MAGAZINE-801
Carmelita Iezzi--Wouter Dasselaar--Anna Halm Schudel--Lorenzo Papadia--DH Dowling--Vassilis Triantis--Kasper Kruse--Nita Vera--Robin Cowings--Mahesh Balasubramanian
Daniel
801
Carmelita Iezzi Wouter Dasselaar Anna Halm Schudel Lorenzo Papadia DH Dowling Vassilis Triantis Kasper Kruse Nita Vera Robin Cowings Mahesh Balasubramanian
04 12 21 30 42 50 60 68 77 86
The images published in this magazine are copyrighted to their respective creators.
Ze Editorial (part 2) Made in Creuse
This new issue of Square Magazine has been produced in France, in my new home. Get a bit closer to your screen and you’ll be able to smell the garlic and the herbs. I managed to set up the computer, fighting to get an internet connection in my rural hole at the back of beyond. At least it is not snowing. Oh, hold on… I have cows at the back, lizards on the walls, spiders… Actually I don’t want to think where the spiders might be. The neighbours bring me leeks. I bought an axe and a wheelbarrow. The barn that should become a Square Gallery next year is still full of boxes, and presumably mice. But the window in my office is square. Serendipity hey?
Ce nouveau numéro de Square Magazine a été produit en France, où j’habite maintenant. Si vous vous rapprochez de votre écran, vous pourrez sentir l’odeur de ’ail et des fines herbes. J’ai réussi a monté mon ordinateur, me battant avec une connexion internet récalcitrante dans mon coin paume. Pour le moment ça va, il ne neige pas. Oh, attends… Il y a des vaches dans les champs derrière, des lézards sur les murs, et des araignées. En fait, j ne tiens pas à penser où les araignées peuvent bien être. Les voisins m’apportent des poireaux. J’ai acheté une hache et une brouette. La grange qui deviendra dans quelques temps un Square Gallery est pleine de cartons et, probablement, de souris. Mais la fenêtre de mon bureau est carrée. Quelle chance, hey ?
Christophe Dillinger, April 2017.
Carmelita Iezzi
0 4 The Silence Between Words This project was inspired by a poem by Roberto Juarroz «El silencio que queda entre dos palabras» The silence between words. This poem became a tale which then became a story told through a series of digital pictures. They are linked together representing a cycle; the cycle of our Mother Nature, the silence and sense of the melancholic loneliness of winter. In this series I preferred to use post-processing techniques that emphasize the black and white tones, making them much more dramatic and adding a sense of poetry.
Ce projet s’inspire d’un poème de Roberto Juarroz « El silencio que queda entre dos palabras » - Le silence entre les mots. Ce poème devint un récit, puis toute une histoire racontée au travers d’images numériques. Elles sont liées et suivent le cycle de la nature, le silence et le sentiment de solitude mélancolique qu’apporte l’hiver. J’ai provilégié les retouches qui soulignent les tons monochromes, les rendant ainsi plus dramatiques et poétiques.
www.carmelitaiezzi.com
Wouter Dasselaar
1 2 Refusing landscape
Japan has one of the highest population densities in the world. Due to the country’s high need of space and a culture where efficiency and organising are of high priority, its landscapes are highly cultivated. However, the strength of nature is visible in many places, making it both respected and feared. This series examines the close relationship between man and nature in Japan.
Le Japon a l’une des densités de population les plus élevées au monde. En raison du grand besoin d’espace et d’une culture où l’efficacité et l’organisation sont hautement prioritaires, ses paysages sont fortement cultivés. La force de la nature y est cependant toujours très évidente, ce qui la rend à la fois respectée et redoutée. Cette série examine la relation étroite entre l’homme et la nature au Japon.
www.wouterdasselaar.nl
Anna Halm Schudel
2 1 4 Seasons
For a full year, I took a picture a day of a flower on Polaroid SX70 film. I chose Polaroid, because the inherent haziness of the material makes the perfume of the flower visible. And I appreciated that I could see the picture immediately. With the 365 originals I then created the «4 seasons», four assemblages between acrylic glass. They are now in the Swiss Foundation for Photography in Winterthur. I have a very special relationship with flowers, because of a dream I have kept having for 40 years. In my sleep I dream of flowers that need water very urgently, they are almost dying, but every time something prevents me from giving them that water. So I make them bloom in my photography.
Pendant un an, j’ai pris une photo de fleur par jour, sur du film Polaroid SX70. J’ai choisi le format Polaroid pour son flou inhérent, qui semblait rendre visible le parfum des fleurs. Et bien sûr je pouvais admirer le résultat dans l’instant. Avec les 365 images originales, j’ai créé « 4 seasons », quatre ensembles d’images sous une vitre en Plexiglas. Elles se trouvent maintenant à la Swiss Foundation for Photography, à Winterthour. J’ai une relation spéciale avec les fleurs, qui vient d’un rêve récurrent que j’ai depuis 40 ans. Je rêve de fleurs qui sont assoiffées, elles se meurent, mais à chaque fois quelque chose m’empêche de les arroser. C’est pourquoi je les fais s’épanouir dans mes photos.
www.fotoschudelhalm.com
Lorenzo Papadia
304 Polaroids
Lorenzo is an Italian photographer, he lives in Lecce, a little city in the south of Italy. He shoots common objects, indoor environments and urban places. Lorenzo tries to order the great chaos generated by fast contemporary days, which usually results in over-elaborated pictures. He thinks the photographer should give the observers all the instruments to discover details, those which are usually ignored as our sight is caught by other distractions. The architecture is a connection between what is real and what is invisible and unreal, like an echo of metaphysical thinking leading to the presence of shadow and light. The photographer believes in the strong evanescence of things, beyond the appearance of which everything ceases to be “true.” Architectures and colours are full of mystery and secrecy.
Lorenzo est un photographe italien vivant à Lecce, une petite ville du sud de l’Italie. Il photographie des objets communs, des intérieurs et des lieux urbains. Lorenzo essaie de remettre de l’ordre dans le grand chaos généré par un contemporain trop rapide, qui se traduit généralement par des images trop élaborées. Il pense que le photographe devrait donner aux observateurs toutes les clefs nécessaires afin de découvrir les détails, ceux qui sont habituellement ignorés car notre vision est accaparée par toutes sortes de distractions. L’architecture est un lien entre ce qui est réel et ce qui est invisible, comme l’écho d’une pensée métaphysique menant à la présence de l’ombre et de la lumière. Lorenzo croit en la forte évanescence des choses, au-delà de l’apparence desquelles tout cesse, le point où tout cesse d’être «vrai». L’architecture et la couleur sont pleins de mystère et de secret.
www.lorenzopapadia.com
Vous êtes, ou vous connaissez quelqu’un qui est un pauvre photographe qui se débat avec le rectangle et qui aimerait essayer le format carré et être publié dans le magazine ? Le tout nouveau programme de résidences d’artistes peut vous aider. C’est gratuit, ça dure de 3 à 6 mois et c’est ouvert à tous, quels que soit votre âge, votre sexe ou votre nationalité. Ce qu’il nous faut : Rassemblez des extraits de vos travaux et quelques infos sur vous-même. Mettez sur pied une proposition, mettant en lumière votre projet visuel et les raisons pour lesquelles vous pensez que le format carré serait approprié. Envoyez le tout à editor@squaremag.org Ce que vous pouvez attendre de nous : Une évaluation et un retour sur votre projet d’un des membres de l’équipe de Square Magazine (mail, téléphone ou Skype). Une aide académique si nécessaire (par exemple en histoire de l’art ou en études contextuelles). Un article dans le magazine à la fin de la résidence. La promotion de votre travail via les réseaux sociaux et notre site web.
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DH Dowling Lost
Yesterday, I was flying down interstate 40 in Texas. It was the dead of winter outside Amarillo. Slick and hazardous. A blizzard had slammed into the Panhandle, paralyzing the region. High winds made the road unsafe. I was driving blind through a snowburst, a day late and a dollar short. Then the dash lights flickered, the engine hesitated, and my Cutlass Supreme stumbled and rolled to a stop in the breakdown lane. There was a loud squealing noise. Power dropped, and it clattered and died. No more heat from the panel vents. I punched the steering wheel with my fists. I had driven the ’93 into the ground. It was snowing hard across the southern high plains. Cold. Pounding. Black smoke poured from the engine, so I got out, fought the wind, popped the hood, and stared at the motor without a clue about internal combustion. My face went numb. I looked into the blowing snow and saw black cattle threaded across the featureless horizon. I recognized the exotic state of sadness I had been chasing all day. I framed-up a shot. I took a picture. I got lost. I lose myself to find myself. All must lose their way.
Hier, j’étais sur l’Interstate 40, dans l’état du Texas. Sorti d’Amarillo, l’hiver sévissait. Verglacé, dangereux. Un blizzard avait envahi le Panhandle, paralysant la région. Des vents violents rendaient la route hasardeuse. Je conduisais, aveuglé par une rafale de neige, un jour où j’étais en retard et fauché. Les lumières du tableau de bord se sont mises à clignoter, le moteur a hésité, puis calé, et ma Cutlass Supreme a fini sa route sur la voie d’arrêt d’urgence avec un bruit étranglé. Plus de jus, donc plus de chauffage. Mort. J’ai frappé le volant de mes poings. Je venais de finir ma bagnole. Il neigeait dur dans les hautes plaines du sud. Un froid intense. De la fumée noire s’échappait du moteur, alors je suis sorti, luttant contre le vent, j’ai ouvert le capot et j’ai fixé le moteur sans avoir la moindre idée de ce à quoi un moteur à combustion interne pouvait bien ressembler. Mon visage s’est engourdi. J’ai regardé au travers de la tempête et j’ai vu du bétail, des bœufs noirs à peine discernables dans l’horizon blanc. J’ai reconnu là cet état de tristesse, un peu exotique, que j’avais poursuivi toute la journée. J’ai mis au point. J’ai pris la photo. Je me suis perdu. Je me perds pour me retrouver. Tous nous devons nous perdre si nous voulons nous retrouver.
@tattooedbubble
Vassilis Triantis
5 0 Point of view
With the series “Point of view” I try to answer a very basic question; how do we perceive our environments and how would our perception transform eventually our surroundings? If individual perception is subjective, will collective perception bring us closer to the true image of our surroundings? Urban and urbanized environments offer the perfect setting to answer these questions since they are observed daily through millions of different perspectives. Each photograph is a multiple exposure of such environments, where each exposure represents an individual point of view while the image represents the collective perception. Sometimes, the surroundings direct our perception, since they “demand” that we take notice of a prominent element in our environment. Other times, we observe our surroundings through our own will, in no orderly fashion resulting in a certain signature in every image.
Avec la série « Point of view », j’essaie de répondre à une question très fondamentale : comment percevons-nous notre environnement et comment cette perception le transformer ? Si la perception individuelle est subjective, la perception collective nous rapprochera-t-elle d’une vérité intrinsèque ? Les environnements urbanisés offrent le cadre parfait pour répondre à ces questions puisqu’ils sont observés quotidiennement au travers des millions de perspectives différentes. Chaque photographie est une exposition multiple de tels endroits, où chaque exposition représente un point de vue individuel tandis que l’image représente la perception collective. Parfois, les lieux dirigent notre perception, puisqu’ils «exigent» que nous prenions conscience de tel ou tel élément. D’autres fois, nous observons notre environnement par notre propre volonté, de façon non ordonnée, résultant en une certaine « signature » de chaque image-vision
www.vassilistriantis.com
Are you, or do you know a poor rectangular photographer who would like to try their hand at the square format and be published in the magazine? If so, the Square Residencies programme is just what you need. It is free, it lasts three to six months and is open to all, regardless of age, gender or nationality (or photographic gear). Here’s what you need to do: Gather some of your work and some info about yourself. Put together a proposal, highlighting your visual project and why you think the square format would fit. Email the lot to editor@squaremag.org What you’ll get: Ongoing assessment and feedback on your project from members of the Square Magazine team (via email, phone and Skype). Academic help if needed (for instance art history and contextual studies). A slot in the magazine at the end of the residency. Promotion of the project via social networks and the magazine’s website.
Kasper Kruse
6 0 One in an Ocean
My photographic work is driven by a troublesome love for melancholia. I’m deeply fascinated by this dark presence in our human experience and I’m constantly trying to investigate it, to map it, to look into its eyes through my viewfinder. My series “One in an Ocean” is no exception. The images in “One in an Ocean” work as a coherent portrait of Isabel, a young girl suffering from a crippling anxiety following her father’s tragic death at sea. In the years after her father’s death, Isabel found herself consumed by a fear of the ocean, but as time passed, her troubled state of mind grew into a more far-reaching fear of open spaces. So now she stays inside her apartment day and night. All she has left is a strict daily routine in which the process of getting out of bed and dressing herself lasts all day. For most people, this kind of routine is just something we go through with other things on our minds. For Isabel, it’s her whole existence. I asked her if she would let me photograph her while she went through her routine. She agreed on one condition: that I didn’t come by on a rainy day. “Water sticks to your clothes”, she said, “It smells like something I want to forget.”
Mon travail photographique est le résultat d’un amour gênant pour la mélancolie. Je suis profondément fasciné par cette présence sombre dans notre expérience humaine et j’essaie constamment d’en faire l’enquete, de la cartographier, de regarder dans ses yeux à travers mon objectif. Ma série « One in a Ocean » ne fait pas exception à cette règle. Les images de « One in a Ocean » représentent un portrait cohérent d’Isabel, une jeune fille souffrant de crises d’angoisse suite à la mort tragique de son père en mer. Dans les années qui suivirent son décès, Isabel se vit consumée par la peur de l’océan, mais au fil du temps, cette peur s’est étendue en une crainte profonde des espaces ouverts en général. Maintenant, elle reste dans son appartement jour et nuit. Elle est consumée par une routine quotidienne stricte dans laquelle le processus de sortir du lit et s’habiller dure toute la journée. Pour la plupart des gens, c’est quelque chose que nous faisons sans y penser. Pour Isabel, c’est toute son existence. Je lui ai demandé si elle me laisserait la photographier pendant sa routine quotidienne. Elle a accepté à une condition: que je ne vienne pas un jour de pluie. « La pluie colle aux vêtements », ditelle, « et ça sent comme quelque chose que je veux oublier ».
www.kasperkruse.net
Vera 6 8 Nita What Love Weighs I have never understood the twisted and complicated relationship my father had with his mother, my grandmother. I started to photograph them together to get closer to what lay underneath their relationship. Reflecting on these photographs, I started to pay attention to my own relationship with my parents. This brought me to start a broader project, a further examination of my family relations. I want to communicate something that is not visible, something that is difficult to express in words. Close relationships are always coloured by friction in between. They are irrational, absurd. With these small details I am narrating fragments of the complexity of human relationships. Something that is not visible to the outside, something that is difficult to express in words. Human relationships usually include different layers, history, and behaviour patterns, but still they have their universal characteristics. Our stories tend to repeat themselves.
Je n’ai jamais compris la relation tordue et compliquée que mon père avait avec sa mère, ma grandmère. J’ai commencé à les photographier ensemble pour m’en rapprocher. En regardant ces photos, j’ai ensuite commencé à prêter attention à ma relation avec mes propres parents. Cela m’a amené à me lancer dans un projet plus vaste, un examen plus approfondi de mes relations familiales. Je veux communiquer quelque chose qui n’est pas visible, quelque chose qui est difficile à exprimer avec des mots. Les relations étroites sont toujours colorées par leurs frictions inhérentes. Elles sont irrationnelles, complexes, absurdes. Elles se composent de plusieurs couches, comprenant toutefois des caractéristiques universelles : nos histoires ont tendance à se répéter.
www.nitavera.net
Cowings 7 7 Robin Mannequin These photographs of shop window mannequins evoke elements of surrealism. The reflections of the “real world” converge with the “manufactured world” of commerce in images that look like double-exposures. These playful confluences are what interest me. In some images I see blank expressionless faces staring coldly with indifference. In other images they almost look like true portraits of real people with emotions and longings staring out expectantly towards us.
Ces photographies de mannequins de vitrines évoquent des éléments du mouvement surréaliste. Les reflets du « monde réel » convergent avec le « monde manufacturé » du commerce dans des images qui ressemblent à des doubles expositions. Ce sont ces confluences ludiques qui me fascinent. Dans certaines images, je vois des visages blancs et inexpressifs qui vous regardent froidement, indifférents. Dans d’autres images, ils ressemblent presque à de vrais portraits de personnes réelles, avec des émotions et des aspirations, nous considérant avec espoir.
www.robincowings.com
Balasubramanian 8 6 Mahesh Portraits of strangers These portraits were taken in the streets of India, with available ambient natural light over the period of 3 years from 2012 to 2014. I strive to portray their inner heart and soul through the expressions in the eyes. I believe that through the subject’s eyes and expression, one can get a feeling of the person’s emotions, state of mind, happiness or sorrow. It is my goal to make portraits which will connect the viewers and the subjects directly.
Ces portraits furent pris dans les rues de l’Inde, sous lumière naturelle, entre 2012 et 2014. J’essaie de retrouver l’essence du cœur et de l’âme au travers du regard. Je crois que l’on peut partager les émotions, les états d’âmes, le bonheur ou la mélancolie dans les yeux des sujets. Mon but est de rapprocher le plus directement possible le spectateur et le modèle.
www.maheshb.com
Rédacteur en chef : Christophe Dillinger Direction artistique : Yves Bigot Relecture : Gwenaël Skeudenner & Demir Sideronymus Berisha Layout: Alice Milner
contribute@squaremag.org We are always on the lookout for new talents. If you wish your work to be considered for publication, please send us a coherent series of 10 images maximum, 1000x1000@72dpi, plus a short intoductory text. Nous sommes toujours à la recherche de nouveaux talents. Si vous voulez nous présenter vos travaux, envoyez-nous une série cohérente de 10 images maximum, 1000x1000@72 dpi, avec un court texte explicatif.
www.squaremag.org
801-APR 17
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