L'Ecole primaire 1883, supplément

Page 1

f92

v.a.uiln• Une curiosité littéraire. Un journal parisien a récemment signalé un ouvrage, qui eet une véritable curiosité littéraire. M. de Chennevièrea a écrit 43 livraisons in-folio en un style excellent sans employer une seule fois le mot qui ni lo mot que. L'auteur remercie ce journal par la lettre suiT&nte: c Monsieur, Vous avez bien voulu découvrir dans les pages des Dessins du Louvre une nouveauté de style. L'attention bienveillante de Totre lecture me flatte infiniment. Permettez-moi de vous exposer les motifs !le ma lutte littéraire. J 1ai juré haine aux qui et aux que, ces lourds conjonctifs de la syntaxe. Cette guerre à outrance contre de paisibles pronoms trouble l'économie de la langue et le mécanisme ordinaire des phrases : mais elle éclaircit la pensée, elle allège la période, elle suspend les longueurs. Depuis quatre siècles l'horrible qui tyrannise les lettres françaises, il in· feste les meilleurs écrivains. Rabelais le cultiT&it dans les bosquets de l'abbaye de Thélème; Pascal et La Bruyère montrèrent pour lui la plus coupable des indulgences. Bossuet le mettait sur les autels. Cette déclinaison éhontée du qui faisait les délices des contemporains. MM. de Port-Royal renchérirent sur Bossuet, et les beaux esprits de la cour et de la ville semèrent cie qui leurs productions. A. l'avènement de Voltaire, le qui régnait despotiquement. Voltaire le laissa vivre. n lui abandonna ses TOrs tragiques mais il l'éconduisit de sa prose, de sa belle prose si pleine et si Tive. ll ne l'expulsa point toutefois avec assez de rudesse, et l'ambitieux pronom réapparut au seuil de certaines phrases. Cha· teaubriand le caressait de sa plume douillette et le berçait avec une mélancolie mignarde. Lamartine lui douna des ailes d'or et le lança dans l'azur de ses rêves. Notre qui rendu insolent par l'hommage d" ces grands noms, allait terroriser davantage encore la République des Lettres. Victor Hugo, ému de cette audace, voulut faire bonne justice de cet outrecuidant; il l'appela en champ clos, le rudoya, l'estocada, mais l'autre tint ferme. J'ai essayé, monsieur, d'approc~er ce monstTe, d'étudier sa tactique, ses moyens do défense. Enfin, je l'ai surpris et je l'écorche vif: il méritait ce châtiment. La patience fut ma seule arme, la patience, à défaut de génie, une longue patience. Avec les qui, la phrase s'embourbe, les pensées hautes ou gracieuses reTê· tent une enveloppe bourgeoise, les Tirilités de la concision perdent de leur étreinte. Emancipée des qui, la phrase s' en va légère, leste, sautillante, aga· çante, provocante, amusante. Elle a le maintien jeune et aisé. C'est une fillette agile et court-vêtue, gagnant d'un saut le but de sa course. Le parti-pris apparent de mon style, cette rage de l'anti qui, pourrait sembler d'abord une gageure peu digne d'un écrivain d'art, mais cette petite conquête grammaticale me paraît capable d'intéresser les curieux de littéra· ture. Recevez, monsieur, etc. l!BNRY DE CHBNNBVIÈRES. )

Œil cù mouclie. -Notre intelligence est comparable à l'œil de mouche, qui a un grand nombre de fenêtres. Lee esprits étroits ne savent regarder que par une seule, et a' étonnent que l'on puisse voir autre chose que ce qu'ils voient.

SUPPLÉMEN1' A L'ECOLE PRUIA.LRE.

SOCIÉTÉ VALAISANNE D'ÉDUCATION. 6me RÉUNION GÉNÉRALE (Compte-rendu extrait des Nos des 1 ct 5 mai 1883 de la N. Gazette drs Valais.) ~ne assemblée oil le personnel enseignant pri· ma1re de tout un petit pays se tl'ouve réuni et représenté par plus de 200 personnes, ne laisse pas d'offrir quelque intérêt et de renfermer plus d'un utile enseignement. L'instituteur est heureux de pouvoir respirer parfois une autre atmosphère que celle de l'école, de se retrouver avec ses anciens condisciples et de sentir son courage renaître au soutlle vivifiant des paroles et des sen. timents échangés ùans les rares rendez. vous de la science et de l'amitié.

Tel est le spectacle que donnait uu de cel' jours damiers l<t société valaisanne d'E:Jucation. Fondée à Sion même en 1873, elle se retrouvait à son berceau le jeudi 26 avrill883, après avoir su.ccessivement vi.sité dans ses étapes Monthey, Geronde, St-Maur1ce et Martigny. Qui aurait ce jour-là entendu traiter des questions pédagogi· ques uvee des iMes préconçues d'indifférence ou


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.
L'Ecole primaire 1883, supplément by Résonances, mensuel de l'Ecole valaisanne - Issuu