Filmer le cabaret du camp de Westerbork

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Filmer le cabaret du camp de Westerbork – une bande sonore à recomposer ? Colloque Musique -­‐ disque -­‐ radio. 21 octobre 2016 Journée Mémoire musicale et résistance dans les camps

Rémy Besson, Chercheur postdoctoral de l’Université de Montréal


Harun Farocki, En Sursis [Aufschub], 2007, tc: 10:58 à 13:45 min.


Comment peut-­‐on écouter les images mueMes tournées à Westerbork ? Une réflexion sur la transparence/opacité du médium cinématographique.


Une intuiUon qui s’inscrit dans un moment historiographique

L’histoire par la photographie


En meMre plein les yeux et rendre Apocalypse irregardable En meCre plein les yeux  : c’est le contraire exactement de donner à voir. Mais l’appareil télévisuel, nous en faisons l’expérience chaque jour, foncUonne à la surenchère et à l’autosaUsfacUon  : nous avons réussi à placer huit cents plans par épisode, nous avons reconsUtué les couleurs, nous avons ajouté les sons absents des images originales… Autant dire que les documents de l’histoire deviennent des confeMs dans un montage qui veut ressembler à un feu d’arOfice d’images. George Didi-­‐Huberman, Libéra8on, 22/09/2009.


« J’ai décidé de préparer ce matériau. J’ai décidé de ne pas uUliser d’autre matériau, de montrer à chaque fois la séquence enUère, sans coupe ni ajout. (…) j’ai décidé de faire un film muet. J’ai décidé d’éditer ces images, rien de plus. Je voulais présenter le matériau de telle sorte qu’il invite le spectateur à une lecture personnelle. »

Farocki Harun, « Comment montrer les vicUmes ? », Trafic, n. 70, été 2009, p. 24


Harun Farocki, En Sursis [Aufschub], 2008, tc: 10:58 à 13:45 min.

Extrait des archives correspondant

hMps://www.youtube.com/watch?v=uZpjWVzMnUI



En fait la force du film de Farocki ne réside pas dans l’absence de médiaUon, soit le fait d’avoir donné à voir l’archive sans la monter (forme de transparence), mais sur une médiaUon plus subUle que les autres qui prend en compte la matérialité du support d’origine.

… Ceci étant dit revenons-­‐en à la musique


Programme du cabaret de Westerbork Bunter Abend, mars 1944

Musique: Willy Rosen et Erich Ziegler Mise en scène: Max Ehrlich



Programme du cabaret de Westerbork Bunter Abend, mars 1944


TranscripUon des notes du réalisateur (1944)

Document transcrit dans Hafer, Edward. « Cabaret and the Art of Survival at the Transit Camp Westerbork ». Dans Amaury du Closel (éd.). Colloque: Musique et camps de concentra8on. Bruxelles: Conseil de l'Europe, 2013.


Johnny and Jones

Westerbork Serenade, 1944

Willy Rosen-­‐Potpourri, 1944


Constater une impossibilité à synchroniser le son et l’image du point de vue de l’approche généUque… … conduit à poser la quesUon en termes d’appropriaUon soit d’une étude de la circulaUon a posteriori


CréaUon d’un effet de synchronisaUon a posteriori

Musique de Johnny and Jones, enregistrée en 1944 Images de Breslauer, filmées en 1944 Carton de Breslauer, rédigés en 1944


Musique de Johnny and Jones, enregistrée en 1944 Images de Breslauer, filmées en 1944 Carton de Breslauer, rédigés en 1944

Mais la musique n’a pas été enregistrée à Westerbork Mais le rythme des séquences n’a pas été respecté Mais les cartons n’ont pas été intégrés au montage de l’époque D’où l’usage du terme « effet » Est-­‐ce la meilleure façon de faire entendre quelque chose à parUr des images mueMes tournées par Breslauer?


CréaUon d’un effet de synchronisaUon a posteriori (2)

Extrait de Volker Kühn, Totentanz – KabareK hinter Stacheldraht, 1991


Herr Frölich und Herr Schön Franz Engel et Max Ehrlich

Proche du respect du rythme des séquences issue de l’archive Son correspond au numéro joué :


Herr Frölich und Herr Schön Franz Engel et Max Ehrlich

Mais impression sur la nature des images (pas faux, mais pas complètement vrai) Et surtout absence d’informaUon sur l’origine de l’enregistrement uUlisé… Ce n’est pas…

Mais plutôt

Enregistrement de 1937 Par Franz Engel et Fritz Wiesenthal

un enregistrement postérieur à la deuxième guerre mondiale (?) Par ex. A. Waechter & Tanja Golden, 2015


CréaUon d’un effet de synchronisaUon a posteriori (3) Assumer la désynchronisaUon

Extrait de Volker Kühn, Totentanz – KabareK hinter Stacheldraht, 1991


CréaUon d’un disposiUf filmique pour introduire l’archive

Archive visuelle : Proche du respect du rythme des séquences issue de l’archive EntreUen filmé : Louis de Wijze (ancien interné de Westerbork déporté à Auschwitz en 1943) Conséquence: Chanson interprétée au début des années 1990 pour le film Volker Kühn arUculée avec les images tournées par Breslauer en 1944 Louis de Wijze Auteur en 2001 d’un CD de reprises de Humor und Melodie de Willy Rosen, 1943


Comment peut-­‐on écouter les images mueMes tournées à Westerbork ? Au lieu de viser à tout prix la synchronisaUon entre musique et images (quête d’un effet de transparence), assumer la créaUon d’une médiaUon basée sur le constat d’une forme d’impossibilité (résistance médiaUque). C’est la meilleure façon de faire entendre aujourd’hui quelque chose à parUr des images mueMes de Westerbork tournée en 1944.


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