Région économie
MARDI 26 NOVEMBRE 2013 37
Industrie Comment Borealis a fait redémarrer la production de Pec-Rhin à Ottmarsheim En février 2012, le groupe autrichien Borealis rachetait Pec-Rhin. Depuis, l’usine d’Ottmarsheim, qui compte 180 salariés, a fortement augmenté sa production et 71 millions d’euros d’investissement sont prévus d’ici 2016. « Les usines doivent tourner à fond. En contrepartie, nous avons besoin de sites de stockage pour faire face aux périodes creuses. » Simon Jones, vice-président en charge de la stratégie et du développement de Borealis, ne cache pas ses objectifs : doubler, d’ici 2020, son niveau de commercialisation d’engrais pour atteindre les 10 millions de tonnes. Une stratégie qui s’appuie sur une croissance externe, notamment en France puisqu’après Pec-Rhin à Ottmarsheim, en février 2012, le groupe basé à Vienne a racheté les usines GPN à Grand-Quevilly
(Seine-maritime, 340 salariés) et Grandpuits (Seine-et-Marne, 210 personnes) en France et Rosier en Belgique. Clairement, dans la stratégie de Borealis, Ottmarsheim a été la tête de pont du groupe à capitaux autrichiens, qui dispose par ailleurs d’un site de production d’engrais et de recherche et développement à Linz. La priorité a été d’adapter la production à l’outil et donc d’augmenter les volumes de fabrication. « À notre arrivée, nous produisions 240 000 tonnes par an. En 2012, nous sommes montés à 310 000 et nous réaliserons 320 000 tonnes en 2013 et 340 000 en 2015 », indique Johan Van Grooter, le directeur du site, qui précise : « Cela a été possible en améliorant la fiabilité et en limitant les arrêts à deux jours par mois. »
Laurent Bodin
Repères
« Il y a ici un savoir-faire auquel nous n’avons pas voulu toucher » D’ici au prochain grand arrêt prévu en 2016, ce sont 71 millions d’euros que Borealis promet d’investir. Ces dépenses porteront
FComment ça marche ? Concrètement, la fabrication d’engrais compte trois étapes : il faut d’abord produire l’ammoniac, mélange d’azote et d’hydrogène au moyen du gaz naturel ; vient ensuite la production d’acide nitrique, réaction d’ammoniac avec de l’oxygène et ajout d’eau ; la production d’engrais étant obtenue par le mélange de gaz ammoniac et l’acide nitrique. La masse fondue est ensuite transformée en granulés par pulvérisation puis séchés et refroidis. Environ le quart de l’ammoniac produit par Pec-Rhin est revendu à Butachimie et l’acide nitrique à Solvay. Deux assurances anti-délocalisation.
Débat Fondations territoriales, un outil de développement local ? Quel peut être le rôle des fondations territoriales, à l’heure où les fonds publics diminuent ? La question sera posée lors d’un débat organisé par le Conseil économique, social et environnemental Alsace, ce soir à Strasbourg. « Dans un contexte économique et social difficile, alors que les aides publiques ont tendance à diminuer, les fondations territoriales représentent un véritable outil de développement local », affirme Marcel Czaja, réélu jeudi dernier à la tête du Céser Alace, en présentant le Césagora de ce soir, de 17 h à 19 h, dans l’hémicycle de la Maison de la Région. Pour lui, ces fondations territoriales peuvent servir de « passerelles entre des associations et des donateurs qui veulent soutenir des projets locaux ». Pour Guillaume d’Andlau, président de la Fondation Passions Alsace, un des intervenants, « ce débat s’inscrit dans un mouvement de fond ». Bien que nées dès 1914 à Cleveland, les fondations territoriales n’ont pas trouvé, durant longtemps, d’écho en France, pays de tradition centralisée. Les donateurs
porté par les zones de l’Est, PecRhin, via le canal d’Alsace qui permet de rejoindre le Danube, est un site stratégique majeur. L’usine a embauché une dizaine de personnes depuis début 2012 et devrait en faire autant dans les prochains mois. Pour une fois, rachat rime avec développement et non démantèlement.
ont préféré s’intéresser à des fondations nationales, agissant autour de domaines précis. « Il y a de nombreuses demandes d’acteurs de terrain dont l’action est facteur d’innovation et de lien social », relève encore Guillaume d’Andlau. Si ces associations capitalisent sur un nombre important de bénévoles, elles ont souvent besoin d’une aide financière… Et l’intérêt des fondations territoriales est aussi d’identifier ces projets. Le débat permettra d’évoquer les différentes fondations, avec un focus sur la Fondation de France, très active dans la région. Mais aussi de poser la question du périmètre pertinent de ces fondations. Deux exemples seront présentés : la fondation de Bielefeld (Allemagne) où des citoyens interviennent dans l’éducation, l’intégration et la santé, et « Mécène et Loire », en Anjou, où 27 PME se sont rassemblés sous une même bannière pour cinq ans. Le président de la Fondation Passions Alsace souhaite aussi lancer le débat de l’implication de la Marque Alsace comme élément fédérateur dans ce domaine.
Innovation Deux entreprises alsaciennes primées à Metz La start-up mulhousienne CellProthera s’est vue décerner la semaine dernière, à Metz, le prix Biotech d’avenir Grand Est, dans le cadre du Technology Fast 50, organisé chaque année par Deloitte France. Une reconnaissance qui conforte toute l’équipe de CellProthera dans le développement de sa thérapie régénératrice cardiaque. Pionnière, CellProthera est en effet à l’origine d’un traitement unique de réparation tissulaire et fonctionnelle du myocarde après un infarctus sévère. La société de biotechnologie mulhousienne s’apprête à débuter au 1er trimestre 2014 un essai clinique international. Toujours dans le cadre du Technology Fast 50 de Metz, le prix Grande entreprise Est 2013 a été attribué, quant à lui, à la société strasbourgeoise RSI Video Technologies, qui a enregistré une croissance de 260 % sur cinq ans grâce à son système d’alarme anti-intrusion sans fil permettant de visualiser à distance la cause du déclenchement.
L’usine Pec-Rhin va bénéficier de 71 millions d’euros d’investissement d’ici 2016. Photo Stéphane Spach
sur l’augmentation des capacités de production, leur fiabilité et la sécurité. « L’objectif final du groupe est d’avoir de bons résultats financiers mais pas à n’importe quel prix. Pas, en tout cas, au détriment de la sécurité de l’environnement ou de nos salariés », précise Louis Desal, vice-président opérationnel du département chimie de base. Si concrètement Pec-Rhin a
adopté l’anglais comme langue courante au niveau managérial, Borealis n’a pas opéré de changements structurels profonds. « Nous avons mis en place une organisation modélisée par le groupe mais il y a ici un savoir-faire auquel nous n’avons pas voulu toucher », note Johan Van Grootel, directeur d’un site de stockage composé de deux bâtiments dans lequel il peut mettre à l’abri 64 000 tonnes d’engrais. « Dans notre métier, il y
a deux périodes importantes qui correspondent aux campagnes agricoles, soit la fin de l’hiver et le début de l’été. Il faut pouvoir stocker dans les périodes plus creuses en termes commerciaux », explique Franck Calderara, directeur HSE (hygiène, sécurité et environnement) de Borealis Pec-Rhin. Dans l’objectif de Borealis de devenir le deuxième producteur d’engrais d’Europe, un marché qui croît de 3 à 4 % par an et est
H Chiffre d’affaires (CA) net du groupe Borealis en 2012 : 7,545 M€ (millions d’euros). Bénéfice net : 480 M€. Rendement du capital investi : 11 %. H CA de l’activité engrais : 726 M€, presque triplée depuis 2009 grâce à une croissance externe. Plus de 5 millions de tonnes d’engrais commercialisés. 1 330 employés dans la production d’engrais, dont 600 à Linz en Autriche, 180 à Ottmarsheim, 340 à Grand-Quevilly et 210 à Grandpuits. H 71 M€ d’investissement à Ottmarsheim entre 2012 et 2016 sont prévus pour accroître « les capacités de production et de stockage, la fiabilité des usines et la sécurité ». H Production annuelle d’engrais : 240 000 tonnes en 2011, 310 000 tonnes en 2012, 320 000 tonnes en 2013 et un objectif de 340 000 tonnes en 2015. H Production quotidienne de Pec-Rhin à Ottmarsheim : 775 tonnes d’ammoniaque, 1 000 tonnes d’acide nitrique, 1 100 tonnes d’engrais ammonitrates, 125 tonnes d’alcali, 250 tonnes de CO2. H Capacité de stockage des engrais dans l’usine : 80 000 tonnes. H Expédition d’engrais : 2 400 tonnes par jour en vrac (camions, barges) et 1 000 tonnes en grands conditionnements (big bags).
Pôles de compétitivité Biovalley et Énergivie jugés « performants » Les deux pôles de compétitivité alsaciens, Biovalley et Énergivie, ont été confortés dans leur action par l’État et les collectivités, jusqu’en 2018. Initiée en 2004 par le ministre – alsacien – François Loos, la politique des pôles de compétitivité fait l’objet d’un consensus au niveau national comme régional. L’État, de concert avec la Région Alsace, la Cus (Communauté urbaine de Strasbourg) et la M2A (Mulhouse Alsace agglomération) ont signé, vendredi, un nouveau contrat de performance, pour les six ans à venir, avec les deux pôles alsaciens, Alsace Biovalley et Alsace Énergivie.
3 200 emplois depuis 2005 Le préfet Stéphane Bouillon, le président Philippe Richert, Catherine Trautmann, vice-présidente de la Cus, et Jean-Pierre Gasser, vice-président de la M2A, ont fixé de nouveaux objectifs aux responsables des deux pôles. Ils avaient été jugés « performants » par le rapport national d’évaluation publié en 2012. L’autorité indépendante a notamment salué « la gouvernance efficace de Biovalley », insistant sur ses actions génératrices d’emplois. « Depuis 2005, 3 266 emplois directs et indirects ont été créés dans le domaine, 62 entreprises créées ou implantées et 473 projets de recherche-développement collaboratifs labellisés », a souligné Didier
Le pôle API, au sein du parc d’innovation d’Illkirch-Graffenstaden.
Frommweiler, directeur du pôle qui va s’ouvrir à d’autres filières que la santé, mais aussi aux entreprises du Grand Est et du Rhin supérieur. « Nous prévoyons la création de 2 000 emplois et de 30 entreprises, ce qui est un objectif ambitieux mais réalisable », a-t-il annoncé, en espérant passer de 115 à 200 membres. « Pour une entreprise, l’élément le plus important, c’est l’ancrage dans le territoire », a confirmé Serge Bischoff, PDG de la société mulhousienne Rhenovia Pharma, satisfait de « l’accompagnement de l’équipe de Biovalley dans sa recherche de clients ». Quant au pôle Énergivie, labellisé en 2010, son équipe a été félicitée pour « sa stratégie claire et structurée » et « la force de son implantation sur une région unique ». Pierre-Étienne Binschedler, président d’Énergivie – qui compte
151 membres dont l’Université de Strasbourg – a rappelé que, partant d’un métier traditionnel, le pôle mise sur le bâtiment à énergie positive, obligatoire d’ici 2020. Ses responsables, qui ont accompagné 28 projets collaboratifs pour 154 millions d’euros, ont comme objectif le renforcement de partenariats à l’échelle
Archives Jean-Marc Loos
du Rhin supérieur, notamment avec Karlsruhe. Reste la question, soulevée lors de la signature, du financement des pôles qui sont encore largement dépendants des fonds publics. Alors que les financements privés devraient atteindre la moitié des budgets. Yolande Baldeweck
FCinq pôles en Alsace L’Alsace compte cinq pôles de compétitivité sur les 71 pôles français. Seuls les deux pôles exclusivement alsaciens, Biovalley, créé en 2005 et consacré aux innovations thérapeutiques, et Énergivie, qui n’affiche que 18 mois d’existence, étaient concernés par le contrat de performance signé à Strasbourg. Les trois autres existent en lien avec d’autres régions, la Franche-Comté pour le pôle Véhicule du futur, la Lorraine pour les pôles Fibres et Hydréos. Le budget global des pôles alsaciens s’élève à 6,9 millions d’euros. Près de 1 000 projets ont été labellisés depuis 2005, contribuant à la création ou au maintien de 5 000 emplois.