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Les nouvelles qualités : agilité et RSE
Agile et responsable, deux qualités à cultiver
Agilité et responsabilité soci(ét)ale sont deux notions au top dans l’univers entrepreneurial. Mais sont-elles compatibles ? Suivant que l’on s’appelle Kazidomi, VO-Event ou COOPCITY, leur combinaison est à géométrie variable.
ISO 26000
En RSE, on parle souvent de norme ISO 26000. Edictée par l’Organisation Internationale de Normalisation, elle fixe les lignes directrices de la responsabilité sociétale et son cadre de référence pour les entreprises. Sur 7 thèmes : gouvernance de l’entreprise ; droits de l’Homme ; relations/conditions de travail ; environnement ; loyauté des pratiques ; rapports aux consommateurs ; et développement local. 99 pays ont créé cette norme. Etats-Unis, Cuba, Inde, Luxembourg et Turquie ont, eux, refusé de la voter.
Agilité, une méthode pas si jeune
Elle fait fureur aujourd’hui mais l’approche « agile » est née dans les eighties et a été consacrée début des années 2000 par un Manifeste détaillant 12 principes. Son application tous azimuts actuelle semble s’écarter de l’essentiel. Comme « favoriser les individus et leurs interactions plus que les outils et processus». Comme « installer une collaboration directe entre développeurs de projets et clients ». Autre méprise : vouloir rendre son entreprise « agile à 100 % ». L’agilité est surtout efficiente dans la gestion des projets… Son déclic d’origine. E lles sont devenues incontournables en entreprise. D’une part, l’agilité pour coller, dans sa production et son fonctionnement, à un environnement commercial hyper volatil, incertain, complexe et désormais sous influence Covid. D’autre part, la RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) : l’alignement par les sociétés de leur gestion globale sur des principes environnementaux, sociaux et économiques pour améliorer en continu leur impact sur la société et la planète.
Encore faut-il faire matcher ces deux principes. Et là, point de recette toute faite. À chaque secteur, son approche. Prenons la société Kazidomi, success story du foodtech made in Belgium avec comme leitmotiv de « rendre accessible un mode de vie sain pour tous » à travers des gammes de produits responsables aussi bien alimentaires, cosmétiques que d’entretien. Mais, sa politique RSE va au-delà. Elle se traduit en logistique, dans l’utilisation de matières recyclables, dans le recours à des producteurs locaux, mais aussi dans le bien-être de ses employés encouragés à vivre « plus responsable ».
« Penser cette approche RSE dans sa globalité nécessite de l’agilité », assure Emna Everard, la CEO de Kazidomi. « Être une entreprise agile consiste à être capable de vite rebondir, à ne pas se coincer dans des paradigmes non-testés au préalable. C’est aussi se concentrer sur des manières d’opérer découpées en cycles courts pour cultiver rapidement les fruits du travail accomplis. Rendre agiles tous ses processus est tout à fait compatible avec une société qui se fixe une mission sociétale et relève les défis nouveaux avec les solutions les plus innovantes. » Avec quelques paradoxes à régler : « nos adhérents sont de plus en plus demandeurs de solutions durables pour les emballages, les livraisons, etc. Mais ils recherchent aussi le meilleur prix, ce qui complexifie la transition vers des solutions durables notamment s’il faut se fournir ailleurs dans le monde. L’important est aussi de disposer d’un outil permettant en permanence de mesurer son impact RSE, pour, de manière agile, rectifier le tir si nécessaire », explique Emna Everard. Dans l’univers de l’économie sociale, agilité, RSE, productivité ont néanmoins une autre résonance. Sabrina Nisen, coordinatrice de COOPCITY, pépinière bruxelloise pour entrepreneurs sociaux, doute du « principe de RSE aux critères extra larges et noncontraignants » dont se gargarisent de grosses sociétés. « Ce label à la mode est en deçà des réalités socio-économiques, culturelles et environnementales de la Belgique », affirme la responsable. « En revanche, les entreprises suivant nos
Une ‘agilité responsable’ peut exister mais à condition d’être pensée collectivement, et pas seulement dans un but de profit.
— SABRINA NISEN - COOPCITY
Bien des secteurs s’efforcent de suivre cette logique associant responsabilité mesurable et agilité de réaction. Par exemple, le groupe VO-Event a initié depuis 2018 une politique RSE dans l’organisation de ses événements. Avec mise en place d’un outil de reporting RSE. Une sorte de check list par événement pour le rendre le plus vertueux possible. D’autre part, un volet « durable » est intégré à toute proposition faite à ses clients. Puisqu’un événement aura toujours une empreinte écologique, VO calcule systématiquement pour chacun sa compensation financière « carbone », assumée soit par le client, soit partiellement par VO-Event. Chaque événement (public ou corporate) étant unique, l’agence a redoublé d’agilité. formations COOPCITY sont, de par leur finalité sociale, des structures qui poussent déjà plus loin et naturellement une dynamique RSE. Elles sont à fond dans le concept d’impact social - sur la société, sur les usagers et clients - évalué en regard des actions et pratiques des sociétés. » Le terme « agilité » n’a pas non plus la cote en milieu d’économie sociale. « Nous nous référons plus à une gouvernance démocratique, à l’autogestion sous forme de coopératives, d’organisation horizontale. Oui, une “agilité responsable” peut exister mais à condition d’être pensée collectivement. Pas seulement pour le profit. »
Agir ensemble pour stimuler la demande en matière recyclée
Le potentiel de circularité de nos déchets d’entreprise est immense. Les bénéfi ces peuvent être considérables, sur le plan non seulement de la durabilité, mais aussi de l’économie. Valipac s’eff orce dès lors d’impliquer toute la chaîne, grâce à des initiatives ciblées et à des projets innovants. Francis Huysman, CEO de Valipac, nous en dit plus à ce sujet.
« Les entreprises belges qui mettent des emballages sur le marché doivent en assumer la responsabilité dans son intégralité, jusqu’à la fi n de la vie de ces emballages. Concrètement, ces “responsables d’emballages” doivent démontrer que 80 % de leurs emballages sont recyclés. Dans ce cadre, Valipac veille à la collecte sélective, au tri et au recyclage des déchets d’emballages des entreprises en Belgique.
Chaque année, nos clients nous transmettent des déclarations de la quantité d’emballages qu’ils ont mise sur le marché. Ils nous paient alors une cotisation, dont le montant dépend des matériaux utilisés et du volume d’emballages. Pour pouvoir démontrer le recyclage, nous concluons des contrats avec des collecteurs. Ceux-ci enlèvent les déchets d’emballages chez les clients des responsables d’emballages (les déballeurs). Afi n d’atteindre un taux de recyclage de 80 %, nous utilisons la cotisation fi nancière de nos clients pour encourager la collecte sélective chez les déballeurs, à l’aide d’incitants fi nanciers.
Vers un nouveau système circulaire
Ce système existe depuis plus de vingt ans et a fait ses preuves. Cependant, les temps ont changé et nous sommes conscients qu’exporter nos déchets d’emballages en Asie du sud-est pour les recycler là-bas n’est pas un système durable. C’est pour cette raison que nous avons mis sur pied un nouveau système circulaire, dans lequel les traders, les recycleurs et les producteurs d’emballages jouent un rôle essentiel. Les traders sont les intervenants qui enlèvent les matériaux chez les collecteurs et qui les revendent aux recycleurs. Les recycleurs recyclent ensuite ces matériaux, afi n qu’ils puissent être réutilisés par les producteurs d’emballages. En faisant en sorte que chacun dans la chaîne assume sa responsabilité, nous souhaitons réutiliser un maximum de déchets d’emballages, en vue de la production de nouveaux emballages, et ainsi, rester à un niveau aussi élevé que possible dans la chaîne de valeur.
Housses rétractables circulaires
Les marchandises livrées sur palette sont généralement protégées par un fi lm rétractable en plastique. En 2019, nous avons conçu du fi lm rétractable composé à 50 % de déchets de plastique issus des collectes en entreprise. Pour ce faire, nous avons travaillé en collaboration avec plusieurs parties prenantes de la chaîne : Total en tant que partenaire technique, Rymoplast en tant que recycleur, Oerlemans en tant que producteur d’emballages et Wienerberger en tant que responsable d’emballages. Ces fi lms rétractables sont désormais utilisés par plusieurs entreprises. Ils ne diffèrent pas des fi lms rétractables classiques d’un point de vue qualitatif et ils ne sont pas beaucoup plus chers, mais leur empreinte carbone est nettement plus faible. Les entreprises n’ont donc plus aucune raison d’utiliser des fi lms rétractables conçus intégralement à partir de matière vierge. »
« Il s’agit d’une innovation importante, car chaque année, pas moins de 100 000 tonnes d’emballages en plastique provenant d’entreprises sont mises sur le marché. Les fi lms rétractables représentent 40 000 tonnes de ceux-ci. »
Film étirable composé à 25 % de plastique recyclé
« 40 000 autres tonnes consistent en fi lm étirable, principalement utilisé dans le secteur de la distribution. Nous mettons donc actuellement au point un fi lm étirable qui contient 25 % de plastique recyclé. Comme le fi lm étirable est beaucoup plus fi n que les fi lms rétractables, il est plus diffi cile, d’un point de vue technique, d’y intégrer des matières recyclées. Nous avons lancé un autre projet en collaboration avec le producteur d’emballages Mima Films. Cette innovation sera testée cet automne, par des utilisateurs tels que Reynaers Aluminium et Colruyt. Avoir de telles grandes entreprises modèles comme partenaires est important, car beaucoup d’autres suivront dans leur sillage. Nous créons ainsi un marché. De cette façon, nous pouvons véritablement changer les règles du jeu. Nous ne manquons pas de déchets à transformer en matière première. Il faut surtout créer la demande en matière recyclée. »
Encre neutralisable
« Les encres ont un impact négatif sur le recyclage des fi lms d’emballage. Sans tri préalable, il est impossible de recycler correctement les fi lms imprimés. C’est pourquoi, au début de cette année, nous avons lancé un projet afi n de concevoir des encres qui peuvent être neutralisées pendant le processus de recyclage. Nous pourrions ainsi fabriquer un fi lm pratiquement transparent à partir d’un fi lm imprimé. Ce projet durera deux ans et se déroulera en collaboration avec plusieurs parties prenantes de la chaîne. »