CHANGEMENT CLIMATIQUE ET URBANISME
entre vulnérabilité et résilience des villes
Romane DANTCIKIAN Tuteur : Karine LAPRAY e642 rapport d’étude L3 31/05/2018
CHANGEMENT CLIMATIQUE ET URBANISME entre vulnérabilité et résilience des villes
Romane DANTCIKIAN Tuteur : Karine LAPRAY e642 rapport d’étude L3 31/05/2018
« C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas. » Victor HUGO, Les contemplations (1856)
« Respect à celles et ceux qui ont déjà perdu leur vie à cause du réchauffement global. Respect de celles et ceux qui perdent leur vie dans le futur. Respect de l’engagement que nous faisons de rester non-violents et attentifs les un.e.s aux autres. Nos dirigeant.e.s ne respectent pas les lignes rouges d’une planète juste et vivable. Des lignes que nous ne devrions pas oser franchir. Nous dessinerons ces lignes rouges avec nos corps, déterminé.e.s à protéger notre maison commune. », Jean MERCKAERT, Revue Projet (2016)
SOM MAI RE 0. Introduction 1. Présentation et contextualisation du sujet
1
2. Quelques éléments de définition : vulnérabilité, résilience, montée des eaux
2
I. État des lieux: culture du risque et vulnérabilité au changement climatique 1. Les différents scénarios scientifiques
4
2. L’exposition des sociétés au risque d’inondation
6
3. État des lieux global des villes dans le monde : un état d’urgence
7
4. Réfugiés climatiques et conséquences urbanistiques sur les villes d’accueil
10
2. Stratégies de résilience au changement climatique 1. Les villes au défi de s’adapter
13
2. Plan et stratégies d’adaptation : une réponse urbaine durable ?
14
3. La résilience, sujette à des inégalités mondiales
16
3. Études de cas 1. Présentation et contextualisation des études de cas
18
2. États-Unis : New York City et Shishmaref
19
3. Thaïlande : Bangkok et Khun Samut Chin
32
4. Conclusion Des réponses inégalitaires face au changement climatique : vers de nouveaux enjeux
39
5. Annexes 1. Glossaire
41
2. Bibliographie
43
0.
INTRODUCTION
1. Contextualisation du sujet
Les villes deviennent le levier d’action de la lutte contre le changement climatique. Avec l’exode rural massif que connaissent les pays émergents, on s’attend à comptabiliser 70% de la population mondiale vivant dans les villes, soit un chiffre qui s’élève à 5 milliards d’habitants. C’est pourquoi l’étude des zones urbanisées est au centre de la réflexion. Géographiquement, beaucoup de grandes villes occupent le littoral ; parmi elles, un certain nombre de capitales comptabilisent des millions d’habitants. Le phénomène étudié prend ainsi toute son ampleur lorsqu’on sait que la ville littorale se montre tout à fait vulnérable face à la montée des eaux. La croissance démographique et le développement économique des zones côtières participent à l’augmentation des risques. Manille, La Havane, Calcutta, Dacca, New York, Orléans, Montréal, Kuala Lumpur, Shanghai, Bangkok, Jakarta et bien d’autres encore ; autant de villes installées en zones inondables qui méritent l’attention avant qu’il ne soit trop tard. Mais comment les villes répondent-elles à ce risque d’inondation de plus en plus menaçant ? Quelles transformations sont subies à l’échelle mondiale ? Quelles réponses sont données à l’échelle locale ? À l’heure où la sensibilisation au développement durable « Le débat sur la réalité du - qui contribue à limiter le changement climatique et ses effets changement climatique est est de plus en plus active, le problème des villes côtières est désormais clos, il importe de encore peu compris par rapport aux conséquences qu’il peut concentrer à présent nos forces sur avoir sur le long terme. L’heure est à l’urgence et il me semble les solutions qui permettront de indispensable qu’une prise de conscience générale se fasse, pour rendre notre futur vivable. », préserver les territoires qui pourraient être potentiellement rayés « Réchauffement : resterons-nous de de la carte dans un futur plus ou moins proche. En tant glace ? » L’influx (blog), 26 octobre 2015 qu’étudiante en architecture, j’ai trouvé, en la rédaction de ce rapport, l’occasion de faire valoir les stratégies de réponse efficaces tout en pointant du doigt le manque de moyens développés par certaines collectivités. Il s’agira, dans l’ensemble, de démontrer les inégalités en matière d’adaptation urbaine et d’étudier les stratégies de résilience mises en place dans certaines villes face à la vulnérabilité d’autres territoires qui sont contraints de donner des réponses différentes, bien moins efficaces.
La montée des eaux est éminemment liée aux territoires et il conviendra de se demander quels sont les différents niveaux de résilience atteints par les villes côtières face à cela et quelles stratégies sont développées pour répondre à cette nouvelle problématique urbaine liée à l’urgence climatique ?
1
2. Quelques éléments de définitions
Pour contextualiser le sujet, il semble nécessaire de définir en quoi consiste la montée des eaux à l’égard du changement climatique. Si l’historique du climat se résume à une succession de périodes froides et chaudes depuis 1 million d’années, ceux-ci s’effectuent cependant en cycles lents, de plus ou moins 4°C d’amplitude sur plusieurs milliers d’années1. Notre époque se situe dans une période plus chaude, appelée période interglaciaire, depuis 18 000 ans. Cependant, sans compter que les 100 dernières années constituant le siècle le plus chaud depuis 2000 ans2, celui-ci ne présente pas les changements réguliers et progressifs qui devraient marquer une période chaude. Au contraire, ces changements de température sont bien trop brutaux pour estimer qu’ils soient naturellement liés au cycle du climat. C’est précisément pour cette raison que l’on parle aujourd’hui de « changement climatique ». Il se base sur la répétition d’événements climatiques extrêmes sur une durée de référence de 30 ans, un temps très court à l’échelle du climat. 97% des scientifiques estiment que la cause est anthropique3 , en lien avec avec les gaz à effet de serre* rejetés par les activités humaines. En 2003, on comptait une augmentation de +0,8°C au niveau du sol depuis 1900, dont 0,5°C depuis 1975, et +0,6°C au niveau des océans. La dernière décennie, titrée comme la plus chaude du siècle, compte l’année 2002 comme la plus chaude depuis 350 ans. Ce réchauffement à l’échelle planétaire entraine une chaine d’impacts à plusieurs échelles et des conséquences successives par effet « domino ». Ainsi, la hausse des températures entraine l’élévation du niveau de la mer. Elle est aujourd’hui calculée à +40cm par rapport à la période préindustrielle4 . En finalité, outre les impacts sur les éco-systèmes terrestres et marins, cette chaine aboutit à de lourdes conséquences sur les sociétés humaines, en termes de santé, d’agriculture, d’urbanisme ou encore d’énergie. On dénombre de nombreux changements environnementaux dûs à la montée des eaux, comme l’invasion des terres plates et des étangs d’eau douce. Cependant, elle est aussi une conséquence de certaines causes anthropiques directes, comme la bétonisation, les barrages qui retiennent les sédiments et participent à l’affaissement des terres, l’urbanisation désorganisée et massive qui entraine la subsidence des sols ou encore la disparition des voies d’écoulement des eaux pluviales. Dans le contexte du rapport d’étude, il sera nécessaire de différencier l’élévation globale du niveau de la mer et la submersion marine - qui n’est qu’une conséquence -, se définissant comme une inondation temporaire due aux ondes de tempête, et cependant facilitée par l’élévation globale du niveau de la mer. Ces changements agissent sur les villes qui témoignent de leur vulnérabilité. Selon le GIEC5 , la vulnérabilité, « c’est le degré auquel un système risque de subir ou d’être affecté négativement par les effets néfastes des changements climatiques, y compris la variabilité climatique et les phénomènes 1
LAMOUR, Bruno, 2015. Stop au dérèglement climatique. Ivry-sur-Seine: Editions de l’Atelier.
2
« Bilan Planète 2009 », Le Monde Hors-Série, n°1 (10 novembre 2009), 170p.
3
Ibid.
4
GIEC, 2007. Fourth Assessment Report : Climate Change 2007. Cambridge : Cambridge University Press.
5
Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat * nb. : les mots soulignés sont définis dans le glossaire en annexe
2
extrêmes. La vulnérabilité dépend du caractère, de l’ampleur et du rythme des changements climatiques auxquels un système est exposé, ainsi que de sa sensibilité et de sa capacité à réagir et à s’adapter. »6 La vulnérabilité d’une ville relate finalement de l’état de fragilité du territoire face à la rencontre entre les aléas naturels et les conditions anthropiques spécifiques à ce même territoire (densités, résistance des infrastructures, politiques d’adaptation locales, etc.). Elle se calcule de manière très précise pour mesurer l’état d’un territoire : V = f(E, S, CA)7, avec E pour Exposition aux aléas, S pour Sensibilité des écosystèmes et CA pour Capacité d’Adaptation. Enfin, pour répondre à leur vulnérabilité, les villes doivent s’adapter aux changements et développer une certaine résilience. D’abord empruntée au domaine des sciences physiques, la résilience concerne l’évaluation de la résistance des matériaux à des chocs élevés et leur capacité d’absorber l’énergie cinétique sans se rompre. Dans le cadre des sciences psychiques, « c'est la capacité de reprendre un développement malgré l’adversité »8 . Plus précisément, « la résilience est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’évènements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères. »9 Le terme de résilience apparait aujourd’hui comme un concept pluridisciplinaire qui définit une faculté à surmonter des obstacles et événements difficiles, en développant une capacité d’adaptation aux changements. Nous nous baserons ainsi sur la définition établie par Jean-Jacques TERRIN, architecte-urbaniste et chercheur sur les stratégies de l’innovation dans le cadre des enjeux de la ville contemporaine : « La résilience, c’est la capacité d’une communauté à résister aux chocs, à absorber les perturbations, anticiper les changements, à se réorganiser tout en conservant son identité et enfin à développer sa faculté d’apprentissage et d’adaptation. »10 Dans le cadre du sujet, cette définition s’applique à l’échelle des villes, qui doivent faire face aux bouleversements environnementaux potentiellement dangereux, liés au changement climatique et qui seront approfondis dans la première partie. Ce type de résilience engendre des changements collatéraux, socio-économiques mais surtout urbains, par le biais de plans et stratégies d’adaptation mis en place à l’échelle locale pour diminuer les risques potentiels.
M. L. PARRY, 2007. Contribution of Working Group II to the Fourth Assessment Report of the International Panel on Climate Change. 6
7
GIEC, 2007. Fourth Assessment Report : Climate Change 2007. Cambridge : Cambridge University Press.
8
CYRULNIK, Boris, 2001. Résilience - Connaissances de base. Paris : Odile Jacob
9
MANCIAUX, Michel, 2001. Résilience : résister et se construire. Paris : Collectif
10
TERRIN, Jean-Jacques, 2014. Le projet du projet. Marseille : Parenthèses.
3
I.
ÉTAT
DES LIEUX
:
CULTURE DU RISQUE ET
VULNÉRABILITÉ AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Avant de définir l’état général des villes côtières et l’impact sur les sociétés urbaines, il est indispensable de définir le rapport scientifiquement établi avec le climat. Les affirmations tenues tout au long de ce rapport se basent sur une situation globale scientifiquement prouvée.
1. Les scénarios scientifiques L’état des connaissances scientifiques actuel permet d’affirmer plusieurs propos sur les impacts du changement climatique. Dans le cadre de la recherche, nous nous baserons ici sur les données partagées par le GIEC11, comme données reconnues. L’élaboration des simulations climatiques futures dépendent des émissions de gaz à effet de serre, passées, actuelles et futures. Les scénarios SRES (Special Report on Emissions Scenarios) ou RCP (Representative Concentration Pathways)12 sont des scénarios présentant différents modèles d’émissions, en fonction des trajectoires adoptées par les sociétés pour se développer et qui sont aujourd’hui difficiles à prévoir. C’est pourquoi le GIEC a mis en place quatre scénarios différents en fonction des différentes tendances d’émissions possibles, du plus optimiste au plus pessimiste : les RCP 2.6, RCP 4.5, RCP 6.0 et RCP 8.5. °C
Evolution des températures depuis 1900
Observations
5
RCP 8.5 (scénario pessimiste)
4
RCP 2.6 (scénario optimiste)
3 2 1 0 1900
1950
2000
2050
2100
Graphique issu des données du GIEC
C’est ainsi que, sur ces scénarios, se développent les scénarios de changement climatique, des simulations climatiques donnant des images potentielles de demain. Ces scénarios incitent les Le GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) a publié quatre rapports depuis 1990. Le dernier date de 2007 et le prochain sera publié en 2022. Chaque rapport établit le bilan des changements climatiques à l’année de publication et donne des mesures d’atténuation. Les travaux du GIEC sont répartis en trois groupes de travail, souvent sur les thèmes suivants : éléments scientifiques, conséquences, adaptation et vulnérabilité et atténuation du changement climatique. 11
12
Changement de dénomination à la publication du rapport de 2007
4
sociétés à prendre des mesures d’adaptation au changement climatique, en mesurant les impacts probables. Le scénario RCP qui sera choisi comme base d’étude sera le RCP 6.0. C’est en effet celui qui semble le plus cohérent avec la direction prise par les politiques climatiques et par les habitudes de consommation actuelles. Cette trajectoire prévoit une augmentation de la température globale de 2°C d’ici 2100 ; même si l’article 2 de l’Accord de Paris évoque une volonté de rester « bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » et si possible de viser à « poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5 °C ». Le niveau actuel de la mer13 permet déjà aux eaux d’envahir certaines villes de basse altitude. Le scénario RCP 8.5, le plus pessimiste, prédit une augmentation de +1m d’ici 210014 avec une importante destruction des habitations, un accès difficile à l’eau potable et un bouleversement des sociétés en zones urbanisées qui seront contraintes d’être déplacées à défaut d’être suffisamment résilientes. Cependant, si la trajectoire actuelle, qui suit le RCP 6.0, ne prévoit pas tant quant à la montée des eaux, il y a tout de même une urgence pour les villes qui sont déjà touchées par ce phénomène. Sur ces scénarios, d’autres experts se sont attelés à donner les potentielles images du futur. À ce titre, l’agence d’architecture et d’urbanisme néerlandaise MVRDV, qui s’associe au journaliste scientifique Sylvestre Huet, proposent des simulations visuelles15 concrètes de nos grandes mégapoles d’ici la fin du siècle. Elle les publie dans un ouvrage16 destiné au grand public pour avertir des risques.
Image de synthèse de la ville de Londres en 2100 © MVRDV, 2003
Nous parlerons ici du risque d’inondation lié à l’élévation du niveau de la mer, et par conséquent des villes du littoral. N’oublions pas que la montée des eaux touche également les terres intérieures par les fleuves, qui menacent de sortir de leurs lits, et évoque aussi un risque pour les villes et territoires loin des côtes. 13
Nous faisons ici référence aux +40cm (cité plus haut) calculés par le GIEC dans son 4e rapport
14
GIEC, 2007. Fourth Assessment Report : Climate Change 2007. Cambridge : Cambridge University Press.
15
Ces images seront reprises pour l’exposition Climax à la Cité des Sciences et de l’Industrie en 2003
16
HUET, S. et MVRDV, 2003. Climax : Un climat sous influence, scénarios pour demain. Paris: Adam Biro
5
2. L’exposition des sociétés au risque d’inondation
Risque d’inondation et conséquences sur les sociétés humaines Au fil du temps et de l’augmentation de la température globale, les sociétés sont de plus en plus exposées au risque d’inondation. Les prévisions vont de paire avec certaines conséquences qui se répartissent autour du globe. C’est pourquoi l’objectif mondial se résume à ne pas dépasser le seuil des +2°C fixé par l’Accord de Paris17 . Pour exemple, selon le RCP 6.0, une fois le seuil des +3°C dépassé, les sociétés seront exposées à des déplacements massifs de populations, aux difficultés d’adaptation des villes côtières les moins riches et aux destructions de productions agricoles, et donc à l’insécurité alimentaire chronique pour les populations locales18 . Cependant, la situation actuelle est déjà très difficile à vivre pour certaines populations du sud. À l’approche des +1,5°C, de nombreux états - notamment les petits états insulaires du Pacifique - sont, à présent, largement touchés. Des îles comme Tuvalu ou Kiribati sont déjà menacées de disparaitre19 . Concrètement, le climat modifie localement l’environnement. De cause à effet, ce dernier agit à son tour sur les sociétés. Outre le risque sur la santé publique et les productions alimentaires, les citadins doivent faire face à une transformation de la ville et de ses usages et à la destruction des habitations, des équipements urbains et du réseau de transports. Les sociétés issues des pays en voie de développement sont les premières concernées. Sur le continent africain, cela mènerait à l’aggravation des problèmes économiques et alimentaires actuels. Dès lors, la dépendance des populations à l’agriculture devient problématique. De plus, la salinisation des eaux intérieures induit l’amenuisement de l’eau potable. Les pays devront alors s’attendre à la réapparition des maladies20 et à des migrations conséquentes, vers de meilleures conditions de vie. De lourds enjeux se jouent aussi en Asie orientale. Près d’un cinquième de la population mondiale21 dépend de la production agricole de la région, manifestement très menacée par la submersion marine et l’élévation globale du niveau de la mer. De façon plus générale, l’alimentation des sociétés du monde entier est concernée. Prenons l’exemple symbolique du « Global Seed Vault » (Réserve Mondiale de Semences) qui a justement ouvert ses portes en 2008 pour protéger les cultures vivrières de la planète, menacées par le climat. Situé sur l’île norvégienne de Svalbard, au plus près du cercle polaire arctique, il abrite plus d’un million de graines à replanter en cas de besoin. Cependant, le « grenier du monde » a été, à son tour, victime du réchauffement climatique et a subi une infiltration d’eau en mai 2017. Des travaux sont en cours pour le protéger des inondations.
Culture du risque Face à ces risques inédits, il est impératif de développer une véritable culture du risque dans les villes. En vivant de façon continue avec la menace de l’inondation, certaines sociétés l’ont compris et adoptent de nouveaux comportements. À l’instar de Tokyo qui impose des exercices de 17
Premier accord universel sur le climat signé par 196 pays en 2016 dans le cadre de la COP21 à Paris.
18
« Climat : jusqu’où repoussera-t-on les limites ? » Revue Projet, n°350 (3 février 2016), 96p.
19
Ibid.
20
Magnan, Alexandre, 2013. Changement climatique : tous vulnérables ? Repenser les inégalités.
21
Ibid.
6
préparation en cas de submersion marine, certaines villes développent de nouvelles mesures de prévention adaptées pour atténuer les impacts d’un tel événement. Cependant, cette culture du risque n’est pas systématique. Elle est souvent négligée dans les pays noncoutumiers des aléas climatiques22 et dans les pays en voie de développement. Ce sont pourtant ces derniers qui doivent s’en doter, en priorité, pour limiter les dégâts dans les villes surpeuplées et souvent mal préparées.
« Certes la France n’est ni un atoll du Pacifique, ni le Bangladesh, où la montée inéluctable des eaux va entrainer à court terme des déplacements massifs de population. Reste que, contrairement à des pays habitués à la brutalité des éléments et qui ont su développer une véritable culture du risque, la douce France semble avoir une capacité encore faible de résistance à l’adversité. », A. LE ROY et M. LIPINSKI, 2015. La France en danger : changement climatique, nul n’est à l’abri
3. L’état des lieux global des villes dans le monde : un état d’urgence Selon l’ONU Habitat, en 2008, on compterait 3351 villes et 380 millions d’habitants en « zone côtière de faible altitude »23 . Parmi elles, 136 métropoles de plus d’un million d’habitants ont été recensées.24 Elles sont au coeur de la problématique puisqu’elles rassemblent le plus d’habitants et d’infrastructures. Ce statut associe autant de villes et d’habitants à un état de vulnérabilité conséquent face à la montée des eaux. Jan CORFEE MORLOT, directeur de l’environnement de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) chiffre « à 1000 milliards de dollars la valeur des infrastructures à risque »25 . Il estime par ailleurs que « les villes les plus menacées sont celles d’Asie, qui connaissent aussi le plus fort développement. »
Tour du monde des villes côtières en danger Si l’enjeu se présente majoritairement dans les grandes métropoles, les petites villes ne font pas exception. C’est ce que nous nous attacherons à démontrer par cette liste non-exhaustive de territoires qui suscitent une certaine pression face à la montée des eaux. Cette série répertorie une vingtaine de villes et territoires plus ou moins peuplés, situées de part et d’autre de la planète. Les grandes métropoles font toutes partie de la liste des 136, citée précédemment. Elle consiste en un état des lieux global, qui démontrera l’urgence de la situation à l’échelle planétaire, ponctué d’exemples précis.
En Afrique : • Saint-Louis, 237 563 habitants Au Sénégal, la ville de Saint-Louis est une des plus menacées par le montée des eaux. Avant 2003, la langue de Barbarie était une étroite langue de sable qui longeait le fleuve Sénégal avant de rejoindre l’Atlantique. Une crue historique en 2003 a nécessité l’ouverture en urgence d’un petit 22
A. LE ROY et M. LIPINSKI, 2015. La France en danger : changement climatique, nul n’est à l’abri
23
Rapport biennal de l’ONU publié en 2008. « L’état des villes dans le monde : 2008-2009 »
24
J. ROCKSTRÖM, W. STEFFEN, K. et Å. PERSSON. « A safe operating space for humanity ». Nature, n° 461. 2009, p.472-475.)
25
OCDE, 2013. Évolution des engagements d’atténuation. OCDE : Paris.
7
canal de délestage. Aujourd’hui, c’est une nouvelle embouchure du fleuve de plusieurs kilomètres qui s’agrandit naturellement au fil du temps, fortement aidée par l’élévation du niveau de la mer. Ce qui n’était qu’un petit geste anthropique en 2003 provoque des bouleversements environnementaux dans toute la région.26 • Lagos, 12 090 000 habitants À Lagos, plus grande ville du continent africain et capitale économique nigérienne, 10 millions de personnes vivent à 2 mètres au dessus du niveau de l’Océan Atlantique. La fonte accélérée des glaces met ainsi en péril tout autant d’habitants.27 • Alexandrie, 5 172 000 habitants À Alexandrie (deuxième ville égyptienne), selon les prévisions, si la mer augmente encore de 50cm, 2 millions de personnes devront être évacuées et quitter leur logement.28 • Mombasa, 939 370 habitants Mombasa, deuxième ville du Kenya est premier port d’Afrique de l’est. Cependant, les chercheurs affirment que 17% de la ville sera noyée si le niveau de la mer augmente encore de 30cm.29
En Asie : • Dacca, 14 400 000 habitants Dacca, capitale du Bangladesh, est menacée par les tempêtes tropicales de plus en plus fréquentes et par l’élévation du niveau de la mer. C’est une des villes les plus peuplées de la planète mais aussi une des plus touchées par la fonte accélérée des glaces.30 • Tokyo, 13 754 059 habitants La capitale nippone comptabilise 2,5 millions d’habitants susceptibles d’être noyés sous 50cm d’eau d’ici 2070.31 • Bangkok, 9 456 780 habitants Cas étudié en partie 3. • Khun Samut Chin, 1026 habitants Cas étudié en partie 3.
Dans le Pacifique : Les îles du Pacifique ne comptent, parmi elles, aucun grande métropole, mais des archipels abritant de nombreuses communautés. 26
« Climat : jusqu’où repoussera-t-on les limites ? » Revue Projet, n°350 (3 février 2016), p. 2
27
« Bilan Planète 2009 », Le Monde Hors-Série, n°1 (10 novembre 2009)
28
Ibid.
29
Ibid.
30
Ibid.
31
FISHER, Stevens. Before the Flood, 2016. USA : National Geographic.
8
• Tuvalu, 11 097 habitants Le point le plus haut de l’archipel polynésien des Tuvalu culmine à 5m de haut. D’ici 2060, on dénombre 11 000 personnes dans la nécessité de quitter leur île.32 • Kiribati, 114 395 habitants Le gouvernent du petit état d’Océanie que composent les Îles Kiribati a acheté des terres à 2000km de chez eux, dans les Fidji. Les habitants devraient s’y installer d’ici 2100.33 • AOSIS, 47 000 000 habitants Pour se faire entendre, ces petits états insulaires extrêmement vulnérables ont fondé l’AOSIS (Alliance of Small Islands States) en 1990, une organisation intergouvernementale regroupant 39 états membres (Fidji, Singapour, Vanuatu, etc.) qui vise à exprimer leurs positions communes à propos du changement climatique, lors des conférences sur le climat.
En Amérique : • Nouvelle-Orléans, 1 240 977 habitants En 2005, l’ouragan Katrina a montré la grande vulnérabilité des zones littorales urbanisées de Louisiane. La Nouvelle-Orléans s’est retrouvée presque entièrement engloutie sous l’eau et a perdu près d’un tiers de ses habitants.34 • Miami, 5 564 635 habitants À Miami, ville basse élevée sur un sol calcaire, il n’est pas rare de voir les rues submergées par l’eau. Selon les données du GIEC (scénario RDP 6.0), le comté de Miami sera amputé de 60% de son territoire d’ici 2100. • Shishmaref, 700 habitants Cas étudié en partie 3. • New York City, 8 537 673 habitants Cas étudié en partie 3.
En Europe : Les dégâts prévisibles sont moindres sans pour autant être négligeables. Les territoires européens vulnérables se repartissent davantage sur des régions entières qu’à des villes en particulier. La côte ouest française à d’ailleurs montré ses limites en février 2010 avec le passage de la tempête Xynthia. La submersion du territoire a provoqué la mort de 47 personnes, la perte de 1,5 milliard d’euros en dégâts matériels35 et l’important recul des dunes qui affaiblit la résistance des territoires face à l’eau.
32
Collectif Argos, 2007. Réfugiés climatiques. Gollion: Infolio.
33
Ibid.
34
FISHER, Stevens. Before the Flood, 2016. USA : National Geographic.
35
LE ROY, Alice et LIPINSKI, Marc, 2015. La France en danger : changement climatique, nul n’est à l’abri. Paris: Éditions Plon.
9
4. Réfugiés climatiques et conséquences urbanistiques sur les villes d’accueil Un nouveau type de flux migratoire est apparu avec des dommages collatéraux du changement climatique sur les villes : les réfugiés climatiques36 (ou éco-réfugiés ou migrants environnementaux). Ils n’ont d’autre choix que de quitter leur ville suite à la submersion et à l’érosion conséquente des territoires. Mais cela implique de nouvelles problématiques urbaines, notamment dans les villes déjà surpeuplées.
Réfugiés climatiques : quelles migrations ? Selon l’ONU, on compte 20 millions de réfugiés climatiques en 2008 à travers le monde, mais d’ici 2060, les calculs en prévoient 200 millions. Ce sont les premiers calculs historiques pour ce type de migration. C’est donc bien un fait récent qui se développe à grande vitesse. Les habitants des îles sont concernés en priorité : les Maldives, les Kiribati, les îles Carteret ou encore Tuvalu se montrent au coeur de cette nouvelle problématique majeure du XXème siècle. En second plan, viennent les habitants des petits villages décimés qui sont contraints de venir dans les métropoles. Cependant, les grandes villes côtières sans système de résilience doivent s’attendre à subir le même phénomène d’ici quelques années. Ces villes sont majoritairement issues de pays à faibles revenus, où les ressources permettant l’adaptation sont les plus faibles. Selon une analyse d’Oxfam37 , « entre 2008 et 2016, les populations des pays à faible revenu et des pays à revenu intermédiaire faible ont été cinq fois plus susceptibles d'être déplacées à cause de catastrophes climatiques extrêmes et soudaines que les habitants de pays à revenu élevé ». Il est clair que les états insulaires du Pacifique et les villes côtières d’Asie sont sur le devant de la scène quant au déplacement de leurs populations. Dacca, capitale du Bangladesh, est une ville profondément menacée et a pourtant déjà accueilli 500 000 personnes issues de villages bangladais et venues se réfugier. Mais à terme, ce seront 35 millions de Bangladais de Dacca qui n’auront d’autre choix que d’aller chercher refuge ailleurs. Enfin, ces flux sont tout autant importants que la culture du risque est sous-développée dans un pays en question38 . En effet, certaines villes des États-Unis sont aussi vulnérables que les grandes villes d’Asie. Cependant, habituées à de tels événements, les premières ont su développer une culture du risque suffisante et peu de déplacements de population sont recensés ; tandis que les secondes subissent des flux quotidiens et exponentiels. Cela relate d’une capacité à s’adapter : c’est la résilience, que nous allons voir en partie suivante.
Le terme même de « réfugiés climatiques » n’a été diffusé en France qu’à partir de 2002, avec les investigations du Collectif ARGOS, photographes et journalistes attachés à développer une prise de conscience sur la situation de ces personnes vivant en zone environnementale sensible. En revanche, le concept même de réfugié pour cause environnemental a été développé dès 1985 par Essam El Hinnawi pour l’ONU et par Norman Myers, pour parler du nouvel exode environnemental, comme conséquence du changement climatique global. 36
Richards, Julie-Anne et Bradshaw, Simon, 2017. Déracinés par le changement climatique : répondre au risque croissant de déplacement. Oxford : Oxfam, 60 pages. 37
38
Le Roy, Alice et Lipinski, Marc, 2015. La France en danger : changement climatique, nul n’est à l’abri. Paris: Éditions Plon.
10
Conséquences urbanistiques De telles migrations entrainent de lourdes conséquences sur les villes de départ comme sur les villes d’arrivée. Pour la ville de départ, le risque est d’être désertée et de sombrer sous la progressive montée des eaux ou d’être grignotée par l’érosion. La plupart de ces migrations s’effectuent au sein du même pays, mais certaines populations sont contraintes de sortir des frontières. Les migrations internationales se font majoritairement d’un pays du Sud vers un autre pays du Sud ou d’un pays du Sud vers un pays du Nord, mais jamais d’un pays du Nord vers un pays du Sud.39 Ces 10 dernières années, 21,8 millions de personnes ont été recensées en tant que migrants internes.40 De manière générale, ces populations fuient vers des grandes métropoles, se pensant à l’abri. Or, pour beaucoup de pays, les grandes métropoles se trouvent sur le littoral et sont tout autant contraintes à faire face à la montée des eaux. D’autant plus que leur vulnérabilité augmente à mesure que leurs populations augmentes et multiplient les risques en termes de dégâts humains et financiers. À plus forte raison, les métropoles ont un important rôle à jouer quant à leur capacité à s’adapter. Pour reprendre l’exemple du Bangladesh, ce dernier compte six millions de personnes déplacées depuis 201041 pour cause environnementale. 500 000 de ces migrations se sont fait en interne, vers Dacca. Déjà intensément peuplée, la capitale n’a pas développé les moyens nécessaires pour accueillir un tel nombre d’arrivants, qui logent désormais dans des conditions indignes. À l’instar de Dacca, de nombreuses zones d’installation informelles se sont développées dans les villes d’accueil ces dernières années, augmentant toujours plus les inégalités au sein même des villes.
Bidonville de Korail, à Dacca, qui regorge de réfugiés climatiques - Photo © Jonas BENDIKSEN RICHARDS, Julie-Anne et BRADSHAW, Simon, 2017. Déracinés par le changement climatique : répondre au risque croissant de déplacement. Oxford : Oxfam, 60 pages. 39
D’après la base de données complète de l'Internal Displacement Monitoring Centre sur les nouveaux déplacements associés aux catastrophes : http://www.internal-displacement.org/database/ 40
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Displacement Solutions, 2012. Climate Displacement in Bangladesh. 35 pages. Genève : Displacement Solutions (p. 5)
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À plus petite échelle, l’existence même des atolls « Mon plus grand espoir est tout peuplant les océans est menacée. De cette manière, c’est simplement que mon pays subsiste, toute une culture qui est visée et des dizaines de villages mis qu'il ne soit pas rayé de la carte. » en péril. De plus, ces petits états sont en fait responsables de Claire Anterea, Kiribati Climate Action très grandes étendues d’océan et nécessitent réellement une Network. gestion territoriale. À titre d’exemple, la zone économique exclusive de Tuvalu est 27 000 fois supérieure à la superficie émergée de l’archipel42 . Dans un acte de solidarité régionale, le gouvernement des Fidji autorise les citoyens de Kiribati et de Tuvalu à s'installer de façon permanente aux Fidji s'ils devaient quitter leur île. Ces flux entraineront ainsi la désertion des territoires à risque et la surpopulation dans les territoires d’accueil.
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RICHARDS, Julie-Anne et BRADSHAW, Simon, 2017. Déracinés par le changement climatique : répondre au risque croissant de déplacement. Oxford : Oxfam, 60 pages. Disponible à l’adresse : https://www.oxfamfrance.org/sites/default/files/bpuprooted-climate-change-displacement-021117-fr.pdf
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2.
STRATÉGIES
DE RÉSILIENCE AU CHANGEMENT
CLIMATIQUE
1. Les villes au défi de s’adapter « Les villes sont désarmées face aux caprices du climat. Il faut travailler d’urgence sur les stratégies d’adaptation des villes aux conséquences du changement climatique. », Dan Moornrveg, expert en environnemental urbain à la Banque Mondiale
Les réponses des villes face au risque d’inondation : intégration stratégique du risque aux territoires Le long déni des collectivités les à pousser à n’agir qu’à la suite d’un événement qui a bouleversé leurs territoires. Il y a encore quelques années, les décisions d’état se prenaient souvent après une catastrophe. Sandy et Katrina aux États-Unis, Xynthia en France : ces tempêtes invasives n’ont fait que tirer la sonnette d’alarme sur l’urgence qu’il advient d’adapter nos villes aux événements futurs.
« Inutile de mettre en place des plans d’amélioration une fois que le mal est fait. Ce qu’il faut, c’est prévoir et c’est maintenant. » Leon FUERTE, conseiller de sécurité nationale de Al Gore
À ce jour, face à la menace constante et la prise de conscience générale, les villes n’ont d’autres choix que de s’adapter. Le risque est intégré dans les stratégies d’aménagement du territoire et l’urbanisme agit plutôt que de subir. L’objectif des plans d’urbanisme d’aujourd'hui est d’anticiper les événements futurs et mettre en place des infrastructures adaptées avec des plans sur le long terme pour limiter les risques. De manière générale, il existe trois stratégies d’adaptation des zones côtières à l’élévation du niveau de la mer : la protection, l’accommodation et le repli43.
Protection
Accommodation
Repli
Monaco, ANDRÉ et Prouzet, PATRICK, 2014. Risques côtiers et adaptations des sociétés. Collection Mer et Océan. Londres: ISTE 43
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À travers la protection, il s’agit de défendre littéralement le littoral par le biais de divers options. Il peut s’agir d’infrastructures dites « dures », d’ingénierie, coûteuses et incertaines sur le long terme mais directement sécurisantes - comme les digues, barrières ou murs de protection -, mais aussi de systèmes plus doux, durables et respectueux de l’environnement - comme la restauration des écosystèmes défensifs ou la mise en place de dunes artificielles. Ces derniers intègrent des paramètres environnementaux et sociaux pour proposer une une qualité de vie durable aux habitants. L’accommodation fait appel à des infrastructures souples, adaptatives et résistantes aux effets de la montée des eaux - comme les bâtiments sur pilotis ou l’élévation des infrastructures de transport -, mais aussi à la flexibilité des activités humaines - comme le développement de nouvelles pratiques agricoles. Le repli, quant à lui, apparait comme la solution de dernier recours qui consiste à déplacer les bâtiments et les communautés ailleurs - vers l’intérieur des terres, le plus souvent.
Les réponses des villes face aux migrations des réfugiés climatiques : un sujet tabou Le statut de réfugié climatique n’est pas reconnu dans tous les pays et ne l’est pas non plus dans le droit international : les droits et statuts des réfugiés établis par la Convention de Genève datent de 1951 et ont subis très peu de changements depuis. Jusqu’ici, seule la Suède a étendu la convention de Genève en accordant un statut d’asile aux migrants victimes de désastres environnementaux liés au changement climatique. Pourtant, la situation impose de nouveaux défis et le vide juridique pose problème pour les villes d’accueil qui doivent attendre de plus en plus de migrants. Certaines ferment les yeux et laissent faire, d’autres - moins nombreux - établissent des politiques locales pour essayer de gérer cet afflux permanent, comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui a accueilli, en 2005, 10 nouvelles familles issues de l’atoll Carteret dans sa capitale, Port Moresby.
2. Plan et stratégies d’adaptation : une réponse urbaine durable ? Le développement de nouveaux plans d’urbanisme spécifiques La volonté politique est indispensable pour la mise en place de plans d’urbanisme réfléchis et concertés. Si la gestion politique du territoire complique la question dans certains pays, d’autres l’ont intégrée et propose des solutions adéquates sur le long terme. Les Pays-Bas, au nom plutôt évocateur, comptabilisent « Nous avons transformé ce pays en un tiers de sa superficie au-dessous du niveau de la mer. un lieu où on vit avec l’eau au lieu de Pourtant, la question de l’eau est intégrée aux administrations la combattre. » régionales depuis 1100 pour mieux la gérer. Des digues, Henk Ovink, envoyé spécial pour les polders, barrages et barrières contre les vagues ont été affaires liées à l’eau. construits au 19e siècle, mais les collectivités ont très vite compris que ces constructions ne constituaient pas des protections à long terme et qu’elles nécessitaient d’être constamment entretenues et rehaussées au fil de la montée progressive de l’eau. Aujourd’hui, le nouveau programme de gouvernance de l’eau, le Programme Delta, propose de vivre avec l’eau en combinant les barrages et l’aménagement du littoral. Il ne s’agit plus de combattre l’eau avec des infrastructures qui grignotent de la place sur l’eau, mais de développer des projets en adéquation avec la nature. Le pays actionne aujourd’hui une nouvelle politique de gestion du littoral : la « dé-polderisation ». Il s’agit de rendre à la mer les
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étendues gagnées sur l’eau auparavant, en ouvrant les polder et permettre la sédimentation qui va contribuer à la mise en place d’écosystèmes défensifs tout en respectant l’environnement. Cette nouvelle politique est très développée aux abords des villes côtières de Grande-Bretagne sous le nom de « managed realignment ». En effet, selon Lydie Goelder-Gianella44 « en reculant la digue et en permettant à la mer de pénétrer dans un polder, à travers une ou plusieurs brèches, un processus de sédimentation entraine une renaissance relativement rapide des vasières et des pré salés, qui peuvent alors aider à freiner la houle ». En Europe, où le champ d’expérimentation urbain est encore large en périphérie des villes, certaines d’entre elles innovent et adoptent des stratégies cohérentes localement. Hambourg, par exemple, qui subit la hausse de la Mer du Nord, a mis en place un des plus vastes projets de développement urbain en Europe : Hafen City. Ce quartier spécial de 12 000 habitants, installé sur d’anciens entrepôts portuaires, se situe entièrement en zone inondable et a opté pour une stratégie d’accommodation pour pallier au risque d’inondation. Sa topographie inventive, sur deux niveaux, le protège du risque de submersion : des squares et parkings étanches en partie basse et des bâtiments surélevés sur des socles de 5m en partie haute. Le directeur général de Hafen City, Jürgen BrunsBerentelg, estime que les risques sont anticipés sur les 100 prochaines années. C’est une des premières villes où l’intégration du risque d’inondation se fait en parallèle du développement de la ville, et non en aval. Cependant, faire émerger un nouveau quartier dans une ville déjà urbanisée est une chance. Ces solutions sont adaptées pour répondre aux désirs d’expansion des mégapoles côtières, mais elles ne le sont pas pour le centre des villes denses déjà construits. Si l’enjeu est le même, les stratégies sont différentes et fonctionnent en additionnant une multitude de systèmes résilients. Mais dans ce cas, rares sont les villes où ces systèmes sont suffisamment pensés en amont pour être durables. NewYork est un cas à part qui a tout misé sur la durabilité de ses aménagements urbains, c’est ce que l’étude en partie 3 consistera à montrer. Dans cette lignée, la capitale britannique, fortement menacée, se démarque également et met en oeuvre un plan ambitieux de résilience intégré dans les plans d’urbanisme de la ville : le Climate Change Act. Les autres villes, notamment issues des pays du Sud, en voie de développement, additionnent les stratégies et plans de résilience sans cohérence et travaillent sur le court terme.
La mise en place d’infrastructures adaptées La première idée qui vient est d’opter pour la stratégie de protection45 et de construire des murs, des digues, des barrages et des brise-lames qui peuvent agir en permanence pour empêcher la submersion. Or, comme beaucoup de problématiques urbaines, les solutions miracles n’existent pas. Il est nécessaire de penser ces solutions à l’échelle locale pour mettre en place des infrastructures adaptées. Elle est évidemment essentielle pour traiter convenablement un territoire. Les Maldives, petit état profondément vulnérable aux événements climatiques, aménagent des îles-refuges sur place, pour y installer ses habitants. Tokyo a développé un immense système de tunnels souterrains qui servent à stocker l’eau en excès, lorsque les portes anti-inondations, qui se ferment en cas d’urgence, ne suffisent pas. Shanghai met un point d’honneur a surveiller de très près Auteur de « Changement climatique et dépoldérisation : le rôle des acteurs et le poids des représentations sociales sur les côtes d’Europe atlantique », Quaderni [En ligne], 71 | Hiver 2009-2010, consulté le 21 mai 2018. Disponible à l’adresse : http://journals.openedition.org/quaderni/527 ; DOI : 10.4000/quaderni.527 44
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Référence au document page 14.
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la subsidence des sols et le mouvement des infrastructures de protection. Venise a doté sa lagune d’un système de défense très spécifique. Ainsi, la mise en place des infrastructures de protection doit s’établir après une étude approfondie du site, de sa vulnérabilité et des enjeux qui lui sont spécifiques. Cependant, certaines villes restent passives face à la situation, pour plusieurs raisons (manque de moyens, manque de prise de conscience, etc.). C’est pourquoi des organisations pour les climat développent des plans d’adaptation à plus grande échelle. On retrouve, en France, le Grenelle de l’Environnement qui visait à prendre des décisions à long terme sur le sujet de l’environnement. Cependant, aucun impact majeur n’a été relevé sur les politiques environnementales. En effet, ces plans d’adaptation nécessitent une réelle intégration à l’échelle du territoire, de la ville, de la côte pour gérer les risques.
3. La résilience, sujette à des inégalités mondiales Si les quelques exemples cités précédemment concernent des villes issues de pays développés, les villes des pays en développement sont en bien plus grande difficulté à mettre en place de telles stratégies, ce qui creuse d’autant plus le fossé entre pays du Nord et pays du Sud. Et si le sujet financier tient une part importante dans la construction des inégalités, il n’en est pourtant pas le seul.
La construction des inégalités Comme le souligne Alexandre Magnan46 , les conséquences néfastes du changement climatique relèvent « Les pays industrialisés ne peuvent pas d’une question complexe en terme d’inégalités.47 En effet, être considérés comme peu ou non vulnérables au changement climatique, les facteurs définissant le niveau de vulnérabilité initiale de même que les pays en développement d’un territoire sont indépendants du niveau de richesse de ne sont pas fatalement dépourvus ce même territoire. En d’autres termes, les sociétés les plus d’aptitudes à s’adapter. riches ne sont pas moins vulnérables que les sociétés les moins riches, face au risque. En revanche, ce sont les plans Alexandre M AGNAN , Changement mis en place dans les villes qui font émerger de nouvelles climatique : tous vulnérables ? inégalités. La mise en place de ces plans d’urbanisme donnant le caractère de résilience nécessaire à la « survie » de ces villes est réservée aux sociétés qui en ont les moyens. Ces « moyens » ne se réduisent pas aux ressources économiques ; il est également question de volonté et de capacité à mettre en œuvre les plans d’aménagement, et cela dépend de chaque société, de son rapport à l’environnement, de la prise de conscience des risques, de sa faculté à anticiper les risques et des moyens scientifiques et intellectuels dont elle dispose48 . C’est pour cette raison que les stratégies de résilience doivent être prises à toutes les échelles, du local au global, et que la responsabilité politique doit se faire sentir dans les plans d’aménagement. Dans ce cadre, nous parlerons d’une vulnérabilité évolutive qui différencie l’état de vulnérabilité initiale de l’état de vulnérabilité résultante et qui témoigne de l’efficacité des choix d’adaptation dans le temps. Cependant, même si une ville issue d’un pays en voie de développement se dote d’une stratégie 46
Chercheur à l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), très engagé sur le sujet
47
Changement climatique : tous vulnérables ? Repenser les inégalités
48
Ibid.
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d’adaptation efficace, souvent, les terrains instables, l’urbanisation sauvage, la précarité ralentissent ce processus et participent grandement au développement d’une vulnérabilité urbaine. À l’échelle de la ville, dans de nombreux cas, lorsque les plans d’aménagement ne sont pas suffisamment concertés ou que les infrastructures sont issues d’initiatives privées, alors ils deviennent des machines à augmenter les inégalités. Protéger le centre-ville devient une priorité, quitte à l’encloisonner littéralement avec des murs en périphérie. De fait, cette séparation contribue à la ségrégation entre les plus riches qui vivent dans un centre-ville protégée et les plus pauvres condamnés à vivre dans des zones inondables. Les habitants les plus pauvres de la ville de Bangkok en ont d’ailleurs fait les frais lors des inondations d’octobre 2011, qui ont laissé 20% de la ville inondés pendant deux mois et demi. Les eaux stagnantes et les conditions sanitaires ont, par ailleurs, provoqué la mort de 657 personnes. Ces inégalités sont spécifiques aux villes ayant opté pour les méthodes dites « dures ». Les habitants des pays pauvres n’ont d’autre choix que de partir et fuir leur situation environnementale. Comme le résume le Pape François dans le Laudato Si’ : « Beaucoup de pauvres vivent dans des endroits particulièrement affectés par des phénomènes liés au réchauffement, et leurs moyens de subsistance dépendent fortement des réserves naturelles et des services de l’écosystème, comme l’agriculture, la pêche et les ressources forestières. Ils n’ont pas d’autres activités financières ni d’autres ressources qui leur permettent de s’adapter aux impacts climatiques, ni de faire face à des situations catastrophiques, et ils ont peu d’accès aux services sociaux et à la protection. » Aussi, on relève une sortie d’indifférence générale face aux événements climatiques qui se déroulent aux quatre coins du globe. Les migrants environnementaux, dont le statut de réfugié n’est pas reconnu par les conventions internationales, ne vont cesser de s’accroitre et se protéger comme ils le peuvent sans protection légale. Face à cela, les pays développés qui subissent également les résultats de leurs activités antérieures, ne cherchent à résoudre le problème qu’à leur échelle. Si l’échelle locale est prioritaire dans la recherche de stratégies de résilience, il ne faut pourtant pas oublier que la montée des eaux se fait sentir à l’échelle planétaire. Se concentrer uniquement sur les grands territoires urbanisés, comme le fait la ville de New York, ne fait qu’accroitre les inégalités entre les villes du Sud et les villes du Nord, malgré leur dette écologique. Tous les pays sont unis par une même préoccupation. Les accords internationaux sur la gestion des territoires se doivent d’être plus drastiques.
Les inégalités entre les villes : entre conséquences et solutions Pour tenter de résoudre ce problème, des ONG se mobilisent pour essayer d’agir sans influence politique et à l’échelle mondiale. En 2013, la fondation Rockefeller49 lance le projet « 100 villes résilientes ». Il consiste en un réseau d'échange d’expertise entre 100 villes particulièrement vulnérables à la montée des eaux. Elles partagent leurs solutions, leurs points de vue et mutualisent les moyens intellectuels pour permettre à toutes les villes de développer des plans adaptés, qu’elles soient riches ou pauvres, grandes ou petites. C’est un façon d’anticiper le futur des villes en difficulté sur les acquis des autres villes. Par exemple, New York, qui a acquis une solide base de connaissances et d’expériences urbaines, peut donner des conseils à une plus petite ville en développement, qui doit faire des choix cruciaux aujourd’hui sur ses infrastructures et ses plans d’aménagement de demain. 49
ONG basée à New York chargée de « promouvoir le bien-être de l'humanité dans le monde » et fondé en 1913
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3.
ÉTUDES
DE CAS
1. Présentation des études de cas Pour illustrer les propos tenus en amont, quatre études de cas ont été choisies pour contextualiser les faits et tirer parti de chacune des positions des villes sur le sujet, leurs niveaux de vulnérabilité et leurs stratégies de résilience. L’étude du sujet a permis d’éclairer certains aspects de la situation à l’échelle internationale. Alors que les niveaux de vulnérabilité peuvent s’avérer égaux entre pays du Nord et pays du Sud, les niveaux de résilience développés dans ces mêmes pays sont tout à fait différents. De la même manière, l’échelle de la ville a son rôle à jouer. C’est ce qu’il sera intéressant de démontrer en comparant États-Unis et Thaïlande à travers l’analyse des stratégies d’aménagement d’une ville globale et d’une petite commune rurale dans chaque pays. Ce choix est à la fois politique et symbolique. En effet, il semblait nécessaire d’étudier des territoires partageant un ou plusieurs critères en commun (qui ont, par ailleurs, orienté les choix) : situation politique, socio-économique, démographique ou encore spatiale. Différentes politiques d’aménagement et de prise en charge se jouent dans les villes. Pour cette raison, les études de cas se porteront sur des situations opposées et semblables à la fois.
La première partie traitera du cas des villes aux États-Unis, en étudiant : • New-York City (New York), une stratégie d’adaptation efficace sur le long terme • Shishmaref (Alaska), une ville vouée à disparaitre et des habitants destinés à déménager
La seconde partie traitera du cas des villes en Thaïlande, en étudiant : • Bangkok, des aménagements coûteux sans garantie sur le long terme • Khun Samut Chin, des solutions citoyennes dans le respect de l’environnement
Ces études de cas sont ciblées, mais n’enlèvent en rien l’état d’urgence climatique général présent dans de nombreux autres pays, notamment les états insulaires du Pacifique, le Bangladesh ou encore les Maldives, considérés comme les plus menacés de disparaitre sous la montée des eaux.
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2. Étude de cas : les États-Unis Malgré le fonctionnement étatique des États-Unis, les états fédérés connaissent globalement la même politique vis-à-vis du climat et une grande partie du territoire est sous la gestion gouvernementale. Il sera alors interessant de comparer, dans les faits, les politiques d’aménagement développées. Aussi, une dimension symbolique conforte ces choix d’étude. Située en Alaska, dans une zone hautement vulnérable, Shishmaref a subit de plein fouet les conséquences du changement climatique (montée des eaux, fonte du permafrost, érosion). Forcés de déménager leur village, les habitants comptent parmi les premiers réfugiés climatiques au monde. Quant à New-York, c’est une ville qu’il est difficile d’imaginer disparaitre un jour ; et pourtant, elle a subi de nombreux événements climatiques, mettant en lumière la vulnérabilité des villes face aux impacts du réchauffement global. Cependant, elle a su y remédier en mettant en place des plans d’urbanisme et d’adaptation efficaces.
New-York Les « villes globales », symboles du 21e siècle, font l’objet d’une réflexion approfondie sur le rapport entre forme urbaine et émergence des phénomènes environnementaux. À ce titre, New-York est un symbole de ville résiliente. Elle a fait preuve d’une recomposition stratégique suite à un événement climatique important : la submersion de plus de 50% de la ville en octobre 2012, avec le passage de l’ouragan Sandy. Les dégâts causés par ce que certains qualifient de « tempête du siècle » ont coûté la vie à 53 personnes et 19 milliards de dollars dans l’état de New York50 . Sandy a révélé l’extrême vulnérabilité de la ville et a permis l’émergence d’un grand nombre d’initiatives citoyennes et politiques en rapport avec un ré-aménagement adapté de la ville. Il s’agira ici de présenter quelques unes des nombreuses stratégies d’aménagement mises en place dans le but principal d’améliorer la résilience de la ville face au risque de submersion : les plans du Special Initiative for Rebuilding and Resiliency, la publication des Flood Maps et le concours d’urbanisme Rebuild by Design.
« A Stronger, More Resilient New York » En décembre 2012, deux mois après le passage de l’ouragan, le Special Initiative for Rebuilding and Resiliency (SIRR) se mobilise pour préparer la ville à long terme dans la volonté commune d’un New York plus résilient. Ce groupe de travail multidisciplinaire centralise les travaux de recherche sur le sujet pour publier en juin 2013, sous l’impulsion des pouvoirs locaux, un rapport complet sur les plans d’action de la ville, appelé « A Stronger, More Resilient New York ». 250 initiatives urbaines sont exposées pour cibler le plan d’action sur la résilience des infrastructures et des bâtiments de la ville face à la montée des eaux. Il concerne les parties les plus vulnérables de la ville : le sud de Manhattan, le waterfront de Brooklyn et du Queens et la côte est de Staten Island. Il s’agit non pas d’éliminer les risques en bâtissant une frontière physique entre l’eau et la ville, mais bien d’adapter le territoire aux risques par le biais de solutions douces et systémiques.
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MAGNAN, Alexandre, 2013. Changement climatique : tous vulnérables ? Repenser les inégalités. Paris: Éditions Rue d’ULM.
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Ce rapport traite des points clés de la ville à gérer, comme : • initiative 1 : mise en oeuvre des plans dessinés pour un système de protection intégrée contre les inondations du sud de Manhattan • initiative 2 : mise en place d’une étude pour la construction d’une digue polyvalente et multifonctions le long de la rive sud de Manhattan de Battery Park à China Town pour répondre au problème de la submersion côtière et créer des opportunités de développement économique (fig. 1) • initiative 6 : remonter les levee (murs légers de protection) de la ville dans les quartiers de basse altitude pour minimiser les inondations à marée haute • initiative 21 : installer un système de protection intégré et adaptatif contre les inondations dans le Lower Manhattan, incluant le Lower East Side (fig. 2 et 3) • initiative 2 bis : reconstruire et réparer de façon adaptée les habitations détruites ou endommagées par Sandy et encourager la réhabilitation des bâtiments existants ainsi que la construction de bâtiments plus résilients • initiative 8 bis : instaurer des « Community Design Centers » pour aider les propriétaires à développer des solutions de reconstruction et de réhabilitation, et à les connecter avec les plans de la ville • initiative 11 bis : lancer un concours pour augmenter les systèmes de bâtiments résilients • initiative 1 ter : reconstruire les rues détruites par Sandy et penser un remaniement résilient de la signalétique routière
Certaines de ces initiatives ont pu être expérimentées, et mises en place pour certaines, en amont du passage de Sandy. Les dunes protectrices préconisées par le SIRR ont prouvé leur efficacité en octobre 2012. (fig. 4 et 5) La volonté du SIRR est de proposer, à travers le rapport, un travail global avec la ville, l’état et les actions fédérales pour allier l’économie à tous ces changements et améliorer la ville sous tous ces angles. Par exemple, la mise en place de digues aménagées tout le long de la rive sont également pensées pour créer des lieux d’économies et de promenade. Le rapport préconise donc un développement axé sur le sujet de l’aménagement citoyen. L’objectif est d’éviter l’effet de repliement de la ville qui ne s’ouvre plus vers le mer, alors qu’elle détient un important patrimoine portuaire et culturellement lié à la mer51 . Parallèlement à ces récentes initiatives, la population new-yorkaise s’est dotée d’une remarquable prise de conscience et d’une culture du risque permettant une réflexion prospective. Ainsi, le SIRR avait publié un premier rapport, bien avant Sandy, en 2007 : « A greener, greater New York ». Celui-ci a influencé quelques ingénieurs et architectes à anticiper les risques et à concevoir des infrastructures de résilience. On the Water : Palisade Bay est le premier projet d’infrastructure de protection douce mis en oeuvre à New York. Réalisé par Guy Nordenson and Associates, il a vu le jour en 2010 et protège le Lower Manhattan des courants par un système de barrières sous-marines. (fig. 6)
GRAS, Pierre, 2017. Ville verticale VS. ville résiliente ? Entre stratégies urbaines et bouleversements climatiques, ENSA de Lyon, 22 novembre 2017 (conférence) 51
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Fig. 1. Digue polyvalente le long de rive sud de Manhattan proposant des activités économiques © NYCEDC
Fig. 2. Système de protection en situation normale © NYCEDC
Fig. 3. Système de protection en situation de risque © NYCEDC
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Fig. 4. Quartier sans protection dunaire avant et après Sandy © NYCEDC
Fig. 5. Quartier avec protection dunaire avant et après Sandy © NYCEDC
Fig. 6. On the Water : Palisade Bay © Guy Nordenson and Associates, 2010
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Les Flood Maps et le NYC Waterfront Comprehensive Plan Après le passage de l’ouragan, la ville a mis en place des Flood Maps (carte des zones inondables), pour optimiser la spécificité des plans d’aménagement et pour informer la population sur le risque de submersion de leur logement. Publiées sur internet52, elles sont facilement accessibles et compréhensibles. C’est une manière d’anticiper en développant la culture du risque auprès des habitants. De plus, elle servent à l’adaptation du plan d’urbanisme de la ville qui doit être constamment mis à jour en fonction des données des Flood Maps. Le plan d’aménagement du waterfront a commencé en 2011 avec le projet Vision 2020 - NYC Waterfront Comprehensive Plan.53 Il consiste en la requalification du waterfront de la ville avec l’aménagement de nouveaux espaces urbains en bord d’eau. Cette transformation urbaine passe par la création de parcs et « La montée des eaux est indéniable. autres espaces publics, par la réhabilitation des docks et par la Elle est en cours. L’unique question est dans quelle mesure. Les mise en place de nouveaux équipements culturels. L’objectif constructions autour du waterfront et était principalement économique, puisqu’il consistait à de la baie doivent tenir compte d’un réhabiliter pour attirer de nouveau la population new-yorkaise imprévisible changement. On ne peut dans ces espaces délaissés. Après Sandy, le Waterfront pas seulement construite un grand Comprehensive Plan s’est vu doté de nouveaux objectifs traitant mur et l’oublier. » le waterfront comme un outil de résilience contre la risque d’inondations. Dans ce cadre, les Flood Maps ont largement Guy NORDENSON, NYC Waterfront Comprehensive Plan ( p.106) servi pour déterminer précisément les nouveaux enjeux du site. À ce titre, un rôle important a été donné aux parcs de la ville situés à proximité de l’eau. Aménagés de manière à servir d’espace tampon, certains de ces parcs freinent l’arrivée de l’eau dans la ville en cas d’inondations. Le Brooklyn Bridge Park en fait partie. Aménagé pour répondre au risque de la montée des eaux, le Brooklyn Bridge Park s’étale sur une superficie de 35 hectares, le long d’East River. (fig. 7) Son objectif est de céder du territoire à l’eau avec des aménagements urbains construits sur l’eau54. Une partie inaccessible freine son arrivée, tandis qu’une partie accessible intègre les fonctions d’aménagements durables. (fig. 8)
À travers le NYC Waterfront Comprehensive Plan, la nouvelle politique d’aménagement de New-York veut réconcilier la ville avec l’eau. En ce sens, cette première réflexion d’ensemble amène les atouts économiques et urbains sur un site qui sert à protéger la ville en parallèle ; à tel point que le waterfront est aujourd’hui considéré comme le 6e borough de New-York55 , alors qu’il était complètement délaissé il y a encore quelques années.
52
À l’adresse : http://www1.nyc.gov/site/floodmaps/
Document de 200 pages reléguant le plan d’aménagement du waterfront new-yorkais. Disponible à l’adresse : http://www1.nyc.gov/assets/planning/download/pdf/plans-studies/vision-2020-cwp/vision2020/vision2020_nyc_cwp.pdf 53
GRAS, Pierre, 2017. Ville verticale VS. ville résiliente ? Entre stratégies urbaines et bouleversements climatiques, ENSA de Lyon, 22 novembre 2017 (conférence) 54
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New York se divise officiellement en cinq boroughs : Manhattan, Brooklyn, le Queens, le Bronx et Staten Island.
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Fig. 7. Projet d’aménagement du Brooklyn Bridge Park - Photo © NYC Planning
Fig. 8. Première phase d’aménagement du Brooklyn Bridge Park - Photo © Pierre Gras, 2011
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Rebuild by Design Par la suite, le maire de New York, Michael Bloomberg, fait appel à différents bureaux d’études et urbanistes pour mettre au point des plans d’aménagement adaptés. En 2014, avec l’appui du Hurricane Sandy Rebuilding Task Force56, il lance le concours Rebuild by Design, qui sélectionnera les meilleurs projets de résilience proposés par des concepteurs privés. C’est ainsi en alliant les pouvoirs publics au privés et la politique aux sciences et techniques, qu’il est possible de développer des plans efficaces face aux risques. Par ailleurs, le succès du concours a inspiré un élan national d’aménagement résilient, avec le lancement d’un concours dans 13 villes vulnérables : le National Disaster Resilience Competition. Parmi les 148 participants au concours, les six projets sélectionnés couvrent différentes parties de la ville pour un coût d’un milliard de dollars, majoritairement financés par l’état. Cette combinaison de stratégies - qui se développent aussi bien sur la terre que dans l’eau, réduisent l’action des vagues, retiennent l’eau, préviennent l’érosion et participent à la reconstruction du littoral - propose des solutions alternatives pour un aménagement durable qui agira efficacement en cas de submersion. Chaque projet donne une réponse locale à son site d’action et propose un aspect social en faveur des usagers de la ville. Il s’agira ici d’étudier les deux projets les plus représentatifs du sujet : The Big U et Living Breakwaters.
Plan des projets sélectionnés du concours Rebuild by Design
BIG - The Big U
OMA - Resist delay store discharges
SCAPE Architecture - Living Breakwaters
MIT + ZUS + URBANISTEN New Meadowland
Interboro - Living with the bay
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Groupe de travail impulsé par Obama pour la reconstruction de la ville
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1) Lower East Side : The Big U (ou The Dryline), par BIG (Bjarke Ingels Group) Englobant la pointe de Manhattan (fig. 9), le Big U propose de transformer le littoral en espace de réception de l’eau. Cette domestication du littoral consiste à accepter de céder du terrain à l’eau en y installant des infrastructures à la fois hybrides, ludiques et attractives. En cas de d’inondations, ces aménagements jouent un rôle de « mur invisible » qui va accueillir l’eau et freiner son cheminement vers la ville57. L’objectif réside dans l’usage donné à ces espaces, qui proposent de réels lieux de vie. Toute l’innovation du projet tient dans le respect de l’environnement paysager, dans la participation au développement économique de la ville et dans la création d’espaces dédiés, en premier lieu, aux habitants.
« Le projet consiste en un véritable mur invisible de 16km de long qui protégerait les immeubles et transformera les berges en espaces de vie et de loisirs pour les rendre aux NewYorkais» Bjarke INGELS, fondateur de l’agence BIG
En établissant un lien fort avec l’eau, le Big U s’oppose aux projets de séparation entre ville et eau par des murs, développés dans certaines villes58 . Bjarke Ingels affirme que « il faut aménager l’infrastructure de résilience autrement qu’avec un mur entre la ville et l’eau. »59 Concrètement, le projet, qui longe le littoral sur 16km, se divise en une diversité de programmes résilients destinés aux habitants. Ce « caméléon urbain » change d’apparence et de caractère en fonction du quartier qu’il traverse. Cette « bridging berm » (berme ondulante) donne a ses habitants une promenade ponctuée de parcs, équipements et espaces publics reliés par des passerelles et longés par une quantité d’arbres et plantes résistants au sel60 . La diversité de formes (fig. 10) que peut prendre le projet est très large (et ne s’arrête pas à la liste nonexhaustive qui suit) :
- une piscine inondable (fig. 11) - du mobilier urbain, sous forme de bancs géants (fig. 12) - une plate-forme inclinée - un pavillon inondable - une surélévation du paysage qui isole le parc du bruit de la voie rapide - un système de fermeture des accès d’eau des boutiques lors des inondations - des murs artistiques déployables en cas de risque Le concept est poussé de manière à ce que les éléments construits, comme les pavillons, puissent se fermer sur eux-mêmes et briser les vagues en cas d’inondation. Additionnés les uns aux autres, tous ces équipements forment un un système qui protège la ville des inondations sous forme continue, sans jamais installer de mur et en proposant de nouveaux lieux de récréation pour les usagers.
Rebuild by Design [en ligne]. The City of New-York, 2013, 2018 [consulté le 20.04.2018]. Disponible à l’adresse : http:// www.rebuildbydesign.org. Document sur le Big U à l’adresse : http://www.rebuildbydesign.org/data/files/675.pdf 57
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Nous étudierons le cas de Bangkok ultérieurement.
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Dans le film documentaire : MANDY, Marie. Inondations : Une menace planétaire, 2015. France : ARTE.
Rebuild by Design [en ligne]. The City of New-York, 2013, 2018 [consulté le 20.04.2018]. Disponible à l’adresse : http:// www.rebuildbydesign.org. Document sur le Big U à l’adresse : http://www.rebuildbydesign.org/data/files/675.pdf 60
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Fig. 9. The BIG U, projet d’aménagement durable pour la pointe de Manhattan © BIG, 2014
BIKING
LOUNGING FOOD + DRINK BOATING
BOATING
LOUNGING
SPORTS BOATING
PLAYGROUND
LOUNGING
FOOD + DRINK ENVIRONMENTAL EDUCATION SPORTS
FERRY BIKING BOATING
SPORTS SPORTS BOATING LOUNGING PLAYGROUND SPORTS CULTURAL INSTITUTION
FERRY
FOOD + DRINK
FOOD + DRINK
LOUNGING
FARMING FERRY
Fig. 10. The BIG U, plan des usages qui composent le projet © BIG, 2014
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Fig. 11. The BIG U, image de synthèse de la piscine inondable © BIG, 2014
Fig 12. The BIG U, images de synthèse du mobilier urbain de protection avant et pendant une submersion © BIG, 2014
2) Staten Island : Living Breakwaters, par SCAPE Architecture Studio Extrêmement exposée aux risques, la rive de Staten Island subit l’érosion côtière de plein fouet. Les plages et les parcs disparaissent, les infrastructures tombent en ruine et les écosystèmes sont menacés. En conséquence, le ligne de côte se rapproche de plus en plus des habitations. L’agence américaine SCAPE spécialisée dans l’architecture paysagère propose une toute autre alternative pour protéger la rive de Tottenville, vaste zone résidentielle de Staten Island. Littéralement « brise-lame vivant », Living Breakwaters propose une protection basée sur les qualités intrinsèques de la nature pour réduire l’impact des vagues et de l’érosion et limiter les inondations, sans toutefois les empêcher. Kate Orff, fondatrice de l’agence, parle de « paysages adaptatifs »61 participant à la résilience écologique et naturelle du site. Plusieurs propositions ont conduit le projet - en cours de réalisation - en collaboration avec des urbanistes et ingénieurs spécialisés en écologie. 61
Dans le film documentaire : MANDY, Marie. Inondations : Une menace planétaire, 2015. France : ARTE.
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La re-création d’écosystèmes vivants aux vertus protectrices est le point-clé du projet. Plusieurs initiatives y sont rattachées. Le BOP (Billion Oyster Project) consiste en la ré-introduction d’un milliard d’huîtres. Le projet prévoit également de repeupler les écosystèmes marins en introduisant des blocs de béton écologique62 qui serviront d’habitat aux poissons (fig. 13). Dirigés vers les vagues, ces blocs absorbe leur énergie et servent de perchoir, en partie émergée, pour les oiseaux et les phoques. Ainsi, la recomposition des récifs sous forme multi-couches permet des eaux peu profondes, à la fois propices au ralentissement des vagues et au développement des activités aquatiques (kayak, pêche, plongée)63. Toutes ces initiatives jouent un rôle de brise-lames, qui réduisent l’action des vagues et de l’érosion sur le littoral, de manière toute à fait naturelle, tout en développant l’économie locale. En parallèle, une partie du projet concerne la mise en place des Water Hubs (fig. 14). Ce sont des plateformes aux usages qui varient en fonction de leur localisation. Ils agissent comme des centres communautaires et éducatifs en lien avec l’aménagement du waterfront new-yorkais. À titre d’exemple, un Water Hub sert de centre aux écoles de Staten Island qui sont chargées du BOP avec leurs élèves. Situées au bord de l’eau, en zones inondables, elles agissent comme brise-lames. Elles sont construites sur un modèle reproductible, avec des modules préfabriqués et des matériaux durables.
Fig 13. Living Breakwaters, reconstitution d’un écosystème défensif avec des blocs de béton écologique © Scape, 2014
Fig 14. Façade d’un Water Hub © Scape, 2014 62
Aussi appelé econcrete, le béton écologique a un ph bas respectueux de l’environnement.
Rebuild by Design [en ligne]. The City of New-York, 2013, 2018 [consulté le 20.04.2018]. Disponible à l’adresse : http:// www.rebuildbydesign.org. Document sur le projet à l’adresse : http://www.rebuildbydesign.org/data/files/676.pdf 63
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Shishmaref Shishmaref, petite ville d’Alaska sur l’île de Sarichef, à 20km du cercle polaire arctique, se fait connaitre pour avoir abrité les premiers réfugiés issus du changement climatique. Construite sur le permafrost, cette petite ville abrite des communautés Inupiak64 depuis plusieurs générations, mais l’élévation des températures qui touche fortement l’Alaska65 met en péril cette culture inuite vieille de 4000 ans. En effet, la hausse des températures fait fondre le permafrost, favorise l’érosion des sols et engendre une instabilité sur l’ensemble du territoire. Pendant des siècles, le territoire s’est protégé naturellement de l’érosion grâce à la banquise ayant pour rôle de protéger les rives. Aujourd’hui, des températures anormalement « Une heure a suffi pour mettre à hautes prolongent l’automne et retarde la formation annuelle de l’abri l’essentiel de mes affaires. la banquise, ce qui laisse les terres nues face à la puissance de Entre-temps, la mer avait avalé les l’eau qui ne cesse de monter et aux tempêtes récurrentes qui deux derniers mètres de terre qui modifient profondément le littoral. En 2000, la quartier ouest de la séparait de la maison. Dessous, les vagues creusaient déjà le la ville est entièrement englouti sous les eaux après le passage permafrost… » d’une tempête. En 2007, une autre tempête dévore, sur 5 mètres de large, la bande côtière de l’île qui ne fait que 400m de large Joe BRAACH, habitant de Shishsur 5km de long66. Des dizaines de maisons qui bordaient la rive maref, à propos de la tempête de tombent à l’eau (fig. 15). Celles qui restent seront déplacées de 2007 l’autre côté de l’île. Face à la situation, la ville a entamé plusieurs tentatives de résilience depuis une vingtaine d’années. Quatre digues ont été construites, mais chacune d’elles est progressivement détruite par la force des vagues. Ces initiatives se montrent inefficaces face à la trop grande vulnérabilité du territoire. Pour tenter de limiter l’impact des vagues, les habitants adoptent des comportements désespérés. Ils renforcent la digue affaiblie en jetant tout ce qui ne leur sert plus sur le rivage67 (motoneiges, quads, etc.), ce qui transforme considérablement le paysage. Sur le long terme, le repli est perçu comme la seule solution valable pour sauver la communauté, en dépit du territoire. Le manque d’infrastructures et de projets adaptés rendent le déménagement du village quasi-inévitable. En 2001, un premier vote a ordonné le déplacement de Shishmaref d’ici 201568. Deux destinations étaient envisagées. La première, appuyée par l’état d’Alaska pour des raisons économiques, consistait à transférer les habitants dans les grandes villes à des centaines de kilomètres, pour bénéficier de leurs infrastructures urbaines. La seconde consistait à déplacer le village à une vingtaine de kilomètres, à Tin Creek, un territoire encore vierge. Les habitants ont opté, à l’unanimité, pour la seconde solution, car elle permettrait de conserver leur culture si spécifique. Cependant, les coûts seraient estimés à 200 millions de dollars et le gouvernement - qui gère 65% du territoire alaskain -, en désaccord avec cette solution, impose au village le financement de 35% des coûts69. Ce dernier est cependant incapable de réunir tant d’argent. L’état n’est pas prêt pour payer une telle somme, mais les habitants ne sont pas prêts à abandonner leur culture inupiak si spécifique et à subir un déracinement. Il s’agit là d’un combat
64
Peuple autochtone d’Alaska Romanovsky, professeur à l’Université de Fairbanks, a calculé une hausse des température de 3°C en Alaska.
65 Vladimir 66
Collectif Argos, 2007. Réfugiés climatiques. Gollion: Infolio.
67
Ibid.
68 VUGNAT, 69
Sébastien et DEFERT, Valérie. Billet retour à Shishmaref, 2014. France : France 4.
Ibid.
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socio-politique qui devient une composante majeure pour la mise en place des plans de résilience dans les territoires en difficulté. Sans suite, le projet de déménagement est tombé à l’eau et les habitants restants - c’est-à-dire ceux qui n’ont pas céder au repli vers les grandes villes - se battent pour préserver leurs terres et leurs habitations. En 2017, le dernier projet en cours était de prélever des tonnes de rochers, à quelques kilomètres du village, pour surélever de 2m la digue de 750m de long (fig. 16), construite en 2006 et déjà détruite en partie70 . La stratégie de protection a pris « L’érosion pourrait être aussi culturelle. Je le pas sur celle du repli et la préservation de leur mode veux sauver ce village où l’on parle encore un de vie est devenu le centre d’interêt. Tony Weyiouanna, peu inupiak. Si l’on se protège correctement, ancien coordinateur de la commission chargée on peut s’en sortir pendant encore des d’organiser l’ex-déménagement, ne s’attarde plus que sur dizaines d’années ! Et sauvegarder notre mode la mise en place des systèmes de défense. de vie basé à 70 % sur l’économie d’autoÀ terme, le Government Accountability Office71 estime qu’une douzaine de villages inuites similaires sont confrontés à la menace climatique. En mars 2016, 15 ans après le premier vote, le ministère de l'Intérieur américain débloque 6,5 millions de dollars pour les aider. Cependant, jusque-là, peu d’actions ont été faites en leur faveur - du moins, elles n’ont pas été relatées. La situation évolue et mérite d’être suivie et médiatisée.
Fig 15. Maison détruite par l’érosion © J. Bernard, 2017
subsistance (chasse, pêche, cueillette). Si l’on est déplacés sur le continent, ce sera socialement désastreux, comme ça l’a été par le passé. Comme ces SDF esquimaux que l’on voit à Nome ou Anchorage, brisés par la drogue et l’alcool.» Tony Weyiouanna
Fig 16. Digue de protection © J. Bernard, 2017
BERNARD, Jérémy. « Lost in Shishmaref » Neufdixieme. 6 février 2017. [Consulté le 02 mars 2018]. Disponible à l’adresse : https://www.neufdixieme.com/lost-in-shishmaref. 70
71
Organisme d'évaluation et d'investigation du Congrès des États-Unis
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3. Étude de cas : la Thaïlande Bangkok Grand exemple de bétonisation extrême et désorganisée, Bangkok est victime d’une subsidence particulièrement importante qui la rend, chaque année, plus vulnérable aux inondations. Elle s’est développée en créant des canaux à partir d’alluvions souples. Ceux-ci constituent les remblais sur lesquelles sont construits les bâtiments. Cependant, ces remblais supportent difficilement la densification et la verticalisation accélérée, ce qui favorise la subsidence. Si la sur-urbanisation de la ville ne cesse pas, le pompage des nappes phréatiques en centre-ville est désormais interdit. Cette restriction a permit de faire ralentir la subsidence en passant de 10cm/an dans les années 70 à 3cm/ an depuis 201072 . Cependant, ce phénomène étant irréversible, la ville, construite sur un sol argileux, ne cesse d’être exposée aux risques de submersion. Certains quartiers ont perdu 1,70m en 60 ans73 . Selon Ashvin Dayal74 , au vu de la situation actuelle, des inondations inévitables d’une ampleur sans précédent auront lieu si « les trois soeurs75 » se rencontrent. De plus, avec le développement urbain de la ville, les mangroves protectrices ont disparu et plus aucun élément naturel ne joue l’espacetampon entre l’eau et la ville. À seulement deux mètres au-dessus du niveau de la mer et au coeur du delta du fleuve Chao Phraya, Bangkok compte parmi les villes les plus vulnérables d’Asie et accueille pourtant 12% de la population thaïlandaise76 . Face à la situation, les politiques de la ville sont à l’urgence et, par manque de concertation, proposent des solutions qui ne sont pas réfléchies sur le long terme. À l’image d’autres grandes villes d’Asie qui déploient des moyens matériels d’ingénierie coûteux, elle crée, en parallèle, des conflits sociaux et urbains et se confronte à des solutions efficaces uniquement sur le court terme. Suite aux importantes inondations du passé, comme celles de 1983, la mégapole asiatique a développé un important réseau de digues, de canaux et autres infrastructures hydrauliques pour prévenir des crues77. La plus importante, la digue du Roi, longe la ville par l’est sur 70km. Les murs qui entourent les quartiers d’affaire, par exemple, créent une imposante barrière physique avec les quartiers plus sensibles, au nord. Les réseaux d’évacuation des eaux pluviales étant obsolètes, il faut stocker l’eau dans des « casiers » pour pouvoir la faire écouler progressivement sans inonder les quartiers les plus riches. Les territoires les moins développés économiquement servent de « casiers » de stockage et laissent leurs habitants entièrement soumis aux aléas de la montée des eaux. Bangkok a développé une culture du risque très spécifique qui se limite au centre-ville et laisse pour compte les quartiers les plus pauvres (fig. 17). Les raisons sont évidemment économiques de sorte à ce que la production et croissance de la capitale, qui génère plus de 40% du PIB de la Thaïlande78, ne soit pas gênée par l’eau. Les limites de ces systèmes de protection se démontrent facilement. De plus, rien ne garantie que ces murs résistent vraiment aux inondations. Déjà surélevée deux fois, une partie de la digue a 72
N.Phien-wej, Land subsidence in Bangkok, Thailand, Engineering Geology, Volume 82, Issue 4, 2006 (p. 187-201)
73
Ibid. Directeur de l’Asian Cities Climate Change Resilience Network et de la Fondation Rockefeller en Thaïlande
74
Dénomination locale pour désigner la pluie, la marée haute du Golfe de Thaïlande et les eaux des rivières du nord qui confluent toutes dans le fleuve Chao Phraya 75
Céline Pierdet pour France Culture. « Villes et mégapoles face aux inondations en Asie du Sud Est » [podcast]. Planète Terre. 23 novembre 2011. 6:48. 76
77
Ibid.
78
Ibid.
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cassé pendant les importantes inondations de 2011, ce qui a contraint la mobilisation de 50 000 soldats thaïlandais pour la mise en place en urgence de digues provisoires de fortune en sacs de sable (fig. 17). Ces infrastructures dites « dures » sont définitivement incertaines, et leur mauvaise gestion entraine une aggravation des inondations traditionnelles. Cependant, à la suite de la submersion catastrophique de 2011, la municipalité n’a pas opté pour des solutions plus douces et plus efficaces. Au contraire, la solution choisie a été d’augmenter le niveau des digues, multiplier les stations de pompage79 et continuer l’endiguement successif en périphérie, sur le modèle de la digue du Roi, pour maintenir le centre hors d’eau et permettre une extension de l’urbanisation. Or, il semblerait que stopper l’urbanisation en périphérie pourrait être une solution. Il s’agirait de maintenir des zones maraichères non urbanisées pour permettre d’étaler la crue sur des sols poreux. Ces sols laissent l’infiltration de l’eau dans le sol possible, à la différence des sols asphaltés de la ville, qui induisent le ruissellement urbain participant grandement aux inondations. De plus, toujours selon Ashvin Dayal, pour une réflexion sur le long terme, il est indispensable de gérer la construction des gratte-ciels pour limiter l’impact de la sur-urbanisation sur les risques d’inondation. Les ingénieurs n’utilisent pas les modèles hydrologiques qui permettraient de déterminer l’impact d’une construction sur l’environnement de la ville et sur le risque d’inondation80. Avec cet outil, la construction plus réfléchie des gratte-ciels irait en faveur de bâtiments plus résilients au risque.
Fig 17. Digues provisoires en sacs de sable installées dans les quartiers défavorisées © Le Monde, 2011
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La ville compte déjà plus de 150 stations de pompage qui évacuent les eaux usées et pluviales en dehors du centre
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MANDY, Marie. Inondations : Une menace planétaire, 2015. France : ARTE.
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Khun Samut Chin À 50km au sud-ouest de Bangkok, Khun Samut Chin est continuellement inondée par les eaux du Golfe de Thaïlande. Durant les 50 dernières années, les habitants ont été contraints de reculer le village 5 fois à cause de la montée des eaux et de l’érosion qui lui est liée. Aujourd’hui, il se trouve à plusieurs centaines de mètres (fig. 18). Seuls le temple bouddhiste et les poteaux électriques subsistent (fig. 19). Symboliquement, les habitants unissent leurs forces et leurs savoirs pour préserver le temple Wat Khun Samut. Il est l’unique construction à être restée sur son emplacement originel. Les moines refusent de se soumettre aux conséquences d’un tel événement81. Techniquement, les solutions utilisées se révèlent efficaces, mais ne le seront probablement pas sur le long terme. Il s’agit majoritairement de piliers triangulaires en béton (fig. 20) installés en périphérie du temple qui brisent les vagues et limitent l’érosion. Une digue de protection (fig. 21) a été montée à proximité directe du temple. Cette nouvelle enceinte empêche l’infiltration de l’eau sur le site. Aussi, les moines ont été contraints de surélever le sol du temple de près de 2m pour pouvoir continuer à prier en cas d’inondations. Malheureusement, la force de l’eau et son élévation incessante se montrent plus fortes que ces fragiles installations. Jusqu’alors, elles ont montré leur efficacité en protégeant quotidiennement le temple des inondations. Cependant, la digue commence à être affaiblie par la puissance de l’eau (fig. 21). Des spécialistes affirment qu’aucun moyen ne saura retenir le temple de la submersion d’ici 30 ans. Si les politiques locales ne réagissent pas face à la situation alarmante de Khun Samut Chin, un collectif de volontaires étudiants bangkokois a pris conscience de la situation et cherchent à agir avec leurs moyens. Connaissant la capacité des mangroves à réguler l’avancée de l’eau, ils se sont rendus sur place pour planter des palétuviers82 sur le rivage. Cependant, si cette méthode durable et naturelle s’avère généralement efficace, la pousse des arbres ne suit pas le rythme effréné de la montée des eaux. La mangrove peine à se développer suffisamment pour protéger le littoral. Pour trouver de l’aide auprès des collectivités bangkokoises qui ne cessent de développer des moyens pour sauver leur métropole, la chef du village, Samorn Khengsamut, a monté un centre local où sont conservés toutes les données, plans, photos et documents manifestant de leur situation (fig. 22). Quelques revenus proviennent des touristes touchés par leur situation, mais aucune aide financière n’a été donnée par la métropole voisine. Ces dons ont notamment servis à la conservation et à la protection du temple pendant des années. Aujourd’hui, si la communauté fait appel à la métropole, c’est en partie pour la reconstruction de l’école détruite en 2010 après une forte pluie (fig. 23)83 . Construite par les habitants avec les matériaux locaux, elle tenait sur des pilotis en bois, rapidement affaiblis avec le temps, qui n’ont pas su résister à la force de l’eau. L’architecture traditionnelle n’est pas faite pour supporter une telle pression aquatique. Cependant, Samorn Khengsamut se bat pour préserver son village et sa communauté, et veut trouver des solutions alternatives pour améliorer la résilience des habitations et éviter le nouveau recul du village. Pour elle, la solution c’est « s’adapter à la nature, vivre avec elle »84 . Elle réajuste son habitation en suivant le mouvement de l’eau : avant de surélever sa maison d’un mètre il y a quelques années, elle vivait La montée des eaux, liée au réchauffement climatique, est d’origine anthropique. Cependant, si les conséquences sont planétaires, les origines du problème sont en grande partie occidentales. 81
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Arbre capable de pousser dans l’eau salée, qui forme une partie de l’écosystème des mangroves
PICONE, Jack. « Thailand's village of Samut Chin: Turning the tide » Al Jazeera. 07 décembre 2015. Disponible à l’adresse : https://www.aljazeera.com/indepth/features/2015/11/thailand-village-samut-chin-turning-tide-151122115118755.html 83
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MANDY, Marie. Inondations : Une menace planétaire, 2015. France : ARTE.
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au niveau du sol. Aujourd’hui, elle vit à trois mètres du sol85 . Par la suite, les habitants se sont mobilisés pour faire de même et surélever les équipements du village, comme les citernes (fig. 24). Ainsi, sans aucun soutien de politiques locales, les habitants du village ont su trouver des solutions. Si cette adaptation à l’eau est adaptée à la situation de Khun Samut Chin, la question se pose alors sur la durée de ces stratégies, à terme. Toutefois, cette mobilisation locale et participative démontre la capacité à sauver le village pour quelques années encore, en proposant des stratégies d’accommodation respectueuses de l’environnement.
Fig 18. Série de photos aériennes le recul de la rive du village par rapport au temple © Straits Times Asia, 2009
Fig 19. Poteaux électriques marquant l’ancienne rue principale © Renaud Philippe
85
Ibid.
35
Fig 20. Brise-lames en béton en périphérie du temple © Witness Street Photography, 2013
Fig 21. Digue de protection du temple de Khun Samut Chin © Witness Street Photography, 2013
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Fig 22. S. Khengsamut montrant les documents attestant de la situation © Witness Street Photography, 2013
Fig 23. L’école de Khun Samut Chin, après l’inondation © Bill Peterson, 2010
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Fig 24. Habitation mise sur pilotis Š Witness Street Photography, 2013
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4.
CONCLUSION Des réponses inégalitaires face au changement climatique : faut-il revoir les enjeux et travailler sur de nouvelles échelles de villes ?
L’étude a montré que la montée du niveau des mers menace les villes côtières du monde entier : elles atteignent toutes un seuil de vulnérabilité plus ou moins critique qui remet en cause l’existence future de certains territoires. Cependant, les réponses apportées diffèrent selon plusieurs critères. À l’image des études de cas, nous retiendrons que le niveau de développement du pays, le statut des villes et la prise de conscience citoyenne orientent ces réponses. De manière globale, les métropoles des pays du Nord mettent au point des plans durables, respectueux de l’environnement et urbainement intégrés. En revanche, les métropoles du Sud, par manque de préparation, optent pour des infrastructures "dures" qui posent de nouvelles problématiques sociales et urbaines. Ces stratégies de résilience peu ou mal-concertées, rarement pensées sur le long terme, ne cessent d’accroitre les inégalités à l’échelle locale comme à l’échelle mondiale. Face à cela, les petites villes doivent souvent affronter un laisser-faire des collectivités pour résister à la submersion. Alors que certaines survivent grâce à des initiatives et petits gestes citoyens, d’autres doivent envisager le repli comme solution ultime. Les habitants n’ont d’autres choix que de partir et prendre le chemin des « réfugiés climatiques ». Le sujet des réfugiés climatiques devient, à son tour, un sujet nécessitant de la réflexion autour de l’urbain. De manière générale, le schéma se résume par des flux allant des petites villes vers les grandes villes, résultant souvent à la mise en place de bidonvilles et de nouvelles inégalités. Par ailleurs, elle se retrouvent saturées au point d’augmenter en terme de vulnérabilité. Mais alors, l’enjeu ne serait-il pas dans ces petites villes et le travail ne se ferait-il pas en amont ? Pas encore urbanisées sur toute leur superficie, elles sont plus faciles à transformer et les plans d’urbanisme peuvent s’appliquer avec moins de contraintes urbaines. De façon plus personnelle, ce travail a guidé une prise de conscience sur le sujet que sont ces territoires presque oubliés. En effet, nombreux sont les auteurs qui traitent précisément des métropoles et de leurs systèmes de résilience. En revanche, peu s’attachent à l’étude des villes de la petite échelle, sans grands impacts économiques ou touristiques. Durant mes recherches, j’ai du faire face à un manque conséquent de publications sur cette thématique. Très peu de recherches ont été menées sur Shishmaref et Khun Samut Chin, qui sont pourtant symboliques et qui font l’objet d’articles généraux, les classant au rang des faits divers. Cela témoigne de l’intérêt insuffisant qui est porté à ces territoires de la petite échelle. Or, de mon point de vue, c’est un vrai sujet qui permettrait de répondre à une partie du problème posé en amont. Il existe des initiatives internationales, comme le projet "100 villes résilientes" qui mettent en commun les connaissances des grandes villes sur le sujet. Ne pourrait-il pas y avoir des projets similaires pour des villes de moins d’un million d’habitants ? Pourquoi ne pas partager les « bonnes idées » avec tous les territoires concernés, aussi petits soient-ils ? À l’avenir, dans le cadre d’un mémoire, cette prise de conscience pourrait permettre d’orienter une étude sur ce sujet plus spécifique qui ouvre, par ailleurs, sur de nombreux thèmes transversaux (architecture adaptative, initiatives citoyennes, urbanisme local et adapté, etc.)
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40
5.
ANNEXES
Glossaire Atoll : « Île basse corallienne, en forme d'anneau, qui renferme une lagune (lagon) pouvant communiquer avec la mer par une ou plusieurs passes » (CNRTL) Chaine d’impacts : La chaine d’impacts provoquée par la hausse des température, commence par une modification des aléas naturels, de leur fréquence, leur intensité et leur répartition, notamment en termes de précipitations, qui tendent à augmenter plus violemment dans certaines parties du globes, à se raréfier dans d’autres parties et à provoquer des changements de courants qui entrainent des événements climatiques extrêmes plus fréquents. Par la suite, la niveau de la mer augmente, à cause des glaciers qui fondent et de la dilatation des molécules d’eau sous la chaleur, suivi d’une modification des ressources naturelles réparties sur l’espace terrestre, dans les eaux et dans les sols. Enfin, on relate de lourdes conséquences sur les sociétés humaines, en termes de santé, d’agriculture, d’urbanisme ou encore d’énergies. Culture du risque : « C'est la connaissance par tous les acteurs des phénomènes naturels et l'appréhension de la vulnérabilité. L'information des populations est le moteur essentiel pour faire progresser la culture du risque. Celle-ci doit permettre d'acquérir des règles de conduite et des réflexes, mais aussi de débattre collectivement des pratiques, des positionnements, des enjeux, etc. pour permettre une meilleure gestion du risque. » (Ministère de la transition écologique et solidaire) Dette écologique : « Dette contractée par les pays industrialisés envers les autres pays à cause des spoliations passées et présentes de leurs ressources naturelles, auxquelles s’ajoutent la délocalisation des dégradations et la libre disposition de la planète afin d’y déposer les déchets de l’industrialisation » (CADTM) Effet de serre : Phénomène naturel qui retient une partie de l’énergie solaire réfléchit par la terre. Les gaz rejetés par les activités humaines contribuent à renforcer l’effet de serre qui se concentre sur le haut de l’atmosphère. Celui-ci filtre naturellement les rayonnements solaires et les réfléchit sur la planète pour en réguler naturellement la température. Mais le renforcement de l’effet de serre contribue à retenir plus de chaleur et ainsi à réchauffer la planète. On retiendra, comme activités principales émettrices de gaz à effet de serre, la combustion des et des gaz, la déforestation et l’agriculture intensive. Érosion : « Altération de l'écorce terrestre par les agents atmosphériques, hydrologiques, ou par l'action de l’homme. » (CNRTL) Dans notre contexte, l’érosion des terres est provoquée en grande partie par la montée des eaux. Onde de tempête : « Élévation du niveau de la mer causée par les vents d'une dépression qui poussent sur la surface. Elle peut entraîner de graves inondations côtières. » (Info Climat)
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Permafrost : Le permafrost, ou pergélisol, est un mélange de sable et de glace. Il constitue le sol de l’Alaska. Dans certaines régions, il peut dater de 30 000 à 40 000 ans, depuis la dernière ère glacière. Polder : « Extension des terres endiguées et asséchées, conquises sur la mer ou les marais littoraux, grâce à un système sophistiqué de digues et de pompes. » (A. Le Roy et M. Lipinski, La France en danger) Réfugiés climatiques : « On appelle migrants environnementaux les personnes ou groupes de personnes qui, essentiellement pour des raisons liées à un changement environnemental soudain ou progressif influant négativement sur leur vie ou leurs conditions de vie, sont contraintes de quitter leur foyer ou le quittent de leur propre initiative, temporairement ou définitivement, et qui, de ce fait, se déplacent à l’intérieur de leur pays ou en sortent. » (Organisation Internationale des Migrations) Salinisation : « Augmentation de la teneur en sels d'un sol, d'une eau douce de surface ou souterraine. Elle altère la qualité de l'eau et peut rendre le sol impropre à la culture. » (Larousse) Subsidence : « Enfoncement lent de la croûte terrestre dans les fosses où s'accumulent de fortes épaisseurs de sédiments. » (CNRTL) Waterfront : Littéralement « front d’eau », il désigne le littoral de la ville.
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RÉSUMÉ Il s’agit, dans ce rapport, de relater l’état des villes vulnérables face à l’inexorable montée des eaux. Le concept de résilience est aujourd’hui à intégrer dans les stratégies d’aménagement du territoire pour préserver ces villes. Cependant, toutes ne sont pas dotées des mêmes capacités et ne développent pas les mêmes plans de résilience. Si certaines intègrent les notions de durabilité et de qualité de vie, d’autres prennent des directions différentes qui engendrent de nouvelles problématiques urbaines, à l’échelle locale comme à l’échelle internationale. L’objectif est de faire valoir les stratégies concluantes et de mettre en lumière celles qui peinent à répondre au problème.
SUMMARY This report offers to study the vulnerability of the cities facing the relentless rise of the water level. Today, the concept of resilience has to be integrated into the strategies of urban planning to protect our cities. However, all are not endowed with the same capacities and do not develop the same plans of resilience. Some integrate the notions of sustainability and quality of life, others take different directions. It causes new urban issues, from the local scale to the international scale. The objectives are asserting the effective strategies and highlighting those who have difficulties to resolve the problem.
MOTS-CLÉS urbanisme - villes - changement climatique - montée des eaux - résilience vulnérabilité - adaptation
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