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III. LES RISQUES INHERENTS AU FINANCEMENT DES SECTEURS D’ACTIVITES CULTURELLES

En complément des appuis apportés par les pouvoirs publics, il convient de relever que certaines sources de financement marchandes répondent à une obligation imposée par les pouvoirs publics aux différents opérateurs privés. Par exemple, les chaînes de télévision dans la plupart de pays européens se sont vues imposer, sous diverses formes, des obligations d’achat de productions nationales ou régionales. Ces sources de financement peuvent parfois être déterminantes pour l’économie d’un secteur, comme c’est le cas de la production cinématographique et audiovisuelle en France.

III. LES RISQUES INHERENTS AU FINANCEMENT DES SECTEURS D’ACTIVITES CULTURELLES

La perception des risques par les financiers non spécialisés dans les secteurs d’activités culturelles génère une forte méfiance vis‐à‐vis des entreprises de ces secteurs. Cela explique leur réticence à accorder des financements en l’absence le plus souvent de sûretés matérielles. L’analyse ci‐après ne prétend pas recenser tous les risques que présentent les activités et les entreprises culturelles, mais elle permet d’identifier les plus importants.

1. CARACTERISTIQUES GENERALES

De manière générale, trois grands types de risque peuvent être décelés dans les secteurs d’activités culturelles.

Le risque commercial

Le principal risque associé aux activités culturelles provient de la difficulté de prévoir le succès commercial d’une œuvre. Le risque commercial est expliqué par l’impossibilité de prévoir l’accueil que le public accordera à une production culturelle. Ce risque introduit un élément aléatoire important dans l’estimation des recettes futures générées par une activité culturelle et n’est pas de nature à rassurer les financiers. Cela explique le choix opéré par les financiers spécialisés dans ces secteurs, qui privilégient certaines formes de financement spécifiques (préventes, minima garantis, subventions, etc.). Même dans ce cas, les préfinancements acquis dépendent de la capacité de paiement de l’acheteur (salles de spectacles, chaînes de télévision, distributeurs, etc.) et des bailleurs de fonds non marchands. Il existe donc un autre risque lié à la solvabilité de ces derniers qui doit être analysé par le financier.

Le risque lié à la pérennité de l’entreprise

Le plan d’affaires d’une entreprise culturelle en phase de démarrage est complexe à évaluer, car il est difficile de juger de la réceptivité des produits culturels auprès de la clientèle cible. Par contre, lorsqu’une entreprise est active depuis quelques années, l’analyse de sa pérennité peut s’appuyer sur les paramètres objectifs liés à sa structure financière et à ses résultats passés. Or, les entreprises culturelles, en dehors des grands groupes intégrés, sont pour la plupart et dans presque tous les secteurs et pays, des PME avec une base financière faible et une insuffisance chronique de fonds propres. L’incapacité d’attirer des fonds propres conséquents fait que les financiers sont souvent confrontés à d’importants risques de pérennité et de défaillance de ces entreprises.

Au‐delà de la structure financière, la pérennité de l’entreprise culturelle peut‐être menacée par la rupture des liens d’affaires avec les principaux fournisseurs de contenus (écrivains, chanteurs, scénaristes, producteurs, etc.) et/ou l’incapacité de découvrir de nouveaux talents et de renouveler son portefeuille. Par exemple lorsque la majorité des revenus sont générés par quelques auteurs ou fournisseurs de contenu, le départ d’un seul peut entraîner une baisse importante du chiffre d’affaires et, à terme, menacer la survie de l’entreprise.

Le risque lié à la gestion des droits et le piratage

La plupart des œuvres culturelles sont soumises à des contrats de cession de droits entre les différents intervenants : du créateur jusqu’au diffuseur final. Ces contrats sont à la base des interventions des apporteurs de fonds qui se couvrent par le biais de nantissements, de cessions ou d’hypothèques des droits d’exploitation et/ou sur les recettes futures.

A titre d’exemple, si le contrat de cession des droits de l’auteur au producteur est frappé de nullité, pour une raison ou une autre, c’est l’ensemble des contrats d’exploitation et de nantissement consenti par le producteur à des tiers (distributeurs, diffuseurs, financiers, etc.) qui ne pourra plus trouver d’application. Il est donc indispensable de minimiser le risque juridique lié à ces différents contrats, par le biais d’une expertise légale appropriée. Par ailleurs, les entreprises culturelles se voient souvent confrontées à une spoliation de leurs droits sur les œuvres par le biais du piratage et elles se trouvent dans l’incapacité de rentabiliser leurs investissements alors qu’il existe bel et bien un marché pour ces œuvres. Dans de nombreux pays en voie de développement, le piratage freine les investissements dans les secteurs d’activités culturelles ou confine celles‐ci à une dimension purement informelle sans perspective de développement économique. Ce risque, qui ne peut être combattu que par la volonté des pouvoirs publics avec l’appui d’organismes internationaux, est sérieusement pris en compte par les financiers qui sont d’autant plus réticents à financer des entreprises culturelles.

2. LES RISQUES ENCOURUS PAR LES INVESTISSEURS EN FONDS NON MARCHANDS

Les apporteurs de fonds non marchands ‐ secteur public, mécénat, fondations, etc.‐ ne sont pas à la recherche de rentabilité pour leurs investissements. Les apports ne sont pas tributaires de la rentabilité qu’ils génèrent et sont assez couramment apportés à fonds perdu. Ce sont ces ressources à but non lucratif qui permettent d’assurer l’équilibre financier (voire la rentabilité) et la survie des différents acteurs culturels dans les secteurs d’activité où les recettes marchandes ne sont pas suffisantes. Les risques encourus sont de deux ordres : o risque sur la capacité de l’entreprise à trouver les cofinancements nécessaires lui permettant d’équilibrer le financement du projet et/ou du développement de l’entreprise ; o risque sur la capacité de l’entreprise à honorer ses engagements, notamment en matière de fabrication et de livraison des biens et/ou services financés. Dans la pratique, ces risques sont évalués et pris en compte lors de la décision d’octroi de financement par les apporteurs de fonds non marchands.

3. LES RISQUES ENCOURUS PAR LES INVESTISSEURS EN FONDS MARCHANDS

Les apporteurs de fonds marchands, banquiers, investisseurs professionnels, etc. sont soumis aux mêmes contraintes de rentabilité que dans les autres secteurs de l’économie. Les risques encourus prennent différentes natures selon que l’on se situe dans la production de contenus ou dans les secteurs de la commercialisation et des industries techniques. En regroupant les principaux secteurs en fonction de leur financement, on peut distinguer les risques suivants :

Risques d’investissement dans les entreprises de production de contenu

La caractéristique des activités des entreprises de production de contenu (producteurs cinéma et audiovisuel, producteurs de spectacles, éditeurs de livres et de musique) est qu’elles peuvent être appréhendées et analysées comme des activités de capital‐risque. Chaque produit est un prototype et le succès commercial est très difficile, voire impossible, à prévoir à l’avance, a fortiori, quand les moyens de promotion ne sont pas massifs et la taille du marché relativement modeste. Sur l’ensemble des œuvres produites, seulement un nombre réduit trouvera un marché significatif et pourra être rentabilisé. L’entreprise va donc produire des prototypes, dont un, de temps en temps, se révélera être un succès commercial qui va permettre d’assurer une rentabilité suffisante à long terme. Cette rentabilité ne peut pas être assurée, ni même espérée, pour chacun des « prototypes » produits ou commercialisés, mais elle sera recherchée plutôt à moyen et long terme. A l’instar des sociétés de capital risque, les entreprises de production de contenu ne peuvent se pérenniser que si elles sont capables de générer à terme un certain nombre de « projets à succès » permettant de rentabiliser la production de l’ensemble de projets financés.

Risques d’investissement dans les entreprises du secteur des industries techniques

Les entreprises du secteur des industries techniques du cinéma et de l’audiovisuel, de la musique et du livre (prestataires de matériel technique : laboratoires, auditorium, imprimerie, unité de reproduction…) se

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