No 01 l'Ecole primaire, 01 novembre 1883

Page 1


N• 1.

Sion, 1 novembre.

1883-84.

ORGANE DE LA.

«SOCIÉTÉ VALAISANNE D'ÉDUCATION • LA RENTREE DES CLASSES Elle vient d'avoir lieu pour toute la jeunesse de nos écoles primaires. • Maîtres et maîtresses, petits garçons et petites filles , tous, à l'appel de la vieille cloche matinale, se sont rencontrés comme un paisible troupeau rentrant au bercail, sur le chemin si connu qui conduit ... à l'école. Le seuil en a été franchi par les uns avec joie, mais par beaucoup - quoi de plus naturel? - avec un gros soupir. n y avait des visages gais, mais aussi que de mines allongées! Aux uns , il a paru doux de reprendre, après les longs jours d'une vie jnactive et décousue, un travail régulier. Comme l'homme se lasse de toutes choses, ils se sont lassés même du repos et du plaisir. lis ont fait l'expérience du vieux proverbe: • Toujours du plaisir n'est plus du plaisir. • Peut-être à quelques-uns leur sera-t-il revenu à la mémoire ce vieux et bon quatrain, que tout père devrait faire apprendre à ses enfants: L'âme est un feu qu'il faut nourrir Et qui s'éteint, s'il ne s'augmente.

Aux autres, - à ceux qui ont longuement et joyeusement respù·é l'air des champs, des bois, des hameaux alpestres ou des pâturages élevés, - à ceux qui ont largement et saù1ement profité de leur liberté - il a paru au contraire singulièrement triste d'aller reprendre sa place ce matin sur le vieux banc scolaire, devant ce tableau noir, ce maître sévère, entre ces quatre murs froids et nus, sans lierre ni guirlandes, près d'une collection de livres et de cahiers, loin des bois, si verts encore, loin des monts, des oiseaux, de l'abeille qui bourdonne en liberté ! ... Oui, c'était dur, pamTes amis! aussi plus d'un regard se perdait-il ce matin, au travers de la crois~e ouverte de la classe, dans le grand ciel bleu, gagné par une distraction aussi charmante que dangereuse, par une rêverie pleine de mélancolie et qu'achevait toujours ou le rappel du maître ou llll long et doulourellx SOllpir. Trève, cependant, à ces inutiles gémissements 1


2 Allons, jeunesse! du courage 1 La vie ne peut pas être un perpétuel amusement. Ce serait ennuyeux! Pour toi, comme pour ceux qui t'ont précédée dans la carrière, s'ouvre et recommence aujourd'hui le chemin du devoir. Il a parfois ses âpres pentes. Les premiers pas sont souvent durs; mais il a aussi ses fleurs, ses saines joies et ses glorieuses récompenses. Jeune écolier 1 Regarde le but: devenir par ton savoir et ton caractère un être utile à la société. Songe aux bim1faits dont tu es entouré: joies et bontés de ta famille, bienveillance de tes maîtres, instruction, protection, jouissances de toute sorte. Rendstoi digne de tout cela. Travaille joyeusement 1 Gravis avec entrain les pentes parfois difficiles de la science. Sois bon, aimable avec tes compagnons de route. Sois prévenant et respectueux à l'égard de tes maires et de ceux qui ont reçu la chatge, parfois bien lourde, de te conduite. Allons, jeunesse 1 ne soupirons plus! ne nous plaignons pas 1 Sois heureuse de tous tes priviléges! sois-en reconnaissante tous les jouts 1 Travaille avec joie, le cœut en haut, près de Dieu et les regards dirigés en avant! Un mot encore! dussions-nous, s'ille faut, mettœ le doigt entre I'adwe et l'écorce. Nous entendons souvent des plaintes parfois très justi11ées, d'une part ptovenant des maîtres sur le manque de zèle des parents dans la surveillance et l'éducation de lents enfants, ct d'autre pal't, provenant des parents, sur tout ce qu'il faut faire enlœr dans Ja mémoire de leurs enfants, sur les programmes indigestes, sur les tâches à domicile et bien d'autres choses encore. Quoi qu'il en soit du bien ou du mal fondé de ces plaintes, nous avons ici un souhait à exprimer: c'est que, maîtres, parents et élèves, nous usions tous, les uns et les autres, d'un peu plus de bon sens, d'esprit d'amour, de zèle dans l'accomplissement de 110s fonctions respectives. L'école ne peut rien sans la famille et la famille aujourd'hui ne peut rien sans l'école. Aux parents iJ appartient d'aider les maîtres, et aux maîtres de savoil' comprendre aussi les parents. De leur accord, dans un esprit de sagesse et de fermeté chrétiennes, dépendent l'avenit et le bonheur de notre chère jeunesse. A elle - dans ce jour de rentrée scolaire où l'écolier reprend son sac et le magister ses livres -- à elle nos vœux les meilleurs 1 Puissent nos écoles donner au pays, qui en a besoin, une jeunesse forte, instruite el moralement bien trempée, une jeunesse qui sache rester jeune, bravant les étouffements d'un pédantisme morbide, comme les ennuis des désenchantements précoces, une jeunesse qui ait des horizons largement ouverts, des enthousiasmes

-

s

dm·ables et des convictions indiv~duelles, et pour laquelle le mot de travail soit synonyme de celm d.e bon~eur. . . C'est dans cet espoir que nous d1sons a tons, ceux qm ensetguent comme à ceux qui sont enseignés: -: B~n ~o~tragc! • (Arrangé d'après la N. Feuille daVIs de Vevev.)

,.

"

1

EN<JORE L.t.. LE<JT1JRE A différentes reprises, il a é~é q~e~tion ~e la lecture ~a~s l'Ecole primaire; ce sujet y a, éte t~aite a.u pom.t de .v~e de l utilité comme de l'importance qu on d~It y aJouter , mru.s il ~e semble qu'on en a négligé le côté pratique, s?r lequel Je rn efforcerai d'attirer l'attention dans ces quelques lignes. En lisant, l'année dernière, le compte-rendu des .examens pédagogiques, je pus constatel' que notre c~nton ~vait obtenu des notes sensiblement meilleutes que les annees precé~en~es, .que le nombre d'illettrés, assul'ément t~op gr~nd encore, dtllll~U~tt gl'aduellement que même nous n occupiOns plus le ~er~er rang1 comme cela' nous était déjà arrivé; ma~s je ~us auss1 t~~s éto?ne de voir la majorité de nos jeunes gens n obterur que l~ 3 et ~erne souvent la 4m• nole pour la lecture. En allant aux mfotmatwns, j'appris bientôt qu'on exige autre chose q!!'u!le lecture lo~rde~ fatigante, monotone, incompréhensible aussi bien pour celm qm lit que pour ceuxqui écoutent. Et cepend~nt la. plupa~t des enfants de nos classes en sont encore là. Lisent-ils d1stmctement, couramment, suffisamment haut, en observant.les paus~s prescrites, et savent-ils ensuite répéter quelques Idées , mem.e décousues, qu'on est conver.m d'appele1: comp,te-rend_u ~ Je s1gnale cette faiblesse et j'avoue, a ma confusion, quelle existe également dans ma classe · mais je suis bien résolu de la combattre de .toutes ~es forces, ca{· j'ai l'intime conviction qu'ave.c une ~ellleure direction et des procédés plus ~·ali?nnels, nos éleve~ obtiendront des résultats beaucoup plus satlsfatsants aux prochams examens. Parmi les causes de cette faiblesse, il en est que toute ~a bonne volonté de l'instituteur ne réussira jamai~ à écarter; Il e~ est d'autres, qu'on ne peut faire disparaître qu'a force de luttes. JO_urnalièœs, dont on ne sort pas toujours ~ans hle~s.ure ;. mrus .Il. Y en a aussi qu'un peu de zèle el de tact su mt pour f~rc. d1spa,ra1lJ e, et c'est de ces dernières que je demande la penmsswn cl entre· . tenir le lecteur. La tableau statistique de l'année passée porte que 945 recrues valaisannes ont été examinées ; 122 d'entre elles ont ~u la 1• note pour la lecture, tandis qu3 la note 3 a été marq~ée a 34 7 et la note 4, à 231 . Le canton de Thurgovie a présente 887 re-


4 c.rues dont 466 ont mérité la 1' note ; nous trouvons des proportions plus ~?rtes encore dans d'autres cantons. Il est facile d'en conclure !JU.11 nous reste un beau chemin à parcourir, malgré les ~rogres u~con.testables ~ue nous avons déjà réalisés. B~en . ~es mstltuteurs Ignorent peut-être l'importance toute part1cultere de la not~ obtenue pour la lecture. Supposons qu'un Jeune hot?me ne reç?1V~ que la 4• note pour cette épreuve ; selon toute vraisemblance, 1l n aura probablement pas une meilleure note pour les. autres, se fût-iJ même assez bien préparé: car la lecture est cons1dérée comme la base, la clef de toute autre connaissance ct de mê~e qu'une bonne lecture prévient avantageusement e1~ faveur dun Jeune homme , une mauvaise lecture donne mal à croire dt> ses autres connaissances. Aussi, au dire des inspecteurs, un grand nombre de nos recrues de cette année eussent obtenu d~ notes supérie~res , soit en histoire, soit en style, peut-être meme en calcul, SI elles avaient mieux su lire. Il. est d,onc ~e toute nécessité d'apporter plus d'attention à cette matière d enseignement. De sept à huit ans, la plupart des enfants parcourent les tableaux .de le?ture et., dès 1~ deuxième année qu'ils fréquentent la ~la~se, Ils dmven~ les sa~orr assez bien pour pouvoir commencer a l!l·~ dans leu: livr~. D où vient.alo:s q~e p~ndant les sept ans qm s écoulent JUsqu a leur émanc1patwn, Ils n arrivent pas à une bonne lecture? A mon humble avis, nous allons trop vite nous voulons que.nos élèves arr~vent trop tôt à une lecture co~rante et nous ~éghgeons la syllabisation, exercice presque indispensable pour amyer à une arti?ulation distincte. Que remarque-t-on quand cet ~xerClce a été D;éghgé ? Les enfants hésitent à chaque mot de pluste~rs syllabes, 1ls essayent à divet·ses reprises de le prononcer et le hsent à tout hasard, heureux même s'ils n 'y substituent pas un autre mot. ll en résulte une lecture inintelligible désagréable et bien peu profitable. ' Tout autre serait la résultat, si les élèves syllabaient souvent même en chœur par une division ou par un banc, jusqu'à ce qu~ le partag~ des mots en syllabes lem· fût devenu facile et qu'ils pussent aisément et sans hésitation déchiffrer les mots. ' Après deux années passées dans la division élémentaire les enfants montent généralement dans la classe intermédiaire · ~'est alors que la lecture devient une véritable gymnastique inLellectu~~e po~r eux: Pendant trois années, on les exerce de telle façon qu !ls. arn~e!!L a une lecture courante, mécanique si vous voulez, m8IS mtt>lhgtble .à t~us ceux qui l'entendent, parce que toutes les syllabes sont artJculees selon leur valeur. les mots bien prononcés et toutes les pauses observées.

-

1

5

-

Il me semble que nous n'accoutumons pas assez les enfants à lire à haute voix, de manière à être facilement compris par toute la division, et cependant c'est là le plus sûr moyen de bien faire articuler. C'est aussi l'avis de l'expert fédéral qui vient d'examiner nos recrues, et qui a même demandé si la lecture à haute voix n'est pas en usage chez nous. Beaucoup de nos jeunes gens en effet lisent comme s'ils avaient peur de faire entendre leur voix, et ils mettent ainsi à la torture ceux qui les écoutent. IJes élèves de la division intermédiaire font le plus souvent la lecture avec ceux de la division supérieure; pour eux le compterendu est presque nécessairement, mais aussi très-avantageusement remplacé par un exercice de conversation sur le morceau qui a été lu. Mais pour cet exercice, il faut absolument exiger l{Ue les enfants fassent entrer la question dans la réponse et que leurs phrases ne soient ni tronquées ni incorrectes. Les élèves de la division supérieure sont tous censés lire trèscouramment, c'est pourquoi on les exer ce suffisamment (au moins une heure par jour) à l'accentuation , afin qu'ils lisent avec expression, avec âme et s'accoutument à repr oduire correctement les principales idées renfermées dans le morceau qu'ils ont été appelés à lire. Si, jusqu'à leur émancipation de l'école primaire, nos jeunes gens arrivaient à une lecture aisée et correcte, ils y prendraient un véritable plaisir, et comme alors ils emploieraient les longues soirées d'hiver plus utilement qu'en jouant aux cartes ou courant les rues l Bientôt le petit c~rcle de leurs idées s'étendrait, ils s·'amasseraient, moyennant quelques bons livres, de véritables trésors de connaissances et d'éducation, et alors ils apprendraient à estimer les cours de répétition. De plus leur moralité et le bon ordre de la commune n'auraient qu'à y gagner. Je vais essayer de mettre ces quelques conseils en pratique dans mon école et voir si, d'ici à la fin d'avril prochain , je n'arrive pas avec mes élèves, à un résultat plus satisfa~sant que celui que j'ai obtenu jusqu'à présent.

LA MISSION ET LES DEVOIRS DE l'INSTITUTEUR Lors de la réunion, le 4 septembre dernier, à Fribourg, de la Société fribourgwise d'Education, S. G. Mgr. Mermillod, évêque de Lausanne-Genève, qui rehaussait l'assemblée de sa présence, a prononcé un remarquable discours que nous ne pouvons résister au plaisir de reproduire ci-après. Les éducateurs de la jeunesse seront certainement bien aises d'entendre ici un écho de


6

~!Ji.~~~ev~~;;mustre prrlat leui·

retraçant leur belle mission et

C'est pour moi une joie b' d d' . et d'applaudir à vos travaux te~an~~~e asstst';[ à votre assemblée annuelle passage qui m'a frappé: j'ai.~u ue rapport. e yotrc président, il y a un que vou~ avez reçu a votre ber2eau~~u~ êtr~ nesd~ une a~s~mbl~e populaire, Ml!- pensee s'est reportée à une ap erne une on~me democratique. sait au Grütli dans un bapt~me ~~~elépoque lorsque la liberté suisse nais.. Mais ce n'est pas assez . il faut u atrc sous e regard de Dieu. pour la cause que vous ave~ entre ~~core marcher en .avant avec courage et ~esdames les institutrices, une ~:~~d Vou~ ayez, Messieurs les instituteurs DlaJS plus grande encore dans les e missiOn,, grande en tous temps p_renez ~es mains de la famille le. tempsl troubles o~ J?Ous vivons. Vou~ c1pes qu1 font les hommes ui 1 Jeune en ant pour lm mculquer les prindes défaillances. C'est là ~~ noebfard_en_t contre les séductions et le relèvent et honorez la patrie. e miSSion par laquelle vous servez l'Eglise . • Si l'instituteur peut faire tant d b" . . desorganiser la fami lle, ruiner les ~r ten, tl peut ausst, par son enseig:nement, cadt-nce. Vous êtes comme on l' oyances, et amener le pays a la dépo_ur la résurrection' de lusieurs a dtt de Not~e-Seig~eur, pour la ruine ou sCignement aura ·néccssfïrement .s Labneutraltt6 est Impossible; votre enenfanrs vous sont confiés. les pareu~~ vgns ou ses IJ?au vais résultats. Des V? US; _l'~glise ne demandè pas mieux us 1es conduisent et se reposent en beué~ultJon. Sous tous ces regards etque ~e vous ~onner son concours et sa de faU"e des hommes, de former des cb~~~i~~~palhtes, vous avez la mission 1 Il Ya des dangers con tre les 1 · tre. le d~gotlt de votre condition ~é~itf! ~eux dvous prémunir. D'abord congrace, atmez votre vocation · e mo este. Je vous le demande en Il Ya d'los toute âme des he~~~~sàeur~ des plus h?norables de l'ordre social. mom~nts où il vous semble que vous ~~stess~ et d accablement. Il Y a des ~~s decourager. Savez-vous ce u'il es meC?nnu~. Alors ne vous laissez c _est de devenir des saules pleu~eurl de pluÏ a cramdre pour des hommes "f fatt _que d'ombrager des tombea .. es sau es pleureurs n'ont jamais rien pes~Imistes ne font jamais rien. il fx. Gardon~-n_ous du pessimisme. Les et 1ensen:tencer, a dit de TocqÙevill:ut être optlmtste pour tracer son sillon 1 . Ah l ~1 est ~ien facile de criti ue · 1 . rien~ mais se litrer au travail a~e r es a!ltres, qua~d SOI·même on ne fait se l~ts~er arrêter par les épreuves ~t Iles saJ!ltes énergies. ~u devoir et ne pas méritOire. Si à l'heure présente vous ~~ mecomptes,. voila qui est fécond et vous que la récompense vous viendra es quelquefois méconnus, souvenezenfants dont vous aurez fait des ho plus tard; elle vous viendra dans ces pense_le travail et le sacrifice. mmes, et plus tard de Dieu qui récom• Dites- vous donc : Je suis en ce mo nd d que Dieu m'a donné un terrain ù. . e. ans Uf!e place d'honneur • parce semence. Plus tard la semence oerl:edefriche, OÙ.Je laboure et où je jette la Aujour~'bui vous c'reusez le sill!n v ra, e~ la mOJsso_n tombera sons la faux. les esprt.ts et les âmes. Ne vous ta'iss~~s YJeJ~z le pam dont se nourrissent m_entanes. Jeanne d'Arc disait à ses pas. c?urager par des échecs moDieu ~onnera la victoire. Appliquez- guemers · Les bomt:nes batailleront et travailleront et pieu fera fructifier 1 ;~~~r~e;~i pensée et dttes: Les bommes 1. .• En second heu écartez de votre . . setgnemeJ?tS. L'œil des enfants est er~~~ ce ~~~ PO!J.rraJt contredire vos enet des mattres, il deyine le côté tafbi ~ cace, Il V~Jt les défauts des parents exemples doivent toujours corrobore: e cel ux QUI sont autour de lui. Vos vos eçons. Donnez autour de vous 1

t

7 l'exemple d'une vie franchement chrétienne et féconde en œuvres. Je vous recommande, en particulier, d'éviter les lectures dangereuses ou frivoles· Croyez qu'en li>ant certains livres qui ne sont pas positivement mauvais, vous risquez néanmoins de voir se dissiper le parfum de votre âme, les saintes énergies de votre foi . Un saint évêque qui avait traversé les épreuves de la Ré\•olution et que j'ai connu dans sa verte vieillesse, me faisait observer qu'i l n'avait jamais lu aucun ouvrage qui ne Jüt positivement bon. Par la, me disait·il, je ne me suis privé d'aucune lumière et je me suis épargné bien des orages. C'est que certaines lectures portent le trouble dans les âmes, énervent les volontés, inspirent le dégoû.t de la condition modeste où Dieu nous a placés. , Puis, tenez. vous en garde contre certains préjugés. Il en est un sur lequel j'appelle votre attention. La science, vous dtra-t-on. peut remplacer la religion. N'en croyez rien. Ab l sans doute, la science a fait de grands progrès. Le travail, béni par Dieu, est d'une fécondité admirable. Nous en avons un exemple dans cette belle exposition nationale qui fait honneur à notre patrie. Tous les siècles sont venus donner leur travail, leurs conquêtes et leurs découvertes merveilleuses: Nous Lénéficions aujourd'hui de ce travail accumulé deg siècles. • Dieu ne nous défend pas d'aimer la science et de nous en servir; il ne nous demande que d'observer la hitlrarcbie des choses; cette hiérarchie est respectée, lorsque l'âme domine le corps, et que Dieu domine les âmes. En dehors de cette loi divine, c'est l'anarchie. , Nous ne sommes pas l'ennemi de la science. Nous savons trop bien, suivant le dire de Bacon, qu'un peu de science éloi gue de la religion, et que plus de science y ramène. Voyez Voltaire épuisant, au siècle passé, tous ses quolibets contre la Bible, parce qu'elle faisait créer la lumière avant le soleil. La lumière sans le soleil, qu'est· ce que cela peut bien être 'r Et tous les incrédules d'applaudir. Mais la science a progressé, et aujourd'hui tous les savants savent que la lumière est tout à fait indépendante du soleil. Demain la science fera un nouveau progrès et fera tomber une autre objection de l'incrédulité, et les générations qui viendront après nous pourront rire d~s moqueries de nos libres penseurs. Ainsi, entre la science et la foi, il n'y a pas d'opposition, d'antinomie, mais un accord parfait, et si par moments cet accord parait troublé, attendez que la science ait fait encore un pas et l'accord sera rétabli. 1 Et par qui la science s'est-elle répandue dans le peuple, sinon par l'Eglise ? Notre-Seigneur a dit à ses apôtres : Allez, enseignez toutes les nations; les pauvres seront évangélisés. Lui seul s'est occupé de faire instruire les peuples abandonnés. Il y avait, dans les nations policées, des académies pour les grands et les riches; mais rien pour les pauvres. Dieu a envoyé ses apôtres, qui ont parcouru la terre et l'ont évangélisée, et bientôt on a vu les écoles du peuple naître à l'ombre des cathédrales, dans les couvents et dans les presbytères. Le prêtre a été le premier instituteur. Quand il n'a pu suffire à la tâche, il a créé l'instituteur. il a créé ces ordres religieux qui font vœu d'instruire le petit, l'enfant du pauvre. Le Bienheureux de la Salle a quitté sa stalle de chanoine pour donner des leçons à d'humbles enfants, et l'Eglise l'inscrira pour cela dans le livre des Saints. Benoit XIV a dit qu'après le péché, le plus grand mal, c'est l'ignorance. C'est pourquoi, nous jetons ce cri: De la lumière 1 Encore de la lumière 1 L'humanité demande des clartés qui illuminent son berceau, qui dirigent ses voies et qui se projettent jusqu'au dcllà du tombQau. Par conséquent la religion n'est pas hostile à la science, elle en est t'auxiliaire. • Fuyez ceux qui veulent semer la méfiance entre l'instituteur et le clergé, qui travaillent à amener des séparations, à exciter de jalouses convoitises.


9

8

publique comme aides. Nous f~rons seulem.en_t remarque! à t?os lecteurs que pour ce qui a tra?t a':' ~alcul, ~c:tt, une modificat~on a été apportée à ce qui se pratiqumt JUsqu 1c1. En e~et ,_ au heu de poser les problèmes en comD?ença~t pae. le pl~s dll1imle et de laisser aux recrut ables la faculte de n en faire qu un seul dont la solution satisfaisante devait lui donner la note en reg~rd, l'on a débuté par les sujets les plus simples don.nant s~ccess1ve~ent les notes 4 3 2 1. Pour a voh· la note inféneure , 11 suffisait de la solution' d~ p'remier problème, ~andis _que ~our l'obtention des notes suivantes, i par exemple, tl fallait avmr résol u les opérations de toute la série.

Le ~rêt~e et le ma.itre d'école ~ont faits pour s'entendre. Le prêtre a besoin de l'tnsututeur et 1! est son meilleur am1. Ils sont d'autant mieux faits pour s'entendre que l'un et l'autre sont fils de cette démocratie où fut leur berceau commun. Ils ont été élevés sur les mêmes bancs d'école; ils ont prié dans la même église, fait côte à côte la première communion. Plus tard, ils se sont séparés quelque temps pour étudier J'un dans le Séminaire, l'au:re à l'Ecole normale; mais voilà qu'ensuite ils se sont trouvés de nouveau, ils se sont rencontrés travaillant ensemble à éclairer les intelligences et à former les cœurs. Quand l'instituteur a des peine.>, où trouvera-t-il amitié et consolation, sinon sous le toit du presbytère Y • J'ajoute ce~te. parole : Tâch~z de retenir aux champs les enfants qui vous so~t. confiés; eVItez de favortser les goûts de déclassement el de cosmopoltttsm~- Quel plus grand bonheur , après tout, pour le jeune homme que de trava1ller Je champ qu'ont travaillé ses ancêtres, de vivre dans la maison où ils ont vécu et où lui-même est né. Qu'irait-il faire dans les villes Y Pour un qui réussit, combien j'en ai vus qui traînent une existence misérable. Vous savez ce que vous mangez, du bon pain, du lait véritable; dans les villes, tou~ est contrefait, même 1~ nourriture. Vous avez un air pur , le spectacle mcomparable de ces homons grandioses, de ces belles prairies, de ces forêts touf!'ues. Un. Ang.lais di~ai t und'our: C'est Dieu qui a fait les campagnes ~t le. d1able qut a fat ~ les vtll~s. ( n rit.) Emp~chez donc ce déclassement qut fatt les hommes tnstes, qm entasse dans les villes ces hommes dé. couragés et aigris, toujours tentés de bouleverser la société qui les a broyés. » Je, me résume. L~ mission de l'instituteur est belle et grande ; vous devez 1accepter sans atgreur et en accepter même les épreuves et les insuccès. Puis, prêchez par l'exemple autant que par les paroles évitez les mauvaises lectures, travaillez dans votre modeste sphère à l'alli'ance de la science et de la religion: que l'entente règne entre l'instituteur et le prêtre. L'avenir de l'humanité.en .dépe_nd._ Si Dieu ,ne vient pas à l'enfant, celui-ci fera plus tard un ouvncr mfidele a ses mattres, un père de famille déshonorant son foyer, un vieillard épouvanté au terme de son existence. • Nous ne voyons que trop dans les villes les résultats de l'éducation ~ans religion: c'est la qu'on trouve les éléments accumulés de désordre des insultes contre Dieu, et la guerre contre la société. Si vous accomplissez votre mission, la déroocrati e_touj ou~s plus chrétien?e montera de plus en plus dans cette sphère oû les drotts de Dteu sont respectes, les hommes libres et honorés et où la conscience conserve sa pureté. ' • Le vieillard de la fable disaît après avoir planté : ~fes arrière-neveux me devro_nt cetombrage. Inspirez-vous de la même pensée. La semence que vous Jetez, germera et donnera plus tard un arbre verdoyant ce sera l'arbre de la vertu et du bonheur. La Suisse a besoin de l'union de tous ses enfants pour n'être point menacée par les ennemis du dehors et du dedans. D'autres ont dit: _c'e~t le ~ou~ag~ qui fait les vainqueurs; j'ajoute que c'est la concorde qut fa1t les tnvmctbles 1 • (Longs applaudissements.)

PROBLÈMES

1.

1.

3. Un journalier a g!l-g~é. fr. (1,.~5 pend~nt les 74, JOurs ~e trava1l des mois d'avril, ma1 et JUill, et a dépense po~r sou e~tr.et1en fr. ~.15 par jour en moyenne; combien lui reste-t-Il au 30 JUill ?. . 2. Un marchand achète 147 hecto!. d'huile à 55_cen~. le Ittre. On pate fr. 125 pour le transport et fr. 3.50 par décalitre a la douane. Cot?bien devra-t-on vendre le litre pour gagner fr. 6i0 sur le rr:,~rche? t. On veut parqueter une galerie longue ~e 7,~"' et large de i.o ave~ des tablettes carrées de 0"',15 de coté, coûtant fr. L~8 chacune, quel sera le prix de ce parquet ? 11. (!,, Si 9 207 4.50 - 2l8 = Y . .. . 3. Un fabricant d'horlogerie vend iO(i, ~outres a rr. 45l!lJ?IeCe et reçott en échange du vin il fr. 60 l'hectohtre. Combten do1t-tl en recevOir d'hectolitres Y . ~- On a payé fr. i53. 60 pour 32 mètres d'étoffe ; comb1en payera-t-on , • • pour 17 1 /,"' de la même éto!Te Y t. Une commune rait creuser un étang carre de 25 de ~olé. 9uelle profondeur devra-t-il avoir pour contenir 75000 hect?htres d eau Y m. (!,, Un paysan va au marché au bétail avec fr. 2000; 11 achète un~ paire de bœufs pour fr. 759 et une vache pour fr. ~88. Que lm reste-t-il Y . 3. 5 stères de bois de toyard coùten~ autan~ que 8 stères de s~pm. Que coûtera t stèr<l de foyard, stle saprn vaut fr. 8.50 le stere? ~. Intérêt de fr. 186~3 au 6 •f. pendant ~ mo1s? 1. Si la production moyenne de la vtgne est de i,l5 h~. par are, on demande ce que rapportera une vigne rectangulaire ~esurant 58m de longueur sur 48 m de largeur, le vin étant vendu a fr. 0,75 le litre Y IV. 4. Hauteur du Jaman i879m • Léman 375m Différence : . . . . ''l r ·t 3. En combien de jours un tisserand auratl-11 fatt t 78~m de to11e, s 1 at par jour 6m ? . . . . 2. Un pharmacien achete une certame substan~e a r~tson de f_r. 60 le kilo. Il détaille cette substanl'-e dans des Lo1tes qm en cont1en!lent 4 décagr. 5 décigr., et se vendent rr. 3. 25,.cbacune. Quel béne~c~ réalise-t.-il par la vente de 150 bolles, s tl se procure les bOites vides au prix de fr. 8 le cent Y L On emploie des tuiles de 0,25m de long sur 0,17 de large pour cou-

+ + +

B%A1VIB1V8 DB8 B.BOB.VBS

En attendant que nous émettions quelques réflexions sur le résultat des examens qui viennent d'avoir lieu, nous commençons ci-après la publication des sujets de composition et de calcul ée1·it tirés du livret qu'a bien roulu nous Laisser M. Scherf, professeur à Neuchâtel, expert pédagogique qui a fonctionné en Valais avec MM. Allet et Pignat, secrétaires du Département de l'Instruction

tt. Un kgr. de café coûte fr. 2A5. Combien coûtent 5_ kgr. Y


fO

V. 4,, 3.

2.

t.

t.

2. 3. 4. 5. 6. 7.

vrir un toit à deux pans rectangulaires mesurant chacun U,m de long et 6,\!5 de large ; sachant que, en se recouvrant, les tuiles perdent les 3/ 5 de leur surface, combien en faudra-t-il pour recou· vrir ce toit 't (847 6\!5 H9 5) - i397 = 't La dépense moyenne journalière pour l'entretien d'un cheval est de fr. i. 25, pour une vache de fr. 0,95. On demande ce que cmHera pendant une année l'entretien de \! chevaux et de i5 vaches T Si 9 doubles déca!. de froment coûtent fr. l10. H. ; combien de déca!. aura-t-on pour fr. 796.H 't Un épicier a trois sortes de café, dont il fait un mélange, savoir 7 kgr. à fr. i.85; 8 kgr. à fr. 1.90; H kgr. à fr. 1.75. Combien doit· il revendre le kgr. du mélange pour gagner le 20 •;. 't COMPOSITIONS Lettre à un méder.in de la ville voisine afin de l'inviter à venir voir votre mère dangereusement malade. Letlre d'un fermier à son maître, lui annonçant que d'importantes ré· parations sont nécessaires à la ferme. La pomme de terre et son utilité. Un jeune homme ayant fait de bonnes études primaires, écrit à un chef de maison pour solliciter une place d'apprenti. Lettre à un maitre d'état pour le presser d'exécuter un ouvrage. L'arrivée d'un train. Visite à une exposition.

il y a toujours une issue pour échapper à la famine complète, de même il y a toujours une issue dans l'enseignement, quaud on sait borner ses prétentions à des résultats modestes et lentement acquis, quand on sait renoncer à l'ambition de former des hommes hors ligne et se contenter de donner à la société des citovens honorables et utiles. Toutes les expériences que j'ai faites jusqu'ici me prouvent qu'un enfant qui a le caractère droit et sincère devient un élève appliqué, el plus tard un honnête homme. C'est pourquoi j'enseigne avec plus d'espérance les enfants doués d'un caractère loyal et ouvert, et chez lesquels je vois nailre l'application. L'absence de grandes difficultés chez eux ne me décourage nullement. (L'Ecole.)

+ + +

(.A suivre.)

L'espérance doit soutenir l'instituteur. L'espérance est un sentiment bien important, car c'est elle <tUi donne du courage à l'instituteur et à. l'élève. Là où manque l'espérance, 11 n'y a point d'énergie, et parlant l'ennui et la paresse triomphent. L'espérance procède de l'épreuve. Souvent on considère une chose comme très-dimctle ou comme impossible; mais pour peu qu'on essaie de l'accomplir et qu'on persévère, elle réussit mieux qu'on aurait pu s'y attendre. Voila ce qui donne de l'espérance. Dès qu'on a fait quelques expériences de cette nature et qu'on a vu que certains résultats inespérés peuvent être obtenus, on en conclut par analogie à la possibilité de beaucoup d'autres, et l'on y travaille avec ardeur. Dans les commencements de ma carrière pédagogique, n'ayant fait que peu d'expériences de ce genre, j'étais ou trop téméraire dans mes ambitions, ou trop confiant dans mes propres forces. Je concevais de fausses espérances et j'étais souvent déçu. Bien des cas se présentaient où je ne savais plus que faire et où je n'entrevoyais aucune issue. Dans cet embarras, je m'attachai à acquérir plus de lumières sur ce point. Je me mis à observer Je jardinier et le vigneron, et je vis qu'ils tiraient de leur longue expérience leurs connaissances en matière de culture, et parvenaient de la sorte à accomplir leurs travaux avec tranquillité d'esprit et avec sécurité. Je pris en pension quelques élèves, sur lesquels j'expérimentai diverses méthodes, pour me rendre compte de ce qu'on pouvait faire et de ce qui était décidément impossible. J'espérai reconnaître par ces tâtonnements la meilleure méthode en éducation et parvenir à enseigner avec sécurité et revos d'esprit. L'homme ne peut être tranquille et se hvrer à l'espérance que quand il voit une issue aux difficultés qui l'entravent. Pour la nourriture, par exemple, s'il ne voit pas d'où elle peut lui venir, il tombe dans les soucis et le tourment d'esprit. Mais s'il voit une ressource ou un moyen de triompher, il est en repos. De même que si l'on sait se contenter de peu, quant à la nourriture,

ltla:dmes et cousells pédagogiques.

**•

Lais&ez venir à moi les petits enfants. (S.-Marc, X, U.) **.,. Qu'avant tout le maitre ait pour ses élèves le cœur d'un père.

.,.*• Quiconque

i .i

(Quintilien.)

n'a pas dans le cœur pour la jeunesse, un dévoûment paternel et maternel, n'est pas destiné au ministère de l'éducation. (Mgr Dupanloup.) Soye• des pè1·~s au milieu de vos élèv~s; ne travaillez pas pour un salaire, mais pour Je Seigneur que vous avez choisi comme Totre part. La conscience d'avoir fait du bien vaut mieux que tous les trésors du monde. (S.-Joseph de Oalasanzio.)

**'ft Aimez ces enfants, combattez sans relâche l'indifférence, la lassitude, les degoûts que leurs fautes et leurs défauts excitent si aisément ; sans fermer les yeux sur ces défauts, ni sur ces fautes, pensez à tout ce que ces enfants ont de qualités aimables; sachez leur gré de tout lebien qu'ils font et de tout le mal qu'lis ne font pas. Quels qu'ils soient, enfin, il faut les aimer. {Abbé Poullet.)

***Calculer, mesurer, se réserver toujours, ce n'est pas se dévouer, ce n'e~t pas aimer: c~ux-là .seuls aiment et se dévouent, qui ne calculent pas, qm n~ !Desurent rten, .qm donnent tout sans compter, qui disent toujours : Me votct. Ecce ego, 1mtte me: cœurs vraiment généreux, caractères nobles et seuls faits pour 1:œuvre évangéliqae,où il faut être toujours prêt au travail, courageux à la peme, et selon le mot expressif de S. Paul, livré à la grâce de Dieu, traditi gratiœ Dei, pour agir, pour secourir, pour souffrir au besoin. (Mgr Dupanloup.) *•* Aime et fais ensuite ce que tu voudras. (St-.Augustin.) . **•. Un grain de véritable foi vaut mieux qu'un quintal de connaissances htstonques, et une goutte d'amour plus qu'une mer de science. (Francke.) *** Les défauts ordinaires des jeunes maîtres et maîtresses s'lot: t • L.a ~ém!lngeai.so~ d~ parler,.~· la !rop grande activité, l'empressement, a• la legeret~, la dtsstpatwn; 4,• l'tmpattence, la dureté,la colère; 5• le dépit; 6° l~s .a~cepllons de personnes ; 7° la lenteur et la négligence; s• la pusillantmtte et la noblesse; 9° J'abaltement et le cbagrin · 10• la familiarité et l'air ~adin; tl • l'habitude de l'ironie; i~· l'inconstance'; 13• la susceptibilité, la Jalouste; la !rop g~ande concentration en soi-même ; 15• la perte du temps; 16 la presomption. (Le Vén. de Za Salle.)

!4°

JK!I!'VJ!I!'JOK C'est une vérité aujourd'hui généralement sentie, admise et déjà traduite


en pratique par le très grand nombre de;; instituteurs intelligents, que l'en· seignement, surtout celui du jeuue âge, doit être intuitif. Hâtons-nous de remarquer que les pédagogues n'enteadent pas seulement par là que Je maître doit exposer la matière des leçons de lecture. d'écriture, etc.• d'une manière intuitive, cela va de soi; mais la plupart admettent de plus la nécessité d'un vrai cours d'intuition, prenant place dans le tableau de la distribution du temps. Si quelque maître doutait encore de cette nécessité, surtout pour les classes inférieures, il prouverait que non-seulement il n'a pas fait une expérience sérieuse d'un cours d'intuition, mais qu'il n'a pas même bien étudié la nature de l'enfant. De quoi, en effet, est capable l'enfant qui entre à l'école primaire vers l'âge de six ans. en supposant même qu'il ait pa~sé par une salle d'asile? Il n'a que très imparfaitement observé les objets matériels qni l'entouraient ; la vue même, le sens le plus exercé, est peu préparée à remarquer les nuances, parfois peu distinctes, des ditrérents caractères qu'on va lui montrer. L'ouïe et le langage sont moins exercés entJore; de là des tâtonnements et les efforts inutiles de l'enfant pour rendre d'abord exactement le son qu'on veut lui faire émettre. En vain prétendriez-vous lui donner l'intelligence de toutes ces choses pM des explications nettes et claires: vous parlez à un sourd. L'enfant ne possède qu'un petit nombre de termes, relatifs à des objets concrets de son entourage. Il n'a jamais réfléchi à des mots et à des lettres ; son esprit va directement a l'objet matériel. De plus sa langue maternelle est si peu litté· raire, souvent si difTérente de celle du maitre que c'est une vrate langue étrangère. Dans de telles conditions, que devient l'enseignement? Combien de temps ne faut-il pas avant que le maître et son élève commencent à s'entendre? Ah 1que d'ennuis, que de dégoûts n'épargne pas à. son élève et à lui· même le maitre qui, continuant le procédé maternel. s'attache d'abord l'at· tention et l'affection des enrants, en leur faisant suivre un cours bien gradué de lecons. Ces exercices bien dirigés font acquérir aux élèves en un temps relativement court, tout ce qui leur manque généralement, lors de leur entrée à l'école, pour profitt-.r des leçons: des sens bien exercés, quelques idées claires et des mots pour les exprimer ; la continuation de ces leçons leur fournira bientôt des pensées, des phrases, un langage convenable et d'excellents exercices de style. Les premiers exercices sont nécessairement oraux. Les questions sont personnelles. Le maitre exige une réponse complète, qui doit fréquemment être répétée en chœur.

Si ces heureux effets ne se font pas toujours sentir, c'est, croyons-nous, que plusieurs instituteurs versent dans des erreurs qui stérilisent l'enseignement de cette branche, ou du moins en paralysent en grande partie les bons résultats. Bien que nous sachions que beaucoup d'instituteurs s'y prennent mieux, n'y en a-t-il plus qui, sous prétexte que les jeunes enfants sont incapables de raisonner, ne s'occupent que de leur proposer d'interminables lignes de chiffres, que l'on ne se donne pas même la peine de nombrer, et que les pauvres enfants doivent transcrire, additionner, multiplier, etc. Ce sont des millions, des billions, des trillions, etc., dont les jeunes calculateurs, et d'autres encore, ne sc font pas la moindre idée. Proposez à ces enfants le moindre problème de la vie usuelle, ils ne savent pas ce que vous voulez dire ct restent bouche close. Pour d'autres maîtres, l'unique préoccupation c'est la numération écrite; à leur sens, rien n'est possible en fait d'arithmétique, avant que les élèves sachent écrire sous la dictée tous les nombres entiers et décimaux. Il en est d'autres qui euseignent soigneusement chacune des opérations fondamentales, ainsi que les procédés à sui vre, et qui négligent le raisonnement des problèmes. Posez une question à leurs élèves, leur unique souci, c'est de découvrir la nature de l'opération à effectuer. Dites-leur : J 'avais 500 fr. ; j'en ai dépensé la moitié : combien me reste-t il? Une soustraction ! s'écrieront les uns; une addition! vous répondront d'autres. Il est enfin des maitres qui exigent de leurs élèves, avant le temps, des raisonnements complets. Leurs disciples ne manqueront jamais de débuter par des si et des lorsque; mais trop souvent il arrive que, perdus dans leur interminable phrase, ils embrouillent les choses les plus simples ; ou si leur bon sens parvient à se faire jour, ce n'est pas sans malmener l'Udemcnt leur phraséologie stéréotypée. (Ecote catholique). •

lill •

CHRONIQUE ET AVIS SCOLAIRES

EXERCICE PRÉLœuu.mE.

Conférences. - M. le président de la. Société valaisanne d'Education

Nous commençons notre cours par un entretien où le maitre est supposé en présence de tout jeunes enfants nouveaux venus à l'école.

met à l'étude pour les conférences d'instituteurs de l'année scolaire 1883-84 les deux sujets suivants auxquels on ne éijturait contester le mérite de l'actualité et de l'à propos en ce qui nous concerne. Les voici: 1. Quelle est l'importance du calcul en général et spécialement du calcul • mental dans les écoles primaires de notre canton, et comment peut-on en rendre l'enseignement à la fois attrayant ct efficace ? 2. Quelle est 1° la part de l'histoire nationale et de l'instruction civique à l'école primaire ; 2• l'infiuence que ces deux branches peuvent exercer sur la vie, et 3° la manière de les enseigner avec fruit. Art. 3:1 de la loi scolaire. - Ensuite d'une demande d'interpréta·

Enseignement de l'arithmétique. Aucun de mes confrères ne me contestera sans doute que l'arithmétique est, parmi les branches du programme des écoles primaires, une de celles qui exercent la plus puissante influence sur le développement intellectuel des élèves.


15 tion, le Conseil d'Etat a estimé que dans le logement auquel a droit le per sonnel enseignant primaire, qui n'est pas domicilié dans la commune, sont compris les meubles meublants nécessaires. Suppléments. - Nous commencerons la publication en supplément, avec un prochain numéro, du remarquable rapport que l\L Kœhl, l'auteur de notre excellent recueil de chants, a lu à l'assemblée générale du 26 avril à Sion, ct dont celle-ci a décidé l'impression. Ce mémoire traite de l'enseignement du chant. Nous publierons ensuite des passages du rapport de notre collaborateur M. Wetzler, sur les causes de la faiblesse de nos recrues, travail qui a été également applaudi. :Legs scolaires. -Un brave agriculteur de Liddes, nommé J .. Jos. Bastian, décédé le 21 octobre dans sa commune à l'âge de 80 ans, a légué aux écoles de son village natal la jolie somme de 2160 fr. Ouvrages d'é&ole. -Nous rappelons au personnel enseignant qu'il peut continuer à se procurer au Bu1·eau du DépMtement de l'instruction publique, à Sion, le Dictionnaire complet (illustr6) de Larousse, â fr. 2.80 (au lieu de 3 fr. en librairie). Tableaux d'honneur (mensuels) et Témoignages de satisfaction (hebdomadaires) à fr. 1.60 le cent des premiers et fr. 1 - celui des seconds. A la même adresse, on peut acquérir également les ouvrages ci-après qui, à différentes reprises déjà, ont été recommandés nu personnel enseignant: Nouvelle M.éthode de Calcul oral (livre du mattre), et Sttjet.~ et modèles de leçons de choses pour l'ense·ignement intuitif. Ces manuels sont remis à 1 fr. 10 et 90 c. au lieu de 1 fr. 30 et 1 fr. (prix de librairie). Nous avons encore eu la bonne fortune de nous procurer à d'excellentes conditions l'ouvrage suivant : L' E'dttcation à l'école primail·e au moyen de l'-int·uition et du style, par Destexhe, qui pourra être remis cartonné à 2 fr. au lieu de 2 fr. 50, prix du livre broché. C'est dire que nous voulons réduire le prix de ces manuels au plus bas possible afin d'en faciliter l'acquisition. Pour faciliter cos acquisitions, les timbres-postes seront acceptés en payement. NÉCROLOGIE Nous avons l e devoir de payer ici un tribut de pieux et reconnaissant sou· venir à M. Mariaux, le collaborateur actif et dévoué que la mort nous a enlevé il y a quelques mois. Voici en quels termes laN. Gazette du Val ais a donné cette nouvelle dans son num. du 11 juillet dernier et apprécié notre cher défunt. " On nous annonce la mort survenue à. Mâcon (Dép. de Saône et Loire) le 27 juin dernier, de M. Alex. Mariaux, instituteur, originaire de Revereulaz, sa paroisse, où il avait enseigné de longues années avant de se décider à quitter son village natal, pour accepter un poste de maitre à l'institut Poyol. M. Mariaux n'avait que 36 ans. C'était un instituteur modèlo à tous égards et qui laisse les meilleurs souvenirs. Humme d'action, de piété et de dévouement, M. Mariaux a toujours joui de l'estime et de la considémtion de ses supérieurs par la manière distinguée dont il s'acquitta de sa ttlche. Il était un des fondateurs de la Société valaisa1me d'éducation et l'un de nos meilleurs instituteurs. 11 avait acquis grâce à un travail persévérant une instruction assez solide, et les lecteurs de notre revue pédagogique avaient pu le remarquer aux articles qu'il lui envoyait et qui tous étaient marqués au coin d'un grand sens pratique et d'une parfaite connaissance du sujet. , . Nous avons également le regret de mentionner le décès de Mlle M une lllnlie~·, institutl'ico à Grimisuat, ci de 111. [•!lél'!J Duchoud,institutem ù Ci1ar-

rat, tous deux morts dans le courant de cette année à. un âge variant entre 18 et 25 ans. R. 1. P.

............................... V AB.X:is'l':ÉlS DANS MON JARDIN

•.

1

L'autre soir, comme je me promenais dans mon jardin, j'entendis tout àcoup des voix singulières qui s'élevaient de la plate-bande. C'étaient les légumes qui causaient à la belle étoile. Voici ce qu'ils disaient: L'Oseille. - Mon Dieu, que je suis malheureuse! Après un doux hiver jé'tais verte et touffue, et je montais déjà, chargée d'espérance ot de graine. J'allais être mère. Mais Monsieur se promenant aveo Madame lui a dit ce soir en me désignant: ,Cela tombe à merveille, comme je prend8 médecine demain, tu m'en feras un bouillon... " Ainsi parce que 111onsieur se pw·ge, il faut que je meure. Quel tyran que l'homme ! Les petits pois.-- Tout l e monde a ses peines. Je grimpais comme un fou l e long des branches étoilées de fleurs, et la brise agitait doucement mes cosses jaunissantes, quant tout à. coup .. . Les carottes. - Quand tout à. coup ... ? Les petits pois. - ... Mariette a rapporté deux pigeons du march6. Le chou. --Jo comprends. Vous allez leur tenir compngnie. Les JJetits pois. ·- Sur le brasier l Ironie cruelle. Quand nous rissolons dans le beurre, on dit que nous chantons. Nous plew-ons nos branches étoilées do fleurs, la brise ot le soleil ; noua ne chantons pas, nous gémissons sur le cuivre brûlant. L'épinard. -Moi, je sais bien ce qui m'attend. Je serai llltohé menu comme chair à pâté. La pomme de terre. ·- Mon sort est-il plus enviable t La main do l'homme ne doit-elle pas mc réduire en purée? Le haricot. - Moi, on m'arrache grain à grain de ma cosse, mon berceau et l'on me jette sans pitié dans l'eau bouillante. Le navet. -Ah 1 Seigneur f qu'entends-je? Le chou. - Qu'as-tu donc, imbécile ; pour quoi trembles-tu ainsi? Le navet. - Il y a de quoi trembler, cher voisin. N'as-tu pas entendu 1\Iadamc dire à la cuisinière: ,Mariette, vous mettrez le canard aux navets!" Ciel ! pourquoi y a-t-il des canards? · L'asperge. - Taisez-vous donc, bavard, ne voyez-vous pas que tout le bruit que veua faites m'empêche de pousser? Le chou. -Voyez-vous cette grande sotte qui voudrait nous imposer silence! Mais, fille inepte, plus vite tu grandiras, plus tôt tu seras croquée. Le navet. - C'est juste! La laitue. - Voyez-vous ce piquet qu'on a enfoncé jusque dans mes racines? Eh bien, ce poteau, c'est mon arrêt de mort. Demain je serai arrachée du wl 11atal et mise en salado ; je rafrai ohirai le gosier de l'homme, ce tyran. L' artichatd. - Faible et mo1le créature, tu regrettes donc la vie? L a laitue. - Non, ce n'est point cette vie, qui dure uue matinée de printemps. Ce que jo regrette, c'est mon ami le crapaud, qui me protégeait contre los limaces. Comme il &Tait soin de moi l Comme sos gros yeux ronds considéraient avec amour mes feuilles verdoyantes et mon cœur si tendre.


16 La ciguë. - Moi, j'ai bien ri l'autre jour. La petite bonne m'a cueillie pour du persil et je me suis bien gardée de l'avertir de sa méprise. Tous les do mestiques ont été malades. Le navet. - A.h ! ah ! ah ! Les petits pois. - Hi ! hi ! hi ! Le cha;mpignon.- Il me semble, jeune ciguë, que vous marchez dans mes plates-bandes. Une rose. - Les fleurs, mes amis, ne sont guère plus heureuses que vous La main de l'homme s'étend aussi, rapace et sacrilége, sur nos calices et nos parfums. Je dois être cueillie ce soir pour parer les cheveux de la maitresse de la maison ; et je ne verrai plus, j e ne sentirai plus dans mes pétales frémissants le bel insecte aux ailes bleues, à la trompe d'argent qui s'enivrait de mes parfums. Le chou. - L'homme est un misérable, il ne nous arrose que pour nous mettre dans sa marmite. L'épinard. - Je voudrais qu'il flit hâché menu. Les petits pois. - Et nous, qu'on le fit rissoler dans le beurre. La pomme de terre.- Je ne suis pas méchante, mais c'est avec une douce satisfaction que je le verrais écrasé en purée. Le navet. - Il me semble qu'il neferait pas mal autour d'un canard. Le chou. - Oh! mon Dieu! qu'on le plonge tout bonnement dans la marmite. Le cornichon. - L'homme! je vote pour qu'on le mette dans un bocal et qu'on l'envoie chez l'épicier. (Exn·ait de Histot:re naturelle en action·, par F. Dumonteil.) POÉSIE Enfants! Enfants, vous êtes beaux! et que vos yeux candides Ont de reflets divins et d'effluves splendides ! On dirait qu'un rayon du ciel est descendu, Puis, en vos doux regards, heureux, s'est épandu. Enfants, vous êtes gais! Oh! que vos voix limpides Vibrent joyeusement dans les bosquets humides! ... C'est un hymne sans fin dans les airs suspendus, Par nos cœurs savouré, par le ciel entendu. Enfants, vous êtes bons ! Vous êtes l'espérance 1 Venez, de vos baisers essuyer tous nos pleurs, Nous parler d'un Dieu saint ~i guérit les douleurs. .. Enfants, vous êtes purs l Que la belle innocence, Ornant vos jeunes fronts d'un nimbe radieux, Vous guide au vrai bonheur en vous montmnt les cieux. A. ROBADEY, inst. à Bulle.

**

* L'expédition du présent numéro a lieu quelques jours après la date qu'il porte, un certain nombre d'écoles ne s'étant ouvertes que le l " lundi de novembre. Dorénavant, elle s'effectuera pour les dates indiquées.



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.