Traité de la Foi, de l’Espérance et de la Charité
1 1 Corinthiens 1, 20 2 Sagesse 6, 26 3 Romains 16, 19 4 Ben Sirac 1, 1
L’occasion et le but de ce « manuel »
m’inspire ta science éclairée et le désir que j’éprouve de te voir au nombre des sages, non de ceux dont il est dit « Où est le sage ? où est le scribe ? Où est le subtil discoureur du siècle présent ? Dieu n’a-t-il pas convaincu de folie toute la sagesse du monde1 ? ». Mais de ceux dont il a été écrit : « La multitude des sages est le salut de l’univers2 », et que l’Apôtre donne pour modèles aux chrétiens à qui il adresse ces paroles : « Je veux que vous soyez sages dans le bien, simples dans le mal3 ». Mais de même qu’on ne peut se donner l’existence, de même on ne peut tirer la sagesse de son propre fond ; il faut, pour l’acquérir, être éclairé par celui dont il a été écrit : « Toute sagesse vient de Dieu4 ».
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2. La sagesse de l’homme, c’est la piété. Ce principe est établi dans le livre de Job, où tu peux lire cet oracle de la sagesse ellemême : « La piété, voilà la sagesse5 ». Si tu me demandes le sens qu’il faut attacher ici au mot de piété, tu le trouveras nettement expliqué dans le terme grec, theosebeia, c’est-à-dire, culte dû à Dieu. La langue grecque désigne aussi la piété par le mot eusebeia, culte légitime ; moins spécial, ce terme est toutefois consacré ordinairement à désigner le culte religieux. Mais comme le premier terme
Peux-tu souhaiter une précision plus grande, toi qui veux que je te présente les plus grandes vérités en raccourci ? Ou bien ne demandes-tu pas qu’on t’explique ce terme et qu’on t’enseigne en peu de mots comment il faut honorer Dieu ? 3. Si je te réponds qu’on doit honorer Dieu par la foi, l’espérance et la charité, tu vas m’accuser de pousser trop loin la précision, et me demander une explication succincte sur ces trois points, à savoir : que faut-il croire, espérer, aimer ? Ce travail sera une réponse complète aux questions que tu m’as posées dans ta lettre. 5 Job 28, 28
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Si tu en as gardé une copie, tu peux les relire. En tout cas, je vais te les rappeler. 4. Tu désires, m’écris-tu, que je compose pour toi ce qu’on nomme un manuel, un manuel qui puisse t’accompagner partout, et où soient traitées les questions suivantes : « Que faut-il hérésies ? Jusqu’à quel point la raison peut-elle devenir l’auxiliaire
L’occasion et le but de ce « manuel »
est l’abrégé de la doctrine chrétienne ? Quel est le fondement véritable et indestructible de la foi catholique ? » Tu sauras tout ce qu’il faut savoir sur ces points essentiels, quand tu sauras exactement ce qu’il faut croire, espérer, aimer. Voilà principalement, ou plutôt voilà tout ce qu’il faut embrasser dans la religion. Celui qui combat ces principes ou ne porte pas le nom du Christ n’est qu’un hérétique. L’emploi du raisonnement n’est légitime qu’autant que les vérités sont du ressort de l’expérience des sens ou tombent sous les prises de notre intelligence. Quant aux choses qui ne relèvent pas de l’espérance ou qui dépassent et ont toujours dépassé la portée de l’esprit humain, il faut s’en rapporter sans hésitation au témoignage des auteurs qui ont composé les Écritures, si juste-
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une énergie assez puissante pour saisir ces vérités surnaturelles ou les voir d’avance. 5. L’esprit, une fois pénétré des principes de la foi agissant par l’amour, s’efforce, par une vie pure, d’arriver à la contemplation où doit se révéler aux cœurs saints et parfaits l’ineffable beauté dont la vue compose la félicité souveraine. Voilà le principe, voilà le terme de la perfection : elle commence par la foi, elle s’achève par la vue de Dieu. Voilà aussi l’abrégé du christianisme. Quant au fondement véritable et éternel de la foi catholique, c’est JésusChrist lui-même : « Personne, [dit l’Apôtre], ne peut poser d’autre fondement que celui qui a été établi et qui n’est autre que Jésus-Christ6 ». Et qu’on n’aille pas dire que ce fondement n’est pas essentiel à la foi catholique parce qu’il semble servir de point commun entre nous et certains hérétiques. Car, si l’on examine attentivement que Jésus-Christ n’appartient que de nom à certains hérétiques qui prétendent au titre de chrétiens, et qu’en réalité il ne préside point au milieu d’eux. La démonstration de cette vérité m’entraînerait trop loin : il faudrait en effet passer en revue toutes les hérésies anciennes, actuelles ou même possibles, et faire voir, en les analysant, qu’elles ne sont chrétiennes que de nom. Or, cette 6 1 Corinthiens 3, 11
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discussion exigerait une suite de volumes, ou plutôt elle paraît inépuisable. 6. Au contraire, tu n’attends de moi « qu’un manuel et non de gros livres capables de remplir les rayons d’une bibliothèque ». Pour en revenir donc aux trois points qui constituent le culte dû à Dieu, la foi, l’espérance, la charité, il est aisé d’enseigner ce qu’il faut croire, ce qu’il faut espérer, ce qu’il faut aimer. S’agit-il de réfuter les sophismes de ceux qui combattent nos principes ? Une telle œuvre exige une science profonde, étendue ; et, pour cœur embrasé de zèle. L’occasion et le but de ce « manuel » 21
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L’occasion et le but de ce « manuel »
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La Croyance et l’Oraison Dominicale comme guides d’interprétation des vertus théologiques de la foi, l’espérance et l’amour 23
3.
Dieu le Créateur de tout ; et la bonté de toute la création
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4.
Le problème du mal
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Les types et degrés de l’erreur
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6.
Le problème du mensonge
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7.
Les questions disputées concernant les limites de la connaissance et de la certitude dans divers sujets 47
8.
L’état de l’homme après la chute
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9.
Le remplacement des anges déchus par les hommes élus ; la nécessité de la grâce. 57
10.
Jésus-Christ le médiateur
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11.
L’incarnation comme exemple premier de l’action de la grâce de Dieu
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12.
Le rôle du Saint-Esprit
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13.
Le baptême et le péché originel
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14.
Les mystères du travail et de la justice médiatrice de Christ
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15.
L’église triomphante et l’église militante
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17.
Formes diverses de l’aumône
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