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Quête de paysages intérieurs

D’une enquête artistique de terrain dans le désert d’Atacama, Rafi Martin revient les valises pleines de témoignages et de quelques minéraux pour créer Resonancias, expérience sur la frontière, la résilience et nos liens à la matière.

T«rouver une météorite, c’est entrer en résonance. » Ces mots de la météoritologue chilienne Millarca Valenzuela ont suffi à Rafi Martin pour ouvrir en grand les portes de son espace intérieur, sensible et sensoriel, convoquer le besoin irrépressible de créer un corridor avec les mondes géologiques. Formé à la sociologie et l’anthropologie avant d’intégrer le département de marionnette contemporaine de la Haute École des Arts vivants de Stuttgart (HMDK), il mobilise ses outils d’enquête de terrain, éprouvés en immersion auprès d’éleveurs de rennes sibériens, pour partir un mois dans le désert chilien d’Atacama avec la metteuse en scène-marionnettiste Julika Mayer et le compositeur Fernando Munizaga. De rencontres en enregistrements de sons et explorations de ce milieu hostile, le trio ramène des matières sous de multiples formes, dont Rafi entend bien rendre compte dans une pièce – « à moins que cela ne finisse en installation à activer », rigole-t-il – nommée Resonancias Dans cette étendue aride, les moindres morceaux de sel que l’on trouve sous différents aspects sont porteurs d’une complexité historico-socialo-spirituelle. « La présence en masse de cuivre et lithium a conduit à l’explosion du paysage grignoté par des mines dont l’agencement d’extraction par des firmes étrangères est toujours porteuse de rapports post-coloniaux. Les taux de cancers y sont 175 fois supérieurs au reste du pays et autour des mines de salpêtre, on trouve encore de la vaisselle en porcelaine amenée par les colons anglais il y a 200 ans ! » S’y rencontrent également « la force profonde des météorites avec ce métal venu d’ailleurs qui les compose et diverses manières d’envisager la notion de frontière liée à la résilience incroyable des populations vivant dans ces lieux La communauté Lickanantai porte ainsi une vision altiplanique de l’espace, où les choses inanimées sont à comprendre comme les animées, car elles ont un esprit. » À l’instar de ceux lui ayant, là-bas, appris à lire les choses, il entend placer le public dans cette position de traverser un espace “muséal” sans savoir à quoi être attentif. Trouver le moyen de transmettre cette expérience intime de « résonance avec des gens en résonance avec des pierres », c’est aussi Vivre avec le trouble emprunté à Donna Haraway, cheminer avec le vivant et mobiliser la puissance des éléments. Ce changement de perspective avec nos habitudes cartésiennes se frotte au battement du temps minéral s’écrivant sur plusieurs millénaires, « offrant une belle leçon d’humilité », confie l’artiste. « Le désert est une entité dangereuse, à respecter. » Entre agencements de témoignages sonores et échos d’impressions, il est en quête de rivages encore manquants, lui ayant fait repousser la première du spectacle, prévue en mars.

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Étape de travail de Resonancias, au TJP grande scène (Strasbourg) vendredi 17 mars, entrée libre sur réservation reservation@tjp-strasbourg.com

À voir également, La Cérémonie du poids de Julika Mayer et Rafi Martin, au TJP grande scène (Strasbourg) vendredi 3 et samedi 4 mars tjp-strasbourg.com

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