Les liens infinis entre sexualité et spiritualité EDITIONS PREMIERE P A R T I E
EDITIONS PREMIERE P A R T I E
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DIEU-SEXE CHAPITRE 1
DIEU PORTE DU ROUGE À LÈVRES
DIEU - SEXE
En 1945, un groupe de soldats britanniques libérèrent un camp de concentration allemand du nom de Bergen-Belsen. L’un d‘eux, le Lieutenant Colonel Mercin Willet Gonin DSO, raconta dans son journal ce qu’ils avaient découvert : « Je ne peux pas donner une description satisfaisante du Camp de l’horreur dans lequel mes hommes et moi allions passer le mois suivant de nos vies. Une terre désertique, stérile, nue. Des corps gisaient partout, certains en piles énormes, d’autres seuls ou par paires, là où ils étaient tombés. Cela prit un certain temps pour s’habituer à voir des hommes, des femmes et des enfants s’effondrer lorsque vous passiez à côté d’eux… On savait que cinq cents mouraient par jour, et que cinq cents continueraient à mourir chaque jour pendant des semaines, avant que ce que nous faisions puisse avoir le moindre effet. Ce n’était, quoi qu’il en soit, pas facile de voir un enfant s’étrangler jusqu’à en mourir à cause de la diphtérie quand vous saviez qu’une trachéotomie et des soins auraient pu le sauver. Certains ont vu des femmes se noyer dans leur propre vomi car elles étaient trop faibles pour s’en détourner, des hommes qui mangeaient des vers comme s’ils agrippaient un demi quignon de pain simplement parce qu’ils avaient dû manger des vers pour survivre et qu’ils ne pouvaient quasiment plus faire la différence entre les deux. Des piles de corps, nus et sordides, avec une femme trop faible pour tenir debout s’y adossant pendant qu’elle cuisinait la nourriture que nous lui avions donnée sur un petit feu, des hommes et des femmes qui s’accroupissaient n’importe où dehors pour se soulager… un réservoir à dysenterie dans lequel les restes d’un enfant flottait. »8 Ce compte-rendu est choquant, horrible et tragique. Mais pourquoi ? Parce que des gens ne devraient pas manger des vers ? Parce que des gens ne devraient pas former des piles de corps ? Nous répondons « oui » à ces questions parce que personne ne devrait être obligé de vivre dans des conditions semblables à celles de Bergen-Belsen. Et pourtant nous comprenons instinctivement que le mal fait à ces prisonniers – ces personnes – était beaucoup plus important encore que les conditions physiques qui leur ont été imposées. P 016
CHAPITRE 1 DIEU PORTE DU ROUGE À LÈVRES
Un camp de concentration est destiné à dépouiller les gens de leur humanité. C’est anti-humain. Et dans les Écritures, tout ce que qui est anti-humain est anti-Dieu. La Genèse commence avec Dieu qui crée le monde et ensuite qui crée un peuple « à son image ».9 Le mot hébreu pour image ici est tselem et a une signification culturelle précise.10 Les récits de la Genèse ont émergé dans la culture antique du Proche-Orient, où un roi disait régner à l’image d’un dieu précis. Le fameux roi égyptien Tout en est un exemple. Son nom complet était Toutankhamon, qui peut être traduit par « l’image vivante du dieu Amon. » Le roi était vu comme l’incarnation d’un dieu précis sur terre. Si vous vouliez savoir à quoi ressemblait ce dieu, il fallait regarder le roi du dieu. L’auteur de la Genèse montre clairement qu’au milieu de toute la Création, les humains ont quelque chose de différent.11 Ils ne sont pas Dieu et il ne vont pas devenir Dieu, mais d’une manière claire, intentionnelle, quelque chose de Dieu a été placé en eux. Ils reflètent ce à quoi ressemble Dieu et qui Dieu est. Une étincelle divine réside dans chaque être humain.12 Tout le monde, partout. Des porteurs de l’image divine.13 Imaginez un groupe de garçons au lycée debout près de leurs casiers lorsqu’une fille passe. Un des garçons demande « Comment tu notes ça ? » Ils donnent ensuite, chacun à leur tour, des valeurs numériques à différentes parties de son anatomie, en discutant à grands renforts de détails sur la façon dont ils évaluent ses attributs physiques.14 Ce scénario arrive sans arrêt, dans le monde entier, tous les jours. C’est un passetemps pour certains. Il y a des émissions de télé, des sites internet et des discussions sans fin dédiées à savoir qui est beau et qui ne l’est pas. C’est une industrie, une forme de divertissement, une culture. Et c’est partout. Le problème c’est que ce « ça » est en fait un « elle ». Une personne. Une femme. P 017
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Avec un nom, une histoire, des sentiments. Ça paraît inoffensif jusqu’au moment où vous êtes cette fille – et là, ça fait mal. C’est dégradant. C’est irrespectueux. Cela fait quelque chose à l’âme d’une personne.
QUAND UN « ELLE » DEVIENT UN « ÇA » Jésus a eu beaucoup de choses à dire sur ce qui advient lorsqu’une femme, porteuse d’image, un véhicule de l’étincelle divine, devient un « ça ». Dans le livre de Matthieu, Jésus enseigne que « celui qui regarde la femme d’un autre avec envie, celui-là, dans son cœur, a déjà couché avec cette femme. »15 Il connecte nos yeux, nos intentions et nos pensées à l’état de nos cœurs.16 Jésus, ensuite, amène les choses encore plus loin Il dit : « Si ton œil droit te fait tomber dans le péché, arrache-le, et jette-le loin de toi. » C’est un peu violent. Sans parler du fait que c’est douloureux. Et pris littéralement, cela rendrait la moitié de l’humanité aveugle en un rien de temps. Sans compter que des aveugles peuvent aussi ressentir de la convoitise. Notre seule conclusion est que Jésus utilise l’image du « c’est juste une blessure physique » pour nous diriger vers autre chose.17 Une vérité au-delà de la mutilation de parties du corps. Si nous ne sommes pas supposés prendre ceci de façon littérale, comment sommes-nous supposés le prendre ? Jésus l’explique en disant : « Pour toi, il vaut mieux perdre une seule partie de ton corps. C’est mieux que de garder ton corps tout entier et d’être jeté dans le lieu de souffrance. » Comment passons-nous de la convoitise, qui est si ordinaire et ne paraît pas être un si gros problème que ça, à avoir notre corps jeté en enfer en l’espace de deux phrases ? Et pour éviter ce sort, tu devrais te couper la main ? T’arracher un œil ? Ce serait mieux ? Il exagère un peu, non ? P 018
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Ou avons-nous manqué quelque chose ? Pour comprendre comment Jésus fait ces connexions, nous devons explorer la compréhension du Ciel des Juifs du premier siècle. Dans le livre des Psaumes, il est écrit : « Le Seigneur a son siège dans le Ciel, son pouvoir royal s’étend sur le monde entier. »18 Pour la pensée juive, le Ciel n’est pas un lieu géographique fixe, immuable quelque part ailleurs que dans ce monde. Le Ciel est le domaine où les choses sont telles que Dieu entend qu’elles soient. L’endroit où les choses sont sous le pouvoir et le règne de Dieu. Et cet endroit peut être n’importe où, n’importe quand, avec n’importe qui. Il est également écrit dans les Psaumes que « le ciel est le Ciel du Seigneur, mais la terre, il l’a donnée aux hommes. »19 Donc il y a ce domaine, le Ciel, où les choses sont comme Dieu les souhaite, sous le pouvoir et le règne de Dieu. Mais la terre est différente. Dieu a autorisé l’existence d’autres royaumes temporaires. D’autres domaines d’autorité. La terre, « il l’a donnée aux hommes. » Ce qui signifie que nous pouvons y faire ce que nous voulons. Nous pouvons vivre comme nous le voulons. Nous pouvons choisir de vivre sous le pouvoir et le règne de Dieu ou nous pouvons choisir de nous rebeller contre Dieu et de vivre d’une autre façon. Et donc s’il y a un domaine où les choses sont telles que Dieu les veut, alors il doit aussi y avoir un domaine où les choses ne sont pas comme Dieu veut qu’elles soient. Où les choses ne sont pas selon sa volonté. Où les gens ne sont pas traités comme vraiment humains. Ça s’appelle l’enfer. En anglais, on utilise l’expression « for the hell of it » (c’est pour l’enfer). Lorsque quelqu’un utilise « for the hell of it », ce qu’il veut dire c’est que peu importe ce dont on discute, cela a été dit ou fait sans raison apparente. C’est par essence, inutile. Un hasard. Et Dieu est pour les projets, la beauté, le sens. Lorsqu’on dit qu’on a « vécu un enfer », nous voulons dire que ça a été un abîme sans amour, sans paix, sans beauté ou sans signification. La volonté et le désir de Dieu ont été absents. P 019
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Nous entendons parler de zones de guerre qui sont comme l’enfer, de conditions de travail infernales, d’un divorce qui est un enfer émotionnel, une famine qui semble être l’enfer sur terre.20 Les camps de concentration sont des enfers sur terre. Et c’est le propos de Jésus avec son enseignement sur « arrache ton œil ». Son propos n’est pas de dire que vous devriez mutiler votre corps si vous vous apercevez que vous convoitez quelqu’un. Son propos est que quelque chose de sérieux – d’infernal – arrive lorsque les gens sont traités comme des objets, et nous devrions résister à cela à tout prix.21
MAINTENANT Lorsque Jésus parle du Ciel et de l’enfer, ce sont premièrement et principalement des réalités présentes qui ont de sérieuses implications sur l’avenir. Les deux peuvent être invités sur terre, maintenant, au travers de nos actions. Il est possible au Ciel d’envahir la terre. Et il est possible à l’enfer d’envahir la terre. Un de mes amis parle honnêtement des années où il a exploité des femmes pour le sexe. Il savait exactement quoi dire, comment faire. Il était passé maître dans l’art de trouver une femme qui avait des relations difficiles avec son père et de manipuler la situation pour son plaisir. La première fois qu’il m’a parlé de son histoire, il a lourdement insisté sur le fait que c’est vrai pour chacun d’entre nous. Il disait que le fait d’exploiter des femmes ne les avait pas seulement dépouillées elles-mêmes de leur humanité, mais cela l’en avait dépouillé lui aussi. Les années passant, il s’est rendu compte qu’il n’aimait pas ce qui lui arrivait. Il devenait moins humain à cause de ce processus. Il a dit qu’il était en train de devenir un monstre.
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En traitant les femmes comme des objets, il perdait quelque chose de sa propre humanité. À un moment donné, il a repris ses esprits. Il était révulsé par la personne qu’il devenait. Il décrit cela comme une « renaissance » dans laquelle il voyait les choses telles qu’elles étaient vraiment. Des années plus tard, mon ami a rencontré un groupe qui travaillait incognito en Asie du Sud-Est pour libérer des jeunes filles du commerce du sexe. Dans des zones rurales perdues, des filles étaient kidnappées et amenées en ville où on les forçait à travailler en tant que prostituées. Mon ami s’est engagé et est récemment parti incognito pour une « mission », pour sauver des jeunes filles et les aider à commencer une nouvelle vie. J’étais avec lui lorsqu’il a montré à un groupe de personnes une photo de lui entouré des filles qu’il avait aidé à sauver. Les gens étaient époustouflés par la photo.22 Il s’attaque à l’enfer et il amène le Ciel. Nous ne respectons pas l’image divine dans les autres seulement parce que nous cherchons à affirmer leur humanité. Il ne s’agit pas que d’eux. Il s’agit de nous. Il s’agit de notre humanité aussi. Je viens de recevoir un courriel demandant que je signe une pétition qui proteste contre l’usage de la torture pour obtenir des informations de la part de soldats ennemis en période de guerre. Le courriel disait que ce problème était débattu actuellement par les politiciens et que le public devait s’exprimer sur cette question. Il y a un débat là-dessus ? Le problème ne se situe pas uniquement sur l’effet de la torture sur la personne que l’on torture, c’est sur l’effet de la torture sur celui qui torture. C’est déjà un souci quand les gens débattent de l’usage de la torture, comme si cela avait des conséquences seulement sur l’ennemi. Notre propre humanité est en danger.
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LA NOUVELLE HUMANITÉ Les premiers chrétiens avaient une expression pour désigner ce qui arrive lorsque les gens reconnaissent et respectent réellement l’image de Dieu chez ceux qui sont autour d’eux. Dans la lettre aux Éphésiens, il est question d’un groupe de personnes qui, avant, étaient divisées à cause de leur race, leur origine, leur richesse, leur statut socio-économique, leur perception du monde et leur religion.23 Un groupe est composé de Juifs, l’autre de Grecs et dans cette nouvelle Église, ils se retrouvent unis parce qu’ils sont tous devenus des disciples de Jésus Christ ressuscité. Toutes les anciennes catégories ne fonctionnent plus. Cette nouvelle communauté, ce nouveau lien, est plus grand que toutes les choses qui les avaient séparés avant. Les premiers chrétiens appelaient ça « la nouvelle humanité ». Au commencement, Dieu nous a créés « à son image ». Donc au début, Dieu nous a donné une image à porter. Puis Dieu nous a donné un genre : mâle ou femelle. Puis Dieu nous a donné quelque chose à faire : prendre soin du monde et le développer, en prenant part au processus continu de la création du monde.24 Plus tard, les gens ont commencé à se déplacer dans différents endroits. Cela a pris des années et des années de l’histoire humaine pour arriver à dire « Ces gens sont d’ici et ceux-là sont de là-bas ». Des endroits différents, des couleurs de peau différentes, des langages, des cultures différentes sont arrivés bien plus tard dans l’histoire humaine. Ce que nous faisons souvent, c’est inverser le processus créateur que Dieu a initié. Nous partons de plusieurs arrière-plans culturels, couleurs de peau et nationalités, et c’est seulement lorsque nous regardons par-delà ces choses que nous sommes capables de comprendre ce que nous avons en commun : que nous sommes des compagnons portant une image avec la tâche commune de prendre soin de la Création de Dieu. Nous prenons les choses complètement à l’envers. Nous voyons d’abord toutes les différences et seulement après, peut-être, nous commençons à voir les similitudes. La nouvelle humanité, c’est voir les gens comme Dieu les voit.
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LORSQUE EUX DEVIENNENT NOUS J’ai déjeuné en septembre de l’année dernière avec un groupe de personnes que je venais juste de rencontrer. Nous discutions du travail que nous faisions les uns et les autres et d’endroits où nous avions été. Alors un homme a commencé à raconter des histoires à propos des Marines. Il avait commandé l’un des premiers groupes à entrer en Irak pendant la Guerre du Golfe en 1991. Il racontait ce que c’était que de rentrer en territoire ennemi et de se faire tirer dessus – de la complexité de la guerre – et nous étions tous suspendus à son récit. Pendant une bataille, ses Marines et lui avaient gagné rapidement et ils durent donc arrêter les soldats qui venaient de faire feu contre eux. Ils les alignèrent et, alors qu’ils les menottaient, l’un d’entre eux se précipita vers le commandant avec une lettre à la main, en le suppliant de l’envoyer immédiatement. L’homme était dans tous ses états et commençait à faire une scène. Il répétait sans arrêt que la lettre devait être postée immédiatement. Il regarda ensuite le Marine droit dans les yeux et dit : « Envoyez cette lettre pour moi, s’il vous plaît. Elle est pour mon père et il doit savoir que je l’aime. » L’homme qui racontait l’histoire s’interrompit, nous regarda chacun à tour de rôle et dit : « Il n’avait aucune idée de la relation difficile que j’avais avec mon propre père. Je suis là au milieu de nulle part dans le désert irakien, essayant d’arrêter un groupe de soldats qui juste auparavant avaient essayé de me tuer, regardant un homme qui voulait que j’envoie une lettre pour lui et je me dis : je pourrais être lui. » Il y a quelques années, une femme avait appelé l’église dont j’étais pasteur car elle avait besoin de parler. Nous avions convenu d’un rendez-vous et lorsqu’elle arriva, je lui demandai comment je pouvais l’aider. Elle dit qu’elle était une prostituée et qu’elle n’avait plus envie de vivre, elle avait donc préparé un plan pour se suicider. Elle décrivit en détail comment elle allait le réaliser, quand elle le ferait et où cela se passerait. Elle était très exhaustive. Elle me dit qu’elle me parlait de tout cela car elle avait besoin de savoir si elle irait au paradis ou en enfer si elle mourait. À un moment, pendant qu’elle m’exposait son plan, elle mentionna le fait qu’elle avait une fille car l’un de ses clients l’avait mise enceinte. Elle faisait confiance à sa famille qui élèverait son enfant lorsqu’elle serait partie. Je lui ai demandé de me parler un peu plus de sa fille. Elle me donna quelques P 023
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détails. Puis je lui demandai comment s’appelait son enfant. Elle me répondit : « Le prénom de ma fille est Faith » Faith.* Il y a ces moments où l’ennemi tout à coup devient comme moi. Où un soldat devient un fils. Où une prostituée devient une mère. Où ils deviennent nous. Où ceux-là deviennent nous. Où il devient moi. Des moments où toutes les façons que nous avons de nous diviser et de nous classer et de nous convaincre à quel point nous sommes différents, meilleurs et aux antipodes disparaissent. Et nous sommes face au fait que d’abord et par-dessus tout, nous sommes humains. Ensemble dans le même bateau. Et pas si différents les uns des autres.25 Juifs. Païens. Marine. Irakien. Orphelin. Famille. Pasteur. Prostituée. Nous pourrions être eux. * Faith signifie « Foi » en anglais
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TRENTE ANS PLUS TARD Lorsque j’avais 5 ans, ma famille rendit visite à mes grands-parents en Californie pour les vacances de Noël. Ils vivaient dans une résidence longée par une allée – très enthousiasmant pour un garçon qui vivait dans une ferme du Michigan. À un moment, pendant mon exploration de l’allée, j’ai décidé de fabriquer un cadeau de Noël à mon père à l’aide de choses que je trouvais là. Donc le matin du 25, mon père a eu le privilège d’ouvrir un paquet contenant un bout de tuyau noir et vert collé à un caillou plat gris avec des petites pierres blanches collées à l’intérieur. Un chef d’œuvre, pour le moins ! La raison pour laquelle je me souviens de ça est que j’ai rendu visite à mon père il y a quelques jours dans son bureau. Pendant que j’attendais qu’il sorte de réunion, j’ai flâné en regardant les photos accrochées aux murs, les papiers sur son bureau et les objets sur ses étagères. Sur l’une d’elles se trouvait, trente ans plus tard, la sculpture faite avec un tuyau et un caillou. Il l’a toujours. Il l’a ramenée à la maison avec lui, l’a mise dans son bureau en 1977 et ne s’en est jamais débarrassé. Nous savons pourquoi il l’a gardée. La façon dont vous traitez la Création reflète ce que vous ressentez pour le créateur. Lorsqu’un être humain est maltraité, utilisé comme un objet ou négligé, lorsque des hommes sont traités de façon inhumaine, ces actions sont des actions contre Dieu. Car la façon dont vous traitez la Création reflète ce que vous ressentez pour le Créateur. Être un chrétien, c’est travailler pour la nouvelle humanité. Jésus demande à ses disciples de nourrir, de vêtir et de visiter ceux qui en ont besoin et de prendre soin d’eux. Ce sont des compagnons porteurs d’une image, ils sont comme nous, et si nous les aimons, nous aimons Dieu. P 025
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Une église existe pour être le reflet de la nouvelle humanité. Une communauté de gens qui honorent et qui respectent les pauvres et les riches, les savants et les incultes, les juifs et les païens et les noirs et les blancs et les vieux et les jeunes et les puissants et les faibles comme des êtres pleinement humains, créés à l’image de Dieu. Ces liens que nous avons les uns avec les autres sont la raison pour laquelle, pour beaucoup, il y a un tel pouvoir dans l’Eucharistie, qu’on appelle aussi la Messe, le repas du Seigneur ou la communion. Nous prenons le pain et nous le trempons dans la coupe pour nous rappeler à nous-mêmes le corps et le sang de Jésus.26 Pour refléter la vérité que nous sommes tous ensemble liés dans cette action, un corps, et que son corps a été brisé et que le sang a été versé pour notre union. Ce n’est pas juste notre relation avec Dieu en tant qu’individus qui importe. Souvent la communion est perçue comme un moment pour méditer sur l’amour de Dieu pour nous à travers la mort de Jésus sur la Croix. Et c’est le cas. Mais c’est à l’origine autant centré sur mon besoin désespéré qu’on me rappelle mon humanité et l’humanité de tous ceux qui sont autour de moi. Lorsque je respecte l’image de Dieu dans les autres, je protège l’image de Dieu en moi. Lorsque Jésus parle d’aimer nos prochains, ce n’est pas juste dans l’intérêt de nos voisins.27 Si nous n’aimons pas nos voisins, quelque chose nous arrive. Et en essayant de protéger l’image de Dieu en eux, nous protégeons peut-être aussi simplement l’image de Dieu en nous en même temps. Parce que dans chaque décision, conversation, geste, commentaire, action et attitude, nous invitons le Ciel ou l’enfer sur terre. J’ai une nouvelle héroïne. Elle s’appelle Lil, et je pense qu’elle doit être près de la soixantaine. Je l’ai rencontrée cette année lorsqu’elle m’a présenté sa fille, dont elle poussait le fauteuil roulant. Au début de leur mariage, Lil et son mari28 avaient décidé qu’ils adopteraient deux enfants. En apprenant à connaître le système des services familiaux, ils découvrirent que dans ce système, il y avait des enfants dont personne ne voulait. Donc ils allèrent à l’agence locale d’adoption et demandèrent les enfants avec les plus gros handicaps, ceux qui avaient les histoires les plus difficiles et les futurs les plus désespérés. Ils ajoutèrent qu’ils pourraient accepter les enfants dont P 026
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personne ne voulait. Durant ces trente dernières années, ils ont élevé plus de vingt enfants, leurs enfants biologiques aux côtés de leurs enfants adoptifs. Lorsque Lil eut terminé son explication, elle se pencha et caressa l’épaule de sa fille et dit « Voici Crystal. Elle a vingt-sept ans mais aura six mois d’âge mental pour le restant de ses jours. Elle ne peut pas parler, ni marcher, ni bouger, ni manger seule, ni faire aucune chose par elle-même. Elle restera comme ça, entièrement dépendante de nous, jusqu’à ce qu’elle meure. Et je l’aime tellement. Ma famille et moi ne pouvons pas imaginer notre vie sans elle. Elle rend les choses tellement meilleures. » Que fait Lil ? Elle amène le Ciel sur la terre. Elle nous donne un aperçu d’un autre monde. D’une meilleure façon. La façon de Dieu. Elle et sa famille ont pris des enfants qui étaient rejetés à cause de leur prétendu manque de valeur et ils ont dit « non, vous n’avez pas à être rejetés et méprisés. Nous allons vous aimer comme des égaux, des êtres humains, comme l’un d’entre nous. » Ils nous montrent comment Dieu nous aime. Ils reflètent l’image. Et lorsque vous l’avez vu incarné comme ça, vous voyez les cieux débarquer sur terre. Au lieu d’étiquettes comme « handicapé », « rebut », ou « invalide », Lil , son mari et ses enfants ont seulement vu une étiquette : « humain ».29 Et donc ils n’ont eu qu’une réponse : l’amour. Et cela fait toute la différence dans le Ciel et sur la terre. Ce qui nous ramène à quelque chose qui est arrivé pendant que le Colonel Gonin était au camp de concentration de Bergen-Belsen : P 027
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« C’était peu de temps après l’arrivée de la Croix-Rouge britannique, même si les deux choses n’étaient peut-être pas liées. Une très grande quantité de rouge à lèvres arriva. Ce n’était pas du tout ce que nous voulions, nous réclamions à corps et à cris des centaines et des milliers d’autres choses et je ne sais pas qui avait demandé du rouge à lèvres. J’aimerais vraiment pouvoir découvrir qui l’a fait, car c’était un acte d’intelligence purement génial. Je crois que rien ne fit plus d’effet aux prisonnières que le rouge à lèvres. Les femmes étaient couchées sur leurs lits sans drap, ni chemise de nuit, mais avec des lèvres rouge écarlate ; on les voyait se promener avec juste une couverture sur leurs épaules, mais avec des lèvres rouge écarlate. J’ai vu une femme morte sur une table d’examen qui serrait encore son tube de rouge à lèvres dans sa main. Enfin quelqu’un avait fait quelque chose pour leur redonner leur individualité, elles étaient quelqu’un, plus seulement le numéro tatoué sur leur bras. Enfin, elles pouvaient s’intéresser à leur apparence. Ce rouge à lèvres a commencé à leur rendre leur humanité. » Parce que parfois, la différence entre le Ciel et l’enfer n’est qu’un peu de rouge à lèvres.
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INTRODUCTION C’EST TOUJOURS EN RAPPORT AVEC ÇA CHAPITRE UN DIEU PORTE DU ROUGE À LÈVRES CHAPITRE DEUX SEXY À L’INTÉRIEUR CHAPITRE TROIS DES ANIMAUX ET DES ANGES CHAPITRE QUATRE DU CUIR, DES FOUETS ET UN FRUIT CHAPITRE CINQ ELLE S’EST PRÉCIPITÉE DANS LES TOILETTES DES FILLES CHAPITRE SIX TU VAUX LA PEINE QU’ON MEURE POUR TOI CHAPITRE SEPT SOUS LA HOUPPA CHAPITRE HUIT JOHNNY ET JUNE CHAPITRE NEUF YOUPI POUR TOUJOURS EPILOGUE PLUS DE BALLONS, S’IL VOUS PLAÎT NOTES DE FIN/BIBLIOGRAPHIE/PISTES DE RÉFLEXION
Dieu et le sexe vont ensemble. On ne peut pas les séparer selon Rob Bell car le monde physique est intimement lié à des réalités spirituelles beaucoup plus profondes. Ainsi, avant de donner du sens à la sexualité, il arrive un moment où l’on doit faire mention de Dieu. Avec beauté et une analyse inhabituelle, Dieu Sexe explore ce lien. Né en 1970, Rob Bell est pasteur de la communauté de Mars Hill. Rob Bell est l’auteur de la collection de vidéos NOOMA qui abordent les questions que peuvent se poser les personnes explorant la foi chrétienne. Il met l’accent sur un christianisme vécu dans la recherche de la présence de Dieu.
ISBN 978-2-916539-44-7 EPP044
14€ adaptation graphisme: www.atomike-studio.com
www.premierepartie.com
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