No 01 l'Ecole primaire, 15 Novembre 1891

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L'ECOLE PRIMAIRE REVUE PÉDAGOGIQUE PUBLIÉE SOUS LES AUSPICES DE LA

SOCIETE VALAISANNE D'EDUCATION L'ÉCOLE PRIMAIRE paralt chaque quinzaine, de Novembre à Avril inclusivement, en livraisons de 16 pages.

Il

Prix d'abonnement pour la Suisse, 2 fr. 50. Union postale 3 fr. -'nnonce11, pria, 20 cent. la ligne ou son espace. Tout ouvrage dont l ' E cole p1·1:maù·e recevra deux exemplaires aura droit à une annone•' ou à un compte·rendu, s'il y a lieu.

SOMMAIRE :

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Attention - Bonheur et succès - - Encore de la lecture - Causerie pédagogique - Le « Cours éducatif de langue maternelle, » du Père Girard - De l'imagination - Partie pratique: Composition - Calm/ écrit La naissance de Notre-Seigneur Jésus- Christ ( Pclt"t dialogue dcst iné mt.r mfants) Supplément: _jl l' E.~Jgislwrn .lion cousin Etielllll' .Vfaison fermée Tout ce qui concerne la publication doit être adressé à l'éditeur : M. P. PIGNAT, secrétaire au Département de l'Instruction publique, à Sion.

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ConférenceM

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BULLETIN DE COMMANDE

inHtituteurs

Le Départflment de l'lostruction publique met à l'ordi·e du jour ries confé•·~nces d' inslituteura pour l'année scolaire 1891-92, lA sujAI suivaut.:

1lfaté1·iel scol{li?·e manqttant cmx enfants de

Installation de l'école, ses abords, l'intérieur de la salle, tenue de l'instituteur et de ses élèves.

l' (>cole de

Abrégé de rHistoire de la Suisse

Pt qne le Secrétm·iat dn Df>pa1·tement de l' Ins-

Nous avous le plaisir d'anoonee•· à MM. les Instituteurs que IPs nouve~ux exPmplaii'Af' dA cet ouvrage contiennent les notions d'instruction civique qui figuraieut dans l'édition précéliP nte. Un tirage spécial de cette pat·tie a eu lieu en nombre C'Jrt'flspondant à celui des exem~llaires vendus sans cette annexe Ct3lle-ci sera mise en b ~ochnre et vendue 20 cflntimes pièce. Elle sera ilXpédiée gratuitement à MM. l<>s InRI.itntPurs an.::silôt qu'elle sera prête . Les notions d'instruction civique ont été revisées et impi·iruées Po p lus grands caractères que da ns l'édition primitive. Elles se tPrminPnt par un joli tableau synoptique dont l'auteur est M. Bouvin, à qui l'ou doit déjà les charmantes cartes qui enrichissent Ja nouvell e édition.

truction publùpre est p1·if> de fai? ·e Pxpédie?· au compte ûe

* Catéchisme 1,

., A L\;SAG~; DES ECOLES I'RI:\IATRES

1 vol. cart. zm• édition, revue et augmentée Cet ouvrage comprend deux partiPs; la 1"", théorique et ornéo oe figures, la 2m•, pratique, qui compte plus de 2000 exercices Pt problèmes. Au nombre de ceux-ci, l'on trouve la plupart des sujets donné., lors des examens des recrues, et dont le Département m i li taire fédéral a bien vouin autoriser la reproduction dans ce manuel. C'est une amélioration sensible sur l'édition précédente. Voici sur re c lassique (très apprécié du corps enseignant valaisan et accueilli ég::tlement avec fr~vem· dans diverses écoles d'autres cantons) entr'autres appréciations. celles émises par deux mspPcteurs scolai!'es élrangars au Valais: «Ce Hli.lllliCl a tiC n~~ls n'anta(!cssur le Irai tt'· 1lc F. P.

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':' Môlhocle de J .ecture S. M. Col iPelion de tableau:\ (:OI'rcsp onllnnt

* Guyau,

PAR UN PROFESSEUR DE L'ÉCOLE NORMALE DE SION

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(Le mêllle, livre <.lu maitre fr. '2. 50)

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de géographi e f:t'·ographie de la S11isse, par \Ynsrr Abrégé Ll' Histoire dP la S11issP, par

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Voici l'autre jugement qui coucorde avec le précédent. .. \ll\ Ln nu nes ù't-colr trè!' 1Wlllhn.:u-t qni rcprutltail'nl a u\. ('ahit·rs ZlCIIriHgl·r l'ah:-;cuc{• rumplclP llt! tll•~tllïl'. l'tnnr:1ge ulfrc un ex]HJ:)~~ thfMique flair} bol~re el ~nrhs:1W1ueut coUt· plet . . . J~ t-.lrdt> trun ··~amt>u atlcntil tlu llli.HHwllo.~ ,.,_u\'idiOH bincl•rl! quît renlèrmc un ~1celknt rt•urs t.l'..ttatllmt~ûqut~. J"o.~ppn~d,~ :-.urlt1ut k ;:ralld llillllhrc ~.:tla t.trflg[cssl nn lticn gt·<:t·hu\• des pr• •l•ll\llles. tl

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s1mplt.·~ et plus prétises. L.,s pruhkmcs su nt vari,'•s, en 111Hllhre suHisant, m~nt pralifjucs. l/um l'agen t~n 11\llrt..· le 1111~ritc du hull lllanlH\ la reliure l.'jl

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EL ÉMENTS D'ARITHMÉTIQUE

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':' Elémcnts d'Arithmétique (Solutions raisonnées du elit ouvrngf>) ':' Hccueil de chants, de M. Kœhl * .:\ouYenu dictionnaire Larousse ':' Dictionnaire complet >>

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de style, pnr le frère P. (3 YOI.) nnnée préparatoire

1re année, 2me année, préeiser la.- ~ quelle) (Le l iwe elu maitre, :i fr. . . 1 * Aux. recrues suisses . . . . Cahier d'écriture (préciser la méthode, 1 soit Gui lloud, Il.ollin et GoLlrlw.ux)

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SOCIÉTÉ VALAISANNE D'ÉDUCATION ..ATT:::E:J:::'J"'T::I: OJ:::'l"' ! Toutes les personnes qui recevront les Nos 1 et 2 de l'ECOLE PRIMAIRE, sans les avoir refusés dans le délai de 10 jours après leur réception, seront censées abonnées. La signature· de celles qui refusent est nécessaire pour constater dûment le renvoi de la publication.

L'Editeur. BONHEUR ET SUCCÈS!

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1891-92

L'ECOLE PRIMAIRE

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SION. 15 Novembre

NOJtlBRE

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L' Jnstit11t (Si~nnhlrP)

Est-il une occasion plus favorable pour nous souhaiter du bonheur et du succès dans l'enseignement que celui de la rentrée des classes 'l Au commencement d'une nouvelle période scolaire, alors qu'on a oublié le.; thagrins et les insuccès des années précédentes, on rentre joyeux dans l'arène pour lutter contre les nombreux ennemis du progrès : l'ignorance et les préjugés. Un champ de bataille vaste, pour ne pas dire infini, où notre ardeur juvénile pourra combattre avec succès de terribles adversaires, se présente à nous. La paix n'est plus possible ; une guerre acharnée se livre partout où une intelligence attend les bienfaits de l'éducation et de l'instruction. Le chemin que nous avons à parcourir est long et pénible ; des dangers et des obstacles de toutes sortes sont opposés à notre zèle et à notre dévouement : tâchons de les surmonter et de les vaincre.· EL si, parfois, le découragement s'emparait de nous. n'oublions pas que sans combat il n'y a pas de gloire, et que notre bonheur et notre mérite seront mesurés a la force que nous montrerons dans les contradictions et les adversités.


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Et d'ailleurs, chers collègues, rappelons-nous que nous traversons des temps difficiles où la saine éducation, base de tout développement moral, subittoules sortes de mauvaises influences. L'exemple venant de haul.s lieux a de l'écho au sein de la société et lui est plus Junesle que le poignard d'un assassin ! Notre tâche devient plus pénible dans ces déplorables circonstances. C'est à nous, éducateurs du peuple, qu'incombe en effet, en grande partie du moins, la mission de maintenir, panni les populations, la foi et les mœurs de nos pères, de raviver dans les cœurs cet amour de Dieu et de la Patrie qui a fait les héros dont s'honore justement notre chère Suisse, de défendre enfin, jusqu'à un certain point, nos libertés religieuses, le plus précieux héritage de nos aïeux. Oui, chers amis, bonheur et succès dans , cette importante mission ! Et maintenant, chers collègues, il. nous reste à saluer notre aimable (( Ecole primmre • qui, elle aussi, rentre dans le champ de la lutte pour nous conseiller dans les conjonctures difficiles, pour nous encourager aux heures de peine et d'abattement, pour nous avertir peut-être de nos faiblesses et de nos fautes ou pour applaudir à nos efforts et à notre arueur. Ténwignons-lui notre reconnaissance en travaillant à la répandre de plus en plus, à réduire le nombre da ses adversaires, car, ne l'oublions pas, ses ennemis sont les nôtres. Que surtout, aucun de nous ne lui refuse l'hospitalité d'un coin de sa petite bibliothèque ou se plaise à critiquer . ses sages avis, et que jamais plus, parmi les instituteurs et institutrices du Valais, il y en ait qui trouvent ruineux l'abonnement à notre revue pédagogique : cet argument de mauvais goût et indigne d'un membre du corps enseignant, est entré dans le domaine de l'oubli. Elle rend en effet de grands services au personnel enseignant, et, à ce titre, elle mérite une place d'honneur parmi nos ouvrages classiques. Aussi chacun de nous la salue de cœur en disant: Chère compagne, sois la bienvenue 1 Enfin, pour résumer nos sentiments et nos Yœux pour

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tous ceux qui s'intéressent à l'instruction populaire, dison~ leur en terminant : Bonheur et succès pendant J'ann~e scolaire 'i 891-92. X*** ENCORE DE LA LECTURE

Nos articles sur la lecture, publiés les années précéden- ( tes par J'Ecole primaire, ont rencontré un bon accueil chez Je personnel enseignant, à en juger du moins par l'eftet , .qu'ils ont produit ; c'est pourqutJi nous nous permettoiJs de nouveau cette année, dès l'ouverture des classes, tle revenir sur le même sujet, et d'attirer encore une Jois l'attention de Messieurs les régents sur une matière aussi importante que celle qui nous occupe. Je n'insisterai plus sur l'importance de cette brauche ; tout le monde sait qu'elle est la clef, la base de toutes celles dont s'occupent les classes primaires ; ne pas savoir bien - lire, quelles que puis~ent être d'ailleurs les autres connaissances, c'est passer pour un illettré; aussi la principale tâche de l'école doit être tout d'abord de former les élèves a une bonne lecture. Bien guidés, ils apprennent avec beaucoup de facilil.é à syllaber dans leur livre de lecture, les deux premières années qu'ils fréquentent la classe. Dès lors il reste assez de temps pour les amener avant leurs 15 ans, à une bonne lecture courante. Une fois arrivé à une certaine perfection dans cette matière, le jeune homme possède le moyP.n de s'instruire lui-même, d'augmenter ses faibles connaissances, d'élargir le cercle étroit de ses idées. Communiquez-lui une émulatiou bien sentie, laissez-lui le temps de lire, et mettez à sa disposition almanachs, journaux, bons livres de toutes sortes. capables de le distraire, de l'instruire et de le perfectionner, et vous verrez comme il. enrichira son intelligencfl. pendant que son camarade complètement ignorant, illettré. cherchera d'au tres occupations, d'au tres .sociétés que cellf:' des livres dont il ne sait que faire, se mettra à jouer, ~~ flaner les dimanches et les fêtes ainsi que pendant l e~ longues soirées de l'hiver. Pcut·être se laissera-t-il all er .à la boisson, peut-être aussi se livrera-t-il â. des amuse-


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ments qui. hélas 1 sont loin d'être toujours recommandables. On peut dés lors se tigurer quelle sera, au moment du recrutement, la différence entre les notes de deux jeunes gens dont l'un est avide d~in~tr~ction. et l'autr~ i.ncapable d'en appl'écier la valeur et mdlfierent a en acquenr. Avec une exacte fréquentation de l'école, des procédés convenables et un dévouemelJt à toute èpreuve de la part du maitre, tous les élèves, ne fussent-ils que médiocrement doués, peuvent arriver à la connaissanc~ d'une bon.~e lecture, de sorte que les notes 4 et 5 dOivent à peu pres disparaître et la note 3, équivalant à faible , c1e former qu'une minime exception ; tandis que, jusqu'à _ce jou.r, 3 était la note dominante. de nos recrues, ce qm explique pourquoi notre canton compte toujours e~core parmi les derniers de la Suisse pour la branche qm nous occupe. Ainsi sur 789 recrues en t 890, il y en a encore 366, près 'de la moitié bien faibles, ou complètement illettrées. Convenons que le résultat n'est pas très flatteur. Pouvonsnous admettre qu'un élève, fréquentant 8 années consécutives une classe primaire bien tenue, n'apprenne pas même à lire couramment on alinéa de six à boit lignes avec une prononciation correcte, une articulation distincte, les pauses requises? Les résultats de plusieurs . communes al: pestres nous prouvent le contraire : leurs jeunes gens, qm n'ont assisté qu'aux classes de leur village, ont obtenu au recrutement la note t ou 2 pour la lecture. Pourquoi dès lors oc pourrait-on pas exiger un pareil résultat des C?mmunes d'Ayent, de Grimisuat, de Vex, de ,Fully, d'ls~r~­ bles, de Trobtorrents, de St-Gingolph et d autres lo?ahtes encore, dont les recrues se distinguent chaque annee par une iaoorance crasse et révollante, résultat vraiment par trop ~édiocre pour 8 ans ::l 'école primaire et 5 de cours de répétition. . . S'agit-il d'instruction civique, d'bi~t~ire et de ge?waphie, les résultats sont tout différents : SI l on ne constdere que Jes notes 1 et Il, sept cantons viennent après le Valais ; et si, au contraire, on met en ligne d~ compte le~ note~ ru ~ · u "' ·""' '";"""n" "" l'o:>nton!:: !lnri>~ nons. c est la

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un notable progrès qui, à notrë avis, est la meilleure démonstration que nos élèves ne manquent pas plus qu'ailleurs des dispositions nécessaires pour réussir, mais que c'est plutôt la bonne direction qui leur faiL défaut. Ils peu vent fort bien étudier l'histoire et la géograptlie, .pourquoi seraient-ils incapables de s'habituer A une bonne lecture ? - Pourquoi faut-il. qu'il y ait encore dans !e Valais des communP.s dont les 10 ou 15 recrues ne se font. marquer que des ;j, des 4 et des 5 dan~ leurs livrets de service pour attester par leur coupable Ignorance la grande faiblesse des écoles ? En 1888, nous n'avions que 33 Ofo avec la note l et Il, aussi le Valais venait-il pour la lecture après tous les Eta~s confédérés. En ·1889, nous avons eu 45 o;0 avec la note l et II, et déjà nous avons devancé le canton d'Appenzell. En '1890, nous sommes allés à M % et voilà que nous laissons trois cantons après nous. Si donc, en deux années, nous avons pu arriver de 33 ·à 54 °/0 , nous pouvons espérer avancer eacore au point de nous rapprocher enfin de 70 o;0 , moyenne générale de la Suisse. Nous. ne connaissons pas encore les résultats de 189,1 ; peut-etre avons-nous un nouveau progrès à constater, il faut le croire à en juger par les dernières années. Nous aimerions bien encore parler des moyens à employer pour arriver à une bonne lecture dans nos écoles primaires. Veillons d'abord à une fl:équenlation rég~lière , eosuite lisons tous les jours nous-memes pour servir de modèle à nos élèves, obtenons une prononciation nette et ne 11ous figurons jamais qu'il est impossible d'extirper de nos écoles les principaux défauts, suite ordim.ire de notre patois. Abandonnons aussi rarement que possible les commençants à des moniteurs inexpérimentés. mal formés ; servons-nous surtout les deux premières années, de la syllabisation ; insistons sur les mots qui offreot quelques difficultés aux élèves; écrivons-les au tableau noir pour les faire prononcer par plusieurs enfants à la f?i~. faison_s aussi souvent des lectures en chœur, el nos eleves arn-


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veront à coup sûr à une bonne prononciation, à une articulation distincte, a des pauses convenables, à une lecture courante et agréable ; faisons lire peu à la fois, mais bien ; ne quittons jamais un alinéa, avant qu 'il soit bien lu et compris, et bientôt no1.1s aurons la douce satisfaction d'avoir formé de boos lecteurs qui pourront, sans rougir, montrer leur livret de service. CAUSERIE PÉDAGOGIQUE

L'homme a été manifestement créé pour vivre en société. Lorsqu'il vient au monde, il serait infailliblement condamné à périr, si des soins dévoués ne veillaient pas incessamment à sa conservation. Durant toute la première période de son t~xistence, le secours d'autrui lui est indispensable pour le mettre à l'abri de la maladie et de la souffrance. Il n'en va pas autrement de sa formation intellectuelle et morale. La Providence l'a doté de facultés admirables : mais, abandonné â. lui-même, comment leur assurera-t-il leur ·légitime développement? .Malgré tous ses efforts, son ignorance serait extrême, s'il était réduit, même en ce qui le touche de plus près, à attendre les résultats tardifs de l'expérience personnelle. Et en dehors de ce cercle étroit, que d~ connaissances lui resteraient étemelfement fermées sans le maître qui est appelé à les lui révéler ? S'agit-il des vertus religieuses, des devoirs de la vie domestique, des bienséances dans les relations sociales ? Pour nous y initir.r, nous n'avons pas moiJJS besoin des leçons et des exemples de ceux qui ont qualilé pour nous instruire. L'enfant ne naît pas boo, comme l'affirmait Rousseau ; parmi les inclinations qui constituent le fond de sa nature, Il en est de louables qu'il faut développer, il eu est de fâcheuses qu'il derra réprimer; comment opérer ae discernement et séparer l'ivraie du bon grain? Ainsi, de quelque côté qu'on J'envisage, l'œuvre si importante de l'éducation est nécessairement l'œuvre commune de l'enfant et ùes parents, de l'élève et du maître. Quand on pénètre dans un pays peu connu, ou quand

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on s'engage à travers des montagnes semées d'escarpements et de prec1ptces, un bon guide est indispensable, et, si pénible que paraisse la route, on marche avec d'autant plus d'assurance qu'on sait son conducteur incapable de s'égarer. De même pour s'orienter dans le vaste domaine des science.:;, l'enfant ne peut se passer d'un guide, et son instruction sera d'autant plus solide, d'autant plus rapide qu'il s'abandonnerc:t. _ avec plus de confiance à la direction du maître. Pour apprendra, il faut avoir foi dans la parole d'autrui. Pourquoi en toute circonstance les jeunes enfants interrogent-ils si volùntiers leur mère? Pourquoi obéissent-ils si facilement à ses conseils? N'est-ce pas parce qu'ils savent que leur mère a, pour veiller sur eux, des lumières spéciales. et que ses avis, com~e ses reproches, partent d'un cœur plein de tendresse? Il en est de même à l'école: pour que l'attention et la docilité· ùe l'élève soient entières, il faut qu'il sente que ....ses maîtres ou ses maîtresses savent réellement ce qu'ils enseignent, et ne cberchenl dans l'accomplissement de leur lâ~he, parfois si difficile, que le bien des jeunes intelligences, dont la culture a ètè remise entre leurs m:lins. D'un côté, un maitre digne de toute la confiance des élèves; de l'autre, des élèves dignes de toute l'affection et de tout le dévouement du maître, n'est-ce pas là l'idéal d'une éco le, et tout particulièrement d'une école chrétienne ? Un des savants les plus remarquables de l'antiquité, Pythagore, est rP,Sté célébre dans l'bis toit e par 1e respect qu'il avait su iuspirer à tous ses Jisdples. Non seulement ceux-ci n'auraient point osé contreJire ouvertement une assertiou du maître, mais lorsqu'il leur arrivait de discuter ' entrt: eux. sur quelque questiou obicure, il suffisait, pour mettre fin au débat, que t'un d'eux pût invoquer en faveur de son opinion cette simple parole: Le maître l'a dit. Sans doute, en dehors de ce qu'enseigne une autorité divinement infaillible ·comme l'Eglise, une confiance aussi absolue dans la parole, même d'un savant, même d'un sage, n'est pas sans inconvénients. L'homme dans la


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plénitude de l'intelligence, l'homme en possession des méthodes de la science a le droit el parfois le devoir d'user de ses facultés pour contrôler les jugements d'autrui; mais le rôle de l'enfant est bien plus simple: aussi s'en rapporte-t-H instinctivement à ce qu'il entend, et s'il multiplie les questions, c'est qu'il est prêt à accepter toutes les réponEes. 11 s'étonne parfois, il t~e conteste presque jamais. Ce qui précède permet de mesurer la responsabilité de quiconque se consacr~ à l'éducation de l'enfance el de la jeuuesse. On n'enseigne bien que ce que l'on a appris : on ne saurait prétendre communiquer à autrui d'autres connaissances que cel les dont on s'est enrichi soi-même. Enfin, on ne recommande pas efficacement des vertus dont on n'est pas le premier à donner le constant exemple. L'enfance elle-même a sa logique, et le maître dont elle aurait une fois surpris l'ignorance en matière d'enseignement ou l'iocoosëquencP. en matièr6 de conduite perdrait bien vite à ses yeux tout tilre à la confiance, sinon tout C. HuiT. droit au respect.' LE «COURS ÉDUCATIF: DE LANGUE MATERNELLE,~ DU PERE GIRARD Le point du • Cours éducatif de langue maternelle, •

du Père Girard, Je cordelier de Fribourg, est, comme celui de Jean-Jacques Rousseau, l'observation attentive de la nature. Pour apprendre à parler à son enfant la mérô emploie des mots: premier point. Quand elle prononce les mots, elle désigne les choses : second point. Enfin elle dirige l'instruction de son enfant vers un but moral : troisième et dernier point. Sur ces données, le Père Girard a développé son ouvrage qu'il divise en trois parties, en trois cours. Il commence, contrairement à toutes les grammaires de son temps, par la syntaxe, el continue par la conjug:üson, la composition, le sens des mots et le vocabulaire. Chaque partie de J'ouvrage a un caractère particulier et est l'œuvre de trois maîtres successifs : le grammairien ou

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littérateur, Je logicien et l'éducateur. Examinons-les l'une après l'autre. 1. Le grammairien. La grammaire commence par l'étude des propositions, des phrases et des périodes. L'élève formule d'abord des phrases qui n'ont pas plus de deux propositions, et il les analyse suivant les règles. Il conjugue les verbes en désignant le mode, le temps, la personne et Je nombre, par propositions complètes. Après la coujugaisou vient la composition. C'est fa partie spéciale du littérateur qui doit faire connaître aux enfants le sens des mots. 2. Le logicien. La mère elle-même est logicienne, presque toujours sans le saroir; elle sait aussi cultiver l'intelligence de son enfaot et développer ses facu ltés intellectuelles, surtout la mémoire et J'imagination. Le Père Girard, dans cette partie de son ouvrage, fait remarquer aux enfants las rapports, les liaisons, la ressemblance ou la différence qui existent entre les choses ; il leur fait rechercher les causes ou les effets, démêler le vrai du faux. Pour cela il s'appuie sur la raison, l'attention et la réflexion. Ce sont, d'ailleurs, la curiosité et la nécessité qui poussent l'enfant et l'homme à vouloir comprendre les choses. Quant à la mémoire, il cultive beaucoup plus celle des choses que celle des mots, et il emploie l'association des idées. Il a cependant tort de n& considérer les mots que comme des signes ; sans doute ce ne sont que des signes, mais ces signes nous rappellent des choses. Le Père Girard est d'avis qu'il faut développer les facultés graduellement et harmoniquement. Ses élèves répondent, inventent, composent et analysent. Non seulement, comme l'avait dit Montaigne, il force l'intelligence ; mais encore il la meuble; il forme l'âme pour la famille, pour la patrie, pour le genre humain tout entier. Enfin, par J'étude de la nature, il conduit l'enfant à la connaissance de son auteur. 3. L'éducateur. L'éducateur moralise; il constate d'abord quatre tendances chez l'enfant : tendance · personnelle, tendance sociale, tendance morale, tendance religieuse, et


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il étudie c.es diverses manifestations du caractère de l'élève. L'amour du plaisir l'amour de soi, bien que naturt:ls et légitimes dans l~ur source, peuvent dégénérer en sensualité, en cupidité, en avarice, en orgueil, en vanlté. Il faut empêcher cette déviation. La reconnaissance, la pitié, la bienveillance. le penchant à la croyance, le penchant à l'imitation, peuvent aussi s'égarer et se transformer en ingratitude, en cruauté, en dureté, en méchanceté, etc. ; il s'agit donc de les conserver purs chez l'enfant. L'amour et le re3pect du bien, J_a conscience peuvent également s'affaiblir, le maître dOit s'atlachtr à l'entretenir. - La tendance religieuse repose sur la piété filiale et, de la bonté des parents, elle conclut à la bonté divine. Le Cours educatif contient 1232 leçons et convient aux enfants de 6 iJ. 14 ans. Non seulemeut il est bien pensé, mais il est bien exécuté et laisse peu de prise à la critique. Cependant ou a dit que le Père Girard ,.Y restreint trop la part faite à la mémoire des mots et qu tl tombe, à cet égard, dans Lt même erreur que son i:Ompatriote Pt:stalozzi. L'homme, dit l'illustre éducateur de Fribourg, aime comme il pense, c'est là aussi ce que disait Herbart, (1776-lS4i ). L'intelligence, le sentiment, la volonté se manifestent dans un seul acte. Nou.; agissons comme nous aimons, mais nos inclinations peuvent être impures. Nous aimons comme nous pensons. Il (aut donc enseiglJer les moyens de faire agir la volonté sur le cœur. Le Père Gir:\rd pourrait peut-être dire: J'agis comme j'aime, j'aime comme je pense. Mais combie~ ~·nommes. 1~ peuvent dire comme lui. Saint Paul IU1·meo1e ne d1t-Il pas, au contraire : Je ne fais pas le bien que je veux el je fais le mal que je ne veux pas. SENECTUS. DE L'IMAGINATION

C'est l'imagination, a dit Ambroise Rendu, qui fail les artistes et les poètes, les écrivains de génie et les esp:its en délire, qui corrompent la litterature et les arts ; c est elle qui fait les enthousiastes et les fanatiques, les héros

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et les fous, qui échauffe Je sentiment vrai de la religion et qui nourrit les superstitions les plus odieuses ; c'esÎ elle qui donne quelquefois à la jeunessè tant d'ardeur po ur le bien et qui la précipite souvent dans de si déplorables écarts. Avec quel soin le maitre devra la surveiller, la contenir, la diriger dans les jeunes intelligences dont la conduite lui est confiée 1 C'est qu'en effet l'imagination est la faculté par laquelle l'esprit se représente les objets et les phéuomènes comme s'ils étaient actuellement présents aux sens, alors qu'ils sont absents et peuvent même jamais n'avoir été réels. A. C.

PARTIE PRATIQUE Afin de conserver à l'Ecole primmre le caractère d'une publication aussi variée que post;ible, il sera fait dans chaque N• une part à des exercices pratiques divers. Nous ouvrons aujourd'hui celLe padie par la reproduction des sujet~ de composition et de calculs donnés lors des derniers exam~os des recrues. MM. les régents, particulièrement ceux qui dirigent des cours de répétition, auront là dos matériaux tout trouvés pour leurs élèves. Co:t::n.posi:ti.o:n..

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1. La fête centenaire de la Confédération célébrée dans mon lieu natal. 2. Comment j'emploie l'après-midi du dimanche t 3. Décrire l'bivet· de 1890 à t891. 4. Température et état des récoltes dans l'été 1891. 5. Invi.ter, par lettre, un débiteur à règler un compte déjà vteux. 6. • Sème dans ta jeu~esse, tu ré col te ras dans ta vieillesse. • 7. Moyen::; de conserver et de fortifier la santé. 8. Racontet· un ac.::ideot. 9. Inviter, par lettrA, un ami à faire partie d'une société de gymnaslique ou d'noe fête de chant, de tit·, etc . 10. Mettre en garde un ami contre les dangers d'une mauvaise compagnie. 11. Remercier par lettre un protecteur bienveillant qui vous a procuré une place avantageuse. 12. Racontet· une promenade d'un~ société de gymnastique ou de chant, une partie en traîneau, de montagne, etc. 13. Ann~ncer à un ounier, engagé précédemment, qu'il pourrait entrer dans sa nouvelle place plus tôt.


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14 S'excuser du retard qu'on a mis à payer une dette, et · annoncer qu'on en envoie le montant. 15. Comment pourrons-nous gagner la confiance de nos semblables' · . 16. Avantages et inconvénients de vo~re prof~s~JOn. 17. Un maître d'état prie un confr~re de 1UI céder pour quelque temps un de ses ou~ner~.. • 18. Au moment de partir pou~ l Amenque; prendre conge par lettre d'un de ses am1s. . 19. Un apprenti annonce à ses parents la mor~ subtte de son patron. 20. Nos meilleurs aliments. , . 21. Un paysan, très éprouvé par _la grêle, demande qu on lUI remette une partie de ses 1~pôts. . 22. Annoncer à un ami le retour mattendu de ROD frere de l'étranger. . . . 23. Le travail seul procure le paiD quotl~t~n. , 24. Première sortie d'un convalescent; VISite a son jardin, à l'atelier, etc. (lettre). . ,. 25. Lettre d'un fils à son père absent; le ren~eJgnet· su~ 1 etat de la tamtlle et sur la marche des affatres depu•s son départ. 26. Avantages que procurent de bonnes notes dans le livret de service. CALCUL ÉCRIT 4. La frontière suisse a une longueur de 390 km. du 1. côté de l'Allemagne, de 459 du côté de la ~rance , de 639 du côté de l'Italie, de 250 du coté de l'Autrîche. Quelle est la longueur totale de notre frontière' 3. Un père gagne fr. 95 par .mois et son fils fr. 16 par semaine. Quel est le gam total de tous deux au bout de l'année' 2. Un terrain à bâtir mesure 8500 m 2 • On en détache une parcelle longue de 62,8 m. et .larg~ de 371/t m. Combien mesure le reste du terra1n ' 1. Un artisan achève un travail dont il calcule le prix de revient comme suit : 1• Matériaux employés fr. 46 25 c., 2• journées fr. 85, 3° frais ~ivers fr. 16,1~. On lui paie son travail fr. 175. Co~bten °/o gagne-t-Il sut· le prix de revient (deux déCimales>.: . II. 4. J'ai gagné le mois passé fr. 1.25,50 et J a1 dépensé fr. 87,25. Combien me reste-t-Il? 3. Un tonnelier fournit à un marchand de vin des tonneaux d'une contenance totale de 4895 litres.

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Combien le marchand aura-t-il à payer, le litre étant facturé à 12 centimes' Une société possède un capital de fr. 157500 placé à 3°/o. L'intérêt d'une année est réparti par portions égales entre les 175 sociétaires. Combien recevr~ chacun d'eux 'f On veut détacher d'un tas de foin une tranche de 401;2 ffi3. Le tas ayant une hauteur de 63/4 m ., une largeur de 2,5 m., quelle sera l'épaisseur de la tranche à détacher ' Dans la période de 1886 à 1889, les décès par suite de phtisie ont atteint les cbiftres suivants: 6420, 5836, 6204 et 6165. Chiff•·e total pour ces 4 années? Un ménage consomme 500 grammes de café par semaine. A combien se monte la dépense annuelle pour cet article, quand le café se paie fr. 2,90 le kilogramme' Combien valent 37,75 stères de sapin, alors que 4 stères se paient fr. 38 î A. B. et IJ. fonden t eusemble un commerce dans lequel A engage fr. 15000, B. fr. 18000 et C. ft•. 2~000. Le bénéfice nAt de la première année se monte à fr. 4125. A combien o;o se monte le bénéfice, dt calculer la part proportionnelle à laquelle a droit chacun des associés î L 'année dernière j'ai eu à payer les impôts suivants : fr. 6,75, fr. 8,25, fr. 14,50 et fr. 4, 15. Combien on tout? Un paysan vend une première fois 2830, une autre fois 3655 kg. de poires à cidre. Le kg. se payant 7 centimes, combien a-t-il retiré en tout ' Dans un canton qui compte 11500 électeurs, 8970 d'ent.re eux ont participé aux dernières élections. Combien ·;e 1 On veut vernir les 4 parois d'une chambre haute de 3, 2 m. Deux des parois ont une longueur de 6a/4 m., les deux autres une longueur de 52/s m. A combien se montera la note du vernisseur, le mi se payant fr. 1,40. (Vu la grande difficulté du travail on ne fait pas de déduction pour les fenêtres)? Un marchand de bétail a payé pour trois vaches fr. 1500. Ii estime la première à fr. 480, la seconde à fr. 525. A combien estime-t-il la troisième 'f Mon voisin doit uno somme de fr. 250. Pour éteindre cette dette, il paie fr. 75 en argent eL fournit e!l


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2. 1.

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3. 2.

1. VII. 4.

3. 2. 1. VIII. 4. 3. 2.

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outre 14 quintaux de pommes d1:1 terre à fr. 6 et 115 litres da lait à 16 cm. Combien doit-il encore! Quel est le contour d'une pièce de terre rectangulaire, longue de 128,4 m. et large de 86,5 m.! A combien se monte une dette de fr. 4285,35, si l'on y ajoute les intérêts à 4 1/4 •Jo du 1•• janvier au 20 septembre de la même année, déduction faite d'un jour (360 ou 365 jou1·s)! Au 1"' janvier 1890 la longueur totale des lignes de chemins de fer suisses se montait à 3106 km. ; au 1"' janvier 1870 cette longueur n'était que de 1374 km. Quelle a été l'au6mentation ! Dans une fête de tir, on a vendu 268 cartes de fête à fr. 8,50. A combien se monte la recette totale 'f On achète 811' q. d'une marchandi"e à rai11on de fr. 60 50 Je q., auxquels il faut ajouter fr. 17,75 pour faux-frais. On revend les 3/:; de la marchandise à 75 c. le kilog et le reste à 70 c. Quel est le gain sur le tout 'f On a acheté une machine au prix de fr. 8400 et on la revend 12 ans plus tard pour fr. 4620 A combien •;o se monte J'usure, calculée sur le prix d'achat f Mon ami possédait, il y a quelques années, une fortune de fr. 4685. Depuis lors, il a hérité une somme de fr. 2768 et il a économisé en plus fr. 18~7. Combien possède-t-il actuellement 'P Les appointements d'un employé se montent à fr. 2100. Combien retire-t-il pour 5 mois. En 81}2 b., un train parcourt 1571/2 km. Combien ce train parcourt.-il en moyenne de mètres par seconde 'f Une somme a rapporté annuellement fr.38,50. Sachant que Je taux est de 4,4•/o, quelle est cette somme 'f Trois paysans achètent en commun 4820 kilog. de foin. Le premier en prend 1564, le second 1278 et le troisième le reste. Combien ce dernier en aura-t-il'P Combien coütent 128 mètres canés de boiserie à fr. 5,80 le mètre carré 'P En. 1~89, la Suisse a importé pour fr. 100300 000 de blé et de farine. A. combian se monte l'imporlation par tête, la population étant de 2 930 000 habitants (calculer jusqu'aux centimes). Un commerçant achète 9445 kg. d'une marchandise à raison de fr. 20,40 par q. m.; ses faux-frais se montent à fr. 205,10, et il revend sa marchandise

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avec uoe augmentation de 183/4 •/o calculée sur Je prix d'achat. Quelle valeur représente toute la marchandise ainsi vendue 'P (A suivre.J

La naissance de Notre-Seigneur Jésus-Christ (1) Petit dialogue destùze aux enfants PREMIÈRE PARTIE LOUISE

_ 4,000 ans aprèR la création du monde, 2,500 ans après la destructiOn du genre humain par le déluge, l'univers entier appartenait aux Romains. - Rome, victorieuse, étendait sa domination jusqu'aux extrémités de la terre. - Les Juifs eux-mêmes avaient perdu leur puissance; Hérode gouvemait la Judée ~u nom de l'empereur de Rome. MARIE

Quel était alors l'empereur de Rome? L OUISE

C'était César-Auguste. La quatrième année de son règne, CésarAuguste voulut connaltre le nombre de ses sujets. En conséquence, des ordres furent donnés dans toutes les provinces conquises pour un recensement général. - Chez les Juifil, chacun devait aller se faire inscrire au lieu ou était né le chef de sa famille. JULIETTE

Marie et JosAph habitaient alors la petite ville de Nazareth. :MARIE

De qu«>lle famille étaient Marie et Joseph? JULIETTE

De la famille du saint roi David. MARIE

Où l'tait né le saint roi David? JULIETTE L~

saint roi David était ~é à Bethléem. - C'est pour cela que Mane et Joseph furent obligés d'aller se faire inscrire à Bethléem. - Marie et Joseph partirent donc pour Bethléem. lifARlE

En quelle saison se trouvait-on? JULIETTE

C'était en hiver, au mois de décembre. Le voyage fut très long t>t très pénible. MARIE

La ville de Bethléem est-elle bien éloignée de Nazareth? (1) Ce petit dialogue a été apptis et récité à l'occasion de Noël par les enfants d'une école libre de la campagne. Nous sommes heureux de la donner dans sa gracieuse naïveté.


-16JULIETTE

De Nazareth à Bethléem, il y a trente lieues. Marie et Joseph parcoururent à pied cette longue route. A bout de forces, épuisés de fatigues, ils arrivèrent enfin à Bethléem. ANGÈLE

Bethléem, le bflrceau de David; Bethléem où, jeune encore, David menait paltre les brebis de son père, BPthlèem, ou David fut sacré roi par le prophète Samuel.

Supplément â L 'ECOLE

P~!!!;__~

MARIE

Qui Marie et Joseph trouvèrent-ils à Bethléem? JULIETTE

Ils y trouvèrent un g:and nombre d'étrangers, venus, eux aussi, pour obéir à l'empereur romain. MARIE

Comment Marie et Joseph furent-ils reçus à Bethléem '1 JULIETTE

A L'EGGISHORN par MARIO***

Ils y furent très mal reçus. MARIE

Et pourquoi donc? JULIETTE

Parce qu'ils étaient pauvres. Ils frappèrent à toutes les portes pour demander l'hospitalité.

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MARIE

Et que leur répondait-on? JULIETTE

On leur répondait avec un air de mépris : • Il n'y a point de place pour vous. • AUGUSTA

Ah 1 si les habitants de Bethléem avaient connu Marie et Joseph 1 S'ils avaient su que Marie, la plus pure des vierges, a1lait bientôt devenir la mère de Dieu, comme ils auraient changé de langage 1 Avec quel bonheur ils auraient reçu dans leurs maisons ces illustres et saints voyageurs 1 MARIE

Que firent donc Marie et Joseph? J ULIETTE

Le jour allait bientôt finir. Il fallait hien chercher un abri pour passer la nuit. N'éprouv::mt que des refus, Marie et Joseph .'lortirent de la ville. lloiARIE

Où allèrent-ils ? JULIETTE

Tout près de Bethléem se trouvait une grotte qui servait d'abri à quelques animaux. Marie et Joseph s'y réfugièrent. (Â suwre.)

-oDix heures du soir. C'était le 15 août, fête de l'Assomption. La journée caniculaire, une de ces journées où les pentes des montagnes chauffées à blanc comme les roch~rs, vous renvoient lenrs ardeurs, deR reverbérations de fournaise; et néanmoins dans le corridor de l'hôtel de la Jungfrau à I'Eggishorn, ' le calorifère ronflait.. .. et l'on éprouvait une singulière sensation de réconfort et de délassement à s'en approcher; aussi à qui mieux mieux, les uns assis, les autres debout, faisait-on cercle tout autour. Tout en s'ét0nnant du plaisir qu'il y avait à se chauffer en plein mois d'août, on en savourait l'imprévu. C'était tout drôle, mais heimlich, - et personne, vous pouvez m'en croire, n'avait sujet d'en médire. Dame 1 - si l'on songe que nous étions à 2,200 m. d'altitude 1 Nous venions d'arriver, et pour tout dire, à pousser jusque-là, avec la perspective de dormir sur le foin, ou à la belle étoile, il y avait bien eu quelque témérité. Mais la fortune est aux audacieux.... et nous avions un pied dans la place. C'était quelque chose, c'était beaucoup, c'était tout. Quant au reste, coucher sm· le foin, ou sur un matelas au food d' un corridor, il nous importait peu .... Nous avions même réussi, ce qui n'était pas facile, à nous faire servir à manger. Car notre course, ce jour-là, était une de ces folles


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Pour le coup, c'en était trop... Foin de cette petite

équipées dont nous sommes coutumiers 1·ésolues d prime-saut, exécutées de même. ' No_us nous étions mis en route sans tenü· compte de avertissements que les gens bien informés ne s'étaien pas fait faute de nous donner. - A l'Eggisborn 1 Allons donc! ... Mais vous n'y son gez ~as. , Voici t,rois semaines que l'hôtel est bondé .. A pr1x d or on n y trouverait pas un lit!. ... Sans comp ter que vous formez une caravane. Boufre .. . 6 personnes, lorRque chaque jou1· on en refuse plus de 50 . C'es de la fohA 1 attendez au moi ns à demain matin Ce dernier arrangement ne nous convenait p~int. S1 nous y mettions de l'entêtement. c'était pour 1 bo_n motif, pour ne pas manquer le -~lou - de la fête, so1.t le lever ~u soleil sur la montagne. Bon gré, mal gre, sur la pa1lle ou sur le foin, on finirait par noua octroyer la courbée.... et nous n'en voulûmes pas démordre. M~is ce qui bien autrement que tous ces racontars au1·a1t pu nous donner à réfléchir, c'étaient les nombreu voyageurs que nous rencontrions au fur et à mesut· qne nous approchions de l'hôtel, eL qui redescendaien faute d'y avoir tl'Ouvé place. . Eroiotés e t suants, sans nous demande t· si nous se r1ons plu,s heureux, no~~ accélérions le pas pour arriver avant qu Il fût tout à fait obscur, au vaste caravansérail dont la mass~ blanche et distincte posée comme u phare dans l'Imll?ensité g~ise, s'enténébrllit de plus e plus sous la rap1de tombee de la nuit.

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. La s~ison b~ttait son plein. Ainsi qu'on nous l'avai d1 t, l'bote! avait plus d'hôtes qu'il n'en pouvait contenir 1~ surplus logés à la diable, partout où il avait été pos' s 1ble d'établir un lit, sous le toit, aux mansardes, dan les d~p~ndances. et les hangars, un encombrement in descr~pt1ble, maltres et vale ts sur les dents. Qu on se figure de quel œil on nous vit arriver? - Un, ~ eux, trois,_ quatre, cinq, six !.. .... Avant qu nou~ eussiOns fran chi le seuil, et pendant que nou ~}!il~~~~ ~~~!;~~~Janade, on nous avait aperçus et comp

caravanE~, et de ses allures conquérantes 1...

Nous entrons. On nous reçoit d'un air visiblement agacé : - Nous regrettons beaucoup. Pas de place, absolument impossible de vous loger.. .. Tel fut l'accueil du maîtr·e d'hôtel aux abois. Mais nous y étions préparés, et de riposter: - N'importe. Logez-nous dans la gt·ange?... Nous serons satisfaits, cela nous suffira. L'hôtu nous regarde, puis il regarde sa femme· son œ il se radoucit . ' Comment renvoyer à une heure aussi tardive, six voyageurs, dont quatl·e du sexe faible't Evidemment, il se livrait un combat dans son âme entre l'impatience et la pitié. En dépit du premier ahurissement, celle-ci l'emporta : - J'aviserai à vou3 coucher, bien que je ne sache encore ni où, ni comment, nous dit-il. En attendant réfugiez- vous au salon de lecture, le seul coin de tout mon hôtel qui soit libre. C'est l'heure du dîner. Bataille gagnée. Le succès couronnait nott·e vaillantise. i20 personnes à table d'hôte .. un assot·timent de • riz et de pruneaux ,, à réjouir le cœur de Tartarin , faces et costumes exotiques. Le fracas des voix, le cliquetis des bouteilles et celui des fourcbqttes, combinés avec les allées et les venues des gens de service, nous arrivaient par l~s portes ouvertes, comme la. rumeu r d'une boule grondante et lointaiue. Le repas achevé, cette cohue s'éparpilla en un long défilé dans le corridor à l'assaut du calorifère. Curieux coup d'œil que celui de ce tableau cosmopolite, formé de toutes les variétés de touristes, de tous Jas types de l'espèce, depuis le touriste fashionabl<:l en souliers vernis, frisé et cravaté à la façon d'un cvuturier pour dames, jusqu'au touriste dP profession, ne comptant ses j~ urnées qu P _par les kilomètres qu'il a enjambés, insoucieux du chtc, hâlé, brûlé, congestiouné, chaussé de grosses gué tt·es, e t faisant trembler Je pl anchet· s ous ses souliers ferrét-~; tableau bizarre aux couleurs beurtéefl mais dont on ne tardait pas à saisir l'ol'iginalité et l~ pittoresque. On a beau dire. Rien ne rapproche, rien n'i nvite à


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l'intimité comme le voisinage d'un foyei'. Le front 1& plus morose se 'déride sous l'action d'un bon feu ; lûs groupes se serrent, les langues se délient, et presque toujours les clartés incandescentes du bra!lier finissent par colorer d'un aspect sympathique les visages les plus blindés. - Sortez ! - venez regarder le ciel ! A cet appel de l'un des nôtres, nous nous précipitons au dehors .. .. Brrrou!.... qu'il faisait froid! on n'échapp&it pas à un mouvement de recul... Mais DiPu ! quel spectacle !.. . Il nous restera à jamais bien gravé dans le cœur. Si vous ignorez les magnificences d' une nuit polaire, votre place était ici. Un même cri d'admiration sortit de toutes les lèvres. Volontiers on se serait mis à genoux. Pas de lune. Mais un ciel criblé de myriades d'étoiles, un ciel qui envahissait tout, et paraissait s'étendre, s'étendre, sans mesut·e et sans borne. La terre semblait ne plus exister. A peine si à l'opposite le profil des montagnes estompait sa ligne indécise sur le v~lours foncé de cette immensité étincelante, qui av11.it l'aspect d'un miroir très-sombre où se jouaient des millions d'astres, et montrait jusque dans ses arrièt·e-profondeurs d'autres légions d'étoiles, des feux et des mondes sans fin. C'était la nuit éclairée à giorno, le lriomphe d'une nuit polaire, merveilleu!?e dans l'agencement magistral de ses perspectives illuminées je clous de diamants, une fantasmagorie à déconcerter le regard. A la cout~mpler nous restions muets. ~Dev ant les mystères du ciel et les largesses du Créateur, la parole s'anête ... Sur la montagne, mieux que partout ailleurs, les cieux nous racontent la gloire de Dieu.

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Une autre SUJ'Prise nous attendait. Lorsque poussés par la fatigue ou le sommeil , pensionnaires et. voyageurs eurent gagné leurs appartements nous pûmes à notre tour prendre possession de celui qui nous était destiné. Avec une parfaite courtoisie, et un bon vou loir dont l'ingéniosité nous toucha, le maitre d'hôtel, au lieu, comme nous nous y étlons attendus, de

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nous envoyer dormir sur le foin, avait fait. disposer . à notre intention le salon de lecture en dortoir. Des hts de camp s'y alignaient, Je gtte était vaste et confortable. En telle occurenca, on ne pouvait désirer ni mieux, ni davantage . Notre audace était récompensée et l'aventure ne manquait pas de piquant. Néanmoi ns nous ne dormîmes que d'un œil, la crainte de ne pas se' réveiller ass~:>z tôt troubla le sommeil de plus d'un. A 3 b., avant qu'aucune lueur pénétrât du dehors dans le salon nous étions debout, et notre témérité reprenant le de~sus, sans autre guide que les indications reçues au hasard, nous nous mettions en marche à la seule clarté des étoiles, ce qui, pour le dire fln passant, était fort peu de chose, car l'aube approchant, elles avaient graduellement perdu l' éclat qui nous avait si fort frappés la veil!~. Les unes après les autre~. elles pâlissaient et s'éteignaient comme des feux follets. L 'ot>scurilé était à peu près complète. En tâtonnant, et après quelques écarts, nous finîmes par tomber sur Je sentier très praticable, qui conduit jusqu'à une petite distance du 8ommet à travers de hauts pâturages coupés ça et là d'éboulis et de rocailles. ~o~s cheminions d'un bon pas, presque sans parler. et r. eta1t tout plaisir de marcher ainsi dans le gran_d sile~ce de cette haute solitude sous le crépuscule qUI venait, devant le gigantesque h~rizon qui s'ébauchait, s'accentuait, prenait for me et couleur, comme s'il fût sorti du néant ou du chaos. Aucun bruit; ni rumeur de torrent, ni chant d'oiseau, le silence n'en était que plus solennel. Bientôt au-dessus de nous, une voix rompit ce calme, mais si fraîche et si douee qu'elle semblait plutôt être l'écho de la sérénité matinale; la cloche d~ l'Angelus tintait, montant de très loin, de Fiesch, sans doute.

Sursum corda. A la hauteur où nous étions, l'éloignement, le lieu et l'heure lui prêtant une poésie plus inLime, cette voi_x de la prière, la première qui el'lt encore frappé oo9 oreilles, s'élevait dans les airs si pénérante, si dégagée de tout alliage, que nous en fi'tmes tous émus. ~el _devait être e cantique de l'homme le m\\tia de la creation. Au premier souffle de l'aurore, il se fit un tressaillement. Un frisson courut sur le vaste horizon. Obéissant


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au même mot d'ordre, les cimes se dressèrent plus blanches que des spectres sur les clartés verdâtres du ciel dont pas un nuage n'altérait la pureté. La vallée tt•u~ jours. dans _l'o~bre, élargissait son double arc jusqu'aux dermers loiDiams. Partout ce n'était que teintes livides ou dures, et profils sévères. LentAment secouée, la nature s'éveillait, elle ne chantait pas encot·e. Si gt·andiose que fût son réveil, il était glacial. Une courbe d'opale, le premier sourire du jour émergea à l'Orient, derrière le massif de la Furka. Les dernières étoiles s'effacèrent. En quelques ;moments cP.tte bande lumineuse s'enflamma. Elle passâ du pourpre à l'orange, s'étendit, se dilata, s'arrondit et aussitôt sur toute la h·gn~, les sommités géantes, pics, dents, aiguil!es, se co orerent de rose, et chacune un rubis au front s'élevèrent plus altières vers l'éther.... Qui dira jamai~ ce panorama t .. et ce jet puissant, audacieux et vain . queur de la lumière de nos Alpes 'f ~e somt;net . n'était plus éloigné. Toute trace de végétatJon avatt disparu. Nous suivions un sentiet· frayé au milieu des décombres de toute forme et de toute grandeur, qui couvrent les hauteurs du versant, zone désolée dont jadis la tradition populaire fit le théâtre des exploHs du terrible Rollibock, le bouc diabolique aux yeux de braise, qui dans ses accès de fm·eur démolissait, les. roche~s, et faisait volet· en éclats les glaciers. L bortzon s empourprait de plus en plus avec des scinti llements de gemmes et d'escarboucles. ' Les teintes i~car~ates descendaient d'étage en étage, la clarté grandissait, et la val lée apparaissait tout entière resplendissante et rosée sur les hauteurs, bleuâtres et violacées dans ses profondeurs. Nous n'étions plus qu'à quelques pas de la cime de l'Eggisborn. lot·sque pour couronner le spectacle le so. lei! . précédé àe quelques secondes par une bo;dée de flèches brûlantes, fit. irruption sur le bord des rochers lointains où son passage imprima les reflets d'un incendie. Nous le saluâmes pat· un hourrah, et la ter~e réchauffée entonna son Allelwa des beaux matins. A wut neigneut·, tout honneur !

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Le sommet de l'Eggishorn (2941 mètres) est un espacede quelques pieds carrés, une manière de belvédère ménagé par 1~ nature .!?our le bonheur âes alpinistes. Au mom~ot ou nous alhons y poser le pied, nous fûmes surprts de rencontrer des étrangers qui déjà en redescendaient. Seul, un Anglais calfeu tré dans un épais waterprof, était dem~~ré sur ~ette plateforme. Poussé par une de ces fantaisies exotiques qui caractérisent les fils d'Albion, il c_hantait.... pardon, je voulais dire... beuglait... la M~rseillaise, que les échos répétaient docilement après lui. Pourquoi les hommes nous déshonorent·ils les plus belles choses~ Si beau qu~ soit cet hymne .:!("} guerre, combien en face de cette Imposante solituda, nous lui aurions pt·éféré la prière des pâtres, ou comme ils l'appellent daus leur, ~aïf la_nga~e: L'Evangile de la parole (1). L atr étan tres calme, le ciel d'un bleu d'azur et l'on n'avait pas assez de ses yeux pour embrasser' J'inoubliable perspecLive qui, de quelque côté que l'on porte le regard, se déroule comme une féerie. Le glacier d'Aletsch, le plus étendu de la Suisse, ce grand désert de glace qui embrasse dans ses longs anneaux les plus hau tes montagnes, semblaole à un fleuve antique subitement congelé, était à nos pieds, arré té, dirait-on, en une nuit de tourmente par le mauvais vouloir de quelque puissance surnaturelle et demeuré sous la. ga~·da des vie~:X colosses blanchis,' qui ont l'air de lut dne : • Tu n Iras paa plus loin 1 • Les yeux le contempleut éblouiP, mais le cœur se serre, comme devant tout ce qui symbolise une sentence mexorable... Par quel sombre mystère ce beau fleuve destiné à s'épandre en de joyeux remous, est-il par une gelée éternelle retenu dans des remparts d'airain ? Pendant longtemps, les montagnards d'alentour ont regardé le glacier d'Aletsch comme un séjour convenable pour _les âmes qui ont besoin d'être purifiées, et la mélancoltque croyance que c'était un lieu de pénitence pour les morts a donné lieu à de nombreuses et tou(1) Le commencement de l'Evangile selon saint Jean que aur les alpages ils récitent chaque jour en commun. '


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ebantes légendes, dont quelques-unes subsistent encore aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, jamais plaine morte ne s'offrit sous de plus splendides aspects, ni ne présenta plus célèbu entourage. Toutes les sommités qui lui foot ceinture cimes à la chevelure d'argent, pics aux flancs d'albâtre' dents aux noires parois, ont leurs annales et leurs titre~ de noblesse, un renom qui ne se discute point. Ce sont les rois et les reines de la chaine valaisanne et de la chaîne bernoise. Sur les épaules de la première. on reconnaît d'abord les Mischabels, à leurs troi~ pointes aiguës, puis fièrement à l'écart, le Cervin, la Dent-Blanche, le Weisshorn, dans leur majesté souveraine : le Grand-Combio et plus loin encore le Mont-Blanc qui soulève sa ca~ otte éblouissante, au-dessus d'une houle de crêtes et de monts. Sur l'autre chaine, dAs cimes rivales, la Jungfrau chastement voi lée de blanc, le Mœncb, le Finsteraarhoro l'Aietschborn, le Hullenhorn, enfont.:Ant non moins bar~ diment leur tête dans le ciel ; et à l'Est comme vers le Sud, derrière ce noble aréopage, on voit se dresser à une altitude plus modeste, tout un monde de pics bleu· tés, de glaciers, de cônes et de croupes enfarinés, dans un pittoresq~e désordt·e, et aussi loin que le regard peut aller, se crOisent et entt·emêlent Jours fantastiques découpures. Nos yeux plongeaient sur le petit lac de Merjelen, enchâssé comme un diamant noir dans les glaces de l'Al~tsch, admirable avec ses icebergs et ses banquises, qUI nous apportent une vision des régions polaires. ~t quand nous tournions la tète, notre vue se reposait sur les flancs verdoyllnts de la c romantiyue , val· lée de Bion, dont pas plus loin que la veille, nous avions admné les pentes veloutées et les riches pâturages. Je m'arrête.... On ne peut tout é numérer. Devant ce ~erveil,Ieux hymen de la terre et du ciel, les impressions s amoncellent confuses, abasourdissent et écrasent. Une seule .néanmoins les domine et persiste, comme les paroles q01, dans les grandes émotions, montent spontanément aux lèvres, et y reviennent sans cesse· Gloire

à l'Eternel. Il est grand dans ses œuvres. Qu~ tout ce qui respire loue le Seigneur ! Sierra, 25 aotlt 1891,

MARio**•

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MON COUSIN ETIENNE Mon cousin Etienne était un grand diseur de gaudrioles, (3t n'avait pas un pareil pour dérid~r les fronts. Une joviale figure que son portrait nous a conservée, toile médiocre dans un simple cadre rle boi. ~. Il se fit • portraicturer, • aius1 que son épouse peu après leur mariage. A cette époque la photographie n'était pas encore née, et force était bien de se résigner aux longues et fastidieuses poses que nécessite la peintur~ à l'huile. L'artiste y mit son temps. C'était un peintre - à la jour· née, - honnête autant que gueux, qui t rois mois durant, gratta, brossa et retoucha son œuvre. Nourri, logé, choyé et promené par le cousin Etienne qui n'entendait pas qu'on pût s'ennuyer chez lui, - notre homme à qui on n'avait jamais fait la vie aussi belle, paya en retour smon an génie, - on ne peut donne donner que ce qu'on possède, - mais en bonne volonté. Si, à maintes reprises, son talent se heurta à la rieuse et mobile physionomie de son modéle, pour ce qui est de celle de la mailresse du logis, li en fut tout autrement. Esprit nul, œil sans flamme, visage ingrat, M"" Etienne de prime-saut fut croquée, bâclée, et dans sa robe de IlOCd 1 ta,ffetas gorge de pigeon, bien définitivement fixée sur la toile. A défaut tle perruque, de cuirasse ou de pourpoint, le cousin, pour la solennité du portrait, dut ainsi que cela se pra ti· quait alors, revêtir l'uniforme militaire à parements rouges, rehaussé par le hausse-col et ses épaulettes de capitainP.. Cet air martial, tout d'emprunt, trahit l'humeur joyeuse, les allures fanfaronnes de l'homme fait, non pour la guerre, mais pour s'ébattre en gais propos. Une sorte de gaucherie angonsée, la raideur voulue bien visible, tout, jusqu'à la tension des nerfs, et au pli de la bouche qui cherche à réprimer un duux sourire, nous le montre aux prises avec son naturel. Le portrait achevé, chacun en dépit des impérities de l'artiste, le déclara réussi. Une croO.te, mais la ressemblance y était. On n'en demanda pas davantage.

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Et tenez, encore aujourd'hui, rien qu'à contempler cette toile naïve, rien qu'à voir cette pleine et cordiale figure, où le souci ni le doute n'ont creusé leur sillon, ces yeux. bleus et clairs dont la tristesse n'ont pas voilé l'éclat, cn mex:ton bon enfant piqué d'une fossette, ces lèvres prêtes à s'eotr'ouvrit· pour nous jeter le mot pour rire . . . rien que cela me réchauffe le cœur, et jP pense l'entendre s'écrit~r : - Sabr-r1·e de bois.' C'était son exclamation favorite. Tel il était, tel encore il se survit. Il portait avec lui une tralnée de galté; elle l'entourP toujours de son auréole.

l'électricité, le naïf orgueil de mon cousm Etienne à l'endroit de ce voyage peut pan-11tre ridicule, je n'eu disconviens pail. :Mais si l'on songe qu'un dE>rni siècle plus PD arrière, chacun ne pouvait s'en vanter d'autant, la question change de face. Autres temps, autres mœurs. L·ére des • trains de plais1rs • n'était pas encore inaugurée. Nos pères sortaient p eu. La fièvre de locomotion qui nous saisit dès le berceau leur était iuconnùe. Pour le plus grand nombre, un voyage a Berne marquait la vie d'un homme d'un caillou blanc, et ceux que l"'ur fortune y avait conduits, rapportaient ordinairement de cette date mémorable matière à raconter pour le reale de leur vie. Fertile en ~pisodes, celui du cousin Etienne avait eu pour effet de désopiler la rate à lous ses voisins. Il en était revenu l'esprit tout bourré d'anecdotes, et ses impressions à force de passer de bouche en bouche, avaient .fini, non seulement par s'incru~:~ter dans la mémoire de chacun, mais aussi par devenir proverbiales. Ce voyage à Ber-rrne, - le cousin, outre qu'il était doué au plus haut degré de l'accent vaudois, avait l'habitude de faire ronfler démesurément les ,., - s'était accompli à peu près clandestinement, soit à la façon dont on fait l'école buissonnière, quelques semaines avant son mariage. Un beau dimanche de printemps qu'il s'était rendn à Romont pour visiter un sien parE-nt, certain cousin a la mode de Bretagne; celui-ci se trouvant précisément absent, il lui vint à l'idée de pousser jusqu'à Fribourg, et de juger par lui-même de l'élévation de son fameux pont suspendu qu'il n'avait encore jamais vu autrement qu'en gravure. Ce qut acheva de l'y décider, ce fut la proposition d'un voituritlr avec lequ(ll il dina à l'auberge, q11i allant à Beme, et s'en retournant à vide, lui ofl"r;t uue place à ses côtés. Il n'y résista pas, et )fi même soir, après avoir arpenté Fribourg avec son nouveau compagnon, mis en goilt par cette première équipée, il ~e dit à lui· même que ce serait folie de s'arrêter eu si beau chemin : - Sab1·-rre de bois .' .. . si j'allais à Be1·-1-rne, ce serait voir bien du pays à la fois ! ... - Voyons, décldez-vou.3, répondait Je voituriP.r. Demain matin à 4 heures mes chevaux serout attelés. - A quatre heures? ... sapristi 1 à Ber-rrne.... - Eh bien oui, à Berne. Ce n'est pas Je bout du monde. - Allons, c'est convenu, à Ber-rrne! ... Buvon~ uu coup, et là· dessus nous irons nous coucher. Nos deux hommes n'avaient pas attendu ce moment pour devenir camarades.

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• Avec lui, on doit rire par force, • disaient lei! femmes du lorsque passant à côté de la fontaine, il leur lançait selon sa coutume, quelqu'une de ses f!lcélies hab ituelles. Et c'était vrai. Entrait-il pour la veillée sous un t01t où régnait la discorde ? . . . . le mari cessait de bougonner, !a femme de rijjOster, les enfants de piailler. Il se fa isait une accalmie. Monsieur Etienne! . ... Son n'>m prononcé avec une intonation joyeuse, soulevait un soupir de soulagement dans toutes les poitrines. La chambre semblait ensoleillée par sa présence, et les petiots, tout oreilles, se serraient contre ses genoux pour n~:~ rien perdre des drôleries que lui seul savait si bien conter. A v ait-il en entrant flairé une atmosphère de querelles ? il ne s'en ingénialt que mieux à la dissiper, et y mettait toutes les batteries de son imagination. Il est vrai de dire qu'il n'etlt servi à rien de se regimber contre sa désopilante influence; les plus obstiués avaient beau faire .... comme les autres ils étaient gagnés ... et rassérénés par son in tariSsable galté. - Mon~;~i eur Etienne, raconte-n.:;us l'histoire des ours de Berne? ... lui disaient tout bas les enfants. Il était rare qu'on le laissât partir sans en avoir entendu quelque chose. Lui-même s'y prêtait d'ailleurs de si bonne grâce. - Sabr-rre de bois!. . . Son voyage à Ber-rrne 1. . . Il mettait autant de gloriole à en parler que s'il fO.t revenu du Kamtchatka. A défaut de nou velles à sensation, histùires de gazette, légendes et anecdotes d'almanach, il so rabattait toujours sur cette escapade, et c'en était unP, et son g rand che · -val de b ataille. • Au JOur d'aujourd'hui, • où tout se fait à la vapeur ou à. villa~e,

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12 Le lendemain, le cousin Etienne faisait son entrée dans la ville des ours, et de ces redoutables Excellences dont la mam a pesé s1 fort sur nos ancêtres. Pour plus de chance, c'était jour de foire, un fourmillement de gens et de bêtes, des campaRnards en foule venus de toutes ll's parties du canton, gens bien plantés, robutes et proprement vêtus. - Serviteur. . . fit tottt haut le cousin Etienne en mettant pied à terre, les Ber-rrnois tout de mlime sont de ct -t·,·ânes gaillards 1 Voyons-les voir de plus prés .. .. Pour lui ce fut une journée d'enchantement, celle des émerveillements n aïfs. N'oublions pas qu'il sortait de son village, un village maussade entre plaine et maraia. Aussi ébahi en to mbant à Berne qu'un Lapon le serait en débarquant à Pékin, il s'enfonça dans la cohue, jouant des coudes, bousculant et bousculé, cherchant à se reconnaltre tout en se fourvoyant de plus en p lus, poussé, heurté, ballotté, et, • à force de voir du nouveau •, ainsi qn'il le disait lui-même, saisi de vertige à l'égal d'un homme 1vre. Sa vi site aux ours q u'il fit en comp agnie de beauco up d'autres gens, les aborda de la fosse étant envahis par le.s forains , ne lui laissa pas u ne impression moins favorable. - Sabr-n·~ de bois! .. . Quels ours bons enfants que ce uxlà, et jolis qu'ou les prendrait pour des demoiselles. . . . Mêmement que Je plus gros m'a fait le salut militaire 1••• Ma foi, de fiers mâtins 1.. . Dommage qu'il leur manque la parole, on les ferait causer .... - Mirage ... affaire de mirage, dirait Daudet. Je panse comme lui. Et là dessus, je passe sur la grande horloge aux personnages automatiques défilant ponctuellement au coup de midi sous le vieux cadran, comme je passe sur toutes les choses curieuse!.', glorieuses et merveilleuses devant lesquelles M. Etienne écarquilla les yeux, - et qui racontées et enjolivées p ar lui, fire nt tant qu'il vécut les délices de ses audite<~rs . Le mirage.... Pour nous, le mot est nouveau, non la chose, car sans vouloir en médire, c'est ce mirage épatant qui ins pira Je cousin Etienne, et fit le succès de ses récits . Par là, je crois avoir suffisamment prouvé, que pas n'est besoin d'être né sous le ciel de la Provence poUl' en subil· l'influence, et qu'on peut en être frappé a ussi bil'n sous les .brouillards de la Broye que sous le soleil de Tarascon. M.uuo•••

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MAISON FERMEE Or, il arriva qu'une sombre nuit d'automne, - vers la fin d'octobre, si je m'en souviens bien, - un m~nétrier qui vers le petit jour, son v~olon ROUS le bras, revenait en titubant de la fête d'un village voisin, crut sentir Je terrain lui manquer I'O US ses pieds, en voyan t u ne des fenêtres de la maison grise proj<lter une vive lueur, en même temps qu'il s'ei.t échappait des cris déchirants et prolongés dont les intonations n'avaient rien de la voix humaine. De la frayeur qu'il en eut, et comme il le raconta plus tard, ses cheveux se dressèrent sur la tête. Ses jambes flaaeollaient, il se figura 6Lre tombé ni plus, ni moins, en pleine

~hète (Sabbat).

Par quel effort suprême parvint-il à regagner son logis ? Lui-même n'eût pu le dire. - Suffoqué, couvert de sueur froide en arrivant, incapable de proférer une parole, il se la1ssa tomber sur un banc, et appuyant ses coudes sur la table, il demeura quelque temps la tête dans ses mains. - La chète ! ... exclama-t-il enfin, lorsque la voix lui revint. La chète ! ... le diab!e et son train ... . A son effarement, sa femme comprenant bien qu'il lui était arrivé quelque cho11e d'extraordinaire, le prel'lsa de quesUons. Tout en s'épongear.t le front de son vieux mouchoir à carreau x, car il suait à grosses gouttes, il lui raconta avec le rabâchement commun aux buveurs, le mauvais quart d'heure qu'il venait de passer. Mais quand il voulut en parler aux voisins, ceux-ci secouèrent la tête à son récit, qu'ils prirent pour une hallucination d'ivrogne, et ne se firent pas faute de l'en plaisanter et de renchérir là-dessus ; - aussi le soir n'était-il pas venu qu'il était déjà la fable de tout le quartier. Ainsi bafoué, et voyant que chacun lui r iait au nez, le bonhomme, qui n'était pas fort en logique, commença à douter de lm-même, et n'aurait pas tardé à se ranger à l'opinion d'autrui, en attribuant sa propre flpouvante à une fantaisie

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15 de son cerveau si deux jours après un cas analogue au sien n'avait pas don'né une apparence de raison à so n dire. Un marchand et sa femme partis avaut le jour, pou r se rendre à la foire de C*** avec une cargaison de vaisselle, ne furent pas peu effrayés, comm~ ils arrivaient près de la place d'armes, d'entendre dt>s cris et .des hurlem ents acc.om• pagnés d'un formidable brmt de ferraille, sorttr de la maison fermée. L'homme arrêta brusquement sa charrette, tandis que sa femmP )!lus morte que vive, se cramponnait à lui en poussaut u'ne exclamation d'effroi. Cris d'bommes ou de bêtes? . . . un vacarme infernal comme ils n'avaient encore jamais entendu, tantôt s'élevait du jardin tantôt semblait sortir de l'habitation. Parfois des lueurs f ugitives, bient6t effacées, glissaient s.ous les arbres et. em)JOurpraient les murs, comme l'eùt fait un feu de bnndliles. Par mstants on distinguait nettement le son de plusieurii voix parlant' une langue mconnut>, et très rapprochées, si prés même qu'on pensait en è~re etlleuré ... pui~ une grande clameur aigüe s'élevait les dommant toutes, déchirante comme le cri d'une âme en détresEe. Ni le père Bodmot, m sa femme, n'avaient jamais passé pour gen~< superstitieux Hiver comme été, à t~ute heure. du jour et de la nuit, ainsi que le voulatt leu.r mé~ter, 1ls ava tent avec leur carriole arpenté le pays, sans JamaB se f0urvoyer en quelque Pndroit hanté. Avoir peur, la Françoise, - allons donc 1 De f<-rte stature, noire, tannée, un peu barbue, et portant martialement sur un buste monu mental, trois étages de men ton, pour ce qui était du courage, elle en eùt remontré au plus brave. Mais cE>tte fois, d'une voix étrangl é~ par la terreur, elle bégaya en pou ssant son homme du coude : - Pas d~ ça, Pierre ... il faut retourner en arrière .... Pour l'or du monde je ne passerai pas là. ... Ils ménent le sabbat.... Prenons le chemin des Râbles. Bodinot ne se le fit pas dire deux fo is. Ses dents claquaient; aussi tremblant que sa femme, il tourna bride. Pour le coup, cette aventure eut du retentissement. Si plusieurs s'obstinèrent à en rire, beaucoup y v1rent un truc pour effrayer les passants, soit une manière de cacher quelque chose de pire. Les proLJleneura se portèrent nombreux vers la maison fermée. On s'arrêtait devant la gnlle, et l'oreille tendue, plongeant le regard dans l'épats!leur de la feuillée, on y cherchait quelque trace de vie. Pendant la jour rien n'indiquait que l'enclos eut des habitants, - mais la nuit avancée, le tintamarre reprenait de plus belle, ainsi que l'affir-

mértnt q uelques jeunes gens, qui voulant sonder ce mystère, se postèrent u n soir après neuf heures sonnées, à quelques pas de la maison. Les sorciers y tenaient-ils leut· sabbat, ou bien était-elle réellement hantée ? Il n'en fallut pas davantage pour remettre en mémoire toutes les histoires de revenants et récits de sorcellerie, qui au terLps jadis étaient accrédités dans la contrée. On en parlait à la veillée, et il se trou;·a plus d'une vieille femme po ur s'en faue l'écho, en racon tant à son auditoire ébahi, les apparitions diaboliques dont, si ce n'était elle-même, au moins ses parents ou ses proches avaient été témoins, ·- alors que la chète se tenait dans certains carrefollrl> mal famés, et q ue son vacarme se prolongeait jusqu'au matin. Rten que d'y songer donnait le frisson. La même semame, un homme qo'on n'avait jamais vu dans la ville, sorte de colosse à cheveux ro ux, vêtu d'un costume de coupe étrangère, se présenta dans divers magasins. Bien que J'expression uatorelle de son visage fut débounaire, elle n'en était pas moins nmd1Ie effrayante par la fixité extraordinaire des yeux, d'un gris très pâle. Il ne parlait pas le français, mais il était muni de petita morceaux de carton portant l'indication des objets dont il avait besoin. Ses achats terminés, il déposait sur le comptoir une pièce d'or anglaise, sur laquelle le marchand lui rendait la monnaie; et comme il était venu il repartait, sans proférer une parole. A sa sortie de la ville, des gamins qui jouaient aux billes, eurent un écart en le voyant passer. ... - Le Vaudai!. . . (le diable) fi t l'un en retenant son soufl:le. Et sans savoir ce qu'ils disaient, tous les autres de répéter après lui: - Le Vaudai! ... Le Vaudai! ... Néanmoins, au bout de quelques minutes, se ravisant, ils se mirent à toutes j·1mbes à sa pourauit~, et arrivèrent assez à temps pour l'apercevoir au moment ou il s'enfilait dans l'enclos désert. Cette fois l'éveil était donné. La police, qui était à la recherche d'une bande de faux monnayeurs qu'on supposait cachés dans les environs, pensa êLre sur leur piste. Le lendemain elle opéra une descente, et la maison grise fut cernée. Aux .coups de sonnette réitérés du commissaü·e, l'homme de la veill~ parut sur le &euil, et vint gravement ouvrir la grille de la cour qui grinça sur ses gonds rouillés. Suivi de ses hommes, le commissaire pénétra dans l'habitation.


OUVRAGES ET MATÉRIEL SCOLAIRES AUTEUR

* * 16 Une femme aux cheveux plus blancs que neige, vêtue denoir comme une veuve, et d'une dlgnitê suprême, debout sur la porte du salon les attendait. - Nous sommes les propriétaires de la maison, fit-elle avec une douceur touchante. Nous l'avons achetée il y a vingt-huit ans dans un voyage que nous flmes en Sui~se à cette époque. Je ne suis point surprise qu'après une auesi longue absence, notre retour inattendu ait pu éveiller des soupçons. Mon mari est atteint d'aliénation mentale, ce qui nous oblige à l'isolement et à la solitude, car ses nuits sont terribles.. . . J'ai résisté à toutes les sollicitations de sa famille qui voulait l'enfermer dans une maison de fous .... Lorsque trente ans en arrière, je l'ai épousé, j'ai promis de ne jamais l'abandonner. . . . Dans Je bonheur comme dans l'adversité, ma place ~at à cOté de lui, et jusqu'à la mort. Et comme Je commissaire, ému de tant de grandeur et de dévouement, se confondait en ex eudes, elle répondit simplement: - Nous sommes bien malheureux ... mais Dieu est grand .... Et d'un geste attendri, elle montrait le ciel. Au même instant, un ricanement féroce éclata sur sa tête. Un homme de haute taille, pâltl, grimaçant, enveloppé d'une robe de ebambre à ramages, se penchait sur la rampe au sommet de l'escalier. En apercevant les étrangers il poussa un cri rauque, il disparut en fermant les portes à grand fra· cas derrière lui.

*

* *

Quelques mois après le pauvre fou avait cessé de vivre et reposait dans une place résPrvée à l'angle nord du cimetière, sous une large dalle de marbre. Avec la date de sa naissance et celle de sa mort, son nom seul était gravé, un nom antique, et presque légendaire dans !eR fastes de l'aristocratie anglaise. Et l'année n'était pas achevée, que déjà sa noble compagne dormait à ses cOtés. Aujourd'hui, à l'ombre d'un du passage du l'envie de tous

leurs dtlux noms, sur la même pierr~ tombale grand saule, sont le seul SOliVenir qui reste bPau couple, qui jadis excitait l'admiration (lt ceux qui le voyaient.

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TITRE

BBR!URo Gmmmair·e du Val111is, Larive li:. Fleury Gramm11ire 71rt!J1aratoire

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GuvAu

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BouRQUARil s. ;\1.

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J. ST.

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- 50 Ct~tèchisme d~t diot·ose Ami de l'enfmwe, 1er li\'fe de l ~cturc , 1Ume tldit. - 60 1 50 2me Lit"Jre de lee/ure (livre de l'èlèv e) 2 50 " » (livre du mnître ). 15 El.!ments de géo,rvaphie à l'usage des écoles prim. 1Bible illustrée â l ' u s~ ge de la jeunesse Jlléthode de leclttrP corresrondanl avec les tableaux du même

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Division des parties et chapitres. Sic transit gloria mundi .

1" PARTIE. - "Voti•JIIS préliltlinaire-1. 1. La fluHlle e:. 1.> foyer clome,..llqne. 2. La f,•mrne ,J~ ménage. 3. Ut' l'P•pnt d·~ famille 4. De l'ec:onotlll~ <lùme~tJqu•' - ---- ----------~------------------------------------~----~


II• • PART!E. - Organisation morale de la maison et qualités d'une bonne m énagère. 1. La prévf'nance. 2. Les

~~~v.~~)-==================~===== \

tètes et réunions dB famille. 3. Devoirs du voisinage. 4. La lecture Pt la bibliotLêque de la maltresse de maison. r•. Du r6le de la femme dam! l'.iducation dt>s enfants. Ill'"' PARTIE. ~ 01·.qanisation matérielle et administration économtque de la maison. 1. Appr.. nt1ssage de l'économie damestique. 2 Des qualité!! de la bonne ménagère. 3. De l'économie. 4 . Emploi de la journée d'une mallresse de maison. 5. Installation d'un ménage. 6. Distribution intérieure de la maison. 7. Cui11ine, office, boulangerie, ustensiles Pt acc~'ssmres de cuisinE'. 8. De>~ domestiqueR. 9. Blancbi11sage et entretien du linge. 19. Entretien Pt conservation des aliments. 11. Des travaux à l'aiguille. 12. Des provisions. 13. Manière d'ordonner un dtner. 14. De l'apprenti11sage de la cuisine. 15. Notions élémentairt>s d,. cuisiue. 16. La ferme et la fermiêrP. 17. Le jardin potager. 18. Chauffag~ et éclairage. 19. Rf'cettes et connaillsances utill's. 20. DP. la comptabilité. 21. Conseils d'hygiène.

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