d’acquisition réside en effet dans la marge du marché de l’art et celle-ci n’est pas insignifiante. Je précise qu’il ne s’agit pas d’un jugement, mais d’une constatation et je
prends un exemple. Lorsque vous vendez une œuvre d’art aux enchères en Belgique, en tant que vendeur, vous acquittez une commission qui va de 10 à 15%. L’acheteur va, quant à lui, acquitter des frais d’achat de l’ordre de 20 à 24%, sans oublier dans certains cas un droit de suite de 4%. Si le marteau du crieur tombe à 10.000 EUR, le vendeur obtiendra entre 8.500 et 9.000 EUR et l’acheteur payera entre 12.000 et 12.800 EUR. Un écart qui peut aller de 30 à 43%. Je donne cet exemple parce qu’il est concret, mais je suis également conscient qu’il est théorique car il importe peu de payer 43% d’écart avec ce que reçoit le vendeur si l’on fait un bon achat. Par contre, si l’on se trompe… Aussi, lorsqu’on achète à un marchand une œuvre qu’il a lui-même acquise en vente publique, il faut encore, et c’est bien normal, compter sur une marge supplémentaire, ce qui accroît encore l’écart. »
ÿ HENRY BOUNAMEAUX Automne - Hiver 2012 | Analyses | 77
LA QUALITÉ FINIT TOUJOURS PAR PAYER, NON SEULEMENT FINANCIÈREMENT MAIS ÉGALEMENT D’UN POINT DE VUE ESTHÉTIQUE. ÿ EDWARD MUNCH, LE CRI. Il faut savoir interpréter les résultats de vente. Qu’entendez-vous par ‘se tromper’ ? HB : « Se tromper, c’est avant tout acheter ce que l’on va regretter. Je pense que la qualité finit toujours par payer, comme c’est le cas dans tous les domaines, et pas seulement financièrement, mais également d’un point de vue esthétique. On se lasse plus facilement des choses à la mode, et lorsqu’il s’agit de les revendre, c’est parfois difficile car, comme tout le monde veut la même chose au même moment, les amateurs ont tout bonnement disparu. Il m’arrive d’être confronté à des clients qui ont payé des œuvres très cher à la fin des années 1980 et qui sont, aujourd’hui, difficilement vendables au quart du prix… Je ne suis pas contre l’achat coup de cœur, mais seulement si l’acheteur est conscient qu’il peut y avoir un risque de perdre de l’argent. Aussi, en ce qui concerne les achats de placement, il faut être vigilant, car ceux-ci peuvent se révéler contre-productifs si l’on a été mal conseillé. »
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NI UN GOUROU, NI UN DEVIN En tant qu’expert, vous estimez-vous à même de déceler ce qui va prendre de la valeur ? HB : « Certainement pas, je ne suis ni un gourou, ni un devin ! Ce qu’un professionnel sérieux peut garantir, c’est que l’achat que vous comptez faire à un moment donné correspond à la valeur de l’œuvre à ce momentlà et que celle-ci est en bon état de conservation. » Comment l’expert s’y prend-il pour déterminer la valeur de réalisation d’une œuvre ? HB : « En comparant avec les prix obtenus par des œuvres comparables proposées récemment en vente publique. Les transactions privées restent par définition confidentielles, il faut donc chercher les informations là où elles sont disponibles, c’est-à-dire en vente aux enchères. Toutefois, j’insiste sur le fait que toute la difficulté réside dans
l’appréciation des éléments de comparaison. En effet, il faut savoir interpréter ces résultats de ventes avec le recul nécessaire, à la lumière de l’expérience, des connaissances et en toute objectivité. » Vers quel expert se tourner ? HB : « Le titre d’expert n’est pas protégé, ce qui signifie que n’importe qui peut le porter. Comment dès lors faire la distinction entre les professionnels compétents et les autres ? Bon nombre d’experts font partie d’une association qui garantit le respect de règles déontologiques. Ainsi, la Chambre Belge des Experts en Œuvres d’Art, association professionnelle reconnue par le Conseil d’Etat, possède un code de déontologie que son Conseil de direction est chargé de faire respecter. Grâce à cet organe, en cas de litige avec un expert membre de cette chambre, le consommateur peut avoir un recours autre que judiciaire et régler son problème à l’amiable, ce qui est un avantage.
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Doit-on s’adresser à des experts spécialisés? HB : « Au XXIe siècle, il est illusoire de prétendre être compétent en tout, depuis l’argenterie jusqu’aux tableaux, en passant par les tapis et la bibliophilie! Le domaine de la collection d’art étant de plus en plus sophistiqué, il est préférable d’avoir recours à des experts versés dans une spécialité, voire plusieurs spécialités, à condition qu’elles soient connexes. Dans certains cas, en matière d’authentification (et non d’évaluation), lorsque l’enjeu financier est important, il faudra même avoir recours à des experts qui ne sont compétents que pour un artiste en particulier. On fera alors appel aux connaissances du monde académique : les scientifiques des musées et les professeurs d’université sont des puits de science! N’oublions pas les grands marchands d’art qui ont acquis, au contact des objets qui passent entre leurs mains, la connaissance et l’expertise dans leur domaine. » En conclusion… HB : « Mieux vaut avoir recours à des experts ayant pignon sur rue et qui sont membres d’une association professionnelle reconnue. En outre, il convient de demander un devis qui récapitule les prestations que vous attendez de l’expert ainsi que le montant de ses honoraires. De cette façon, vous éviterez bien des déconvenues. »
MIEUX VAUT AVOIR RECOURS À DES EXPERTS AYANT PIGNON SUR RUE ET QUI SONT MEMBRES D’UNE ASSOCIATION PROFESSIONNELLE RECONNUE.
ÿ INVESTISSEMENT. En ce qui concerne les achats de placement, il faut être vigilant.
LA CHAMBRE DES EXPERTS La Chambre Belge des Experts en Œuvres d’Art est une union professionnelle fondée en 1963 et reconnue par décision du Conseil d’Etat depuis 1964. Son objectif social est la défense de la profession d’expert en œuvres d’art. À cet effet, elle est régie par un code de déontologie qui vise à assurer l’intégrité professionnelle et morale de ses membres. Près de 70 membres-experts y sont affiliés pour une trentaine de catégories. Chaque expert est limité à quatre spécialités connexes, tout au plus. La Chambre Belge des Experts en Œuvres d’Art est membre de la Confédération Européenne des Experts d’Art.
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ART | PORTRAIT
每 REMBRANDT BUGATTI
PORTRAIT | ART
REMBRANDT
BUGATTI LE PLUS ANVERSOIS DES SCULPTEURS ITALIENS TEXTE © VÉRONIQUE FROMANGER ET CHRISTINE MOSTERT - PHOTOS © CHRISTIE’S ET CONSERVATOIRE BUGATTI
En ce début du XXIe siècle, les grands collectionneurs veulent posséder un « Rembrandt Bugatti ». Comment l’œuvre de ce sculpteur unique a-t-elle été protégée pour répondre à l’exigence contemporaine de la collection ?
S
i le patronyme de Bugatti est le plus souvent associé aux luxueuses voitures de sport créées par Ettore Bugatti (1881 Milan – 1947 Neuilly-sur-Seine), la famille compte deux autres créateurs de génie : Carlo Bugatti (1856 Milan – 1940 Molsheim), le père, créateur de mobilier, et Rembrandt Bugatti (1884 Milan – 1916 Paris), le frère cadet, sans aucun doute le sculpteur animalier le plus important du XXe siècle. C’est en 1990, lors de la vente Alain Delon qui présenta 39 sculptures de Rembrandt Bugatti aux enchères, que le public l’a redécouvert. Aujourd’hui, ses œuvres sont recherchées par les grands collectionneurs et peuvent atteindre des prix très élevés. Les raisons de ce succès sont claires : le marché pour les œuvres de Bugatti est un marché sain et, par là même, la cote de l’artiste est restée préservée. Deux facteurs importants entrent en compte : d’une part, il n’y a pas eu de fontes posthumes autorisées par les ayants droit et, d’autre part, l’extraordinaire travail de recensement des bronzes de Bugatti, entamé par Véronique Fromanger il y a plus de vingt ans, est une référence ne permettant pas aux quelques surmoulages qui pourraient circuler de venir déforcer la confiance dans ce marché. Par ailleurs, si l’œuvre est assise à un niveau de prix important, c’est également parce qu’elle intéresse différentes catégories d’amateurs : les collectionneurs de sculptures, les collectionneurs d’Art Impressionniste, les collectionneurs d’Art Déco (ceux-ci préférant les sujets emblématiques de la période comme les félins et les éléphants) et les collectionneurs d’art animalier.
Véronique Fromanger, expert attitré de l’œuvre de Rembrandt Bugatti et auteur du Répertoire monographique de l’artiste, revient sur la période anversoise du sculpteur, sur le rôle de son éditeur A.A. Hébrard et sur la position de la famille Bugatti face à cet héritage artistique. REMBRANDT BUGATTI À ANVERS Vers 1906, à l’invitation de la Société Royale de Zoologie d’Anvers, le tout jeune sculpteur Rembrandt Bugatti part en Belgique. Il a déjà signé un contrat d’exclusivité avec l’éditeur et galeriste parisien A.A. Hébrard, qui avait exposé en 1904 trente modèles en plâtre – des personnages et des animaux. Encouragé par son succès, Bugatti va intensifier son rythme de création, lui consacrer toute son énergie et poursuivre sans relâche la quête de ses modèles pour créer son œuvre. Pour ce faire, il va vivre entre la France et la Belgique, tel un oiseau migrateur.
ÿ ÉLÉPHANT BLANC D’ASIE MENDIANT. LUXX | 81 19 Automne - Hiver 2012 | Analyses
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Le jardin zoologique d’Anvers est considéré au début du XXe siècle comme le plus important du monde. C’est une oasis de verdure au milieu de la ville, à coté de l’imposante Gare Centrale, symbole d’évolution et de modernisme. Les animaux sauvages sont dans des enclos ou en semi-liberté. Il n’y a plus de cage comme au Jardin des Plantes à Paris. Bugatti entretiendra des rapports d’amitié avec le directeur du zoo, Michel L’Hoest, qui lui facilitera son installation. Il peut circuler librement dans le Jardin et modeler en plein air comme il l’entend.
ÿ REMBRANDT BUGATTI ET SON FRÈRE ETTORE.
Bugatti poursuit le cycle des grands fauves, passe de l’ours à l’éléphant, du rhinocéros à l’hippopotame, du buffle à la girafe, et s’intéresse à d’autres espèces d’animaux : des antilopes, un zèbre, un grand fourmilier, un singe cynocéphale, des yacks, des lamas, des tapirs, une autruche, des casoars... Il possède une vision synthétique des volumes qui lui permet, tout en schématisant chaque animal en masses géométriques, de donner la sensation de la peau, du plumage ou du pelage. Il a su faire coexister l’abstraction et la figuration, à travers les lignes et les volumes. En dix ans d’une fulgurante production, Bugatti a parcouru l’expressionnisme des fauves, la synthèse des formes et le dynamisme futu-
riste. Le Singe Cynocéphale ou Babouin sacré Hamadryas en est la parfaite illustration. Cette nouvelle manière de traiter les lignes et les masses, en équilibre de relations, en rapports de géométrie et de sensibilité, tout en poursuivant ses recherches sur les matières, Bugatti va l’appliquer à tous ses modèles réalisés à Anvers. SON MARCHAND : A.A. HÉBRARD Le plus grand talent d’Adrien-Aurélien Hébrard est de nous avoir révélé l’œuvre de Rembrandt Bugatti, de l’avoir pérennisée en l’éditant en bronze ou en argent, puis d’avoir osé imposer un sculpteur animalier en tant que tel. Chaque année, l’éditeur, fondeur-artiste et galeriste Hébrard expose les nouvelles œuvres de Bugatti dans sa galerie parisienne. Il présente également des rétrospectives du sculpteur dans les Salons officiels de Paris, Venise, Milan, Bruxelles, Berlin, Anvers et New York. C’est Hébrard qui assume tous les risques de sa promotion. Cette « entreprise » de mettre Bugatti sur orbite dans le monde de l’art ambitionne, en d’autres mots, de placer le jeune artiste italien, inconnu en 1904, sur la plus haute marche de l’échelle des valeurs internationales tant artistiques que commerciales.
QUELQUES RÉFÉRENCES DE PRIX DE VENTE
LES ŒUVRES DE BUGATTI SONT RECHERCHÉES PAR LES GRANDS COLLECTIONNEURS ET PEUVENT ATTEINDRE DES PRIX TRÈS ÉLEVÉS. 82 | Analyses | Automne - Hiver 2012
• « La Panthère à l’affût », réalisée entre 1913 et 1914, estimée à 300.000 - 350.000 euros et vendue le 23 novembre 2011 par Christie’s Paris pour 1.005.800 euros. • « Le Grand Élan », réalisée aussi entre 1913 et 1914, estimée à 750.000 - 1.000.000 USD et vendue le 2 novembre 2010 par Sotheby’s New York pour 1.202.500 USD. • « Le Chimpanzé assis sur une boule », réalisée entre 1913 et 1914, estimée à 300.000 500.000 USD et vendue le 16/5/2010 par Sotheby’s New York pour 512.500 USD.
ÿ LA PANTHÈRE À L’AFFÛT.
ÿ LE GRAND ÉLAN.
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On peut dire qu’Hébrard a joué un rôle déterminant en imposant pour la toute première fois une éthique de reproduction et de diffusion. Dans la volonté de respecter tout à la fois son artiste et ses collectionneurs, il a fait le choix de la contrainte et de la rigueur : chaque modèle en plâtre réalisé par Bugatti est édité en bronze (ou en argent) par Hébrard à un nombre d’exemplaires limité, et chaque exemplaire est réalisé par le procédé technique de la cire perdue : « la cire perdue permet de tout fondre d’un seul jet, quelle que soit la complexité du sujet, jamais de coupes et point de montures. Et puis ce procédé respecte absolument l’œuvre de l’artiste (…) : il respecte si bien le modelé qu’on retrouve sur le bronze l’empreinte des doigts du sculpteur. » (Source : D’après Louis Vauxcelles, «La fonte à cire perdue», Art et Décoration, deuxième semestre 1910) Le travail d’excellence du fondeur Albino Palazzolo, chef d’atelier chez Hébrard, permet à Bugatti d’avoir une liberté de mouvement exemplaire. Il n’est pas dans l’obligation de contrôler ni les cires, ni les ciselures. Chaque fonte est signée, numérotée ou marquée « pièce unique » et porte le cachet de l’édition du fondeur (Cire Perdue A.A. Hébrard). Grâce à cette technique, chaque bronze réalisé pour un même modèle est identifiable par son propre alliage, sa propre patine, ses propres marques de fonte et son propre poids. L’HÉRITAGE, LA PÉRÉNITÉ DE L’ŒUVRE Pour commémorer la date à laquelle Rembrandt Bugatti a mis fin à ses jours volontairement, le 8 janvier 1916, Ettore a choisi comme dernière œuvre le Tigre piétinant un serpent, un symbole unique à double titre : en 1914, après la transformation du zoo d’Anvers en hôpital de guerre et la mise à mort des tigres, en signe d’adieu, Rembrandt Bugatti avait repris en sculpture le thème développé en mosaïque sur le pilier d’entrée du zoo, un tigre en lutte avec un serpent venimeux, le symbole de la lutte contre le mensonge. En 1919, la fonderie Hébrard sera la seule autorisée à poursuivre les fontes en bronze des modèles dont elle a acquis les droits de reproduction en exclusivité dès 1904. En 1926, l’usine Bugatti de Molsheim connaît enfin la gloire et la fortune. Ettore et son fils Jean tiennent à ce que Rembrandt participe, à titre posthume, à la création de la plus belle voiture du monde. Ils vont utiliser le modèle du Petit Éléphant dressé de 1904 pour créer le bouchon
L’ÉDITION OPPOSÉE À L’ŒUVRE UNIQUE À la fin du XIXe siècle, le bronze d’édition est considéré comme un progrès, une démocratisation de l’art rendu populaire par les Salons. Sa réalisation d’une qualité irréprochable lui confère le statut d’œuvre d’art. A cette époque, ce statut même se définit, pour le plus grand nombre, par des concepts de beau, de laid, de sens de l’œuvre et de perfection technique. Cette multiplication de « l’unique », rendue possible grâce aux prouesses techniques de l’industrie d’art, va connaître un revers au XXe siècle. La notion de l’œuvre d’art et de sa reproductibilité est théorisée et le multiple condamné au profit de l’œuvre unique. C’est par l’utilisation de la technique à la cire perdue que des fondeurs comme A.A. Hébrard, Valsuani ou Susse ont trouvé une alternative à cette mésalliance en introduisant la notion de série limitée, numérotée et signée. De cette manière, chaque pièce, reproduite à partir d’un original, retrouve son individualité, son rang d’œuvre d’art. Les questions autour du multiple, de l’original et de l’unique embrasent toujours les discussions des collectionneurs, amateurs, théoriciens et experts en art, et sont un terrain d’expérimentation pour les artistes. Ces notions sont également abordées et légiférées sous l’angle légal et fiscal.
de radiateur de la somptueuse Bugatti Royale. Pour faire vivre l’œuvre de son frère, Ettore Bugatti va reprendre le flambeau et amplifier sa collection, qui deviendra au fil des années la plus importante au monde avant d’être dispersée (à partir de 1970) en ventes publiques ou à l’amiable par ses héritiers, Lidia Bugatti de Boigne, Ebé Bugatti et Roland Bugatti, après les expositions rétrospectives de 1955 et 1965 organisées par la Société Royale de Zoologie d’Anvers et par la Galerie Samy Chalom à Paris. Ebé Bugatti, la fille ainée d’Ettore, qui a hérité des plâtres,
va en conserver la plupart sans jamais faire aucune fonte posthume ni reproduction, ni surmoulage. Elle fera sa première donation aux musées nationaux français en 1975 et son héritier et filleul Jean-Marie Desbordes fera le don exceptionnel de sa collection de quatre-vingt plâtres en 1981. Véronique Fromanger, Expert Auteur du livre « Rembrandt Bugatti Sculpteur, Répertoire monographique » paru aux Editions de l’Amateur en 2010
ÿ BUGATTI au plus près des animaux. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 83
ART | EXPOSITION
UNE RÉTROSPECTIVE EN DIALOGUE AVEC MARLENE DUMAS ET THIERRY DE CORDIER
CONSTANT PERMEKE AU PALAIS DES BEAUX-ARTS TEXTE © WILLY VAN DEN BUSSCHE ET PUILAETCO DEWAAY - PHOTOS © SABAM BELGIUM 2012
La présence de Permeke cet automne au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles n’est pas anodine. Willy Van den Bussche, commissaire de l’exposition et spécialiste de Permeke, revient sur le lien étroit entre l’artiste et l’institution et tente une lecture renouvelée de son œuvre, en regard avec les œuvres de Marlene Dumas et de Thierry De Cordier.
O
rganiser, soixante ans après le décès de Constant Permeke, une rétrospective de son œuvre au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, c’est se replonger dans une époque où, de son vivant, il y tenait une exposition presque chaque année. Permeke y connut sa première grande rétrospective – qui fut aussi d’emblée la plus grande – en 1930. Le PBA avait été inauguré en 1928 avec une exposition d’art belge. L’année suivante, l’œuvre de James Ensor y fut mise à l’honneur et, après Ensor, ce fut au tour de Permeke. La notoriété de l’artiste n’était pas pour plaire à tout le monde. Un certain mécontentement se fit même sentir ici et là lorsque les critiques d’art Luc et Paul Haesaerts lui décernèrent le titre de «Dieu le Père» dans la «Sainte Trinité»: Permeke, Gust De Smet et Frits Van den Berghe. Dans la nouvelle revue Les BeauxArts, les frères Haesaerts octroyaient à ce groupe d’artistes le nom d’«expressionnistes flamands». Charles Leirens, alors directeur du PBA, surprit pratiquement tout le monde, y compris Permeke, en présentant un nombre impressionnant d’œuvres (plus de 550) lors de cette première rétrospective. L’exposition et les propos quelque peu exaltés des critiques d’art déclenchèrent une vive animosité. Deux camps se formèrent. Les opposants lancèrent même une campagne de calomnies dans l’hebdomadaire Pourquoi Pas?, qui publia en couverture une caricature du peintre soustitrée «Permeke, le Dieu le Père de la peinture expressionniste flamande». Il va sans dire que
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cette exposition fut un événement retentissant, notamment pour Permeke lui-même. Certaines des nombreuses expositions que le PBA consacra par la suite à l’artiste ont joué un rôle particulier dans sa carrière. Lorsqu’il présenta un grand nombre de paysages en 1936, les critiques se mirent à pleuvoir. Même ses plus fervents défenseurs lui reprochèrent d’avoir emprunté la voie du «retour à l’humain» et d’avoir abandonné son langage plastique résolument expressif. Permeke était très sensible aux critiques de la presse. Il réagit d’une manière qui lui était bien propre: il se plongea dans le dessin de nus et s’essaya en grand secret à une discipline nouvelle pour lui, la sculpture. La matière rétive de l’argile le mettait au défi. La terre, qu’il avait peinte dans tant de tableaux, devenait désormais son matériau d’expression. L’année suivante, une première présentation des sculptures – tant des petits formats que des pièces monumentales – et des dessins de nus eut lieu au PBA.
LA NOTORIÉTÉ DE L’ARTISTE N’ÉTAIT PAS POUR PLAIRE À TOUT LE MONDE.
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ÿ FAMILLE DE PAYSANS AU CHAT. À partir de là, Permeke se consacra presque exclusivement à la sculpture et au dessin. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ce furent même ses seules activités, ce qui lui permit de présenter un ensemble autonome dès 1944 au PBA. Le fait d’avoir été frappé de censure par l’occupant allemand, qui considérait son art comme de l’Entartete Kunst (art dégénéré), ne
l’avait pas arrêté. L’événement au PBA provoqua la consternation et, après l’exposition, les Allemands firent fermer le bâtiment. En 1947, le PBA organisa à nouveau une grande rétrospective à l’occasion du soixantième anniversaire de l’artiste. Cette exposition fut ensuite accueillie au Stedelijk Museum
d’Amsterdam, puis au Musée national d’Art moderne de Paris. Le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles fut incontestablement le lieu par excellence où Permeke put se manifester. Voilà pourquoi il semblait évident que le soixantième anniversaire de son décès soit commémoré à travers une puissante rétrospective dans ce même lieu. Automne - Hiver 2012 | Analyses | 85
ART | EXPOSITION
ÿ PORT DE PÊCHE EN BRETAGNE «Pour la mise en place de cette exposition, j’ai trouvé intéressant de mettre en lumière des aspects de son œuvre et de sa personnalité, au lieu de suivre d’emblée une ligne purement chronologique. Je me suis en outre efforcé de relier tant picturalement qu’émotionnellement les divers thèmes que sont la mer, la terre et l’engagement humain. En encadrant son œuvre avec celles de deux artistes contemporains de réputation internationale – Marlene Dumas et Thierry De Cordier –, je veux surtout attirer l’attention sur la continuité de cet engagement pictural et de cet investissement émotionnel. Ces deux artistes transcendent, tout comme Permeke, la reproduction de la réalité d’une manière personnelle. L’ancrage durable dans la réalité acquiert une présence encore plus grande
INFORMATIONS PRATIQUES La rétrospective «Constant Permeke» se tiendra du 11 octobre 2012 au 20 janvier 2013 au Palais des BeauxArts de Bruxelles. L’exposition est accessible du mardi au dimanche, de 10 heures à 18 heures, et le jeudi jusqu’à 21 heures. www.bozar.be.
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ÿ FEMME DE PÊCHEUR sous l’effet de la forte matérialité. Chez les deux artistes, la relativité des choses est rendue de manière suggestive et certainement pas narrative. L’œuvre de Dumas résulte de l’arrogance de l’expressionnisme. L’œuvre de De Cordier est plutôt née d’une retenue élémentaire. À l’instar de Permeke, ils sont tous deux non conformistes, mais fortement impliqués émotionnellement dans leurs sujets. De Dumas, l’exposition montre des dessins de nus, de De Cordier des paysages. À travers cet ensemble passionnant de similitudes et de controverses, je veux souligner l’actualité de l’œuvre de Permeke et son importance durable.» Extraits du catalogue de l’exposition, rédigé par Willy Van den Bussche (publication Fonds Mercator en coédition avec BOZAR - Palais des Beaux-Arts, Bruxelles) MARLENE DUMAS: DES NUS EXPRESSIFS Marlene Dumas vient de remporter le prix Johannes Vermeer 2012. Son talent et sa capacité sans égal à mettre en images les émotions humaines a conquis le jury néerlandais. L’œuvre de l’artiste sud-africaine installée aux Pays-Bas est présente dans de nombreux musées, parmi lesquels le Centre Georges Pompidou à Paris, le MoMA à New York, le Stedelijk Museum à
Amsterdam et la Tate Modern à Londres. Des expositions d’envergure lui ont également déjà été consacrées à Anvers, New York, Tokyo et Los Angeles. Elle est une des artistes phares de notre époque. THIERRY DE CORDIER: LA FORCE PRIMITIVE À la fois peintre et dessinateur, sculpteur et bâtisseur de grandes installations, Thierry De Cordier n’hésite pas à soulever des questions d’ordre social, idéologique et religieux. Pour cette rétrospective, iI expose des peintures spécialement réalisées pour l’occasion. Il est également retourné à l’essence même des choses, à la force primitive. Avec ses paysages poignants et ses nuances sombres et lumineuses soigneusement choisies, il suscite l’émotion, tout comme Permeke.
« LE DIEU LE PÈRE DE LA PEINTURE EXPRESSIONNISTE FLAMANDE»
EXPOSITION | ART
ÿ THIERRY DE CORDIER, SPINACHE. WILLY VAN DEN BUSSCHE
UN COMMISSAIRE DE CARACTÈRE Willy Van den Bussche a donné un port d’attache à l’art moderne belge. Il est à l’initiative du Musée Permeke à Jabbeke (PMCP) et du Musée d’Art Moderne sur mer à Ostende (PMMK), pour lesquels il a occupé le poste de conservateur en chef. Avec plus de deux cents expositions à son actif, Willy Van den Bussche peut se targuer d’un palmarès impressionnant, comptant entre autres la «Triennale d’art contemporain en Belgique», «De Dada à nos jours» ou «D’Ensor à Delvaux».Il est également le fondateur de «Beaufort», la Triennale d’art contemporain sur mer. Avec le dynamisme et la foi qui le caractérisent, il a su donner à Permeke une place sur la scène mondiale en faisant découvrir son œuvre lors de rétrospectives qu’il a organisées de Madrid à Shanghai, en passant par Vienne et Oslo. Il est l’auteur d’une vaste monographie de l’artiste et a collaboré au film Permeke des cinéastes belges Henri Storck et Patrick Conrad. «Selon moi, Permeke est l’artiste du vingtième siècle qui fait le plus preuve de caractère. Depuis ma jeunesse, je suis passionné par le personnage et par son œuvre. Si je n’avais pas été aussi déterminé que lui dans mon travail, le musée Permeke et le Musée d’Art moderne sur mer n’existeraient pas aujourd’hui. Sur ce point, lui et moi avons quelque chose en commun...»
ÿ MARLENE DUMAS, SNOW FLAKE.
À L’INSTAR DE PERMEKE, MARLENE DUMAS ET THIERRY DE CORDIER SONT TOUS DEUX NON CONFORMISTES, MAIS FORTEMENT IMPLIQUÉS ÉMOTIONNELLEMENT DANS LEURS SUJETS.
L’ENGAGEMENT DE PUILAETCO DEWAAY
LA CULTURE ACCESSIBLE À TOUS Puilaetco Dewaay partage l’engagement de BOZAR à rendre la culture accessible à tous. Comme BOZAR, la banque considère l’art comme un moyen idéal pour créer des ponts entre les cultures et les individus. C’est dans cette optique que Puilaetco Dewaay, sensible à l’importance de sa responsabilité sociale en matière de culture et d’art, soutient le Palais des Beaux-Arts en tant que BOZAR Patron et sponsor principal de l’exposition Constant Permeke.
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CULTURE | AGENDA
AGENDA
LE PROGRAMME CULTUREL ET ÉVÉNEMENTIEL TEXTE © CHRISTINE MOSTERT
BELGIQUE
BRUXELLES Jordaens et l’Antiquité Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, jusqu’au 27 janvier Après Rubens, c’est à Jacob Jordaens d’être mis à l’honneur par les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique. Plus de 80 tableaux, dessins, tapisseries et sculptures provenant de musées prestigieux et de collections privées feront découvrir le moins connu des trois grands peintres baroques flamands. www.fine-arts-museum.be La Princesse Marie-José, entre Belgique et Italie. Une garde-robe royale Musées royaux d’Art et d’Histoire, jusqu’au 3 mars La fille du roi Albert 1er et de la reine Elisabeth épouse en 1930 l’héritier du trône d’Italie. Le paraître fait partie de la stratégie politique de l’époque et Marie-José est dotée de robes et manteaux de cour somptueux qui contribuent à faire d’elle une des femmes les plus élégantes de son temps. L’exposition est aussi documentée d’archives qui permettent de mieux comprendre la complexité de cette période entre faste de cour et montée du fascisme. www.kmkg-mrah.be Constant Permeke. Rétrospective Palais des Beaux-Arts, jusqu’au 20 janvier Voir notre article page 84 www.bozar.be Jules Wabbes. Furniture designer Palais des Beaux-Arts, du 17 octobre au 13 janvier Pour la première fois, un aperçu complet du travail de ce grand créateur belge de mobilier est montré au grand public. L’accent est mis sur les pièces uniques, les prototypes et les meubles qu’il a créés pour le Foncolin. www.bozar.be
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Antoine Watteau. La leçon de musique Palais des Beaux-Arts, du 8 février au 12 mai Ce grand peintre français du début du XVIIIe siècle a souvent introduit des scènes musicales dans ses tableaux. Une œuvre délicate que l’on peut aussi redécouvrir en musique avec les concerts associés à l’exposition. www.bozar.be Art belge. Un siècle moderne. Collection Caroline et Maurice Verbaet Musée d’Ixelles, jusqu’au 20 janvier Un regard original et atypique est posé sur l’art belge du XXe siècle, à travers une sélection d’œuvres de la collection de Caroline et Maurice Verbaet. www.museeixelles.irisnet.be Pascal Bernier. A pop nightmare Le Botanique, jusqu’au 18 novembre L’artiste belge dresse avec une légèreté feinte et beaucoup d’humour les rapports ambigus que nous entretenons avec le monde qui nous entoure. Le Botanique présente des œuvres faites spécialement pour l’exposition ainsi que des pièces récentes et plus anciennes. www.botanique.be
d’Anvers organise un hommage au peintre en réunissant autour de sa figure quelque septante œuvres d’amis et de contemporains, tous pionniers de l’expressionisme. www.kmska.be L’âme du maître. Esquisses anversoises de Rubens à Panamarenko Musée Plantin-Moretus, jusqu’au 16 décembre Pour cette exposition, le musée a impliqué son public en demandant à des spécialistes, des amateurs, des riverains, des jeunes et des artistes de choisir cent esquisses parmi la collection du Prentenkabinet. www.museumplantinmoretus.be Weegee. Murder is my Business Musée de la photographie d’Anvers, du 19 octobre au 27 janvier Dans le New York des années 30, le photographe américain Weegee photographie les scènes de crime qu’il vend aux tabloïds. Avec ses prises de vue instantanées et résolument dramatiques, il met en place les fondements de la presse à sensation. www.fotomuseum.be
ANVERS Madame Grès. Mode sculpturale Musée de la mode, jusqu’au 10 février Après quelques mois de fermeture, le musée de la mode d’Anvers ouvre à nouveau ses portes en accueillant la couturière parisienne. La rétrospective des 50 ans de créations de Madame Grès, conçue par le musée Galliera, a été repensée dans une scénographie orchestrée par le plasticien belge Renato Nicolodi. www.momu.be
GAND 3X collection Musée des Beaux-Arts de Gand, jusqu’au 16 décembre Trois expositions sous forme de dossiers mettent en valeur les collections du musée : Abraham Grapheus, modèle des peintres, L’ensemble de Théo Van Rysselberghe et L’art de la donation. Cette dernière met l’accent sur l’importance des dons et des legs dans la constitution de la collection du musée. www.mskgent.be
Les modernes. Permeke & ses amis Musée royal des Beaux-Arts d’Anvers, jusqu’au 25 février A l’occasion du soixantième anniversaire de la mort de Constant Permeke, le musée
HORNU S.F. (Art, science & fiction) Mac’s, du 18 novembre au 17 février Exploration des liens entre l’art et la sciencefiction à travers des œuvres de Larry Bell,
ÿ PASCAL BERNIER, Struggle for afterlife, 2008 © Pascal Bernier et Sabam
ÿ RAPHAËL, Portrait de Bindo Altoviti, vers 1516-1518.
ÿ TOBIAS VERHAECHT, La Tour de Babel
© Musée Royal des Beaux-Arts Anvers, Lukas - Art in Flanders
© Image courtesy of the National Gallery of Art, Washington
Jacques Charlier, Lucio Fontana, Anish Kapoor, Mike Kelley, Casimir Malevitch, Chris Marker, Gavin Turk… www.mac-s.be OSTENDE Victor Servranckx Mu.ZEE, du 15 septembre au 6 janvier L’œuvre des années 20 de l’artiste fondateur de 7 Arts est montrée sous son jour le plus géométrico-abstrait. www.muzee.be
FRANCE
PARIS Edward Hopper Grand Palais, jusqu’au 28 janvier Hopper est un peintre personnel, inclassable. Son œuvre est riche et complexe et ne se donne pas à l’évidence trompeuse de la première lecture. www.grandpalais.fr Bohèmes Grand Palais, jusqu’au 14 janvier Pour les peintres, la figure du bohémien incarne la liberté, le symbole de l’artiste incompris et solitaire. L’exposition met en lumière, à travers un parcours de deux cents œuvres, la profonde transformation du statut de l’artiste à partir du milieu du XIXe siècle. www.grandpalais.fr Raphaël, les dernières années Musée du Louvre, jusqu’au 14 janvier En partenariat avec le Prado, le Louvre a réuni des tableaux réalisés durant les sept dernières années de la vie du génie d’Urbino. Raphaël a alors atteint la maturité de son art et incarne la Renaissance à son sommet. www.louvre.fr Dali Centre Pompidou, du 21 novembre au 25 mars
Il est un des peintres les plus controversés et les plus populaires du XXe siècle. Il y a plus de trente ans, l’exposition Dali organisée par le Centre Pompidou avait accueilli 850.000 visiteurs. Cette exposition est attendue comme l’événement de cette fin d’année. www.centrepompidou.fr
LILLE Babel Palais des Beaux-Arts, jusqu’au 14 janvier Le thème de la tour de Babel chez les artistes contemporains est utilisé comme autant de visions renouvelées de celles des maîtres anciens. www.pba-lille.fr
Van Cleef and Arpels Musée des arts décoratifs, jusqu’au 10 février Depuis 1906, la maison de joaillerie manie créativité, audace et savoir-faire. 400 bijoux prestigieux sont montrés à la lumière d’archives et de dessins. www.lesartsdecoratifs.fr
Fables du paysage flamand au XVIe siècle Palais des Beaux-Arts, jusqu’au 27 janvier Dans les chefs-d’œuvre de Bosch, Breughel, Bles, Bril… la nature est le lieu de tous les mythes et le fantastique se mêle aux scènes de la vie ordinaire. Une exposition à voir avec Babel. www.pba-lille.fr
Canaletto – Guardi Musée Jacquemart-André, jusqu’au 14 janvier Les deux peintres de paysages urbains vénitiens sont confrontés dans un face-à-face révélant leur sensibilité et leur personnalité propres. www.musee-jacquemart-andre.com Canaletto à Venise Musée Maillol, jusqu’au 10 février L’exposition dévoile quelques secrets de fabrication des chefs-d’œuvre de Canaletto grâce à la présentation de son cahier de dessins et à la reconstitution de la chambre optique qui lui permettait de dessiner des perspectives parfaites. www.museemaillol.com Chaïm Soutine (1893-1943). L’ordre du chaos Musée de l’Orangerie, jusqu’au 21 janvier L’artiste russe de la première école de Paris incarne le mythe du peintre maudit. Sa peinture est crue et puissante et son influence sur les peintres de la fin du XXe siècle est importante. Cette grande rétrospective s’articule autour des vingt-deux tableaux de la donation Paul Guillaume. www.musee-orangerie.fr
LENS Musée du Louvre-Lens A partir du 4 décembre Le grand projet de décentralisation des musées nationaux se concrétise. Après PompidouMetz, c’est au tour du Louvre de s’installer en région. Le musée universel ouvre à Lens le 4 décembre avec une exposition faisant dialoguer 250 pièces de différentes civilisations, de l’Egypte des pharaons au XIXe siècle. www.louvrelens.fr METZ Sol LeWitt. Dessins muraux de 1968 à 2007 Centre Pompidou-Metz, jusqu’au 9 janvier Cette rétrospective de grande envergure dédiée aux wall drawings noirs et blancs nous plonge dans l’univers sensible de l’artiste conceptuel. www.centrepompidou-metz.fr ROUBAIX Marc Chagall. L’épaisseur des rêves La Piscine - Musée d’Art et d’Industrie André Diligent, jusqu’au 13 janvier Deux cents œuvres de Chagall, comprenant des sculptures, de la céramique, des costumes de ballet, des rideaux de théâtre, Automne - Hiver 2012 | Analyses | 89
CULTURE | AGENDA
SALONS D’ART OCTOBRE - AVRIL FIAC Paris, Grand Palais, du 18 au 21 octobre www.fiac.com
ÿ WEEGEE, Anthony Esposito, Accused “Cop Killer”
ÿ Exposition Edward Hopper
© Weegee / International Center of Photography
mettent l’accent sur une production moins connue de son œuvre. www.roubaix-lapiscine.com
SUISSE
BÂLE Edgard Degas Fondation Beyeler, jusqu’au 27 janvier Bien qu’il soit considéré comme un des précurseurs de l’art moderne, les expositions consacrées à Degas sont rares. La Fondation Beyeler a rassemblé des œuvres provenant de collections publiques et privées, sur les thèmes des danseuses, des nus, des cavaliers et des paysages. www.fondationbeyeler.ch Tinguely@Tinguely Musée Jean Tinguely, du 7 novembre au 3 février Rétrospective à l’occasion de la nouvelle présentation de l’œuvre de Jean Tinguely dans son musée monographique. Nouveau regard et nouvelle perspective sur son travail. www.tinguely.ch
ALLEMAGNE
COLOGNE David Hockney. A bigger picture Museum Ludwig, du 27 octobre au 3 février Depuis son retour en Angleterre, le paysage est au centre de la création artistique de David Hockney. Il donne à ce thème classique une impulsion nouvelle, avec un raffinement tout britannique. www.museum-ludwig.de
AUTRICHE
VIENNE Sous le signe des chefs-d’oeuvre : 150 ans, Gustav Klimt Belvédère, jusqu’au 6 janvier
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Le musée du Belvédère possède la plus grande collection de tableaux de Klimt parmi lesquels « Le Baiser ». Cette année, Vienne commémore les 150 ans de la naissance de cet artiste qui n’a pas fini de fasciner le monde. www.belvedere.at
ESPAGNE
BILBAO Claes Oldenburg. Les années soixante Musée Guggenheim, du 30 octobre au 17 février La plus vaste manifestation jamais consacrée au travail des années soixante d’un des pères du Pop Art. www.guggenheim-bilbao.es
GRANDEBRETAGNE
LONDRES Pre-Raphaelites. Victorian avant-garde Tate Modern, jusqu’au 13 janvier En rébellion contre la société victorienne, les préraphaélites vont révolutionner l’art et la vision de leur temps. Ils sont le premier mouvement artistique moderne britannique. www.tate.org.uk
USA
NEW YORK Regarding Warhol : Sixty Artists, Fifty Years Metropolitan museum of Art, jusqu’au 31 décembre Warhol a eu une influence très importante sur les artistes qui l’ont suivi. Le Met explore la nature et l’étendue de cette influence à travers 60 artistes et leur production. www.metmuseum.org
PARISTABLEAU. Le salon international de la peinture ancienne Paris, Palais de la Bourse, du 7 au 12 novembre www.paristableau.com Paris Photo Paris, Grand Palais, du 15 au 18 novembre www.parisphoto.fr Art Basel Miami Beach Miami Beach, Florida, USA du 6 au 9 décembre www.artbaselmiamibeach.com BRAFA Bruxelles, Tour & Taxis, du 19 au 27 janvier www.brafa.be The Armory Show New York, du 7 au 9 mars www.thearmoryshow.com TEFAF Maastricht, du 15 au 24 mars www.tefaf.com Eurantica Brussels Bruxelles, du 14 mars au 24 mars www.eurantica.be Salon du dessin Paris, Palais de la Bourse, du 11 au 14 avril www.salondudessin.com Art Paris Art Fair Paris, Grand Palais, du 28 mars au 1er avril www.artparis.fr Pavillon des Arts et du Design Paris, jardin des Tuileries, du 27 au 31 mars www.padparis.net Art cologne Cologne, Koelnmesse, du 19 au 22 avril www.artcologne.de Art brussels Brussels Expo, du 17 au 21 avril www.artbrussels.be