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LE CERVEAU, UN ACTEUR RÉGULATEUR DE L’INFLAMMATION
Dans le noyau parabrachial du cerveau, les neurones marqués en rouge se projettent à travers tout le cerveau et contrôlent la libération de cortisone après la détection d’un signal inflammatoire dans le sang.
En centralisant de nombreux signaux d’alerte, une région du cerveau, le noyau parabrachial, modulerait la réponse anti-inflammatoire.
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En cas de blessure ou d’infection, les cellules immunitaires, présentes dans les tissus ou circulant dans l’organisme, s’activent et déclenchent, notamment, la réponse inflammatoire. Dans les premières étapes de ce processus, elles libèrent diverses molécules ou « médiateurs de l’inflammation », par exemple des cytokines, des histamines, etc. Le rôle de ces molécules est de recruter des cellules circulantes du système immunitaire, d’éliminer les agents pathogènes ou encore d’engager la réparation des tissus lésés. Dans cette cascade de mécanismes complexes, le cerveau n’est pas en reste. En détectant la présence de médiateurs de l’inflammation dans le sang, il induit une réponse nommée « état de maladie », qui consiste à réa ff ecter l’énergie au sein de l’organisme pour mieux lutter contre la perturbation. Cette réaction se traduit par des ajustements du métabolisme (fièvre, perte d’appétit, altération de la production d’hormones, etc.) ou du comportement (évitement social, sommeil, etc.).
La modulation du système immunitaire est réalisée notamment par la synthèse dans la glande surrénale de cortisone, une hormone produite sous le contrôle du noyau paraventriculaire de l’hypothalamus La libération de cette hormone est induite par différents signaux : psychologiques, sensoriels (liés à la douleur) ou immunitaires (avec les médiateurs de l’inflammation). En 1999, Andrew Turnbull et Catherine Rivier, de l’institut Salk , en Californie , avaient démontré que certaines cytokines médiatrices de l’inflammation déclenchaient une activation de l’hypothalamus conduisant à la production de cortisone dans la glande surrénale.
Certaines observations suggèrent que le cerveau a aussi une action régulatrice sur la réponse inflammatoire.
Cependant, l’activité du noyau paraventriculaire est connue pour être régulée par de nombreuses autres régions du cerveau Dès lors, il était possible que d’autres circuits établissent une connexion entre les signaux du système immunitaire et l’hypothalamus. En étudiant les interactions du cerveau et du système immunitaire chez la souris , les équipes de l’immunologiste Gérard Eberl et des neuroscientifiques Pierre -Marie Lledo et Gabriel Lepousez, de l’institut Pasteur, de l’Inserm et du CNRS , ont justement découvert un tel circuit par lequel le cerveau détecte l’inflammation et, en retour, contribue à réguler cette dernière
Pour l’identifier, les chercheurs ont d’abord administré différents médiateurs de l’inflammation à des souris Ils ont alors constaté une production de cortisone importante pour seulement certaines cytokines , notamment l’interleukine 1 bêta (IL-1β). Ils ont remarqué qu’une dose croissante d’IL -1 β n’augmentait pas la concentration de cortisone émise , mais prolongeait sa réponse dans la durée
Les scientifiques de l’institut Pasteur ont constaté que cette interleukine active dans un premier temps des neurones d’une région du tronc cérébral ( situé sous le cerveau et directement relié à la moelle épinière ), le complexe vagal Après cette première étape, les informations sont transmises du complexe vagal vers une autre région du tronc cérébral, le noyau parabrachial Cette zone est connue pour traiter divers signaux provenant d’autres régions du cerveau, en lien avec la douleur et certaines mémoires aversives ou traumatiques De là , les signaux de l’inflammation conduisent à l’activation de neurones de l’hypothalamus, qui se traduit par une production et libération de cortisone dans le sang. Cette hormone réduit alors le développement de cellules immunitaires dans la moelle osseuse et le thymus, afin d’éviter un emballement immunitaire qui pourrait être fatal , comme c’est le cas lors d’un choc septique.
En collectant de nombreux signaux provenant de l’extérieur ou de l’intérieur de l’organisme, le noyau parabrachial permet au cerveau de coordonner la meilleure réponse possible – immunitaire , métabolique et comportementale – en cas d’inflammation et a ainsi un rôle central dans le processus de retour à l’équilibre de l’organisme n
Sean Bailly