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Comment prendre en charge le burn out en situation de pandémie

Kandouci Chahrazade.

Réponse

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Le burnout, dit épuisement professionnel, est devenu un des risques contemporains majeurs pour les salariés. L'actuelle pandémie de Coronavirus (Covid-19) augmente ce risque pour certains salariés, qu'il convient de protéger.

De nombreux employés devant obligatoirement continuer à travailler durant cette période sont soumis à un risque fort d’épuisement professionnel. Il faut en effet tenir compte des heures de travail, de l’intensité du travail, du stress permanent, de la tension permanente, de la peur continuelle de la contamination et de contaminer ses proches à son retour. Le stress, l'anxiété et la dépression peuvent être considérés comme des réactions émotionnelles normales face à une pandémie; Les travailleurs de la santé sont à plus haut risque d'exposition au virus et ont un impact psychologique plus important que ceux qui sont moins exposés.

La prise en charge individuelle :

La première étape est un accompagnement professionnel : Il faut apprendre au patient souffrant de burnout à reconnaître sa surcharge, à en parler avec son supérieur hiérarchique et évaluer les possibilités de décharge et de soutien. Il faut aussi mettre en place des dispositifs de prise en charge psychologique surtout pour le personnel de soins et de repérer les employés qui sont susceptibles de développer un stress post-traumatique ou des troubles d’ordre psychologique. Par ailleurs le télé travail mis en place par certaines entreprises est une organisation nouvelle pour laquelle les employés n’ont pas été préparé; et les managers ne sont pas non plus formés à un management à distance et peuvent ne pas se rendre compte de l’impact de leurs comportements. Une bonne gestion du télétravail repose sur une organisation stricte que le salarié doit de luimême s’imposer: -des horaires fixes, établir un marqueur précis du terme de la journée de travail. -aménager un lieu dédié au télé travail dans le logement - se déconnecter régulièrement en faisant des pauses et en essayant de conserver des horaires de travail similaire à d'habitude. La deuxième étape consiste en un accompagnement de vie (coaching), la recherche d’un nouvel équilibre de l’aménagement du quotidien est au premier plan. Le patient souffrant de burnout doit prendre des distances plus nettes avec son travail et incorporer d’avantage d’activités reposantes et intéressantes à son agenda: se réservez du temps en famille, pour faire des activités loin des écrans, du sport, de la relaxation, et prendre des nouvelles de ses proches. -Les thérapies corporelles, les thérapies créatives (art, peinture, ergothérapie), les massages, le sport sont recommandés. -Les méthodes éducatives et comportementales sont surtout indiquées dans la gestion du stress. Son indication dépend de l’importance des symptômes cliniques. Elle doit être envisagée en

cas de : troubles du sommeil persistants, troubles anxieux et dépression. Si un arrêt de travail de plusieurs semaines se profile chez le patient souffrant de burnout, un séjour dans une clinique spécialisée est la plupart du temps indiqué.

Action sur l’environnement professionnel :

Identifier les contraintes organisationnelles et psychosociales avec lesquelles le salarié est en relation afin de mener des actions correctrices adéquates; • Veiller à ne pas surcharger certains postes ou certains salariés • Favoriser le soutien social et éviter l’isolement: Le maintien des contacts sociaux est de plus en plus difficile dans le contexte des exigences de distanciation sociale: c’est le cas les professionnels de la santé qui négligent souvent les relations avec leurs amis et leur famille en raison de la lourde charge de travail ou des préoccupations concernant l'infection des autres en raison de leur propre exposition professionnelle au virus. • Renforcement du travail en équipe tout en respectant les mesures de distanciation. • Lacréation d'un environnement psychologiquement sûr • La reconnaissance du travail accompli • Êtrevigilant au traitement équitable des salariés • Éviterles conflits éthiques autour de la qualité du travail en partageant les objectifs et les manières de faire pour les atteindre. • Des stratégies organisationnelles claires pour le bien-être du personnel, une communication cohérente et un soutien d'équipe important.

Références

1.Holly Blake & co. “Mitigating the Psychological Impact of COVID-19 on Healthcare

Workers: A Digital Learning Package “International Journal of Environmental Research & Public Health 2020, 17(9),2997; https://doi.org/10.3390/ijerph17092997 2.Valérie Pezet- Langevin « burn out: mieux connaitre l’épuisement professionnel », hygiène et sécurité du travail N°237-Décembre 2014 3.Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn out. Mieux comprendre pour mieux agir. DGT, Anat, INRS. Guide d’aide à la prévention N° ISBN : 978-2-11-12998-8 4.Toni Brühlmann, surmenage ou sous-menage: stress dangereux pour la santé; fatigue en cas de burn out et bore out. Revue médicale suisse 2015; 11(471): 923-926 5.Guéritault-Chalvin, C. Cooper.Mieux comprendre le burnout professionnel et les nouvelles stratégies de prévention : un compte rendu de la littérature Journal de

Thérapie Comportementale et Cognitive 2004, 14, 2, 59-70.

Quelle attitude adopter pour l’aptitude du personnel de santé en fonction de l’âge?

Chaib Samia, Gueroui Said

Réponse

Au cours de cette pandémie, le risque de contamination par le Covid-19 concerne toute la population, quel que soit l’âge. Selon les données, de la littérature scientifique internationale, le risque de développer une forme grave, voire le décès est plus élevé chez les groupes de patients les plus âgés et/ou avec des comorbidités (1, 2). En effet, les estimations de la proportion de personnes infectées susceptibles d’être hospitalisées ont augmenté avec l’âge jusqu’à un maximum de 18,4% (11,0 - 7,6) chez les personnes âgées de 80ans ou plus (3). Chez la population générale en Chine, bien que la majorité des cas signalés soient bénins (81 %), environ 80% des décès sont survenus chez des adultes âgés de plus de 60ans (4). Aux USA, des données récentes des CDC (Centers for Disease Control and Prevention) indiquent que les taux d’hospitalisations, d’admissions en soins intensifs et de mortalité parmi les cas de COVID-19 signalés sont substantiellement plus élevés chez les patients de plus de 45ans, avec des taux de létalité dépassant 1,4% chez les patients âgés de 55 à 64ans et dépassant 2,7% chez ceux âgés de 65 à74ans (4). Ces estimations donnent une indication du taux de mortalité à travers le spectre de la maladieCOVID-19 et montrent un fort gradient d’âge dans le risque de décès (3). En Italie, au 30mars 2020, le taux de létalité déclaré est de 0,7% pour les personnes âgées de 40 à 49ans, et de 27,7% pour les personnes âgées de plus de 80ans, avec 96,9% des décès chez les personnes âgées de 60ans et plus. L’Italie est l’une des populations les plus âgées, avec 23,3% de sa population de plus de 65ans, contre 12 % en Chine. Le fardeau global des cas graves et de la mortalité reflète les liens entre la répartition par âge des cas précoces, la structure par âge de la population et les liens intergénérationnels (5). Dans une revue systématique et une métanalyse, l’âge avancé était fortement associé à la forme sévère de Covid-19 dans les huit études éligibles, avec un risque relatif (RR) >5 chez les 60-65ans vs les moins de 50ans (6). En Angleterre, les premières données d’une étude réalisée sur la plateforme Opensafely révèlent une augmentation du risque de décès en fonction de l’âge et des comorbidités (7). En Algérie, selon les données du ministère de la Santé, le 24avril 2020, le nombre de cas confirmés est de 19,7% pour la tranche d’âge 50-59ans, et de 35,3% pour les plus de 60ans. Le nombre de décès est de 74 pour la tranche d’âge 50-59ans, et de 306 pour les plus de 60ans (8). Le secteur de la santé n’est pas épargné du risque d’infection nosocomiale au Covid-19. En effet, jusqu’à 10% des cas signalés en Chine et jusqu’à 9% de tous les cas en Italie concernaient le personnel de la santé (9). En France, au 20mars 2020, le nombre de médecins contaminés par le Covid-19 est de 870. La répartition pour les tranches d’âge: moins de 40ans, 40 à 60ans et plus de 60ans, est respectivement de : 33,68%, 42,53% et 23,79% (10). Il est à noter qu’il n’existe pas d’étude concernant les facteurs de risque, notamment âge et comorbidités chez les travailleurs de la santé infectés par le Covid-19 (11). Cependant, il faut tenir compte de ces deux variables pour l’avis d’aptitude des personnels de santé prenant en charge des patientsCovid-19 positifs ou suspects. En outre, il faut évaluer le risque d’exposition au Covid-19 dans les services. Ces servicesdevraient être classésen fonction du flux de patients potentiellement ou certainement infectés par le Covid-19 (en se référant à l’avis de la SFMT du 23mars 2020 (12)), selon les textes réglementaires algériens et en fonction de l’organisation de chaquestructure sanitaire:

Classe1 : Les services assurant l’accueil et la prise en charge des patients Covid+ confirmés ou en attente de confirmation éligibles à des soins intensifs (cas graves). Classe2 : Les services assurant l’accueil et la prise en charge des patients Covid+ confirmés ou en attente de confirmation non éligibles à des soins intensifs (cas non graves). Classe3: Les services ou consultations non dédiés, pouvant accueillir des patients sans signes Covid, et qui peuvent évidemment se révéler secondairement positifs. Classe4: Les services accueillant des patients fragiles (hématologie, oncologie, etc.) pour lesquels tout doit être fait pour éviter une contamination des patients. L’attitude à adopter pour l’avis d’aptitude est la suivante: (1, 12, 13). La décision d’aptitude est à prendre au cas par cas. Les personnels de plus de 50ans affectés dans les services dédiés à la prise en charge des patientsCovid-19 (classe1 et 2) doivent être informés des risques encourus à fortiori s’ils sont atteints de maladies chroniques. Et les doter des moyens de protection notamment du port obligatoire de masquesFFP2. En particulier, en cas d’impossibilité de remplacement de ces personnels. Il convient d’éviter le contact avec les patients suspects ou confirmés. Et adopter les mesures de prévention suivantes: –Renforcer les recommandations d’hygiène des mains. –Le soignant doit porter un masque en respectant les consignes du bon usage du masque, et faire porter aussi au patient suspect un masque chirurgical. –Un masque chirurgical correctement porté est plus efficace qu’un masqueFFP2 incorrectement porté. –Réserver les masquesFFP2 aux situations d’exposition particulière à risque (ventilation, intubation, prélèvements respiratoires, kinésithérapie…) ou exclure ces personnels de ces tâches particulières. –Mesures barrières ou mesures de distanciation sociale spécifique aux personnes fragiles:

Pour les personnels de plus de 65ans, les exclure de l’activité présentielle et mettre en œuvre systématiquement des moyens de communication alternatifs dans le cadre de leur activité d’apprentissage ou professionnelle: e-learning, travail à distance, téléconsultation ou consultation par téléphone, téléconférence… Concernant, les services non dédiés au Covid-19, les personnels maintenus au travail doivent appliquer les mesures de prévention et de distanciation sociale.

Références

1. Andujar P, Petit A, Bensefa-Colas L, et al. Société Française de Médecine du Travail. Avis Relatif à l’âge et à l’affectation des travailleurs en milieu de soins: Risques d’apparition de formes sévères et de décès chez les personnels soignants atteints par le COVID par classe d’âge. Avis publié le 6avril 2020. http:// Doi : 10.1016/j.admp.2020.04.006. 2. MuniyappaR, Gubbi S. COVID-19 Pandemic, Coronaviruses, and Diabetes Mellitus. Am J Physiol Endocrinol Metab. 2020 May 1;318(5):736-741. http://:doi: 10.1152/ajpendo.00124.2020. Epub 2020 Mar 31.PMID: 32228322 3. Verity R, Okell LC, Dorigatti I, et al. Estimates of the severity of coronavirus disease 2019: a model-based analysis. Lancet Infect Dis. 2020 Mar 30. S1473-3099(20)30243-7. www.thelancet.com/infection Published on line March 30, 2020: https://doi.org/10.1016/S1473-3099(20)30243-7 4. CDCCOVID-19. Response Team. Severe Outcomes Among Patients with Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) -United States, February 12-March 16, 2020. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 2020 Mar 27;69(12):343-346. https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/69/wr/mm6912e2.htms_cid=mm6912e2_w 5. Dowda JB, Andrianoa L, Brazela DM, et al. Demographic science aids in understanding the spread and fatality rates of COVID-19.ALeverhulme Centre for Demographic Science,

Nuffield College, University of Oxford, Oxford OX1 3UQ, United Kingdom Edited by Douglas S. Massey, Princeton University, Princeton, NJ, and approved April 8, 2020 (received for review March 17, 2020). 6. Matsushita K et al. The relationship of COVID-19 severity with cardiovascular disease and its traditional risk factors: A systematic review and meta-analysis. medRxiv (2020). 7. The OpenSAFELY Collaborative. Open safely: factors associated with Covid-19-related hospital death in the linked electronic health of 17 million adult NHS patients). medRxiv preprint doi: https://doi.org/10.1101/2020.05.06.20092999. Version postée le 7Mai 2020. 8. http://covid19.sante.gov.dz/carte/. 9. ECDC technical report. Infection prevention and control and preparedness for COVID-19 in healthcare settings. Second update: 31 March 2020. 10. https://urgences-serveur.fr/ 11. Buerhaus PI, Auerbach DI, Staiger DO. Older Clinicians and the Surge in Novel Coronavirus Disease 2019 (COVID-19). JAMA. 2020 Mar 30. doi:10.1001/jama.2020.4978. 12. Recommandations de la Société Française de Médecine du Travail (SFMT) du 23mars2020.http://www.chu-rouen.fr/sfmt/autres/Criteres_evictions_COVID19_SFMT_23_mars_2020.pdf 13. le Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Avis relatif à la prévention et à la prise en charge des patients à risque de formes graves de COVID-19 ainsi qu’à la priorisation des tests diagnostiques. 31 mars 2020.

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