Standard n°26

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Numéro 26

Table des matières MATIÈRE BRUTE

MATIÈRE GRISE

INTERVIEWS

DOSSIER

MODE & MUSIQUE p. 16

JEUX VIDÉO p. 50

MODE p. 124

« On vit dans une société pirate ! »

Gaming Star Tech 10e Art Zelda = La Joconde Cinéma Neveldine & Taylor Retro Streets of Rage Mode Mini Cooper

Stylisme Eley Kishimoto Créateurs Modopoly Mode Rika Fernandez Mood Nick Cave Accessoires Télé7Jeux Jouets Lego

Ebony Bones CINÉMA p. 22

« -·DWWHQGV OH ÁDVK »

Alden Ehrenreich MUSIQUE p. 76 MUSIQUE p. 26

« Comment je vais me reproduire, moi ? »

Arnaud Fleurent-Didier

MATIÈRE VIVANTE

ARTS DE VIVRE BREF p. 30

Consommons pendant qu’il est encore temps

&KLSWXQH Pacman à l’Olympia Quiz The Dead Weather Jeunes pousses Toy Fight Mode Shit Browne SOCIÉTÉ p. 94

Société 3DULV ÁDPEH W LO " Politique Tripots russes (WKLTXH Les jeux de boisson Mode Cluedo

La Phantom 1928 de Gainsbourg

Art Matthieu Laurette 3KRWRJUDSKLH 4XL HVW &KDUOLH " Télévision Incroyables Talento Hobby Jeux-concours Net Questions pour un champion

VOYAGE p. 40

PORTFOLIO DESSIN p. 120

Serbie, la démocratie des lucioles

Daniel Johnston

Global Sushi AUTOMOBILE p. 38

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Débat Philo-Lanta 3V\FKRORJLH La liberté de roquer Tourisme Latourex Voyage Le UNO du Mali 7KpkWUH Rotozaza PORTFOLIO PHOTOGRAPHIE p. 146

Elza Jo LITTÉRATURE p. 152

MÉDIAS p. 112 ENVIRONNEMENT p. 36

PENSÉE p. 136

BD Joe Daly &DUWH EODQFKH Sylvain Cabot Roman Douglas Coupland Livres Ludolittérature Featuring Philippe Jaenada Mode Hairplay Beauté Playground

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VA M P I R E WEEKEND CONTRA

nouvel album le 11 janvier 2010 Egalement à télécharger sur fnac.com

EN CONCERT 25 février : Paris / 26 février : Toulouse / Le Bikini distribution

EN CONCERT 8 FÉVRIER : LILLE / L’AÉRONEF 6 MARS : MARSEILLE / POSTE À GALÈNE 7 MARS : GRENOBLE / LE CIEL 8 MARS : PARIS / L’ALHAMBRA

NOUVEL ALBUM LE 12 JANVIER 2010 STAND26_P003-106_MAG.indd 9

distribution

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Numéro 26

Table des matières (suite) MATIÈRE PREMIÈRE

CE QUI SORT PAILLETTES – MODE p. 178

PARABOLES – MÉDIAS p. 210

Cosmétique, Rozalb de Mura

Bernard Zekri, Lost, Le Tribunal des Flagrants Délires

PAPIERS – LITTÉRATURE p. 182

Ingrid Astier, Florent Couao-Zotti, B. Traven, William Burroughs Jr... La chronique de Tristan Garcia PALETTES – ART p. 192

Richard Hamilton, Deadline, Les inaccoutumés, Keren Cytter, La chronique d’Olivier Babin PELLICULES – CINÉMA p. 200

Master Class Audiard/Coppola, In The Air, Ajami, Bad Lieutenant 2, Txiki Margalef + DVD La chronique de Gustave Kervern

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MATIÈRE RECYCLABLE

VIEUX GÉNIE PHOTOGRAPHIE p. 236

Martin Parr ´&·HVW XQ FDXFKHPDU GH VKRRWHU FKH] YRXV µ

PLAYERS – JEUX VIDÉO p. 218

Uncharted 2, Modern Warfare 2, 10 contre 1 Live Box, Spécial Mario, Shadow Complex, Trial HD, Prototype, Bordelands PLATINES – MUSIQUE

p. 222

Owen Pallett, Midlake, Vampire Weekend, Ghana Special, The Drums, Sourya La chronique de Flairs PLANCHES – THÉÂTRE p. 232

Maguy Marin, Jan Lauwers La chronique d’Allio-Weber

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Edito

Ă quoi tu joues ? La  nouvelle  formule  de  Standard  :  le  plus  prenant  des  puzzles. La joyeuse ĂŠlaboration d’un magazine ressemble Ă un drĂ´le de puzzle. Pour chaque numĂŠro de Standard, XQH IRLV OD WKpPDWLTXH LGHQWLĂ€pH ² VHORQ GHV FULWqUHV impliquant la direction du vent, les hasards amusĂŠs de O¡H[LVWHQFH HW XQ ]HVW GH PDJLH EODQFKH ² F¡HVW FRPPH VL YRWUH SHWLW IUqUH pWDLW UHQWUp GDQV YRWUH FKDPEUH HW (patatras !) avait renversĂŠ la boĂŽte. Deux cent quarante SLqFHV pSDUSLOOpHV VXU OD PRTXHWWH HW OD 7RXU GH 3LVH j remonter. Curieux infatigable, vous avez toutes les cartes en main pour chroniquer l’actualitĂŠ culture & mode de OD VDLVRQ HQ Ă€OLJUDQH OH PRQGH HW YRWUH pSRTXH 9RV camarades de jeu ? Des stylistes ĂŠpatants, des reporters tĂŠmĂŠraires, des photographes ingĂŠnieux, des dessinateurs rigolos et des ĂŠcrivains volontaires rivalisent de stratĂŠgie

SRXU IDLUH DYDQFHU OD SDUWLH 9RXV DYH] WURLV PRLV WRXWHV les combinaisons sont envisageables. La photo de Truc sous le texte de Machine ? Et l’interview de Bidule, c’est FRQĂ€UPp " 4XDQG HVW FH TX¡LO UHQWUH GX 0R]DPELTXH O¡DXWUH KXUOXEHUOX " Bref, c’est assez ludique. Standard grandit, grossit, s’Êpanouit, prend seize pages sous la peau, change de papier, de maquette, de logo, de W\SR UppTXLOLEUH VHV UXEULTXHV HW FRQYLH GHV LQYLWpV WUqV VSpFLDX[ 2OLYLHU %DELQ )ODLUV 7ULVWDQ *DUFLD *XVWDYH .HUYHUQ $OOLR :HEHU j V¡DPXVHU WUqV VpULHXVHPHQW GH OD dĂŠcennie qui s’ouvre. Merci Ă tous. On recommence ? Allez, qui lance les dĂŠs ? — Magali Aubert & Richard Gaitet

Photographie Jean-Luc Bertini  AoÝt 2008, Chicago  Image extraite d’un travail en cours appelÊ  Figurations amÊricaines  PAGE

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69 rue des Rigoles, F-75020 Paris T + 33 1 43 57 14 63 standardmagazine.com SUpQRP QRP#VWDQGDUGPDJD]LQH FRP

RÉDACTION EN CHEF

RÉDACTION

PUBLICITÉ ET PARTENARIATS

Magali Aubert & Richard Gaitet

Nadia Ahmane, Patricia Allio, Olivier Babin, Gilles Baume, Julien Blanc-Gras, Léo Bourdin, Antoine Couder, Yan-Alexandre Damasiewicz, Damien Delille, Jean-Emmanuel Deluxe, Margaux Duquesne, Flairs, Tristan Garcia, Adeline Grais-Cernea, Bertrand Guillot, Guillaume Jan, Philippe Jaenada, Alex Jestaire, Gustave Kervern, Eric Le Bot, Mauve Leroy, Fanny Menceur, Johanna Möhring, Sébastien d’Ornano, Tristan Ranx, Nicolas Roux, Alexis Tain, Pacôme Thiellement, Elisa Tudor, Eléonore Weber, Samy Zakari

David Herman

DIRECTION ARTISTIQUE

David Garchey MODE

Consultant Olivier Mulin BEAUTÉ

Lucille Gauthier MUSIQUE

Timothée Barrière CINÉMA

Alex Masson THÉÂTRE

Mélanie Alves De Sousa ART

Patricia Maincent

RÉGIE PUBLICITAIRE

FASHION & CULTURE PRESSE 25 rue Palestro F-75002 Paris T + 33 1 42 33 20 91 F + 33 1 47 42 01 78 fcpresse.com

Fabrice Criscuolo fabrice@fcpresse.com M + 33 6 60 91 79 56

Marc Lustigman marc@fcpresse.com M + 33 6 03 70 08 38

MULTIMEDIAS

François Grelet & Benjamin Rozovas

STYLISME

Arnaud Carpentier

LIVRES

Andrea Crews, Olivier Mulin, Jean-Marc Rabemila, Pholoso Selegobo, Vava Dudu

arnaud@fcpresse.com

François Perrin

M + 33 6 77 13 99 20

ICONOGRAPHIE

Caroline de Greef

PHOTOGRAPHIE

SECRÉTARIAT DE RÉDACTION

Blaise Arnold, Jean-Luc Bertini, Thomas Corgnet, Caroline de Greef, David Dudouit, Elza Jo, Clément Pascal, Tomislav Peternek, Jean-Marc Ruellan, Michaël Smits, Tom[ts74]

Anaïs Chourin ASSISTANT DE RÉDACTION

Camille Charton

ILLUSTRATION

Sylvain Cabot, Mlle ChatChat, Thomas Dircks, Yann G., Hélène Georget, Juliette Maï, Noémie Rosset, Wa REMERCIEMENTS

EN COUVERTURE

Anne-Sophie Meyer, Fany Rognogne (à vie)

Cascade par Elza Jo Courtesy Cokkie Snoei Gallery

Directrice de la publication Magali Aubert. Standard est édité par Faites le zéro, SARL au capital de 10 000 euros et imprimé par Imprimerie de Champagne, rue de l'Etoile de Langres, 52200 Langres Trimestriel. CP1112K83033. N°ISSN 1636-4511. Dépôt légal à parution. Standard magazine décline toute responsabilité quant aux manuscrits et photos qui lui sont envoyés. Les articles publiés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction réservés. ©2010 Standard.

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MUSIQUE & MODE

EBONY

BONES

pirate ! » é t ié c o s e n u s n « On vit da Prêtresse bouclée de la génération iPod, la Londonienne EBONY BONES aborda la fashion week en liant son électro-funk de carnaval à la collection « pirate » de Castelbajac. En coulisses, babillage et rhabillage de saison. PHOTOGRAPHIE CAROLINE DE GREEF STYLISME VAVA DUDU ET OLIVIER MULIN

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Page de gauche : Robe totem et boléro Jean-Charles de Castelbajac Ci-contre : Brassière, jupe, escarpins, écharpe de miss et voilette Jean-Charles de Castelbajac Veste autruche en fausse fourrure Vava Dudu Montre ODM par JC/DC

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MUSIQUE & MODE

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EBONY BONES SUITE

ENTRETIEN RICHARD GAITET

Comment as-­tu rencontrĂŠ Castelbajac ? Ebony Bones : Il a demandĂŠ une entrevue, Ă Paris. 1RXV DYRQV HX XQH FRQYHUVDWLRQ WUqV SROLH SHQGDQW plusieurs heures, autour de l’identitĂŠ et du manque GH FRQVFLHQFH VRFLDOH HQ DUW &RPPH PRQ SqUH LO est nĂŠ en 1949, mais j’avais l’impression de parler Ă TXHOTX¡XQ GH PRQ kJH ,O SRVVqGH HQFRUH VD PDUTXH il a crĂŠĂŠ des vĂŞtements pour Madonna et Jean-­Paul II. -H OH WURXYH WUqV LQVSLUDQW 0DJLTXH Sa collection printemps-­ÊtĂŠ a pour thème les ÂŤ pirates Âť. La piraterie, en mode et en musique ? On vit dans une sociĂŠtĂŠ pirate, une nation pirate ! Je crois pourtant que les gens ne laisseront pas tomber l’industrie du disque parce qu’elle leur permet de partager. Pourant, ça ne fait pas sens pour tout OH PRQGH /LO\ $OOHQ D FRPSOqWHPHQW FUDTXp HQ dĂŠclarant qu’elle ne fera pas de nouvel album tant que OD TXHVWLRQ GX WpOpFKDUJHPHQW QH VHUD SDV UpJOpH ² HOOH SHXW WRXMRXUV DWWHQGUH 9RLOj QRWUH PRQGH Q¡HVSpUH] pas que les masses s’adaptent Ă vous, adaptez-­vous aux masses. Ton disque a ĂŠtĂŠ beaucoup tĂŠlĂŠchargĂŠ, non ? 2K \HDK 7URLV PLOOLRQV GH downloads ! Ça ne m’a SDV GX WRXW pQHUYpH -H PH IRXV j FRPELHQ V¡pOqYHQW mes ventes, ce qui m’importe, c’est que les gens paient pour m’entendre, car vous ne pouvez pas pirater les ĂŠmotions. Ado, j’Êtais une vraie pirate :

Comme M.I.A., suspendras-­tu ta carrière pour dessiner ta ligne de vĂŞtements ? Pas du tout. C’est un tel clichĂŠ, si narcissique : ÂŤ Pour VHQWLU DXVVL ERQ TXH PRL DFKHWH] PRQ SDUIXP Âť Je dĂŠteste ça, il y a tant d’autres choses Ă faire. Mais j’adore les gadgets, alors pourquoi pas une jolie ligne de clĂŠs USB ? Je perds toujours la mienne. Qui a le meilleur look ? 7RXWHV pSRTXHV FRQIRQGXHV " 6O\ 7KH )DPLO\ 6WRQH *HRUJH &OLQWRQ 'HV JHQV TXL VRUWHQW GH leur circonfĂŠrence et galvanisent leur audience. Oh ! J’adore aussi ChloĂŤ Sevigny parce qu’elle a l’air de s’en foutre intĂŠgralement, vraiment punk. -H SUpIqUH GH ORLQ OD PRGH PDVFXOLQH QRWDPPHQW *DOOLDQR ,O IDXW OD FpOpEUHU GDYDQWDJH 9RLOj VL MH dois crĂŠer une ligne, ce sera pour les hommes. Style GpEXW GH VLqFOH ODUJHV pSDXOHV M¡DLPH OD FKDUSHQWH masculine‌ J’ai vraiment dit ÂŤ j’aime la charpente masculine Âť ?! Au secours ! Que regrettes-­tu voir se dĂŠmoder ? Cannes et chapeaux. Les hommes font beaucoup d’efforts pour donner l’impression qu’ils ne font aucun effort pour s’habiller : c’est le cancer du style. Bon, il QH V¡DJLW SDV GH GpQLFKHU GHV /DG\ *DJD PkOHV WRXV OHV FLQT PqWUHV PDLVÂŤ H[SULPH] YRXV Justement : tu ne voulais pas que ton disque soit ÂŤ trop poli Âť, les morceaux te seraient venus ÂŤ en

 N’ESPÉREZ PAS QUE LES MASSES S’ADAPTENT À VOUS, ADAPTEZ-VOUS AUX MASSES.  EBONY BONES

Page de gauche : Robe totem, bolÊro et mini casquette sur la coiffe Jean-Charles de Castelbajac Bracelets, mitaines et coiffe Vava Dudu

je bricolais des PL[WDSHV toutes pourries avec ce que j’entendais Ă la radio, New York Dolls, Can, Fela Kuti. SpĂŠcialement Ă Londres, les tribus musicales se mĂŠlangeaient bien. Mes profs me renvoyaient en racontant Ă ma famille : ÂŤ la petite Ebony vend de la musique pirate Ă l’Êcole Âť ! A propos de tribus, c’est quoi ces anneaux en mousse qui ont rendu ton look cĂŠlèbre ? [Elle me propose d’en essayer un.] C’est une rĂŠfĂŠrence Ă une tribu sud-­africaine, les NdĂŠbĂŠlĂŠs, qu’on trouve aussi au Zimbabwe. Les femmes portent des parures pouvant peser 25 kilos, les anneaux de cuivre colorĂŠs s’empilent autour du cou et de la taille en fonction de leur importance, de leur intelligence. Pour nos FRVWXPHV GH VFqQH M¡DLPH PpODQJHU OHV FXOWXUHV motifs ĂŠgyptiens, japonais‌ Ne pas avoir de styliste, porter ce qu’on veut, c’est le grand pied. Le message : soyez votre propre idole, il n’y a pas que Pop Idol dans la vie. Tu es ta propre compositrice, productrice, multi-­ instrumentiste, styliste ? Ma propre personne. Pour la mode, je travaille avec le GHVLJQHU 7LPRWK\ -DPHV $QGUHZV DLQVL TX¡DYHF XQH copine adorable tout juste sortie de l’Êcole, et ils ont beaucoup d’imagination.

une heure Âť, ÂŤ comme quand tu as trop bu et que tu vomis Âť. Ça va mieux ? /D SOXV PHUYHLOOHXVH GHV JXHXOHV GH ERLV 7X YRLV FHV gosses qui sautent partout, sans raison ? Mon enfance est toujours vivante en moi. Les artistes indĂŠs sont souvent trop polis : des gosses des classes moyennes qui n’ont rien contre quoi se rĂŠvolter, ne causent que de Ă€OOHV HW GH IXPHWWH *RQĂ DQW 6DXI (PSLUH RI WKH 6XQ Et ton second album en 2010 : enregistrĂŠ Ă Mumbai avec un orchestre symphonique indien ? -H GRLV G¡DERUG WHUPLQHU OD WRXUQpH ² %RQHV RI My Bones HVW UHQWUp GDQV OH WRS DX -DSRQ ² le sortir aux Etats-­Unis, tourner le clip de : $ 5 5 , 2 5 Ă Miami, puis j’ai un shooting avec Jean-­Baptiste Mondino pour le 1HZ <RUN 7LPHV : ÂŤ la nouvelle royautĂŠ musicale Âť, avec plein de couronnes, WUqV GU{OH Ton interview ouvre notre numĂŠro ÂŤ jeux Âť. Quel est ton favori ? Le jeu de l’amour. Je perds toujours, donc je mise beaucoup sur 2010. Tu veux dire que des hommes peuvent, euh‌ te quitter ? Je n’ai jamais dit qu’il s’agissait d’un homme ou d’une femme, si ? [Elle ĂŠclate de rire.] —

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MUSIQUE & MODE

AU DÉFILÉ

TRI BAL REPORT Clapotis des vagues, ailerons de requins dépassant d’une mer factice. Puis sous les palmiers, fuyant d’une case en osier sur la piste dévouée au défilé JC/DC, c’est l’entrée féline d’Ebony « Boney » Thomas et de ses sauvages. Martellement tribal, celui de W.A.R.R.I.O.R., puis déhanchement de mannequins corsaires pendant huit titres live tirés de Bones Of My Bones, premier album vaudou-cool. Ses bottes-squelettes donnent la cadence, hélas l’audience se lève avant la fin de sa reprise de I Wanna Be Your Dog. De quoi terminer marron ? « Je ne fais pas partie de ces chanteuses hypersensibles. » R. G. Page de gauche : Robe perroquet, jupe longue, escarpin sur le coussin et oursons Jean-Charles de Castelbajac Coussin Vava Dudu Page de droite : Robe totem, bandeau pirate et sac Jean-Charles de Castelbajac Blouson en jean Vava Dudu

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EBONY BONES SUITE

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CINÉMA

« J’attends

le flash »

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INTERVIEW

Candide Êtoile du nouveau Coppola, ALDEN EHRENREICH, 19 ans, campe un joli matelot larguÊ dans Buenos Aires, frÊrot d’un Vincent Gallo tourmentÊ au cœur de Tetro, superbe chronique familiale en clair-obscur. ENTRETIEN RICHARD GAITET PHOTOGRAPHIE BLAISE ARNOLD

Lors de sa Master Class *, Francis Ford Coppola parle du jeu de Vincent Gallo comme d’un ÂŤ matĂŠriel ĂŠmotionnel brut, de la vĂŠritĂŠ en très peu de prises Âť. Vous partagez la plupart des scènes. Comment adapter le vĂ´tre au sien ? Alden Ehrenreich : Pas la peine de s’adapter, MXVWHPHQW 4XDQG YRXV MRXH] DYHF OXL 9LQFHQW HVW WUqV très concernĂŠ par ce qui vous arrive, surtout si vous donnez le maximum pour l’aider, que vous osez, que vous ĂŠcoutez. Il est du genre : ÂŤ on ne rentre SDV j OD PDLVRQ WDQW TXH OD SULVH Q¡HVW SDV ERQQH ÂŞ. J’en demandais plus, moi aussi. Mais j’ai trop peu d’expĂŠrience pour comparer.

et Peter Falk. Avec Tetro, je ne savais mĂŞme pas ce que je faisais, j’expĂŠrimentais sans cesse. Pas d’Êcole ? Coppola dĂŠclare : ÂŤ Oubliez les comĂŠdiens sans formation. Âť 'HV SLqFHV GH WKpkWUH DX FROOqJH XQ acting studio Ă 15 ans. Puis j’ai rencontrĂŠ un mentor, qui me coache. -¡DL SULV GHV FRXUV j 1HZ <RUN O¡DQQpH GHUQLqUH 0DLQWHQDQW MH PH GHPDQGH FH TXL VHUD ERQ ² HW YUDL ² SRXU PRL 2Q YHUUD Coppola dirige-­t-­il beaucoup ses acteurs ? Francis crĂŠe un environnement dans lequel vous vous sentez chez vous, disposĂŠ Ă offrir ce que vous DYH] GH PHLOOHXU ,O LQIXVH O¡DWPRVSKqUH DYHF WDQW

ÂŤ TERMINÉ LE VIEIL HOLLYWOOD OĂ™ LES STARS PRENAIENT DES PSEUDOS COMME ROCK HUDSON. Âť Comment avez-­vous appris Ă jouer ? (Q UHJDUGDQW GHV ZHVWHUQV HW GHV Ă€OPV GH JXHUUH tout petit. Je pensais que les vieux acteurs ĂŠtaient OHV SOXV FRROV HW M¡HVVD\DLV GH MRXHU FRPPH HX[ ² QRQ pas ÂŤ jouer Âť : me comporter comme eux. John Wayne. *UHJRU\ 3HFN $YD *DUGQHU /HV JUDQGV GH OD ÂŤ MĂŠthode Âť [de l’Actors Studio] : Brando, James Dean, Montgomery Cliff. J’ai redĂŠcouvert Jimmy Stewart et c’est mon comĂŠdien prĂŠfĂŠrĂŠ. Ned Beatty est incroyable aussi. Et Meryl Streep, Jane Fonda. Diane Keaton. *HQD 5RZODQGV (W 'XVWLQ +RIIPDQ -DFN 1LFKROVRQ

d’Êmotions authentiques que vous ne voulez qu’une chose : le rendre heureux. Il ne mĂŠnage personne et nous guide. Et pense que le rĂŠalisateur doit ÂŤ prĂŠsider Âť plutĂ´t que ÂŤ diriger Âť. On s’envoie des mails, on ĂŠchange EHDXFRXS VXU SRXUTXRL FH SODQ VHV Ă€OPV DGRUpV $X moment de tourner, vous ne voyez pas comme lui the whole picture, mais vous sentez l’Ênergie qui l’illumine. (W F¡HVW WUqV EHDX A l’audition, vous avez dĂť prĂŠsenter un extrait de L’Attrape-­cĹ“urs. L’aviez-­vous lu ? Non. Je l’avais pourtant achetĂŠ le jour de mes 17 ans.

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CINÉMA

Quand j’ai obtenu le rĂ´le, le l’ai avalĂŠ dans l’avion qui m’emmenait en Argentine. Francis voulait crĂŠer son SURSUH +ROGHQ &DXĂ€HOG %HQQLH >VRQ SHUVRQQDJH@ HW +ROGHQ RQW HQ FRPPXQ OD FDQGHXU FH EHVRLQ GH VH UpFRQFLOLHU HW XQH YLVLRQ GX PRQGH SDV WUqV UpDOLVWH +ROGHQ HVW F\QLTXH HW QpJDWLI %HQQLH HVW URPDQWLTXH et idĂŠaliste. Jouer un rĂ´le et jouer pour s’amuser, c’est idem ? Question gĂŠniale. Aux Etats-­Unis, on surnomme parfois les acteurs ÂŤ la caste des joueurs Âť. Francis UpSqWH TXH SRXU PLHX[ OHV FRQQDvWUH YRXV SRXYH] emmener vos acteurs au restaurant chaque semaine, mais vous pouvez aussi organiser un match de softball : vous obtiendrez tellement plus de ludique et de comĂŠdie ! Il nous mettait en cercle, on improvisait en permanence de petits jeux, des mouvements, du fun. Quand vous jouez, vous mobilisez autant votre FRUSV TXH YRWUH FHUYHDX ² DX OLHX GH OLUH OHV GLDORJXHV DVVLV GHUULqUH XQ EXUHDX dD RXYUH XQ ERXOHYDUG SRXU une bonne performance. Coppola aurait organisĂŠ un bal costumĂŠ oĂš chacun devait venir dĂŠguiser comme l’aurait fait son personnage. Vrai ? Oui, juste avant le tournage. Avec un buffet, un orchestre, des ĂŠclairages, une vraie fĂŞte ! Francis REVHUYDLW ² j O¡pFDUW ² HW avait donnĂŠ une consigne j FKDFXQ 9LQFHQW *DOOR pWDLW YrWX FRPPH VRQ SqUH et VD PqUH DYHF XQ PDVTXH XQH ORQJXH SHUUXTXH HW XQ WDLOOHXU EL]DUUH WUqV PDUUDQW 0RL M¡pWDLV HQ +HPLQJZD\ DYHF XQH EDUEH XQ JLOHW XQ JURV YHQWUH MH GHYDLV WURXYHU TXL pWDLW OD PqUH GH 7HWUR SDUPL OHV invitĂŠs. Et j’ai gagnĂŠ ! Une belle bouteille de vin rouge.

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Certaines interactions de ce bal ont totalement changĂŠ OD GUDPDWXUJLH GX Ă€OP Votre nom est assez dur Ă prononcer. C’est allemand ? $XWULFKLHQ dD VH SURQRQFH >L UHQ UHwTXH@ HW VLJQLĂ€H URXQG RI JORU\, XQ OLHX KRQRULĂ€TXH Š $OGHQ ÂŞ HVW d’origine galloise et veut dire, je crois, ÂŤ vieux sage Âť. Mes parents l’ont choisi en rĂŠfĂŠrence Ă Phil Alden 5RELQVRQ OH PHWWHXU HQ VFqQH GH -XVTX¡DX ERXW GX rĂŞve [du base-­ball avec Kevin Costner], qu’ils ont vu l’annĂŠe de ma naissance. Ce nom compliquĂŠ ne me SRVH DXFXQ SUREOqPH WHUPLQp OH YLHLO +ROO\ZRRG R OHV VWDUV SUHQDLHQW GHV SVHXGRV FRPPH 5RFN +XGVRQ &DU\ *UDQW *DU\ &RRSHU 5HJDUGH] .LUVWHQ 'XQVW 9RWUH SURFKDLQ Ă€OP Greased, une comĂŠdie romantique ĂŠtrange, est en postproduction. De quoi s’agit-­il ? 2K PRQ 'LHX F¡HVW WUqV DPXVDQW F¡HVW XQ FRXUW mĂŠtrage de cinq minutes rĂŠalisĂŠ par une copine diplĂ´mĂŠe d’une ĂŠcole de cinĂŠma. Ça ne sortira jamais en salles. Je n’ai rien tournĂŠ depuis Tetro. Ah bon ? Je vais juste Ă l’Êcole. Si je reçois un scĂŠnario fort, j’irai. Mais pour le moment, j’Êtudie. Parmi les scripts, no good damned story ? -¡DL pWp SULV SRXU VL[ RX VHSW Ă€OPV TXL Q¡RQW SDV SX VH IDLUH j FDXVH GH OD JUqYH GHV VFpQDULVWHV HW GH OD FULVH Je lis des trucs inintĂŠressants. Je rĂŠponds quand je vois quelque chose d’authentique ou de cool, selon mon intuition, peu importe le genre. Je refuse les teen FRPHGLHV HW M¡DWWHQGVÂŤ OH Ă DVK Âł

Tetro

en salles

* Voir extraits p. 203.

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ALDEN EHRENREICH SUITE

LA PHOTO Nous avions pensé à lui pour la couverture de ce numéro jeux, et disposé une centaine de cartes, des dés et des fléchettes sur la moquette crème de la suite 305 de l’hôtel Bristol. Alden apparaît : ce garçon ne semble pas né en 1990. Pas de jeune premier, de minet stylé : ses sapes sont frustes, chemise froissée, fripe velours, baskets sales, maillot de corps très Soprano – un gars normal.

OK, on dirait DiCaprio juvénile, mais qui aurait vécu quatre mois en Argentine avec Vincent Gallo, regard frontal, déjà mûr, lassitude, un rien de jet lag, just gimme some truth. Il s’assoit, une fille le maquille. Se redresse. « Il y a mieux pour exprimer l’amusement. Réfléchissons. » Tourne en rond. « Jouer avec les fleurs ? Une bataille de coussins ? Sauter

par-dessus les fauteuils, sur le canapé, la table ? » Le voilà suant, bondissant, très pro, quinze-vingt fois, pile entre la table en marbre et le lustre à dix mille dollars, sans tomber. Les murs tremblent, le flash de notre photographe explose au bout d’un quart d’heure. R. G.

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MUSIQUE

ARNAUD flEURENTDIDIER Disque ÊlÊgant, La Reproduction d’ARNAUD FLEURENT-DIDIER, 35 ans, illustre l’indÊcision du trentenaire dans son environnement naturel. Pop tragi-comique, timbre androgyne, arrangements soignÊs : ne cherchez plus, votre nouveau hÊros, c’est lui. ENTRETIEN RICHARD GAITET PHOTOGRAPHIE CLÉMENT PASCAL

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La Reproduction aborde frontalement cette question : hĂŠsitez-­vous Ă vous reproduire ? Arnaud Fleurent-­Didier : &RPSOqWHPHQW &¡HVW l’histoire d’un mec qui n’arrive pas Ă faire un gosse. Est-­ce une bonne idĂŠe ? La conclusion, c’est qu’il ne s’agit pas d’une LGpH, bonne ou mauvaise : il s’agit [comme dans l’une des chansons] de rater son risotto aux courgettes et la meuf vous saute dessus. C’est comme ça qu’ils font des gamins, mes copains. Ça les dĂŠpasse. Personne ne m’a jamais dit : ÂŤ Maintenant TXH MH JDJQH ELHQ PD YLH TXH M¡DL SOHLQ G¡LGpHV VXU OH PRQGH TXH M¡DL SDVVp WRXV OHV FDSV LPSRUWDQWV GH PD YLH G¡KRPPHÂŤ Âť Le hĂŠros se pose la question sans arrĂŞt, puis ne sait plus. Et ce n’est pas grave. Vous interrogez aussi la reproduction des comportements parentaux. Les vĂ´tres ont-­ils ĂŠcoutĂŠ l’album ? 2XL / DOEXP D pWp Ă€QL TXDQG LOV Q¡DOODLHQW SDV ELHQ donc je l’ai fait par touches. Ils m’ont dit ce qui les gĂŞnait, sans plus. Je pense qu’ils sont contents, ce disque me semble bourrĂŠ de tendresse. La question

G¡DYRLU WUDQFKp DYHF HX[ P¡D REVpGp FHV GHUQLqUHV DQQpHV PRQ SqUH IXW FRPPXQLTXDQW GDQV XQH IpGpUDWLRQ G¡LQGXVWULH WHFKQLTXH PD PqUH '5+ Je les regarde, je les analyse, je les commente, et SRXUWDQW MH VHQV TXH oD SRXVVH HQ PRL ² M¡LPDJLQH TXH SHXW rWUH MH EDLVH FRPPH PRQ SqUH 5DVVXUH] vous, je ne l’ai jamais vu faire. Physiquement, je lui ressemble pas mal, avec les annĂŠes, ça s’accentue. Ce mimĂŠtisme collait Ă mon obsession : comment je vais me reproduire, moi ? c’est quoi mon projet de vie ? de WUDQVFHQGDQFH " -H IDLV TXRL GH FH PRGqOH DYHF PHV poils au mĂŞme endroit ? MĂŞme si je joue au rebelle, il y a toujours un truc Ă lui qui me rattrapera. Houellebecq : ÂŤ 2Q Ă€QLW WRXMRXUV SOXV RX PRLQV Ă ressembler Ă son père, voilĂ une vĂŠritĂŠ qui retombe sur moi avec l’ÊlĂŠgance d’un bloc de bĂŠton. Âť -H PH VHQV WUqV SURFKH GH FH VHQWLPHQW Et aussi pour son regard dĂŠsabusĂŠ sur la solitude urbaine, la France, l’ironie glacĂŠe‌ ce disque est-­il houellebecquien ? +RXHOOHEHFT D HQUHJLVWUp XQ WUqV ERQ DOEXP parlĂŠ/chantĂŠ [3UpVHQFH KXPDLQH, 2000]. J’ai lu /HV 3DUWLFXOHV pOpPHQWDLUHV et /D 3RVVLELOLWp G¡XQH ĂŽle, sans fascination. S’il y a un hĂŠritage commun, c’est peut-­être CĂŠline, mon ĂŠcrivain prĂŠfĂŠrĂŠ, pour ses sauts d’un ton Ă l’autre. 0RUW j FUpGLW, les larmes que ça provoque‌ et le rire. Je sors des +HUEHV IROOHV G¡$ODLQ 5HVQDLV >R 'XVVROOLHU SHQVH Š &¡HVW PRQ Ă€OV HW LO QH YHXW SDV G¡HQIDQW &¡HVW YUDL oD VH UHSURGXLUH j TXRL ERQ " Âť]. J’aime ce travail sur la diction, les voix. L’intro dite par Baer est brillante. Et mĂŠlange les tons. Comment doser entre premier et second degrĂŠs ? Entre la blague du Risotto aux courgettes et cette dĂŠclaration Ă cĹ“ur ouvert Ă votre père, Si on se dit pas tout ? Je construis les disques comme un Lego. Au dĂŠbut, j’ai Si on se dit pas tout : c’est ĂŠmouvant. Ensuite,

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INTERVIEW

« Comment je vais me reproduire, moi ? »

Arnaud FleurentDidier au Parc Monceau, Paris, novembre 2009

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MUSIQUE

La Reproduction

Columbia / Sony Live!

A. F.-D. reproduit son disque le 8 janvier à Nantes, le 9 à Saint-Lô, le 12 à Paris en première partie de Air.

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ARNAUD flEURENTDIDIER SUITE

t UNE CHANSON

ÂŤ Ne sois

pas trop exigeant Âť

je trouve 0pPp gag niaiseux avec ÂŤ Dis Papa, GLV 0DPDQ FRPPHQW F¡pWDLW 0DL " Âť, lĂ j’ai une problĂŠmatique. Puis je trouve un bon dĂŠbut avec France Culture. Ensuite, je bosse pour crĂŠer des IDXVVHV SLVWHV VLQRQ F¡HVW WHUQH WURS VLQFqUH JrQDQW D’ailleurs, dans Si on se dit pas tout, j’aurais pas dĂť tout mettre. Et la musique permet de varier. C’est pas mal qu’on rigole, qu’on soit triste, qu’on tape du pied, qu’on interroge, qu’on rime bien, qu’on rime mal, les contrastes assez forts. Vous sentez-­vous très loin ou pas si loin de Delerm, Katerine, Biolay ?

Le trentenaire cĂŠlibataire de l’album, c’est vous ? Je fais des chroniques de vie, je n’ai pas d’autre idĂŠe. Mon prĂŠcĂŠdent, 3RUWUDLW GX MHXQH KRPPH HQ artiste [2004], ĂŠtait plus intime. LĂ , j’introduis une OpJqUH GLVWDQFH DYHF OD SURGXFWLRQ SDU H[HPSOH GHV coups de fouet, je ne fouette pas. Il y a des mensonges et des vĂŠritĂŠs, comme ça c’est moins chiant. Avec un peu d’acting. Je ne pense pas ĂŞtre auteur. Je suis ce TXH M¡pFULV -H SUpIqUH OHV FKDQVRQV DX[ FKDQWHXUV Comment traduire le disque en live ? 2Q D FUpp XQ SHWLW VSHFWDFOH DYHF GHX[ Ă€OOHV VXSHU guitare et claviers, pour jouer les chansons dans

ÂŤ J’IMAGINE QUE, PEUT-ĂŠTRE, JE BAISE COMME MON PĂˆRE. Âť Ce n’est pas vraiment ma famille. Je cĂ´toie plutĂ´t Daft Punk, Phoenix, j’Êtais hier au concert du pianiste MDSRQDLV 5\€LVKL 6DNDPRWR DYHF $LU HW ;DYLHU 9HLOKDQ RQ OLW OHV PrPHV OLYUHV RQ YRLW OHV PrPHV Ă€OPV $YHF Katerine, on est un peu copains, mais il y a une sorte de compĂŠtition, qui n’existe pas avec Daft Punk et Phoenix, qui me parlent de Pagnol en ĂŠcoutant mon disque. Les chanteurs français que j’ai rencontrĂŠs ne SDUOHQW SDV G¡DUW LOV DLPHQW %UDVVHQV RX *DLQVERXUJ. Alors que Daft Punk aime 3KDQWRP RI WKH 3DUDGLVH [de Brian de Palma]. J’ai lu Ă propos de France Culture que ce serait ÂŤ 'HOHUP TXL VH EDW GDQV OD ERXH DYHF 6pEDVWLHQ 7HOOLHU VXU XQH ERXFOH GH *DLQVERXUJ Âť. 7RXW ça parce que j’ai eu la maladresse de faire du QDPH dropping et qu’avec la basse, les cordes, les gens SHQVHQW j *DLQVERXUJ TXL Q¡HVW SDV GX WRXW PRQ hĂŠros ! C’est ĂŠnervant. Mais on s’en fout.

l’ordre, avec des images. J’auditionne le batteur. Je ne suis pas un homme de live, il y a du boulot. Que restera-­t-­il, musicalement, des annĂŠes 00 ? La compression dĂŠgueulasse, abusĂŠe, ĂŠtriquĂŠe, de l’Êcole Ed Banger, tout le temps Ă bloc, les basses cassĂŠes de Justice. J’aime bien SebastiAn. EsthĂŠtiquement, ils apportent un nouveau son. Que vous souhaitez-­vous pour les annĂŠes 10 ? (QUHJLVWUHU XQ DXWUH GLVTXH DXVVL ELHQ -H SUpIqUH OH prĂŠcĂŠdent, mais /D 5HSURGXFWLRQ a plus de potentiel pour toucher les gens. Entre les deux, j’ai eu un accident au cerveau, j’ai ĂŠcrit des bandes originales pour un rĂŠalisateur norvĂŠgien, deux longs, trois courts, pas grand-­chose. Les maisons de disques ne comprennent pas que pour avoir des idĂŠes, il faut que je vive quatre ans minimum. Il va falloir que M¡DFFpOqUH Âł

Extension du domaine de la dĂŠprime, quand les marmots bourgeonnent, Ă la coule. ÂŤÂ Sur l’avenue pleine de pauvres gens / Un travelo me dĂŠpasse / Son beau cul efficace m’hypnotise un moment / Ne sois pas trop exigeant / La seule fille baisable du feu / M’accorde un petit regard / Un petit regard c’est bien peu / Et puis ça vaut rien dire / Un petit regard ça fait plaisir / Ne sois pas trop exigeant [‌] / Papa et Maman vieillissent et la famille change / Les courses dans le frigo pourrissent / Et personne ne les mange / Regarde certaines femmes sont dĂŠsirables / Et mĂŞme quand on les dĂŠshabille / Tu restes assez prĂŠsentable / Tu pourrais peut-ĂŞtre te reproduire [‌] / Tu jouis trois Ă quatre fois par jour / Tu appelles ça faire l’amour / Ou bien tu vas au square au milieu des nounous / Tu vas t’asseoir entre deux poussettes Ă trois roues / Mater les bourgeoises qui s’entretiennent / Encore folles de leurs culs ou disons fières / Celles qui se tiennent un petit peu en arrière / Avec leurs histoires de p’tits, leurs histoires de psy / Leurs apĂŠros parties leurs souvenirs du samedi / Ne sois pas trop exigeant / Je vais au square oĂš y a des enfants qui m’ressemblent / Je les regarde et quand ils me sourient / Je tremble / Ne t’habitues pas aux choses qui finissent / Et tu seras longtemps heureux mon fils / Le bonheur est Ă portĂŠe de main / Demain. 

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une fragrance Le parfum STANDARD COMME DES GARÇONS est unisexe comme son nom et celui de la marque l’indiquent. On ne sait pas s’il est SOXV PRGH UDSSRUW j OD WUqV FKLF griffe japonaise du faubourg Saint-­ +RQRUp TXH FXOWXUH OH GHVLJQ SDU $UWHN 678',2·V ([DFWHPHQW comme ce que vous être en train de tenir entre vos mains. M. A.

CONSOMMONS PENDANT QU'IL EST un accessoire ENCORE TEMPS

Un bracelet qui donne l’heure, vous y auriez pensé, vous ? Sous la houlette de Hironao Tsuboi, 100 %, le remarquable site de vente nippo-nippon (seuls les heureux insulaires peuvent commander leurs produits en ligne) propose des objets simples, intelligents et surtout, en ces temps de bling assumé, sobres. Ça fait du bien. D. G. SHUVWRUH FRP

un magazine

Roven VLJQLÀH © YROHU ª HQ QpHUODQGDLV Mais c’est entre de bonnes mains que cette revue bi-­annuelle sur le dessin contemporain se trouve : celles de -RKDQD &DUULHU HW 0DULQH 3DJqV /H numéro deux est disponible dans les librairies d’art. Il « critique » l’art du dessin avec un rubriquage intelligent et une maquette qui sublime l’œuvre sans l’étouffer. La couverture est FRQVDFUpH DX GXR +LSSRO\WH +HQWJHQ dont les traits rappellent les années 30. C. C.

URYHQUHYXH EORJVSRW FRP

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des gants clever PlantĂŠ du bâton et SMS tactiles ne sont plus incompatibles grâce Ă ces gants de ski E-Tip de The North Face composĂŠs de Xstatic – matière qui conduit la chaleur GX FRUSV SDU OH ELDLV GH Ă€ODPHQWV G¡DUJHQW Mon petit Charles, geek doublĂŠ nerd, WHV WHQGRQV Ă pFKLVVHXUV WD SKDODQJH proximale et ton muscle interosseux palmaire vont pouvoir me transmettre la chaleur de ton cĹ“ur sans te geler les doigts. A.-S. M. WKHQRUWKIDFH FRP

des chaussures

une revue

Bonjour, Veuillez trouver ci-joint une chaussure de pied droit de la marque Firetrap appelĂŠe la moustashoe. Ci-joint ĂŠgalement, une idĂŠe importĂŠe de Londres, signĂŠe des très puĂŠriles designers anglais Lazy Oaf. C’Êtait un communiquĂŠ comme l’on en trouve dans les emails rasoirs. Cordialement. M. A. (Q YHQWH FKH] EDOWKDVDUG FRP

des accessoires

Fan des annĂŠes 80, fan jusqu’au bout des mains‌ Un Rubik’s cube, c’est chiant, un vrai casse-tĂŞte impossible Ă boucler, mais un sac Rubik’s cube par le pape du style occidentalojaponais Issey Miyake, c’est moins compliquĂŠ ! Enfin, on peut aussi y passer des heures Ă chercher un rouge Ă lèvre... A.-S. M. isseymiyake.co.jp

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Le bimestriel Le Tigre, ÂŤ curieux magazine curieux Âť, publie des dossiers très soignĂŠs sur ÂŤ le quadrilatère Âť, des photos bizarres, des avis sur l’amour, GHV Ă€FKHV VXU 6SLQR]D HW les ĂŠpinards, des extraits du blog DXWRĂ€FWLI d’Eric Chevillard et, diantre, un cahier jeux très ĂŠlaborĂŠ. Cet hiver, mettez du Tigre dans votre moiteur. R. G. OH WLJUH QHW

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un accessoire Vous n’avez pas pu vous offrir LA veste Ă ĂŠpaulettes dont vous rĂŞviez parce que vous ĂŠtiez en mission au Mali pendant la pĂŠriode des soldes ? On va vous en apprendre une bonne : sur le continent europĂŠen, le must du style, c’est le look Dynastie, et pour ça, quoi de mieux que le cache ĂŠpaules en fausse fourrure Anne Fontaine ? Ben nous, on voit pas. A.-S. M. annefontaine.com

des fringues Lacoste red bondit cet ĂŠtĂŠ. La prochaine collection s’articulera autour de deux thèmes. Le premier est inspirĂŠ du mythe amĂŠricain ÂŤ Into the wild Âť avec des carreaux, des capuches en molleton, des blouson en popeline et le second des mythes enfantins (cf. photo) : des couOHXUV Ă DVK\ GHV UD\XUHV HW GHV FDUGLJDQV comme sortis d’une bd imaginaire entre Spirou et un tableau de Keith Haring. M. A. ODFRVWH IU

De la mode Un cycliste du Nord, un ingĂŠnieur en mĂŠcano n u c l ĂŠ a i r e o u u n spationaute ? A qui notre styliste fĂŠtiche et douĂŠ Olivier Mulin a-­t-­il pensĂŠ lorsque, chez Paul & Joe, FHWWH WHQXH WUqV GDQG\ FKLF façon Zoolander mission Star Trek lui est passĂŠe VRXV OHV \HX[ " 5pVHUYH] vite votre combi argentĂŠe avant que l’hiver lunaire ne se termine ! A.-­S. M.

paulandjoe.com

un meuble La BoĂŽte concept Première, merveille rĂŠtro-futuriste inspirĂŠe des bornes arcades est une invention festive et dĂŠcorative de Guillaume Cagniard, ancien directeur artistique de l’agence de publicitĂŠ TBWA. A l’intĂŠrieur, un Mac en wifi, une station d’accueil pour iPod et des bonnes vieilles enceintes acoustiques : un bon moyen

design de rĂŠunir en un seul objet high tech old school son matĂŠriel hifi et son ordinateur. De bons moyens aussi il faut avoir : 9600 euros (rĂŠtro-projecteur en option) ! Pour rembourser votre caprice, faites payer l’entrĂŠe des dĂŽners chez vous Ă vos amis et faites-leur des boĂŽtes de haricots. C. C. laboiteconcept.com

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de la Musique Une vie Yves Saint-Laurent, coffret d’Alain Chamfort et Pierre-­ Dominique Burgaud (auteur du Soldat rose), c’est quinze chansons romanesques correspondant aux moments importants de la vie du couturier. Phase ascendante :

du rangement Pantone multiplie les collaborations et les best-sellers. Après les mugs, les t-shirts, les sacs, le Rubik’s cube imaginĂŠ par le designer Ignacio Pilotto – qui, pour une raison inconnue et frustrante, n’a pas ĂŠtĂŠ commercialisĂŠ –, c’est Ă l’innovante maison de design italien (dĂŠcidĂŠment fort) Seletti de proposer le nouveau nĂŠ de la Pantone mania : des boĂŽtes de rangement (Ă pipe, prĂŠservatifs, boules de Geisha etcetera) au nombre de cinq, 16 euros chacune : violet, jaune, vert, rouge et gris. Seletti a ĂŠgalement travaillĂŠ sur des chaises, mais elles sont moins belles et on ne peut rien mettre dedans. C. C. FRQUDQVKRS IU

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naissance Ă Oran, dĂŠbuts chez Dior, rencontre de l’amour (/HV GHX[ QH IRQW TX¡XQ), VXFFqV G¡HVWLPH HW G¡DUJHQW (6PRNLQJ RU QRW VPRNLQJ) ; puis descendante : l’alcool, la drogue, la dĂŠpression (Les Muses, 4XDQG on a tout connu) mais toujours ce fond palpitant, empreint d’art et de soleil marocain. Disque histoire comme Melody Nelson GH *DLQVERXUJ RX Berlin de Lou 5HHG (FRXWp HW DSSUpFLp SDU Yves Saint Laurent, le disque, enregistrĂŠ de novembre Ă avril 2008, ne sort que maintenant, ayant Ă la demande de Pierre Berger respectĂŠ une pĂŠriode de deuil. Le temps aussi, depuis le 2 juin 2008, d’ajouter une VHL]LqPH FKDQVRQ OD GHUQLqUH ÂŤ Ce n’est pas dans les UpGDFWLRQV TXH O¡RQ ERXVFXOH OHV conventions Âť entend-­on dans 3UrW j SRUWHU. Peut-­être, mais on y parle de choses biens. M. A.

Disponible en librairie (distribution Albin Michel) et sur YHQWH SULYHH FRP

un comics Sans Steve Ditko, 92 ans, pas de Frank Miller (Sin City, The Dark Knight Returns) ni de frères Hernandez (Love and Rockets). Plongez dans le premier volume de Strange Suspense : The Steve Ditko Archives (ĂŠditions Fantagraphics), compilation des travaux initiaux (1953-1954) du master amĂŠricain, bourrĂŠs d’histoires criminelles des fifties, de femmes fatales et de bains d’acide. Ressortie ĂŠgalement du n°1 de son Mr. A, le justicier qui voit le monde en noir et blanc. J.-E. D. fantagraphics.com

du cuir Chaque annĂŠe Absolut habille d’une nouvelle robe son emblĂŠmatique bouteille, chère aux soirĂŠes et indispensable ingrĂŠdient de nos cocktails Tatin (dĂŠlicieux vodka-pomme-cannelle). Après le sequin rouge très girly de la dernière ĂŠdition, on a droit cet hiver Ă un design rock : chic, insolent, qui se frotte contre les autres spiritueux des rayons alcool, Ă frĂŠquenter somme toute modĂŠrĂŠment. C. C. DEVROXW FRP

un sac

Angleterre, an de grâce 1205, ta cotte de maille te gratte. Huit siècles plus tard, Bottletop et Fenchurch revisitent le Moyen-Age avec des capsules de canettes. C’est arty et bien foutu, et en plus ça recycle des morceaux d’alumium. On se demande ce qu’ils vont nous prĂŠparer avec le reste de la canette et pourquoi des bananes ? A.-S. M. bottletop.org

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ENVIRONNEMENT

RENDRE LE MAKI Produit par CAPA, le documentaire GLOBAL SUSHI enquête sur la disparition du thon rouge : plus piquant qu’un pot de wasabi.

PAR MARGAUX DUQUESNE

ÂŤ 5HSDV LGpDO GX XXIe VLqFOH UDSLGH VDLQ ERXUUp G¡RPpJD H[RWLTXH WHQGDQFH HQ TXLQ]H DQV OH VXVKL a FRQTXLV OD SODQqWH ÂŞ +pODV OHV WDSLV URXODQWV GHV restaurants sont plus rapides que la reproduction des poissons et les rĂŠserves naturelles s’Êpuisent. C’est la chair de *OREDO 6XVKL habilement sous-­titrĂŠ : 'HPDLQ QRV HQIDQWV PDQJHURQW GHV PpGXVHV A la base de ce saisissant documentaire sur le ÂŤ QRXYHO KDPEXUJHU GLpWpWLTXH Âť, un livre-­enquĂŞte, 7KH 6XVKL (FRQRP\ ² SXEOLp HQ SDU OD MRXUQDOLVWH DPpULFDLQH 6DVKD ,VVHQEHUJ ² DOLEL DX riz gluant pour parler de la santĂŠ des ocĂŠans. ÂŤ /D ELRGLYHUVLWp PDULWLPH HW WHUUHVWUH HVW O¡XQ GHV SUHPLHUV SUREOqPHV j UpVRXGUH DYDQW PrPH OH UpFKDXIIHPHQW FOLPDWLTXH PrPH VL WRXW HVW OLp ÂŞ V¡LQTXLqWH -HDQ 3LHUUH &DQHW O¡XQ GHV trois rĂŠalisateurs. ÂŤ /H VXVKL HVW OH V\PEROH FLWDGLQ HW EUDQFKp GH QRWUH FRQVRPPDWLRQ GH SRLVVRQ 2Q QH IDLW SOXV OH OLHQ DYHF FH TXH O¡RQ PDQJH ÂŞ /H VXFFqV GH FH plat traditionnel, cuisinĂŠ les jours de fĂŞte, met en pĂŠril la survie du thon rouge mĂŠditerranĂŠen, dont le WWF annonce la disparition pour 2012 !

Les images Ă bord du -DFN $EU\, ambiance glaciale, sont impressionnantes : de la pĂŞche de destruction PDVVLYH 9LFWLPHV FROODWpUDOHV OHV SRLVVRQV ÂŤ accessoires Âť, pris puis rejetĂŠs Ă la mer, tels ces requins pour lesquels on n’a pas encore ÂŤ WURXYp GH FRPPHUFLDOLVDWLRQ Âť. A d’autres on retire nĂŠanmoins le foie et la peau pour fabriquer des chaussures ou des cosmĂŠtiques. (W OHV FRQWU{OHV " /¡,&&$7 &RPPLVVLRQ LQWHUQDWLRQDOH pour la conservation des thonidĂŠs de l’Atlantique) UHQG GHV UDSSRUWV GH UpSDUWLWLRQ GHV TXRWDV ² MDPDLV respectĂŠs. A Madrid en octobre dernier, elle sonnait encore l’alarme : il resterait 15 % de capacitĂŠ de reproduction du thon rouge. Jean-­Pierre Canet : Š /¡LQGXVWULH HVW LQWpUHVVpH SDU OHV JURV WKRQV OHV SOXV YLHX[ TXL VRQW OHV PHLOOHXUV UHSURGXFWHXUV Âť Quelques restaurateurs rĂŠagissent : la chaĂŽne 5HODLV &KkWHDX[ FRPPH FHUWDLQV VXSHUPDUFKpV britanniques, s’est engagĂŠe Ă ne plus servir de thon rouge d’Atlantique et de MĂŠditerranĂŠe. ÂŤ Les espèces VRQW IUDJLOHV ÂŞ H[SOLTXH GDQV OH Ă€OP 3KLOLSSH &XU\ de l’Institut de recherche pour le dĂŠveloppement. ÂŤ (OOHV RQW EHDX SRQGUH EHDXFRXS G¡¹XIV VL RQ OHV VXUH[SORLWH HOOHV V¡HIIRQGUHQW (W QH UHYLHQQHQW SDV Âť C’est bateau, mais c’est vrai. —

ÂŤ POISSONS ACCESSOIRES Âť $SUqV RQ]H PRLV GH WRXUQDJH *OREDO 6XVKL ² WUqV rĂŠussi visuellement mais souffrant d’un surpoids d’infos, comme quand on sort le ventre plein de FDOLIRUQLD UROOV ² VH EDODGH DX[ States, sur les marchĂŠs VpQpJDODLV GX SRUW GH 6qWH j O¡vOH GH &KLORp DX &KLOL $X ODUJH GH O¡(FRVVH ;DYLHU /pDXWp FDSLWDLQH GX chalutier -DFN $EU\ ,, du groupe IntermarchĂŠ, raconte qu’avant, il pĂŞchait cinquante tonnes par prise alors TX DXMRXUG KXL OHV Ă€OHWV Q HQ FRPSWH SOXV TXH YLQJW Une catastrophe pour Claire Nouvian, fondatrice de l’association Bloom de protection des ocĂŠans : ÂŤ Le FKDOXWLHU F¡HVW XQ EXOOGR]HU &RPPH VL RQ DEDWWDLW WRXV OHV SRPPLHUV SRXU UDPDVVHU OHV SRPPHV Âť Global Sushi Demain nos enfants mangeront des mĂŠduses

de Jean-Pierre Canet, Jean-Marie Michel et Damien Vercaemer Sur Canal+ le 1er fĂŠvrier, 20 h 50

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L’A

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AUTOMOBILES DE LÉGENDE

LA PHANTOM 1928 DE SERGE GAINSBOURG RessuscitÊ sur grand Êcran, L’HOMME À TÊTE DE CHOU aimait à renverser les cyclistes aux cheveux rouges au volant de sa Rolls – du moins en chanson.

1970, Serge est avec Jane en Yougoslavie, sur le WRXUQDJH GH GHX[ Ă€OPV PpGLRFUHV ,O MRXH GHV SHWLWV rĂ´les mais s’est surtout dĂŠplacĂŠ pour garder l’œil sur VD Ă€DQFpH ² FDU DSUqV XQ DQ HW GHPL GH YLH FRPPXQH LO HVW WRXMRXUV DXVVL MDORX[ ,O UpĂ pFKLW DORUV j VD grande Ĺ“uvre, celle qui bluffera Jane : Histoire de Melody Nelson 3UREOqPH O¡LQVSLUDWLRQ QH YLHQW SDV *DLQVERXUJ Ă€QLW SDU VH IDLUH H[SXOVHU GX SD\V SRXU ² GpMj ² XQH DIIDLUH GH ELOOHW EUXOp 'DQV VHV YDOLVHV LO UDPqQH VRQ FDFKHW G¡DFWHXU GH TXRL VH SD\HU VRQ UrYH XQH 5ROOV 5R\FH 1RQ SDV Š XQH 6LOYHU *KRVW GH 1910 Âť, comme on l’entend sur Melody, le futur titre introductif, Gainsbourg (vie hĂŠroĂŻque) mais une Phantom de 1928. de Joann Sfar, en salles le 20 janvier PAR YAN-ALEXANDRE DAMASIEWICZ REMERCIEMENTS GILLES VERLANT*

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ZIGZAGS & GLAVIOTS 8Q YUDL FDSULFH FDU *DLQVERXUJ Q¡D SDV VRQ permis. D’ailleurs, il ne sait pas du tout conduire. Pour preuve, la vidĂŠo d’8QH SHWLWH WDVVH G¡DQ[LpWp, HQUHJLVWUpH HQ GXR DYHF *LOOLDQ +LOOV SRXU XQÂŤ Salon de l’Auto ! Le pauvre Serge, au volant d’une 6XQEHDP $OSLQH OD SUHPLqUH YRLWXUH GH -DPHV %RQG se traĂŽne lamentablement dans les allĂŠes du bois de Boulogne, dĂŠpassĂŠ par ceux qui parviennent Ă ĂŠviter ses zigzags. Ce qui ne l’empĂŞche pas d’apprĂŠcier les virĂŠes en cabriolet, et surtout de se faire OLIWHU par les copains. (Q LO SDUW HQ WRXUQpH DYHF %UHO *UDQG -DFTXHV roule en dĂŠcapotable et Serge ne rate pas une occasion pour monter avec lui. Leur jeu prĂŠfĂŠrĂŠ : cracher en calculant son coup pour qu’avec le vent, le glaviot atterrisse sur le visage de l’autre. Peu probable qu’il joue à ça avec Jane, dix ans plus tard, lorsqu’il loue une gigantesque Lincoln avec chauffeur pour, comme d’habitude, la surveiller et l’impressionner sur le tournage de La Piscine (Jacques Deray, 1969), des fois que Delon‌ Elle n’en aura que faire, de la voiture, prĂŠfĂŠrant l’utiliser pour stocker les couches GH VD MHXQH Ă€OOH .DWH DX JUDQG GpVHVSRLU GH 6HUJH VENUS D’ARGENT (W OD 5ROOV " (OOH QH URXOHUD VDQV GRXWH SDV SOXV GH TXHOTXHV FHQWLPqWUHV GDQV OH VWXGLR GH -HDQ &KULVWRSKH $YHUW\ TXL UpDOLVD OH EL]DUUH Ă€OP PXVLFDO de Melody Nelson *DLQVERXUJ OD Š FRQGXLW ÂŞ GDQV une zone dangereuse, isolĂŠe, avant d’en perdre le contrĂ´le‌ vous connaissez la suite. La voiture sera revendue quelques annĂŠes plus tard et il n’en gardera qu’un fascinant souvenir, la Venus G¡DUJHQW GX UDGLDWHXU GRQW OHV YRLOHV OpJHUV YROHQW DX[ DYDQW SRVWHV. On le reverra ensuite dans des 5ROOV G¡HPSUXQW SRXU OHV JUDQGHV RFFDVLRQV FRQIRUWDEOHPHQW LQVWDOOp j O¡DUULqUH SLORWpHV SDU XQ YLGHXU GX 3DODFH $ O¡HQWHUUHPHQW GH 3DFDGLV RX DSUqV avoir achetĂŠ le manuscrit original de la Marseillaise DX[ HQFKqUHV &HUWDLQHV GH FHV VFqQHV VRQW Ă€GqOHPHQW UHSULVHV GDQV OH Ă€OP GH -RDQQ 6IDU *DLQVERXUJ YLH KpURwTXH TXH O¡RQ YRXV UHFRPPDQGH 3RXU OD 5ROOV OD YUDLH SURFXUH] YRXV OH Ă€OP 0HORG\ 1HOVRQÂŤ avec en prime les dĂŠhanchements de Jane. — * Gainsbourg (Albin Michel)

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VOYAGE L’ENQUÊTE FLEUVE

Serbie

LA DÉMOCRATIE DES LUCIOLES

Estampillée « peuple-boureau » dans les années 90, la SERBIE ouvre ses frontières et sa jeunesse exulte : plus besoin de visa pour voyager en Europe. Happy together ? Entre ciné underground, jolies filles et débat sur l’adhésion à l’Union, reportage au long cours. Par Antoine Couder (à Belgrade) Photographie David Dudouit & Tomislav Peternek

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SEXE, MENSONGES ET HÉROÏNE AU CINÉMA BALKAN

B

elgrade, premier jour de l’hiver, brutal et sans concession. La ville recroqueville son vieux fond oriental sous sa dignité slave, du Sud précisément. Ses habitants, s’ils sont tous Serbes (c’est à voir), sont de vagues cousins GHV GHVFHQGDQWV GHV ,OO\ULHQV 6RLW GHV *UHFV TXL RQW tourné Ottomans en gardant les pieds en Europe. C’est un peuple de seigneurs médiévaux, mélange de guerriers et de paysans qui attendent la neige. Classe.

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Š Tomislav Peternek

Arnaud FleurentDidier au Parc Monceau, Paris, novembre 2009

&DU VL OD 6HUELH D SHUGX VRQ DFFqV j OD PHU VXLWH DX[ GHUQLqUHV JXHUUHV LO OXL UHVWH OD EHDXWp YLUJLQDOH GH VHV hivers. Nous sommes au cinĂŠma Balkan, au centre d’une ville qui palpite de son gros million d’habitants. 'HKRUV FLUFXOHQW GH JURVVHV YRLWXUHV PRGqOHV GHUQLHU cri. L’argent circule mais pas entre toutes les mains, HW VXUWRXW SDV Oj R RQ O¡DWWHQGUDLW A l’intĂŠrieur, dans ce dernier carrĂŠ de la cinĂŠphilie serbe, on se presse pour dĂŠcouvrir le brulĂ´t subversif du jeune Mladen Djordjevic, =L]RW , VPUW SRUQR EDQGH, JURVVLqUHPHQW 9LH HW PRUW G¡XQH EDQGH SRUQR /H Ă€OP conte l’ÊpopĂŠe d’un jeune rĂŠalisateur qui s’essaie Ă l’industrie porno sans convaincre des producteurs

dĂŠsorientĂŠs par son approche underground. Il quitte alors Belgrade Ă bord d’un bus avec une brochette d’acteurs de la vraie vie pour un voyage porno-­ libĂŠrateur Ă la campagne. La rencontre est heureuse et champĂŞtre jusqu’à ce que le mal surgisse au dĂŠtour G¡XQH FODLULqUH VRXV OD Ă€JXUH G¡XQ YLHLO $OOHPDQG pornophile qui propose la fortune Ă l’innocente petite troupe en ĂŠchange de la rĂŠalisation de VQXII PRYLHV. C’est tragique et saignant, peut-­être un peu trop, FH TXL QH VHPEOH SDV GpUDQJHU OH PHWWHXU HQ VFqQH Sans doute parce que l’essentiel est ailleurs, dans FHWWH IDoRQ VL FRQWHPSRUDLQH GH Ă€OPHU OD 6HUELH GH toujours. Celle qui hĂŠsite entre ce spectacle glauque

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VOYAGE SERBIE

du capitalisme mondial et le petit commerce avec les bandes locales et ces vieux chefs rusÊs à qui il faut savoir parler en paysan-­soldat.

ÂŤ

2Q YHXW rWUH OLEUH HW IRUW KRUV GH SRUWpH GH OD PDQLSXODWLRQ ÂŞ UpVXPH *UHJRU =XSDQF JUDQG lecteur de Debord (inexplicablement traduit en serbe) et autre ĂŠtoile montante du nouveau cinĂŠma serbe. Lui aussi a appris son mĂŠtier dans ce GpVLU GH GRFXĂ€FWLRQ TXL FXLVLQH UpDOLVPH HW VRFLDOLVPH dans un fond de sauce situationniste. Et comme tous les artistes de sa gĂŠnĂŠration, il s’est nourri de cette tĂŠlĂŠ libre qui a ĂŠmergĂŠ durant les bombardements de 1999, innondant le pays de MXQN PRYLHV et de chefs-­ d’œuvre internationaux diffusĂŠs en version originale sous-­titrĂŠe. Fils d’un ponte de la tĂŠlĂŠvision publique,

BUSINESS, POLITIQUE ET TESTOSTÉRONE À L’HÔTEL MAJESTIC

L

a question intĂŠresse d’autant plus le Belgradois que l’on est ici dans un pays qui aime la conversation. Pas au sens DQJOR VD[RQ GH 7ZLWWLQJ SOXW{W DX VHQV mĂŠdiĂŠval du duel et de la joute. Car c’est bien dans cette Europe de l’Est qu’a ĂŠtĂŠ inventĂŠe la culture des cafĂŠs, lieux publics ouverts Ă tous, bulles de libertĂŠ R O¡RQ SHXW GLVFXWHU SROLWLTXH DPRXU HW VSLULWXDOLWp jusqu’à plus soif. C’est cette oralitĂŠ joyeuse que Belgrade a conservĂŠe de l’occupation autrichienne, laissant aux cousins croates les directives morales et administratives, la limitation de vitesse, l’interdiction de fumer dans les

DES TRENTENAIRES PASSÉS PAR LE SERVICE MILITAIRE DURANT LES MOMENTS DE GUERRE, QUI OSCILLENT ENTRE NAUSÉE ET SENTIMENT D’ABSURDITÉ. *UHJRU V¡HVW IDLW FRQQDvWUH DYHF 0pGLWHUUDQHDQ, qui dĂŠcrit les milieux toxicomanes de la ville, dans ce mĂŞme style ÂŤ faux-­documentaire avec acteurs inconnus Âť qui fait la force de 9LH HW PRUW G¡XQH EDQGH porno. Pas un hasard si la jeunesse d’avant-­garde s’est HPSDUpH GH FHV WKqPHV 'HSXLV O¡pFURXOHPHQW GH OD Yougoslavie (voir encadrĂŠ), les autoroutes de la drogue sont remontĂŠes d’Albanie jusqu’au Novi Beograd, la partie moderne et autrichienne de la ville situĂŠe de l’autre cĂ´tĂŠ du Danube. Le quartier est rĂŠputĂŠ pour son hĂŠroĂŻne de grande qualitĂŠ, vendue Ă des prix ultra compĂŠtitifs. Une situation qui n’est pas sans donner quelques arguments Ă l’agitation hooligan et sa cohorte d’adeptes de la puretĂŠ serbe. Ă€ moins que celle-­ci ne soit tout simplement provoquĂŠe par l’imminence de l’entrĂŠe de la Serbie dans l’Union EuropĂŠenne.

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lieux publics ou de vendre de l’alcool aux mineurs. 'DQV OHV VDORQV URFRFRV GH O¡+{WHO 0DMHVWLF OH VROHLO perce timidement, ĂŠclairant le visage rond d’hommes d’affaires en discussion avec de grandes tiges amĂŠricaines, moitiĂŠ ingĂŠnieur du bâtiment, moitiĂŠ humanitaire, glissant doucement dans la romance PLWWHO-­europĂŠenne. En revanche, les touristes se font discrets, et pour cause (il faut lire les directives DQ[LRJqQHV TXH O¡DPEDVVDGH GH )UDQFH GLIIXVDLW HQFRUH HQ OD YLOOH QH VH SUrWH JXqUH DX tour operating SHX GH SRLQWV GH YXH VSpFLĂ€TXHV SHX de diffĂŠrences entre quartiers riches et quartiers pauvres‌ Une sorte d’esthĂŠtique de l’indiffĂŠrenciation. Au Majestic, on a un peu tout vu, y compris, Ă deux pas d’ici, la mortelle agression, en septembre dernier, GX VXSSRUWHU WRXORXVDLQ %ULFH 7DWRQ DQV WDEDVVp Ă la batte de base-­ball et jetĂŠ du haut d’un muret (dix PqWUHV GH FKXWH DSUqV XQ PDWFK GH IRRWEDOO RSSRVDQW

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%HOJUDGH j 7RXORXVH /¡KLVWRLUH D WUDXPDWLVp OD FLWp WRXW SDUWLFXOLqUHPHQW XQH SDUWLH GH VD MHXQHVVH dĂŠjĂ ĂŠchaudĂŠe par l’annulation en catastrophe de la *D\ 3ULGH HW TXL UHJDUGH G¡XQ WUqV PDXYDLV ÂąLO WRXW ce qui freine sa longue marche vers plus de libertĂŠ. &DU FHWWH IRLV WRXW V¡DFFpOqUH 6LJQH TXL QH WURPSH pas, le rĂŠtablissement de vols directs entre les grandes villes d’Europe et la capitale serbe. Une rĂŠvolution pour un pays longtemps mis au ban de Schengen.

A

XWUH LQGLFH IRUW OD UHOHFWXUH FRPSOqWH GH OD OpJLVODWLRQ VHUEH j OD OXPLqUH GX GURLW europĂŠen. Un travail de titan menĂŠ par des armĂŠes de jeunes juristes d’affaires (bien souvent des femmes) qui ont rĂŠussi l’impossible, la GpFRQVWUXFWLRQ UHFRQVWUXFWLRQ GH OD FRGLĂ€FDWLRQ VHUEH -¡DL UHQFRQWUp FHV Ă€OOHV GLJQHV HW WUDYDLOOHXVHV

ÂŤ

,FL LO Q¡\ D SDV YUDLPHQW GH PDUFKpV SDV YUDLPHQW GH PDUTXHV Âť, explique Kosta Ciric, jeune producteur tĂŠlĂŠ devenu patron d’une agence de publicitĂŠ spĂŠcialisĂŠe dans les nouveaux mĂŠdias. Il a l’impression d’avoir loupĂŠ OH WUDLQ GX VXFFqV FHOXL G¡XQ PRQGH JOREDOLVp HW cultivĂŠ. De plus, la nouvelle gĂŠnĂŠration politique, d’anciens ĂŠtudiants venus du monde de la musique RX GH OD %' Q¡LQVSLUH SDV IRUFpPHQW FRQĂ€DQFH j FHV trentenaires refroidis. Pour la plupart, ceux-­ci sont passĂŠs par le service militaire obligatoire durant les moments de guerre et oscillent entre nausĂŠe et sentiment d’absurditĂŠ. ÂŤ ,OV VRQW SHUGXV HQIHUPpV GDQV XQH SRVW DGROHVFHQFH GRQW LOV SRXUUDLHQW ELHQ QH MDPDLV VRUWLU Âť, m’a dit XQ MRXU XQ WUqV MHXQH 6HUEH GH 3DULV &RPPH VL OD guerre pouvait enfoncer dans l’enfance tous ceux

DANS LES YEUX DE CES fiLLES DIGNES ET TRAVAILLEUSES, LE TRIOMPHE MAIS AUSSI L’INCERTITUDE. pSXLVpHV SDU XQH WkFKH JUDQGLRVH HW ELHQ V€U WUqV mal payĂŠes. J’ai lu dans leurs yeux le triomphe PDLV DXVVL O¡LQFHUWLWXGH &DU LO HVW ELHQ GLIĂ€FLOH GH trouver son chemin Ă travers la coutume serbe, le droit ottoman et la jurisprudence autrichienne, de dĂŠterminer Ă qui appartient un immeuble belgradois : Ă l’Etat, Ă la ÂŤ communautĂŠ Âť, Ă un improbable propriĂŠtaire exilÊ‌ ? A Belgrade, la promesse du changement est toujours riante comme dans un tableau communiste, mais elle se heurte aux dures lois du rĂŠel. ChĂ´mage, incertitude concernant l’avenir. Comme dit le nouveau hĂŠros national, le champion de tennis Novak Djokovic : ÂŤ Je FRQQDLV EHDXFRXS GH PRWV PDLV LO IDXW TXH M¡DUULYH j OHV UDVVHPEOHU. Âť Il parlait de sa maĂŽtrise du français, mais on peut y voir une mĂŠtaphore d’un pays qui se sent parfois en miettes.

qui l’ont vĂŠcue‌ ÂŤ ,O Q¡HVW GH SLUH PLVDQWKURSH TX¡XQ JDPLQ GpoX Âť, ĂŠcrivait Melville. Et pourtant Belgrade se transforme. Depuis dĂŠcembre dernier, les Serbes n’ont plus besoin de visa pour voyager dans l’Union EuropĂŠenne, ce qui facilite la vie des plus jeunes mais, ĂŠgalement, celle des EXVLQHVVPHQ. Cette annĂŠe, le secteur des ĂŠnergies nouvelles va s’ouvrir aux investisseurs internationaux Ă des prix GpĂ€DQW WRXWH FRQFXUUHQFH SURYRTXDQW XQ QRXYHO DSSHO G¡DLU Ă€QDQFLHU 1LFRODV 6DUNR]\ GHYUDLW IDLUH un petit saut ici, en mars‌ Des retrouvailles qui seront sans doute un peu ambiguĂŤs, car la position de la France envers la Serbie est restĂŠe ambivalente pendant ces terribles annĂŠes 90. C’est le moins TXH O¡RQ SXLVVH GLUH VL O¡RQ HQ FURLW OH WUqV pFODLUDQW %DPELSDUN1 G¡XQ 'DYLG GL 1RWD WUqV HQ YHUYH

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VOYAGE SERBIE

BAISER FRANÇAIS, SOAP OPERA ET FESTIVAL TECHNO AU CENTRE CULTUREL GRAD

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endant longtemps, pourtant, le français a ĂŠtĂŠ OD ODQJXH RIĂ€FLHOOH GH O¡LQWHOOLJHQWVLD HW GHV ĂŠchanges culturels. La France, c’Êtait par H[HPSOH OD 1RXYHOOH 9DJXH TXL HQ 6HUELH V¡HVW traduite par une ÂŤ vague noire Âť de nouveaux cinĂŠastes dont on dĂŠcouvre peu Ă peu l’originalitĂŠ fondatrice. Darko Bajik, actuel propriĂŠtaire du cinĂŠma Balkan HW Ă€JXUH PDMHXUH GX FLQpPD VHUEH GHV DQQpHV aimerait remettre le couvert, montrer ce cinĂŠma transnational qui sait Ă la fois converger et s’opposer. Subtile dialectique yougoslave faite de dĂŠcouvertes et de dĂŠbats que l’on retrouve au cĹ“ur du festival L’Europe au cĹ“ur de l’Europe, que Darko co-­organise avec la Franco-­Serbe IrĂŠna Bilic. Dans ce festival itinĂŠrant, des trains se croisent. Des bobines serbes font le voyage Belgrade-­Paris tandis que d’autres, HVWDPSLOOpHV Š 1RXYHOOH 9DJXH IUDQoDLVH ÂŞ IRQW OH WUDMHW inverse. ÂŤ Tous pareils PDLV WRXV GLIIpUHQWV Âť, c’est du Deleuze, pas du Benetton, le rĂŞve fou d’anĂŠantir les DQQpHV GDQV OD Ă€qYUH GHV sixties. Belgrade, ville camĂŠlĂŠon qui, sous ses airs gris et WLqGHV SHXW V¡HQĂ DPPHU HW VH WUDQVIRUPHU HQ XQ pFODLU 2Q SHXW WUqV YLWH V¡\ VHQWLU FKH] VRL &RPPH l’on dit dans les guides touristiques au chapitre

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Q HVW j GHX[ SDV GX Ă HXYH WRXW SUqV GX quartier de la gare. Le centre jouxte ces UHVWDXUDQWV LQWHUORSHV R OD MHXQHVVH GX *UDG YLHQW FKHUFKHU GHV IULVVRQV DX[ VRQV des chansons folk qui ont fait la marque de fabrique de la citĂŠ. L’amour violent et les cĹ“urs brisĂŠs, la SpWDVVHULH QDWLRQDOLVWH HW OD FUXDXWp GH O¡+LVWRLUH 2Q FRPSUHQG PLHX[ R OH MHXQH =DFK &RQGRQ GH %HLUXW a pu tirer son (OHSKDQW *XQ. Ici, on fait boire les Ă€OOHV GHV EHDX[ TXDUWLHUV HQ FUDFKDQW VXU OD PXVLTXH Š WXUER ÂŞ OH IRON pOHFWURQLTXH HW VXSHUĂ€FLHO ORQJWHPSV assimilĂŠe Ă la pĂŠriode Milosevic. ÂŤ Ici, les gens ont O¡KDELWXGH GH FKDQJHU GH FRGHV HQ SHUPDQHQFH OD SUHPLqUH LPSXOVLRQ F¡HVW SOXW{W GH WRXW UHFRPPHQFHU DORUV TX¡LO IDXGUDLW VROLGLĂ€HU OHV EDVHV GH OD FXOWXUH Âť, H[SOLTXH 0DUFR *UXEDF EULOODQW SXEOLFLWDLUH GH DQV qui a abandonnĂŠ l’entreprise privĂŠe pour l’action culturelle. Belgrade cent fois dĂŠtruite, cent fois reconstruite. &HWWH VqYH G¡DXWKHQWLFLWp TXL EDW GDQV XQ FÂąXU vintage, on la retrouve dans l’hystĂŠrie qui accompagne le remake de ce grand soap tĂŠlĂŠ familial qui a HQĂ DPPp OD <RXJRVODYLH GHV DQQpHV $ O¡pSRTXH la sĂŠrie s’appellait 8QH YLH PHLOOHXUH, et aujourd’hui, quelque chose comme /H 7KpkWUH j OD PDLVRQ. C’est j SHX SUqV OD PrPH FKRVH PDLV F¡HVW XQH DXWUH façon de regarder cette chose. C’est sans doute ce TXH 3DVROLQL HW j VD VXLWH *HRUJHV 'LGL +XEHUPDQ

KOSTA, JEUNE PRODUCTEUR TÉLÉ, A L’IMPRESSION D’AVOIR LOUPÉ LE TRAIN DU SUCCĂˆS, CELUI D’UN MONDE GLOBALISÉ ET CULTIVÉ. du dĂŠcalage horaire, ÂŤ Paris/Belgrade : aucun Âť. Une sensation qu’on retrouve dans les couloirs du GpSDUWHPHQW GH OD FXOWXUH GH OD 9LOOH R j TXHOTXHV heures de la date limite de la remise des dossiers de GHPDQGH GH VXEYHQWLRQV XQH MHXQH EXUHDXFUDWH SqWH les plombs. ÂŤ 0DLV TX¡HVW FH TXH YRXV FUR\H], hurlait-­ elle, TX¡RQ QH V¡RFFXSH TXH GH OD FXOWXUH GDQV FHWWH ville ? Âť Il y avait des dizaines de jeunes et notamment 5HOMD %RELF O¡RUJDQLVDWHXU GH FH 'LV 3DWFK IHVWLYDO TXL a permis d’inscrire la Belgrade sur la carte mondiale GH OD WHFKQR +XLW DQQpHV GH VXFFqV HW KXLW DQQpHV GH GpEURXLOOH %RGLF D EHDX rWUH XQ 9,3 GH OD FXOWXUH techno internationale, il est toujours coincĂŠ dans O¡XQGHUJURXQG GDQV FH V\VWqPH DVVRFLDWLI TXL IDLW OD JORLUH GX FHQWUH FXOWXUHO *UDG FH SHWLW RDVLV GH branchitude qui fait penser que Belgrade c’est aussi SDUIRLV %HUOLQ *UDG FHOD YHXW GLUH Š YLOOH ÂŞ /RUVTX¡RQ demande ce qu’il se passe au centre culturel, c’est une façon de dire : ÂŤ Quoi de neuf en ville ? Âť

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appellent les ÂŤ lucioles Âť, ces restes d’expĂŠriences collectives qu’aucun gĂŠnocide, fĂťt-­il culturel, ne saurait faire disparaĂŽtre2 &HV OXFLROHV 0DUFR *UXEDF les cherche aussi dans sa quĂŞte de hĂŠros crĂŠdibles TXL SRXUUDLHQW VHUYLU GH PRGqOHV j OD MHXQH JpQpUDWLRQ et permettre d’Êcrire un bout de l’avenir de l’Europe HQ 6HUELH 'LIĂ€FLOH PDLV SDV LPSRVVLEOH 0DUFR OXL \ croit. D’ailleurs, il vient d’avoir un enfant et n’a pas l’intention de bouger d’ici. — Bambipark, roman de David di Nota, Gallimard, 2009. 5DMHXQLU OH SHVVLPLVPH, Dork Zabunyan, Art Press, dĂŠcembre 2009. Cet article doit beaucoup Ă Jean-­Louis Murat, David di Notta, Nenad Zilic, IrĂŠna Bilic, Milan Janic et Johanna MarcadĂŠ, mĂŞme si aucun d’entre eux ne porte la responsabilitĂŠ des opinions dĂŠveloppĂŠes ici. 1 2

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Histoire « De la difficulté d’exister en tant que petite nation. » Cour de rattrapage géopolitique.

Jusqu’en 1992 La Fédération Yougoslave se composait de la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine, le Monténégro et la Serbie. Juillet 1995 Sur instruction du général serbe Mladic, 8000 musulmans désarmés se font massacrer dans une ville de Bosnie orientale. La zone était sous la responsabilité militaire de l’ONU qui invoque un problème de fax et la position malencontreuse d’un nuage.

© David Dudouit

Avril 1999 L’Otan bombarde la Serbie pendant 72 jours en déversant 24 000 bombes sur le pays : c’est la première guerre « humanitaire ».

Novembre 2009 Radovan Karadzic, patron des Serbes de Bosnie, annonce qu’il se défendra sans avocat devant le tribunal pénal international qui l’accuse de crime contre l’humanité. Quelques jours plus tard, Le Monde laisse entendre ouvertement que le procès Karadzic serait un bon moyen de lancer la légitimité du TPI pour l’ex-Yougoslavie. La question est de savoir si la notion de nettoyage ethnique peut être universalisée sachant qu’elle vise la seule Serbie alors qu’au même moment d’autres nettoyages – sans doute de moindre ampleur – se sont déroulés simultanément dans la région.

Décembre 2009 L’Union Européenne décide d’exempter de visas les ressortissants de Serbie, au moment où son rapprochement avec les 27 est bloqué. 2010 L’entrée de la Serbie au sein de l’UE est concrètement discutée. 2015 ? 2017 ? L’histoire dira si la Serbie chrétienne entrera en Europe avant la Turquie musulmane, son caractère ottoman lui conférant une position de médiation sur l’avenir diplomatique européen.

Toujours « Ce qu’a appris la Serbie au XIXe siècle c’est la difficulté d’exister en tant que petite nation. » Rebecca West, Agneau noir et faucon gris, 1940. A. C.

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VOYAGE SERBIE

ÇA SE PASSE LÀ-BAS

BD

CinĂŠma Retour sur la vedette des comics locaux le journaliste mĂŠtaphysique ALEKSANDAR ZOGRAF.

C’est une quasi-traversĂŠe du siècle. En moins de cinquante ans, Aleksandar Zograf est passĂŠ d’un monde rural sans ĂŠcran Ă la cĂŠlĂŠbritĂŠ du rĂŠseau mondial. Regard un peu triste mais visage chaleureux, Zograf est cet enfant Ă la fois joyeux et dĂŠpressif qui cachait ses dessins pour ne pas inquiĂŠter ses parents. Nourri de la tradition de la bande dessinĂŠe serbo-croate, sous influence amĂŠricaine et surtout italienne, il crĂŠe des mondes complexes et fantastiques qui s’agitent sous terre ou Ă l’intĂŠrieur de ventres d’animaux. Lorsqu’il dĂŠcouvre la BD indĂŠpendante, c’est une ĂŠvidence : il sera l’une des premières stars du genre. La guerre va lui offrir l’opportunitĂŠ d’approfondir sa condition d’artiste, enrichissant sa veine autobiographique d’interrogations plus gĂŠnĂŠrales. Ce sera Bons Baisers de Serbie, publiĂŠe en ĂŠpisodes aux Etats-Unis par Chris Ware pendant les bombardements amĂŠricains. Une chronique en noir et blanc qui dĂŠpeint un univers d’absurditĂŠ radicale et de profonde humanitĂŠ. La patte Zograf est nĂŠe. Et avec elle tout un monde alternatif qui finit par apparaĂŽtre au grand jour. Les rĂŠseaux serbo-croates d’amitiĂŠ et de travail jamais rompus, la culture indĂŠpendante des annĂŠes 90 donnera un socle Ă la jeune dĂŠmocratie serbe des annĂŠes 2000. Zograf est aujourd’hui une sorte de journaliste mĂŠtaphysique qui fouille dans les poubelles underground de l’ex-Yougoslavie comme dans une brocante, pour faire chanter le vivre-ensemble. Aujourd’hui, il est plus optimiste – mais surtout beaucoup plus exigeant. A. C.

En fĂŠvrier, le thriller LA RÉVÉLATION rouvre les plaies militaires de la Serbie d’avant-hier. : Coincidence, notre collaborateur Eric Le Bot a activement participĂŠ Ă la sortie française de La 5pYpODWLRQ (6WRUP), acclamĂŠ au dernier festival de Berlin, rouvrant les plaies militaires de la Serbie d’avant-­hier GDQV OHV FRXORLUV GX 7ULEXQDO 3pQDO ,QWHUQDWLRQDO GH /D +D\H 'DQV FH WKULOOHU MXGLFLDLUH OLPSLGH GH O¡$OOHPDQG +DQV &KULVWLDQ 6FKPLG VDOXp dans ces colonnes pour son effrayant 5HTXLHP, 2006), une procureure anglaise tenace cherche Ă faire tomber XQ JpQpUDO WUqV SRSXODLUH DFFXVp GH FULPHV GH JXHUUH et de crimes contre l’humanitĂŠ, sur le point d’entamer XQH FDUULqUH SROLWLTXH 8Q SRUWUDLW GH IHPPH V PDLV aussi de corruption, d’intimidation, de rĂŠsilience historique, autour d’un passĂŠ douloureux que les hĂŠroĂŻnes et le rĂŠalisateur affrontent les yeux dans les yeux. R. G. La RĂŠvĂŠlation

En salles le 10 mars

Vestiges du monde

L’Association, 2008

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Š DR

Dernier ouvrage en français :

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RENCONTRE

TU ES BELLE, DZANA

Š David Dudouit

Elle a l’air de sortir de sa cuisine, plus concentrĂŠe que vĂŠritablement glamour, dans ce dress code improbable qui lui SHUPHW GH WHQLU j GLVWDQFH OH PRGqOH de la prostituĂŠe de l’Est. Il faut dire TX¡LFL + 0 HVW KRUV GH SUL[ (W FRPPH disent les mauvaises langues, tout ce TXH SRVVqGH XQH Ă€OOH GH %HOJUDGH HOOH le porte sur elle. Et aussi : ce style de douce sauvage, plastique mais nature, allemande plus mĂŠditerranĂŠenne que russe. Le cĂ´tĂŠ ottoman pour une sensualitĂŠ orientale de blonde Ă jolis seins ; le cĂ´tĂŠ slave communiste pour l’aspect ĂŠmancipation et prise de parole. Un mĂŠlange de Paul Anka et de Sally Shapiro. Ici, l’avortement et la pilule, on connaĂŽt. D’ailleurs le taux de natalitĂŠ s’en UHVVHQW GXUHPHQW FRPPH VL DSUqV JXHUUH dans un monde encore incertain, seul l’instant prĂŠsent pouvait donner du sens Ă l’avenir. Et puis Ă Belgrade, l’insulte suprĂŞme est WUqV H[SOLFWH Š Toi, retourne dans la chatte GH WD PqUH ÂŞ dD IDLW UpĂ pFKLU A. C.

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À QUOI TU JOUES ?

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LE DOSSIER

 T’as une paire !  Simone de Beauvoir, ÊmoustillÊe

 J’essaie d’arrêter le 1000 bornes  Kurt Vonnegut, inventeur d’expressions

 Il s’agit maintenant de traverser l’Êcran, choper les gens à la gorge et les Êtrangler.  Un incroyable talento

Ces citations ont ÊtÊ mal distribuÊes. Qui a dit quoi ? 5pSRQVHV DX ÀO GH FH GRVVLHU ou en vous aidant des couleurs.

 C’est l’heure du verdict. Sigmund Freud doit quitter l’aventure. 

 Aïe, arrête, ça fait mal ton MHX GH PHUGH ª Matthieu Laurette, artiste multicarte

ÂŤ On peut parler deux heures de l’esthĂŠtique d’un biscuit. Âť Un perdant qui a jouĂŠ Ă la vache qui tâche

ÂŤ J’admirais ces guerrières qui dĂŠployaient autant de courage et de cruautĂŠ que les mâles. Âť Julien Lepers sur le Net

ÂŤ AconchomĂŠm avecmodrĂŠlation Âť Un croupier malhonnĂŞte

-DFN :KLWH complètement accro

ÂŤÂ J’ai participĂŠ Ă Tournez Manège avec Fabienne Egal et Que le meilleur gagne avec Nagui.  Le groupe Toy Fight, dans un van

ÂŤ Alors les zigotos, vous voulez un nouveau nom pour votre JpQpUDWLRQ " ÂŞ Les rĂŠalisateurs de Ultimate Game, HQ IDLVDQW XQ FXLUH XQ ODSLQ

ÂŤ Oh oui oui oui oui oui ! Âť Denis Brogniart, devant une urne en bambou

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SPÉCIAL JEUX Jeux vidÊo

TECH

STAR

Une technologie de plus en plus puissante et des jeux qui restent IXQV F¡HVW SRVVLEOH " TOUTE LA PROBLÉMATIQUE GAMING se joue lĂ . Maintenant.

Panorama de Battlefield Bad Company 2 :  Joli  PAGE

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JEUX VIDÉO

Par François Grelet & Benjamin Rozovas

Pour un Ĺ“il non-­avisĂŠ, les jeux vidĂŠo aujourd’hui se ressemblent tous. Ils sont jolis, plein GH FRXOHXUV LQFUR\DEOHV YUDLPHQW WUqV ELHQ IDLWV OH SOXV VRXYHQW HQ YXH VXEMHFWLYH DYHF XQ Ă LQJXH en amorce de plan. On jurerait parfois qu’ils le font H[SUqV OHV QRQ DYLVpV ,OV URXOHQW GHV \HX[ LOV IRQW maladroitement tomber la manette Ă seize boutons comme si elle leur brĂťlait les mains et ils se bornent Ă ne pas faire la diffĂŠrence entre &DOO RI -XDUH], un western, et &DOO RI 'XW\ 0RGHUQ :DUIDUH, un thriller KL WHFK. On pourrait penser qu’une personne normalement constituĂŠe sait distinguer un cowboy d’un Navy Seals.

0DLV RQ DXUDLW WRUW *UDYHPHQW 9RWUH JUDQGH VÂąXU ostĂŠopathe ne voit pas les canons de la guerre de SĂŠcession au fond de l’image : elle voit un jeu de tir j OD SUHPLqUH SHUVRQQH (OOH YRLW VHXOHPHQW FH TXH le medium a imprimĂŠ depuis longtemps dans son code gĂŠnĂŠtique et ce que l’industrie, dans sa toute-­ puissance normative, a placardĂŠ au premier plan. En fait, elle a raison : on joue encore et toujours au(x) mĂŞme(s) jeu(x). /HVWpV SDU XQH WHFKQRORJLH LQWLPLGDQWH HW XQ PRGqOH ĂŠconomique ciblĂŠ qui condamnent l’audace et la YDULpWp OHV MHX[ YLGpR PRGHUQHV VRQW GHV PRGqOHV H[WUrPHPHQW GpĂ€QLV j O¡LQWpULHXU GHVTXHOV OD FDSDFLWp d’expression et d’innovation reste extrĂŞmement rĂŠduite. Beaucoup de JLJDELWV, beaucoup de talent, trop d’argent. Et pourtant, observez avec quelle disparitĂŠ d’esprit et quel ĂŠcart de sensibilitĂŠ deux chefs-­d’œuvre comme %LR 6KRFN et +DOI /LIH cohabitent dans la mĂŞme case FPS [First Person Shooter]. C’est ce qui est beau dans le JDPLQJ. C’est ce qui reste inexplicable aussi. C’est pour ça qu’on joue. —

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SPÉCIAL JEUX Jeux vidÊo

 NOUS SOMMES À UN CARREFOUR DE L’HISTOIRE  Les jeux vidÊo ont-ils vraiment TXH GH OD JXHXOH " 2Q D SRVp OD question à ceux dont c’est le mÊtier, artistes, producteurs ou concepteurs, impliquÊs sur certains des titres les plus attendus de 2010.

NOS QUESTIONS

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Adrien Cho Mass Effect 2 (Bioware)

Un jeu nÊcessite en moyenne deux ans de dÊveloppement. Comment faire en sorte qu’il reste au top de la technologie au moment de sa sortie ?

2

Cette gĂŠnĂŠration de machines repousse sans cesse les limites techniques, pendant que l’essence du JDPHSOD\ ĂŠvolue, moins ÂŤ challenging Âť, plus simple et peut-­ ĂŞtre moins fun. C’est liĂŠ ?

Vivons-­ nous un âge d’or des jeux vidĂŠo ou reste-­t-­il, par GpĂ€QLWLRQ Ă venir ?

3

C’est dĂŠlicat. Surtout lorsqu’on dĂŠbute dans le mĂŠtier ou qu’on inaugure une licence, et que nous n’avons ni rĂŠfĂŠrent Ă dĂŠpasser, ni fondations sur lesquelles construire, il faut continuellement rĂŠĂŠcrire par dessus ce que l’on vient de faire. Le contraire de Mass Effect 2 oĂš il ne s’agissait ÂŤÂ que  de peaufiner les graphismes ou de recalibrer quelques ĂŠlĂŠments de gameplay : faire sa propre autocritique en mĂŞme qu’une grosse update graphique.Â

1

Oui et non. Il y aura toujours des gens pour croire que des graphismes ĂŠtourdissants suffisent Ă insuffler une âme. Le pire, c’est que dans un sens ils ont raison, puisque l’incarnation se fait par le biais de cette perfection formelle. De mon cĂ´tĂŠ, je n’ai toujours pas lâchĂŠ Pacman et Donkey Kong, alors...

2

Nous vivons surtout une fin de cycle. La Wii est la console qui se vend le mieux, Natal dÊboule bientôt, le hardware risque de disparaÎtre. Nous sommes à un carrefour de l’histoire du jeu. Une fois que nous aurons choisi la direction à suivre, je pourrais peut être rÊpondre à votre question.

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JEUX VIDÉO

Gordon Van Dyke

Justin Lambros Andy Whitehurst

Battlefield : Bad Company 2 (Dice) Beaucoup de chance, voilà tout ! C’est l’angoisse principal de tous les producteurs : « Et si j’étais en train de réaliser un jeu ringard à sa date de sortie ? ». Dans le blockbuster, je peux vous dire que ça nous panique du matin au soir. Il faut avoir quelques espions chez la concurrence, serrer les bonnes mains, passer les bons coups de fil. Et avoir des développeurs qui assurent.

Dante’s Inferno (Visceral Games)

Wardevil (Digi-Guys) Vous parlez à la bonne personne : je travaille sur WarDevil depuis cinq ans. C’est en grande partie de la chance. Un groupe médiatique Indien très puissant, UTV, que possède en partie Disney, nous finance depuis notre première démo en 2006. En cinq ans, on a accompli dix ans de recherche et développement. On s’est donc retrouvé à l’avant-garde de l’imagerie graphique. Plus besoin de regarder derrière nous.

2

Actuellement la tendance est au « beau mais chiant », c’est vrai. Mais dans trois semaines, ça aura peut-être changé. Vous vous en rendrez compte dès la sortie de Bad Company 2, ah ah. Le jeu vidéo est un art tellement jeune qu’il défriche en permanence. Faire des jeux, c’est encore comme jouer au petit chimiste, on met un peu de machin, un peu de bidule, des fois ça nous explose à la gueule, d’autres fois c’est de la pure magie.

1

Il faut partir de la technologie, lorsqu’on doit commencer un jeu à partir de rien, c’est l’enfer. Pour Dante’s Inferno, on s’est aidés des innovations, en termes de framerate [fluidité d’affichage] et de rendering [calcul des différentes couches d’images en postprod], expérimentés à l’époque de Dead Space. Le plus dur, d’un point de vue visuel, était fait, on a pu se consacrer essentiellement au gameplay.

Oui, évidemment. Tout se ramène à une question économique. Des boîtes qui ont bien plus d’argent que nous le dilapident en faisant appel à des gens du cinéma qui leur disent de faire ci ou ça. Et les concepteurs de jeux leur expliquent en retour que ce n’est pas possible parce que ci ou ça. Je bosse tranquillement sur mon jeu en petit comité, et c’est la manière que je préconise dans ce métier.

L’état de grâce d’une machine n’arrive qu’à son crépuscule. Les plus beaux jeux de la PS2, comme God Of War ou Shadow of The Collossus, sont arrivés alors que la PS3 déboulait. A ce moment-là, les développeurs connaissaient le hardware sur le bout des doigts, ils allaient fouiller les tripes de la machine pour en ressortir des trucs dingues. Pour cette génération, si âge d’or il y a, il n’arrivera qu’à la fin des cycles de la PS3 et de la 360. C’est-à-dire dans longtemps.

La question ne se pose pas en ces termes. D’un côté, on a un public de gamers qui réclame des graphismes soufflants pour leur télés HD, de l’autre des « casuals » qui veulent juste rigoler avec leurs amis ou passer vingt minutes par jour sur leur console. Notre challenge, à nous développeurs, c’est de faire quelque chose d’aussi addictif qu’un jeu flash sur Facebook, mais technologiquement tuant. De ne laisser aucun public sur le bord de la route.

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Non, car il y a toujours quelqu’un ou quelque chose qui remue l’industrie et change la donne. J’espère que WarDevil ou le moteur graphique qu’on a créé pour l’occasion arrivera à ça. La bonne analogie, c’est Star Wars. Il faut se remettre dans le contexte économique de l’époque. On donnait six millions de dollars à Lucas quand le coût moyen d’un film était de quinze millions. Il n’avait rien et il a réalisé ce truc qui a fait basculer l’industrie… On croise les doigts pour les âges d’or du futur.

Nous vivons une forme d’âge d’or, oui. La preuve en est que jamais une génération de machines n’a duré aussi longtemps que celle-là, ce qui signifie qu’on commence à toucher du doigt les limites de la technologie. Après je ne sais pas si c’est une bonne nouvelle ou non pour l’avenir du jeu vidéo, mais bon sang, je ne me suis jamais autant éclaté sur ma console !

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SPÉCIAL JEUX Jeux vidÊo

Il vient de se passer un truc 7URLV MHX[ UpFHQWV TXL QDYLJXHQW FHWWH ÀQH ligne frissonnante entre dÊmonstration de force et gameplay profond.

Dead Space Extraction 9LVFHUDO *DPHV ( $

Vise, shoote, essaye de pas dĂŠgueuler, regarde autour de (et devant) toi.

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'HUULqUH VHV DWWULEXWV PRGHVWHV GH UDLO VKRRWHU pour Wii, Dead Space Extraction apporte sa petite pierre, PDLV SDV GHV PRLQGUHV j O¡pGLĂ€FH GX MHX TXL VHUDLW XQ Ă€OP GRQW WX HV OH KpURV 2Q ULJROH PDLV OHV DV GH 9LVFHUDO viennent de ressusciter le vieux mythe GX Ă€OP LQWHUDFWLI 3DV WHOOHPHQW GX cĂ´tĂŠ des sensations pures (domaine d’Uncharted ou 0RGHUQ :DUIDUH), moins prĂŠsentes, il faut le noter, que dans le ÂŤ vrai Âť Dead Space, mais du cĂ´tĂŠ du dispositif ÂŤ cinĂŠma Âť justement. Jeu de tir en vue subjective, Extraction vous place dans la peau de plusieurs YLFWLPHV HQ SXLVVDQFH DX Ă€O G¡XQ scĂŠnario craspec qui invente un

nouveau sous-­genre : le VHULDO VXUYLYDO. Ambiance $OLHQV garantie. L’astuce est dans la camĂŠra, qui QH Ă€JXUH SDV WRWDOHPHQW OH UHJDUG conditionnĂŠ du joueur ; dans les coins, elle s’amuse Ă ÂŤ faire du cinĂŠma Âť, ORQJH OHV PXUV VXLQWDQWV RSqUH des torsions ĂŠtranges, avec un Ĺ“il incroyable pour la putrĂŠfaction et les bas-­fonds sous-­ÊclairĂŠs (Fincher serait Ă€HU /D PLVH HQ VFqQH HVW GH WRXWH beautĂŠ, gĂŠnĂŠralement le signe d’un JDPHSOD\ appauvri. Pas ici. L’absence de libertĂŠ de mouvement indique au contraire que vous allez en chier. Pas de doute, il vient de se passer un truc. —

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JEUX VIDÉO

DJ Hero (Freestyle Games/ $FWLYLVLRQ %OL]]DUG

Si le son ne me tue pas, le beat m’aura. Perdu entre le stylet d’une DS, le bouton Star power d’une guitare en plastoc, et des licences qui pĂŠriclitent Ă vue d’œil, le renouveau du U\WKP JDPH ne pouvait passer que par la crĂŠation d’un pĂŠriphĂŠrique capable de singer autre chose qu’une phrase mĂŠlodique ou rythmique. Si DJ Hero IDLW VRXIĂ HU XQ DLU IXQN\ VXU OHV FRQVROHV +' F¡HVW TXH VHV concepteurs ont eu la brillante idĂŠe de ne retenir que des PDVK XS dans leur (interminable) playlist. Du coup, le challenge consiste Ă faire cohabiter deux morceaux dans le mĂŞme espace sonore Ă l’aide d’une platine surchargĂŠe de potards multicolores. Non plus, comme ses aĂŽnĂŠs, Ă reproduire un phrasĂŠ musical, mais Ă le

PHWWUH HQ VFqQH FRLQFHU OH EHDW de Let’s Dance sur la mĂŠlodie de I +HDUG ,W 7KURXJK 7KH *UDSHYLQH, ou l’inverse, et l’agrĂŠmenter de scratchs bien sentis). La platine de DJ Hero prend des allures de Moviola [instrument TXL SHUPHW GH PRQWHU XQ Ă€OP HQ le regardant] ludique, d’infernale machine Ă ĂŠchantillonner, Ă compiler, Ă copier/coller. Et au fur et Ă mesure des mix se dĂŠvoile son vĂŠritable dessein : au-­delĂ de l’imitation de DJ de camping, elle tient Ă faire de vous le Phil Spector des annĂŠes 00. —

Borderlands *HDUER[ . *DPHV

)36 53* )3* :7) "

D’abord la claque formelle. Une fantasmagorie ÂŤ cell-­ shadĂŠe Âť, qui convoque les lignes claires de Moebius et Druillet dans un immense shaker post-­apocalyptique. /j R OD SOXSDUW GHV )36 QH MXUHQW TXH SDU XQ photorĂŠalisme qui arrache la rĂŠtine et des rafales de kalachnikovs en 5.1, Borderlands [lire p. 220] susurre des mots doux Ă l’oreille, dĂŠroule tranquillement sa SF bricolo au beau milieu d’immenses panoramas caillouteux peuplĂŠs de PLJGHWV Ă machettes et d’haltĂŠrophiles accros au shotgun. Une fois la mesure prise du gĂŠnie graphique et de OD FRKpUHQFH YLVXHOOH OH MHX HQYRLH VD GHX[LqPH offensive. Du shoot en subjectif oui, mais tartinĂŠ GH JURVVHV FRXFKHV GH 53* DUPHV j FXVWRPLVHU SRLQWV G¡;3 >G¡H[SpULHQFH@ j FKRSHU j V¡HQĂ€OHU G¡XQH seule traite en coop’ (Ă deux, trois ou quatre). Un gros fourre-­tout dans lequel on a fait rentrer de force les lubies vidĂŠoludiques du moment. Il y a de l’Êmerveillement Ă constater que la greffe prend aussi bien, aussi vite, en deux coups de mitraillettes. La force presque mystique du jeu, de son JDPHSOD\, tient j FH FDUDFWqUH DIIUHXVHPHQW EkWDUG (YLGHQW SRXUWDQW non ?

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SPÉCIAL JEUX DÊbat

ZELDA AUSSI BELLE QUE LA JOCONDE Sans rougir, nous avons questionnÊ nos experts pour savoir à quelle heure nous pourrons dire que le 10E ART, C’EST LES JEUX VIDÉO.

par Fanny Menceur et Samy Zakari

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Enter. Quand Pong est sorti en 1972, personne n’imaginait l’ampleur de la mutation des jeux vidĂŠo en industrie. Les SUHPLqUHV JpQpUDWLRQV GH FRQVROHV et les bornes d’arcades ont fait place Ă des mondes DX[ SRVVLELOLWpV LQĂ€QLHV j O LQVWDU GH 8QFKDUWHG $PRQJ 7KLHYHV (Naughty Dog, 2009), qui atteint l’excellence au rayon action-­aventure avec sa trame hollywoodienne et des prouesses techniques inĂŠdites. Si, pour certains, la violence et l’aliĂŠnation sont toujours de mise au rayon polĂŠmiques (des

VFLHQWLĂ€TXHV DPpULFDLQV RQW GpPRQWUp TXH FHUWDLQV jeux entraĂŽnaient des traumatismes crâniens et Nadine Morano, la secrĂŠtaire d’Etat chargĂŠe de la Famille, a cataloguĂŠ GTA IV d’ DPRUDO Âť), pour les gens normaux, il s’agit plutĂ´t d’une nouvelle forme d’art qui suit les traces du cinĂŠma, nĂŠ lui aussi sous le feu des critiques. ÂŤ 6L OH MHX YLGpR Q¡HVW SDV O¡DUW GHV DUWV 3ODWRQ Q¡DXUD pWp TX¡XQ geek GHV SURYLQFHV G¡$WKqQHV Âť L’argument de Frank Beau, directeur de l’ouvrage collectif

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DÉBAT

Culture d’Univers, intronise la discipline dans l’histoire culturelle du XXIe VLqFOH /H WURLVLqPH PpGLD HQ WHUPHV GH FKLIIUH G¡DIIDLUHV DSUqV OD WpOpYLVLRQ HW OD PXVLTXH LQWHUURJH DX QLYHDX MXULGLTXH ² TXHO VWDWXW SRXU O¡¹XYUH LQWHUDFWLYH " ² HW VXUWRXW VXU OH SODQ artistique. Allumons la console.

 Myst, Out of This World, Super Mario 64 ou Braid font partie du patrimoine le plus ÊlevÊ de l’humanitÊ. 

François Bliss de la Boissière, critique

LÉGITIMITÉ FRAGILE L’intĂŠgration du jeu vidĂŠo dans l’espace culturel s’est accĂŠlĂŠrĂŠe au dĂŠbut des annĂŠes 2000. Les crĂŠateurs Shigeru Miyamoto (Zelda, Mario), Michel Ancel (Rayman, Beyond Good & Evil HW )UpGpULFN 5D\QDO (Little Big Adventure, Time Commando) sont faits Chevaliers des Arts et des Lettres en 2006. En septembre dernier, FrĂŠdĂŠric Mitterrand annonce la FUpDWLRQ G¡XQ 2EVHUYDWRLUH GX -HX 9LGpR HW 1DWKDOLH .RVFLXVNR 0RUL]HW OqYH YLQJW PLOOLRQV G¡HXURV SRXU Ă€QDQFHU TXDUDQWH KXLW SURMHWV GH VHULRXV JDPHV. Face Ă un tel branle-­bas de Ă€JKW, Frank Beau se veut prudent : ÂŤ &H Q¡HVW SDV XQ DUW ELHQ TX¡XQH SDUWLH GH O¡LQGXVWULH YHXW TXH FHOD HQ VRLW XQ SRXU IDFLOLWHU O¡DFFqV DX[ Ă€QDQFHPHQWV DX[ DLGHV VXEVWDQWLHOOHV FRPPH SRXU OH FLQpPD (Q DWWHQGDQW PRLQV LO \ DXUD GH IDQWDVPH GH OD UHFRQQDLVVDQFH SOXV OH MHX DXUD GH FKDQFH GH GpYHORSSHU VHV TXDOLWpV DUWLVWLTXHV GH PDQLqUH RVWHQWDWRLUH Âť Les JDPH GHVLJQHUV, se considĂŠrant davantage comme des artisans du divertissement, alimentent peu le GpEDW 6L FHUWDLQV FRQFqGHQW TX¡XQH SDUWLH GH OHXU WUDYDLO SHXW rWUH DUWLVWLTXH DXFXQ Q¡DIĂ€UPH HQFRUH ÂŤ faire de l’art Âť. Le public, lui, ne se pose pas vraiment la question de la spiritualitĂŠ mystique d’Okami, du gĂŠnie conceptuel des palais de Zelda ou de la poĂŠsie environnementale de Flower. A quand une grammaire vidĂŠoludique pour en percevoir toute la dimension ?

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SPÉCIAL JEUX DÊbat

Sous la direction de Frank Beau Culture d’Univers

Fyp, 2008

MATÉRIALISER DES PROPRIÉTÉS DU TEMPS -XVTX¡j OD Ă€Q GHV DQQpHV OH FLQpPD pWDLW OH seul mĂŠdia Ă s’approprier les autres disciplines artistiques. Le jeu vidĂŠo va aujourd’hui plus loin : les mondes virtuels bâtis au croisement de l’art et de la science demandent une exigence mathĂŠmatique et technologique : la programmation, les moteurs JUDSKLTXHV HW SK\VLTXHV O¡LQWHOOLJHQFH DUWLĂ€FLHOOH et le rĂŠseau. Par ailleurs, les jeux dĂŠveloppent un langage inĂŠdit, le JDPHSOD\. François Bliss de la %RLVVLqUH FULWLTXH MHX[ HW FLQpPD j 3UHPLqUH et au 1RXYHO 2EV HVW GpĂ€QLWLI Š 0\VW et ses suites, Out of 7KLV :RUOG, Super Mario 64, =HOGD 2FDULQD RI 7LPH, Abe’s Oddysee, Ico, Shadow of the Colossus, Pixel Junk Eden, Braid IRQW SDUWLH GX SDWULPRLQH OH SOXV pOHYp GH O¡KXPDQLWp Âť Des chefs-­d’œuvre. Mais les jeux disposent-­ils d’une riche palette de sujets (comme le cinĂŠma) ? D’un ĂŠventail d’Êmotions (Ă la hauteur de la littĂŠrature) ? En rĂŠalitĂŠ, le jeu vidĂŠo entame sa maturation crĂŠative et enfante, depuis peu, des ovnis comme Passage -DVRQ 5RKUHU GRQW O¡HVWKpWLTXH UpWUR VHUW XQH UpĂ H[LRQ SRLJQDQWH VXU OD IDWDOLWp HW WRXFKH DX FÂąXU HW Ă l’esprit. Le 10e art se trouve probablement ici. Pour *UHJRU\ 6]ULIWJLVHU MRXUQDOLVWH SRXU OH VLWH *DPHEORJ, Braid (Jonathan Blow, 2008) en est la meilleure illustration : ÂŤ /HV pPRWLRQV OHV UpĂ H[LRQV TX¡LO VXVFLWH DXFXQH DXWUH GLVFLSOLQH Q¡HQ HVW FDSDEOH &¡HVW OD IRUFH GH FHV PpFDQLTXHV G¡LQWHUDFWLYLWp LOV SHUPHWWHQW DX MRXHXU G¡DSSUpKHQGHU VD EHDXWp PDWpULDOLVDQW j O¡pFUDQ PDLV VXUWRXW GDQV QRV WrWHV FHUWDLQHV SURSULpWpV GX WHPSV Âť CIMENT D’UNE CULTURE POPULAIRE L’expĂŠrience immersive existe en tant qu’œuvre audiovisuelle interactive. Car contrairement Ă XQ Ă€OP R OH VSHFWDWHXU HVW ODLVVp VHXO DYHF VD parole, l’exploration, ZLLPRWH Ă la main, ne raconte

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SDV G¡KLVWRLUH GH PDQLqUH OLQpDLUH HW Q¡D GH VHQV qu’investie par le joueur. Frank Beau : ÂŤ /H MRXHXU HVW XQ VSHFWDWHXU GH OXL PrPH HQ WDQW TX¡DFWHXU 7RXW OH JpQLH GX MHX YLGpR ² FRPPH RQ SDUOH GH FLQpJpQLH HW GH WpOpJpQLH ² UHSRVH VXU OH UHJDUG VXU XQH DFWLRQ TXL QRXV HVW SURSUH 4X¡RQ SHXW UDIĂ€QHU HQ PHWWDQW SOXV GH ' de spatialisation sonore, de gameplay GH VFpQDULRV RULJLQDX[ GH SHWLWHV DVWXFHV ErWHV HW HIĂ€FDFHV HW VXUWRXW GH WpPRLQV j VDYRLU OHV DXWUHV MRXHXUV Âť Il y a aussi dans le jeu vidĂŠo ces moments instructifs qui renvoient des ĂŠchos profonds de notre culture, en assumant des fonctions attribuĂŠes autrefois aux contes populaires, mythes et lĂŠgendes. En dĂŠveloppant les symboles du Bien et du Mal, du Destin ou des puissances magiques, les jeux vidĂŠo perpĂŠtuent cette tradition orale qui cimente la culture populaire et parlent Ă l’inconscient collectif G¡XQ SHXSOH ,OV pYRTXHQW OH P\VWqUH GHV RULJLQHV HW les puissances de la nature avec un langage imagĂŠ et symbolique, tissent de romanesque ce qu’ils empruntent parfois Ă une trame historique et crĂŠent le hĂŠros Ă partir de O¡KRPPH historique. La tradition française se dĂŠmarque par une conception un peu trop acadĂŠmique de l’art. Elle ĂŠtablit ainsi une hiĂŠrarchie stricte entre les formes d’expression. ÂŤ 3HUVRQQH QH SHXW GLUH TX¡XQ MHX YLGpR pJDOH La Joconde, rappelle Frank Beau, HW WDQW TXH OD PDMRULWp GHV JHQV VRXWLHQGURQW FHWWH K\SRWKqVH OH MHX VHUD UDQJp GDQV OD FDWpJRULH GHV DUWV PLQHXUV YRLUH GHV DUWV TXL Q¡HQ VRQW SDV GX WRXW ,O FKDQJHUD GH VWDWXW OH MRXU R O¡RQ VH VHUD VRXYHQX TXH O¡DUW HVW XQH GpPDUFKH Âť Autrement dit, une entente est Ă nĂŠgocier entre l’industrie, les institutions et le milieu LQWHOOHFWXHO TXL LQWpJUHUDLW GpĂ€QLWLYHPHQW OHV MHX[ vidĂŠo dans le cercle restreint des arts. Et si le dĂŠbat public correspond au processus d’assimilation dont a besoin une sociĂŠtĂŠ, le jeu vidĂŠo est dĂŠjĂ le 10e art. —

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DÉBAT

« Le statut des jeux vidéo changera le jour où l’on se sera souvenu que l’art est une démarche. »

Frank Beau

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SPÉCIAL JEUX 'pEDW VXLWH

Entretien

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Delacroix, Lynch et Shigeru Miyamoto, même combat ? Conversation en mode two players entre la critique d’art MARGHERITA BALZERANI et le concepteur ERIC VIENNOT.

A quelle distance sommes-nous de considérer le jeu vidéo comme le 10e art ? Margherita Balzerani : Le jeu vidéo est rentré dans la culture populaire. Il est, sans conteste, le 10e art. Cela m’intéresse, dans ma démarche de critique, de faire accéder les jeunes générations à ce patrimoine. Pong, Arkanoid, Pacman ou Space Invaders sont déjà considérés comme des œuvres d’art. Cela dit, le jeu vidéo doit être appréhendé différemment du point de vue esthétique, en raison de sa dimension interactive. Eric Viennot : Il est encore trop tôt pour le dire. Comparé au cinéma, certains disent qu’on en est aux années 50. Je dirais plutôt les années 10. Même de grands game designers comme Shigeru Miyamoto [Mario, Zelda] affirment qu’il ne s’agit que d’un divertissement. C’est une attitude saine – cela permet de créer sans trop se prendre au sérieux. N’oublions pas que les frères Lumière ne voyaient dans le cinéma qu’un objet utilitaire. Ce n’est qu’ensuite que Méliès ou Chaplin ont pris conscience de sa portée artistique. Quels critères permettent de qualifier une discipline d’art ? M. B. : Une œuvre d’art nous prend complètement les sens et dépasse la question subjective du beau. La notion d’art est à réviser, car l’identification donne une

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dans une vidéo, où il efface l’interface dimension artistique supplémentaire au jeu graphique pour ne laisser que des nuages, vidéo. Prenez La Rotative plaques verre de ou le Français Martin Le Chevalier, qui a Marcel Duchamp (1920) : une machine qu’il créé en 2001 Vigilance 1.0 au moment où ne définissait pas comme une œuvre d’art mais le gouvernement se posait des questions comme une invention ; le mouvement déclenché sur la sécurité. Je collabore aussi avec des par la rotation d’une turbine hypnotisait le éditeurs de jeux pour mettre en avant l’aspect spectateur. J’aime faire l’analogie avec le jeu esthétique de leur sortie. vidéo qui n’existe que si le joueur s’implique. E. V. : Tout le monde sait que le cinéma est le E. V. : Le jeu, parce qu’il s’articule autour du 7e art, mais tout le monde ne sait pas quels gameplay, a tout pour être un art accompli. Il fait vivre au public une expérience complète sont les autres*, dont certains ne sont pas les et immersive, permet de construire une œuvre plus représentatifs de l’idée que je me fais de totale, avec ses lieux, ses bâtiments, ses sons, l’art. La télévision est devenue obsolète pour ses variations de lumière et de climat, sa la jeune génération, qui l’a remplacée par logique interne. Internet, les mangas Est-il un art et les jeux vidéo. mineur – ou un art Sa fonction ludique « Comparé au impur – suscitant le place-t-il horscinéma, nous d’autres émotions jeu ? en sommes aux qu’artistiques ? M. B. : Les univers années 1910. » M. B. : Considérations populaires comme le Eric Viennot désuètes. tuning ou le cosplay L’artiste japonais intéressent bon Takashi Murakami nombre d’artistes. Les s’inspire beaucoup de l’esthétique manga, Français ont du mal à reconnaître la dimension non pas parce qu’elle est populaire, mais ludique dans la culture parce qu’ils sont encore parce qu’il n’y a plus de hiérarchie dans trop attachés à cette conception très XIXe de la production culturelle. J’accompagne des l’art. Pourtant, Marcel Duchamp, l’un des artistes qui détournent les jeux pour en artistes les plus ironiques à cet égard, est faire de véritables œuvres, tels l’Américain français. Cory Arcangel, qui a détourné Super Mario E. V. : La force du jeu vidéo est de renouer

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DÉBAT

avec les sensations des jeux d’enfants. Si, pour certains, l’art doit ĂŞtre sĂŠrieux voire austère, le jeu a toujours ĂŠtĂŠ un ĂŠlĂŠment important dans la crĂŠation artistique. Ce qui est rĂŠbarbatif, ce sont les thĂŠories de confĂŠrenciers bavards. Quels jeux ĂŠlèveriez-vous au rang d’art ? E. V. : Shadow of Colossus et Ico sont des expĂŠriences incroyables. M. B. : J’adore Braid, qui joue avec l’ÊlasticitĂŠ ÂŤ Quand j’ai senti du temps. Flowers offre une expĂŠrience le cĹ“ur de Ico battre singulière et poĂŠtique. par les vibrations de Enfin Rez, que j’ai la manette, j’en ai exposĂŠ il y a deux ans pleurĂŠ. Âť au Festival du Jeu VidĂŠo Margherita Balzerani de Paris. Attendez-vous une meilleure reconnaissance des crĂŠateurs ? M. B. : Absolument. Le nom de l’auteur passe souvent inaperçu au gĂŠnĂŠrique de fin, car il faut crĂŠditer tous ceux qui ont participĂŠ Ă la conception. C’est aussi liĂŠ aux ĂŠditeurs, qui gardent souvent les droits et ne laissent qu’une marge rĂŠduite aux concepteurs.  E. V. : Au cinĂŠma, il a fallu du temps pour voir ĂŠmerger la notion d’auteur. Pour les jeux vidĂŠo,

JOUEUR 1

Margherita Balzerani

AGE : 34 ans. MISSION : Curateur, critique d’art et professeur de sÊmiotique et d’histoire de l’art à l’Êcole de Manga, Eurasiam à Paris. AVATAR : Margherita Bertolucci (Second /LIH). SES POUVOIRS :

2000 DEA d’histoire de l’art contemporain j O¡XQLYHUVLWp /D 6DSLHQ]D 5RPH

2002 EntrÊe au dÊpartement de l’action FXOWXUHOOH GX 3DODLV GH 7RN\R 3DULV

2010 7KqVH GH GRFWRUDW VXU Š OHV HQMHX[ HVWKpWLTXHV GHV MHX[ YLGpR HW OHXU LQà XHQFH VXU OD FUpDWLRQ DUWLVWLTXH FRQWHPSRUDLQH .

c’est pareil : on connaĂŽt davantage Mario ou Lara Croft que leurs designers. J’ajoute que ces derniers ne sont pas toujours conscients d’avoir un point de vue d’auteur. Se considèrent-ils comme des artisans, des artistes ? M. B. : On peut faire l’analogie avec un atelier de la Renaissance italienne comme la Bottega de Michel-Ange : pour concevoir un jeu, un artiste s’occupe du dessin, un autre de la musique, un autre du gameplay, etc. La question de l’artiste numĂŠrique me dĂŠrange. C’est comme si on disait de LĂŠonard ou Michel-Ange qu’ils ĂŠtaient des artistes sculpturaux ou picturaux. L’expression de l’artiste va au-delĂ du mĂŠdia. E. V. : Je viens des arts plastiques et je me suis intĂŠressĂŠ aux jeux vidĂŠo, un monde oĂš tout est Ă faire. Peut-ĂŞtre que le jeu vidĂŠo permettra la naissance de nouveaux arts, ou qu’il se divisera en plusieurs branches. OĂš en est le jeu vidĂŠo en termes d’Êmotions ? M. B. : J’ai dĂŠcidĂŠ de m’occuper du jeu vidĂŠo en tant qu’art en jouant Ă Ico. Lorsque j’ai senti le cĹ“ur de la jeune fille battre par les vibrations de la manette, j’en ai pleurĂŠ. Le jeu vidĂŠo peut engendrer de l’angoisse, elle-mĂŞme source d’adrĂŠnaline.

E. V. : Pour que les ĂŠmotions passent, il faut oublier la technique. Fumito Ueda [Ico, Shadow of the Colossus] est l’un des rares designers Ă savoir faire passer ses prouesses technologiques au second plan, pour mettre en lumière la narration, la poĂŠsie et l’Êmotion. L’ÊlasticitĂŠ du temps est l’autre point fort. Jouer pendant trente heures nĂŠcessite une affinitĂŠ avec un personnage. Quand vous l’accompagnez pendant des semaines, votre empathie n’est pas la mĂŞme que pour le hĂŠros d’un film. Ne confondons-nous pas Ĺ“uvre d’art et loisir culturel ? M. B. : Le jeu vidĂŠo est dĂŠjĂ les deux. Je ne suis pas contre l’idĂŠe d’un musĂŠe du jeu vidĂŠo, Ă condition que ce ne soit pas le Louvre. E. V. : MĂŞme sans succès commercial, un jeu touche au moins cent mille personnes. Le jeu vidĂŠo fait de l’art populaire, au sens noble. * Selon Hegel et son EsthĂŠtique ou la Philosophie de l’art (1818-1829), il s’agit de l’architecture, la sculpture, la peinture, la musique, la danse et la poĂŠsie. Le ÂŤ 7e art Âť est une expression proposĂŠe en 1919 par l’Êcrivain français Ricciotto Canudo pour dĂŠsigner le cinĂŠma ; sont venus s’ajouter en 8e et 9e positions les arts mĂŠdiatiques (radio, tĂŠlĂŠ et photo) et la bande dessinĂŠe.

JOUEUR 2

Eric Viennot AGE : 40 ans. MISSION : CrĂŠateur de jeux vidĂŠo. AVATAR : Wander (6KDGRZ RI &RORVVXV) SES POUVOIRS :

1980-1985 CAPES et l’agrĂŠgation d’arts plastique et enseigne Ă l’universitĂŠ de Paris I PanthĂŠon-­Sorbonne.

1990 Fondation du studio de crĂŠation Lexis NumĂŠrique.

2003 Premier volet de la sĂŠrie ,Q 0HPRULDP, dont il a assurĂŠ la conception.

2007 NommĂŠ Chevalier des Arts et des Lettres.

2009-2010 PrĂŠpare un jeu dit ÂŤ transmedia Âť et un autre en 3D sur PS3.

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SPÉCIAL JEUX CinÊma

entretien 5LFKDUG *DLWHW & Alex Masson

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Start. OĂš vous trouvez-­vous en ce moment et comment vous sentez-­vous ? Brian Taylor : C’est un magazine porno ? Mark Neveldine : Je suis dans ma maison, Ă deux doigts de manger dehors (du lapin). Il fait p‌ de 70 °C Ă l’intĂŠrieur et 33 °C Ă l’extĂŠrieur. Je rĂŠponds Ă cet HQWUHWLHQ GH PHUGH HW MH PH VHQV WUqV ELHQ SDUFH TXH MH viens de m’acheter un nouveau fusil. Dans Ultimate Game, il est dit que le jeu doit ĂŠvoluer. Faire ĂŠvoluer le cinĂŠma, c’est votre mission ? Taylor : Nous ne sommes que des soldats, la guerre est tout autour. Le cinĂŠma doit ĂŠvoluer au risque de s’Êteindre. La plupart des gosses que je connais

Q¡HQ RQW ULHQ j EUDQOHU GHV Ă€OPV LOV SUpIqUHQW OHV jeux vidĂŠo et Internet. Le divertissement tel que vous le pratiquez, passivement, est mourant. Il s’agit maintenant de traverser l’Êcran, choper les gens Ă la gorge et les ĂŠtrangler. 8OWLPDWH *DPH HVW XQ Ă€OP GH console next generation. Avez-­vous des enfants ? Quel avenir pour cette gĂŠnĂŠration hyper connectĂŠe ? Neveldine : Brian en a un, moi non. Nous avons passĂŠ pas mal de temps sur le Net pour capter le ]HLWJHLVW des 15-­25 ans. Taylor : '¡LFL j FH TXH FHWWH JpQpUDWLRQ ² FHOOH TXL D DXMRXUG¡KXL GLVRQV HQWUH HW DQV ² JUDQGLVVH

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'HSXLV WURLV ÀOPV H[SORVLIV OHV $PpULFDLQV MARK NEVELDINE & BRIAN TAYLOR transfusent le meilleur et le pire du jeu vidÊo au cœur du cinÊma. Pour la sortie DVD d’Ultimate Game – à côtÊ duquel Matrix est aussi palpitant qu’une partie de Monopoly –, entretien au clavier avec deux geeks surdouÊs.

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CINÉMA

 Le divertissement pratiquÊ, passivement est mourant. Il s’agit de traverser l’Êcran, choper les gens à la gorge et les Êtrangler. 

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Brian Taylor

le monde sera mĂŠconnaissable. Ce qu’on appelle OH WURXEOH GX GpĂ€FLW GH O¡DWWHQWLRQ ou l’hyperactivitĂŠ, TXL VH VRLJQH DX 5LWDOLQ RX DYHF G¡DXWUHV GURJXHV est vraiment rentrĂŠ dans une phase hyper ĂŠvolutive. Ces mĂ´mes sont en train de devenir quelque chose de nouveau, qui dĂŠcompose et traite l’information Ă une vitesse supĂŠrieure Ă celle des humains prĂŠcĂŠdents. Ils ne sont pas foutus : ils s’ennuient, c’est tout. A quelle distance sommes-­nous du futur dĂŠcrit dans Ultimate Game ? Taylor : Pas plus de six, sept ans. Neveldine : Je dirais MRXUV DSUqV FHWWH LQWHUYLHZ que vos lecteurs vont maintenant dĂŠvorer pour faire en sorte que tout ce que nous disons se produise rĂŠellement. Le personnage de Ken Castle, concepteur de jeux PDFKLDYpOLTXH UHĂ qWH W LO YRV SHXUV DX VXMHW GX virtuel et des control freaks ? Neveldine : Castle provient d’une organisation cupide et bien rĂŠelle qui ne sera toujours pas dĂŠmasquĂŠe Ă O¡KHXUH R YRWUH PDJD]LQH SDUWLUD VXU OHV URWDWLYHV Taylor : C’est un croisement entre Bill Clinton et Mark Cuban, milliardaire du Net et propriĂŠtaire des Mavericks, l’Êquipe de basket de Dallas. Un gosse dans une peau d’adulte qui regarde le monde comme s’il s’agissait d’un sablier. Un des jeux permet d’expĂŠrimenter des fantasmes extrĂŞmes. S’il existait, que feriez-­vous : coucher avec qui vous voulez, tuer un rival ? Taylor : Je fais dĂŠjà ça dans la vraie vie. Si les jeux d’8OWLPDWH *DPH ĂŠtaient rĂŠels, la plupart d’entre nous s’y adonneraient, bien sĂťr. Neveldine : Je pratique dĂŠjĂ mon jeu prĂŠfĂŠrĂŠ : je chasse. Le lapin, la dinde, le cerf, la perdrix, le faisan, le canard. Car quand j’Êtais gosse, j’adorais Duck Hunt [1985], le jeu de tir sur Nintendo NES. Puis, un soir de dĂŠprime, je me suis mis Ă Big Buck Hunter [best-­seller des jeux de chasse, 2001]. J’adore vivre Ă la campagne, j’aime chasser mon dĂŽner, et ma femme prend du plaisir Ă cuisiner le gibier‌ Je ne fais que vivre ces jeux pour de vrai. Aimeriez-­vous ĂŠcrire ou concevoir un jeu vidĂŠo ? Neveldine : Non. Taylor : $EVROXPHQW 1RWUH SUHPLHU Ă€OP Hypertension [2006], ferait d’ailleurs un jeu SKpQRPpQDO EHDXFRXS GH JHQV FRQVLGqUHQW TX¡LO s’agit d’une adaptation de *7$ ² j FH SURSRV RQ DGRUHUDLW ERVVHU DYHF OHV PHFV GH 5RFNVWDU *DPHV Q¡LPSRUWH TXDQG Q¡LPSRUWH R FH VRQW GHV JpQLHV Comment expliquer qu’aucun jeu adaptĂŠ au cinĂŠma n’ait su retranscrire les sensations des joueurs ? Taylor : /HV VFqQHV GH EDWDLOOH G¡8OWLPDWH *DPH nous paraissent proches de l’hyper-­sensation d’un shoot WKHP XS en mode hard‌ mais la grosse diffĂŠrence, F¡HVW TXH OHV MHX[ VRQW LQWHUDFWLIV HW TXH OHV Ă€OPV ² GX PRLQV SRXU OH PRPHQW ² QRQ 2Q DGRUHUDLW GLULJHU l’adaptation de &DOO RI 'XW\. Si vos lecteurs veulent voir ça un jour, qu’ils envoient des mails Ă Activision pour leur faire savoir !

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SPÉCIAL JEUX CinÊma

DVD TF1 VidĂŠo

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6WHYH 0F4XHHQ SOXV GH .XUW 5XVVHOO 2Q GRLW traverser l’Atlantique et gagner l’Angleterre pour trouver des durs Ă cuire crĂŠdibles. Vous avez ĂŠcrit le scĂŠnario de Jonah Hex, western surnaturel tirĂŠ d’un comics DC, puis abandonnĂŠ la partie. Pourquoi ? Neveldine & Taylor : Jonah est un chasseur de SULPHV REVFqQH HW YLROHQW QRXV YRXOLRQV HQ WLUHU XQ Ă€OP VXSHU +$5' 5 [interdit aux moins de 18 ans]. Les producteurs visaient quelque chose de PDLQVWUHDP [Jonah Hex sortira en 2010 sous la GLUHFWLRQ GH -LPP\ +D\ZDUG DQLPDWHXU FKH] 3L[DU avec Josh Brolin, Megan Fox et John Malkovich]. Le politiquement correct est l’ennemi mortel de l’art. Tarantino, le maĂŽtre de la contre-­culture mixant les genres et les humeurs du cinĂŠ underground des annĂŠes 70-­80, est-­il dĂŠjĂ passĂŠ ? Seriez-­vous le Tarantino bicĂŠphale 2.0, brassant l’underground des annĂŠes 90-­00 ? Neveldine : 7DUDQWLQR HVW H[WUDRUGLQDLUH 1RXV sommes des enfants de chĹ“ur comparĂŠs Ă lui. Taylor : 7RXW OH PRQGH DYDLW IDLW XQH FURL[ VXU OXL puis il y a eu Inglorious Basterds. Il a son style bien Ă lui, mais je ne le vois pas reprĂŠsenter un mouvement ou une tendance. Nous aurions encore du chemin Ă parcourir avant d’être classĂŠs dans la mĂŞme catĂŠgorie que lui.

Votre projet de sĂŠrie tĂŠlĂŠ, Zeroes ? Neveldine : Faites le zĂŠro‌ quand il n’y a plus personne Ă appeler. Taylor : Zeroes est une excuse pour introduire une hystĂŠrie totalement cramĂŠe dans le mĂŠdium tĂŠlĂŠvisuel. Nous allons tenter de franchir un nouveau palier et offrir au public une expĂŠrience perpĂŠtuellement intense et plus urgente que tout ce que vous avez vu jusqu’ici dans la boĂŽte. Et après ? Neveldine : 1RXV DYRQV pFULW GHX[ Ă€OPV TXH QRXV essayons actuellement de tourner. Taylor : Et c’est top secret. —

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ultimate Game/ Hypertension 1&2

Neveldine : Moi, je n’en ai pas du tout envie. Le VHXO Ă€OP GX JHQUH TXH M¡DL YX F¡HVW 0RUWDO .RPEDW [Paul W. S. Anderson, 1995]. J’ai plutĂ´t aimĂŠ. Taylor : Ils sont en train de dĂŠvelopper $VWHURLGV [pionnier mĂŠga basique du VKRRW WKHP XS sur borne d’arcade, 1979], donc le concours de la ÂŤ pire adaptation de jeu au cinĂŠma Âť est annulĂŠ. A quoi jouez-­vous, en gĂŠnĂŠral ? Taylor : En ce moment, Ă 0RGHUQ :DUIDUH comme tout le monde. Mais je garde une machine Defenfer bien vintage Ă la maison histoire de ne pas perdre mon sens aigu du 8-­bits. Neveldine : Je joue juste au poker. Mais si les gros paris sont des jeux, eh bien, je suis un putain de JDPHU avide et cinglĂŠ. Taylor : On est plutĂ´t des mecs 8-­bit. Hypertension 1 ont le style des jeux sur bornes d’arcade : tu JOLVVHV XQH SLqFH GDQV OD IHQWH HW HQ O¡HVSDFH G¡XQH seconde te voilĂ de nouveau debout, ressuscitĂŠ, pour continuer Ă te battre. Neveldine : On adore crĂŠer des hĂŠros qui ne peuvent pas mourir. Ça fait tellement annĂŠes 80. Visuellement, Hypertension 1 & 2 compensent leur aspect tournĂŠ Ă l’arrache par l’Ênergie. Comme les sĂŠries B des annĂŠes 60-­70, oĂš ÂŤ moins GH IULF ÂŞ VLJQLĂ€DLW Š SOXV G¡LGpHV ÂŞ " Taylor : Oui. La diffĂŠrence avec la pĂŠriode (DV\ 5LGHU [Dennis +RSSHU @ RX ÂŤ Le futur mĂŞme le 'RJPH d'Ultimate Game GH /DUV 9RQ 7ULHU HW est prĂŠvu pour 7KRPDV 9LQWHUEHUJ dans 183 jours c’est que maintenant après cette on peut atteindre interview. Âť cette libertĂŠ sans compromis Mark Neveldine niveau qualitĂŠ. La technologie est lĂ pour crĂŠer des images aussi nettes et brusques et VDWXUpHV TXH OHV Ă€OPV j JURV EXGJHW HW OHXUV RXWLOV j deux balles de professionnels de la consommation. Neveldine : 0RLQV GH IULF HVW WRXMRXUV XQ GpĂ€ HW rend crĂŠatif. Mais je serais curieux de voir ce que ça donnerait si nous avions plus d’argent. Jason Statham dans Hypertension, Gerard Butler dans Ultimate Game : que penser de ces incarnations masculines Ăźber testostĂŠronĂŠes ? Neveldine : *HUDUG HW -DVRQ DLPHQW VH IDLUH ERWWHU OH cul sur un tournage, ce qui rend le travail avec eux WUqV DJUpDEOH Taylor : 'LIĂ€FLOH QpDQPRLQV GH GLUH OHTXHO GHV GHX[ est le plus gay. Neveldine : J’aimerais les voir se battre dans une cage. Je crois que je sais qui gagnerait. Taylor : /D WULVWH UpDOLWp F¡HVW TXH O¡qUH GHV DFWHXUV ultra mâles amĂŠricains est terminĂŠe. Plus de

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CINÉMA

Filmographie

Jeux demain, jeux de vilains

hypertension

Hypertension 2

Zeroes

2006

2009

2010 ?

Chev Chelios : un nom de personnage de jeu, la vie qui va avec. Neveldine & Taylor réussissent dès ce premier long la fusion de l’univers de Guy Ritchie et d’un Super Mario trash, tant l’histoire ressemble à un jeu de plateforme : Chelios (Jason Statham, Snatch, Arnaques, crimes et botanique) traverse une ville par étapes pour récupérer l’antidote au lent poison injecté dans ses veines, en s’arrêtant à chaque source d’adrénaline pour se maintenir en vie.

Chev Chelios 2.0. Cette fois-ci à la poursuite de son cœur, piqué par la mafia chinoise. Upload de tout ce qui s’est accéléré depuis trois ans : avènement de jeux vidéo next-gen déviants (GTA), règne de YouTube comme boîte à images décomplexées, démocratisation du porno gonzo, suprématie de la culture geek… Et cette question, sérieuse : et si le monde vivait avec un cœur artificiel ?

Assaut sur le nouvel eldorado culturel : la série télé. Toujours avec un pas d’avance. Au moment où Heroes n’en finit plus d’aller vers une mort scénaristique clinique, le duo propose à la même chaîne, NBC, un concept qui pourrait faire l’effet d’une décharge de défibrillateur : les épisodes de Zeroes se passeront de prologue, voire de conclusion, pour plonger direct dans la dernière heure d’une situation de crise. Imposeront-ils leur cinéma-guérilla à la télévision ? Réponse prévue l’année prochaine. A. M.

Pathology 2008

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Un étudiant médecin légiste découvre que ses camarades se lancent des concours de crimes parfaits qui les surexcitent. Scénaristes, le vicieux binôme prend le dessus sur la mise en scène d’un certain Marc Schoelermann – on dirait un épisode des Experts. Ce thriller tordu fait partouzer l’érotisme SM du Cronenberg de Crash et le nouveau rapport au corps imposé par la télé – gore domestique à la Nip/Tuck, avec Milo « Peter Petrelli » Ventimiglia de Heroes dans le rôle principal.

Ultimate Game 2009 Neveldine & Taylor ne font plus semblant : là où les Hypertension ne faisaient qu’allusion aux jeux vidéo, Ultimate Game met en scène un « MMORPG », jeu de rôles massivement multijoueur, grandeur nature, où des anonymes dirigent à distance des taulards condamnés à mort dans des parties de paintball à balles réelles. Le tout manipulé par un Bill Gates en plein trip joué par un dément Michael C. Hall (Dexter), « l’un des plus grands acteurs vivants » selon les réals qui souhaitent « absolument » retravailler avec lui. Conjuguant la grammaire visuelle ultra kinétique d’aujourd’hui et la science-fiction dystopique des seventies, se rédige la loi de Lavoisier de la société du spectacle : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.

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RETRO-GAMING

BLAZE FIELDING, la sexy-star du beat them all culte auraitelle appliquÊ les thÊories du Deuxième Sexe " Start. par Nadia Ahmane

On ne naĂŽt pas Blaze Fielding, on le devient. Les hĂŠroĂŻnes de jeu vidĂŠo sont souvent des bombes sexuelles inspiratrices de fantasmes futuristes. Un standard esthĂŠtique auquel rĂŠpond la pasionaria 2D de la trilogie EHDW WKHP DOO de rĂŠfĂŠrence, Streets RI 5DJH ĂŠditĂŠe par Sega sur Megadrive de 1991 Ă 1994. Blaze s’y castagne en mini minijupe ĂŠcarlate au point d’exciter les instincts primaires (on voit parfois sa culotte) : c’est ce cĂ´tĂŠ H[FOXVLYHPHQW sexy, que Simone de Beauvoir dĂŠnonçait dans /H 'HX[LqPH 6H[H en 1949, comme Š OHV WDUHV GH OD IpPLQLWp Âť. Mais la ÂŤ fĂŠminitĂŠ Âť de Fielding n’est-­elle pas la dĂŠmonstration de son fĂŠminisme ? %HDXYRLU O¡DIĂ€UPH OD IHPPH Q¡HVW SDV FHW Š $XWUH ÂŞ TXL QH VH GpĂ€QLW TXH SDU UDSSRUW DX PRGqOH PDVFXOLQ dominant, en cours dans la sociĂŠtĂŠ française des annĂŠes 50. Dans les nineties new-­yorkaises et nocturnes de 6WUHHWV RI 5DJH, Blaze, 21 ans, ne dĂŠpend de personne. Sa OLIH" ElevĂŠe sur une ĂŽle SDUDGLVLDTXH GHV *DOiSDJRV HOOH DVVLVWH j O¡DVVDVVLQDW de ses parents par des pourris qui la violent, devient Ă LF H[SHUWH HQ MXGR TXLWWH XQH SROLFH FRUURPSXH et s’improvise chef d’une bande de justiciers. Sa SDVVLRQ " /D ODPEDGD DX GpEXW GX GHX[LqPH pSLVRGH preuve de son indĂŠpendance, elle enseigne la danse). Et ses amours ? Si le bel Axel Stone est plus qu’un VLPSOH FROOqJXH F¡HVW VRQ FKpUL )LHOGLQJ Q¡HVW MDPDLV Š OD SHWLWH DPLH GH ÂŞ ² DORUV TXH 6LPRQH GH %HDXYRLU elle, se payait un paradoxal ÂŤ Notre-­Dame-­de-­Sartre Âť.

SIMONE DE BEAUVOIR DANS STREETS OF RAGE ?

KICKS BIEN PLACÉS Autre malaise ÊpinglÊ par l’essayiste, celui de la  IHPHOOH , la femme pensÊe comme un être naturellement faible. Blaze, elle, n’a rien d’une pÊpÊe fragile. C’est au contraire le perso le plus rapide, SXLV OH SOXV IRUW WHFKQLTXHPHQW GDQV OH WURLVLqPH volet. De Beauvoir, encore :  C’est à travers les yeux GHV KRPPHV TXH OD ÀOOHWWH H[SORUH OH PRQGH HW \ GpFKLIIUH VRQ GHVWLQ ª $YHF )LHOGLQJ OD ÀOOHWWH PRGHUQH s’affranchit de l’autoritÊ masculine et fout des coups de tuyaux ou des kicks bien placÊs à tous les sales W\SHV GHV 5XHV GH OD 5DJH FascinÊe par les Amazones, ces  JXHUULqUHV TXL GpSOR\DLHQW DXWDQW GH FRXUDJH HW GH FUXDXWp TXH OHV PkOHV , la philosophe fÊministe l’aurait ÊtÊ à coup sÝr par l’Amazone des pixels qui se joue des clichÊs phallocrates. —

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SPÉCIAL JEUX Mode

Photographie Tom TS74 c Assisté de Romain Leblan Stylisme Andrea Crews h Van, Modèles Ylva Falk, Anji Din ard Khady Thiam, Pierre-Edou lie Salazar Les , mé Ro l sca ,Pa Hanffou Publi-rédactionnel David Herman

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MODE

Like the first days Mini ĂŠvĂŠnement sous LV ORUV OD QHI GX *UDQG 3DOD )LDF H OD Q G GH OD GHUQLqUH pGLWLR bougies 50 ses er fĂŞt r en octobre : pou grandes des s petite sous le capot, la plu avait y isĂŠ tor mo e visionnaires du mond ² VpULH HQ PG &D ,1, OH 0 YHO FORLVRQQp VD QRX PLOLHX DX EH DX HUVDLUH ² OLPLWpH VSpFLDO DQQLY tionneur lec col Le ur. fut du d’une piscine Ă balles tĂŠ de nĂŠi nta spo retrouver la distinguĂŠ a ainsi pu en ĂŠe ng plo ne d’u ps le tem ses premiers jours, is ce dont Ma ce. ven jou de in apnĂŠe dans ce ba ’en t se douter, c’est qu personne ne pouvai ard nd Sta e, sag nis ver catiMINI, la veille du c vagues ave y avait dĂŠjĂ fait des Andrea Crews.

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Conception du stand piscine Ă balles TBWA \MAP Remerciements Christelle Delarue, Kevin Salembier, Julien Boissinot, Laurent BaulĂŠ (Bob Design) et Marco (Janvier).

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JEUX & LOISIRS Musique

PACMAN À L’OLYMPIA

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MUSIQUE

Electro 8-bits, rockers gamers et geeks  CHIPTUNE ª : après des nuits passÊes à buller devant la console, certains petits malins sont devenus musiciens sans solfège ni doubles croches. Cheap "

par Richard Gaitet & Fanny Menceur

ÂŤ 3RXU QRXV OD EDQGH RULJLQDOH GH Final Fantasy 7 FRPSWH SUHVTXH DXWDQW TXH OH Double Blanc des %HDWOHV Âť. Parole de nerd ? Pas tout Ă fait. On la doit Ă Jean Felzine, IURQWPDQ gominĂŠ du brillant trio rock-­yĂŠyĂŠ Mustang (voir encadrĂŠ). DĂŠbut octobre, la fĂŠline Anglaise Ebony Bones nous faisait cette FRQĂ€GHQFH VLPLODLUH Š Mario Bros 2 HVW PRQ MHX YLGpR IDYRUL /H SOXV PDUUDQW F¡HVW TXH OD EDVVH GH PRQ PRUFHDX We Know All About U [celui qui l’a rĂŠvĂŠlĂŠ DXSUqV GH OD %%&@ HVW GLUHFWHPHQW LQVSLUpH SDU OH WKqPH GX GHUQLHU QLYHDX ´WX GX GXÂľ GDQV OH FKkWHDX GH %URZVHU Âť Et mĂŞme les rigolos ahuris de Weezer eurent droit cet ĂŠtĂŠ, malgrĂŠ eux, Ă une compilation de leurs hits remixĂŠs 8-­bits*. Nos oreilles appuient donc sur reseW OD 3ULQFHVVH HW 7RDG PXVHV G¡XQ IXWXU $SKH[ 7ZLQ ? MA PUCE, MON AMOUR Le premier maxi du player ĂŠlectro lyonnais 2080, 1HUG 7R *HHN, est un bon exemple de cette mouvance inspirĂŠe des scores et des codes des consoles des annĂŠes 80. Sur 0D[LPL]HG, on redĂŠcouvre, sur un EHDW teigneux, tous les EOLSV et les EORXSV circa Nintendo NES, les climats d’errance d’un personnage hĂŠroĂŻque explorant seul un monde dangereux, ÂŤ perdant des vies Âť, ÂŤ regagnant de l’Ênergie Âť pour ÂŤ pFODWHU OH ERVV GH Ă€Q Âť. Bref, une ĂŠlectro de poche nappĂŠe de sonoritĂŠs enfantines. InvitĂŠs sur le titre Fatality (refrain : Š OD GpIDLWH F¡HVW SRXU OHV SHUGDQWV Âť), OHV UDSSHXUV GHV *RXUPHWV VLJQHQW XQ KRPPDJH giga-­rĂŠfĂŠrencĂŠ Ă l’esthĂŠtique 2D. 3XQFK OLQH avisĂŠe : ÂŤ ,PDJLQH 6XE =HUR HQ ERvWH DYHF XQH FRXSH GH FKDPS¡ Âť Plus loin, +HDUW 6KDSHG 3L[HO nous tirerait presque une larme (si nous ĂŠtions des robots) : on dirait un JpQpULTXH GH Ă€Q ORUVTXH OH KpURV UHQWUH FKH] OXL Il n’y a pourtant chez 2080 aucun emprunt Ă des bandes originales prĂŠexistantes. ÂŤ -H MRXH VHXOHPHQW GX IDLW TXH PHV V\QWKpV ² XQ '; RX OH 07 DYHF OHTXHO IXW FRPSRVp OH score de Monkey Island ² RQW XQH SXFH FRPPXQH DYHF FHOOH GH OD 0HJDGULYH '¡R O¡LPSUHVVLRQ GH GpMj HQWHQGX 0DLV FH Q¡HVW TX¡XQH

LQĂ XHQFH SDUPL G¡DXWUHV HQWUH *LRUJLR 0RURGHU 3URGLJ\ HW -HDQ 0LFKHO -DUUH /D PXVLTXH GH MHX YLGpR HVW XQ JHQUH j SDUW HQWLqUH Âť Il prĂŠcise assez fermement : ÂŤ -H QH IDLV SDV GH chiptune -¡DL PrPH SHXU GH PHWWUH OHV SLHGV GDQV FHV VRLUpHV Oj GH SHXU TXH GHV KDUGFRUH JDPHUV PH MHWWHQW GHV *DPH %R\ j OD Ă€JXUH Âť Chipwhat ? DÉTOURNEMENT LO-­TECH Le chiptune, pour chip (puce ĂŠlectronique) et tune (air musical), est une relecture pop et rĂŠtro-­futuriste des bandes-­sons des jeux vidĂŠo eighties 5pIpUHQFHV l’Anglais Rob Hubbard (0RQW\ RQ WKH 5XQ, 1985) et le Japonais Koji Kondo (Super Mario, 1983, Zelda, &HV 3LHUUH +HQU\ GX JDPLQJ ont inspirĂŠ toute une gĂŠnĂŠration de bidouilleurs, de Teamtendo aux Allemands de Mikron 64 ou le collectif japonais YMCK. En 2000, Role Model, un jeune ingĂŠnieur VXpGRLV WUDQVIRUPD OD *DPH %R\ HQ PLQL VWDWLRQ GH production, et lança en toute illĂŠgalitĂŠ une cartouche appelĂŠe Little Sound DJ, qui permettait de copier une sonate de Beethoven aussi bien que d’Êcrire ses propres morceaux chip. Prometteurs, les AmĂŠricains Bitshifter et Nullsleep ont fondĂŠ le label 8bitpeoples et pixelisent depuis 2002 les GDQFHĂ RRUV new-­yorkais via des gimmicks drum’n’bass. Sidabitball est quant j OXL OD FRTXHOXFKH GH OD VFqQH chiptune hexagonale, PDOWUDLWDQW VXU VFqQH GHV FRQVROHV PRGLĂ€pHV recyclant les jouets de son enfance et bricolant ses synthĂŠtiseurs avec un sens aigu du crossover funk/ breakbeat/noise. Art pirate, transformant un produit de consommation de masse en appareil crĂŠatif, le chiptune prĂŞche le dĂŠtournement et le collage poĂŠtique des objets cassĂŠs. En revendiquant l’amateurisme Ă travers une nouvelle ĂŠcriture numĂŠrique, c’est une rĂŠponse OR WHFK Ă la musique ĂŠlectronique lĂŠchĂŠe, surproduite. Le prochain Justice, chip ou cheap ? — * :HH]HU 7KH ELW DOEXP (Pterodactyle Squad), tĂŠlĂŠchargeable sur ptesquad.com

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SPÉCIAL JEUX 0XVLTXH VXLWH

« Ça finit par rentrer dans l’ADN. » Entre la manette et le micro, ils n’ont pas su choisir. Select.

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Nerd To Geek Gourmets Recordingz Live!

Le 12 février et le 13 mars à Lyon.

© DR

« Ado, la seule musique que j’écoutais en boucle, c’était les bandes-originales de mes jeux préférés. L’intro de Captain Blood sur Amstrad CPC 6128 a été mon premier coup de foudre musical. C’était une adaptation d’un morceau de Jean-Michel Jarre. J’ai appris mon solfège avec Chris Hülsbeck (Turrican), David Whittaker (Shadow of the Beast) et Michel Land (Monkey Island). C’est donc tout naturellement que ces influences vidéoludiques se retrouvent aujourd’hui dans mon travail. Mon iPod est rempli à 75 % de musique de jeux. »

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MUSIQUE

« J’ai peur de mettre les pieds dans des soirées chiptune de peur que des hardcore gamers me jettent des Game Boy à la figure. »

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Liqid (Les Gourmets) « Je suis un inconditionnel des musiques de Yuzo Koshiro. Je me rappelle avoir aperçu son nom dans le générique de Streets Of Rage et m’être dit : « Big up pelo ! » Je reste hanté par cette bande originale, comme par la petite mélodie qui intervenait sur la carte dans Golden Axe. Notre approche de la musique est profondément imprégnée par ce background. Notre morceau Fatality reprend les règles de mise à mort de Mortal Kombat et sert également de générique pour un futur documentaire sur les jeux de combat. »

Tout doit disparaître en téléchargement gratuit sur gourmets-music.com Gourmets Recordingz Live!

© HUGO JUILLARD/BLAISE ARNOLD

Le 29 janvier à Rennes.

Jean Felzine

(Mustang) « On adore particulièrement les musiques de jeux vidéo des années 90, c’est avec eux qu’on a grandi. Nos favoris, niveau bandes originales : Zelda Majora’s Mask, Chrono Trigger, Final Fantasy 7, Monkey Island 2, Streets of Rage. On a été marqués par Koji Kondo (Zelda, Mario) et Nobuo Uematsu (Final Fantasy), qui composaient de vrais thèmes. Avec souvent des digests de tous les styles et des pastiches : calypsos, ragtimes, boléros, reggaes, classique. Ces mélodies nous collent à la peau et ressortent inconsciemment dans les compos, au même titre que Suicide ou Bo Diddley. Ça finit par rentrer dans l’ADN. Final Fantasy 7 compte presque autant pour nous que le Double Blanc des Beatles. »

A71 A Rag / Sony Live!

Le 28 janvier à La Cigale (Paris), le 5 février à Saint-Brieuc, le 13 à Saint Croix Volvestre et le 17 à Nantes.

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SPÉCIAL JEUX Musique

 J’ESSAIE D’ARRÊTER LE 1000 BORNES  entretien Richard Gaitet

Super-groupe au blues vÊnÊneux, THE DEAD WEATHER se la joue brelan d’as. D’ici à la seconde averse annoncÊe pour 2010, souvenirs ludiques et quiz rock en compagnie de Jack White et Alison Mosshart.

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)DLWHV VDXWHU OD EDQTXH FRPELQDLVRQ JDJQDQWH -DQYLHU OH 5RL GH &¹XU GHV :KLWH 6WULSHV FHWWH IRLV j OD EDWWHULH V¡DVVRFLH j OD 'DPH GH 3LTXH GHV .LOOV SRXU XQH SDUWLH GLDEROLTXH à DQTXpV G¡XQH SDLUH GH &DYDOLHUV SLRFKpV FKH] OHV 5DFRQWHXUV HW OHV 4XHHQV 2I 7KH 6WRQH $JH 'L[ PRLV SOXV WDUG j O¡2O\PSLD OHV ORJHV VRQW parcourues par des roadies FRVWXPHV FUDYDWHV HW FKDSHDX[ WUqV 1RXYHOOH 2UOpDQV HW OD WRXUQpH GH 7KH 'HDG :HDWKHU V¡DFKqYH VDQV WHPSV PRUW /¡DSUqV PLGL WUqV SUR -DFN FKHYHX[ FRUEHDX VDOXH HW VH UHFRLIIH HQ VH PDWDQW GDQV OH PLURLU DORUV TX¡$OLVRQ pWHLQWH QH GLW SUHVTXH ULHQ (OOH IXPH ULW TXHOTXHIRLV ² MH FURLV VXUWRXW TX¡HOOH QH FRPSUHQG SDV FH TXH MH GLV 0L GpFHPEUH ils repartiront à Nashville pour enregistrer,  une vingtaine de morceaux dont trois ou TXDWUH WHVWpV VXU VFqQH FH TXL FRPSRVHUD OHXU VHFRQG GLVTXH

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MUSIQUE

Primo, Jack, Alison : quelle place a le jeu dans votre vie ? Jack White : 9RXV VDYH] F¡HVW GU{OH SDUFH TXH mon jeu prĂŠfĂŠrĂŠ est un jeu de cartes français : le 1 000 bornes. C’est tellement addictif que j’essaie mĂŞme d’arrĂŞter ! Pendant les tournĂŠes des White Stripes, Meg [White] et moi, on y jouait dans le bus, et si vous ouvrez la pochette de /DID\HWWH %OXHV, notre GHX[LqPH WRXUV YRXV YHUUH] XQH SKRWR DYHF GHV tas de cartes de 1 000 bornes. Alison Mosshart : Il faut des cartes spĂŠciales ? Jack : 2XL 7X DYDQFHV GH GHX[ FHQWV NLORPqWUHV je t’envoie un pneu crevĂŠ. Moi j’avance de cent NLORPqWUHV HW SDI WX PH FROOHV XQ IHX URXJH ,O IDXW VH VWRSSHU PXWXHOOHPHQW OH FRQFHSW HVW WUqV IXQ $ TXDQG UHPRQWH OD GHUQLqUH IRLV TXH MH PH VXLV amusĂŠ comme ça, trois ans ? [Il rit] Alison : Moi, mon jeu favori, c’est le rami. J’y jouais DYHF PD IDPLOOH TXDQG M¡pWDLV SHWLWH 8Q UDPL WUqV prĂŠcis, le premier joueur prend dix cartes, le second onze. Jack : Ah ? chez moi, c’Êtait sept cartes. Alison : -H SUpIqUH GH ORLQ oD DX[ MHX[ YLGpR -¡DGRUH OH Ă LSSHU DXVVL ÂŤ Glisser un Jack : Ce qui est simple est superbe. morceau *DPLQ M¡DYDLV WRXWH XQH FROOHFWLRQ GH Ă LSSHUV PpFDQLTXHV /HV MHX[ YLGpR dans un jeu VRQW FRPPH GHV Ă€OPV PDLQWHQDQW /HV vidĂŠo, c'est le seul moyen mĂ´mes rentrent de l’Êcole et [soupir] se FROOHQW GHYDQW ² DXWDQW GH SHUVRQQHV TXL d’attirer n’Êcoutent pas de musique. Et lĂ , ton label l’attention te dit que ce serait cool si tu parvenais Ă des kids. Âť glisser un morceau dans un jeu, car c’est le seul moyen d’attirer l’attention des kids. Jack White Je ne sais mĂŞme pas si c’est le cas pour 7KH 'HDG :HDWKHU 6L " >2XDLS XQ Š SDFN ÂŞ avec +DQJ <RX )URP 7KH +HDYHQV, No Hassle Night et Treat Me Like Your Mother est tĂŠlĂŠchargeable dans 5RFN %DQG]. Les gosses ne sont pas assez exposĂŠs Ă la musique, c’est triste. On leur dit : amusez-­vous. OK, allez-­y, ĂŠclatez-­vous. Mais‌ qu’est-­ce ce qui cloche avec la sociĂŠtĂŠ amĂŠricaine ? Moi, j’ai un jeu pour vous. C’est le quiz rock le plus facile du monde. Go ? Jack & Alison : *R

Live From The Third Man West EP

et toujours Horehound

7KLUG 0DQ Records/Sony

Quel est le point commun entre Elvis Costello, Goldfrapp et The Dead Weather ? A – Tous leurs membres se nourrissent exclusivement de beurre de cacahuète B – Tous leurs membres sont en rĂŠalitĂŠ des femmes, mais ne l’assument pas trop C ² 7RXV OHXUV PHPEUHV VRQW DPRXUHX[ G¡XQH Ă€OOH nommĂŠe Alison Jack : [Ils ĂŠclatent de rire] C’est probablement B ou C.

Disons C. Car si tous les membres sont en rĂŠalitĂŠ des IHPPHV F¡HVW WUqV IDFLOH j YpULĂ€HU 5DMRXWH] XQH Ă€OOH j O¡LQWpULHXU G¡XQH EDQGH GH PHFV ² GDQV OD YLH RX HQ VWXGLR ² HW OHV FKRVHV GHYLHQQHQW pODVWLTXHV Alison : dD GHYLHQW XQH IDPLOOH GHV IUqUHV &H TXL PH PDQTXH HQ JpQpUDO 0DLV DXFXQ Q¡HVW VHFUqWHPHQW amoureux de moi. Jack : 3DV VHFUqWHPHQW RXYHUWHPHQW &¡HVW XQH WURXSH ² RX XQ JDQJ ² PDLV PL[WH Quelle reprise royale ouvre le nouveau EP de The Dead Weather ? A – Bohemian Rhapsody de Queen B – La version de God Save The Queen des Sex Pistols C – Forever My Queen de Pentagram Jack : Ça fait un paquet de reines Ă choisir ! )RUHYHU 0\ 4XHHQ GH 3HQWDJUDP XQ WUqV ERQ groupe heavy metal amĂŠricain des seventies, issu GH O¡qUH %ODFN 6DEEDWK %OXH &KHHU (Q WRXUQpH DYHF 7KH 5DFRQWHXUV OH EDWWHXU 3DWULFN .HHOHU PH O¡D MRXp dans la voiture et je me suis dit : ÂŤ cette chanson est vraiment ĂŠnorme Âť. Avec un nom pareil, je pensais que c’Êtaient des satanistes des annĂŠes 80. Qui a dĂŠclarĂŠ : ÂŤ -¡DGRUHUDLV YUDLPHQW MRXHU GH OD batterie dans un groupe avec Jack White. C’est un type très intĂŠressant. Âť ? A – Jacques Chirac B – Lenny Kravitz C – Phil Collins Jack : Ça ne peut pas ĂŞtre Phil, il ne joue plus de EDWWHULH % 2Q P¡D VRXIĂ p oD RXL 0DLV /HQQ\ D balancĂŠ ça histoire de botter le cul d’un journaliste. -RXHU DYHF OXL " -H SUpIqUH TXDQG OHV FKRVHV VH IRQW spontanĂŠment, pas Ă cause d’un magazine. (QĂ€Q TXL IXW OH PHLOOHXU (OYLV DX FLQpPD " A – Val Kilmer dans True Romance [Tony Scott, 1993], parce qu’on ne le voit jamais B – Jack White et sa dĂŠmonstration de karatĂŠ dans Walk Hard [Jake Kasdan, 2007] C – Le King lui-­mĂŞme dans King Creole [Michael Curtiz, 1958] Jack White : /H .LQJ OXL PrPH &¡HVW XQH WUqV ERQQH question, car Ă cette ĂŠpoque, Presley sombre dans l’autocaricature. Il ne joue pas la musique qu’il veut, QH WRXUQH SDV OHV Ă€OPV TX¡LO YHXW OH &RORQHO 3DUNHU dicte tout. Alors Elvis devient le meilleur imitateur G¡(OYLV -¡DL YX OD SOXSDUW GH VHV Ă€OPV 6XU Walk Hard, une part de moi me rĂŠpĂŠtait de ne pas m’en moquer, je l’aime tellement. C’est un saint. Quelqu’un d’incroyablement talentueux, qui n’a pourtant jamais ĂŠcrit une seule chanson, c’est si bizarre. Un performer total. J’ai tant de respect pour lui. Alison : Oui mais toi, tu joues beaucoup mieux ! —

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SPÉCIAL JEUX Musique

ÂŤ Ni oui, ni non, ni ni Âť

L’album

Epique bataille de jouets

par Mauve Leroy

Peplum

Cityslang Live!

Le 11 IpYULHU DIĂ€FKH partagĂŠe avec Mina 7LQGOH

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pour les ĂŠcouter. SĂŠbastien : Par exemple, sur le disque, on a trois interludes sur lesquels l’un d’entre nous fait exactement ce qu’il veut pendant trente-­trois secondes, et dans Minute Song, il y a des doubles croches jouĂŠes Ă la boĂŽte de conserve. Vous faites presque tous partie d’autres groupes : Please Don’t Blame Mexico!, Mina Tindle, ÂŤ On peut parler deux heures Tahiti de l’esthĂŠtique d’un biscuit. Âť Boy, The Limes. Pour SĂŠbastien, Toy Fight l’amour de jouer ? Jean : Ça permet surtout de collaborer Jean : On n’a pas cette prĂŠtention. autour de belles idĂŠes. Mais +RUV GH O¡(XURSH HW GH O¡$PpULTXH M¡DLPH ELHQ WRXUQHU DYHF 7R\ )LJKW du Nord, il y a des groupes de parce qu’on peut passer deux pop incroyables qui n’intĂŠressent heures Ă parler de l’esthĂŠtique personne parce qu’ils ne renvoient d’un biscuit dans le van. Parfois pas assez une image de coolitude aussi Bertrand nous raconte occidentale. l’histoire de la conquĂŞte du David : Ou parce qu’il y a trop de poivre. musiciens et pas assez de gens Donnez-­nous une raison de croire que vous serez toujours de la partie l’an prochain ? Jean : ,O UHVWH WURLV DQV DYDQW OD Ă€Q du monde, c’est pas le moment de jeter l’Êponge. Maxime : La force d’inertie. Pourquoi avez-­vous l’impression de sortir du lot ? Maxime : On ne sort pas du Lot, on est parisiens.

On vous a dĂŠjĂ confondu avec un autre groupe – Stinky Toys, Fair Sex Toys ? Maxime : Les Belges et les Allemands nous appellent souvent 7R\ )OLJKW Jean : J’ai un pote ashkĂŠnaze qui QRXV DSSHOOH *R\ )LJKW A part de la musique, vous jouez Ă quoi ? Maxime : En tournĂŠe, beaucoup au poker et Ă PES. Sinon on joue Ă LPLWHU 0RUVD\ >Š WUXDQG OD JDOqUH ÂŞ GH &OLJQDQFRXUW FpOqEUH SRXU son tube 2Q V¡HQ EDW OHV FRXLOOHV]. Cet homme est une source d’inspiration inĂŠpuisable. Jean : On fait aussi des parties de ÂŤ ni oui, ni non, ni ni Âť. C’est toujours David qui gagne, car il est WUqV UXVp Vous ferez quoi quand vous serez vieux ? Maxime : On jouera au poker, Ă PES et on imitera Morsay. Mais sans les concerts au milieu. — Š DR

SignÊ sur l’exigeant label Cityslang, le sextet parisien de pop dÊbraillÊe TOY FIGHT aime jouer sur les mots. Ci-dessous, l’heure de la rÊcrÊ.

En 2006, Toy Fight ĂŠtait un trio autoproduit, trois ans après c’est un sextet signĂŠ sur le label allemand Cityslang (Tortoise, Vic Chesnutt). La pop de leur second album livre bataille Ă la mĂŠdiocritĂŠ au moyen de mandoline, banjo, glockenspiel, piano, farfisa, mĂŠlodica ou boĂŽtes de conserve. On retrouve des discours de valeureux guerriers toujours un peu mystĂŠrieux (Les Indes Noires) et très poĂŠtiques (Trucmuche). Tout Peplum cache une dĂŠclaration d’amour. M. L.

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SHIT BROWNE Photographie Olivia Fremineau Stylisme Jean-­Marc Rabemila Assisté de Megumi Yabushita Coiffure Daniela faurel Assistée de Tracy Fesneau Modèles Thibault Browne, Benjamin Browne, Denis Browne, Sébastien Browne, Hadrien Browne Remerciements Studio LNA

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Thibault polo Lacoste veste Thierry Mugler pantalon Uniqlo cravate Charles Georges bottines Philippe Zorzetto %HQMDPLQ chemise Agnès b blouson K-­way bermuda Thierry Mugler chaussettes American Apparel tennis Springcourt Denis polo Lacoste blouson American Apparel pantalon M’s Braque chaussettes American Apparel chaussures Sebago Sebastien chemise Paul&Joe blouson Fred Perry bermuda Y-­3 chaussettes American Apparel mocassins Rivieras Hadrien chemise Lacoste pantalon Redskins montre Casio tennis Feiyue

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every single penny Will Be Reinvested In The Party

$VSKDOW 'XFKHVV (sortie prévue HQ PDUV

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Le quintet parisien Shit Browne (marron caca) ressuscite l'esprit Madchester façon Happy Mondays. Et n'entre dans aucune case.

La fois où vous vous êtes VHQWL SLRQ " Sébastien (guitare/voix) : Hier, en plein déménagement avec une grosse gueule de bois et une bonne tête de clochard, en passant là où je gare mon cher vélo, j’ai vu que la grille avait été sciée et qu’il avait disparu. Le problème est que j’avais l’impression d’avoir déjà vécu cette scène de nombreuses fois. Denis (guitare) : Pendant un concert, trop ivre pour jouer, je tenais à peine debout. Hadrien (batterie) : Quand j’ai commencé à travailler dans la musique. Thibault (claviers) : Chaque fois que je me rends compte que je suis devenu le « bon copain ». Benjamin (basse) : Au tirage au sort à chou-fleur pour déterminer les équipes au foot. Dernier avec le petit gros. La fois où vous êtes senti ZLQQHU " Sébastien : Quand un des gars du Deaf Institute de Manchester, un habitué de l’Haçienda, a dit qu’il adorait ce qu’on faisait et qu’il fallait qu’on vienne jouer là-bas. Thibault : Quand on a joué Winter collection pour la première fois en concert. Hadrien : Quand j’ai commencé à travailler dans la musique. Denis : Quand le premier single de Shit Browne est sorti. Benjamin : Ecstasy motherfucker ! $ TXRL WX MRXHV " Sébastien : Je tape les réponses d’une main et de l’autre je fais l’hélicoptère avec

ma quéquette. Denis : Au docteur. Hadrien : Au lapin blanc. Thibault : A GTA : The Ballad of Gay Tony en buvant du Comte de Serac. Benjamin : Un peu de kazoo. Le titre du disque : Tout l’argent gagné sera réinvesti dans la party. La musique, c’est ludique DYDQW WRXW " Hadrien : On sera cinq pendant cette fête. C’est égoïste avant tout. Denis : Oui, absolument. On joue d’un instrument après tout. C’est du travail, mais si ce n’est plus amusant, pas la peine de se donner du mal. Sébastien : La musique est tout, donc tous les adjectifs possibles autant que leurs contraires et une infinité de combinaisons. Benjamin : (…) Thibault : La musique est 1) libre : l’activité doit être choisie pour conserver son caractère ludique 2) séparée : circonscrite dans les limites d’espace et de temps 3) incertaine : l’issue n’est pas connue à l’avance 4) improductive : qui ne produit ni biens, ni richesses (même les jeux d’argent ne sont qu’un transfert de richesse) 5) réglée : elle est soumise à des règles qui suspendent les lois ordinaires 6) fictive : accompagnée d’une conscience fictive de la réalité seconde. Si on suit cette définition de Roger Caillois, oh que oui ! — Entretien Magali Aubert

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Hadrien polo Lacoste gilet Thierry Mugler bermuda Gaspard Yurkievich chaussettes American Apparel chaussures Lacoste Denis pull Superdry blouson G.Star echarpe et chaussettes American Apparel tennis Lacoste Page suivante %HQMDPLQ pull Xavier Brisoux blouson Schott short Desigual casque A.style Thibault chemise Blaak veste Lacoste Bermuda Fred Perry Sebastien chemise Blaak blouson Lacoste

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Sebastien chemise Dockers veste De Fursac pantalon Emanuel Ungaro cravate Paul&Joe gants Agnelle chaussures Philippe Zorzetto Denis chemise François Legendre veste Gaspard Yurkievich pantalon Blaak cravate Thierry Mugler gants Agnelle chaussures Gaspard Yurkievich Hadrien chemise et costume De Fursac cravate Thierry Mugler gants Agnelle chaussures Paul&Joe %HQMDPLQ chemise Paul Smith veste Emanuel Ungaro pantalon Dormeuil cravate Charvet chaussures Pierre Hardy Thibault chemise Emanuel Ungaro veste Paul Smith pantalon Agnès b cravate Charvet gants Agnelle bottines Philippe Zorzetto

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SPÉCIAL JEUX SociÊtÊ

-HX[ G¡DUJHQW " &DVLQRV gains illico et banditsmanchots sont interdits dans la capitale. Mais qu’en est-il des CERCLES DE JEUX PARISIENS qui dĂŠcrochent le monopole GX EXVLQHVV FDVK OXGLTXH " Immersion dans les salons.

par LĂŠo Bourdin illustration NoĂŠmie Rosset

En France, le code pĂŠnal interdit les jeux d’argent sauf autorisation (voir encadrĂŠ). Parmi les rĂŠglementations sibyllines, on trouve la notule : ÂŤ SDV GH FDVLQRV j PRLQV GH NP GH OD FDSLWDOH Âť. Pourtant, depuis le dĂŠbut du VLqFOH GHUQLHU GH GLVFUqWHV LQVWLWXWLRQV WLHQQHQW OH KDXW du pavĂŠ Ă coups de jetons de 1 000 euros, tables de SRNHU HW Ă€QDQFHPHQWV RSDTXHV (QWURQV GROS CALIBRES Ă€ L’A. C. F. A la diffĂŠrence des casinos, lieux de perdition de PDVVH R VH FURLVHQW YDFDQFLHUV HQ VKRUW HW SULQFHV arabes en berline, la dizaine de cercles de jeu parisiens sont rĂŠservĂŠs Ă une population d’initiĂŠs. Bien qu’ils aient pignon sur rue, la plaque indique ÂŤ club privĂŠ Âť. Il faut dĂŠcliner son identitĂŠ et s’acquitter d’une cotisation annuelle qui varie de 30 Ă 100 euros. /H SOXV FpOqEUH OH SOXV SULVp HVW LQFRQWHVWDEOHPHQW l'Aviation Club de France (ÂŤ O¡$ & ) Âť, pour ĂŞtre dans OH FRXS 6LWXp VXU OHV &KDPSV (O\VpHV LO EpQpĂ€FLH

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d’une renommĂŠe internationale depuis qu’en 2002, OD SUHPLqUH pWDSH KRUV FRQWLQHQW GX :RUOG 3RNHU 7RXU IDPHX[ FLUFXLW SURIHVVLRQQHO DPpULFDLQ \ D HX lieu. Boiseries d’Êpoque, mobilier feutrĂŠ : ce standing MXVWLĂ€H TXH V¡\ GpURXOHQW OHV SOXV LPSRUWDQWHV SDUWLHV de la rĂŠgion. Mais contentez-­vous de cette brochure touristique : les salons privĂŠs de cette envergure sont rĂŠservĂŠs aux ÂŤ high rollers Âť, gros calibres capables de PLVHU GHV PLOOLHUV G¡HXURV VXU XQ EUHODQ 9RXV YRXOH] IDLUH XQH HQWRUVH j YRWUH EXGJHW " 5HSRUWH] YRXV j notre sĂŠlection des salons frĂŠquentables (voir encadrĂŠ). &RXVLQV pORLJQpV GHV Š VDOOHV ÂŞ OHV FHUFOHV GLIIqUHQW sensiblement en termes de nature des jeux. Pas de URXOHWWHV QL PDFKLQHV j VRXV PDLV %ODFNMDFN 9HJDV RX 3XQWR %DQFR HW VXUWRXW 7H[DV +ROG¡HP HQ SOHLQ ERXP depuis dix ans, qui change la physionomie du poker : les joueurs n’affrontent plus la ÂŤ banque Âť mais leurs alter-­ego, ce qui est beaucoup moins risquĂŠ en facteur GH FKDQFH ² O¡pWDEOLVVHPHQW VH FRQWHQWH GH SUpOHYHU XQH Š WDLOOH ÂŞ XQH WD[H VXU OH PRQWDQW Ă€QDO GH FKDTXH SRW SOCIOLOGIE DU GAMBLER Cette nouvelle donne a transformĂŠ les parties. Se SUHVVH DX[ WDEOHV GX 7H[DV +ROG¡HP WRXW DOFKLPLVWH GH OD Ă DPEH 8QH IDXQH KpWpURJqQH j FDVWHV 'DQV OD famille La Chance, on trouve d’abord le ÂŤ semi-­pro Âť, ÂŤ requin Âť ou ÂŤ regular Âť, qui passe son temps Ă tenter d’Êchanger des jetons de cĂŠramique en monnaie VRQQDQWH HW WUpEXFKDQWH ² F¡HVW WRXW VLPSOHPHQW son gagne-­pain. Il est lĂ toutes les nuits et tire son ĂŠpingle du jeu grâce Ă sa connaissance des stratĂŠgies (et sa facultĂŠ Ă dĂŠplumer les nĂŠophytes). Il salue les FURXSLHUV FRPPH GHV FROOqJXHV /HV ERQV PRLV VRQ salaire varie de 10 000 Ă 30 000 euros. Les ÂŤ young gunners Âť, c’est la gĂŠnĂŠration Internet. Ils ont fait leurs classes en ligne et se frottent parfois Ă des adversaires en chair et en os. Look : casquette Ă l’envers, hoodys dĂŠlavĂŠs, ĂŠcouteurs aux oreilles. 0DOJUp OHXU H[SpULHQFH LOV pSURXYHQW GHV GLIĂ€FXOWpV Ă s’adapter au live. Le ÂŤ cagoulĂŠ Âť, c’est l’accro. Il accumule les dettes et attend qu’un ami fasse un gros

ÂŤ Ça va de l’aigri qui critique tous tes coups Ă la racaille qui te sort “ Couche toi ou je te dĂŠfonce â€?. Âť

Alexis, 24 ans. FRXS SRXU OXL VRXWLUHU TXHOTXHV ELOOHWV 7HO XQ ]RPELH il erre de cercle en cercle Ă la recherche de la partie qui lui permettra de se refaire. Peu importe qu’il gagne RX TX¡LO SHUGH j OD Ă€Q LO HVW WRXMRXUV GDQV OH URXJH (QĂ€Q FRPPHQW DSSHOOH W RQ OH GpEXWDQW TXL DWWHUULW lĂ par hasard ? ÂŤ Touriste Âť, ÂŤ Ă€VK Âť. Cible privilĂŠgiĂŠe des ÂŤ requins Âť, il ne maĂŽtrise pas les codes et arrose ses SDUWHQDLUHV DX Ă€O G¡HUUHXUV VWUDWpJLTXHV VH FRQWHQWH souvent de siroter son coca gratuit en ponctuant le

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SOCIÉTÉ

InterprÊtation de l’icône byzantine religieuse La Descente aux Enfers.

Ă RW GH VHV PDODGUHVVHV SDU GHV DEHUUDWLRQV TXL RQW le mĂŠrite de lui donner bon dos‌ ÂŤ GH WRXWH IDoRQ DX SRNHU MH QH MRXH SDV OHV FDUWHV MH MRXH OH FURXSLHU Âť, ÂŤ MH SUpIqUH WRXW SHUGUH PDLQWHQDQW FRPPH oD MH SHX[ PLHX[ UDFKHWHU GHV MHWRQV GHUULqUH Âť. PROIES FACILES Dans la famille Malchance, il y a le ÂŤ mec bourrĂŠ Âť. Il se pointe vers trois heures du mat’, Ĺ“il pĂŠtillant du fĂŞtard et luciditĂŠ en berne. Son taux d’alcoolĂŠmie fait de lui une proie facile et ses pires ennemis sont le barman et le distributeur de billets. Le ÂŤ degenerated JDPEOHU ÂŞ OXL HVW XQ Ă DPEHXU IRX TXL QH V¡DUUrWH pas tant qu’il n’a pas tout perdu. Souvent d’origine asiatique, il vient de se faire raser Ă la table de Punto Banco et joue sur son plafond de carte bleue. Sortant toujours Ă poil ĂŠgalement, le ÂŤ lascar Âť porte des lunettes de soleil de contrefaçon. AffublĂŠ d’une petite sacoche en croco, il arrose la table de petites coupures, maĂŽtrisant plus volontiers la gouaille SDULVLHQQH TXH OHV ERQV FRXSV 4X¡LO V¡HQ WLUH WUqV ULFKH RX WUqV SDXYUH LO VH WHUPLQH TXRLTX¡LO DUULYH DX

La loi

Toi, jeune Nasbinalais* du 4-8, beau, sexuellement Joue pas, joue actif, au salaire pas comme ça mensuel brut de 1 367,86 euros, tu frimes dans ta Polo II 4 cylindres vintage, tu es le roi du monde. Ton image ne saurait ĂŞtre parfaite sans ton activitĂŠ favorite : les jeux d’argent. Après t’être entraĂŽnĂŠ des nuits entières sur ton PC Windows 95, 2 549 victoires sur 7 734 parties jouĂŠes, hier soir tu as ratatinĂŠ Thebigboss67, champion du poker en ligne. Pour fĂŞter ça, tu dĂŠcides de te frotter au rĂŠel, histoire de montrer qui c’est le plus fort.

Le problème, c’est ta mignonne petite commune, Nasbinals, 500 habitants au compteur. Car, jeune padawan, grâce Ă des gĂŠnĂŠrations de lĂŠgislateurs un peu zĂŠlĂŠs en 1810, 1907, 1988 et 2006, ton pays est arrivĂŠ Ă un imbroglio de lois autorisant les casinos en activitĂŠ Ă le rester mais interdisant l’ouverture de nouveaux cercles de jeu dans toute ville qui n’est pas une station touristique – sous couvert d’approbation du ministère de l’IntĂŠrieur. Tu habites Ă plus de 340 bornes de Cannes, un minimum pour un monstre du tapis comme toi, non ? Anne-Sophie Meyer

* Habitant de Nasbinals, Lozère.

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SPÉCIAL JEUX SociÊtÊ

pendant plus de deux ans : ÂŤ 3DUIRLV F¡HVW GX JUDQG Q¡LPSRUWH TXRL ,O \ D GHV PHFV DX VDQJ FKDXG TXL QH VXSSRUWHQW SDV GH SHUGUH HW PHWWHQW GHV JURV FRXSV GH SUHVVLRQ dD YD GX W\SH DLJUL TXL FULWLTXH WRXV WHV FRXSV j OD JURVVH UDFDLOOH TXL WH VRUW ´Couche-­toi ou je te dĂŠfonceâ€? ÂŞ 6L OH Ă RRU QH OHV UHPHW SDV YLWH j OHXU SODFH oD GHYLHQW UDSLGHPHQW OD IRLUH G¡HPSRLJQH Âť Et de poursuivre sur l’attitude de certains croupiers qui ÂŤ VH FURLHQW WRXW SHUPLV /¡XQ G¡HQWUH HX[ UHJDUGDLW PHV FDUWHV DORUV TXH M¡pWDLV HQ SOHLQ FRXS HW FRPPHQWDLW PRQ MHX -¡pWDLV WHOOHPHQW RXWUp TXH MH PH VXLV EDUUp 'DQV FHV FDV Oj LO IDXW IDLUH PDUFKHU OD FRQFXUUHQFH HW DOOHU DLOOHXUV KLVWRLUH GH PRQWUHU DX[ Ă RRUV TX¡RQ Q¡HVW SDV TXH GHV YDFKHV j SRJQRQ Âť Le Cercle Wagram YRLU HQFDGUp HVW O¡XQ GHV SOXV FKDXGV HQ OD PDWLqUH D’autres cercles plus ou moins malfamĂŠs usent de techniques frauduleuses pour dĂŠlester leurs clients. Un ancien croupier tĂŠmoigne : ÂŤ J’ai GHDOp [distribuĂŠ les cartes] SHQGDQW VL[ PRLV VXU OHV *UDQGV %RXOHYDUGV 2Q QRXV DSSUHQDLW j IDLUH GHV IDXVVHV FRXSHV SRXU FUpHU GHV DFFLGHQWV HW IDLUH JDJQHU OD EDQTXH 8Q VRLU XQ PHF DYHF OH FXO ERUGp GH QRXLOOHV DYDLW IDLW HXURV HQ XQH KHXUH DX %ODFNMDFN /H VWDII OXL D RIIHUW XQH ERXWHLOOH SRXU IrWHU VD YLFWRLUHÂŤ HW D UpFXSpUp OH FDVK HQ PRLQV G¡XQH GHPL KHXUH Âť

%ODFNMDFN FRPPH GDQV OHV Ă€OPV DYHF GH 1LUR Et puis il y a ÂŤ l’ÊlĂŠphant Âť, qui traĂŽne dans les cercles GHSXLV O¡pSRTXH GX 3LJDOOH GH 0HOYLOOH 9LHX[ EULVFDUG fantomatique, il connaĂŽt tous les trucs et s’adapte aux modes. Adversaire redoutable, il ĂŠcume les grosses tables de FDVK JDPH MXVTX¡j WUqV W{W SUpIqUH OHV variantes ĂŠrudites comme le Omaha ou le Badugi, voire une bonne partie de tarots ou de backgammon. Encadrant ces petites fratries, les croupiers sont le FKDUERQ GHV pWDEOLVVHPHQWV 7HOOHV G¡LQIDWLJDEOHV IRXUPLV LOV VH UHODLHQW DX[ WDEOHV LQVXIĂ HQW OH rythme, comptent minutieusement les jetons et rappellent Ă l’ordre les ĂŠtourdis. MaĂŽtres de cĂŠrĂŠmonie en terrain ludique, rĂŠmunĂŠrĂŠs aux pourboires, ils sont souvent ÂŤ fĂŠtichĂŠs Âť par les joueurs Ă hauteur de 2 Ă 10 euros par sĂŠquence. Un bon croupier gagne en moyenne 1 500 euros par mois, cela variant en fonction de la gĂŠnĂŠrositĂŠ des clients et de son anciennetĂŠ. Au-­dessus d’eux, le Ă RRU est un genre de maĂŽtre d’hĂ´tel. PrĂŠsent pour veiller au respect des UqJOHV HW RUJDQLVHU OHV MHX[ %RQ PDQDJHU LO FRQQDvW ses habituĂŠs et tranche en cas de litige. VACHE Ă€ POGNON ET POULE AUX Ĺ’UFS D'OR Parmi les habituĂŠs, certains JDPEOHQW chaque mois l’intĂŠgralitĂŠ de leur paye. Alors, la tension prend parfois le pas sur le divertissement, et la tenue correcte n’a plus qu’un sens vestimentaire. Alexis, ĂŠtudiant de 24 ans, a frĂŠquentĂŠ les cercles parisiens

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AS DE PIQUE ET POLÉMIQUES L’histoire de la liquidation judiciaire du Cercle Concorde, rue Cadet (9e), est assez reprĂŠsentative des GpULYHV /D GLYLVLRQ GHV 5HQVHLJQHPHQWV *pQpUDX[ FKDUJpH GH OD SROLFH GHV MHX[ O¡D IHUPp HQ DSUqV avoir dĂŠmontrĂŠ qu’il avait ĂŠtĂŠ largement alimentĂŠ par le grand banditisme. FrĂŠdĂŠric Ploquin, journaliste Ă Marianne, dĂŠtaille dans l’enquĂŞte 3DUUDLQV HW &DwGV (2005) la ÂŤ SUpGLVSRVLWLRQ TXH SRVVqGH OD PDĂ€D FRUVH j IDLUH GHV FHUFOHV SDULVLHQV VRQ WHUUDLQ GH MHX GH SUpGLOHFWLRQ Âť. Le spĂŠcialiste des affaires judiciaires Yves Bordenave dĂŠcrit dans Le Monde feu le Cercle Concorde comme un ÂŤ DUULqUH GpFRU Âť aux gains considĂŠrables (1,4 million d’euros rien qu’entre juillet et dĂŠcembre 2006), ÂŤ une SRXOH DX[ ÂąXIV G¡RU GDQV ODTXHOOH VHXOV HPSOR\pV pWDLHQW GpFODUpV VXU Âť. Les cercles parisiens s’inscrivent dans une politique de libĂŠralisation du jeu qui aboutira peut-­être, selon les rumeurs, Ă l’installation de casinos dans la capitale. Pour l’instant, mĂŞme tolĂŠrĂŠs, les ĂŠtablissements intra PXURV nourrissent les polĂŠmiques. Aussi, malgrĂŠ l’instauration du principe de cotisation, le nombre de leurs joueurs est toujours en augmentation (dans le JDD du 31 mars 2009, le Cercle Wagram informait accueillir environ 800 joueurs par jour, contre 400 il y a quelques annĂŠes), grâce Ă l’explosion de la popularitĂŠ du poker. Jusqu’à participer Ă O¡pPDQFLSDWLRQ G¡XQH pOLWH KH[DJRQDOH GH +ROG¡HP qui s’Êloigne des enclaves traditionnelles du jeu ÂŤ Ă la française Âť, avec ses lenteurs et sa rigiditĂŠ administrative, pour adopter le fonctionnement des FDVLQRV GH 9HJDV )LQDOHPHQW QRXV DYRQV HQFRUH IDLW tapis face aux Yankees. —

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SOCIÉTÉ

Nos bonnes adresses RefoulĂŠs de l’Aviation Club de France ? Misez plutĂ´t sur :

Le Cercle Wagram &DGUH DXVVL à DPER\DQW TXH O $ & ) OLUH DUWLFOH PDLV FOLHQWqOH beaucoup moins huppÊe. On joue au Poker mais aussi au Stud à cinq cartes, au POK21, au Multicolore et au Punto Banco. Le Wagram a bâti sa rÊputation DXWRXU GH VHV SDUWLHV WUqV DJLWpHV et de ses molosses russes, gardiens du fort. 47, rue de Wagram, 17e

Le Cercle Gaillon Egalement rĂŠputĂŠ pour son standing, la tenue correcte est exigĂŠe pour ĂŞtre assortie Ă la plastique avantageuse GHV FURXSLqUHV /HV WDEOHV VRQW DVVH] FKqUHV OD SDUWLH HQJDJH une cave de 400 euros minimum. 11, rue de Berri, 8e

Les Cercles Frochot et Hausmann /HV ÀJXUHV KLVWRULTXHV JDJHV

de crÊdibilitÊ et tradition  à la IUDQoDLVH ª /H &HUFOH +DXVPDQQ vient de rouvrir suite à une suspension judiciaire. 2, rue Frochot, 9e 22, rue de la Michodière, 2e

Le Club Eldo /XJXEUH 9HUV K GX PDWLQ il est frĂŠquent d’assister Ă une chorĂŠgraphie dĂŠsorganisĂŠe de Ă DPEHXUV j FUDQ IDLVDQW OH YD HW vient entre le distributeur de billets et l’enfer des tables de Stud Poker. 33, boulevard Saint-­Martin, 3e

Bonus Il existe vers Pigalle une multitude de petits cercles de jeu plus ou moins rĂŠpertoriĂŠs, impossibles Ă dĂŠnicher sans dĂŠtective privĂŠ. L. B.

Le Cercle Clichy Montmartre Ancien club de billard, c’est l’un des plus rĂŠcents. FrĂŠquentĂŠ par XQH FOLHQWqOH GH Š young gunners Âť, il propose indĂŠniablement la plus EHOOH JULOOH GH WRXUQRLV GH 7H[DV +ROG¡(P 84, rue de Clichy, 9e entre deux crackheads

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SPÉCIAL JEUX Politique

En juillet dernier, LA RUSSIE DÉCLARAIT ILLÉGAL TOUT JEU DE HASARD partout, sauf dans quatre zones. Pour comprendre ce poker lÊgislatif, GLDORJXH VXUQDWXUHO HQWUH GHX[ à DPEHXUV d’envergure, Vladimir Poutine et Fedor Dostoïevski.

ÂŤ LAS VEGAS DANS LE CAUCASE ? Âť PAGE

par Johanna MĂśhring illustration Yann G.

Kaliningrad sur la mer Baltique, Primorskii Krai VXU OH 3DFLĂ€TXH O¡$OWDw HQ 6LEpULH HW .UDVQRGDU SUqV de la mer Noire. Quatre rĂŠgions, certes rĂŠservĂŠes au dĂŠveloppement ĂŠconomique national, mais QXOOHPHQW SUrWHV j DFFXHLOOLU GHV KRUGHV G¡DĂ€FLRQDGRV GH OD URXOHWWH ² UXVVH 9RWpH HQ GpFHPEUH HW appliquĂŠe depuis l’ÊtĂŠ dernier pour des raisons de santĂŠ publique et de lutte contre l’addiction, cette loi contre le jeu qui, ÂŤ FRPPH O¡DOFRRO LQWR[LTXH OD SRSXODWLRQ HW HQWUDvQH XQ SUpMXGLFH PRUDO HW PDWpULHO Âť VHORQ 9ODGLPLU 3RXWLQH LQWHUGLW WRXWH FUpDWLRQ GH

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POLITIQUE

FDVLQR KRUV GH FHV ]RQHV j OD IURQWLqUH GH OD *pRUJLH Un moyen de tenir tĂŞte sur le marchĂŠ des jeux Ă ce pays devenu trop indĂŠpendant ? L’ombrageux Premier PLQLVWUH SUpVLGHQW HW O¡DXWHXU HQĂ€pYUp GX Joueur en dĂŠbattent au clair de lune. 0RVFRX DX PLOLHX GH OD QXLW VRXV OHV QpRQV pWHLQWV GX OpJHQGDLUH FDVLQR Metelitsa rue Noviy Arbat Fedor DostoĂŻevski : Monsieur le prĂŠsident du gouvernement, bonsoir ! Est-­il donc vrai que vous avez fermĂŠ nos casinos ? Mais quelle idĂŠe d’envoyer le beau monde de Moscou et de Saint-­PĂŠtersbourg en Prusse-­ 2ULHQWDOH RX HQFRUH j O¡DXWUH ERXW GH OD 5XVVLH Ă des milliers de verstes1 GH OD FLYLOLVDWLRQ 9RXV VDYH] DXVVL ELHQ TXH PRL 9ODGLPLU 9ODGLPLURYLWFK qu’il n’y a strictement rien lĂ -­bas ! Ni tables de jeux, ni restaurants, ni hĂ´tels, ni employĂŠs, ni mĂŞme de route ! J’ai eu l’occasion de parler avec un sujet britannique, Michael Boettcher, qui depuis presque vingt ans fait tourner des casinos dans notre pays splendide : les investisseurs de vos quatre URXOHWWHQERXUJV 2 perdus dans le dĂŠsert se ÂŤ Mon jeu, c'est le sont dĂŠsistĂŠs, n’Êtant prĂŞts pouvoir. Âť Ă payer 1 168 milliards Vladimir Poutine de roubles [27 milliards d’euros] pour une affaire plus que douteuse. Vladimir Poutine [irritĂŠ] : Que voulez-­vous, mon cher Fedor MikhaĂŻlovitch, il fallait bien reprendre les choses en main. Les casinos et les salons de jeu sont des lieux de dĂŠbauche, contrĂ´lĂŠs par le crime RUJDQLVp 7RXV OHV VRLUV OHV SDUNLQJV GHV WUHQWH casinos moscovites ĂŠtaient bondĂŠs de voitures de luxe pWUDQJqUHV G¡R VRUWDLHQW GHV EXVLQHVVPHQ HQ TXrWH de frissons, aux bras de femmes faciles. On ĂŠtalait sa richesse, on dilapidait des sommes faramineuses en toute frivolitĂŠ. Et que dites-­vous de la malĂŠdiction des machines Ă sous ? Avec 600 roubles3, on pouvait se procurer une licence du ComitĂŠ des Sports pour mettre en service ces appareils diaboliques ne FR€WDQW HX[ TXH URXEOHV 5pVXOWDW les tripots souvent tenus par des Tcherniye 4 prolifĂŠraient comme le cancer. Au moins cinq cents salles Ă Moscou sans compter les bandits-­manchots dans les supermarchĂŠs, les clubs de jeunesse, le mĂŠtro, aux arrĂŞts d’autobus ! Partout, des parieurs maladifs ĂŠtaient prĂŞts Ă tout mettre en jeu, mĂŞme la vie des leurs. Il fallait agir ! Fedor DostoĂŻevski [sceptique] : Je reste intriguĂŠ, JROXEFKLN 5. Pourquoi interdire le jeu, qui rapportait chaque annĂŠe 29 milliards de roubles Ă l’Etat et constituait le gagne-­pain de quatre cent mille personnes ? Et surtout, pourquoi maintenant, alors que vous avez toujours tolĂŠrĂŠ et mĂŞme encouragĂŠ ce

vice ? J’ai entendu dire que votre loi ĂŠtait destinĂŠe Ă SXQLU QRWUH ELHQ DLPp UR\DXPH GH *pRUJLH GHYHQX trop indĂŠpendant. En coupant court au business de la SqJUH JpRUJLHQQH TXL FRQWU{ODLW O¡HVVHQWLHO GHV FDVLQRV vous pensiez peut-­être dĂŠbrancher la FDVK PDFKLQH ? Dites-­moi, expliquez-­moi en quoi votre loi est HIĂ€FDFH " 8QH ERQQH SDUWLH GHV FDVLQRV HW WULSRWV VRQW VLPSOHPHQW GHYHQXV GHV VDORQV R O¡RQ MRXH DX ORWR au poker ou Ă bien d’autres choses, et Ă distance, grâce Ă cette chose prodigieuse, Internet. A Moscou, j’ai mĂŞme vu des salles de jeu tournant Ă plein rĂŠgime Ă la barbe des autoritĂŠs. Quoi qu’en dise Sergei Baidakov, l’adjoint au maire de Moscou, paradant avec sa PLOLWVLD 6 devant les camĂŠras, votre lutte contre les jeux de hasard est loin d’être gagnĂŠe. Vladimir Poutine [ironique] : Fedor MikhaĂŻlovitch, vous m’ennuyez avec vos airs de grand inquisiteur. 9RXV SOXV TXH OHV DXWUHV GHYULH] PH FRPSUHQGUH -H VXLV YRWUH Ă€GqOH DGPLUDWHXU O¡pOqYH PRGqOH GH YRV KpURV QLKLOLVWHV /D Ă DWWHULH SDU LPLWDWLRQ QH YRXV convient-­elle pas ? Pourquoi joue-­t-­on, Fedor ? Et Ă TXRL MRXH W RQ ORUVTX¡RQ MRXH " 9RXV FRQQDLVVH] FH petit minable de Samuil Binder, le directeur adjoint de l’Association pour le DĂŠveloppement du Commerce des -HX[ HQ 5XVVLH " ,O Q¡D SDV WRUW TXDQG LO GLW j OD SUHVVH que, dans ce pays, les dĂŠcisions sont prises par une seule personne. Et cette personne : c’est moi. Cette loi n’a pas de sens, c’est un vice d’autoritĂŠ ? Je suis celui qui dĂŠcide qui va perdre et qui va gagner. Je brasse OHV FDUWHV MH VDLV j O¡DYDQFH R YD WRPEHU OD ELOOH &¡HVW PRL HW PRL VHXO TXL DGDSWH OHV UqJOHV TXDQG FHOD m’arrange ou tout simplement m’amuse. Mon jeu Ă moi, c’est le pouvoir. 5LGHDX 9ODGLPLU 3RXWLQH UHJDJQH OH .UHPOLQ VRQ FRUWqJH GH OLPRXVLQHV HQFRPEUDQW OH WUDĂ€F QRFWXUQH DX SDVVDJH Fedor DostoĂŻevski, seul, sort un crayon et une feuille de papier de sa poche droite : ÂŤ &¡HVW ELHQ FH TXH MH FUDLJQDLV &HX[ TXL RQW SRVVpGp FHWWH SXLVVDQFH LOOLPLWpH VXU OD FKDLU OH VDQJ HW O¡kPH GH OHXU VHPEODEOH > @ FHX[ Oj VRQW LQFDSDEOHV GH UpVLVWHU j OHXUV GpVLUV j OHXU VRLI GH VHQVDWLRQV > @ /¡KRPPH HW OH FLWR\HQ GLVSDUDLVVHQW SRXU WRXMRXUV GDQV OH tyran Âť 7. — 1. Ancienne mesure russe correspondant Ă 1,06 kilomètres. 2. D’après le nom de la ville d’eau allemande imaginĂŠe par DostoĂŻevski dans Le Joueur (1866). 3. 1 euro = environ 40 roubles. &H WHUPH YDJXH HW SpMRUDWLI VLJQLĂ€DQW Š 1RLUV ÂŞ FLEOH OHV personnes venues d’Asie centrale ou du Caucase, qui ont un teint basanĂŠ, qui parlent russe avec un accent ou qui se distinguent par leurs habits traditionnels. 5. ÂŤ Cher ami Âť, en russe. 6. Forces de police dĂŠpendantes du ministère de l’IntĂŠrieur. 7. Souvenirs de la maison des morts, Deuxième Partie, III -­ HĂ´pital (suite), 1862.

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SPÉCIAL JEUX SociÊtÊ

Le JEU DE BOISSON ne fait l’objet d’aucun traitĂŠ acadĂŠmique. Pour l’Êtudier, une seule solution : la dĂŠmarche empirique. par François Perrin photographie CĂŠline Turroques

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9LHX[ FRPPH OH GpVLU DEVXUGH GH IDLUH pWDODJH GH VRQ ivresse et accessible Ă tous quel que soit son ĂŠtat, le MHX j ERLUH YLVH SULQFLSDOHPHQW j DFFURvWUH GH PDQLqUH H[SRQHQWLHOOH OH QLYHDX G¡pEULpWp GX VXMHW DĂ€Q GH OXL permettre de rire plus facilement et de s’ennuyer moins rapidement. Il constitue une expĂŠrience collective fĂŠdĂŠrant la cohĂŠsion du groupe autour de son plus petit dĂŠnominateur commun, avec un triple impĂŠratif : pODERUDWLRQ G¡XQH UqJOH LPPpGLDWHPHQW FRPSUpKHQVLEOH par l¡KRPR HUHFWXV moindre recours Ă la culture gĂŠnĂŠrale, passion commune pour les concours absurdes. Des institutionnels ÂŤ Caps Âť1 ou ÂŤ Vache qui tache Âť2 Ă leurs petits cousins inventĂŠs aux zincs, ces distractions nocturnes (dans le meilleur des cas) rĂŠpondent Ă la propension naturelle du mâle (nettement surreprĂŠsentĂŠ, Ă moins d’envisager un nouveau champ du jeu Ă boire3) Ă assister au spectacle de l’effondrement d’autrui tout en ĂŠrigeant son propre piĂŠdestal de buveur inĂŠgalable. Il s’agit ĂŠgalement de masquer, via le recours Ă l’euphorie grĂŠgaire, sa propre pente alcoolique : comme l’indique avec sagacitĂŠ un auteur anonyme de Wikipedia4, le jeu de boisson ÂŤ se

SUDWLTXH JpQpUDOHPHQW j SOXVLHXUV [sa] SUDWLTXH VHXOH pWDQW DVVLPLOpH j GX VLPSOH DOFRROLVPH Âť. Cela dit, un examen plus attentif de la typologie des joueurs fait apparaĂŽtre une dichotomie entre deux familles : disons qu’aux Capulet dĂŠsireux de montrer Ă quel point ils sont agiles PrPH LYUHV s’opposent ces Montaigu n’ayant de cesse d’exhiber Ă la face du monde les travers de leurs contemporains TXDQG LOV VRQW LYUHV. Deux clans antagonistes qui ne rient pas pour les mĂŞmes raisons, ni ne s’orientent vers les mĂŞmes jeux. Les seconds se font les militants d’une ludologie PHWWDQW HQ YDOHXU XQ SUpFHSWH VLPSOH TX¡RQ TXDOLĂ€HUD ÂŤ d’effet de levier en spirale Âť : plus un individu boit, moins il est susceptible de suivre une quelconque UqJOH GX MHX GRQF SOXV LO ERLW /H ULUH LFL LQWHUYLHQW prĂŠcisĂŠment lors de l’instant-­FOLPD[ du jeu, c’est-­à -­dire lorsque l’un des joueurs, physiologiquement diminuĂŠ par la quantitĂŠ d’alcool ingĂŠrĂŠe, sort des clous. ÂŤ Boula boula Âť5, voire le gĂŠnial ÂŤ Bonjour Bob Âť6, sont ici vĂŠnĂŠrĂŠs comme des idoles.

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SOCIÉTÉ

Notice 1 Deux joueurs se font face, une bouteille de bière ouverte devant chacun, capsule posÊe sur le goulot. A tour de rôle, chaque joueur tente de faire tomber la capsule adverse par un habile jet de capsule. Celui qui perd boit.

2 X joueurs s’affublent d’un numĂŠro. Le premier joueur se lance : ÂŤ Je suis la vache qui tache sans tâche numĂŠro X et j’appelle la vache qui tache sans tache numĂŠro Y. Âť Le joueur appelĂŠ se prĂŠsente Ă son tour et en apostrophe un nouveau de la mĂŞme façon. Celui qui se trompe dans son nom se marque le visage d’une tâche pratiquĂŠe Ă l’aide d’un bouchon de liège brĂťlĂŠ et doit dĂŠsormais accoler Ă son nom la mention ÂŤ avec une tâche Âť en lieu et place de ÂŤ sans tâche Âť. Et ainsi de suite. Ah, si ! celui qui perd boit, aussi.

3 La mixitĂŠ sexuelle transforme souvent la nature du jeu Ă boire, en ceci qu’elle peut substituer un illusoire dĂŠsir de sĂŠduction Ă la simple vellĂŠitĂŠ de ÂŤ se mettre minable Âť. Le ÂŤ Je n’ai jamais Âť, consistant Ă lancer Ă la cantonade une assertion Ă caractère principalement sexuelle pour voir qui boit (ceux qui rĂŠpondraient par l’affirmative Ă cette assertion) et qui ne boit pas (les autres), et donc faciliter l’Êlaboration d’une stratĂŠgie de conquĂŞte perdue d’avance, constitue un bon exemple de cet ĂŠtat de fait.

4 http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=jeudeboisson Citer Wikipedia dans un article peut constituer la rĂŠponse victorieuse Ă un pari enivrĂŠ, c’est-Ă -dire, Ă proprement parler, un jeu de boisson. 5 Un joueur tend une bouteille Ă son voisin en lui lançant RĂ”LE SOCIAL ET PLANTE EN POT /HV SUHPLHUV HQ UHYDQFKH SUpIqUHQW OH EUDV GH IHU SXU HW GXU ² FH VRQW OHV PrPHV TXL V¡LOOXVWUHQW GDQV OHV VSRUWV LQGLYLGXHOV HW TXL LQVLVWDLHQW DXSUqV GHV professeurs pour que les copies soient rendues dans l’ordre des notes : ils s’esclaffent d’avoir fait sauter la capsule du voisin, ou d’être restĂŠs les derniers debout Ă l’issue d’un quelconque relais alcool7. Ici, il ne s’agit plus, en effet, de GpPRQWUHU HQ ULDQW OHV HIIHWV QpIDVWHV GH O¡DOFRRO VXU O¡RUJDQLVPH HW OH FHUYHDX, mais simplement de SURXYHU TX¡RQ HQ D XQH SOXV JURVVH. Ainsi, les Capulet s’opposeraient aux Montaigu en ce qu’ils privilĂŠgieraient leur plaisir (alcoolisĂŠ) individuel au plaisir (alcoolisĂŠ) collectif : ils ne rient pas de leur ami prononçant ÂŤ YLDFKH ÂŞ au lieu de ÂŤ vache ÂŞ mais bien plutĂ´t de leur adversaire incapable de tenir un tant soit peu dignement le rythme, la frĂŠquence ou la quantitĂŠ. Ainsi, quel que soit son objectif avouĂŠ, si le jeu de ERLVVRQ SHXW rWUH SUDWLTXp Q¡LPSRUWH R DYHF RX VDQV ustensile (dĂŠs, cartes Ă jouer, tĂŠlĂŠvision, plante en pot), c’est avant tout parce qu’il sert un rĂ´le social dĂŠpassant OHV kJHV FRPPH OHV IURQWLqUHV ERLUH VDQV DYRLU j VH confronter Ă soi-­mĂŞme. En cela, il est salutaire8. —

ÂŤ Tiens Âť ; ce dernier lui demande ÂŤ C’est quoi ? Âť, le premier rĂŠpond ÂŤ Du boula boula Âť, le second ÂŤ Ah d’accord Âť, puis le tend Ă un autre joueur, enrichissant ainsi la chaĂŽne puisqu’il faudra Ă chaque fois la remonter totalement, selon le modèle suivant. Joueur 2 Ă 3 : ÂŤ Tiens Âť, 3 Ă 2 : ÂŤ C’est quoi ? Âť, 2 à 1 : ÂŤ Oui, c’est quoi ? Âť, 1 Ă 2 : ÂŤ Du boula boula Âť, 2 Ă 3 : ÂŤ Du boula boula , et ainsi de suite. HilaritĂŠ. Ah oui ! et celui qui perd boit.

6 ÂŤ Quand quelqu’un dit “Bonjour Bobâ€? dans le Bob Newhart Show, tu bois une gorgĂŠe. [‌] Mais si c’est Bill Dailey qui dit “Bonjour Bobâ€? [‌], alors c’est la mort, tu dois siffler la bouteille. Âť La Fonction du balai, David Foster Wallace, Au Diable Vauvert, 2009. 7 Seul ou par ĂŠquipes, buvez un verre et faites quelque chose d’idiot demandant de l’adresse (garder son verre en ĂŠquilibre sur sa tĂŞte, tenir dix secondes sur un pied) ou juste quelque chose de quelconque (changer de bar, de rame de mĂŠtro, sprinter sur cent mètres) et passer la main Ă l’adversaire. Ici, variante de taille, celui qui vomit est disqualifiĂŠ (il n’est donc plus contraint de boire) : c’est celui qui a le plus bu qui gagne. 8 A conchomĂŠmavecmodrĂŠlation. Boire cĂŠ le male. PAGE

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SPÉCIAL JEUX Mode

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dans le bureau avec la clef anglaise ? *LOHW Laclos Chemise Kookaï Pantalon Desigual Casquette Energie Carré Charvet Montre Lacoste

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dans le grand salon avec le revolver ?

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5REH Anglomania by Vivienne Westwood Pochette Charvet Collier Taty Devine Bracelet nĹ“ud Xuan-­Thu Nguyen Bracelets et bague Dominique Denaive Ceinture Richard Gampel Collants Wolford

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dans l'antichambre avec le couteau ? 9HVWH HW FUDYDWH Lacoste Pull Redskin Chemise Ben Sherman Pantalon Kanabeach Baskets Napapijri Montre G-­Shock

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dans la bibliothèque avec la corde ?

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Polo Lacoste Cardigan Uniqlo Pantalon Christophe Lemaire Chapeau CA4LA Lunettes Ralph Lauren Echarpe Energie Montre Casio Ceinture Vivienne Westwood

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SPÉCIAL JEUX Mode

dans le boudoir avec le poison ? Veste Pablo by Gérard Darel Carré Charvet Top paillettes Vivienne Westwood Anglomania Voilette Mikaella Assouline %URFKH ÁHXU Cherry Chau Collier Imaï Bracelets KMO Montre Casio

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dans la chambre avec le bougeoir ?

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Col roulé et gilet Marithé + François Girbaud Veste et pantalon Paul&Joe Chaussures Dr. Martens Echarpe et gants Little Marcel Montre ODM Sacoche Energie

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SPÉCIAL JEUX Mode

Colonel Moutarde : David Garchey Costume trois pièces De Fursac Chemise et chaus-­ sures Mjölk Pochette et cravate Charvet Madame Pervenche : Lucille Gauthier Col en plumes Yrusha Top Vivienne Wes-­ twood Anglomania Pantalon Les Prairies de Paris Coiffe Cherry Chau Collier Shourouk Sautoirs Kookaï Sergent Le Gris : Richard Gaitet Costume Pal Zileri Chemise G-­Star Raw Chaussures Philippe Zorzetto Echarpe, nœud papillon et ceinture Charvet Montre Boss

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Pose Standard

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Mademoiselle Rose : Magali Aubert Robe Paul&Joe Chaussures Sté-­ phane Kélian Colliers Fried Broches « Rose » Cherry Chau Broche en perles Vivienne Westwood Gants Forte Forte Bague KMO Collants Wolford Docteur Olive : Olivier Mulin Pantalon Vivienne Westwood Chemise, veste d’intérieur et carré Charvet Chaussures Paul&Joe Pochette Epice Professeur Violet : David Herman Veste Vivienne Westwood Chemise 1909 Victorinox Pantalon Bernard Zins Chaussures Paul&Joe Nœud papillon et ceinture Charvet

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SPÉCIAL JEUX Art

Apparition: Tournez Manège, TF1, 16 mars 1993 (extrait) 1993. Collections FNAC, Fonds National d’Art Contemporain, Puteaux-Paris MusĂŠe National d'Art Moderne, Centre Pompidou, Paris. Courtesy: Matthieu Laurette - Gaudel de Stampa, Paris - Deweer Gallery, Otegem. (c) ADAGP

De Tournez Manège Ă Que le meilleur gagne, MATTHIEU LAURETTE, trublion de l’art multimĂŠdia, s’est fait connaĂŽtre en participant Ă des jeux tĂŠlĂŠvisĂŠs. Et poursuit aujourd’hui son exploration de l’amusement contemporain.

 LE JEU EST UNE CHOSE SÉRIEUSE  par Magali Aubert remerciements Camille Charton

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Quelle idĂŠe pour un artiste d’aller Ă Tournez manège ?! Matthieu Laurette : A l’Êpoque [en 1993], la tĂŠlĂŠvision ĂŠtait un lieu d’exposition potentiel, très peu exploitĂŠ par les artistes notamment Ă cause de son aspect nĂŠgatif. J'ĂŠtais encore ĂŠtudiant aux Beaux-­Arts de Grenoble et j’ai dĂŠcidĂŠ de passer dans ce jeu parce que c’Êtait une ĂŠmission extrĂŞmement populaire, et basĂŠe sur la question de la rencontre. Il y a cette phrase cĂŠlèbre de Marcel Duchamp : ÂŤ L’œuvre d’art est un rendez-­vous. Âť Vous vouliez l’appliquer ? Dans un sens, oui. Je donnais rendez-­vous Ă des gens pour regarder l’Êmission en direct. Au lieu d’envoyer un carton pour un vernissage dans une galerie, j’ai envoyĂŠ environ 250 invitations Ă ÂŤ regarder une

ĂŠmission Âť Ă des gens de mon entourage : des artistes, des critiques, des professeurs‌ J’apparaissais dans la rubrique ÂŤ Choisissez-­moi Âť, en première partie. 0DLV j OD Ă€Q FH Q¡HVW SDV PRL TXH OD Ă€OOH D FKRLVL Le but ĂŠtait de rester le plus rĂŠel possible, de ne pas rWUH GDQV OD Ă€FWLRQ GDQV O¡LQYHQWLRQ G¡XQ SHUVRQQDJH 5HVWHU VRL PrPH HVW WUqV GLIĂ€FLOH j OD WpOpYLVLRQ Pas de sĂŠduction alors ? Dans une certaine sĂŠduction, oui. Mais les codes du jeu n’Êtaient pas totalement les miens. Je les ai utilisĂŠs comme un moyen d’apparaĂŽtre et de se mettre en jeu soi-­mĂŞme, et sa carrière d’artiste. J’ai appelĂŠ ces passages Ă la tĂŠlĂŠ des Apparitions. En anglais, il y a deux mots : apperence, qui veut dire apparaĂŽtre, et apparition, qui est de l’ordre du mystique, du religieux. Les autres passages, c’Êtait oĂš ?

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ART

Tiens, cadeau, un paillasson Participer à une œuvre en cours, c’est très simple. El Gran Trueque (Le Grand Troc), Bilbao, 2000. Courtesy M. Laurette, Consonni, Bilbao, Gaudel de Stampa, Paris, Deweer Gallery, Otegem. ©ADAGP Photo : Seber Ugarte

Les Archipels Réinventés : Les 10 ans du Prix Ricard

Exposition collective Musée National d’Art Moderne Centre Pompidou Jusqu’au 11 janvier

Après trois ans à Amsterdam, Matthieu Laurette est de retour à Paris depuis novembre. Au moment d’emménager dans son Global Demix Studio Paris, dans le 20e arrondissement, à quelques rues de notre rédaction, il a eu l’idée d'un nouveau projet intitulé Things (Les Choses) permettant de se meubler à moindres frais tout en ravissant les collectionneurs : « Je

Par exemple Que le meilleur gagne, avec Nagui, quelques secondes, mais j'ai gagné de l'argent. Puis dans des émissions de variété, au sein du public, en train d’applaudir. J’ai continué avec des talk show comme La Grande famille [sur Canal+, 1990-­1997], HQ HVVD\DQW GH GpÀQLU OHV GLIIpUHQWHV W\SRORJLHV d’Apparition possibles, c’est-­à-­dire comment ce système utilise les gens appelés – bien avant la téléréalité – « real people ». J’explorais ce que ça sous-­ entendait. Quelles ont été les réactions ? Parfois extrêmement violentes de la part du milieu de l’art. Mais les choses ont évolué et le montage vidéo des Apparitions, que j'ai fait entre 1993 et 1995, font désormais partie de la collection du Centre Pompidou. La question est : qu’est-­ce que ça a soulevé, qu’est-­

propose aux gens de financer l’acquisition de ce dont j’ai besoin dans mon atelierstudio. En échange, ils reçoivent une photographie du ou des objets qu’ils m’ont financés, accompagnée d'un certificat. » Echanger une photo de frigo contre un frigo, voilà ce que c’est, l’esprit pratique.M. A. Liste des cadeaux matthieulaurettethings. blogspot.com

ce que ça a changé de travailler avec un médium qui semble inaccessible ? A la télévision, il y a des acteurs, des chanteurs, des écrivains, mais jamais d’artistes qui viennent parler de leur travail, ou alors sous des formes réductrices, souvent moqueuses : « Est-­ce que ça a vraiment un sens ? N’est-­ce pas n’importe quoi ? » A quel moment avez-­vous été reconnu ? Je ne sais pas, dès le début les réactions ont été emblématiques de ce que génèrent mes activités. Mais plus récemment, Jacques Rancière [philosophe et essayiste, auteur de La Leçon d'Althusser] questionne dans son dernier livre [Le Spectateur émancipé] le fait d’aller dans une émission de télé et de montrer ça dans un musée. C’est la part de jeu : j’essaie de faire un travail à la fois conceptuel, très sérieux, et qui garde une dynamique parfois comique parce que

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SPÉCIAL JEUX Art

Moneyback Life! 2001, Courtesy Matthieu Laurette, Gaudel de Stampa, Paris, Deweer Art Gallery, Otegem

c’est rare en art. Parallèlement, j’ai commencĂŠ un autre projet : vivre en consommant quasiment que des produits ÂŤ premier achat remboursĂŠ Âť. Pousser le système ĂŠconomique dans ses retranchements – en transformant le rapport aux courses en quĂŞte pour trouver des produits – est un jeu en soi. Qui vous a menĂŠ Ă nouveau Ă la tĂŠlÊ‌ Exactement. En 1996, j’ai ĂŠtĂŠ invitĂŠ Ă Je passe Ă la tĂŠlĂŠ, l’après-­midi sur France 3. Un talent show avec un rideau qui se fermait petit Ă petit. Une sorte ÂŤ J’ai utilisĂŠ Tournez d’audimat en temps Manège comme un moyen rĂŠel oĂš un panel de de mettre en jeu cent personnes dans ma carrière d'artiste. Âť le public pouvait vous faire disparaĂŽtre Matthieu Laurette en cinq minutes. J’intervenais dans la seconde partie oĂš venaient des passionnĂŠs : une collectionneuse de cartes tĂŠlĂŠphoniques, un spĂŠcialiste des reptiles, des danseurs acrobates, et moi qui vivais de produits remboursĂŠs. Ce mode d’achat a durĂŠ presque dix ans. L’un de mes questionnements ĂŠtait : comment l’artiste peut prendre sa vie en main Ă travers son travail, et comment la sociĂŠtĂŠ peut offrir d’autres modes de consommation, de rĂŠmunĂŠration, que le salaire.

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A quelles ĂŠmissions aimeriez-­vous participer aujourd’hui ? A La ferme cĂŠlĂŠbritĂŠs. Mais je suis passĂŠ Ă autre chose. En 2000, en rĂŠponse Ă une commande pour l'espace public de Consonni, une structure de production de la Ville de Bilbao, j’ai inventĂŠ et produit une ĂŠmission pour une chaĂŽne privĂŠe du pays basque espagnol : Le grand troc. Un troc ludique oĂš l’on pouvait ĂŠchanger une Fiat Panda contre n’importe quel autre achat. Le gagnant ĂŠtait celui qui ferait la proposition la plus haute. Ce fut un ordinateur et une imprimante valant un tiers de la voiture. Il a ĂŠtĂŠ ĂŠchangĂŠ Ă son tour contre un tĂŠlĂŠviseur, puis un rĂŠfrigĂŠrateur, et ainsi de suite, jusqu’à un lot de six verres bleus pour lesquels personne n’a appelĂŠ. Vous avez dĂŠposĂŠ le concept ? Oui. Mais on ne risque pas vraiment de me le racheter parce que l’audimat baissait en mĂŞme temps que la valeur du lot‌ Il faut toujours aller dans le sens du JDLQ ² SRXU IDLUH GHV SURĂ€WV HQ WpOp SDV IRUFpPHQW GDQV O DUW Toujours aussi ludique aujourd’hui ? 0rPH VDQV SUHQGUH VSpFLĂ€TXHPHQW OD IRUPH GH MHX mes projets [voir encadrĂŠ] sont contradictoires : il y a un cĂ´tĂŠ ludique et une dimension extrĂŞmement sĂŠrieuse. C’est dans cette ambiguĂŻtĂŠ que ça se joue. Ça ne m’intĂŠresse pas de faire des choses dans lesquelles il n’y a pas un certain amusement. —

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PHOTOGRAPHIE

LA VÉRITÉ SUR CHARLIE

InspirĂŠ par le best-seller des livres-jeux anglais, l’artiste parisien anthony peskine (sans majuscules) voit des pulls rayĂŠs partout et se demande Qui est Charlie ? par Magali Aubert

Qui est Charlie ?

Auto-ĂŠditĂŠ anthonypeskine.com The Blood Next Door

Galerie Catherine et AndrÊ Hug 9, rue de l’EchaudÊ, Paris 6e. A partir du 5 fÊvrier

Dans cette drĂ´le de rĂŠalitĂŠ augmentĂŠe (une page de OĂš est Charlie ? devant les yeux toute la journĂŠe), la traque photographique peut mener Ă l’addiction au comique de rĂŠpĂŠtition. Accro en ĂŠtĂŠ 2007, l’annĂŠe de son diplĂ´me aux Beaux-­Arts de Paris, anthony peskine capture dans la capitale les pulls Ă rayures rouges et blanches assortis d’un pantalon bleu. Cent clichĂŠs en deux mois et, trois ans après, OH UpĂ H[H SHUVLVWDQW Š Encore aujourd’hui quand je croise de beaux spĂŠcimens, je m’Êcrie : ´&KDUOLH Âľ Cette manie a contaminĂŠ mon entourage. C’est très addictif, j’ai songĂŠ Ă replonger plusieurs fois. Âť Il en rĂŠsulte un livre, Qui est Charlie ?, qui n’apporte pas de rĂŠponse mais ouvre des pistes.

En fait, Charlie (Wally dans la langue maternelle de son crĂŠateur anglais Martin Handford) n'a pas toujours un bonnet et des lunettes rondes. Depuis, anthony peskine a rĂŠalisĂŠ d’autres travaux ÂŤ inspirĂŠs GHV Ă€OPV GHV VXSHUPDUFKpV GHV pubs, de la pop culture et des stars Âť. Il a participĂŠ Ă l’exposition collective Mieux vaut ĂŞtre un virus que tomber malade Ă Mains d’Œuvres en 2008, avec entre autres Julien PrĂŠvieux (cf. Standard n° 23), Matthieu Laurette (cf. article prĂŠcĂŠdent) et Jean-­Luc Moulène. Il expose en fĂŠvrier la sĂŠrie The Blood Next Door (avec l’artiste Nazheli Perrot) des crĂŠations photographiques violentes, cyniques ou niaises, ÂŤ qui suggèrent que notre vie ne serait qu’une face B. Âť Il est guĂŠri. —

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SPÉCIAL JEUX TÊlÊvision

INCROYABLES TALENT DÊcors kitsch, Êpreuves loufoques et rires potaches : mais pourquoi les JEUX TÉLÉVISÉS JAPONAIS existent-ils ?!

I l s mesure que le sont six Nikkei s’envolait. autour de la table, Mais en 1990, la crise dans une bibliothèque ĂŠclate, ouvrant la voie Ă publique. Autour d’eux, des XQH GpFHQQLH GH GpĂ DWLRQ HW OHV ĂŠtudiants plongĂŠs dans leurs livres. budgets fondent. La tĂŠlĂŠ invente alors L’un des candidats retourne une carte des jeux sans enjeu, auxquels se prĂŞtent marquĂŠe d’une tĂŞte de mort, s’effondre sur OD WDEOH VRQ YLVDJH KXUOH Š QRQ SDV PRL ÂŞ les talento. Le prĂŠcurseur de ces jeux est l’acteur/rĂŠalisateur ÂŤ Beat Âť Takeshi Kitano Rires ĂŠtouffĂŠs. Son voisin sort une pince Ă (Hana-­Bi, L’EtĂŠ de Kikujiro), Ă l’Êpoque superstar ĂŠpiler et lui arrache un poil du nez. La victime n’a du comique. Il crĂŠe et anime le mythique Takeshi’s pas le droit de crier, les autres sont pliĂŠs en deux. Castle (1986-­1989) : des candidats ridiculement Ce n’est que le dĂŠbut : machine Ă claques, inhalateur dĂŠguisĂŠs s’y affrontaient dans des ĂŠpreuves loufoques de pets – les supplices iront crescendo jusqu’à la pub. Ă LSSHU KXPDLQ URGpRV WRXW FH TXL SHUPHWWDLW GH Il est vingt-­deux heures, vous regardez Silent Library. tomber Ă l’eau) avant d’affronter Takeshi et ses gardes Bienvenue sur la tĂŠlĂŠvision japonaise. GDQV XQ Ă€QDO NLWVFKLVVLPH $SUqV OXL OHV FUpDWHXUV GH Zappons. Deux ĂŠquipes s’affrontent sur une fausse jeux chercheront toujours plus spectaculaire, plus drĂ´le. piste d’athlĂŠtisme : attachĂŠs entre eux, les participants Et peu importe le manque de moyens. franchissent des haies, cherchent avec les dents une ÂŤ 95 % des programmes sont produits sur place Âť, prĂŠcise clĂŠ cachĂŠe dans une poudre de wasabi, escaladent un GaĂŤl, du site Kanpai, spĂŠcialiste de la culture populaire escalier savonnĂŠ, s’arrachent les vĂŞtements. Que gagnent japonaise. Qui veut gagner des les vainqueurs ? Rien. Tous les millions a bien ĂŠtĂŠ importĂŠ, mais candidats sont des cĂŠlĂŠbritĂŠs, les les citoyens lambda ont vite cĂŠdĂŠ talento des ĂŠmissions de variĂŠtĂŠs. Pierre-feuille-ciseaux la place aux talento – lesquels, au ÂŤ La tĂŠlĂŠ japonaise ne connaĂŽt en prime time passage, ne reversent pas leurs pas vraiment de frontières entre avec coups de rouleau gains (limitĂŠs) Ă une association. les genres Âť, explique Alain Roy, Ă pâtisserie. Les Batsu games (jeux avec gages) 37 ans, ex-­traducteur et sous-­ restent la norme, tel ce pierre-­ titreur français installĂŠ depuis feuille-­ciseaux en prime time avec coups de rouleau Ă deux ans Ă Tokyo, chroniqueur dans l’Êquivalent local pâtisserie pour le perdant. d’Union libre et acteur Ă tout faire de sĂŠries tĂŠlĂŠvisĂŠes (il jouait rĂŠcemment le mĂŠchant dans Gaiji Keisatsu). PINCES CROCODILES Qui sont les talento ? Danseurs, comĂŠdiens en promo En marge des 75 % d’audience rĂŠalisĂŠs par les chaĂŽnes devenus des professionnels du divertissement, des privĂŠes, les Japonais regardent aussi les quiz de la tĂŠlĂŠ G.O. de colonies de vacances cathodiques très sados-­ publique NHK, au niveau culturel impressionnant. masos. ÂŤ Le SM est très ancrĂŠ au Japon, poursuit Les ĂŠpreuves de Meikyu Bijutsukan (le ÂŤ musĂŠe Alain. Il n’est pas rare que dans une conversation P\VWqUH ÂŞ V¡HQWUHFRXSHQW GH GRFX Ă€FWLRQV VXU dĂŠcontractĂŠe, on joue Ă deviner qui est S et qui la vie des peintres – oĂš Alain, notre talento en est M‌ Âť herbe, campa le peintre Chardin. Terminons notre zapping. Sur TV Tokyo, deux TAKESHI KITANO, LA RÉFÉRENCE -XVTX¡j OD Ă€Q GHV DQQpHV SRXUWDQW gamers s’affrontent sur un nouveau jeu vidĂŠo avec des pinces crocodiles les jeux tĂŠlĂŠvisuels ĂŠtaient plutĂ´t branchĂŠes sur les orteils. Le classiques, avec des quidams perdant sera ĂŠlectrocutĂŠ, pour candidats. Les il est dĂŠjĂ minuit. — sommes remportĂŠes s’Êlevaient Ă

par Bertrand Guillot

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TÉLÉVISION

Entretien

« VOIR SON VENTRE

EXPLOSER » Selon l’écrivain-­dessinateur-­photographe ROMAIN SLOCOMBE, dont l’œuvre se focalise sur la culture nippone, cette télé-­là fonctionne comme une boule antistress.

Christelle Corrigée

Le Serpent à Plumes, 2009

Regardez-vous les jeux télé japonais ? Romain Slocombe : Je les trouve assez amusants dans leur principe, mais comme je déteste la télévision japonaise en général, je les déteste aussi. Que nous apprennent-ils ? Les Japonais sont connus pour subir un stress intense de par la pression sociale – la compétition et le travail acharné –, mais aussi pour savoir très bien se détendre – bière, bains brûlants, karaoké, love hotels, etc. Voir leurs compatriotes se faire martyriser dans des parcours du combattant drôles et cruels (une version soft des combats de gladiateurs) aide à déstresser. Toujours plus violents, absurdes : une spécificité locale ? Etant extrêmes en tout (y compris en

politesse et en gentillesse), ils vont très loin dans la pénibilité. La spécificité, outre cette violence bizarre, est dans le côté souvent prosaïque, familier, des épreuves. Par exemple, dans un restaurant, il faut deviner, sur un menu qui en comporte des centaines, le top ten des plats les plus populaires, les manger puis renouveler la commande (pas question d’en laisser) jusqu’à tomber juste – au risque de voir son ventre exploser. Les Japonais y sont-ils attachés ? Beaucoup (pas les plus intelligents) le sont, d’autant plus que les participants sont souvent des stars (chanteurs, comiques, acteurs), obligées de participer sous la pression de leurs agents. Les spectateurs sont ravis de les voir souffrir un peu et cela renforce le capital sympathie des vedettes.

Mais en raison de leur cruauté et de leur stupidité, ces jeux commencent à avoir mauvaise presse. Et ça peut vous inspirer un livre ? Il y a une douzaine d’années, j’ai participé à un reportage à Tokyo pour une chaîne française qui faisait un panorama des télés étrangères débiles (comme si la nôtre échappait à ce qualificatif !) : j’ai donc assisté à l’enregistrement d’un jeu. Il se peut en effet que je fasse revivre cette expérience cocasse à mon personnage fétiche Gilbert Woodbrooke*. * Héros de la tétralogie /D &UXFLÀ[LRQ en jaune (Gallimard, Fayard, 2000-­ 2006)

Propos recueillis par Camille Charton

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SPÉCIAL JEUX Performance

L’AUTRE FRANÇAISE DES JEUX Le fordisme appliquĂŠ aux jeux-concours. Portrait d’une gagnante très mĂŠthodique.

par Nicolas Roux

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Mon premier a gagnĂŠ – entre autres et en l’espace de quatre ans – un iPod touch première gĂŠnĂŠration 8 Go, un iPod touch deuxième gĂŠnĂŠration 16 Go, deux nuits d’hĂ´tel avec petit dĂŠjeuner pour deux au Best Western de Sainte-­Maxime, un sac Ă main KookaĂŻ, deux billets pour Metallica Ă Bercy, un VTT B-­Twin, une X Box 360, cent euros de bons d’achat chez Leroy-­ Merlin, quatre tickets pour la nocturne au Disney Studio de Marne-­la-­VallĂŠe, un coffret vingt-­trois DVD Warner ainsi qu’un ensemble home cinema et son ĂŠcran plasma accompagnĂŠ d’une autre X Box 360 fournie avec Guitar Hero 5. Mon second, qui est aussi mon premier, participe du lundi au dimanche Ă des

jeux-­concours en ligne. Mon tout, qui est aussi mon second, remporte en moyenne 400 euros de lots par mois sans dĂŠpenser un centime. Qui suis-­je ? L’un des vingt mille chasseurs de prix qui parient quotidiennement sur toutgagner.com. PLUS RENTABLE QUE LES HEURES SUPP’ LancĂŠ en 2002, le site ÂŤ pour ne manquer aucun jeu-­concours Âť propose non seulement une sĂŠlection mais aussi les rĂŠponses des jeux-­concours en cours, avec la bĂŠnĂŠdiction des marques organisatrices qui rĂŠcupèrent ainsi des centaines d’adresses mails. Et comme les participants ont tous bien rĂŠpondu, un tirage au sort les dĂŠpartage. Question de chance ? De probabilitĂŠs plutĂ´t, doublĂŠes d’une organisation fordienne. Tous les jours, pendant trente minutes, GaĂŤlle P., 29 ans, trie minutieusement les jeux selon les gains – un t-­shirt de Johnny, non merci –, ne tremble jamais devant des questions complexes (ÂŤ combien d’heures de jeu propose Call of Duty 5 ? Âť, ÂŤ quel est le prix de la nouvelle perceuse sans Ă€O %RVFK " ÂŞ), lâche quelques infos personnelles et recommence dix ou vingt fois avant d’aller virer les spams publicitaires pour du champagne, des pulls ou une table basse, de sa boĂŽte mail. Cerise sur le pudding, en un clic, le logiciel RoboForm remplit les formulaires Ă sa place et augmente sa productivitĂŠ. P our une troisième X Box 360 ? Parfois, elle gagne un jeu pour une console qu’elle n’a pas. Ce qui l’amène Ă dĂŠvelopper un rĂŠseau WUqV HIĂ€FDFH GH UHYHQWH GH WURF HW GH FDGHDX[ HQ attendant de pouvoir payer ses impĂ´ts en iPods. Son DFWLYLWp GH FRQFRXULVWH LQĂ XHQFH DXVVL VHV VRUWLHV au grĂŠ de semaines qui ressemblent Ă des plans quinquennaux : lundi, -XVWH OD Ă€Q GX PRQGH Ă la ComĂŠdie Française, mardi, Jarvis Cocker au Bataclan, mercredi, Les Femmes s’en mĂŞlent Ă la Maroquinerie, jeudi, les Black-­Eyed Peas au VIP Room Theater et samedi, bal Ă l’ElysĂŠe-­Montmartre. Plus rentable TXH OHV KHXUHV VXSS¡ FH V\VWqPH DUURQGLW VHV Ă€QV GH mois. Trop fastoche ? La plupart de ses amis qui ont WHQWp GH O¡LPLWHU RQW Ă€QL SDU DEDQGRQQHU FDU WRXW OH monde ne s’appelle pas Henry Ford. N’empĂŞche, rien que sur toutgagner.com, les trois cents winners de 2002 sont maintenant trois cent mille, acharnĂŠs ou ponctuels, dont 70 % de femmes entre 25 et 45 ans. Oliver Perrot, fondateur du site, raconte qu’en 2008, Le Figaro D ODQFp XQ MHX WUqV GLIĂ€FLOH DYHF j OD FOp XQ PLOOLRQ G¡HXURV GH ORWV 6D FRPPXQDXWp HQ D UDĂ p l’intĂŠgralitĂŠ. Scandale ? Un bel exemple de contre-­ pouvoir ĂŠlectronique. —

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La version on line de Questions pour un champion, champ de bataille des nouveaux geeks ? Confession d’un accro.

de seconde, grimpant les niveaux jusqu’à vous TXDOLĂ€HU SRXU OHV mini-­masters d’or, sans pouvoir WRXWHIRLV SDUWDJHU YRWUH Ă€HUWp OXGLTXH FDU YRV DPLV trouvent tellement plus cool de dĂŠnicher des remix de groupes new-­yorkais que l’Histoire ne retiendra pas (contrairement Ă l’assassin de Trotski). Vous ĂŞtes un incompris.

par Julien BlancGras

MON PSEUDO C’EST LILOU32 0DLV XQ MRXU YRXV UHFHYH] GHV FRQĂ€GHQFHV j YRL[ basse, comme on en fait que chez les toxicos. ÂŤ J’ai essayĂŠ ton truc, lĂ . C’est pas mal, en fait. On se cale une petite partie en live un de ces quatre ? Âť Vous souriez. Et vous explosez les impudents au ÂŤ face Ă face Âť pour leur apprendre Ă ne pas assumer les Au dĂŠbut, tout le monde vous prend pour un dĂŠbile. plaisirs simples de la France moyenne. C’est normal. Vous hurlez sur tous les toits que vous Un soir, enhardi, vous clamez votre passion dans avez dĂŠcouvert un truc mortel et les gens sont un peu un bar Ă la mode. Les regards se dĂŠtournent, dĂŠsarçonnĂŠs quand vous leur expliquez qu’il s’agit de embarrassĂŠs. Quelques minutes après, une jolie la version en ligne de Questions pour un champion. EORQGH RIĂ€FLDQW GDQV GHV FDQDUGV WHUULEOHPHQW 2XL O¡LPPXDEOH UHQGH] YRXV GH Ă€Q G¡DSUqV PLGL GH branchĂŠs vous glisse Ă France 3 cartonne avec sa l’oreille ÂŤ mon pseudo c’est nouvelle dĂŠclinaison Web ÂŤ QPUC on line, c’est moche et Lilou32, on s’en fait une lancĂŠe en mars dernier. ça ne sert Ă rien, mais ça peut petite quand tu veux Âť. Avec 150 000 visites sauver le QI. Âť Deux jours plus tard, quotidiennes, c’est le une amie qui travaille deuxième site le plus Karl Lagerfeld ? pourtant dans la fashion visitĂŠ du portail France (oĂš le moindre faux-­pas tendance peut vous coĂťter TĂŠlĂŠvisions. Vous crĂŠez votre petit avatar et vous votre job), me fait son coming-­out d’un air dĂŠgagĂŠ : pouvez jouer Ă la redoutable ĂŠpreuve du 4 Ă la suite ÂŤ J’adore la tension qui règne au moment des 9 points contre d’autres dĂŠbiles qui, comme vous, kiffent les gagnants. Âť Jubilation. Karl Lagarfeld ne devrait pas jeux de culture gĂŠnĂŠrale. QPUC on line prĂŠsente en tarder Ă dĂŠclarer que ÂŤ QPUC on line, c’est moche et ça outre l’inestimable avantage de nous ĂŠpargner les ne sert Ă rien, mais ça peut sauver le QI Âť. Pourquoi logorrhĂŠes hallucinĂŠes de Julien Lepers, le digital pas ? Les geeks sont bien devenus les maĂŽtres du cool ĂŠtant bien plus calme que l’original. HQ VH EUDQODQW VXU GHV Ă€JXULQHV GH &KHZEDFFD &¡HVW Vous jouez donc, avec la lĂŠgitime jouissance de celui peut-­être maintenant au tour des adorateurs du petit qui se souvient du nom de l’assassin de Trotski ou Larousse illustrĂŠ. — de la capitale du sultanat de Brunei en une fraction

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SPÉCIAL JEUX Portfolio

DANIEL JOHNSTON, POPE OF THE POP par Wilfried Paris

Dessins au feutre sur cahier d’Êcolier Extraits du Cahier dans la marge n°1 Arts Factory [ĂŠditions]

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6XUQRPPp Š OH SHWLW SDSH GH OD OR Ă€ ÂŞ 'DQLHO -RKQVWRQ 49 ans, grand (gros) enfant un peu schizophrène de Austin, Texas, enregistre dans sa chambre des comptines pop-­folk beatlesiennes (ses anges), amoureuses (dÊçues) ou monstrueuses (King Kong, Frankenstein, Casper) quand il ne dessine pas sur des cahiers d’Êcolier un foisonnant bestiaire mythologique, entre comics Ă la Jack Kirby (Captain America), enfer pop (Matt Groening meets Jerome Bosch) ou art brut paranoĂŻaque (croix gammĂŠes). DĂŠcouvert au dĂŠbut des annĂŠes 90 sur des cassettes autoproduites, cĂŠlĂŠbrĂŠ partout comme s’il ĂŠtait dĂŠjĂ mort (compiles et rĂŠĂŠditions nĂŠcrologiques), il rassure tout le monde sur son dernier album tout ĂŠlectrique, intitulĂŠ Daniel Johnston Is and Always Was. Godbless. — Disque Is and always was

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Effi Mild et Laurent Zorzin, à l’origine de la galerie Arts Factory, ont pris l’excellente initiative d’envoyer un cahier d’écolier aux artistes qu’ils exposent, leur demandant d’y dessiner ce qu’ils voulaient. Parmi eux, Nine Antico, Julien Langendorff (deux artistes à qui Standard a déjà confié ces mêmes pages), Isabelle Boinot, Jochen Gerner et... Daniel Johnston. La collection se décline sous la forme d’exposition itinérante. Du 19 mars au 17 avril, Ecole d’arts appliqués de Troyes dans le cadre du festival Qualité féroce. Du 22 mai au 13 juin, Le LieuUnique à Nantes. danslamarge.net

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TOUT SAUF VIEUX JEU

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Moitié du duo Eley Kishimoto, l’Anglais MARK ELEY, touche-àtout haut-de-gamme, s’amuse autant avec ses créations qu’en road trips sur sa Honda FTR 223. Portrait du joker de la mode.

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MODE & DESIGN

par Elisa Tudor

ÂŤ -RXHU VLJQLĂ€H JDJQHU rWUH RXYHUW G¡HVSULW rWUH PRGHUQH s’amuser dans son travail, se laisser aller au jeu de rĂ´le de la vie ; c’est une source d’inspiration qui rend heureux ! Âť L’homme qui parle ressemble Ă un ourson proche de l’âge adulte ou Ă ce que serait David Lynch soudain reconverti en catcheur. Notre première rencontre avec Mark Eley : cet ĂŠtĂŠ, Ă Berlin, il est en train de partager ses connaissances avec de jeunes crĂŠateurs de mode au workshop Five Gum Vision Lab, organisĂŠ par les chewing-­gum Wrigleys. Sa mission professorale terminĂŠe, il emmène ses pupilles dans une soirĂŠe de promotion pour les frisbees qu’il vient de crĂŠer en collaboration avec Freestyle Magazine. Il passe la soirĂŠe en tant que DJ sur le toit d’un bus.

qui expriment une approche enfantine de la mode, accentuĂŠe par les bleus et roses pastels mĂŠlangĂŠs Ă des jaunes et rouges vifs, et inspirĂŠes par une boĂŽte Ă jouets : ÂŤ Ça donne une ambiance onirique oĂš l’on ressent la sensation prĂŠcise d'une gamme de couleurs, d'une coupe, d'ĂŠtoffes choisies, continue Mark Eley, il est Ă tel point important pour nous de parler aux gens susceptibles de porter nos vĂŞtements, qu’on termine souvent notre collection en ĂŠcrivant un poème distribuĂŠ dans notre showroom. Âť

Eley Kishimoto communique avec des amateurs en tout genre, parlant d’ imprimĂŠs intelligents Âť et se GpĂ€QLVVDQW FRPPH Š GpFRUDWHXU GH VXUIDFH ÂŞ Š Le monde nous offre beaucoup d’outils, utilisons-­les pour Octobre, galerie Jean Rochdard, dans le quartier du le dĂŠcorer et jouer avec ! Âť D’autres artistes jouent Marais, Ă Paris : la fashion week prĂŞt-­à -­porter bat son j ERXVFXOHU OD PDJQLĂ€FHQFH XQ EULQ VpULHXVH GH OD plein. Eley Kishimoto prĂŠsente sa collection Beyond haute-­couture : ÂŤ Bernhard Willhelm et Jeremy Scott the chintz (littĂŠralement ÂŤ au-­delĂ de la fripe Âť), ainsi expĂŠrimentent l’humour dans le prĂŞt-­à -­porter. La MR\HXVHPHQW GpĂ€QLH SDU 0DUN Š Une sorte de bric-­à -­ mode commence Ă prendre des traits plus enjouĂŠs brac, des vĂŞtements du placard de ta grand-­mère – des et loufoques, pour attirer l’attention d’un public plus PRWLIV Ă RUDX[ jeune et ouvert des imprimĂŠs d’esprit. Âť Au old-­school – avec rayon fantaisie, ÂŤ Les vĂŞtements de ta grand-mère, le petit qui joue on citera aussi le petit qui joue au Game Boy, au game-­boy en les Belges le chien qui aboie arrière plan, le Jean-­Paul et les voisins qui fument du crack. Âť chien qui aboie Lespagnard (voir Mark Eley, dĂŠfinissant sa collection en voyant le Standard n°24) facteur et les et Walter Van voisins qui s’enferment pour fumer du crack. Âť Beirendonck, et les Français d’Andrea Crews‌ Mais Une vision des choses mue par l’Ênergie british de Mark Eley va plus loin que le prĂŞt-­à -­porter. Dans son 0DUN HW DGRXFLH SDU OH UDIĂ€QHPHQW GH OD PRLWLp parc d’attractions : le jouet collector Be@rbrick, les japonaise du duo, Wakako Kishimoto, qui plaĂŽt frisbees, l’Êtui PSP et des meubles ÂŤ do-­it-­yourself Âť aux marques de luxe. Eley Kishimoto a fricotĂŠ (et pour Ben Wilson comblent ses envies de gai touche-­ tricotĂŠ) avec Alexander McQueen, YSL, Givenchy Ă -­tout. Etendre sa touche en dehors de sa propre ou Louis Vuitton, et a obtenu le poste de directeur marque est pour lui ÂŤ pour un public qui aime s’amuser. artistique pour Cacharel entre 2007 et 2008. ÂŤ Au Tous les produits autour de notre label sont nĂŠs d’une dĂŠbut, on crĂŠait des imprimĂŠs classiques qui nous ont amitiĂŠ ou d’un concept marketing ludique Âť. valu de nombreuses collaborations avec des crĂŠateurs ; aujourd’hui, on joue plus avec notre philosophie de ÂŤ PRINCESSE DE PREMIĂˆRE CLASSE Âť travail. On crĂŠe des imprimĂŠs hors du commun. Âť On Autre projet amical et culturel permettant de sortir compte des collab’s plus accessibles, adressĂŠes Ă un peu du clan de la mode ĂŠlitiste : Mark Eley uni un public plus jeune, avec Converse depuis 2002 et Ă son amie de longue date Sophie Calle pour une Eastpack en 2008, allant au-­delĂ de la mode, lorsqu’il exposition Ă la Biennale de Venise en 2007. Une s’agit d’habiller le groupe de pop minimale Broadcast mise en scène de livre d’artiste (Prenez soin de vous, par exemple. construit autour d’une lettre de rupture) est aussi naturel pour lui que la customisation de casques de POĂˆME DE SHOWROOM moto avec les Ateliers Ruby. La passion de Mark pour /HXU SOXUDOLWp VH UHĂ qWH GDQV OD FROOHFWLRQ SULQWHPSV les motos ne nous ĂŠtait pas ĂŠtrangère. Il ĂŠtait arrivĂŠ pWp ,PSULPpV j UD\XUHV Ă RUDX[ HW SROND UREHV devant son showroom parisien avec sa Honda favorite Ă volants, cols marins‌ reprĂŠsentent le cĂ´tĂŠ plus et des sacoches assorties Ă son casque. Monsieur Eley innocent de la collection et se mĂŠlangent Ă des coupes serait-­il ultra fashion victim ? ÂŤ Mais non ! se dĂŠfend-­il, courtes et sexy, des pantalons boyfriend et des motifs riant, mais Ă force de voyager, je me suis dit que ça Ă plumes plus sauvages et ethniques : des tenues serait cool de me sentir comme Ă la maison avec mon

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LPSULPp Ă DVK VXU PD VDFRFKH MH YHX[ PH VHQWLU FRPPH une princesse en première classe ! Âť Pendant l’interview, Mark a du mal Ă ne pas plaisanter, il nous propose d’aller boire une bière et de reporter les questions sĂŠrieuses Ă un autre jour. ÂŤ Il faut de l’humour dans ce business, sinon tu es foutu d’avance ; c’est l’excuse que j’utilise pour monter des projets urbains comme Hairywood Ă Londres [une installation mĂŠtaphore d’une forĂŞt en ĂŠrection]. Âť Après quelques soirĂŠes arrosĂŠes en notre compagnie, la fashion week parisienne venant Ă son terme, Mark s’envole pour Moscou oĂš il ĂŠtait invitĂŠ par l’ambassade britannique pour le projet d’urbanisme City Future Game. De retour Ă son atelier londonien, il QRXV VN\SH HQĂ€Q GpFLGp Ă accorder un peu de temps Ă nos questions pas drĂ´les. Par webcam, on en SURĂ€WH SRXU MHWHU XQ FRXS d’œil Ă son atelier, une DQFLHQQH XVLQH j FRQĂ€WXUH de trois ĂŠtages : un escalier,

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des ĂŠtoffes partout et, bien sĂťr, des motos. ÂŤ On a dĂŠjĂ un pop-­up store dans une cave ici, Ă Londres, et dans une ancienne chocolaterie Ă Tokyo. J’aime utiliser des espaces qui racontent une histoire. Âť De ce lieu de travail est nĂŠe EK Jam Factory, une ligne de vĂŞtement crĂŠĂŠe en octobre avec la marque d’accessoires amĂŠricaine Anthropologie. ÂŤ C’est une sorte de dĂŠrivĂŠ, de plateforme pour les artistes avec lesquels on collabore sans brouiller l’identitĂŠ de Eley Kishimoto. Âť Artiste lui-­mĂŞme ? ÂŤ L’ambassade avait fait venir quelques artistes, dont moi-­mĂŞme, pour une consultation sur le rĂŠamĂŠnagement d’un quartier pauvre de la ville. Tout le monde ĂŠtait super sĂŠrieux, voulant crĂŠer des musĂŠes-­concepts et des amĂŠnagements ĂŠcolos. J’ai proposĂŠ tout bĂŞtement de bâtir une place verte, ĂŠcolo Ă souhait, pour en boucher un coin Ă la place rouge. Ils m’ont regardĂŠ comme si j’Êtais fou ! Mais j’Êtais sĂŠrieux : Ă force de divaguer dans l’art, on perd son essentiel, c’est-­à -­dire le fait de divertir, d’embellir la vie ! Après tout, fuck it, LW¡V RQO\ D JDPH ÂŞ Âł

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De gauche à droite, de haut en bas : la chaise EK, l’ours Bearbricked le casque Ruby, la Honda FTR 223. Page de droite : Collection printempsÊtÊ 2010.

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MODE & DESIGN

Coup de pinceau

Ensemble Eley Kishimoto pour les Galeries Lafayette

Grand Magasin Haussmann Du 24 mars au 8 mai

« A force de divaguer dans l'art, on perd l’essentiel : divertir, embellir la vie ! »

Mark Eley

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ELEY KISHIMOTO aux Galeries Lafayette. Attention, peinture fraîche.

Mark Eley a designé pour les Galeries Lafayette un charmant ensemble robe t-shirt/écharpe imprimé chaînes, très années 80 et accessible (moins de 100 euros par pièce). Une exclusivité qui inaugure l’opération Edition Spéciale menée à partir de ce printemps et signant le retour des Galeries sur le devant de la scène mode. Le superstore du boulevard Haussmann va, pendant plusieurs semaines, multiplier collaborations, événements et expositions avec les artistes, créateurs ou maisons de luxe les plus d’avant-garde. Le fil rouge de cette action ? eh bien le rouge ! Le but étant d’intégrer dans chaque création le code couleurs du logo des Galeries – une autre forme de retour aux fondamentaux en quelque sorte. David Herman

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JUDITH HOMAS Derrière ce vêtement se cache Judith Thomas, l’un des talents de l’Académie royale d’Anvers. Mais où se trouve cette caverne d’Ali Baba de la mode ? Réponse : en Belgique. Si vous avez répondu aux Pays-Bas, retournez fumer des boulettes case beu.

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Avec cette collection limitée, Louis Vuitton rend hommage à un sport très sexy. Imaginer les talons aiguilles de la maison sur une planche à roulettes, cela plairait-il davantage à Tony Hawk ou Marc Jacobs ? Réponse : les deux. Et tout le monde avance !

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ROMAIN KREMER Pour sa collection printemps/été 10, Romain Kremer a collaboré avec une marque de lunettes tendance. A. Persol, B. Mykita, C . Ray Ban ? Réponse : B. Mais voyons, Ray Ban, c’était tendance en 2007 ! Les perdants reçoivent un bon d’achat chez Optic 2000.

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Partie d’échecs très glamour en 05 chez Alexander McQueen. La question le sera moins : combien de pions comprend un échiquier : 16 ou 14 ? Réponse : 16. Ceux qui n’ont pas trouvé sont fous et se rendent sur la case «Chance » rose.

Le jeu préféré de nos petits frères devient chez J. C. de Castelbajac un accessoire de mode pour les myopes de cet hiver. Le Lego ou les dominos ? Si vous avez répondu les dominos, tombez brusquement sur votre voisin de droite.

ALEXANDER MCQUEEN JEAN-CHARLES DE CASTELBAJAC

Le Japonais Watanabe, designer de cette tenue printemps/été 10, est plus connu pour ses créations au sein de : A. Comme des Garçons ou B. Eley Kishimoto ? Réponse : A. Les perdants retournent en sifflant vers la case « Départ » ou foncent page 124 pour approfondir leurs connaissances.

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SPÉCIAL JEUX Mode

LOUIS VUITTON


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Barbie se transforme en chapeau chez Piers Atkinson. Mais combien de bougies notre blonde favorite a-t-elle soufflé en 09 ? A. 50, B. 100, C. 752 ? Réponse : A. Ceux qui n’ont pas trouvé ne recevront rien de Santa Klaus.

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Encore un tour ! Ni à la fête foraine ni au cirque, mais aux défilés : quel créateur a pensé à cette partie de plaisir ? A. Manish Arora, B. Gareth Pugh, C. Giles Deacon ? Réponse : A, collection été 09. Si vous n’aviez pas trouvé, refaites un tour.

MANISH ARORA

A quel jeu Ashish fait-il allusion dans sa collection automne/ hiver 09 ? Réponse : le scratchball. Si vous avez répondu « une bataille de boules de neige », c’est que vous avez trop fumé. Restez sur cette case jusqu’à la fin de vos jours.

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L’idée qui inspire les broderies et broches des robes cocktail d’été 10 de Cacharel fut volée dans une cour d’école. De quoi s’agit-il ? A. La corde à sauter, B. Le saut à l’élastique, C. Le scoubidou ? Réponse : C. Les autres, allez au coin.

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CACHAREL

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Walter van Beirendonck a la chance d’avoir une dream doll à son effigie. Mais de quel collectif épatant faisait-il partie dans les années 80 ? A. The B’52’s, B. Antwerp 6, C. 2be3 ? Réponse : B. Hey, les losers ! Procurez-vous vite fait une poupée gonflable.

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N O E RT D OIX A S C E H N LD C U SO RE T Z VE LES VO CE R DE E U R O E P SS E PR

Bernhard Willhelm laisse ses mannequins s’amuser avec des cerceaux pendant sa performance d’automne/hiver 09. A Berlin ou à Paris ? Réponse : Berlin. Eh oui, il ne fallait pas se fier à la photo : la tour Eiffel fut exportée pour l’occasion. Die Verlierer sind dumm!

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PIERS ATKINSON

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SPÉCIAL JEUX DÊcouverte

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E I P TOU

Professeur de mode de l’Institut de Chicago et artiste, NICK CAVE compose des tenues musicales. Entre tradition et extravagance, rigiditĂŠ et mouvement, ça donne le tournis. par Elisa Tudor

combinaisons sur lesquelles sont Nick Cave, Ă ne pas confondre accrochĂŠs des jouets chinĂŠs dans avec le chanteur australien des brocantes, imprĂŠgnĂŠes de burinĂŠ, jongle avec la mode, la couleurs chaudes et de motifs sculpture, la musique, la danse, Ă RUDX[ UpPLQLVFHQFHV GH VD la performance, pour crĂŠer un XQLYHUV GpMDQWp Ă€QDOHPHQW FODVVp culture afro-­amĂŠricaine. Nick Cave exprime un au rayon de l’art contemporain. mouvement constant, propre et Lors de sa première exposition attachĂŠ Ă l’Afrique, en 2006 au centre oĂš le mouvement culturel de Chicago, ÂŤ Des armures du corps est liĂŠ Ă ses ÂŤ soundsuits Âť d’univers la cĂŠlĂŠbration de surdimensionnĂŠs traditionnel, forces divines. ÂŤ Mes et très colorĂŠs, pour protĂŠger soundsuits sont imaginĂŠs Ă des attaques comme des armures l’origine pour extĂŠrieures. Âť d’univers traditionnel, ĂŠmettre des Nick Cave destinĂŠes Ă protĂŠger sons lors d’une des attaques performance extĂŠrieures Âť, lit-­ de danse, on sur son site. Des crĂŠations impressionnent les amateurs hybrides et ethniques, de ÂŤ fashionart Âť. DĂŠbut 2009, folkloriques et modernes, qui Ă la galerie new-­yorkaise Jack LQVXIĂ HQW j O¡HVSULW VRSKLVWLTXp Shainman, la nouvelle collection de la mode une dimension de ÂŤ vĂŞtements sonores Âť de sociopolitique enjouĂŠe. cet ancien danseur s’avère Partie gagnĂŠe —. encore plus sculpturale : des

Recent Soundsuits

Courtesy Jack Shainman Gallery, NY

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DECOUVERTE

La crÊatrice espagnole RAKI FERNANDEZ, 26 ans, a nommÊ sa troisième collection How to play with Raki. Des cocottes sur ses robes, Raki fait de la mode son jeu prÊfÊrÊ. par Elisa Tudor photographie Marta Gornicka

Entre WOAH, sa galerie d’art contemporain Ă Neukolln dans le sud de Berlin, ses collections de prĂŞt-­à -­porter, du stylisme pour MTV et des performances avec le collectif Sameheads, Raki Fernandez a eu le loisir de rĂŠpondre Ă nos questions. Pourquoi avoir choisi le jeu de la cocotte comme motif ? Raki Fernandez : J’ai essayĂŠ de choisir un jeu commun Ă l’Europe puisque je vends en Espagne, en Italie et en Allemagne. Les gens V¡LQGHQWLĂ€HQW HW FRPSUHQQHQW rapidement le concept. Je ne sais pas si c’est dans l’air du

ÂŤ Choisir ses vĂŞtements devrait ĂŞtre le moment le plus amusant de la journĂŠe. Âť

Raki Fernandez

C’EST LE LOOK COCOTTE

temps, mais je trouve cette forme intĂŠressante. J’en ai fait une grosse en papier pour mon look book. C’est une prĂŠsentation originale. Tu dis t’amuser avec la mode. Quels sont ses aspects ludiques ? Un coup d’œil dans ta garde-­robe chaque matin devrait dĂŠjĂ ĂŞtre une partie de plaisir qui te donne l’opportunitĂŠ de jouer avec les diffĂŠrentes facettes de ton identitĂŠ. Changer d’optique selon ton humeur enrichit la perception de toi-­mĂŞme et celle que les autres ont de toi, ce qui rend la vie amusante. Le milieu de la fashion se prend trop au sĂŠrieux ? $EVROXPHQW 6L SOXV GH JHQV VDYDLHQW H[SpULPHQWHU et jouer avec la mode, les balades dans la rue deviendraient plus intĂŠressantes et ludiques. S’habiller est une nĂŠcessitĂŠ, il faut savoir jouer avec ce caractère indispensable. C’est gĂŠnial quand un inconnu te fait un EHDX VRXULUH j FDXVH GH WRQ DSSDUHQFH &¡HVW TXH WX DV rĂŠussi Ă le faire rĂŞver et Ă le faire sortir de son train-­ train quotidien. Travailler, c’est ta manière Ă toi de t’amuser ? La mode c’est mon travail oui, mais en mĂŞme temps,

mon loisir, mon divertissement prĂŠfĂŠrĂŠ. Se mettre toujours Ă l’Êpreuve, ne pas arrĂŞter d’Êvoluer. Le mĂŠli-­mĂŠlo crĂŠatif de Berlin me donne l’opportunitĂŠ de rĂŠaliser toutes mes envies, ce qui n’Êtait pas possible en Espagne, qui manque de diversitĂŠ artistique. Berlin prĂŠvoit toujours des journĂŠes chargĂŠes et chaotiques, remplies de nouvelles idĂŠes qui me laissent poursuivre mon jeu. A part ça, tu t’amuses comment ? J’adore le poker. Avec tous mes projets, je n’ai pas vraiment le temps pour les parties, mais j’ai toujours XQ MHX GH FDUWHV GDQV PRQ MHDQ DX FDV R Âł Prochaine collection Ă dĂŠcouvrir en mars sur rakibcn.com

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SPÉCIAL JEUX Mode

JOUONS UN PEU De haut en bas et de gauche à droite Baskets Puma Meile Easyrider, 1978 Montres Phantom Blouson teddy Feiyue Casques WESC Gants Firetrap Baskets G-­Star Raw Veste Timberland

illustration Mlle Chat-Chat

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MODE

Sac Franklin & Marshall Nœud papillon Laurent Desgrange Blouson Kway Cravates Yves Saint Laurent Bottes UGG Slip Benetton

Réponse : les cravates. Seuls accessoires d’une marque haute couture. PAGE

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SPÉCIAL JEUX Culte

LEGO a 50 ans et s’attaque aux

jeux de société. La vie en jaune ?

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CULTE

par David Herman illustration Thomas Dircks

Jeux de sociÊtÊ Lego™

Dix jeux disponibles en magasin Ă partir de janvier

Chaque gĂŠnĂŠration a connu sa famille de Lego. Celle qui dĂŠboule HQ SUpĂ€JXUH XQ UHYLUHPHQW total dans l’apprĂŠhension de la brique mythique. Le but n’est plus de construire son bateau de fret ou sa moto de police reclus dans sa chambre, mais de rĂŠunir jusqu’à huit personnes autour d’une table familiale pour dĂŠcouvrir le jeu de sociĂŠtĂŠ made in Lego. Une première pour cette marque qui explore dĂŠjĂ un nombre de gammes considĂŠrable, rĂŠpondant aux besoins de dĂŠveloppement du bambin ĂŠveillĂŠ (et son Lego Duplo)

j O¡DGXOWH FRQĂ€UPp VRQ /HJR Technic). C’est en travaillant Ă cette forme de rĂŠinvention permanente que le groupe s’est dĂŠveloppĂŠ depuis cinquante ans dans plus de cent trente pays. Et nous parions que dans un temps encore au moins ĂŠquivalent, nous continuerons de prononcer le petit phrasĂŠ danois magique, ĂŠtymologie du nom de la marque : ÂŤ Leg Godt ÂŞ VLJQLĂ€DQW littĂŠralement ÂŤ joue bien Âť. Cette bonne vieille tĂŞte de Beatles de Playmobil pourra-­t-­elle en dire autant ? —

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SPÉCIAL JEUX Philosophie

Sur une des plages de Koh-Lanta, dialogue ÊclairÊ à la torche entre les SEPT PLUS GRANDS PENSEURS DU JEU, d’Aristote à Freud, chargÊs d’Êliminer l’un des leurs. par SÊbastien d’Ornano illustration Thomas Dircks

Koh-Lanta, le choc des hĂŠros

sur TF1 en mars

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En MicronÊsie, au creux de l’une des centaines d’Îles de la RÊpublique des Palaos, Denis Brogniart retrouve la tribu des  Logos , oubliÊe sur place depuis plus de cent ans. Lors du conseil de ce soir, ils devront, dans la pÊnombre, voter pour Êliminer l’un d’entre eux – car le jeu continue, Êternellement.

Aristote : C’est exact. Le jeu est une sorte de dĂŠlassement, du fait que nous sommes incapables de travailler d’une façon ininterrompue et que nous avons besoin de relâche. Le dĂŠlassement n’est donc SDV XQH Ă€Q FDU LO Q¡D OLHX TX¡HQ YXH GH O¡DFWLYLWp 3 Ça PH UDSSHOOH TXH 3ODWRQ PRQ IUqUH Ă€W XQ MRXU GHV reproches Ă un homme qui jouait aux dĂŠs. L’autre lui Denis Brogniart : Aristote, cette ĂŠdition de rĂŠpondit qu’il s’emportait pour bien peu de choses. Koh-­Lanta dure depuis Platon rĂŠtorqua : ÂŤ Mais plus d’un siècle. Vous n’en l’habitude d’y jouer n’est pas avez pas marre de jouer ? peu de choses. Âť 4 ÂŤ Il ne faut pas parler sur Aristote : Certes. D’autant Denis Brogniart : Thomas, le jeu, il ne faut pas rire, que ce n’est pas dans le jeu vous avez l’air hĂŠsitant. La il ne faut pas tousser, que consiste le bonheur. Il partie vous lasse ? autrement ils sont serait mĂŞme ĂŠtrange que la Saint-­Thomas d’Aquin : Un tous dĂŠpitĂŠs. Âť Ă€Q GH O¡KRPPH I€W OH MHX chouĂŻa. Ceux qui ne jouent Saint-Thomas d’Aquin et qu’on dĂťt se donner du jamais, de telle sorte qu’ils tracas et du mal pendant ne disent rien d’agrĂŠable et WRXWH VD YLH DĂ€Q GH SRXYRLU qui repoussent les choses s’amuser.1 agrĂŠables que les autres disent avec modĂŠration, pèchent Ă la vĂŠritĂŠ, mais moins que ceux qui donnent Gottfried Leibniz : Totote a raison. Il semble dans l’excès contraire en jouant trop.5 nĂŠanmoins que nous sommes si accoutumĂŠs au jeu et au badinage que nous jouons jusque dans Emmanuel Kant : Jamais blanc ou noir, Saint-­ les occupations les plus sĂŠrieuses, et quand nous 7KRPDV 7RXMRXUV GDQV OH JULV >)UHXG HW /HLEQL] y pensons le moins.2 rient de bon cĹ“ur]. Je trouve qu’il est profondĂŠment

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PHILOSOPHIE

Sources

singulier de voir comment des hommes raisonnables sont capables de rester assis et de tailler les cartes souvent pendant des heures. D’oĂš l’on voit d’ailleurs que les hommes ne cessent pas si facilement d’être des enfants.6 Pour cerner les vrais intellos de la bande, je rappelle ce que disait Rousseau qui nous a quittĂŠ la deuxième semaine après l’Êpreuve de la promenade en ĂŠquipe : ÂŤ On voit rarement les penseurs se plaire beaucoup au jeu. Âť7 Denis Brogniart : Blaise, vous, vous avez vraiment triste mine. Blaise Pascal : La seule chose qui nous console de nos misères, c’est le divertissement, et cependant c’est la plus grande de nos misères.8 D’Aquin : En plein dans le mille, Pascalou. Y a-­t-­il attention plus triste, plus sombre et mĂŠlancolique que celle des joueurs ? Il ne faut pas parler sur le jeu, il ne faut pas rire, il ne faut pas tousser, autrement ils sont tous dĂŠpitĂŠs.9 Leibniz : Waou, vous avez raison de partager la mĂŞme WHQWH WRXV OHV GHX[ 4X¡HVW FH TX¡RQ ULJROH /¡HVSULW humain paraĂŽt mieux dans les jeux que dans les matières les plus sĂŠrieuses.10 Amusant, non ? L’esprit s’y trouve Ă son aise.11 Aristote : Ce qui est sĂťr, et nous en parlions justement ce matin Ă la pĂŞche avec Casanova, c’est qu’on peut en savoir plus sur quelqu’un en une heure de jeu qu’en une annĂŠe de conversations.12 Denis Brogniart : Giacomo, vous jouez beaucoup ? Casanova : Pour tout vous dire, moi je joue et j’ai grand tort, car je n’ai ni la force de quitter quand la fortune m’est contraire, ni celle de ne pas courir après mon argent. Ce qui me force Ă jouer est un sentiment d’avarice. J’aime la dĂŠpense et je la regrette quand ce n’est pas le jeu qui me fournit l’argent pour la faire. J’ai l’impression que l’argent gagnĂŠ au jeu ne me coĂťte

1 Ethique Ă Nicomaque, X, 6, 1176b (-IVe siècle) 2 Essais de ThĂŠodicĂŠee, I, 56 (1710) 3 Ethique Ă Nicomaque, X, 6, 1176b (-IVe siècle) 4 Diogène LaĂŤrce, Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres (environ 200 après J.-C.) 5 Somme thĂŠologique, art. IV (1272) 6 RĂŠflexions sur l’Êducation (17XX) 7 Emile, ou De l’Education (1762) 8 PensĂŠes (1670) 9 Introduction Ă la vie dĂŠvote ( ?) 10 Nouveaux essais sur l’entendement humain (1705) 11 Lettre Ă RĂŠmond de Montmort (1714) 12 Diogène LaĂŤrce, Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres (environ 200 après J.-C.) 13 Histoire de ma vie, I, 408, 1825 14 Histoire de ma vie, fragment 168 15 ÂŤ Le CrĂŠateur littĂŠraire et la fantaisie Âť, in InquiĂŠtante ĂŠtrangetĂŠ (1919)

rien.13 Sinon, pour changer de sujet, on n’aurait pas dĂť ĂŠliminer toutes les signorinas, no ? Pascal : Tout cela est vicieux. Tel homme passe sa vie sans ennui, en jouant tous les jours peu de choses. Donnez-­lui tous les matins l’argent qu’il peut gagner, Ă la charge qu’il ne joue plus : vous le rendez malheureux. On dira qu’il recherche l’amusement du jeu et non pas le gain. Faites-­le donc jouer pour rien, il s’y ennuiera. Ce n’est donc pas l’amusement seul qu’il recherche : un amusement languissant et sans passion l’ennuiera. Il faut qu’il s’y ĂŠchauffe et qu’il se mente Ă lui-­mĂŞme, en s’imaginant qu’il serait heureux de gagner ce qu’il ne voudrait pas qu’on lui donnât Ă condition de ne plus jouer.14 Sigmund Freud : C’est fou‌ Et lĂ se forme un sujet de passion, un sujet qui l’excite, un sujet qui rĂŠveille son dĂŠsir, sa colère, sa crainte, qui le fait bander et il n’en pleut plus le joueur, il n’en peut plus, il n’a qu’une envie c’est de s’envoyer en l’air, jouer Ă la bĂŞte Ă deux dos, mettre Papa dans Maman, et‌ Denis Brogniart [l’interrompant] : Très bien, messieurs. Nous allons passer au vote. L’un d’entre vous va devoir nous quitter. A vos bulletins. Chaque philosophe glisse un petit papier dans le tronc G¡XQ SDOpWXYLHU IDLVDQW RIĂ€FH G¡XUQH Denis Brogniart : C’est l’heure du verdict. Sigmund Freud doit quitter l’aventure. Freud : Il doit y avoir erreur. Je suis frustration. Denis Brogniart : Vous ĂŞtes dĂŠsormais exclu de la tribu des Logos. Un petit message Ă vos camarades avant de partir ? Freud : Vous vivez tous une sale rĂŠalitĂŠ. PrĂŠcisĂŠment, je crois que l’opposĂŠ du jeu ce n’est pas le sĂŠrieux, c’est la rĂŠalitĂŠ.15 —

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SPÉCIAL JEUX Philosophie (suite)

Par peur de perde du temps, certains n’arrivent pas à jouer sans culpabiliser. C’est grave Docteur Maboule ? Heu‌ pardon, monsieur le philosophe ?

 LA LIBERTÉ DE ROQUER  par Bertrand Guillot* illustration Wa

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Perd-­on son temps en jouant ? &RODV 'XĂ R SKLORVRSKH HW SURIHVVHXU GH OLWWpUDWXUH : Depuis Erasme, on sait que le jeu n’est pas une perte de temps, qu’il contribue au dĂŠveloppement de l’intelligence, Ă l’apprentissage de la vie sociale. Attention toutefois : Ă trop insister sur la dimension pĂŠdagogique, on ramène le jeu Ă un moyen, sans en voir la principale richesse qui est cette formidable puissance de donner de la vie Ă des temps ÂŤ morts Âť, et d’enrichir notre humanitĂŠ. On ne perd pas plus son temps Ă jouer Ă un bon jeu que discuter entre amis. Il existe tout de mĂŞme des jeux sans intĂŠrĂŞt et très addictifs‌ Bien sĂťr. Si vous lancez un Tetris au lieu d’Êcrire votre article, vous pourrez considĂŠrer que vous perdez votre temps. Mais vous pourriez lire un roman de gare. La question n’est pas celle du jeu : il n’est qu’un moyen de meubler une fuite. La vraie question, c’est ce que vous fuyez. )UHXG GpĂ€QLW OH MHX FRPPH Š s’opposant non pas au sĂŠrieux mais Ă la rĂŠalitĂŠ Âť. Qu’en dites-­vous ? L’approche de Freud est très fĂŠconde. Il s’Êloigne de tous les penseurs qui le plaçaient du cĂ´tĂŠ du futile et insiste sur sa dimension constructive, sa richesse interne. Et s’inscrit dans la lignĂŠe d’un Leibniz : le jeu, dit-­il, ÂŤ FRQVWUXLW GHV PRQGHV Ă€FWLIV R V¡H[SULPH

l’intelligence humaine libĂŠrĂŠe de la contrainte de la rĂŠalitĂŠ Âť. Quels ont ĂŠtĂŠ les grands penseurs du jeu au XXe siècle ? Le NĂŠerlandais Johan Huizinga a insistĂŠ (avec Homo Ludens, 1938) sur la règle ÂŤ librement consentie mais complètement impĂŠrieuse Âť qui fonde le jeu, mais aussi sur les limites de temps et de lieu, ÂŤ avec la conscience d’être autrement que dans la vie courante Âť. Toute la pensĂŠe contemporaine sur le sujet [Roger Caillois et Jacques Henriot, notamment] part de cela. Cependant, peu d’auteurs s’y intĂŠressent. Huizinga lui-­mĂŞme l’Êtudie comme un modèle pour comprendre l’ensemble des activitĂŠs culturelles. Et vous ? Je m’y suis d’abord intĂŠressĂŠ en tant que joueur. J’ai toujours aimĂŠ dĂŠcouvrir de nouveaux jeux, en essayant de comprendre leur logique. Dans les annĂŠes 90, je travaillais sur la philosophie du droit chez Kant, donc sur le rapport entre la libertĂŠ et la règle‌ C’est en FUHXVDQW TXH P¡HVW YHQXH O¡LGpH G¡XQH GpĂ€QLWLRQ GX jeu en lui-­mĂŞme, qui tient en une double libertĂŠ. Le jeu est l’invention d’une libertĂŠ dans et par une lĂŠgalitĂŠ. La ÂŤ lĂŠgalitĂŠ Âť, ici, c’est la règle, essentielle, qui encadre la libertĂŠ du joueur. Classique et incomplet sans une autre libertĂŠ : celle qui est crĂŠĂŠe par des règles

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PHILOSOPHIE

arbitraires. Aux ĂŠchecs, j’ai le droit de roquer, mais cette libertĂŠ n’existe pas ailleurs que dans la règle du jeu. C’est la ÂŤ lĂŠgalibertĂŠ Âť dont vous parlez dans Jouer et philosopher. VoilĂ . On a tendance Ă considĂŠrer la règle comme un bornage – mais elle produit elle-­mĂŞme de la libertĂŠ, qui dĂŠtermine la richesse d’un jeu. Car en explorer les possibilitĂŠs est l’une des principales activitĂŠs du joueur. S’il est trop simple, si une stratĂŠgie s’avère gagnante Ă tous les coups, on s’en lasse. Les ĂŠchecs ou le go mĂŠnagent des libertĂŠs telles qu’une culture a pu se dĂŠvelopper autour d’eux.

ÂŤ On ne perd pas plus son temps Ă jouer qu'Ă discuter entre amis. Âť

Colas Duflo Et les jeux vidĂŠo ? 6DQV FKDQJHU OD GpĂ€QLWLRQ OH MRXHXU WURTXH VD OLEHUWp contre une libertĂŠ ludique), ils posent des questions nouvelles : le rapport Ă la règle, le rapport au temps. Avec les jeux en rĂŠseau ou et ceux Ă univers rĂŠsident, OHV SRWHQWLDOLWpV VRQW TXDVL LQĂ€QLHV

Mais pourquoi joue-­t-­on ? Pour le plaisir. Qui est d’abord de rester dans le jeu, puis d’augmenter notre puissance d’agir dans le jeu. LibertĂŠ, règles, plaisir‌ que l’on peut ensuite appliquer Ă la vie sociale ? -¡HVSqUH ELHQ TXH QRQ 6LQRQ M¡DXUDLV PDQTXp PRQ propos. Certes, nous nous soumettons tous les jours Ă des lois et Ă des règles arbitraires mais rĂŠgulant des libertĂŠs existantes. Les conducteurs existaient avant le code de la route, alors que vous ne pouviez pas jouer au squash avant que ses règles ne soient inventĂŠes : ce VRQW OHV UqJOHV TXL RQW FUpp OHV FRXUWV HW OHV UDTXHWWHV (QĂ€Q QRWUH PRQGH HVW LO GH SOXV HQ SOXV OXGLTXH " Oui. On habille la rĂŠalitĂŠ de ludique, ce qui crĂŠe une confusion croissante entre jeu et rĂŠel. Voyez les jeux ĂŠducatifs. On essaie de faire digĂŠrer les choses en leur donnant une forme amusante, mais cela est souvent pauvre en jeu et perd de sa puissance ; les enfants reviennent vite aux ÂŤ vrais Âť divertissements. N’oublions pas que le jeu a une dimension culturelle, et mĂŞme subversive. —

Jouer et philosopher

1997 Le Jeu de Pascal Ă Schiller

1997 Diderot, l’expÊrience de l’art

2007 PUF

* Bertrand Guillot est l’auteur de Hors-­jeu (Le Dilettante, 2007), premier roman trĂŠpidant sur un jeune loup du marketing SXEOLFLWDLUH GpWHUPLQp j WRXW SRXU DUULYHU HQ Ă€QDOH G¡XQ MHX tĂŠlĂŠvisĂŠ.

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SPÉCIAL JEUX Tourisme

Fiche-bricolage du guide LATOUREX,  laboratoire de tourisme expÊrimental  ingÊnieusement farfelu, idÊal pour fuir l’hiver à JÊrusalem (dans les Vosges).

par Tristan Ranx* illustration Juliette MaĂŻ

* Retrouvez les voyages noctambules de Tristan Ranx, auteur de La Cinquième saison du monde (Max Milo), chaque samedi dans LibÊration.

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Vous dĂŠambulez dans le dĂŠdale de canaux et de rues de G¡XQ SUpĂ€[H JUHF RX ODWLQ YRLU HQFDGUp 'HV FHQWDLQHV la citĂŠ des Doges. Un groupe de touristes passe devant de mĂŠthodes, de ÂŤ l’alĂŠatourisme Âť au ÂŤ zygotourisme Âť, vous en suivant leur guide braillard. Des couples ont ainsi ĂŠtĂŠ inventĂŠes et testĂŠes. Le Latourex GpSOLHQW XQH FDUWH GH 9HQLVH G¡DXWUHV RQW OHV \HX[ Ă€[pV s’inspire aussi bien des dadaĂŻstes, des surrĂŠalistes sur le GPS de leur tĂŠlĂŠphone. Vous souriez. Ces gens et des situationnistes en jouant des comportements sont ridicules. Vous prenez la première ruelle Ă droite et contraires Ă l’usage gĂŠnĂŠral. vous continuez jusqu’à la prochaine intersection. Vous InspirĂŠ du conte persan Les Trois Princes de ĂŞtes vraiment perdu maintenant, bonne chose, car c’est Serendip, le terme de ÂŤ sĂŠrendipitĂŠ Âť, dont se rĂŠclame dĂŠsormais le hasard qui dirige vos pas. Vous ĂŞtes un le Latourex, a ĂŠtĂŠ inventĂŠ par Horace Walpole en voyageur expĂŠrimental. Vous sortez de votre poche une HW VH GpĂ€QLW FRPPH Š la facultĂŠ de dĂŠcouvrir paire de dĂŠs. La Venise alĂŠatoire s’offre Ă vous comme des choses prĂŠcieuses ou agrĂŠables sans les avoir l’amante indĂŠterminĂŠe de L’Homme dĂŠ (Luke Rhinehart, cherchĂŠes Âť. Parmi les prĂŠcurseurs, nous pouvons ĂŠdition de l’Olivier, 1971). citer Robert Louis Stevenson Peut-­être dĂŠcouvrirez-­vous la et son Voyage avec un âne Vous voilĂ perdu, place de l’arcane secrète de dans les CĂŠvennes (1879), bonne chose, Corto Maltese ou les terribles Blaise Cendrars et ses car c’est dĂŠsormais secrets des palais vĂŠnitiens dĂŠrives alĂŠatoires dans la GX Ă€OP Anima Persa de le hasard qui dirige vos pas. banlieue parisienne, les Dinox Risi (1976), peut-­être virĂŠes d’Arthur Cravan au perdrez-­vous votre temps‌ Canada dĂŠguisĂŠ en femme. En 1967, les Beatles avaient tentĂŠ une expĂŠrience similaire avec leur Magical Mystery Tour, en bus, TROUVER SANS CHERCHER Ă travers la campagne anglaise (il ne se passa Cette nouvelle manière de voyager a ĂŠtĂŠ inventĂŠe VWULFWHPHQW ULHQ )DXW LO KXOXOHU j O¡HVFURTXHULH " (Q par le ÂŤ LAboratoire de TOURisme EXpĂŠrimental Âť, OH VFLHQWLĂ€TXH -XOLXV + &RPURH DIĂ€UPDLW TXH /DWRXUH[ SRXU OHV LQLWLpV RUJDQLVPH VFLHQWLĂ€TXH ÂŤ la sĂŠrendipitĂŠ, c’est comme chercher une aiguille dans non gouvernemental fondĂŠ Ă Strasbourg en 1990 XQH ERWWH GH IRLQ HW \ WURXYHU OD Ă€OOH GX IHUPLHU. Âť — qui ĂŠtudie l’activitĂŠ touristique. Le protocole des latourex.org expĂŠriences du Latourex est souvent dĂŠsignĂŠ par une GpĂ€QLWLRQ VFLHQWLĂ€TXH j SDUWLU GX PRW Š WRXULVPH ÂŞ VXLYL

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TOURISME

« Partez visiter la tache » Sélection des formes les plus modernes de tourisme expérimental. Vos billets s’il-­ vous-­plaît.

TOURISME EXPRESSIONNISTE : Répondez à la proposition touristique suggérée par une expression populaire. « Aller à Canossa » (Italie, Emilie-Romagne), mais c’est assez humiliant. « Aller se faire voir chez les Grecs », on vous souhaite bien du plaisir. « On ira pendre notre linge sur la ligne Siegfried », avec une valise de linge sale. TOURISME TACHISTE : Renversez de l’encre de Chine sur une carte et partez visiter la tache. TOURISME ZAOUM : Choisissez une destination en fonction du caractère onomatopéique de son nom. Berck-plage, au secours. Split, en Croatie, vous n’êtes pas mal tombé, filles et garçons y sont très beaux. Les informations sur Tchak au Soudan sont par contre assez confuses, personne ne se souvient en être revenu. Tandis qu’à force de suivre le chemin de Zbroutch (Russie) et

Boersch (Bas-Rhin), vous vous retrouvez dans le monde des langues agglutinantes, de quoi en perdre son latin. HIPPOTOURISME (Bougerie chevaline) : Mettez à l’épreuve les règles sociales et les convenances d’une manière absurde, comme celle de voyager avec une tête de cheval. Vous pouvez pousser l’expérimentation plus loin à la manière de l’artiste Marion LavalJantet en vous faisant injecter du sang de cheval rendu compatible afin de provoquer des modifications de comportement.

Puis les trois marcheurs iront de concert en recruter un quatrième, ainsi de suite. POP TOURISM : Testez la formule de voyage célébrée par un tube. Week-end à Rome d’Etienne Daho, Capri c’est fini d’Hervé Vilard, Marseille la nuit de IAM et le grand classique de la variété, 8 jours à El Paso de Michel Sardou. MONOPOLYTOURISME : Explorez Paris en vous servant d’un plateau de Monopoly. Prévoir de s’arrêter rue Lecourbe, ce que personne n’a jamais fait.

SIMILITOURISME : Visitez les localités dont l’homonymie fait sourire. Les Etats-Unis sont un paradis avec Paris (Texas), Venise (Californie), (La Nouvelle)-Orléans. Certains conseillent la visite de Jérusalem (dans les Vosges) avant de descendre plus au Sud jusqu’à Lagos (PyrénéesAtlantiques). PROMENADE « BOULE DE NEIGE » : L’initiateur d’une telle promenade se rendra à pied et à l’improviste chez un de ses amis, qu’il convaincra d’accompagner selon les mêmes modalités chez un troisième qu’ils auront choisi ensemble.

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SPÉCIAL JEUX Voyage

par Richard Gaitet (à Endé) photographie Thomas Corgnet (à Endé)

A la lueur des lampes à pétrole, LA JEUNESSE DU PAYS DOGON joue au « 151 », version malienne du huit américain. Les cartes résisteront-elles à l’inattendu challenger toubab ?

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-­ Carreau. -­ Cœur. -­ T’es gentil toi. Et maintenant tu vas aller au lit. -­ Dame. -­ Non. -­ 1HXI GH WUqÁH -­ Neuf de pique. -­ Ça triche dans tous les sens. -­ Un petit carreau, non ? -­ Cœur. -­ Pique. -­ Pique-­pocket ! -­ As. Prends deux cartes. -­ Mauvais business. -­ Moi, je suis honnête. -­ Cœur. -­ Arna-­cœur. -­ Tu roules des mécaniques. -­ Quel rouleur. Deux rois. -­ Deux as. -­ Comme t’es relou ! -­ Tranquille Emile. -­ Tu saignes, tu saignes.

-­ Deux cartes. -­ T’es gentil comme un poulet rôti. 7UqÁH -­ Après la fête, la défaite. -­ Le pays va mal. -­ Huit. Carreau. -­ Le pays est en développement. -­ Neuf de pique. -­ Ça commence à piocher. -­ Ça commence à pioncer ! -­ On joue dans quel sens, là ? -­ Carte. Ça calme ? Ça fait peur hein ? -­ Putain, moi j’ai onze mille cartes. -­ Ta sœur est vilaine comme un accident. -­ Ne redis jamais ça. -­ Je suis dans la nuit, les gars. -­ Vous être prêts pour un coup KLVWRULTXH " 7URLV KXLW 7UqÁH -­ C’est un cadeau empoisonné. Il faut faire venir un avocat sénégalais. -­ T’as gagné ?

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VOYAGE

Mode d’emploi Pour jouer au 151, inutile d’appeler Toumani DiabatĂŠ. Les règles Distribuez entre deux et huit cartes Ă chaque joueur, selon que vous souhaitez faire une partie courte ou longue. Retournez la première carte du tas restant. Celui qui est Ă gauche du donneur commence. Il peut poser une carte de la mĂŞme couleur (cĹ“ur, pique, trèfle, carreau) ou du mĂŞme motif (roi, sept, etc.). Le valet change le sens de la partie. La dame saute le tour du prochain. L’as fait piocher deux cartes au prochain, Ă moins de poser un as ou un huit. Le huit est la meilleure carte : elle se pose en toutes circonstances et permet d’annoncer la couleur de votre choix. Quand vous n’avez plus qu’une seule carte en main, dites ÂŤ carte Âť, sinon, piochez. Celui qui a posĂŠ toutes ses cartes a gagnĂŠ la partie, les autres comptent leurs points Ă partir des cartes qu’ils ont dans les mains. Celui qui n’atteint pas cent cinquante-et-un points remporte le tournoi. Les points Un huit vaut 32 points, un as 11, un roi 4, une dame 3, un valet 2, les autres cartes ce qui est marquĂŠ dessus. Trois parties gagnĂŠes d’affilĂŠe vous permettent de retirer dix points Ă votre score. Ça vous rappelle quelque chose ? C'est le Uno !

R. G.

Les cartes sont difficiles Ă dĂŠchiffrer sans ĂŠlectricitĂŠ.

Pays Dogon, nuit bleue. Les cartes VRQW GLIĂ€FLOHV j GpFKLIIUHU FDU LO n’y a pas d’ÊlectricitĂŠ. Trois lampes Ă pĂŠtrole et la lune d’octobre ĂŠclairent faiblement nos six petites tĂŞtes attablĂŠes dans la cour, au pied des escarpements sĂŠculaires de la falaise de Bandiagara. On entend striduler les sauterelles et nos trois valeureux adversaires n’en reviennent pas : mais quel Ă€FKX VRUWLOqJH FH IULQJXDQW touriste Ă lunettes a-­t-­il jetĂŠ pour remporter sans ciller, et avec panache, le premier tournoi franco-­malien de 151 ? Pour ĂŞtre honnĂŞte, je n’en sais bougrement rien – on attribuera ce prodige Ă la proverbiale chance du dĂŠbutant. Moi qui dĂŠteste cordialement tout jeu d’argent, de sociĂŠtĂŠ, de rĂ´le, de hasard – qu’y puis-­je, toujours j’ai l’impression mortifère de perdre mon temps‌ –, me voici pavanant,

victoire. Qu’est-­ce que le 151 ? La variante malienne du huit amĂŠricain. Les règles sont exactement les mĂŞmes Ă ceci près que les cartes piochĂŠes n’ont pas tout Ă fait la mĂŞme valeur (voir encadrĂŠ) et que le jeu doit son nom au nombre de points au-­delĂ duquel tout participant doit quitter la partie, s’allumer une tige, commander une Castel et retourner se coucher sur le toit de la maison. D’oĂš vient cette fantaisie ? ÂŤ Ce sont des aventuriers qui l’ont apportĂŠ – ceux qui reviennent des grandes villes, de Bamako, de CĂ´te d’Ivoire. Âť VoilĂ pour l’histoire, on n’en saura pas plus. Pendant six jours, après chaque repas, nous avons jouĂŠ à ça. Pas question de fanfaronner : OH UHVWH GX VpMRXU M¡DL Ă€QL ERQ dernier, le Mali se bidonnait, to be or not toubab. —

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JEUX Théâtre

ELOGE DE LA PIÈCE MANQUANTE

Pour le collectif anglais ROTOZAZA, monter un spectacle, c’est créer un rôle pour chaque spectateur – qui, du coup, n’en est plus un. J’peux jouer avec toi ? par Adeline Grais-Cernea

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« On dirait que Barbie allait dans le champ pour cueillir GHV ÁHXUV j .HQ HW TXH MH UHQFRQWUH 0HUOLQ TXL OXL MHWWH un sort et je vais en prison dans le cachot du bateau pirate. Qui veut faire le cheval ? » Il fut un temps où mes copines et leurs couettes se retrouvaient en tailleur dans ma chambre les mercredis après-­midi pluvieux, prêtes à inventer d’incroyables histoires épiques qui resteraient à tout jamais gravées dans la mémoire des nos poupées. Le périmètre était établi, le ring délimité et, déjà, la responsabilité théâtrale

d’aventurer son personnage sur un espace-­jeu FRQÀQp j O·XQLWp GH WHPSV © RQ D SDV pFROH ª HW O·XQLWp de lieu (« le tapis de la chambre »). Introduction à la vie (on fera ce qu’on peut, pas ce qu’on veut et il va falloir jouer serré), le jeu pour le jeu à travers une forme purement distractive pose les premiers piliers de la hiérarchie en société. En grandissant sont arrivés, justement, les « jeux de société », tels que les Jeu de l’Oie, Petits Chevaux, Cluedo, Monopoly et compagnie… qui commençaient tous par le dépliage d’un plateau carré placé à équidistance de tous les joueurs sur la table du salon, qui a remplacé le tapis de chambre, qui lui-­même avait remplacé le SDUF SRXU EpEp /HV UqJOHV SUppWDEOLHV DIÀQDLHQW QRV personnalités face à la contrainte – Allez directement en prison, ne passez pas par la case départ, ne touchez

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THÉÂTRE

pas 20 000 francs – mĂŠtaphorisant ce que l’avenir pourrait nous rĂŠserver si l’on manquait de chance ou de stratĂŠgie. D’horizontale, la surface de jeu est devenue verticale. On s’est plantĂŠ devant la tĂŠlĂŠ, manettes en mains, et Mario est devenu notre alter ego. Puis est venue la vie, la vraie. Auchan : l’âge adulte. Pour certains, le jeu est devenu un mĂŠtier, celui de comĂŠdien, et pour les autres, la contemplation (au thÊâtre et/ou au cinĂŠma) de ce qu’il pourrait rĂŠvĂŠler de nous. On retrouve au thÊâtre, comme au cinĂŠma, la surface scène/ ĂŠcran, rectangle de notre enfance, laissant cette fois agir les professionnels de la mise en scène et de O¡LQWHUSUpWDWLRQ TXDQG RQ D GpMj VXIĂ€VDPPHQW j UpJOHU avec les impĂ´ts, le travail, les enfants et les dĂŠjeuners dominicaux, dans un système aux règles formatĂŠes oĂš il est parfois utile de savoir, secrètement, un peu jouer la comĂŠdie.

Etiquette

Scène Nationale, Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime) Du 12 au 19 mars Toutes les dates sur rotozaza.co.uk

votre langue, auxquelles vous allez devoir rĂŠpondre et faire face. Les gestes s’enchaĂŽnent. Un vrai dialogue s’installe. ÂŤ J’ai un problème avec la patience qu’il faut pour les jeux Âť, poursuit Ant qui, en accĂŠlĂŠrant le rĂ´le GH VRXIĂ HXU GDQV O¡RUHLOOHWWH GH FKDTXH SDUWLFLSDQW devient maĂŽtre-­temps de la reprĂŠsentation. ÂŤ En 2001, le garçon avec qui je travaillais et moi, nous avons essayĂŠ de trouver des solutions pour lui faire jouer une pièce ĂŠcrite pour une personne, sans assumer les responsabilitĂŠs d’un acteur, puisqu’il n’en ĂŠtait pas un. Nous est alors venue cette idĂŠe “d’instructionsâ€? qui, de plus, rentrait tout Ă fait dans l’esprit interactif qui nous intĂŠressait. Depuis, Silvia et moi ne cessons de faire des recherches et de crĂŠer de nouvelles pièces allant dans ce sens. Âť

SOUPAPE AUDACIEUSE POUR JOUEURS DÉCHUS Rotozaza expĂŠrimente un nouveau langage thÊâtral. S’il leur arrivait de monter des pièces oĂš des comĂŠdiens/performeurs faisaient semblant ÂŤ AUTO-­THÉÂTRE Âť ET INSTRUCTIONS d’improviser ce qu’ils jouaient, ils travaillent Allant bien plus loin, le collectif londonien Rotozaza aujourd’hui avec des personnes (en rĂŠfĂŠrence Ă une sculpture de non initiĂŠes et mettent en scène l’artiste Jean Tinguely), dirigĂŠ Vous ĂŞtes assis face leurs propres spectateurs Ă par Antony ÂŤ Ant Âť Hampton et travers l’idĂŠe de ÂŤ conversation Âť. Silvia Mercuriali, montent en Ă un autre acteur/ Etre acteur alors qu’on n’en 2007 une expĂŠrience inĂŠdite, spectateur, est pas un, se laisser diriger et Etiquette, oĂš l’on retrouve un casque diffuse donner la rĂŠplique. Etre actant, ces gestes simples, ces petits les ÂŤ instructions Âť diriger ses pions et Ĺ“uvrer personnages, ce tapis de auxquelles pour l’histoire. Regarder chambre ou cette table qui vous devez rĂŠpondre. l’autre. Attendre. Se laisser inspiraient autrefois notre prendre Ă travers des mots imagination et laissaient qui ne nous appartiennent croire que tout ĂŠtait possible : pas, ressentir des ĂŠmotions Etiquette ouvre la voie vers qui n’appartiennent qu’à nous, et faire d’un moment ÂŤ l’auto-­thÊâtre Âť. Le concept est toutefois moins particulier le miroir d’une complicitĂŠ naissante ludique qu’il n’y paraĂŽt – ÂŤ Je dois ĂŞtre honnĂŞte : je et parfois d’un comportement inattendu. Deux dĂŠteste les jeux, FRQĂ€H $QW, tout comme le sport. Et par deux Ă une table, les spectateurs/acteurs se l’idĂŠe de compĂŠtition que l’on retrouve parfois dans confondent. L’enjeu n’est que pure expĂŠrience. l’art m’est insupportable. Âť A travers une installation Soupape audacieuse pour nous tous, pauvres joueurs simple, la ÂŤ pièce Âť est une sorte de conversation entre dĂŠchus. Etiquette s’est jouĂŠe partout dans le monde deux personnes qui ne se connaissent pas forcĂŠment, pendant deux ans, a ĂŠtĂŠ traduite dans des dizaines dans un contexte Ă la fois banal (bistrot, jardin public) de langues et a toujours reçu un très bel accueil. et performatif. Rotozaza Ĺ“uvre aujourd’hui sur d’autres projets Le principe : vous ĂŞtes assis Ă table en face d’un autre ÂŤ d’auto-­thÊâtre Âť, notamment The Bench (Le Banc), joueur/acteur/spectateur. Sur la table : un plateau pièce pour deux personnes, oĂš votre partenaire sera agrĂŠmentĂŠ de tout un tas d’accessoires (un verre dĂŠsignĂŠ par la personne avec qui vous ĂŞtes venu. G¡HDX GHV FUDLHV GH OD 3DWDĂ€[ TXH YRXV DOOH] GHYRLU Tableau de croix thÊâtral pour nouvelles rencontres utiliser. Sur vos oreilles : un casque qui diffuse de performatives. — façon synchronisĂŠe les ÂŤ instructions Âť dictĂŠes dans

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SPÉCIAL JEUX Portfolio

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PORTFOLIO

par Elza Jo

Courtesy Galerie Cokkie Snoei, Pays-足Bas

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PORTFOLIO

Dans les allées du dernier salon 3DULV 3KRWR D VRXIÁp FRPPH XQ vent de fraîcheur et d’happiness. Agrémentés de garnitures de cupcakes, de coups de markers ou d’explosions de paillettes, les photographies de cette jeune Néérlandaise de 28 ans dégagent une belle énergie punk et sexy, aux accents teenage-­trash. Après une trentaine d’expositions entre Amsterdam, New York et Miami, des portraits de M.I.A. ou Dizzee Rascal, Elza Jo va décliner son travail en vidéo. Attendons donc que le Louvre accueille le salon Paris Vidéo. David Herman elzajo.com Fake absurd 2 CDouble-­page précédente : Fake absurd 1 Courtesy Galerie Cokkie Snoei, Pays-­Bas

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Attrape ton cœur Courtesy Galerie Cokkie Snoei, Pays-­Bas

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Attrape tes Reves Courtesy Galerie Cokkie Snoei, Pays-足Bas

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SPÉCIAL JEUX BD

Par Odin ! Avec Dungeon Quest, le SudAfricain Joe Daly, 30 ans, revisite l’univers FRGLÀp GHV MHX[ GH U{OHV YHUVLRQ Donjons & Dragons pour un dÊtournement absurde et irrÊvÊrencieux. Tu me passes ta hache ?

 VENDRE UN TROLL À MANDELA  par JeanEmmanuel Deluxe

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Les personnages d’heroic fantasy parlent Joe, pourquoi se moquer des fans de jeux de rĂ´les ? Joe Daly : -H QH PH PRTXH SDV /HV MHX[ GH U{OHV VRQW d’ordinaire de façon ampoulĂŠe, or les tiens s’expriment naturellement. une plateforme sur laquelle je projette ma sensibilitĂŠ : Je voulais des hĂŠros qui s’expriment comme des ados ils donnent Ă ma BD une structure et une qualitĂŠ devant leurs jeux vidĂŠo. A l’intĂŠrieur du jeu, quelqu’un qui facilite mon boulot de scĂŠnariste. Au pire, je rĂŠplique : ÂŤ Par le pouvoir d’Odin, je terrasserai le subvertis le genre, au mieux, je le cĂŠlèbre d’une façon Dragon ! Âť Alors que le boutonneux type, Ă l’extĂŠrieur, bizarre. Pour tout te dire, je n’ai jamais jouĂŠ Ă Donjons dirait : ÂŤ Je vais tuer cet enculĂŠ de Dragon ! Âť La & Dragons – je ne suis donc peut-­être pas le plus pratique des jeux vidĂŠo implique pas mal de jurons. TXDOLĂ€p PDLV DSSUpKHQGHU FHW XQLYHUV DYHF XQ ÂąLO C’est amusant. extĂŠrieur me donne de la perspective. Les jeux de rĂ´les seraient-­ils un art ? Avec l’idĂŠe de le rendre comprĂŠhensible au Certains touchent au grand grand public ? art. Si la chose est rĂŠalisĂŠe Probablement, mais sans essayer ÂŤ La BD se suffit Ă elled’une manière mystĂŠrieuse de rendre mes livres mainstream. qui transcende la banalitĂŠ, Au dĂŠbut de Dungeon Quest, mĂŞme et vieillit mieux tout a le potentiel d’être les nĂŠophytes ont la chance de que les jeux vidĂŠo. Âť ÂŤ de l’art Âť : le plafond de la dĂŠcouvrir les concepts de base, que Joe Daly chapelle Sixtine, le catch, un j’ai moi-­mĂŞme appris Ă travers des clodo qui pisse en pleine rue, jeux vidĂŠo adaptĂŠs de jeux de rĂ´les le rock’n’roll, les comics‌ En mĂŞme temps, j’essaie de tels qu’Ultima VIII: Pagan et plus tard Dungeon Siege. ne pas trop me prendre au sĂŠrieux. Mes prĂŠfĂŠrĂŠs sont ceux dĂŠveloppĂŠs par Tim Schafer Peux-­tu citer un jeu typiquement de Lucas Arts : Day of the Tentacle, Sam and Max, sud-­africain ? Full Throttle et Grim Fandango (chef-­d’œuvre). Tous Le morabaraba est un jeu de stratĂŠgie sur plateau très sont chargĂŠs d’humour, d’ÊtrangetĂŠ et d’un pouvoir apprĂŠciĂŠ de la communautĂŠ noire. Les fans de sport narratif combinĂŠ Ă des ĂŠnigmes. C’est triste, d’ailleurs, sont nombreux par ici, mĂŞme sur PS3 et Wii. Sinon, que ce soit passĂŠ de mode. Ce cĂ´tĂŠ ĂŠnigme sera encore nous sommes très amĂŠricanisĂŠs. Comme partout plus prĂŠsent dans le deuxième tome de Dungeon Quest.

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BD

Dungeon Quest – tome 1

L’Association 136 p., 15 euros Dungeon Quest – tome 2

Sortie en mars

La BD

La mayonnaise

du donjon Sonnez cors et trompettes ! Voilà nos héros assemblés comme une autre « Communauté de l’Anneau », taillés cette fois comme des roseaux ! Parce qu’il s’ennuie ferme dans sa banlieue minable, Millenium Boy, courte créature dotée d’une tête énorme, part « à l’Est » avec Steve, branleur intégral (croisé dans l’autre ouvrage de Daly paru en 2009, The Red Monkey), pour tabasser des hommes-taupes et améliorer la « fiche-personnage » de son avatar. En chemin, ils rencontreront un gros balèze nommé Lash Pénis, puis Nerdgirl, une nana moche et peu bavarde mais très forte au tir à l’arc. Et aussi des squelettes-pirates, un clochard et un Indien avec lequel ils fument des feuilles de bunjy décuplant la clairvoyance. La trilogie Dungeon Quest s’amuse des pratiques « rôlistes » avec une fibre existentielle, dans un style oscillant entre ligne claire et Charles Burns. La flèche atteint le centre de la cible. J.-E. D.

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SPÉCIAL JEUX BD

ailleurs, nous importons plus de pop culture que nous n’en exportons. Quel auteur t’a donnĂŠ envie de devenir dessinateur ? Probablement HergĂŠ. J’aime toujours autant Tintin. Comment se porte la BD en Afrique du Sud ? Il y a des auteurs mais peu de supports, Ă part les strips des journaux quotidiens publiĂŠs en album une fois par an. Les ĂŠditeurs sont frileux, le marchĂŠ spĂŠcialisĂŠ est faible. J’ai essayĂŠ de me faire ĂŠditer ici : beaucoup de peine pour rien. Donc, maintenant, les rares libraires du coin font venir mes bouquins des Etats-­Unis. Plusieurs auteurs de BD vont vers les jeux vidĂŠo, la tĂŠlĂŠ ou le cinĂŠma. Ça te tente ? 3RXU OH PRPHQW MH YHX[ Ă€QLU Dungeon Quest, mais je suis ouvert : c’est un fantasme de participer Ă un jeu vidĂŠo ou un dessin animĂŠ. Mais la rĂŠalitĂŠ sera peut-­être dĂŠcevante, je ne suis pas sĂťr d’y retrouver la mĂŞme OLEHUWp /D %' VH VXIĂ€W j HOOH PrPH et vieillit mieux que les jeux vidĂŠo. J’aime l’idĂŠe que mon travail rĂŠsiste au temps, mĂŞme si ce n’est que pour un petit nombre de gens. OK : tu es un chevalier vampire vĂŠnĂŠrĂŠ dans sa caste, tu traverses une forĂŞt lugubre en compagnie d’un troll ronchon et d’une elfe super canon. Tu manques de sang, tu croises Nelson Mandela. Tu fais quoi ? Je chie dans mon froc d’Êtonnement et je tente de vendre le troll Ă Mandela pour beaucoup d’argent. —

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BD La page de Cab’

LE PENDU par Sylvain Cabot

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SPÉCIAL JEUX LittÊrature

JPOD,

Cerveau de la  GÊnÊration X , le romancier canadien DOUGLAS COUPLAND s’immerge dans le bocal aux vacuitÊs de la gÊnÊration Google avec jPod, sitcom interactive sur une tripotÊe de glandeurs fondus de video games. Appuyez sur lecture.

Le ludisme dĂŠconstruit de jPod s’Êtend jusqu’aux sphères de l’autisme subtil lorsque l’auteur propose de trouver l’erreur dans les cent mille premières dĂŠcimales de pi, dont la liste occupe dix-­neuf pages du roman (voir encadrĂŠ). Same player shoot again? Une bonne tranche de rigolade, et une ĂŠtrange sensation de vide – voilĂ ce qu’on ressent en refermant jPod de Douglas Coupland –, un peu comme après un bon ĂŠpisode de Madame est servie entrecoupĂŠ du nombre nĂŠcessaire de jingles pub – ce n’est d’ailleurs pas un hasard si jPod est devenu jpod (Au Diable Vauvert) depuis sa parution au Canada (2006) une minisĂŠrie CBC en treize ĂŠpisodes. Toutes les Ă€FHOOHV QDUUDWLYHV GX JHQUH VRQW Oj jusqu’au carton ÂŤ quatre mois plus tard‌ Âť lorsque l’intrigue patine un peu – sauf qu’on remplacera la petite virgule Ă la guitare, tellement annĂŠes 80, par un bleep de Brian Eno sous XP. Le cinĂŠaste Todd Solondz avait dĂŠjĂ jouĂŠ avec

par Alex Jestaire

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Coupland, inventeur du terme ÂŤ Mc job Âť, aurait-il conçu un ÂŤ Mc book Âť ? ĂŠclatĂŠe, parasitĂŠe de bogues, listings, spams et mails croisĂŠs. Coupland le reconnaĂŽt : ÂŤ jPod est le Microserfs de la gĂŠnĂŠration Google Âť, ce qui, en lieu de mise Ă jour, donne des personnages qui s’exclament : ÂŤ L’aviditĂŠ de la bulle des annĂŠes 90 me manque – la possibilitĂŠ de faire un truc genre

Apple, un truc un-­point-­zĂŠro. Âť Nous sommes bien dans les annĂŠes 00, celles des dĂŠsillusions : ÂŤ Plus jeunes, nous faisions au moins mine de ne pas ĂŞtre dupes en laissant des numĂŠros de Casseurs de pubs sur nos bureaux. Après quelques annĂŠes ça n’a tout simplement plus d’importance. Vous cherchez GHV EODJXHV RX GHV Ă€FKLHUV ZDY divertissants sur le Net. Âť TOURNOIS DE TETRIS, TOURNIS VIRTUEL Alors, on s’amuse Ă Geekland, ou plutĂ´t Ă jPod, boĂŽte de jeux vidĂŠo high-­tech de Vancouver oĂš nos hĂŠros transparents – Ethan Jarewlski et ses collègues de travail – s’Êvertuent Ă disperser leur ĂŠnergie et toute forme de personnalitĂŠ profonde dans le grand nĂŠant numĂŠrique. Entre les tournois de Tetris, la UpGDFWLRQ GH Ă€FKHV SURGXLW SRXU VH vendre eux-­mĂŞmes sur eBay et des concours pour gagner de la junk food, ces crevards de la virtualitĂŠ

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ces codes dans Storytelling (2001), autre lecture sitcomisĂŠe (mais bien plus distanciĂŠe) du vide sidĂŠral qui envahit Ă revers nos existences saturĂŠes d’informations inutiles. Il y a lĂ un problème de forme et de fond, qui laissa la critique anglo-­ saxonne mitigĂŠe. On a reprochĂŠ Ă Coupland, 48 ans, de bĂŠgayer son prĂŠcĂŠdent Microserfs (1995), qui parlait dĂŠjĂ de vie sous plateforme Windows, dans une mĂŞme forme

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LITTÉRATURE

Extrait

ÂŤÂ Je viens de vous envoyer par e-mail les cent mille premières dĂŠcimales de pi. A l’intĂŠrieur de cette liste j’en ai glissĂŠ une qui n’est pas correcte. Le premier d’entre vous qui la retrouve gagne ce sachet de chips aux crevettes corĂŠennes. Un, deux, trois : cherchez !

trouvent le temps de bosser – Ă croire qu’ils habitent au taf. Le destin du jeu de skateboard qu’ils doivent dĂŠvelopper est d’ailleurs OH Ă€O FRQGXFWHXU GX UpFLW ² GHVWLQ tragique et grotesque, puisqu’il Ă€QLUD PLQp GH O¡LQWpULHXU SDU XQ Ronald MacDonald’s psychopathe (ÂŤ Je suis Ronald, de Mordor, le Mage, le Destructeur Âť) –, pĂŠripĂŠties agrĂŠmentĂŠes par la folie furieuse de la famille d’Ethan, les plantations de beuh de sa mère, la carrière de danseur de salon de VRQ SqUH OHXUV DPLV GDQV OD PDĂ€D chinoise, etc. On se demande si Coupland – après des Ĺ“uvres plus Ă€QHV HW HPSDWKLTXHV FRPPH Hey Nostradamus! (2003), sur une tuerie similaire Ă celle de Columbine, ou Eleanor Rigby (2004), sur la solitude d’une quadragĂŠnaire obèse – ne serait pas parti en roue libre, façon Lunar Park pour Ellis, sur un sujet et avec des tics qui lui sont familiers. L’inventeur du terme ÂŤ Mc job Âť aurait-­il conçu

XQ Š 0F ERRN ÂŞ " /¡DIĂ€UPHU VHUDLW nĂŠgliger la petite musique de fond du roman – cette façon systĂŠmatique de montrer le rien et de s’en moquer qui, au-­delĂ des clins d’œil et des cabrioles, communique un rĂŠel sentiment de vide, Ă nouveau –, quelque chose de dĂŠsespĂŠrant, une dĂŠtresse sans issue vissĂŠe au cĹ“ur de notre progrès, et dont on ne pourrait ULHQ IDLUH G¡DXWUH DX Ă€QDO TXH des blagues. Si la ÂŤ GĂŠnĂŠration X Âť se sentait inutile, la ÂŤ GĂŠnĂŠration jPod Âť l’est bel et bien : ÂŤ Vous ĂŞtes un assemblage dĂŠprimant G¡LQĂ XHQFHV GH FXOWXUH SRSXODLUH et d’Êmotions ĂŠtouffĂŠes, commandĂŠ par le moteur crachotant de la forme simplement la plus banale du capitalisme. Âť LA GÉNÉRATION ÂŤ A Âť, TRIOMPHANTE On attend donc avec impatience la traduction de Generation A, dernier opus de Coupland paru cette annĂŠe outre-­Atlantique, sur une toute autre orientation : dans

un monde futuriste oÚ Internet est devenu le mode de vie dominant, oÚ les abeilles ont disparu, une sÊrie de piqÝres rÊunit des marginaux à travers le monde. Le titre fut inspirÊ par une allocution de l’Êcrivain Kurt Vonnegut à l’attention d’une classe universitaire :  Alors les zigotos, vous voulez un nouveau nom pour votre gÊnÊration ? J’imagine que non – vous voulez juste du boulot. Les mÊdias nous rendent un tel service à tous lorsqu’ils vous appellent la GÊnÊration X, pas vrai ? A deux clics du bout de l’alphabet. C’est pourquoi je vous appellerai la gÊnÊration A, celle qui se trouve au dÊbut d’une sÊrie de triomphes et d’Êchecs aussi impressionnants que le furent en leur temps ceux d’Adam et Eve.  Voilà un programme qui nous changerait de la vie sous XP. Vous m’excuserez, il faut que j’y retourne. Cet article a ÊtÊ rÊalisÊ avec l’aimable assistance de Google, Amazon et Wikipedia. —

3.14159265358979 323846264338327 9502884197169399 3751058209749445 923078164062862 089986280348253 4211706798214808 651328230664709 384460955058223 1725359408128481 11745028410270193 8521105559644622 948954930381964 428810975665933 4461284756482337 8678316527120190 914564856692346 034861045432664 821339360726024 9141273724587006 6063155881748815 209209628292540 9171536436789259 036001133053054 8820466521384146 9519415116094330 5727036575959195 3092186117381932 61179310511854807 4462379962749567 3518857527248912 2793818301194912 983367336244065 664308602139494 6395224737190702 1798609437027705 39217176293176752 384674818467669 4051320005681271 452635608277857 7134275778960917 3637178721468440 901224953‌

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SPÉCIAL JEUX Littérature (suite)

« VOUS SEREZ LE JE, PUISQUE LE JEU COMMENCE » sélection François Perrin

LE JEU N’A JAMAIS BOUDÉ L’INSPIRATION DES ÉCRIVAINS. Petit voyage en

ludottérature.

Le classique

Le sulfureux

L’incontournable

Le Joueur (1866)

Le Dessous des cartes d’une partie de whist in Les Diaboliques (1874)

Le Joueur d’échecs (1943)

Jules Barbey d’Aurevilly

Sur un paquebot, un champion du monde d’échecs affronte un amateur qui, rendu schizophrène par des années d’isolement imposées par les nazis, a dû apprendre à dédoubler son cerveau au cours de longues parties imaginaires contre lui-même pour éviter de « tourner à vide ». Le maître vacille face à lui puis le vainc sans noblesse en jouant sur sa pathologie mentale. « Au début, pour les ouvertures obligées, tout alla assez vite. Ce n’est qu’au septième ou huitième coup que la bataille parut se dessiner selon un plan précis […] Plus les pièces composaient sur l’échiquier leurs étranges arabesques, moins nous en pénétrions le sens caché. […] Nous voyions seulement qu’ils déplaçaient leurs pièces tels des leviers, ou comme des généraux font marcher leurs troupes pour tâcher de faire une brèche dans les lignes ennemies. »

Fedor Dostoïevski A Roulettenbourg, Allemagne, Alexeï Ivanovitch est un joueur compulsif. Il a attrapé le démon afin de venir en aide à la famille auprès de laquelle il est précepteur. Démon qui ne tardera pas à l’ingurgiter corps et âme. « Comme ils sont insolents, tous, et avides ! […] J’ai commencé timidement, en ne risquant que deux ou trois pièces à la fois. Pendant ce temps, j’observais et faisais des remarques ; il me semble que tous ces calculs ne signifient pas grand-chose et qu’ils n’ont pas l’importance que leur attribuent beaucoup de joueurs. Ils sont assis là avec des feuilles couvertes de chiffres, ils notent les coups, comptent, supputent les chances, font une dernière opération, misent enfin… et perdent, tout comme les simples mortels qui jouent sans calculer. »

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Prétexte à l’intrigue chez Douglas Coupland, contrainte narrative pour Italo Calvino,

En Normandie, les aristocrates jouent au whist pour tuer l’ennui. Prétexte pour l’auteur à décrire la comtesse de Stasseville, maîtresse d’un étrange Anglais revenu des Indes, les bras lourds de présents. Du Barbey troublant comme on l’aime, railleur et sombre. « Le jeu, c’était la grande affaire de ces anciens nobles, taillés dans le patron des grands seigneurs, et désœuvrés comme de vieilles femmes aveugles. […] Leur parenté de race avec les Anglais, l’émigration en Angleterre, la dignité de ce jeu, silencieux et contenu comme la plus grande diplomatie, leur avaient fait adopter le whist. C’était le whist qu’ils avaient jeté, pour le combler, dans l’abîme de leurs jours vides. »

Stefan Zweig

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LITTÉRATURE

Le carton

La Joueuse de go (2001) Shan Sa Place des Mille Vents, une adolescente mandchoue allonge tous ses adversaires au jeu de go. Face à elle, au bout du chemin, un officier japonais d’occupation l’affrontera et l’aimera, remettant en cause la sévérité de sa propre morale. Un tableau d’ensemble calibré best-seller. « L’homme compte et recompte les pions. Battu de dix-huit points, il pousse un soupir et me tend sa bougie. Il se lève en déployant sa taille de géant, ramasse son bagage et s’en va sans se retourner. Je range les pions dans leurs pots de bois. Ils crissent sous mes doigts. Je suis seule, avec mes soldats, mon orgueil rassasié. Aujourd’hui, je fête ma centième victoire. »

L’oulipien

Le culte

L’expérimental

Le Château des destins croisés (1969)

L’Homme-dé (1971)

La Nuit je suis Buffy Summers (2007)

©DR

Italo Calvino « Tour de passe-passe, qui consiste à aligner des tarots pour en tirer des histoires », Le Château répond fidèlement au mot d’ordre de l’Oulipo : créer des contraintes littéraires pour nourrir l’inspiration. L’auteur effectue un tirage de cartes et raconte – un récit médiéval, fort logiquement. Comme Tournier dans la préface de son Vendredi ou les limbes du Pacifique, tout le roman est condensé dans ce tirage initial. Robinson sur son bateau comme Italo dans son bureau voient l’avenir tandis même qu’ils le construisent. « J’écarte un tarot, j’en écarte un autre, je me retrouve avec bien peu de cartes en main. Le Cavalier d’Epée, L’Ermite, Le Bateleur, c’est toujours moi tel que tour à tour je me suis imaginé que j’étais, cependant que je continuais d’être assis promenant ma plume sur la page de haut en bas. L’élan guerrier de la jeunesse s’éloigne au galop par des sentiers d’encre, avec l’anxiété existentielle et l’énergie de l’aventure, dépensés dans un carnage de ratures et de feuilles jetées au panier. »

Luke Rhinehart aka George Powers Cockcroft Un psychiatre conceptuel, pour rompre sa monotonie et interroger le moi et le destin, décide un beau jour de jouer toutes ses décisions au dé, de la plus anodine à la plus déterminante. Un roman motivant autant qu’angoissant, son suspense reposant sur la probabilité de sortie du « 2 » sur un dé à six faces. « Si je fumais tantôt d’une façon, tantôt d’une autre, et d’autres fois pas du tout, si je changeais ma façon de m’habiller, si j’étais tour à tour nerveux, serein, ambitieux et paresseux, paillard, glouton, ascète – où résiderait mon moi ? C’est la façon dont un homme choisit de se limiter qui détermine son personnage. Un homme sans habitudes, sans cohérence, qui ne se répète pas, donc ne s’ennuie pas, n’est pas humain. Il est fou. »

Chloé Delaume On aurait pu citer aussi Julio Cortázar, qui dans son Marelle joue aussi des codes des livres dont vous êtes le héros. Une intrigue, des numéros, un doigt planté page 35 tandis qu’on parcourt la 45, des jets de dés pour une expérience littéraire partagée directement entre un auteur et son lecteur. « Qui je suis, moi qui vous parle, ça n’a pas d’importance. Qui raconte ne change rien à ce qui s’est passé, se passe et se passera. Encore moins à ce que vous allez vivre. Vous. Car vous serez le je, puisque le jeu commence. »

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JEUX & LOISIRS Featuring

LE CHEVAL FANTÔME IndÊcrottable fondu de courses hippiques, PHILIPPE JAENADA se souvient de ce dimanche à Auteuil oÚ il paria sa fortune sur un destrier luisant. Vainqueur il l’est à chaque fois (ou presque). par Philippe Jaenada* photographie Thomas Corgnet (à l’hippodrome d’Auteuil)

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Il y en a un que je n’oublierai jamais. Ce n’est pas Suave Dancer, ni Peintre CĂŠlèbre, ni Pois Chiche (mon premier gagnant sur un hippodrome, celui d’Evry, Ă 15 ans (avec mes potes, on demandait Ă des vieux de jouer pour nous (aujourd’hui quand de temps en temps je le fais pour un gamin, ça me donne envie de pleurer, la vie qui tourne et tout ça))), ni Arazi, ni Katko, ni Sabre d’Estruval, ni Al Capone (mĂŞme si ceux-­lĂ non plus je ne les oublierai pas, bien sĂťr – ce serait comme oublier ma mère), ce n’est pas non plus Ourasi, ni Bellino II (la première photo que j’ai dĂŠcoupĂŠe dans un journal, Ă 10 ans), ni Fakir du Vivier, GĂŠnĂŠral du Pommeau, ni Ernest le Rebelle

(je l’aimais bien, celui-­lĂ , je l’ai touchĂŠ gagnant sec Ă XQ VRLU j 9LQFHQQHV ² M¡DL DSSHOp PRQ Ă€OV (UQHVW pour le coup). Non, ce n’est pas un cheval au-­dessus des autres. Ce n’est pas une crĂŠature au sang explosif, aux accĂŠlarations foudroyantes (comme Suave Dancer, PRUW FRPPH LO D YpFX Ă€QDOHPHQW UHMRLQW GDQV XQ prĂŠ par ce qui lui donnait son pouvoir : frappĂŠ par la foudre), ce n’est pas un monstre d’endurance, de vitesse, de volontĂŠ ni de courage, ce n’est pas un sauteur fĂŠlin ni un trotteur en apesanteur, ce n’est pas le pacha de Gravelle, le seigneur du moulin de Longchamp, ni le prince de Mortemart. C’est Twist Collonges. Ce pignouf.

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« J’ai joué Twist Collonges. La guichetière n’a pas moufté. »

Peu de gens se souviennent de lui, j’imagine. Pourtant ce n’est pas si vieux, je devais avoir 26 ans (donc vraiment, c’est hier). Moi-­même, je ne me rappelle plus le nom de son jockey, ni de son entraîneur (peut-­être Marcel Rolland, mais ce n’est pas certain), de son propriétaire, je revois une robe presque noire, une casaque rouge, c’est tout. Non, je me souviens bien de sa tête (pignouf), de ses yeux de guerrier fou, de sa crinière trop sauvage et de sa silhouette imposante. Il était grand. Des muscles noirs, et du rouge. Je ne sais pas s’il est toujours de ce monde, mais je ne l’oublierai jamais, je suis lié à lui jusqu’à ma mort. A l’époque, j’étais vraiment dans la misère. Pas la vraie misère car j’étais joyeux, insouciant, un rien m’excitait, tout me semblait possible et le monde plein de surprises, j’avais non seulement la vie devant moi mais aussi autour. La misère matérielle, juste. Je mangeais des pâtes ou des pommes de terre six jours sur sept, je me faisais payer des coups partout, je n’achetais jamais rien (mais je n’en geignais pas : c’était moi qui le voulais, je m’étais juré de tout faire pour ne jamais travailler, du moins ne jamais travailler tous les jours, ne jamais mettre les pieds plus d’une heure dans un bureau, une usine, un commerce ou un abattoir clandestin (et jusqu’à maintenant j’ai réussi, j’ai bien tenu le coup (même si, alléchés par ma silhouette imposante, mes yeux de guerrier fou, et la rumeur galopante (jamais YpULÀpH FHSHQGDQW VHORQ ODTXHOOH M·DL OD IRXGUH GDQV les poings, plusieurs abattoirs clandestins m’ont proposé des ponts d’or)). Malgré la disette, je n’ai pas raté une seule réunion d’Auteuil (pas une seule) pendant huit ans, de 1986 à 1994. J’arrivais à l’hippodrome en métro, deux fois par semaine en général sauf en hiver, toujours avec exactement soixante-­dix francs en poche. Je passais le portillon et la vie commençait à changer de nature, j’entrais dans le premier tunnel, long, sous les néons, je pensais aux chevaux, et quand je sortais à la lumière forte, sur la pelouse, je voyais le monde en face de moi, vaste et courbe, encore vierge sous le soleil (toujours : jamais de nuages à Auteuil). J’allais gagner. L’entrée de la pelouse était gratuite, c’est donc là que je pariais avec le plus grand sérieux sur les cinq premières courses, au centre de la piste avec les hommes gris, sombres, faibles, puis avant la sixième le second tunnel s’ouvrait aux pauvres et je pouvais passer du côté des tribunes, du rond de présentation, de la bonne humeur et de la couleur, pour les deux dernières. Si je touchais quelque chose avant la cinquième, je franchissais plus tôt, en payant, le tunnel de la gloire. Au premier gagnant, aussi, et s’ils n’avaient pas déjà tous été engloutis par les magiciens du pronostic et les acrobates du tuyau, je m’offrais un sandwich poulet-­mayo-­crudités, jambon quand il ne restait plus que ça – sinon tant pis (de toute façon, je n’avais jamais spécialement faim à Auteuil, c’était juste pour le plaisir de me dire : « Ah, quel bon

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FEATURING après-­midi, et en plus je mange un sandwich Âť) –, et au deuxième gagnant de la journĂŠe (je jouais toujours gagnant sec plutĂ´t que placĂŠ, il me semblait assez humiliant de mettre mes prĂŠcieux, inestimables dix francs sur un cheval qui me rapporterait de l’argent mĂŞme s’il ĂŠtait battu (la charitĂŠ, merci bien)), je me payais une bière (ensuite, une bière Ă chaque gagnant – mais il ĂŠtait rare que je quitte l’hippodrome en ĂŠtat d’ivresse). Si je me plantais dans les sept courses (ce qui, soyons honnĂŞtes et dignes quoique penauds, arrivait frĂŠquemment), je rentrais Ă pied : j’habitais Ă l’Êpoque au-­delĂ de la place Clichy, ce qui, depuis la porte d’Auteuil, me faisait une bonne marche de pĂŠnitence, espèce de tache, incapable, poissard. Je ne sais pas pourquoi j’allais Ă Auteuil plutĂ´t qu’ailleurs. Ce qui est sĂťr, c’est que je prĂŠfĂŠrais le galop (je crois, pour avoir consciencieusement bossĂŠ le sujet auprès d’un ĂŠchantillon reprĂŠsentatif de la SRSXODWLRQ WXUĂ€VWH TX¡RQ JDUGH WRXMRXUV O¡HPSUHLQWH hĂŠgĂŠmonique de son premier contact avec les courses – or, petit, j’habitais non loin d’Evry, hippodrome de galop, et j’y allais en mobylette). De toute façon, Ă Vincennes, royaume du trot, on se croirait dans une gare (et quand on sort regarder la course, au bord d’une autoroute) : je n’imagine pas qu’on puisse gagner Ă Vincennes, on laisse forcĂŠment ses tickets avec les milliers d’autres sur le sol sale, et on repart sombre et dĂŠprimĂŠ (et en plus, il fait froid). Quant Ă Longchamp, si je ne m’y rendais que rarement, c’est peut-­être que les courses y allaient trop vite : une pièce de dix francs reprĂŠsentait Ă Auteuil une ĂŠmotion croissante de plusieurs longues minutes. A Longchamp c’Êtait plus explosif, certes, mais vlan j’ai dĂŠjĂ perdu. Bref. J’assitais Ă toutes les rĂŠunions d’Auteuil et j’avais très peu d’argent. Il ĂŠtait une fois, dans le rond de prĂŠsentation, un grand et beau cheval noir. Un peu comme l’Etalon Noir, voyez. Il m’avait sĂŠduit au premier passage, mais n’Êtant pas nĂŠ de la dernière pluie de pommes, je l’ai bien observĂŠ au deuxième (la tĂŞte, surtout la tĂŞte – il a l’air cinglĂŠ, mais ce n’est pas spĂŠcialement mauvais signe –, l’encolure, l’arrière-­main, le ventre, j’aime bien regarder le ventre des chevaux, et les oreilles), puis j’ai ĂŠtudiĂŠ ses perfs dans le Turf, avec toute la concentration nĂŠcessaire, et j’ai mis mes GL[ IUDQFV GHVVXV ,O D Ă€QL GHX[ RX WURLVLqPH MH QH sais plus, donc je n’ai pas touchĂŠ, mais c’Êtait un de ces ĂŠchecs qui ne minent pas, au contraire, qui ferment une petite porte pour en ouvrir une grande, qui font naĂŽtre l’espoir, le vrai, celui qui va au-­delĂ d’une course : il avait tracĂŠ un très bon parcours, fait quelques petites fautes dues Ă sa jeunesse et Ă son physique de titan, et terminĂŠ dans une belle action, souple, tranquille, puissante. Il ne lui restait qu’à se dĂŠgourdir un peu, comprendre comment coordonner tous ses muscles, et aux autres il ne resterait plus qu’à essayer de suivre, avec leurs petits corps ordinaires. A mon avis, on n’Êtait pas douze mille Ă l’avoir remarquĂŠ.

Les semaines suivantes, je l’ai jouĂŠ encore deux ou trois fois, ou quatre, toujours dix francs, et toujours avec le mĂŞme rĂŠsultat : il courait de mieux en mieux, apprenait sereinement son mĂŠtier, prenait de l’assurance (ça se voyait sur sa tĂŞte de fou) et concluait toujours dans les premiers, sans gagner, sans se fatiguer non plus, sĂťr de son avenir (mais je me refusais Ă tenter de le toucher placĂŠ : on ferait injure Ă Hercule (et Ă soi-­mĂŞme) en pariant qu’il va rĂŠussir au moins sept ou huit travaux). Les quelques limiers qui l’avaient repĂŠrĂŠ lors de la première course oĂš je l’avais jouĂŠ commençaient Ă lâcher prise, Ă ma grande satisfaction : moi, je tenais bon, ÂŤ AccoudĂŠ Ă la j’attendais mon jour, comme lui. Les barrière portes s’ouvraient devant moi, de plus blanche, en plus hautes et larges, et j’Êtais seul j’ai luttĂŠ pour dans le couloir. J’avais mĂŞme du mal Ă y ne pas calculer croire, je marchais sur la pointe des pieds, combien comme un cambrioleur. j’allais gagner, Et le grand jour est arrivĂŠ. Quand j’ai car j’avais appris dans le Turf qu’il allait participer remarquĂŠ que Ă une course importante, richement dotĂŠe ça portait (je ne sais plus laquelle, je l’ai dit : j’ai la poisse. Âť tout oubliĂŠ), qui ne regrouperait que cinq partants, je venais de toucher le plus gros chèque de ma vie, trois mille cinq cents francs (ça me faisait bien un mois et demi, Ă l’Êpoque), en ĂŠchange d’un test pour le magazine Marie-­Claire, ÂŤ Quelle genre de gourmande ĂŞtes-­vous ? Âť – je ne pouvais qu’y voir un signe du destin, tu touches le pactole de Marie-­Claire au moment prĂŠcis oĂš tu en as besoin, et de toute façon c’est de l’argent injustement gagnĂŠ (j’Êtais spĂŠcialiste en gourmandise comme ma grand-­mère en trampoline), les pommes de terre prĂŠ-­pelĂŠes sous vide et autres mets de luxe que je m’offrirais avec n’auraient assurĂŠment pas le mĂŞme goĂťt de triomphe que si je les payais avec une fortune honnĂŞtement quoique astucieusement amassĂŠe, en touchant un cheval Ă huit ou neuf contre un par exemple, disons Twist Collonges. Il a ouvert Ă six quarante. Je ne me rappelle pas avoir hĂŠsitĂŠ quinze secondes. Je me suis approchĂŠ du guichet Ă cent francs, j’ai posĂŠ devant la dame les quatre billets de cinq cents, les cinq billets de deux cents et les cinq billets de cent que j’Êtais allĂŠ chercher la veille Ă la banque dans l’indiffĂŠrence gĂŠnĂŠrale (plus rien ne les ĂŠtonne, les gens), et j’ai jouĂŠ Twist Collonges, mon champion secret : trente-­cinq fois gagnant, trois mille cinq cents francs. La guichetière n’a pas mouftĂŠ. -H PH VHQWDLV pWUDQJHPHQW FRQĂ€DQW WDQGLV TXH d’habitude, pour un ticket Ă dix francs, doute et trouille se jetaient ensemble sur mes tripes vulnĂŠrables dès la haie d’essai), je suis allĂŠ au bord de la piste en fredonnant – je crois. Twist Collonges semblait lui aussi parfaitement dĂŠtendu. Ses huit adversaires, chevaux et jockeys, n’Êtaient que des Ă€JXUDQWV HW OH UHVWHUDLHQW LQGLVSHQVDEOHV pYLGHPPHQW mais peu intĂŠressants. Pendant les cinq minutes

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pour vivre, lĂ -­bas en face, puis je revois l’entrĂŠe de la ligne droite, je me penche sur la barrière pour les deux dernières haies, c’est maintenant, l’avant-­dernière et la tache rouge toujours derrière, c’est maintenant, la dernière haie et le rouge qui ne revient pas, qui lâche prise, mollement, des fous furieux qui passent juste devant moi Ă toute vitesse et plus loin Twist Collonges qui termine cinquième, loin, mou. Quelque chose ne va pas. Ça ne doit pas ĂŞtre très grave, mais quelque chose cloche. Pendant une ou deux secondes, j’ai pensĂŠ que j’allais pouvoir revenir en arrière et ne pas dĂŠposer mes trois mille cinq cents francs au guichet. Cela paraĂŽt idiot mais je jure que c’est vrai, j’ai sincèrement cru, en un ĂŠclair d’absurditĂŠ, que j’avais en moi la force de remonter le temps de quelques minutes et d’effacer tout ça, personne n’a rien vu, on recommence. Mais non. Et quand je m’en suis rendu compte, quand le tonnerre de l’Êpouvante a rĂŠsonnĂŠ dans mon crâne, le monde s’est disloquĂŠ autour de moi, tout a fondu instantanĂŠment, je me suis retrouvĂŠ seul debout au milieu des ruines pompĂŠiesques, et dĂŠgoulinant d’effroi. Les trois mille cinq cents francs que j’avais tout Ă l’heure, je ne les avais plus. Le mois et demi Ă venir, perdu. Mais ce n’Êtait pas possible. Twist Collonges n’avait pas couru : seuls les quatre autres s’Êtaient disputĂŠs la victoire et les places, et moi j’avais mis mes trois mille cinq cents francs sur un cheval fantĂ´me. Une illusion, qui avait galopĂŠ dans un autre monde. On ne pouvait pas me laisser comme ça, on n’avait pas le droit, j’avais ĂŠtĂŠ victime d’un incident rare, d’une erreur sur le programme, d’une faille dans la rĂŠalitĂŠ, il fallait qu’on me rembourse. Mais malgrĂŠ la mĂŠlasse de misère et de consternation qui me poissait de la tĂŞte aux pieds comme du caramel fondu sur un soldat de plomb, qui m’aveuglait et m’engluait le cerveau, je devinais qu’aucun guichetier n’accepterait de m’Êcouter, de me comprendre, aucun guichetier ni personne d’autre. Les gens sont bornĂŠs. Je marchais comme un fantĂ´me (je viens dans ton monde, Twist Collonges), plus aucun son ne me parvenait de l’extĂŠrieur, j’avançais dans une zone lumineuse homogène. Je me suis approchĂŠ sans mĂŞme m’en rendre compte des chevaux qui rentraient aux balances, le vainqueur ĂŠblouissant, glorieux, aĂŠrien, entourĂŠ de parieurs euphoriques et reconnaissants qui avaient misĂŠ sur lui, de gens sensĂŠs et sĂťrs d’eux qui n’auraient aucun problème dans le mois et demi Ă venir, puis les autres chevaux, normaux, juste chevaux TXL Q¡RQW SDV JDJQp OD FRXUVH HW HQĂ€Q TXHOTXH WHPSV après, Twist Collonges, ĂŠreintĂŠ et fumant mais cheval quand mĂŞme, lourd, ne semblant pas rĂŠaliser. Je ne

ÂŤ Ça ne doit pas ĂŞtre très grave, mais quelque chose cloche. Âť

qui ont prĂŠcĂŠdĂŠ le dĂŠpart, accoudĂŠ Ă la barrière blanche, j’ai luttĂŠ pour ne pas calculer combien j’allais gagner, car j’avais remarquĂŠ que ça portait la poisse, je l’avais remarquĂŠ souvent, mais mon esprit ĂŠtait plus fort que moi et travaillait gaiement sans que je puisse l’orienter vers d’autres prĂŠoccupations plus inoffensives, et moins encore le neutraliser – avec quoi, avec mes bras ? Trois mille cinq fois sept, ça faisait vingt-­quatre mille cinq cents. Je n’avais jamais possĂŠdĂŠ une telle somme, mĂŞme dans mes rĂŞves (dans mes rĂŞves, j’ajoutais juste du gruyère dans les pâtes). Cette fois, ça ne porterait pas la poisse, c’est idiot ces histoires. Le dĂŠpart a ĂŠtĂŠ donnĂŠ. Je ne sais plus oĂš. Peut-­être Ă la haie du Pavillon. Ou en face. Ils sont partis, en tout cas. Vingt-­quatre mille cinq cents francs. Dans cinq minutes. Ou mes trois mille cinq cents francs qui. Twist Collonges est restĂŠ Ă l’arrière du petit peloton pendant toute la course, je revois sa robe noire, luisante, sa masse sculpturale et tranquille prĂŞte Ă changer de nature pour ĂŠcraser tout le monde, ses muscles noirs qui avalaient les haies, je revois surtout la tache rouge du jockey, toujours en dernière position pendant un tour et demi de cette piste immense, en ĂŠquilibre sur la force noire, la tache rouge qui portait tout mon argent, tout ce que j’avais

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bougeais pas, j’avais envie de hurler mais c’Êtait bien au-­dessus de mes forces, j’avais envie de lui sauter dessus et de le rouer de coups de poings pour le jeter au sol mais on ne peut pas cogner, bousculer, renverser un fantĂ´me, une illusion. J’ai quittĂŠ l’hippodrome dans le brouillard, sans toucher le sol, et j’ai errĂŠ dans Paris pendant des heures, perdu comme un fou, je n’avais plus rien, plus un sou, rien devant moi ni rien derrière (toutes ces semaines Ă attendre, Ă prĂŠvoir, Ă espĂŠrer, venaient de s’effacer d’un coup, plop, de disparaĂŽtre sans ULHQ GRQQHU HQ pFKDQJH Ă RWWDQW GDQV OH YLGH 7RXW ĂŠtait terminĂŠ. (Ça peut paraĂŽtre un peu exagĂŠrĂŠ pour seulement l’Êquivalent d’un test dans Marie-­Claire, mais bien sĂťr c’Êtait plus que ça : l’Êchec, une sensation de nĂŠant.) Ensuite, ĂŠvidemment, je suis devenu un peu branque. Ahuri et bancal. On ne peut croire en rien, tout est inutile – ce genre de choses. Mais le plus ĂŠtrange, c’est que ma vie n’a pas changĂŠ. Je n’ai pas mangĂŠ pendant

un mois, puis j’ai retrouvĂŠ de l’argent et j’ai mangĂŠ, EX MRXp DX[ FRXUVHV HPEUDVVp GHV Ă€OOHV -H PH VXLV rendu compte que je pouvais continuer comme si de rien n’Êtait, ahuri et bancal mais tranquille, et mĂŞme encore plus facilement qu’avant puisque, vaincu, terrassĂŠ sans que personne ne s’en aperçoive, je ne risquais plus rien. J’en voulais Ă ce cheval trompeur, ce tocard Ă l’allure de champion, pignouf, mais il m’avait permis de passer de l’autre cĂ´tĂŠ, dans le monde des ĂŠgarĂŠs sereins, oĂš tout est plus simple. Je me sens bien, maintenant. — * Veinard ĂŠternel, Philippe Jaenada vient de remporter le ÂŤ Prix du roman inachevĂŠ d’un auteur dĂŠjĂ ĂŠditĂŠ Âť pour Drames, malheurs et destins brisĂŠs, ÂŤ 7 700 signes prometteurs narrant les mĂŠsaventures d’un personnage portant les mĂŞmes initiales que JĂŠsus-­Christ Âť – une histoire qu’il a depuis entrepris d’achever, tiens. Son dernier livre, Plage de Manacorra, 16 h 30, sera disponible en poche en fĂŠvrier, chez Points.

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JEUX & LOISIRS Mode

Le travail des élèves de la Royal Academy of Fine Arts d'Anvers oscille entre démarche fantaisie et technique LUUpSURFKDEOH /HV QRXYHDX[ WDOHQWV GH OD PRGH ÁDPDQGH QH peuvent pas jouer à « Qui perd gagne », puisqu'ils ne perdent jamais. Photographie Michaël Smits Stylisme Pholoso Selebogo Coiffure & maquillage Louis Ghewy Modèle Betina Molnar chez Dominique Models Remerciements Studio RA, 13 rue Klooster à Anvers

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ANVERS 2010

Collier Elise Gettlife Chemise Nathalie Fordeyn

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Collier et masque peint Elise Gettlife

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ANVERS 2010

Masque en métal Guiseppe Virgone Chemisier Vintage Top oversized brodé Michelle Woods Ceinture Ute Ploier Leggings H&M

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Top Dries Van Noten Jupe, escarpins et bolĂŠro Nathalie Fordeyn

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ANVERS 2010

Catsuit Lion Blau

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Manches Lion Blau Coiffe Michelle Woods Top American Apparel Collants Fastasm

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ANVERS 2010

Jupe Pierre Renaux Veste Elise Gettlife Top Bruno Pieters

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JEUX & LOISIRS Beauté

Courbes majestueuses, transparences irréelles et jus envoûtants, la créativité GpERUGDQWH GHV ÁDFRQV GH OX[H ne ternit pas..

playground Eau de parfum Lola de Marc Jacobs, 100 ml, 90 euros. Eau de parfum Ricci Ricci de Nina Ricci, 50 ml, 60 euros. Eau Méga de Viktor & Rolf, 50 ml, 72 euros. Vernis à ongles Lippmann 18 dollars sur lippmanncollection.com. Faux cils Tsumori Chisato par Lucille Gauthier pour Shu Uemura, 25 euros. illustration Hélène Eau de parfum Rose The One Georget de Dolce & Gabbana, 50 ml, 66 euros. Eau de parfum L’Eau Ambrée de Dolce & Gabbana, 50 ml, 72 euros. Eau de parfum Alberta Ferretti, 75 ml, 70 euros. Eau de Parfum Idole de Giorgio Armani, 50 ml, 66 euros.

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BEAUTÉ

L’Impératrice de D&G, eau de Toilette 100 ml, 59 euros Balenciaga, eau de parfum, 50 ml, sortie prévue en février For Her Intense de Narciso Rodriguez, eau de parfum en édition limitée, 100 ml, 100 euros. Magnolia Nobile d’Acqua Di Parma, eau de parfum, 100 ml, 116 euros. Parisienne d’Yves Saint Laurent, eau de parfum, 90 ml, 80 euros. Pucci Vivara Black Edition eau de parfum, en édition limitée 50 ml, 66,50 euros. Hypnôse Senses de Lancôme, eau de parfum, 100 ml, 76 euros. Tsumori Chisato pour Shu Uemura, rouge à lèvres, 30 euros.

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Chroniques ce qui sort

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PAILLETTES MODE

FASHION DES CARPATES

Dracula cool

Quand le prĂŞt-Ă porter s’invente une identitĂŠ fantasmagorique, on frissonne devant les ĂŠtoffes volcaniques G¡XQ P\VWpULHX[ baron transylvanien, ROZALB DE MURA. Ça mord.

Collection automne-hiver 2009-2010

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C’est l’histoire d’un aristocrate, quelque part dans les montagnes de Transylvanie. L’air y est si pur, la nature si vierge, la solitude si terrible, que le baron Rozalb de Mura, jeune homme charismatique aux yeux slaves, rĂŞvasse Ă de grands pays lointains, lĂ oĂš la terre est rouge, oĂš l’on s’exalte des saveurs tropicales, oĂš les corps s’embellissent de tuniques traditionnelles. Parfois, aussi, son esprit s’abandonne jusqu’aux SD\VDJHV GpĂ€JXUpV SDU OH EpWRQ lĂ oĂš les tours touchent les nuages et oĂš la mode est d’un minimalisme austère. PassionnĂŠ de musique, de beaux-­arts, de voyages et de sciences, Rozalb de Mura transforme ses rĂŞves en prĂŞt-­à -­porter touche locale. C’est ce que nous rĂŠvèle Olah Gyarfas, crĂŠateur de la marque. Pourquoi ce personnage ? ÂŤ Parce qu’il n’y a rien de plus dĂŠlicieux que de mĂŠlanger OD Ă€FWLRQ j OD UpDOLWp Âť D’origine hongroise, Olah ĂŠtudie les arts appliquĂŠs Ă Budapest avant de se dissimuler (en 2005) sous la cape de Rozalb de Mura. Un personnage

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par Elisa Tudor

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qui attire l’attention de la fashion week de Bucarest et intrigue Ă l’international : ses vĂŞtements sont prĂŠsentĂŠs au +46 Trade Show de Stockholm, Ă l’Ideal Fashion Show de Berlin et au salon Rendez-­vous de Paris. Stefan Siegel, fondateur de Not Just A Label, plateforme online des professionnels de la PRGH FRQĂ€UPH TXH VHV FUpDWLRQV se vendent aussi bien que les pommes au royaume de Blanche-­ Neige.

Le baron Rozalb de Mura alias Olah Gyarfas

substance noire, puis sĂŠchĂŠes CACHE-­CACHE DANS LES naturellement, de sorte que, CARPATES VH VROLGLĂ€DQW OHXU VWUXFWXUH Pourquoi cela a-­t-­il impressionnĂŠ ait un aspect ondoyant. Des les clients, la presse ? Sans dĂŠtails renforcent l’aspect doute l’Êtonnement de voir des FDPRXĂ DJH GHV SRFKHV FDFKpHV crĂŠations ultramodernes sortir de faux plis, des accessoires d’un pays en dĂŠveloppement. Se inquiĂŠtants en forme de masque. GpWDFKDQW GLIĂ€FLOHPHQW GX UpJLPH Une mĂŠtaphore du milieu crĂŠatif communiste, la Roumanie n’a pas qui, sous Ceausescu, jouait Ă encore les moyens de soutenir ses cache-­cache avec les autoritĂŠs ? petits gĂŠnies : ÂŤ /¡DLGH j OD FUpDWLRQ La collection printemps-­ÊtĂŠ 2010 d’entreprise est rare, et pour la surprendra, elle, par effet de mode, il ne faut mĂŞme pas espĂŠrer ! Âť contraste extrĂŞme : volants Olah Gyarfas exporte son univers bouffants, bizarre, sombre, couleur rose prĂŠcis, dĂŠlicat. L’esthĂŠtique volcanique, bonbon, serre-­ Sa collection le relief rocheux tĂŞte tressĂŠ, pour automne-­ une approche hiver 2009 enrobĂŠ de magma plus folklorique brasse visqueux et et romantique. l’esthĂŠtique les ĂŠtats d’âme Plus optimiste volcanique, le aussi, relief rocheux de la jeunesse roumaine. symptomatique enrobĂŠ de d’une nation qui magma se dĂŠtache bien, pas Ă pas, d’un visqueux et les ĂŠtats d’âme de la sombre passĂŠ. — jeunesse roumaine, blasĂŠe par OH FRPPXQLVPH PDLV FRQĂ€DQWH en l’avenir. Les ĂŠtoffes ont ĂŠtĂŠ trempĂŠes dans une ĂŠnigmatique

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PAILLETTES MODE

SÉLECTION BEAUTÉ

Nouveaux standards Pari réussi pour la petite sœur de Bourjois qui allie modernité, parti-pris écologique et petits prix. Une 19 produits à partir de 11 euros.

NoPeg, petite boutique du quartier Montorgueil, présente une sélection beauté chic et bio. On découvre entre autres les marques Hévéa, Patyka, 66°30, mais aussi les soins cabines Clé des Champs qui changent avec les saisons. NoPeg 69, rue d’Argout, Paris 2e.

Nouvelle marque bio made in grand air qui prône l’éco-invisibilité, Elevation 3196 présente une idée originale autour des infusions de plantes de montagne, comme la reine des prés, la mauve ou l’églantier pour remplacer les bases aqueuses.

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Cette gelĂŠe transforme le train-train morose du dĂŠmaquillage en va et vient de pur bonheur. Un produit Ă changement de phase : la gelĂŠe devient huile puis lait. On en boirait. GelĂŠe dĂŠmaquillante polysensorielle Pomarium 21 euros.

Kiehl’s s’associe cet hiver Ă l’artiste new-yorkais Kaws LVVX GX JUDIĂ€WL pour relooker sa cĂŠlèbre crème de corps. 100 % GHV EpQpĂ€FHV VHURQW reversĂŠs aux orphelins du Sida via l’association FXB. Gamme Crème de Corps Kiehl’s Ă partir de 32,50 euros.

L’hiver, le froid met l’Êpiderme a rude ĂŠpreuve, alors pour sauver notre peau on use et abuse de ce soin visage qui laisse la peau douce et hydratĂŠe grâce au beurre de karitĂŠ et Ă l’extrait de coton. Crème ultra confort coton-karitĂŠ L’Occitane 30 ml 26 euros.

Le prodige du parfum ouvre sa maison entre le jardin des Tuileries et la rue Saint-HonorÊ et en SURÀWH SRXU SUpVHQWHU GH QRXYHOOHV SURSRVLWLRQV parfumÊes comme des lessives ou des bulles de savon aussi ludiques que dÊlicieuses. Francis Kurkdjian 5 rue d’Alger Paris 1er.

Les cultissimes &UqPHV 6RXIĂ pHV GH Laura Mercier sont rassemblĂŠes dans un coffret qui nous ĂŠvite de choisir entre le best Crème BrulĂŠe, l’exotique Amande-Lait

de coco et la dernière venue Crème de pistache. Coffret Laura Mercier, 60 euros aux Galeries Lafayette.

L’envoÝtement de la rose parÊe de Stella passe cette fois-ci par des notes sensuelles et suaves de vanille d’Ouganda et d’ambre gris. Brume douce parfumÊe STELLANUDE de Stella McCartney à pschitter sur sa jolie lingerie. 125 ml, 51 euros.

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INTERVIEW

 J’Êven -tre le rÊel 

Le livre

Après une sĂŠrie d’essais sur les parfums, les roses et le thĂŠ, INGRID ASTIER, 33 ans, publie un SRODU GRFXPHQWp GpGLp DX[ PDFFKDEpHV GH OD Seine. On se bouche le nez ? entretien François Perrin

Quai des enfers

SÊrie Noire – Gallimard 401 p., 20 euros

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Votre premier roman prend la Seine pour dĂŠcor. Pourquoi ? Le Paris des ponts et des bateaux-­ mouches sent vite le musĂŠe. Je UHIXVH GH YRLU OD 6HLQH ² Ă€O SDUIDLW qui traverse la ville en liant le Paris romantique et celui de la misère – comme une belle endormie. J’ai voulu la tirer de cette narcose, montrer qu’elle aimante des lieux IRUWV GH OD %ULJDGH Ă XYLDOH DX capharnaĂźm des SDF. Des lieux oĂš se jouent des destins. Je voulais tendre au lecteur l’envers du dĂŠcor. Comment avez-­vous travaillĂŠ ? -¡DL OD Ă€qYUH GX GpWDLO M¡DLPH travailler sur le vif. L’un de mes personnages dit que ÂŤ l’avantage du lĂŠgiste, c’est de palper sans limites Âť. Pour assumer mon imaginaire, j’ai besoin de cette palpation : dissĂŠquer, dĂŠplier, aller sur le terrain pour que les donnĂŠes

techniques soient bĂŠtonnĂŠes. J’ai menĂŠ des enquĂŞtes (Brigade criminelle, mĂŠdecine lĂŠgale, psychiatrie, SDF, pĂŞcheurs, parfumeurs, juristes, journalistes‌) pour WURXYHU GHV SHUVRQQDOLWpV IRUWHV ² TXDOLĂ€pHV GH Š SHDX[ de tambour Âť pour leur capacitĂŠ Ă faire vibrer le rĂŠel. Je voulais des personnages qui aient du nerf, de la GHQVLWp HW XQ ODQJDJH SURSUH -¡LQĂ€OWUH HW fais l’Êponge, m’imprègne des milieux, des langages, des gens, jusqu’à sentir l’humanitĂŠ Ă l’os. Plusieurs de vos descriptions de la Seine font penser Ă celles d’Aragon dans AurĂŠlien. L’Êcriture est un creuset : normal qu’on y croise des ĂŠchos. J’aime l’Aragon provocateur du TraitĂŠ du style. L’image hallucinĂŠe, aussi, de Rimbaud et de ses spectres Ă la dĂŠrive : ÂŤ (W MH YRJXDLV ORUVTX¡j WUDYHUV PHV OLHQV IUrOHV 'HV QR\pV GHVFHQGDLHQW GRUPLU j reculons !‌ Âť Ce j UHFXORQV m’obsède depuis l’enfance. Vous vĂŠnĂŠrez Nine Inch Nails et Faith No More, sans compter votre fascination pour l’ÊviscĂŠration. Ça va, sinon ? Fascination, vous y allez fort ! C’est mon cĂ´tĂŠ voleur de feu : je prends Ă la musique son ĂŠnergie, sans elle je n’Êcris pas une ligne. Elle me permet de descendre en imaginaire. La musique industrielle restitue mon obsession des bruits de machine. Sinon, l’ÊviscĂŠration agit comme mĂŠtaphore : le plaisir du polar repose en partie sur le va-­et-­vient entre l’observation et la divulgation, le dehors et le cachĂŠ. Donc, oui, j’Êventre le rĂŠel, je pĂŠnètre des milieux et je dissèque des mystères. —

A l’approche de NoĂŤl, des modèles dĂŠsarticulĂŠs pleuvent sur les bords du fleuve parisien. Originales ou pâles copies, on ramasse leurs cadavres et ceux de leur entourage proche figĂŠs dans la froideur de leur dernière pose. Brigade fluviale sur les dents, inspecteurs du 36 narguĂŠs jusque sous leurs fenĂŞtres, lĂŠgistes et scribouillards en ronde funèbre se font face et se mĂŞlent Ă d’esthètes assassins, pour consacrer ensemble la beautĂŠ pestilentielle d’un fleuve tout droit surgi d’un conte de sorcières. Ingrid Astier mène sa barque en ĂŠvitant les ĂŠcueils du genre. Avec une pensĂŠe pour Katoucha ? F. P.

Š C. HÊlie

Macabre mise en Seine

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QUESTIONNAIRE DE BERGSON

ÂŤ Les gens au ras du sol Âť

$ DQV OH SUROL[H %pQLQRLV FLORENT COUAO-ZOTTI publie le truculent Si la cour du mouton est sale, ce n’est pas au porc de le dire. Notre questionnaire de Bergson n’a donc pas craint de bondir outre-MÊditerranÊe.

Le livre

Les oreilles ont beau ĂŞtre grandes...

entretien François Perrin

‌ elles ne dÊpassent jamais la tête. StructurÊ autour de chapitres titrÊs d’autant de proverbes populaires, ce polar made in Cotonou nous propulse au cœur d’une faune de truands blancs (libanais, en l’occurrence), de conducteurs de taxi aux mains baladeuses, de citoyens à la machette facile, de chÊries à la peau dÊcapÊe et de policiers dÊbordÊs. Au cœur de cet explosif capharnaßm, un dÊtective tente d’imposer son statut à un pays qui n’a pas, comme le nôtre, ÊtÊ baignÊ à l’imagerie de Chinatown et Nestor Burma. Immersion dans la paisible nuit bÊninoise. F. P. Si la cour du mouton est sale, ce n’est pas au porc de le dire

Le Serpent Ă Plumes 200 p., 14 euros

Comment vous reprĂŠsentez-­vous l’avenir de la littĂŠrature ? Florent Couao-­Zotti : Tant que les hommes manifestent le dĂŠsir de se raconter, d’inventer leurs histoires ou des vies, la littĂŠrature reste cet espace de construction de nos utopies ; certes, dans deux cents ans, on dira que tout a ĂŠtĂŠ dĂŠjĂ dit puisqu’on le dit depuis Platon. Pourtant, les humains seront les mĂŞmes devant les ĂŠmotions. Cet avenir possède-­t-­il une quelconque rĂŠalitĂŠ, ou reprĂŠsente-­t-­il un pur possible ? Ce futur, du point de vue des technologies, se rĂŠalise dĂŠjĂ . Au Salon du livre de MontrĂŠal, l’une GHV UpĂ H[LRQV SRUWDLW VXU OH OLYUH ĂŠlectronique et la disparition du livre papier‌ Cela n’empĂŞchera pourtant pas la littĂŠrature d’exister. Que celle-­ci soit portĂŠe par des supports autres que traditionnels, rien ne l’empĂŞchera d’être des ÂŤ raccourcis d’humanitĂŠ Âť. Vous-­mĂŞme, oĂš vous situez-­vous dans cette littĂŠrature possible ? Je voudrais volontiers faire de l’anticipation littĂŠraire, mais je n’en ai pas les armes. Je ne me vois pourtant pas seul : je vois mon pays, l’Afrique, et ce que

nos littĂŠratures reprĂŠsentent Ă travers le monde. Il paraĂŽt que le concept de ÂŤ littĂŠrature monde Âť a ĂŠtĂŠ inventĂŠ pour rendre visibles les productions de certaines rĂŠgions. Je ne sais pas s’il est vraiment opĂŠratoire, ça me rend perplexe‌ Si vous pressentez l’œuvre Ă venir, pourquoi ne la faites-­vous pas vous-­mĂŞme ? Chaque fois qu’on ĂŠcrit quelque chose, on est en compĂŠtition avec soi-­mĂŞme. Ce que j’Êcris aujourd’hui doit ĂŞtre meilleur que ce que j’ai fait hier. C’est par cet exercice qu’on parviendra Ă ĂŠcrire la plus belle Ĺ“uvre de sa vie. Quelles diffĂŠrences entre un polar bĂŠninois et son cousin nord-­amĂŠricain ou europĂŠen ? Si on supprimait mes rĂŠfĂŠrences culturelles, le nom des lieux, il ne resterait que l’histoire qui, me semble-­t-­il, peut se produire dans n’importe quelle contrĂŠe. Est-­ce que ce ne sont pas les substrats culturels la petite plus-­value Ă un texte littĂŠraire ? Les quartiers brousse d’une ville pĂŠriphĂŠrique, la mentalitĂŠ des populations qui veulent se faire justice, les odeurs, les bruits, les gens au ras du sol‌ —

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PAPIERS LITTÉRATURE

LAC DES SIGNES

Le Secret de la Sierra Madre

RÊÊditÊs, les rÊcits bouillonnants de rÊvolte de l’AmÊricain B. TRAVEN, cachÊ sous une trentaine de noms et de mÊtiers, lui valurent une renommÊe dont il se serait volontiers passÊ.

ROMANS Le Vaisseau des morts

La DĂŠcouverte poche 286 p., 12 euros La RĂŠvolte des pendus

La DĂŠcouverte poche 302 p., 12 euros Le TrĂŠsor de la Sierra Madre

Sillage 320 p., 19,50 euros BIOGRAPHIE Insaisissable les aventures de B. Traven

par Rolf Recknagel L’Insomniaque 350 p., 18 euros

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Ses romans hypnotiques, VHFV HW Ă€pYUHX[ LO OHV UpGLJHDLW en quelques semaines, avec juste ce qu’il faut d’encre et de papier – sa cabane, perdue dans la jungle mexicaine, ĂŠtait Ă 50 kilomètres de la boutique la plus proche. Il se levait parfois pour chasser un scorpion et, Ă la tombĂŠe du jour, s’emmaillotait les mains pour les protĂŠger des moustiques. Ses hĂŠros parlent avec le mĂŞme feu intĂŠrieur que le Bardamu de Voyage au bout de la nuit. Dans tous ses livres, on retrouve ÂŤ OĂš est ma patrie ? OH VRXIĂ H LĂ oĂš personne ne me aventureux dĂŠrange, ne veut savoir de Jack London, qui je suis.  les mĂŞmes B. Traven, critiques Le Vaisseau des morts contre le capitalisme hypertrophiĂŠ et son cortège d’injustices. Mal connue en France, l’œuvre de B. Traven rĂŠsonne pourtant avec beaucoup d’acuitĂŠ. La rĂŠĂŠdition de ses trois plus grands romans – Le Vaisseau des morts (1926), Le TrĂŠsor de la Sierra Madre (1927) et La RĂŠvolte des pendus (1936) – est l’occasion de redĂŠcouvrir un auteur criant dans son Vaisseau : ÂŤ J’aime ĂŞtre libre encore plus qu’avoir le ventre plein. Âť INSAISISSABLE ZAPATISTE D’oĂš vient cette rage qui le consume ? Auteur d’une quinzaine de livres (rĂŠdigĂŠs entre 1925 et 1940, et diffusĂŠs Ă des millions d’exemplaires), une grande partie de son existence reste un secret – comme en

tĂŠmoigne Insaisissable, sa captivante biographie sortie en 2009. Comme Thomas Pynchon ou J. D. Salinger après lui, il a toujours refusĂŠ de dĂŠvoiler ses origines. Quelques pistes : pendant la Première Guerre mondiale, il est Ret Marut, rĂŠvolutionnaire allemand, anarchiste HW SDFLĂ€VWH TXL YHXW Š se fondre GDQV XQ FRPSOHW DQRQ\PDW DĂ€Q GH vous hurler ses paroles Âť, (dĂŠjĂ ) en 1918. CondamnĂŠ Ă mort en 1919, il prend la fuite et vagabonde en Europe, sous diffĂŠrentes identitĂŠs. Il rĂŠapparaĂŽt en 1924, au Mexique. C’est d’ici qu’il envoie ses premiers manuscrits en utilisant son nouveau nom de plume : B. Traven. Pour gagner sa vie, il travaille dans les champs de coton, dans les puits de pĂŠtrole, est marin, photographe, paysan. Et puis rattrapĂŠ par la gloire. En 1948, John Huston adapte son deuxième roman, Le TrĂŠsor de la Sierra Madre – trois desperados FXSLGHV j OD UHFKHUFKH G¡XQ Ă€ORQ G¡RU /H Ă€OP UHPSRUWH WURLV 2VFDUV l’identitĂŠ de Traven excite la frĂŠnĂŠsie des reporters, mais l’auteur continue de se cacher – craint-­il de se faire extrader vers l’Allemagne ? Il parcourt le Chiapas et se passionne SRXU OD UpYROXWLRQ ]DSDWLVWH Ă€GqOH DX Ă€O URXJH GH VRQ ÂąXYUH GpIHQGUH les opprimĂŠs. Il meurt Ă Mexico en 1969, exigeant que ses cendres soient dispersĂŠes dans la jungle. Pour ne pas laisser de traces. —

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par Guillaume Jan

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LITTÉRATURE

RELECTURE

L’enfant de la Beat Perdant ĂŠternel, WILLIAM BURROUGHS JR. surgit avec Speed, premier roman et gonzoUHSRUWDJH G¡XQ MHXQH WR[LFR QR\p GDQV OHV remous du rĂŞve hippie. par François Perrin

Le livre

Š Allen Ginsberg LLC

Protopunk

En 1967, Billy et son pote &KDG ÀOHQW GH 3DOP %HDFK j Greenwich Village pour un semestre d’immersion culturelle et de perfectionnement tox chez les hippies. Ils y croisent et font un peu tout et n’importe quoi, Billy s’embourbant dans son cynisme et sa provocation tandis que ses camarades semblent mieux rÊpondre à l’appel babaFRRO FH QRXYHDX FROOHFWLI à RUDO et bien-pensant. Il s’agit de l’histoire d’un post-Beat sur le tard, paumÊ dans un monde qui attendra encore dix ans, dommage pour lui, pour inventer le punk. Drôle pourtant, Speed trace le portrait d’un rejeton dÊbarquÊ à la mauvaise Êpoque. F. P. Speed

13e Note 174 p., 19 euros La Dernière balade de Billy

Ă paraĂŽtre

1973 –, sa traversĂŠe des seventies Citizen Burroughs. Nom d’usage : sera ĂŠmaillĂŠe d’un divorce, d’une Billy Junior. NĂŠ en 1947, disparu transplantation et d’un lent trente-­trois ans plus tard engloutissement, contre lesquels d’une explosion de son foie de sa tentative avortĂŠe de troisième substitution (le premier ayant jetĂŠ roman, Prakriti Junction, ne pourra l’Êponge en 1976). Profession de rien. OD PqUH Ă LQJXpH SDU VRQ PDUL des suites d’une reconstitution FATUM FAMILIAL de Guillaume Tell sous produits. A 13 ans, il avait rejoint Profession du père : absent brièvement son hĂŠroĂŻnomane de ² pFULYDLQ SUROLĂ€TXH ² MXQNLH père en exil Ă Tanger, tentant fugitif. Profession du bisaĂŻeul : de renouer le contact – mais ne inventeur. Profession des aĂŻeux rapporta dans ses bagages que ses paternels : parents de substitution. premiers contacts avec le hasch. Parrain tutĂŠlaire : Allen Ginsberg, Deux ans plus tard, il blesse poète, chantre de la Beat grièvement Generation un ami d’un et activiste ÂŤÂ Rendre sa libertĂŠ coup de politique. Ă ma peur. Âť fusil – fatum ,QĂ XHQFHV William Burroughs Jr., Speed familial littĂŠraires qui l’envoie revendiquĂŠes : brièvement en HP. Commence une Jack Kerouac (droguĂŠ), longue agonie mâtinĂŠe de came et Charles Bukowski (alcoolique). d’alcool, de larcins le faisant passer DĂŠviances connues : drogue, mal-­ par la case prison en malheureuses ĂŞtre, drogue, virĂŠes, drogue. tentatives de sevrage Ă la Green Comment surmonter un hĂŠritage Valley School. Pendant cette si lourd, franchement ? Billy Jr. a pĂŠriode, son ambition littĂŠraire lui dĂť se poser la question plus d’une sert de fragile bĂŠquille, le gamin fois, et sa rĂŠponse oscille entre parvenant pourtant en partie, Ă laisser-­aller quotidien et littĂŠrature force de travail, Ă esquisser sa comme planche de salut : ÂŤ Ce voie, sa voix, pour solder son mec m’Êcoute divaguer sans me hĂŠritage : ÂŤ Nulle part oĂš aller, alors trouver bizarre, du coup je ne tarde je m’incruste, mais en me sentant SDV j DFFHSWHU PRQ LPSXLVVDQFH de plus en plus dĂŠconnectĂŠ de mon HW UHQGUH VD OLEHUWp j PD SHXU Âť environnement. Âť Une entreprise %RXpH LQVXIĂ€VDQWH SXLVTX¡DSUqV Ă laquelle il serait parvenu si son la parution de ses deux romans atavique psychisme ne l’avait pas autobiographiques, Speed Ă 23 ans condamnĂŠ Ă l’abattoir. — et Kentucky Ham Ă 26 – en 1970 et

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CHRONIQUES

D'autres

LIVRES Angosta Hector Abad Faciolince JC Lattès 356 p., 20,90 euros

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Le Supplice des weekpas de limite ends «à Ilcen’yquealesapparemment gens les plus dénués

La cité d’Angosta, cauchemar urbain comme il en existe des tas : trois secteurs hermétiques, accueillant les membres plus ou moins homogènes de trois classes sociales ; les dons, les secondons et les tercerons. Quelle que soit leur couleur de peau, Robert Benchley les premiers sont socialement considérés comme Robert Laffont des Blancs, les seconds comme des métis, les 311 p. 17 euros troisièmes comme des Noirs ou des Indiens – à vous de deviner qui sont les mieux lotis. Planté dans le secteur des secondons, un hôtel accueille un méli-­ mélo de gens « moyens » qui parviennent cependant à établir d’un étage à l’autre une nouvelle échelle sociale. Faciolince prétexte cette dystopie pour régler son compte à « Il arrive parfois qu’on une Colombie infernale, rencontre un homme ayant imaginer les supporté un voyage avec un réjouissances nées nouveau-né. On devrait saluer fatalement de vingt et un coups de canon d’un abandon complet du l’arrivée d’un pareil citoyen lien social (qui ne sert à rien, dans la ville, et l’autoriser rappelons-­le) et imposer son style nerveux et ses trouvailles à porter l’insigne du Pater formelles ; la systématique Dolorosa, qui donne le droit présentation des personnages en note de bas de page, sur le de mendier sur les parvis PRGqOH G·XQH ÀFKH VLJQDOpWLTXH des cathédrales. » rédigée par un ironiste Robert Benchley névropathe, tient du génie. — François Perrin in Le Voyage en wagon d’enfants

d’humour feraient pour l’analyser. On dirait que l’Humour les dérange. Ils n’arrivent pas à croire que quelque chose puisse simplement être drôle en soi. » Légende du New Yorker, le chroniqueur américain Robert Benchley (1889-1945) défendait dans ces articles compilés-réédités cet hiver une idée du « nonsense pour le nonsense ». Il s’attachait à écrire sur la vie sociale du triton, sa haine tout à fait légitime des enfants, les monologues intérieurs d’un patron dictant une lettre à sa secrétaire, une méthode incroyable pour « venir à bout de tout ce qu’on doit faire » (très utile en période de bouclage), sa haine tout à fait compréhensible des bébés et le fameux supplice concernant l’heure à laquelle il est décent de se lever pour le petit déjeuner lors d’un week-end chez des amis. Mais pourquoi aucun journal de ce pays ne publie des auteurs de cette trempe (vivants, ce serait mieux) qui signeraient chaque semaine des textes drôles en soi prompts à soulager l’angoisse de nos contemporains ? Petit appétit, l’oiseau fait son nid. Richard Gaitet

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Mort de

Bunny Munro Nick Cave Flammarion 333 p., 20 euros

Pour comprendre les ressorts psychologiques de Bunny Munro, le papa poule VRP, obsédé sexuel et alcoolo-junkotabagique du second roman du crooner australien Nick Cave, se reporter à la page 196. Et là, ô merveille ! Du haut de ses 12 ans, la virginale Penny Charade, (dé) vêtue d’un bikini jaune à pois, apparaît telle une épiphanie. Sans Penny Charade, Bunny Munro n’aurait peut-être jamais su qu’il possédait « ce pouvoir, ce truc spécial que les autres n’avaient pas… ce talent qui lui a permis de comprendre ce qu’il était venu foutre sur cette planète à la con ». Un don qui lui donne la (quasi-)certitude qu’« Avril Lavigne possède le putain de Walhalla de tous les vagins ». Un talent qui lui fait réaliser « la dichotomie surréalisticosexy entre les bottes à poil Ugg de Pamela Anderson et sa foufoune (presque) rasée ». Sur son chemin, les femmes révèlent « l’arche dorée de leur string, qui s’élève d’entre [leurs] fesses comme le logo de Mc Donald’s ». Sans toi, jeune écervelée, le lecteur n’eut-il pas été épargné par les pulsions sodomites de Bunny ? Probablement, et tout particulièrement lorsque, des haut-parleurs du club de gym, Kylie Minogue susurre de sa voix de pute être prête à « baiser n’importe quoi ». Sans doute le lecteur eut-il été bien inspiré de ne pas se laisser embarquer sur la route (à écouter avec la « mellowsonne » B. O. du même auteur) empruntée par Bunny Sr. et Jr. (le pauvre enfant). De cette épate-bourgeois, dont la force poétique s’échappe de la plume virevoltante de notre idole comme le vomi du matin, l’on retiendra l’angoisse toute naturelle de Nick Cave aux abords de l’andropause.

Mathusalem

& Cie Jacques Girardon Le Dilettante 288 p., 20 euros

On ne devrait jamais nommer un hypocondriaque à la rubrique médecine d’un journal. Promu par hasard à ce poste, Eugène Galton s’y plonge avec délectation. Fasciné par les progrès de la génétique, il rêve d’échapper au pauvre destin promis aux derniers humains sans OGM. In vitro veritas, la science avance, l’immortalité est à portée de main ! Eugène décide donc de se faire cloner. Quitte à perdre sa compagne, ses amis… et se retrouver bien embêté au moment de ramener de l’étranger son bébé-clone sans papiers.

Ancien rédac’ chef de Sciences et Avenir, Jacques Girardon relève un GRXEOH GpÀ VRQ KXPRXU SHUPHW GH suivre avec sympathie son antihéros à l’enthousiasme dangereux et en suivant sa « carrière » dans le journalisme, il parvient à lier le développement VFLHQWLÀTXH HW FHOXL G·XQH LQWULJXH Entre sérieux du clonage et clownerie du personnage, Mathusalem & Cie pose sur nous un regard interrogateur sans la moindre morale, le sourire en bonus. 8QH VFLHQFH ÀFWLRQ DX SUpVHQW Bertrand Guillot

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PAPIERS LITTÉRATURE

CHRONIQUES (SUITE)

ESSAIS No Low cost Bruno Fay & Stéphane Reynaud Editions du Moment 222 p., 18 euros

Un Nouvel art

de militer Sébastien Porte & Cyril Cavalier Alternatives 144 p., 25 euros

&

Petit Manuel de

désobéissance civile Xavier Renou Syllepse 142 p., 7 euros

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Bazookas en carton et bouées pareballes, la Brigade Activiste des Clowns (BAC) attaque l’arsenal nucléaire de l’Ile Longue, en rade de Brest. Objectif : dénoncer la chape de plomb qui pèse sur la question du nucléaire ! Depuis quelques années, une nouvelle génération de militants s’organise de manière joyeuse pour lutter contre la logique de GRPLQDWLRQ HW GH SURÀW TXL PDOPqQH OD planète, les libertés publiques ou le droit au logement. Un Nouvel art de militer raconte toutes ces actions spectaculaires et médiatiques, depuis les fauchages d’OGM jusqu’aux déboulonnages des panneaux publicitaires, en passant par les squats spectaculaires menés par les larrons sans toit de Jeudi Noir. Ce reportage en profondeur (cinq ans de travail) révèle au passage l’exaspération citoyenne qui fait de plus en plus d’émules dans le clan des contestataires. En parallèle, le Petit Manuel de désobéissance civile dévoile les méthodes d’action de cette contestation non violente. Recommandé pour ceux qui refusent la passivité, ce précieux guide donne des conseils techniques en s’appuyant sur de nombreux récits – Xavier Renou, l’auteur, organise des stages de GpVREpLVVDQFH FLYLOH GHSXLV ÀQ Guillaume Jan

Le low cost, une imposture ? La mode s’est répandue dans tous les secteurs de l’économie : transport, alimentation, textile, immobilier, tourisme, santé... Aujourd’hui, la robe de soirée made in China est à 11 euros, un vol pour Dublin coûte 30 euros et CDiscount propose des canapés convertibles à 121,99 euros. Une aubaine, en période de crise ? Pas sûr. En enquêtant sur cette séduisante illusion, Bruno Fay et Stéphane Reynaud révèlent à quel point les enseignes renoncent à la qualité, aux droits sociaux et au développement durable : « Notre système entre dans une spirale négative où tout devient toujours moins cher, moins bon, moins écologique. Une sous-civilisation voit le jour, dont l’éphémère et la mauvaise qualité sont les signes distinctifs. » Mais fustiger l’hyperconsommation au rabais, n’est-ce pas une préoccupation de riche ? « La question n’est pas de culpabiliser le consommateur pauvre, mais de lui ouvrir les yeux sur les conséquences de ses actes à long terme. » Car, réduits au minimum, les coûts de production nuisent gravement à la santé, à l’emploi et à l’environnement. Une seule solution : achetez cher ! G. J.

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LITTÉRATURE

NOS COLLABORATEURS

PUBLIENT Cabala, Led Zeppelin occulte

Les Discrètes

vertus de la

PacĂ´me Thiellement HoĂŤbecke 170 p., 23 euros

corruption Gaspard Koenig Grasset 290 p., 19 euros

ÂŤ Laissons les grands corrompus ĂŠvoluer sur la scène qu’ils se VRQW FRQVWUXLWH HW SURĂ€WRQV GX spectacle. Âť Gaspard Koenig sera QRWUH VRXIĂ HXU EkWL DXWRXU GH OD Fable des abeilles du philosophe nĂŠerlandais Bernard Mandeville (1670-­1733), ce fort instructif essai sur les plus mĂŠmorables ÂŤ rois de boue Âť de l’Histoire, de Talleyrand Ă Roland Dumas en passant par Mobutu, le clan Corleone ou ce cher Lucien de RubemprĂŠ, compose une galerie de personnages si savoureuse qu’on pense, et avec lui, qu’il s’agit lĂ de son meilleur roman. Car il ne mĂŠgotte ni sur le style, ni sur la structure, ni sur les leçons. ÂŤ On apprend beaucoup plus en menant ses propres intrigues qu’en relisant celles des autres dans Stendhal. Âť Glissant sur la polysĂŠmie du mot ÂŤ corrompre Âť (les

chapitres sur le corps, le sexe et la mort sont Ă ce titre, et de loin, les meilleurs), Gaspard Koenig, qui fut deux ans durant la plume de Christine Lagarde, signe ÂŤ la dĂŠfense d’un phĂŠnomène LQMXVWHPHQW GpFULp j TXL QRXV devons peut-­être ce que nous avons de meilleur. ÂŞ 'pĂ€QLWLRQ Ă€QDOH Š La corruption est le processus mĂŞme de la vie, dans les expĂŠriences qu’elle propose comme dans les excès qu’elle provoque. Ce n’est pas un hasard si l’on nomme les individus dissolus les “viveursâ€?. Âť Mais dites, cette chronique, pur renvoi d’ascenseur ? A fĂŠliciter un auteur avec lequel nous travaillons de bon cĹ“ur depuis quatre ans, me serais-­je compromis ? Oui. Non. C’est tout le sens de cet ouvrage. Vivons. Richard Gaitet

ÂŤ On aurait dit Billie Holiday avec une paire de testicules Ă la place des larmes. Âť Jimmy Page Ă propos de Robert Plant, in Cabala.

Le fan serait capable d’Êtriper n’importe qui parlerait mal, parlerait en mal ou oublierait simplement de parler du groupe qui a bercĂŠ ses premiers ĂŠmois plus ou moins scabreux. PacĂ´me Thiellement a donc pris l’habitude de risquer sa peau Ă chaque instant, publiant des ouvrages pointus au parti pris assumĂŠ sur de minuscules crĂŠateurs comme Frank Zappa, Paul McCartney ou GĂŠrard de Nerval sans qu’on puisse lui reprocher une seconde de ne pas maĂŽtriser son sujet de bout en bout. Ici, c’est Ă Led Zeppelin qu’il s’intĂŠresse, Ă la dimension hermĂŠtique de leurs influences et contributions au Grand Tout. Jimmy Page sorcier, sĂŠrieux ? Eh ben oui. Bonham golem tellurique, Plant mage incantateur, John Paul Jones alchimiste de l’ombre ? Pourquoi pas, après tout. Le propos se tient, les raisonnements ĂŠrudits tiennent la route dans leurs circonvolutions illustrĂŠes des dĂŠclarations mĂŞmes des intĂŠressĂŠs. Cela dit, PacĂ´me Thiellement se fera bien entendu lapider par-ci par-lĂ , il en a fait son mĂŠtier, l’animal. Manque de pot, Ă n’en pas douter, lui non plus ne refusera pas l’Êtiquette de groupie exemplaire : ça risque de saigner dans les fans clubs. F. P.

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PAPIERS LITTÉRATURE

FLASH

et aussi T Je lis Garland

Photographeéclair à Vogue, le Suisse

Vous êtes photographe ou écrivain ? Nicolaï Lo Russo : Pas l’un plus que l’autre. Etre écrivain, c’est surtout une question de production : Simenon, Troyat, eux, étaient NICOLAÏ LO de vrais forçats. Le concept d’écrivain, RUSSO, 45 ans, aujourd’hui, est complètement éclaté. J’aime publie Hyrok, les textes qu’on peut lire à haute voix, la récit assassin musicalité de Céline, par exemple. Il ne faut pas que l’oreille « s’essouffle » à la lecture sur l’art comme chez Laurent Mauvignier : lui, il et la mode fait de la tapisserie – c’est un vrai écrivain, parisienne évidemment, mais il ne communique pas. Je des années 90. préfère travailler sur les dialogues ou sur les entretien François Perrin nouveaux modes d’écriture, comme les blogs. Comme votre personnage, vous avez débarqué à Paris pour devenir photographe de mode… J’ai créé Louison Rascoli sur une matrice

Le livre

Mort d’un commiscréateur Hyrok

Léo Scheer 516 pages, 19 euros

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En 2044, un orphelin remet la main sur le matériel audio, vidéo et écrit de son regretté père, Louison Rascoli, photographe successful des nineties étouffé de désillusion au tournant du siècle. Son seul chefd’œuvre ? La mise en

autobiographique et l’ai placé face à des événements réels ou imaginaires. Ma priorité, c’était de viser le réalisme. Le réalisme, c’est aussi ce que vous recherchiez en photo ? Richard Avedon disait : « Toutes les photographies sont exactes, aucune d’elles n’est la vérité. » Il avait aussi décrété, à propos d’une de ses photos d’Adjani, qu’il s’agissait de la dernière photo de mode, à laquelle ne succèderaient que des photos de LA mode. Les magazines ne proposent plus que des photos de catalogue pour acheteuses, ou pour le petit monde des professionnels. Entre les deux, pas grandchose. Des « gourous » décrètent quel photographe doit monter : c’est la Française des Jeux. —

scène de son suicide, dans la solitude d’une clairière enneigée. Sombre destin GRQW OH ÀOV VRXOLJQHUD la portée prophétique : au milieu du XXIe siècle, les signes avantcoureurs de la déchéance culturelle qu’avait perçus Louison ont donné leurs

fruits rances. Nicolaï Lo Russo, dans une langue éminemment travaillée, propose une parabole sur la perte du sens, une anticipation sinistre autant que brillante.

X Pas trop près

Dans Lunar Park, Bret Easton Ellis avouait monnayer parfois sa plume pour vanter un roman banal et inoffensif... Et voici le second de Sara Gran, Viens plus près (Sonatine), auréolé de l’éloge du maître : « Le meilleur roman que j’aie lu depuis longtemps » ! Verdict ? Un thriller bien ficelé, mais aux ficelles énormes. On préfère Ellis écrivain. B. G. W Rouge

Mexique

Après Tijuana City Blues, Lover Boy et Mexicali City Blues, Les Allusifs poursuivent, avec la publication de Mezquite road, leur entreprise d’implantation du Mexicain Gabriel Trujillo Munoz auprès du lectorat français. Toujours sanglant de la couverture à la dernière phrase, il ravira les psychopathes de 7 à 77 ans. F. P. X Evénement

Eric-Emmanuel Schmitt publiera sans doute quelque chose en 2010. Il y a fort à parier que beaucoup de gens le liront. Ou bien ce sera un film. Ou bien une pièce de théâtre. F. P.

© Louison Rascoli

« VISER LE RÉALISME »

Coma, splendide roman conceptuel entre rêve et réalité de l’Anglais Alex Garland, romancier de La Plage et scénariste de Danny Boyle (Sunshine, 28 jours plus tard), astucieusement illustré par les estampes de son père et paru en 2004 chez Belfond, ressort en poche, chez 10-18. Hop-hop-hop. F. P.

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PARIERS

Carte blanche

Johnny Guitare s’en vat-en mer Epique Êvocation du mÊconnu Voyage, unique et puissant roman maritime de l’acteur amÊricain STERLING HAYDEN. par Tristan Garcia

Le meilleur livre publiĂŠ en 2009 date de 1976. Chef-­d’œuvre oubliĂŠ, Voyage a tout d’un objet anachronique et d’un nĹ“ud de malentendus. Ecrit par Sterling Hayden (1916-­1986), grand acteur hollywoodien par la taille et par le talent (Johnny Guitare, Quand la ville dort, L’Ultime Razzia et Dr. Folamour, des seconds rĂ´les tardifs dans Le Parrain ou Le PrivĂŠ), ce roman n’est pas qu’une curiositĂŠ qui n’aurait d’autre intĂŠrĂŞt que la personnalitĂŠ de son auteur. Marin, dès l’âge de 15 ans, de schooners en bateaux de pĂŞche au large de Cuba, commandant un navire grĂŠĂŠ en carrĂŠ Ă 22 ans, Hayden n’a jamais ĂŠtĂŠ Ă Hollywood qu’en transit. HĂŠros de guerre et agent secret GXUDQW OD 6HFRQGH *XHUUH PRQGLDOH LQĂ€OWUp derrière les lignes allemandes en Croatie, converti par les partisans au communisme, il livra ses camarades Ă la commission McCarthy et concevra dès lors un mĂŠpris insondable pour sa propre personne, qui DIĂ HXUH GDQV VD VSOHQGLGH DXWRELRJUDSKLH tourmentĂŠe, Wanderer (1963), un premier essai littĂŠraire rĂŠdigĂŠ Ă l’occasion de sa fuite en goĂŠlette vers Tahiti. Hors-­la-­loi, il emportait ses quatre enfants avec lui, après un divorce calamiteux. Ne jouant Ă l’acteur que pour payer ses tours du monde, il se retira sur une pĂŠniche, entre la Hollande et Paris, et consacra dix ans Ă l’ouvrage qui nous intĂŠresse, Voyage – une aventure de 1896.

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Voyage

Rivages/Clairac 751 p., 25 euros

PYNCHON ET LEHANE PAR-­DESSUS BORD Cette ĂŠpopĂŠe Ă la cinquantaine de personnages inoubliables – du capitaine Pendleton Ă la bĂŞte Otto Lassiter, de l’hĂŠritier Blanchard Ă la fort peu chaste LoĂŻs, de l’Êpave Harwar au marxiste dĂŠfait John Dialog – n’est pas, contrairement Ă ce que pourraient suggĂŠrer la couverture

et une lecture distraite, un rĂŠcit de marin nĂŠoclassique, un White Jacket ou un Nègre du Narcisse passĂŠiste, livre d’aventures d’après la bataille. C’est un roman total : lutte des classes au fondement des Etats-­ Unis modernes (comme La Porte du Paradis GH &LPLQR JDOHULH GH SRUWUDLWV Ă€GqOH j l’impulsion morale de chaque ĂŞtre, tableau de la mer et des bois, carte idyllique des ĂŽles GX 3DFLĂ€TXH FDUWH LQIHUQDOH GH OD PDULQH de commerce, des matelots ÂŤ shangaĂŻsĂŠs Âť, des docks et des usines, fresque sur la sexualitĂŠ, les corps en corset et la peau nue, compilation de tics verbaux, de langues VSpFLDOLVpHV HW DUJRWLTXHV UpĂ H[LRQ SROLWLTXH sur la dĂŠfaite syndicale des populistes et des dĂŠmocrates‌ L’homme d’Hayden est comme ce navire ultramoderne, en acier, chargĂŠ de charbon et qui brĂťle sous l’effet imprĂŠvu du soleil, en pleine mer. C’est le grand roman amĂŠricain de l’aube du XXe siècle, ĂŠcrit depuis son crĂŠpuscule, dĂŠpassant l’avant-­dernier Pynchon, trop complaisamment baroque (A contrejour) et le dernier Lehane, trop complaisamment classique (8Q SD\V j O¡DXEH VXU OH Ă€O DYHF trente ans d’avance, le vieil Hayden avait rĂŠussi le vĂŠritable livre sur l’entrĂŠe dans ce siècle dont nous sommes aujourd’hui sortis. —

Retrouvez Ă chaque numĂŠro la chronique de Tristan Garcia qui, après le remarquĂŠ La Meilleure Part des hommes (Gallimard, prix de Flore 2008), publiera courant 2010 son second roman, MĂŠmoires de la Jungle, ÂŤÂ ĂŠtrange rĂŠcit d’aventures racontĂŠ par un jeune singe ĂŠduquĂŠ et parlant, perdu dans la forĂŞt ĂŠquatoriale africaine .

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ART PAPY

 Duchamp me voyait comme un fils  Pour la sortie du Grand dÊchiffreur, regroupant les entretiens et la correspondance de Marcel Duchamp, le peintre pop anglais RICHARD HAMILTON DQV H[SOLTXH VRQ U{OH GDQV OD reconnaissance en France du père du ready-made. entretien Damien Delille

(WHV YRXV VDWLVIDLW GH YRLU HQĂ€Q WUDGXLW YRWUH OLYUH sur Marcel Duchamp ? Richard Hamilton : J’ai ĂŠtĂŠ surpris, après tout ce WHPSV 0DLV MH WURXYH WUqV JUDWLĂ€DQW HW KRQRULĂ€TXH d’avoir la possibilitĂŠ d’enseigner Marcel Duchamp aux Français ! Pourquoi une reconnaissance si tardive ? Le fait que Duchamp soit parti durant les annĂŠes 50 a ĂŠtĂŠ ressenti comme une trahison. C’est assez comprĂŠhensible en un sens. Les Français ont considĂŠrĂŠ qu’il ĂŠtait AmĂŠricain et n’ont portĂŠ de considĂŠration sur son Ĺ“uvre qu’après sa mort en 1968 [sa première rĂŠtrospective en France accompagne l’inauguration du Centre Pompidou en 1977]. Qu’est-­ce qui vous a attirĂŠ chez lui ? Vous savez, Ă l’Êpoque, personne n’avait vu une peinture de Duchamp – contrairement aux grands noms ÂŤ Je trouve très comme Picasso ou Matisse. Il n’Êtait pas connu et je n’avais honorifique d’avoir la pas de raison de venir Ă lui. Mais possibilitĂŠ d’enseigner en 1948, j’ai dĂŠcouvert l’une des 320 versions de la BoĂŽte Verte Marcel Duchamp [lire encadrĂŠ] qui contiennent les aux Français ! Âť notes et les schĂŠmas relatifs Ă son Richard Hamilton travail, et je les ai dĂŠchiffrĂŠs avec des collègues francophones. C’est cela qui m’a permis d’être conscient de ce qu’il ĂŠtait – pas ses peintures. Comment l’avez-­vous rencontrĂŠ ? La première fois a ĂŠtĂŠ une catastrophe : je suis tombĂŠ malade tellement j’Êtais intimidĂŠ. Mais Duchamp ĂŠtait très charmant et, entre mes premiers contacts en HW QRV PXOWLSOHV UHQFRQWUHV XQH FRQĂ€DQFH V¡HVW LQVWDOOpH ,O PH YR\DLW FRPPH XQ Ă€OV MH FURLV Avez-­vous ĂŠtĂŠ l’un des premiers Ă comprendre son importance ? J’Êtais sĂťrement le premier Ă le comprendre complètement en tant qu’artiste. Quand les notes ont ĂŠtĂŠ publiĂŠes, Marcel m’a envoyĂŠ une lettre : ÂŤ Nous sommes fous du livre. La passion que vous avez mise

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GDQV FH WUDYDLO D GRQQp QDLVVDQFH j XQ PRQVWUH GH vĂŠracitĂŠ ; la mariĂŠe [lire encadrĂŠ] doit s’Êpanouir de plus en plus. Âť C’est tout ce que l’on peut espĂŠrer de mieux. Et pour l’art d’aujourd’hui ? Les choses et les images changent beaucoup. Je rĂŠpondrai Ă peu près comme lui : ÂŤ Une Ĺ“uvre d’art n’en est une que pendant une brève pĂŠriode, vingt ans‌ Âť De quoi lui ĂŞtes-­vous redevable ? D’une attitude montrant que certaines choses n’ont pas besoin d’être faites. Il faut toujours rebondir, faire des choses opposĂŠes. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai fait de la peinture, pour revenir au rĂŠtinien, Ă l’opposĂŠ de Duchamp. —

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ART

Marcel Duchamp et Richard Hamilton au Museum of Modern Art, 1963. A gauche, Richard Hamilton réalisant la reconstruction de la Mariée PLVH j QX SDU ses célibataires, même, ou Le Grand Verre, 1915-­1923, 1965-­1966, sur le motif des célibataires (pour « artforum » et « batchelor »)

©DR

Duchamp s’il vous plaît 27 juin 1956. Richard Hamilton envoie à New York une lettre expliquant à Marcel Duchamp la nécessité de traduire en anglais les notes liées au Grand Verre (sa grande œuvre inachevée sur la transposition mécanique des relations amoureuses et érotiques) commencée en 1912. L’artiste lui répond un an après, avec enthousiasme, pour lui donner l’opportunité de traduire les quatre-vingt-treize documents de la Boîte Verte réalisée en 1934 (à l’intérieur, la plupart de ses notes, et sur le couvercle, la célèbre mention « La mariée mise à nu par ses célibataires même »). Ce travail, qui passe par le déchiffrage de ratures et la transcription de schémas, finira par être qualifié de « transposition typographique » du monde

intérieur duchampien, spécialité d’Hamilton. 26 novembre 1960. Hamilton écrit beaucoup, restituant les mystères d’une œuvre prolifique. Duchamp lui fait part de toute sa gratitude pour la publication enfin réussie des notes. En pleine période Pop art, une relation de confiance prolonge la pensée de l’inventeur du ready-made : « Ma réponse a consisté à essayer d’aller aussi loin que possible dans le geste iconoclaste, pas pour tuer l’art, mais pour le réduire à un acte complètement banal. » 16 février 1964. Teeny, la femme de Duchamp, remercie Hamilton d’avoir écrit le seul compte rendu de la première rétrospective de son mari au Pasadena Art Museum. Lors d’un voyage en Californie, Hamilton constate :

« Le pop art, ce mouvement, avec ses maîtres et ses compagnons de route, était en train de me passer sous le nez. Je me suis ressaisi pour tenter de le prendre en marche. » Hamilton serait bientôt présenté comme le père du pop art anglais, produisant dès 1956 son célèbre collage Qu’est-ce qui peut bien rendre nos intérieurs d’aujourd’hui si différents, si attrayants ? 1966. Deux ans avant sa mort, la reconstitution du Grand Verre par Hamilton pour l’exposition rétrospective de la Tate Gallery de Londres fait de lui l’exécutant admiré de Duchamp. D. D.

Le Grand déchiffreur

Richard Hamilton sur Marcel Duchamp. JRP Ringier, 2009

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DESSINS TRÈS ANIMÉS

Lignes de tir Sur fond de guerre et de valeurs troublées, NOUS, VOUS, ILS OU ELLES, ou

les croquis d’une société violente H[SRVpV DX Frac Picardie d’Amiens. par Patricia Maincent

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Précurseur dans l’engouement pour le dessin (dès 1983, deux ans après sa création, il y consacre exclusivement sa collection), le Frac de Picardie propose Nous, Vous, Ils ou Elles, conçue comme le prolongement de Je, Tu, Il ou Elle, présentée à la galerie nationale de la tapisserie de Beauvais au printemps 2009. Opposant le collectif, ou pluriel, au postulat de l’image de soi, de l’intime et du paraître de la proposition précédente, l’exposition donne une vision cruelle et trouble sur le rapport au monde, à l’Histoire et à la société. Un dessin est un travail en direct, achevé dans l’immédiateté (pas de temps d’attente pour un éventuel séchage, moulage). Cependant, son caractère séculaire et la simplicité des outils le rendent, paradoxalement, hors du temps. Cette mise à distance permet un regard d’autant plus critique, voire cynique pour le détracteur qu’est l’Américain Raymond Pettibon. Sur une plage de Californie, quatre surfeurs se tiennent debout derrière leurs planches avec cette légende : « Certains jours d’été, notre croix était portée avec courage ». Mêlant la surf culture aussi bien que l’histoire de l’art et la religion dans un style proche de la BD, Pettibon saisit de quelques lignes crues l’incohérence des valeurs sociales et les clichés de l’Amérique. C’est le portrait d’une société en quête de références, où sont placés au même niveau image médiatique et intimité, religion et loisirs.

Martin Kippenberger Sans titre Extrait de la série Was Gott im Herrschen, bin ich im Können, 1990 Collection Frac Picardie

UN AMIRAL EN BIÈRE Dans ce sombre panorama social, OH FRQÁLW DUPp DSSDUDvW GDQV la série sur la première guerre du Golfe de l’Allemand Martin Kippenberger. Intitulée Was Gott im Herrschen, bin ich im Können (A Dieu de régner, à moi d’agir, HW ÀGqOH j OD WHFKQLTXH « vite fait, mal fait » de son auteur, l’œuvre est dessinée sur des papiers à en-­tête des hôtels où il réside. Ce nomade dresse ainsi une cartographie de l’Europe à travers la culture hôtelière. Sur la feuille de l’hôtel Lord Nelson, OD ÀJXUH FRQTXpUDQWH GX FpOqEUH Amiral prend la forme d’une chope de bière. Quant au papier partiellement brûlé du Caesar’s Palace, deux GI pagaient dans

un petit canot pneumatique. Une satire de la guerre technologique américaine ? Un brin pessimiste, l’ensemble est ponctué de trois grands dessins blancs de l’Espagnol Jaume Plensa, dont le motif central du cercle est visible dans un jeu monochrome de texture brillante en résine blanche sur papier calque. Au cœur de ces trois cibles, trois mots, Blind (aveugle), Deaf (sourd), Mute (muet). La couleur est trompeuse et n’en reste pas moins un constat amer de plus sur la société. —

Nous, Vous, Ils ou Elles

Fonds régional d’art contemporain de Picardie, Amiens Jusqu’au 29 janvier

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ART

MORTEL

Léger tremblement au seuil de la mort

Derniers jours pour DEADLINE au musée d’Art moderne de Paris, ode à la vie d’artistes à la mort annoncée. Trop tard ? par Patricia Maincent

La force créatrice d’artistes se sachant condamnés ? Le texte de présentation de Deadline laissait augurer une exposition fascinante. Mais… le frisson ne survient pas, le questionnement métaphysique non plus. La tension émouvante qui réside chez ces artistes s’annule dans leur proximité mortuaire. Jeunes ou vieux, les douze personnalités présentées, confrontées à une fin prochaine, réagissent différemment : distance et intellectualisme, ou énergie et emphase. ABSALON CRIE, HARTUNG PROJETTE L’Israélien Absalon, condamné par le sida dès 1989 à l’âge de 22 ans, revit avec trois vidéos et une de ses cellules – constructions réduisant au minimum l’espace vital, destinées à être habité par lui dans une grande ville du monde. Réduction de son avenir, entre chambre d’hôpital et cercueil,

la Cellule n° 3, conçue pour New York en 1992 – un an avant sa mort –, évoque aussi les cellules biologiques malades. Dans ses vidéos, habillé en noir et blanc, il esquisse des gestes quotidiens aussi minimalistes qu’existentiels. Malheureusement, les cris qu’Absalon poussent dans l’une des séquences restent muets à côté des peintures de Hans Hartung, tant leur dépouillement s’accompagne mal de l’hyper-gestualité des drippings du vieux monsieur allemand. Paralysé au terme de sa vie, Hartung projette, à l’aide d’une machine de pulvérisation agricole, des litres de peintures colorées sur ses toiles. Visible sur un documentaire à la fin de l’exposition, la démesure entre ce corps et la fougue du jet, est touchante. Au détour d’un couloir, la poésie des photographies de vautours – petites taches perdues dans le ciel – du Cubain Felix Gonzales-Torres pourraient laisser

songeur si les toiles aux traits colorés de l’expressionniste américain De Kooning ne venaient pas perturber cette rêverie, nous ramenant à un discours d’exaltation radicalement opposé. Isolé par son évocation directe de la maladie, l’artiste franco-chinois Chen Zhen travaille des matières délicates, comme le verre ou l’albâtre, pour évoquer la fragilité de l’anatomie. Comme sur une table de dissection, la face cachée du corps révèle des organes aux formes friables. Ce « patient qui voulait devenir médecin », comme il se définit lui-même, sort des entrailles un paysage onirique et raffiné. Les thèmes – la maladie, la vieillesse ou l’énergie –, peut-être trop nombreux, se côtoient sans créer d’espace de réflexion. Le texte d’introduction abordait la difficulté de la société occidentale à évoquer la mort : constat non dépassé. — Absalon Cellule n° 3, 1992 Musée d’Art moderne de Saint-Etienne-Métropole, Donation de la Caisse des Dépôts, Paris, 2006 Photo Yves Bresson ©DR

Deadline

Musée d’Art moderne de la Ville de Paris-Arc Jusqu’au 10 janvier

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PALETTES ART

APRĂˆS COUP

Scènes de rĂŠsisdanse Cet automne, la MĂŠnagerie de Verre, et son festival LES INACCOUTUMÉS,

D FRQÀUPp VRQ U{OH GH salutaire laboratoire entre chorÊgraphie et arts plastiques – jusqu’à nous faire oublier la diffÊrence. par Gilles Baume

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Depuis vingt-­cinq ans, une histoire de la crĂŠation scĂŠnique s’Êcrit Ă la MĂŠnagerie de Verre. D’ex-­jeunes pousses comme Boris Charmatz ou Alain Buffard, devenus des rĂŠfĂŠrences sur les plateaux de danse, \ Ă€UHQW OHXUV SUHPLHUV SDV &H OLHX SRXUVXLW donc son travail de dĂŠfrichage et maintient son rang de laboratoire Ă travers l’automnal festival des InaccoutumĂŠs. Que voit-­on aux ÂŤ Inac Âť, lĂ oĂš O¡RQ SRXUUDLW V¡DWWHQGUH j GH OD GDQVH " 'HV Ă€OPV (PlongĂŠe de Vincent Dupont, Saison 1, ĂŠpisode 2 de Bettina Atala), des installations autour desquelles le spectateur ĂŠvolue avec le danseur (Park de Claudio Triozzi), un cinĂŠ-­concert (1999 de GĂŠrald Kurdian). Ou encore un spectacle de danse sans danseur, comme 100 % polyester, objet dansant n° 49. Conçue par Christian Rizzo en collaboration avec Caty Olive, cette courte pièce donne Ă voir une ĂŠtrange sculpture en textile suspendue, soit deux robes sur cintres aux bras cousus. Plus ou moins visibles en fonction de l’Êclairage, les silhouettes IDQWRPDWLTXHV TXL pPHUJHQW Ă€JXUHV GH OD JpPHOOLWp RX GX FRXSOH GDQVHQW HQ URQG DX JUp GX VRXIĂ H GHV ventilateurs. En quelques instants, l’objet inanimĂŠ (quelques morceaux de tissu) prend vie au moyen de la lumière, du mouvement et du son (un montage de musiques ĂŠlectroniques). Rizzo chorĂŠgraphe est peut-­ ĂŞtre avant tout designer d’espace ou scĂŠnographe ; aujourd’hui, il n’est parfois plus possible, ni mĂŞme pertinent, de distinguer le chorĂŠgraphe du plasticien, la performance spectacle de la performance artistique, et Christian Rizzo et GĂŠrald Kurdian ont ĂŠtudiĂŠ aussi bien en ĂŠcole d’art que dans le cadre de formations chorĂŠgraphiques. Le thème de la disparition du corps cher Ă Rizzo se retrouve aussi dans le travail de Vincent Dupont. Dans sa crĂŠation 6RXIĂ HV ,, le chorĂŠgraphe-­interprète fauche un champ imaginaire au moyen d’une faux ELHQ UpHOOH GpĂ€QLVVDQW XQ UDSSRUW HQWUH VRQ FRUSV et l’outil. Pendant toute la pièce, un corps fĂŠminin, en fond de scène, allongĂŠ et drapĂŠ de blanc, s’Êlève dans les airs comme par enchantement. Très tĂŠnues, les situations se dĂŠveloppent lentement et longuement, plongeant le spectateur dans un ĂŠtat de contemplation hypnotique.

EXPLORATION DES GESTES L’espace nommĂŠ performance se partage aujourd’hui entre danse et arts plastiques. Territoire au contour Ă RX FH FKDPS Q¡HQ HVW SDV PRLQV GH SOXV HQ SOXV omniprĂŠsent, aussi bien dans les centres d’art que dans les thÊâtres. Historiquement, du cĂ´tĂŠ des plasticiens, une performance est une Ĺ“uvre dans laquelle l’artiste met en jeu son corps, exĂŠcutant des gestes dans des conditions bien prĂŠcises. Du point de vue des danseurs, la performance renvoie au principe d’expĂŠrimentation et de recherche. La virtuositĂŠ chorĂŠgraphique laisse la place Ă une exploration de gestes empruntĂŠs au quotidien, comme dans Park, oĂš les actions ordinaires du personnage fĂŠminin, interprĂŠtĂŠ par Claudia Triozzi, sont empruntĂŠes au rituel domestique. Les artistes du festival, d’oĂš qu’ils viennent, GpĂ€QLVVHQW GH QRXYHDX[ IRUPDWV HQ GHKRUV GHV durĂŠes standard et des rapports classiques entre spectacle et public. Les objets produits, Ă la fois chorĂŠgraphiques et plastiques, donnent une place centrale au spectateur. Les effets spectaculaires sont TXHVWLRQQpV YRLUH DEDQGRQQpV DX SURĂ€W GH VLWXDWLRQV

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ART

et aussi XJ.-J.Lebel Soulèvements La Maison Rouge, Paris (75011) Jusqu’au 17 janvier

XL’Espèce de chose mĂŠlancolie Mamco, musĂŠe d’art moderne et contemporain, Genève (CH) Jusqu’au 17 janvier

SIvan Plusch The News Galerie Orel Art, Paris (75004) Du 15 janvier au 27 fĂŠvrier

XRobert Breer et CÊcile Babiole Tours et DÊtours Espace MultimÊdia Gantner, Bourogne (90) Jusqu’au 13 fÊvrier

XChristian Boltanski Exposition en 2 volets :

Après FULWLTXHV HW UpĂ H[LYHV XVDQW GX FRUSV FRPPH G¡XQ matĂŠriau parmi d’autres. L’Êconomie de moyens doit s’entendre comme une quĂŞte de l’essentiel, une interrogation des composantes de l’acte de crĂŠation. EloignĂŠe de l’industrie dĂŠrivant vers le spectaculaire pour mieux accroĂŽtre son audience, la performance ÂŤ transgenre Âť, telle que la dĂŠfend Les InaccoutumĂŠs, constitue un salutaire lieu de rĂŠsistance Ă tous les conformismes. —

Ci-dessus Christian Rizzo i-fang lin / christian rizzo ŠChristian Rizzo A gauche GÊrald Kurdian 1999 ŠBettina Hoffman

MAC/VAL, Vitry sur Seine (94) Du 15 janvier au 28 mars

Personnes Grand Palais - Monumenta 3 Paris (75008) Du 13 janvier au 21 fĂŠvrier

TLeandro Erlich Swimming Pool PS1, New York (US) Jusqu’au 1er mars

La MĂŠnagerie de Verre, Paris

menagerie-de-verre.org Christian Rizzo

L’Oubli, toucher du bois Les 25, 26 et 27 fĂŠvrier Ă l’OpĂŠra de Lille, le 31 mars Ă Poitiers, le 8 avril Ă La Passerelle Ă Saint-Brieuc, les 26, 27 et 28 mai au ThÊâtre de la Ville Ă Paris. GĂŠrald Kurdian

Se produit en concert sous le nom de This is the hello monster ! Les 19 et 20 mai au Lieu Unique Ă Nantes.

XDokidoki Tropic Fm du duo d’artistes Falseparklocation Procurez-vous le disque sur editions.dokidoki.fr

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PALETTES ART

VIDÉO VRAIE

De la psychose au conte fantastique, O¡XQLYHUV Ă€OPp GH O¡,VUDpOLHQQH KEREN CYTTER est servi au Plateau. Rencontre fragmentĂŠe un soir de montage. par Patricia Maincent

La femme qui gravissait les escaliers de la vie et rĂŠalisa qu’il s’agissait de fauteuils de cinĂŠma* CONFUSION PERMANENTE /D ORJLTXH GH VHV Ă€OPV UHSRVH VXU GHV QLYHDX[ GH narration complexes entre le langage et les visuels, dont les diffĂŠrentes lectures se mĂŞlent et se dĂŠcalent O¡XQH O¡DXWUH GDQV XQ Ă RW G¡LPDJHV SURFKH GX UrYH Dans Four Seasons, le personnage fĂŠminin est prĂŠnommĂŠ Stella, soit ĂŠtoile, alors que la scène se dĂŠroule dans un dĂŠcor de NoĂŤl. Personnage et dĂŠcor se font ĂŠcho : lorsque l’arbre prend feu, Stella disparaĂŽt. ÂŤ -¡pFULV PHV Ă€OPV HQ SHQVDQW Keren Cytter

Exposition personnelle Frac-Ile-de-France - Le Plateau, Paris Jusqu’au 14 fÊvrier SÊance Keren Cytter

Prospectif CinĂŠma, Centre Georges Pompidou, Paris Jeudi 28 janvier Ă 20 h, cinĂŠma 1

ÂŤ C’est ça le rĂŠel, ce lien entre ce que l’on perçoit et ce qu’il advient. Âť Keren Cytter

Keren Cytter Repulsion, 2005 3 vidÊos, 5 min chacune Courtesy : Galerie Nagel, SCHAUORT, Elisabeth Kaufmann et Christiane Bßntgen et Keren Cytter

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EngoncĂŠe dans son manteau et noyĂŠe derrière une grosse ĂŠcharpe, Keren Cytter, nĂŠe en 1977 Ă Tel-­ Aviv, est loin du bon ton de rigueur pour vendre sa première exposition personnelle en France. Sympathique mais très abrupte dans ses rĂŠponses, elle conclura notre entretien d’un soupir de soulagement. Quelques bribes concĂŠdĂŠes permettent cependant de mieux saisir la curiositĂŠ des Ă€OPV TX¡HOOH pWDLW HQ WUDLQ G¡LQVWDOOHU j QRWUH DUULYpH Reprenant la structure narrative ĂŠclatĂŠe des montages GHV KXLW Ă€OPV SURMHWpV O¡HVSDFH G¡H[SRVLWLRQ HVW ponctuĂŠ de phrases ou de dessins qui soulignent les rĂŠpĂŠtitions et les liens souvent dĂŠroutants entre images et voix. Keren avoue que la salle de cinĂŠma l’intĂŠresse plus que le musĂŠe : ÂŤ Quand on va au FLQpPD RQ FRPPHQFH OH Ă€OP DX GpEXW F¡HVW XQH expĂŠrience plus intense, et puis je prĂŠfère l’audience SOXV GLYHUVLĂ€pH GHV VDOOHV REVFXUHV -H QH YLHQV SDV GX tout d’un milieu culturel, mes parents ne m’ont jamais emmenĂŠe au musĂŠe. Âť

GLUHFWHPHQW j O¡LPDJH SRXU TXH OHV GHX[ OLJQHV voix et images, soient structurĂŠes en mĂŞme temps. Âť Ces rapprochements formels sont très riches, et loin d’être ĂŠvidents, formant comme un discours Ă part entière. Des mises en abyme ajoutent un nouveau niveau d’interprĂŠtation, la citation devenant un pOpPHQW LQWpJUDQW GH OD Ă€FWLRQ 'DQV Continuity (2005, hommage Ă la cĂŠlèbre nouvelle de l’Argentin Julio CortĂĄzar), un homme assis dans un fauteuil lit l’histoire de son propre meurtre, et la scène se termine alors que le meurtrier est derrière lui. L’intervention du fantastique dans ses scĂŠnarios renforce le trouble de protagonistes parfois quasi autistes. ÂŤ Je tente de suivre un cheminement intĂŠrieur, en relation avec la perception de la rĂŠalitĂŠ de chacun. Âť En fait, il y a une confusion permanente entre la vie psychique de ses hĂŠros et le rĂŠel. ÂŤ J’ai l’impression que c’est ça le rĂŠel, ce lien entre ce que l’on perçoit et ce qu’il advient. Personne ne saisit parfaitement la diffĂŠrence entre son monde intĂŠrieur et la rĂŠalitĂŠ. Âť — * Titre au fĂŠminin de son dernier ouvrage : The Man who climbed the stairs of life and found out they were cinema seats.

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ART

Carte blanche

de près comme de loin, olivier babin

TWO AMERICAN STANDARDS

Retrouvez dans chaque numéro la chronique d'Olivier Babin. Il participe en janvier aux group shows new-yorkais Eleven Rivington et Thierry Goldberg Projects. En mars, il présentera Paradis Blanc au Triple V à Dijon et fera partie de l'exposition collective Deuxième Main au Musée d'Art Moderne de Paris. PAGE

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UNDER UNDERGROUND

 Des hybrides  Les collages mutants et les vidÊos sensuelles de l’Espagnole TXIKI MARGALEF, 33 ans, pleines GH FRUSV PRGLÀpV VRXV WHQVLRQ pURWLTXH invitent à des rêveries diurnes. On se rÊveille.

entretien Jean-Emmanuel Deluxe

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Qu’est-­ce qui t’a donnĂŠ envie d’être plasticienne ? Txiki Margalef : L’art constitue une expĂŠrience rĂŠtinienne, et mon enfance fut baignĂŠe de couleurs YLYHV 3DUPL PHV LQĂ XHQFHV LO \ D %XxXHO OH surrĂŠalisme, des vidĂŠastes comme l’AmĂŠricain %LOO 9LROD >SLRQQLHU GH O¡DUW YLGpR@ 9DVDUHO\ +DQV %HOOPHU OH Ă€OP Performance >1LFRODV 5RHJ @ HW WRXW OH FLQpPD SV\FKpGpOLTXH Photo, vidĂŠo, collages‌ Que choisir ? $ O¡RULJLQH MH QH SHLJQDLV TXH GHV WRLOHV j O¡KXLOH WUqV FODVVLTXHV PDLV DYHF GHV VXMHWV RULJLQDX[ 3XLV M¡DL

FRPPHQFp OD SKRWR DX[ %HDX[ $UWV >HQWUH 0DGULG 5RPH HW $QYHUV@ /D YLGpR V¡DSSUHQG HQ DXWRGLGDFWH j SDUWLU GX PRPHQW R WX W¡LQWpUHVVHV DX[ WUDYDX[ des autres‌ Je me suis laissĂŠ porter par le tout. C’est comme une palette de couleurs pour peindre un tableau : un processus naturel. Pourquoi ce travail sur le corps ? &¡HVW DPXVDQW 0DLV M¡DL DXVVL SUpVHQWp GHV SHWLWHV Ă HXUV PrPH VL HOOHV pWDLHQW VSpFLDOHV -¡DLPH OHV H[SpULHQFHV OH UpVXOWDW Ă€QDO GHV LPDJHV QH FRPSWH SDV WDQW TXH oD ,O V¡DJLW GDYDQWDJH G¡XQH UHQFRQWUH

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CINÉMA

et aussi T Black-list 2009 La quoi ? Depuis 2004 se rĂŠunit chaque annĂŠe un groupe comprenant des petites mains des studios hollywoodiens pour rĂŠdiger la liste des ÂŤ meilleurs scĂŠnarios en circulation ne trouvant pas de producteur Âť. Ou presque : parmi les dix premiers cette annĂŠe ĂŠtait classĂŠ The Social Network, un rĂŠcit des coulisses de la crĂŠation de Facebook que David Fincher tourne en ce moment. En numĂŠro un, Ă l’unanimitĂŠ, The Muppet Man, sur la vie de Jim Henson, crĂŠateur du Muppet Show. Mais qui ne veut pas savoir comment Kermit et Peggy sont nĂŠs ?

T Small is beautiful

Š DR

Projets mutants

Exposition photo et vidĂŠo en avril Ă la galerie Aeroplastics (Bruxelles).

Livre de photos accompagnÊes de textes du critique et historien de l’art Paul Ardenne chez Monografik.

HQWUH GHX[ FRUSV GHX[ XQLYHUV GH FUpHU GHV K\EULGHV &HUWDLQV GHVVLQHQW OHV VRXIIUDQFHV 0RL MH WLHQV j FH TX¡LO \ DLW GX SODLVLU L’inconscient semble très fort‌ -¡DL IDLW XQH SV\FKDQDO\VH SHQGDQW WURLV PRLV j XQ PRPHQW R M¡pWDLV WUqV GpFRQQHFWpH MH PDUFKDLV GDQV OD UXH HW VXELWHPHQW MH QH VDYDLV SOXV R M¡pWDLV ,O \ D de la poĂŠsie dans l’idĂŠe de se libĂŠrer par la parole, PDLV VL RQ VH FRPSUHQG WURS RQ ULVTXH GH SHUGUH VD spontanĂŠitĂŠ. — txikimargalef.aeroplastics.net et souvenirsfromearth.tv

Publication dans la revue PylĂ´ne, dispo chez Colette.

VidĂŠos diffusĂŠes sur la chaĂŽne Souvenirs from Earth Ă partir de janvier.

Au moment oĂš vous lirez ce numĂŠro, on saura si l’Avatar de James Cameron est rentable ou pas ; il faudra quand mĂŞme des millions d’entrĂŠes pour ĂŠquilibrer un budget de plus de 250 M$. A l’inverse, Paranormal Activity de l’IsraĂŠlien Oren Peli, qui a coĂťtĂŠ 10 000 $, a dĂŠjĂ rapportĂŠ plus de dix mille fois sa mise. RĂŠsultat, les gros studios sont Ă l’affĂťt de tout film bricolĂŠ dans sa chambre pour que dalle, et lancent mĂŞme des dĂŠpartements chargĂŠs de surveiller les festivals et les sites diffusant des films amateurs ultra low budget. Conclusion : ne sortez plus sans votre Flip, le petit camĂŠscope HD le plus design qui soit que vous avez rĂŠussi Ă vous faire offrir pour NoĂŤl. Alex Masson

 Je tiens à ce qu’il y ait du plaisir.  7[LNL 0DUJDOHI

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THESE DIRECTORS’VE BEEN CUT

ÂŤ Schi zophrĂŠnie Âť

En lice pour l’Oscar du PHLOOHXU ÀOP Êtranger, juste favori des CÊsars, le fulgurant

Š -H VXLV WRXMRXUV WUqV VXUSULV TX¡RQ PH GLVH ´quel scĂŠnario formidableâ€?. /D PLVH HQ VFqQH QH VHUDLW TX¡XQH YDOHXU DMRXWpH DX JHVWH VFpQDULVWLTXH " &H Q¡HVW SDV YUDL F¡HVW OD PrPH FKRVH /H VFpQDULR Q¡HVW TX¡XQ REMHW TXL V¡DXWRGpWUXLW GDQV O¡DFWH GH UpDOLVDWLRQ ² LO Q¡H[LVWH PrPH TXH SRXU oD 2Q SDUOH GH OD FULVH GX VFpQDULR PRL MH SURVSqUH Oj GHVVXVÂŤ 0DLV WRXUQHU FH TXH M¡DL pFULW P¡HVW GH SOXV HQ SOXV GLIĂ€FLOH FDU MH SDVVH pQRUPpPHQW GH WHPSV j EDWDLOOHU Prophète DYHF FH PDWpULHO -¡HQ VXLV ODV oD IDWLJXH 3DUFH TXH de JACQUES la rĂŠalisation, c’est la production d’une innocence : AUDIARD fut LO IDXW TX¡RQ DLW OH VHQWLPHQW TXH WRXW VH SURGXLVH accouchĂŠ SRXU OD SUHPLqUH IRLV 4XDQG YRXV DYH] SDVVp WURLV DQV j O¡pFULWXUH YRXV IULVH] OD VFKL]RSKUpQLH dD F¡HVW dans la QRXYHDX " 1RQ oD VHQW OD VXHXU ÂŞ douleur. Echographie. Š /D GHX[LqPH VHPDLQH XQ VRLU DSUqV OH WRXUQDJH M¡pWDLV GDQV XQ SHWLW EXUHDX HQ WUDLQ GH PH FKDQJHU avant d’aller m’pieuter et je vois ma scripte et mon DVVLVWDQW PRQWHXU ² RQ DXUDLW GLW OHV FURTXHPRUWV dans Lucky Luke ² TXL P¡LQWHUSHOOHQW Š Jacques, arrĂŞte de te battre contre ton scĂŠnario : tu perds ton temps, t’es en train de nous foutre dans le Propos tenus lors d’une mur. ÂŞ -H GHYHQDLV GDQJHUHX[ MH FRQWHVWDLV Master Class O¡KLVWRLUH HW OHV GLDORJXHV WRXW OH WHPSV au Forum des Images, &¡pWDLW IUDSSp GH ERQ VHQV 3DUFH TXH Un Paris, 11 octobre 2009. Prophète HVW XQ Ă€OP ORXUG PRL M¡pWDLV SDV Au suivant : Alain Cavalier, KDELWXp j oD WRXV OHV PDWLQV YRXV DYH] le 28 janvier Ă 19h30

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Photographie Jean-Marc Ruellan En fÊvrier 2006, Jacques Audiard faisant valser son Êpouse lors de l’aftershow des CÊsars. De battre mon cœur s'est arrêtÊ vient de remporter huit trophÊes, dont ceux du meilleur film et du meilleur rÊalisateur.

TXDUDQWH SHUVRQQHV TXL YRXV DWWHQGHQW oD YDXW OH GpWRXU ÂŞ FAIRE PORTER LA VOIX ÂŤ Un Prophète F¡HVW XQ WLWUH DPELJX ,URQLTXH -¡DLPH EHDXFRXS dD FRPSRVH XQ QRXYHDX SURWRW\SH G¡LQGLYLGX 0D JUDQGH TXHVWLRQ F¡HVW FRPPHQW oD VH SDVVH FKH] OHV DXWUHV " &KH] OHV YR\RXV FKH] OHV IHPPHV " &KH] PHV FRQIUqUHV HW FRQVÂąXUV FLQpDVWHV " dD P¡REVqGH FRPPHQW WRXUQHQW LOV " -H UHJDUGH WUqV SHX OHV UXVKHV PDLV SDUIRLV MH QRWH WLHQV oD QH YLW SDV F¡HVW FRPPH GX ERLV GX FRQWUHSODTXp HW MH VXLV PDO j O¡DLVH PDO j O¡DLVH &H TXL HVW ELHQ GDQV OH FLQpPD F¡HVW TXH F¡HVW PRGHVWH SUDWLTXH -¡DLPH FHWWH DOOLDQFH G¡LQGXVWULHO HW G¡DUWLVWLTXH FHWWH LPSXUHWp 3DUOHU j XQ DFWHXU F¡HVW GX FRQFUHW 0rPH GDQV XQH FRXU GH SULVRQ VL YRXV YRXOH] TXDUDQWH W\SHV TXL jouent vraiment, va falloir parler, mettre en route les Ă€JXUDQWV TXL WDSHQW GDQV XQ EDOORQ DYDQW GH ODQFHU OHV FRPpGLHQV GH SUHPLHU SODQ )DLUH SRUWHU OD YRL[ ÂŞ ÂŤ A Cannes, j’Êtais‌ au bord de l’autisme. Aucun UHFXO -¡DL FRPPHQFp j SRXYRLU HQ SDUOHU DX ERXW G¡XQ PRLV JUkFH DX SXEOLF DX[ FULWLTXHV /¡LPDJH GH UpDOLVDWHXU RPQLVFLHQW F¡HVW FRQVWHUQDQW XQ Ă€OP F¡HVW XQ REMHW YLYDQW XQH UpSRQVH j XQH TXHVWLRQ ² XQH UpSRQVH LQFHUWDLQH TXL DPqQH G¡DXWUHV TXHVWLRQV 4XL WUHPEOH ÂŞ Âł

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CINÉMA

SeptuagĂŠnaire Godfather du cinĂŠma indĂŠpendant, en transit Ă Paris pour l’Êmouvant Tetro, FRANCIS FORD COPPOLA s’est fendu d’une agrĂŠable leçon de choses. Tendons l’oreille.

ÂŤ A 22 ans, je voulais ĂŠcrire des Ă€OPV SHUVRQQHOV expĂŠrimentaux, mais je me suis mariĂŠ parce TXH MH YRXODLV des enfants. Je devais faire vivre cette SHWLWH IDPLOOH J’ai tournĂŠ Les Gens de la pluie > @ HW M¡DYDLV SDV mal d’idĂŠes, dont Conversation secrète >3DOPH G¡2U HQ @ VDQV DYRLU VSpFLDOHPHQW O¡HQYLH G¡LQWpJUHU OD JUDQGH LQGXVWULH KROO\ZRRGLHQQH 0DLV PRQ MHXQH assistant me rĂŠpĂŠtait : ÂŤ Allez, on a besoin d’argent, accepte ce projet, lĂ . ÂŞ 0RQ DVVLVWDQW pWDLW *HRUJH Lucas et le projet, Le Parrain >2VFDU GX PHLOOHXU Ă€OP HQ @ 8Q FDXFKHPDU 7RXWHV OHV VHPDLQHV OHV SURGXFWHXUV PHQDoDLHQW GH PH YLUHU GpWHVWDLHQW %UDQGR 3DFLQR OD PXVLTXH GH 1LQR 5RWD O¡LPDJH Š WURS VRPEUH ÂŞ ² LOV YRXODLHQW TXH O¡KLVWRLUH VH GpURXOH LQWpJUDOHPHQW GDQV OHV DQQpHV SRXU TXH oD FR€WH PRLQV FKHU (WUH KXPLOLp FHQW IRLV SDU MRXU F¡pWDLW oD rĂŠaliser Le Parrain 0DLV M¡DYDLV FHWWH DWWLWXGH pWUDQJH ÂŤ 7DQW TXH M¡HQ VHUDLV OH UpDOLVDWHXU MH IHUDLV FH Ă€OP j ma façon. ÂŞ -¡DL JDJQp VXU WRXV OHV SODQV ÂŞ

Š DR

ÂŤ Immortel Âť

ÂŤ VOLEZ AUX MEILLEURS Âť Š 8Q Ă€OP LO IDXW VDYRLU OH UpVXPHU HQ XQ PRW XQ WKqPH Le Parrain, c’Êtait la transmission. Conversation secrète, l’intimitĂŠ. Apocalypse Now >3DOPH G¡2U HQ @ O¡H[SORVLRQ GH OD PRUDOLWp 3RXU WRXV OHV MHXQHV rĂŠalisateurs, ce conseil : WRPEH] DPRXUHX[ GH YRV Ă€OPV /HV pOpPHQWV LPSRUWDQWV VRQW O¡pFULWXUH HW OH MHX TXL VXUYLYURQW toujours j XQH SKRWRJUDSKLH PR\HQQH RX j XQH EDQGH RULJLQDOH UDWpH &RQFHQWUH] YRXV Oj GHVVXV 6R\H] GLVSRQLEOH SRXU YRV DFWHXUV FH VRQW YRV ELMRX[ ODLVVH] OHV YLYUH (Q UHYDQFKH Q¡D\H] aucun scrupule DYHF OHV FRPpGLHQV VDQV IRUPDWLRQ (W IDLWHV FRQĂ€DQFH j YRWUH LQWXLWLRQ ÂŞ Š 3RXU FKDTXH VFpQDULR SXLVH] GDQV YRV VRXYHQLUV (QIDQW M¡pWDLV FHOXL TXL IXJXH GH O¡pFROH PLOLWDLUH HW TXL D SHXU GH VRQ SqUH &RPPH GDQV Tetro, je me suis UpIXJLp DXSUqV GH PRQ IUqUH $XJXVW >GpFpGp TXLQ]H MRXUV DYDQW FHWWH FRQIpUHQFH@ GH FLQT DQV PRQ DvQp TXL P¡HPPHQDLW >FRPPH GDQV OH Ă€OP@ YRLU Les Contes

d’Hoffmann ² MH Q¡\ FRPSUHQDLV ULHQ PDLV M¡pWDLV UDYL Tetro -H YRXODLV rWUH OXL LO YRXODLW rWUH PpGHFLQ MH YRXODLV en salles rWUH RSKWDOPR LO UrYDLW G¡rWUH VFpQDULVWH HW PRL DXVVL 3DUFH TXH MH OH WURXYDLV JpQLDO ,O \ D pJDOHPHQW GHV VLPLOLWXGHV DYHF O¡KLVWRLUH GH PRQ SqUH &DUPLQH F¡pWDLW XQ SURGLJLHX[ à €WLVWH HW VRQ IUqUH FDGHW DYDLW GX WDOHQW O¡DLQp D G€ DSSUHQGUH DX SOXV SHWLWÂŤ FHWWH ULYDOLWp P¡LQWpUHVVDLW $XMRXUG¡KXL HQFRUH FHUWDLQV membres de la famille Coppola ont beaucoup de WDOHQW YRXV HQ DYH] SHXW rWUH HQWHQGX SDUOHUÂŤ ÂŞ Š &KH] PRL M¡DL OHV ÂąXYUHV FRPSOqWHV GH %DO]DF 3DUPL GHV FKRVHV DVVH] REVFXUHV XQH LGpH P¡D WRXFKp ÂŤ Le jeune artiste doit faire des emprunts. ÂŞ &H TXL UHQG OHV YLHX[ DXWHXUV IRXV GH MRLH FDU JUkFH j FHV Š HPSUXQWV ÂŞ LOV GHYLHQQHQW LPPRUWHOV 0RQ SqUH DYDLW ce slogan : ÂŤ Volez aux meilleurs. ÂŞ 9RXV WURXYHUH] DLQVL YRWUH YRLH HW GDQV YLQJW DQV TXHOTX¡XQ YRXV YROHUD 9RLU GHV SXEV TXL UHVVHPEOHQW j PHV Ă€OPV RX GHV Ă€OPV TXL PH OHV UDSSHOOHQW F¡HVW XQ KRQQHXU Conversation secrète, c’Êtait simplement ma UpSRQVH j Blow Up G¡$QWRQLRQL > @ /H FLQpPD HVW XQH FKRVH FRPSOqWHPHQW pWRQQDQWH Propos tenus lors d’une Master Class KHLQ " ÂŞ Âł

au Forum des Images, Paris, 11 novembre 2009. Voir entretien avec l’acteur Alden Ehrenreich p. 22

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LES CHRONIQUES D’ALEX MASSON

Ajami

de Scandar Copti et Yaron Shani, le 27 janvier

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La situation au Proche2ULHQW Ă€OPpH j OD KDXWHXU d’une guerre des gangs : ĂŠcrit et mis en scène par un tandem juif et musulman, AJAMI met le cinĂŠma israĂŠlien au pied du mur. ÂŤ Je crois que je sais ce qui va arriver. ÂŞ /H SUHPLHU ORQJ PpWUDJH GH 6FDQGDU &RSWL HW <DURQ 6KDQL V¡RXYUH VXU FHWWH PLQL SURSKpWLH -XVWH DYDQW XQH VpTXHQFH R GHV JDQJVWHUV DUDEHV Ă LQJXHQW SDU HUUHXU XQ LQQRFHQW HW GpFOHQFKHQW une guerre des gangs. DĂŠtail : QRXV QH VRPPHV QL j 1HZ <RUN QL j %UDVLOLD PDLV GDQV OHV UXHV G¡$MDPL TXDUWLHU KLVWRULTXH GH -DIID OH 6XG SRUWXDLUH GH 7HO $YLY R FKUpWLHQV MXLIV HW PXVXOPDQV FRKDELWHQW GHSXLV ORQJWHPSV /HV UpDOLVDWHXUV VDYHQW TX¡LOV WLHQQHQW

THRILLER TRAGIQUE Ajami Q¡HVW SDV ORLQ G¡rWUH XQH version orientale d’Amours chiennes $OHMDQGUR *RQ]iOH] ,xiUULWX GDQV VRQ DVSHFW GH SX]]OH UHFRPSRVp j YXH R WRXW WLHQW j GHV PDOHQWHQGXV 3DV EHVRLQ G¡rWUH XQ &DVTXH %OHX SRXU FRPSUHQGUH O¡DOOXVLRQ j O¡DEVXUGLWp GX FRQĂ LW LVUDpOR palestinien, encore moins TXDQG OD SOXSDUW GHV VHJPHQWV PRQWUHQW GHV IUqUHV TXL QH VH FRPSUHQQHQW SOXV (Q UHVLWXDQW

cet affrontement, non plus entre deux camps adverses mais entre des individus (comme le dit l’un des personnages : ÂŤ Tant que ça ne te touche pas personnellement, ce n’est qu’un article dans le journal ÂŞ Ajami O¡LGHQWLĂ€H EHDXFRXS SOXV clairement. /H IDLW TXH VHV MHXQHV DXWHXUV soient l’un musulman et l’autre MXLI DXUDLW SX UDQJHU OHXU Ă€OP DX UD\RQ FDULWDWLI &RSWL HW 6KDQL ne s’Êpargnent rien, refusent de jouer les colombes portant des rameaux d’oliviers dans leur bec HW SUpIqUHQW WRTXHU j OD SRUWH GH 6RSKRFOH FKH] TXL FRPPH FKH] eux on ne peut rien contre son GHVWLQ ,O \ D SRXUWDQW XQH VRUWH G¡KDUPRQLH GDQV FHW pWRQQDQW WKULOOHU XUEDLQ RQ \ SDUOH DUDEH et KpEUHX FRQFDVVpV HQ XQH ODQJXH commune ĂŠcrite en lettres de sang. 0RL DXVVL Š je crois que je sais ce qui va arriver ÂŞ ELHQ TX¡LPSDUIDLW GDQV FHUWDLQHV FRTXHWWHULHV conceptuelles, Ajami devrait offrir j VHV DXWHXUV XQ SDVVHSRUW SRXU XQH EHOOH UHFRQQDLVVDQFH FULWLTXH HW SXEOLTXH Âł

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Frères ennemis

une bombe entre les mains, et la font exploser en plusieurs temps. Ajami VH IUDJPHQWH HQ TXDWUH UpFLWV DSUqV FH SUHPLHU PHXUWUH PDODGURLW LO \ D O¡KLVWRLUH G¡XQ FODQGHVWLQ TXL ERVVH SRXU XQ SDUUDLQ SDOHVWLQLHQ FHOOH G¡XQ Ă LF israĂŠlien rongĂŠ par la disparition de son frangin et celle d’un Arabe HW GH VD FRSLQH MXLYH KDUFHOpH SDU OD SROLFH TXL YHXW OXL FROOHU VXU OH dos les conneries de son dealer GH IUqUH FHFL IRUPDQW DX Ă€QDO OD PrPH FKURQLTXH G¡XQH PRUW DQQRQFpH 9RXV DYH] GpMj YX oD TXHOTXH SDUW "

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fiLMS


CINÉMA

Abattu

en plein

vol A l’ère des bilans carbone, le rĂŠalisateur de Juno dresse Ă€QHPHQW FHOXL VHQWLPHQWDO G¡XQ TXDGUD HQ GpURXWH ayant passĂŠ sa vie le nez en l’air.

In the Air

GHV WUDYHUV GH QRWUH pSRTXH WRXW HQ D\DQW UHFRXUV j GHV PpWKRGHV GH FLQpPD j l’ancienne. ATTERRISSAGE EXISTENTIEL Le casting d’In the Air SRXUUDLW rWUH FHOXL G¡XQH FRPpGLH VRSKLVWLTXpH GHV DQQpHV *HRUJH &ORRQH\ UR\DO HVW SOXV TXH MDPDLV OD UpLQFDUQDWLRQ G¡XQ &DU\ *UDQW RX G¡XQ -DPHV 6WHZDUW 9HUD )DUPLJD FRPSRVH XQH parfaite femme fatale et Anna Kendrick LQFDUQH j PHUYHLOOH OD MHXQH LQJpQXH Surtout : la prĂŠcision et la densitĂŠ du VFpQDULR pYLWHQW GH IDLUH HVFDOH j WRXV OHV SDVVDJHV REOLJpV GH OD FRPpGLH URPDQWLTXH 1RUPDO VRXV VHV DLUV EDGLQV In the Air est XQ GUDPH $ FH TXDGUD UpDOLVDQW TX¡LO V¡HVW WURPSp GH YLH 5HLWPDQ j O¡LQWHOOLJHQFH GH QH SDV RIIULU GH VHFRQGH FKDQFH FURLUH TXH OH UrYH DPpULFDLQ HVW WRXMRXUV j SRUWpH GH main serait incompatible avec le portrait HQ FUHX[ TXH GUHVVH In the Air G¡XQ SD\V VH SUHQDQW GDQV OD JXHXOH OHV FRQVpTXHQFHV G¡XQ PRGqOH LQGXVWULHO LQKXPDLQ /H Ă€OP dĂŠmarre sur des visions aĂŠriennes des (WDWV 8QLV HW VH WHUPLQH SDU XQ EUXWDO DWWHUULVVDJH H[LVWHQWLHO $SUqV Thank you for Smoking et Juno 5HLWPDQ V¡LPSRVH FRPPH XQ FLQpDVWH D\DQW FRPSULV TXH F¡HVW HQ UHVWDQW DX VRO TX¡RQ YRLW PLHX[ OHV FKRVHV ² HW OHV JHQV Âł

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de Jason Reitman le 10 fĂŠvrier

5\DQ %LQJKDP HVW XQ KRPPH PRGHUQH tout s’organise autour de sa perpĂŠtuelle dĂŠlocalisation. Pas de bureau, pas G¡DSSDUWHPHQW RX SUHVTXH HW FKDTXH MRXU dans une autre ville. Son boulot : expert en SODQV VRFLDX[ F¡HVW j GLUH TX¡LO SDVVH VRQ WHPSV j DSSUHQGUH j GHV LQFRQQXV TX¡LOV sont virĂŠs, avec un minimum d’Êtats d’âme. %LQJKDP HVW SUpVHQWp FRPPH XQ TXDGUD FRQWHQW GH VRQ MRE HW VDQV DWWDFKHV VLQRQ OHV FHLQWXUHV GHV PXOWLSOHV DYLRQV TX¡LO SUHQG 4XDQG RQ OXL GHPDQGH R LO YLW LO rĂŠpond ÂŤ ici ÂŞ HQ GpVLJQDQW VRQ VLqJH SDVVDJHU RX OH KDOO G¡XQ TXDWUH pWRLOHV DX SLHG GX moindre aĂŠroport. -DVRQ 5HLWPDQ Juno, SOS FantĂ´mes D UpDOLVp XQ Ă€OP VXU PDLQWHQDQW FHWWH SpULRGH R rWUH corporate peut devenir une identitĂŠ VRFLDOH RX UpXVVLU SHXW VLJQLĂ€HU passer le cap des dix millions de miles sur la carte GH Ă€GpOLWp G¡XQH FRPSDJQLH DpULHQQH 0DLV SRXU TXRL SRXU DOOHU R " 6DWLVIDLW GH VRQ H[LVWHQFH GH FpOLEDWDLUH YR\DJHDQW OpJHU %LQJKDP HQWUH GDQV XQH VpULHXVH ]RQH GH turbulences, bousculĂŠ entre deux femmes : VRQ TXDVL GRXEOH Š pense que je suis toi mais avec un vagin ÂŞ TX¡LO UHWURXYH DX JUp GHV YROV HW GHV K{WHOV HW VD MHXQH FROOqJXH DX[ GHQWV ORQJXHV TXL O¡DFFRPSDJQH HQ PLVVLRQ SRXU le convaincre des vertus des licenciements par visioconfĂŠrence. In the Air se prĂŠoccupe

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LES CHRONIQUES D’ALEX MASSON

WERNER HERZOG et Nicolas

Cage revisitent le Bad Lieutenant d’Abel Ferrara. Une reprise en totale roue libre ? Pas seulement.

Bad Lieutenant : escale Ă la Nouvelle-OrlĂŠans

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de Werner Herzog, le 3 mars

ONE-­MAN-­SHOW BAROQUE Le Bad Lieutenant G¡+HU]RJ HVW HQ WRWDOH ĂŠbullition. Le rĂŠalisateur allemand a YLVLEOHPHQW GRQQp VD EpQpGLFWLRQ j 1LFRODV &DJH SRXU IDLUH FH TX¡LO Ă€W GH PLHX[ FHV

GHUQLqUHV DQQpHV j O¡pFUDQ Q¡LPSRUWH TXRL 'DQV O¡RULJLQDO +DUYH\ .HLWHO LQWpULRULVDLW MXVTX¡j Q¡rWUH SOXV TX¡XQH boule de douleur. Cage extĂŠriorise tout SRXU XQ SKpQRPpQDO one-­man-­show, entre VpULHV GH WLFV j IDLUH EOrPLU 6DUNR]\ HW LPSURYLVDWLRQV EDURTXHV VXU OH WH[WH RX OHV VLWXDWLRQV VRQ PRQRORJXH DEVFRQV SHQGDQW TX¡LO VH UDVH GHYUDLW UHVWHU GDQV OHV DQQDOHV WRXW FRPPH VHV KDOOXFLQDWLRQV peuplĂŠes d’iguanes. 2Q DXUDLW FHSHQGDQW WRUW GH VH UXHU VXU ce Bad Lieutenant bis juste pour se poiler. (QWUH OHV ERXIIpHV GpOLUDQWHV +HU]RJ Ă€OPH son cop comme un pantin possĂŠdĂŠ et retrouve des bribes de l’original, peinture G¡XQ PRQGH PpGLRFUH TX¡LO IDXW IXLU SDU O¡H[FqV 7RXUQDQW GDQV OD YLOOH GpYDVWpH SDU .DWULQD +HU]RJ HVW j VD PDQLqUH XQ DXWUH ouragan, dĂŠsireux de pulvĂŠriser les codes GH OD PRUDOH SRXU PLHX[ OD IDLUH UHQDvWUH )HUUDUD Q¡DYDLW SDV GH SLWLp SRXU VRQ Ă LF HW O¡DPHQDLW DX SLORUL +HU]RJ SDUGRQQH tout au sien, transforme sa part obscure HQ LOOXPLQDWLRQ SHUPDQHQWH 5pSOLTXH ĂŠnorme : ÂŤ Retire-­lui dessus, son âme danse encore. ÂŞ 3DV SDUFH TX¡HOOH HVW j PRXULU GH ULUH GDQV OD ERXFKH GH &DJH PDLV SDUFH TX¡HOOH UpVXPH H[DFWHPHQW FHW REMHW TXL IRXW XQ SHX OD KRQWH PDLV EU€OH GH PLOOH IHX[ HQ UHIXVDQW GH EU€OHU VXU O¡DXWHO GHV conventions. —

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Mad Lieutenant

L’un de mes plus forts souvenirs au festival de Cannes reste la projection, en GH Bad Lieutenant. Pas tant pour O¡LPSUHVVLRQQDQW Ă€OP G¡$EHO )HUUDUD SHXW rWUH VRQ VRPPHW TXH SRXU O¡LUUXSWLRQ VXU VFqQH GH OD VFpQDULVWH =Rp 7DPHUOLV DORUV TXH FHUWDLQV DFFUpGLWpV TXLWWDLHQW OD VDOOH DYDQW OD WRXWH GHUQLqUH VFqQH HOOH V¡pWDLW PLVH j KXUOHU WRXWHV WULSHV GHKRUV TXH OHV journalistes n’avaient ÂŤ rien compris ÂŞ 'L[ VHSW DQV SOXV WDUG :HUQHU +HU]RJ Aguirre, la Colère de Dieu D O¡LGpH IDUIHOXH G¡DFFHSWHU GH GRQQHU XQH VXLWH j Bad Lieutenant (W FHWWH IRLV FL QH ULHQ FRPSUHQGUH HVW VDQV GRXWH OD PHLOOHXUH IDoRQ GH O¡DSSUpFLHU &KH] )HUUDUD LO pWDLW TXHVWLRQ G¡XQ Ă LF FRUURPSX GpIRQFp DX FDWKROLFLVPH GH UpGHPSWLRQ HW GH GpVHVSRLU 5LHQ GH WRXW oD GDQV FHWWH Escale Ă la Nouvelle-­OrlĂŠans, PrPH VL OH FRQFHSW UHVWH OH PrPH XQ SROLFLHU SRXUUL MXVTX¡j O¡RV HVW VXU OH SRLQW G¡rWUH FKRSp SDU O¡,*6 ORFDOH HW WHQWH GH VH refaire une virginitĂŠ via une affaire tordue de TXLQWXSOH PHXUWUH 4XHO SRLQW FRPPXQ HQWUH +HU]RJ HW )HUUDUD " /H FLQpPD OHXU VHUW GH FUL SULPDO pUXFWDQW OHXU KDLQH GHV VHQWLPHQWV WLqGHV


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Carte blanche

La mission Ă Paulo

Va voir PAULO ANARKAO on te dit : un moyen mĂŠtrage très marrant sur un papa bizarre, tournĂŠ avec rien, visible sur le Net et rĂŠcompensĂŠ au festival du Ă€OP JURODQGDLV +p RXDLV

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par Gustave Kervern

A Standard LOV VRQW YUDLPHQW FRQV -¡DL UpXVVL j OHXU YHQGUH XQH UXEULTXH FLQpPD DORUV TXH MH YDLV MDPDLV DX FLQpPD +DKDKD 1RQ MH GpFRQQH (Q IDLW F¡HVW HX[ TXL P¡RQW SURSRVp oD (W TXDQG MH OHXU DL GLW TXH j’allais jamais au cinĂŠma, ils m’ont dit : ÂŤ Tant mieux. ÂŞ &¡HVW SHXW rWUH SRXU oD TXH Standard, M¡DGRUH &¡HVW SHXW rWUH DXVVL SRXU oD TX¡RQ D GX PDO j IpGpUHU -H GLV Š RQ ÂŞ SDUFH TXH HX[ en presse ĂŠcrite, et nous au cinĂŠma, on aime bien sortir des autoroutes battues. %UHI LO PH IDXW GRQF SDUOHU G¡XQ Ă€OP TXL m’aurait sĂŠduit ces derniers temps. La vĂŠritĂŠ HVW TXH MH VXLV j OD IRLV VXSHU ERQ SXEOLF HW WUqV PDXYDLV SXEOLF TXDQG M¡DL O¡LPSUHVVLRQ d’avoir ĂŠtĂŠ pris pour un jambon sous vide. 2X TXDQG MH VHQV TXH GDQV XQH ÂąXYUH OD WHFKQLTXH D SULV OH SDV VXU O¡DIIHFWLI 2U F¡HVW VRXYHQW OH FDV 0DLV FRPPH MH VDLV DXVVL TXH IDLUH XQ Ă€OP F¡HVW JpQpUDOHPHQW ORLQ G¡rWUH XQH SDUWLH GH SODLVLU DX YX GHV GLIĂ€FXOWpV j OH PRQWHU SXLV j OH IDLUH SXLV j OH VRUWLU MH QH SHX[ rWUH TXH FRXODQW DYHF PHV Š FROOqJXHV ÂŞ rĂŠalisateurs. ,O \ D ELHQ XQ WUXF TXH M¡DL DLPp (W TXH MH YRXV FRQVHLOOH HQ WRXWH VLPSOLFLWp dD s’appelle Paulo Anarkao &¡HVW XQ PR\HQ PpWUDJH GH PLQXWHV WRXUQp HQ SDU *pUDOG 7RXLOORQ DYHF WURLV HXURV VL[ VRXV PDLV TXL D WRXWHV OHV TXDOLWpV SRXU OH UHQGUH VL DJUpDEOH j PHV \HX[ SRFKpV

Ă€ BOIRE, Ă€ MANGER, Ă€ FUMER, Ă€ FORNIQUER &¡HVW O¡KLVWRLUH G¡XQ MHXQH TXL UHWURXYH VRQ SqUH TXL O¡D DEDQGRQQp QDJXqUH j VRQ WULVWH VRUW ,O HQ SURĂ€WH SRXU IDLUH XQ UHSRUWDJH VXU VRQ JpQLWHXU SHUGX XQH HVSqFH G¡DQDUFKLVWH DPDWHXU GH FKRVHV j ERLUH j PDQJHU j IXPHU j IRUQLTXHU $XWDQW GH FKRVHV TX¡DXFXQ PLOLWDQW UR\DOLVWH QH FRQQDvWUD MDPDLV /HV GHX[ U{OHV SULQFLSDX[ VRQW SDU FRQWUH UR\DOHPHQW LQWHUSUpWpV /H Ă€OV HVW MRXp SDU *pUDOG OH UpDOLVDWHXU /H SDSD HVW MRXp SDU 3DXOR ² TXH O¡RQ D GHSXLV HQU{Op GDQV QRWUH SURFKDLQ Ă€OP j QRXV TX¡RQ D IDLW DYHF %HQRvW 'HOpSLQH Mammuth. 3DXOR V¡HVW DLQVL UHWURXYp GHYDQW *pUDUG Depardieu. De mĂŠmoire, je n’ai jamais vu XQ KRPPH VXHU DXWDQW DYDQW GH MRXHU Pourtant, il a peur de rien, le Paulo, lui TXL SRXU YLYUH IDLW GHV UHSULVHV G¡$& '& j O¡RUJXH GH EDUEDULH 0DLV Oj LO D HX OHV IRLHV %UHI HQWUH O¡DFKDW G¡XQ PDWHODV VXU H%D\ HW OH YLVLRQQDJH G¡XQH pQLqPH JDIIH GH PLQLVWUH SUHQH] OH WHPSV GH YRXV PDUUHU GHYDQW Paulo Anarkao (W VL YRXV Q¡DYH] SDV DLPp Standard vous rembourse votre abonnement ORUV GH OD SURFKDLQH GLVWULEXWLRQ G¡DUJHQW TXH OH PDJD]LQH RUJDQLVH OH MHXGL MDQYLHU GqV K j OD VDOOH RPQLVSRUWV GH 3DULV %HUF\ 0HUFL GH P¡DYRLU OX Âł

Retrouvez dans chaque numĂŠro la chronique de Gustave Kervern. Tandis que Louise Michel, son prĂŠcĂŠdent bâton de dynamite corĂŠalisĂŠ avec BenoĂŽt DelĂŠpine, vient de sortir en DVD chez MK2, Mammuth, leur quatrième long mĂŠtrage, ÂŤ l’histoire d’un nouveau retraitĂŠ qui, pour toucher son dĂť, part Ă la recherche de papiers manquants Âť, avec GĂŠrard Depardieu, Yolande Moreau et Isabelle Adjani, devrait surgir sur les ĂŠcrans en avril.

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LE CINÉMA CHEZ SOI, BIEN CONFORT

DVD X Femmes Collectif, 2008 Studio Canal

Arnaud & Jean-Marie Larrieu, 2009 Wild Side

 La jeunesse, c’est quand on ne sait pas ce qui va arriver.  0DWKLHX $PDOULF GDQV Les Derniers Jours du Monde PAGE

Avec Un Prophète, la fable apocalyptique et romantique des frères Larrieu (Peindre ou faire l’amour IXW O¡DXWUH Ă€OP IUDQoDLV le plus audacieux de l’annĂŠe tout juste embaumĂŠe. D’une main (d’une prothèse), en arrière-plan, une catastrophe sanitaire internationale – inexpliquĂŠe, car ce n’est pas le sujet – conduit la planète Ă sa perte et les gens se battent, paniquent, baisent, V¡HQĂ€OHQW LO \ D GHV SLOODJHV HW GH JUDQGHV fĂŞtes. On n’aura jamais vu la France et O¡(VSDJQH Ă€OPpHV FRPPH FHOD GDQV l’anarchie, cela en toute modestie – c’est crĂŠdible, autant que le Londres abandonnĂŠ de 28 jours plus tard ou le New York zombie de Je suis une lĂŠgende (W WRXW oD pour parler de souvenirs amoureux ! Car dans l’autre main, un homme – Amalric, qui d’autre ? – se balade avec son sac Ă dos – le motif de la randonnĂŠe parcourt WRXWH OD Ă€OPR GHV UpDOLVDWHXUV ² j WUDYHUV les cendres Ă la recherche de sa maĂŽtresse androgyne. Renoue avec sa femme le temps d’un cunnilingus ultime (avec XQH VXUSUHQDQWH .DULQ 9LDUG Ă LUWH DYHF Sergi Lopez qui sent fort ou pilote un camion aux cĂ´tĂŠs d’une chouette. Peut-ĂŞtre que les choses ne vont pas si mal que ça : le monde est simplement en train de rajeunir. Richard Gaitet

 L’Origine du Monde, ce serait mieux avec le maillot fait.   Arielle Dombasle dans Le Bijou indiscret

Eric Le Bot

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Les Derniers Jours du Monde

Neufs courts mĂŠtrages pornos ĂŠcrits et rĂŠalisĂŠs par des actrices/rĂŠalisatrices. 2 h 30 pour comprendre l’excitation fĂŠminine ? Parmi celles qui montrent et celles qui cachent, celles qui parlent ÂŤ fantasmes Âť et celles qui scrutent le rĂŠel, des similitudes : la femme cesse ĂŠvidemment d’être un objet ; la lumière, la plupart du temps tamisĂŠe, est travaillĂŠe ; il y a toujours un jeu. Chez ZoĂŠ Cassavetes, un couple sous coke se travestit et le dildo se retrouve oĂš vous imaginez. Chez Lola Doillon, une fille amusĂŠe imite en live un film X que son copain s’apprĂŞtait Ă voir sans elle – Ă la fin, elle interroge : ÂŤ Alors, qui c’est qui t’excite le plus ? Âť, c’est d’une fraĂŽcheur hard inconnue. La catwoman d’HĂŠlĂŠna Noguerra fĂŞte son anniversaire dans un peep-show torride (c'est le plus proche du porno traditionnel, donc le plus excitant, on ne se refait pas). Le bel acteur choisi par MĂŠlanie Laurent erre dans des backrooms et couche avec une femme Ă travers une vitre. Caroline Loeb filme deux coquines se touchant sous la table. Tonie Marshall suit une femme mĂťre ayant rendezvous avec un inconnu. HĂŠlène Fillières prend un cours d’escort girl hyper intellectuel chez Laetitia Masson-le-glaçon (qui considère que ÂŤ l’Êrotisme c’est le mystère, c’est la musique de Jean-Louis Murat Âť). Frigide ! Quant Ă Arielle Dombasle (le pire de tous), elle cherche ÂŤ le plus beau sexe fĂŠminin du monde Âť et, fĂŠtichiste, des habits pour ses poupĂŠes Barbie. C’est le dernier le plus rĂŠussi, signĂŠ Anna Mouglalis : un couple se prend la main, elle glissant son index entre son pouce et son majeur Ă lui – en un mot se pĂŠnĂŠtrant, avec, dans le fond, une tĂŠlĂŠ diffusant du porn. C’est touchant, violent, ça subvertit la règle de la sĂŠrie (ÂŤ montrer Âť), dĂŠmontre un sens du jeu (d’acteur) et de l’efficacitĂŠ.

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CINÉMA

Il ĂŠtait une fois la rĂŠvolution Sergio Leone, 1971, Fox

Closeup Abbas Kiarostami, 1990

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Montparnasse

RestaurĂŠ par la CinĂŠmathèque de Bologne avec Giorgio Armani, Cartier et, tiens, Qatar Airlines, ÂŤ l’enfant mal formĂŠ Âť de Leone s’ouvre sur le jet d’urine d’un grassouillet voleur de poules, Juan Miranda, embarquĂŠ malgrĂŠ lui en compagnie de son père et de ses six bambins dans la rĂŠvolution mexicaine de 1913, qui n’est pas un dĂŽner de gala. PassĂŠ cette citation de Mao, des bourgeois racistes insultent notre prolo dans l’exiguĂŻtĂŠ d’une diligence, avant d’être copieusement humiliĂŠs Ă leur tour – cette première scène exemplaire, Tarantino doit en rĂŞver la nuit, et de la suite aussi : James Coburn Ă moto, dynamitant la montagne, rompant direct avec l’esthĂŠtique western : son personnage de John Fire Cracker Mallory est un hĂŠros bottĂŠ steampunk, cache-poussière, lunettes d’aviateur, foulard rouge, regard clair de prĂŠdateur ailĂŠ. Un terroriste expert en explosifs avec le drapeau de l’IRA (qui n’existait pas en 1913 !) dans sa sacoche. En cavale. Miranda et lui deviendront frères.

Les couleurs et le son sont très profonds. Les plans sur les visages, obsĂŠdants. Les Ă DVKEDFNV LUODQGDLV DX[TXHOV OD EDQGH VRQ de Morricone (d’oĂš sortent ces ÂŤ chomchom Âť qui ponctuent tout le rĂŠcit ?) donne une ampleur ĂŠdĂŠnique, irrĂŠels, et l’amertume des trahisons particulièrement palSDEOH G¡DLOOHXUV OH Ă€OP HVW WUqV ODUJHPHQW pessimiste, Ă l’image de son titre original – Baisse la tĂŞte, courbe l’Êchine –, et de sa dernière rĂŠplique de pĂŠquenaud promu gĂŠnĂŠral, dĂŠsormais sans famille et sans ami, qui se demande : ÂŤ Et moi alors ? Âť, puisque aucune rĂŠvolte n’amène grand-chose de meilleur car ce sont toujours, Ă dĂŠfaut des travailleurs, ÂŤ ceux qui lisent les livres Âť qui mènent la danse. R. G.

(Q $OL 6DE]LDQ VH IDLW SDVVHU SRXU OH FLQpDVWH LUDQLHQ 0RKVHQ 0DNKPDOEDI Le Cycliste DXSUqV G¡XQH IDPLOOH ERXUJHRLVH TXL SRUWH SODLQWH )DVFLQp SDU FHWWH KLVWRLUH YUDLH $EEDV .LDURVWDPL SODFH VHV FDPpUDV DX FÂąXU GX WULEXQDO ÂŤ Nous R O¡LPSRVWHXU HVW MXJp SRXU sommes les HVFURTXHULH UHFRQVWLWXDQW OHV IDLWV avec les intervenants. De tous ses esclaves d’un Ă€OPV .LDURVWDPL DYRXH TXH Close-­ rĂ´le ĂŠgoĂŻste up HVW OH VHXO TX¡LO DLPH YUDLPHQW qui dissimule 1RUPDO XQ IDX[ UpDOLVDWHXU \ devient rĂŠellement un acteur notre vrai ² VLPXODFUH j WRXV OHV pWDJHV visage. Âť essentiel. $OL 6DE]LDQ .LDURVWDPL HW 0DNKPDOEDI DSSURIRQGLURQW OD PLVH HQ DE\PH dans Le premier avec Au travers des Close-­up oliviers O¡KLVWRLUH G¡XQH pTXLSH GH FLQpPD GpEDUTXDQW dans un village pour tourner Et la vie continue VRQ Ă€OP SUpFpGHQW /H VHFRQG DYHF O¡XQH GHV plus belles dĂŠclarations d’amour DX e art : Salaam CinĂŠma JUDQG FDVWLQJ QDWLRQDO R OHV aspirants acteurs le deviennent LQVWDQWDQpPHQW $ PRLQV TX¡LO IDLOOH FKHUFKHU O¡RULJLQH GX PpWD Ă€OP GDQV OD SUHPLqUH Ă€FWLRQ LUDQLHQQH PXHWWH HQ Hadji Agha, acteur du cinĂŠma SRUWDLW j O pFUDQ XQ UpDOLVDWHXU j OD UHFKHUFKH G¡XQ VXMHW SRXU VRQ Ă€OP E. L. B.

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PARABOLES 0e',$6

LES MEILLEURS D’ENTRE NOUS (EPISODE IX)

Mi-mars, LES INROCKUPTIBLES mutent en newsmagazine  gÊnÊrationnel ª PrODQW FULWLTXH aiguisÊe, journalisme  debout  et engagement citoyen. Le rÊdacteur en chef Bernard Zekri, 54 ans, brother formÊ à Actuel et ex-directeur G¡L 7pOp GpFRUWLTXH VRQ QRXYHDX Š kif .

 C’est bien d’être un journal Ênervant  entretien Richard Gaitet & Guillaume Jan photographie Blaise Arnold remerciements Anne-Sophie Meyer

ÂŤ Un peu de Vanity Fair pour les histoires long format [‌], du Rolling Stone des annĂŠes 70-­80 pour le cĂ´tĂŠ amĂŠricain et Ă la marge, un peu d’Actuel pour le ton moderne qu’il avait Ă l’Êpoque. Âť VoilĂ comment Matthieu Pigasse*, votre DFWLRQQDLUH SULQFLSDO GpĂ€QLW OD QRXYHOOH IRUPXOH C’est ça ? Bernard Zekri : Vanity Fair, Rolling Stone, d’accord. 0DLQWHQDQW FH TX¡LO IDXW UDMRXWHU F¡HVW Les Inrocks : ce journal a une âme, doublĂŠe d’une compĂŠtence et d’une FUpGLELOLWp WUqV IRUWHV HQ PDWLqUH GH FULWLTXH ² LO QH V¡DJLW SDV GH MHWHU WRXW oD j OD SRXEHOOH &H TXH UpVXPH 0DWWKLHX F¡HVW QRWUH YRORQWp G¡pYROXHU GH WHQGUH YHUV GDYDQWDJH G¡DPELWLRQ %LHQ TX¡LO IDLOOH DXVVL SUHQGUH OD PHVXUH GHV FKRVHV

avec le coÝt d’un seul reportage à Vanity Fair, on doit pouvoir financer

deux numĂŠros complets des Inrocks. &RQĂ€DQW PDOJUp OH FOLPDW pFRQRPLTXH PDXVVDGH " 5pDOLVWH 2Q QH IHUD SDV FLQTXDQWH stories par VHPDLQH 0DLV VL RQ QH VH WURPSH SDV G¡KLVWRLUH VL RQ PHW OD EDUUH DVVH] KDXW DYHF OH ERQ timing et des FKRL[ FRKpUHQWV DORUV RXL RQ SHXW FRPSWHU GDQV OH SD\VDJH HW G¡XQH IDoRQ VLQJXOLqUH 2Q D PH VHPEOH W LO XQ ERXOHYDUG SRXU FUpHU XQ MRXUQDO QRXYHDX /D

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presse ĂŠcrite se porte mal, mais les gens ont besoin TX¡RQ WULH FH GpOXJH G¡LQIRUPDWLRQV TXL QH SHUPHW SDV OH UHFXO 7RXW HVW GDQV OD GLVWDQFH rWUH SUqV GH VRQ VXMHW PDLV SDV WURS SUqV 2U OD WHQGDQFH F¡HVW OH GpFU\SWDJH WRXW OH PRQGH YHXW GpFU\SWHU Et pas Les Inrocks ? -H SHQVH SOXW{W TX¡LO \ D XQH FHUWDLQH IUDvFKHXU j proposer, faire dĂŠcouvrir. J’ai toujours ĂŠtĂŠ dans ce MRXUQDOLVPH Oj ELHQ TX¡LO IDLOOH DXVVL PHWWUH OD SOXPH Oj R oD IDLW PDO YpULĂ€HU OHV IDLWV PHWWUH OHV JHQV IDFH j OHXUV FRQWUDGLFWLRQV 'H O¡HQWKRXVLDVPH HW GH OD ULJXHXU &KHUFKHU OH UpFLW TXL UDFRQWH OH PRQGH GRQQHU HQYLH GH SROLWLTXH j FHX[ TXL HQ VRQW GpJR€WpV Oj RQ PDUTXHUDLW GHV SRLQWV /H SUHPLHU GpVLU SRXU oD F¡HVW O¡LQGpSHQGDQFH -HDQ )UDQoRLV %L]RW >IRQGDWHXU G¡Actuel et de Nova, voir Standard no @ GpIHQGDLW oD HW oD Q¡H[LVWH SOXV -H VXLV WUqV KHXUHX[ GH SDUWLFLSHU j FHWWH DYHQWXUH SDUFH TXH Les Inrocks D UpXVVL j UHVWHU LQGpSHQGDQW >GHSXLV @ VDQV V¡DSSX\HU VXU XQ JURXSH XQH IRUWXQH UHVSHFW (W YRLFL TX¡DXMRXUG¡KXL 3LJDVVH XQ FXULHX[ LQGLYLGX DYHF un vrai appĂŠtit de presse, investit ses propres sous. 4XHOOH DXGDFH Combien (lui) coĂťte la nouvelle formule ? Work in progress. (QWUH XQ HW GHX[ PLOOLRQV G¡HXURV Le nombre de pages va-­t-­il augmenter ? 9LQJW TXDWUH SDJHV HQ SOXV QRXV SHUPHWWUDLHQW

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d’atteindre une mise en page plus aĂŠrĂŠe, ĂŠlĂŠgante. 3DV SOXV FDU XQ MRXUQDO F¡HVW GHV FKRL[ 3XEOLHU GHV WRQQHV GH WUXFV Q¡HVW SDV OD VROXWLRQ MH SUpIqUH prendre le temps d’aller voir les gens, soigner les articles. Et surtout reformer la partie ÂŤ news Âť du journal ? 2Q D HQYLH GH YLYDFLWp G¡LPSHUWLQHQFH 2Q FKHUFKH FRPPH WRXV OHV DXWUHV FDQDUGV j PDUTXHU QRWUH VLJQDWXUH /D TXHVWLRQ F¡HVW O¡pTXLOLEUH OD SODFH DFFRUGpH j O¡DFWXDOLWp OD SROLWLTXH OD FULWLTXH culturelle, et celle accordĂŠe au journalisme debout, de terrain. Comment marier les deux, renforcer l’un sans vider l’autre, ce sera un peu la clĂŠ de notre VXFFqV VL RQ DUULYH j pTXLOLEUHU oD RQ HVW VXU XQH IRUPXOH DVVH] RULJLQDOH -H IRQFWLRQQH DX MRXUQDOLVPH G¡LQWpUrW

on se pose des questions, on a envie d’y rĂŠpondre. Vous recrutez de nouvelles signatures. Dont Florence Aubenas ? 2Q VH SDUOH &¡HVW TXHOTX¡XQ TXL QRXV SODvW -H QH SHX[ SDV WURS P¡DYDQFHU KRQQrWHPHQW M¡DL UHQFRQWUp XQH FHQWDLQH GH MRXUQDOLVWHV ,O QH V¡DJLW SDV GH recruter vingt personnes, simplement du renfort. Avec Christian Fevret, fondateur du titre et directeur de la rĂŠdaction, avez-­vous la mĂŞme vision du mĂŠtier ? 1RQ &¡HVW WRXW O¡LQWpUrW GH QRWUH FROODERUDWLRQ 1RV YpFXV VH FRPSOqWHQW MH OXL DSSRUWH GHV FKRVHV HW YLFH YHUVD -H YLHQV G¡XQH FKDvQH LQIR >GH j %HUQDUG =HNUL D pWp GLUHFWHXU GH OD UpGDFWLRQ d’i-­TĂŠlĂŠ@ MH PH VKRRWH j FHWWH DGUpQDOLQH &KULVWLDQ HVW beaucoup plus dans le recul, il a un fonctionnement SUHVTXH DUWLVWLTXH SUHQG OH WHPSV GH IDLUH DERXWLU VD UpĂ H[LRQ VDQV DYRLU IRUFpPHQW O¡HQYLH GH VH SORQJHU dans tous les dĂŠbats – il veut d’abord juger de leur LQWpUrW DORUV TXH MH VXLV SOXV UpDFWLI ça vient de se passer, il faut qu’on y aille ! Je l’Êcoute, il m’Êcoute, RQ VH WHPSqUH C’est lui qui vous a appelĂŠ ? 2XL DĂŠcidez-­vous Ă deux ? dD DUULYH TXH MH WUDQFKH oD DUULYH TXH FH VRLW OXL RQ OH IDLW HQVHPEOH GH WHPSV HQ WHPSV F¡HVW SOXV DQDUFKLTXH 2Q GLVFXWH 2Q Q¡HVW SDV WURS GH GHX[ Voire trois : Matthieu Pigasse intervient-­il sur l’Êditorial ? vient-­il au journal ? 6RXYHQW dD P¡LQWpUHVVH GH GLVFXWHU DYHF OXL GX PRPHQW R LO QH VH GUDSH SDV GH VD TXDOLWp GH SURSULpWDLUH FDU XQH UpGDFWLRQ QH PDUFKH SDV FRPPH oD -H Q¡DL SDV SHXU GH SDUOHU DYHF OXL SDV SOXV TXH MH Q¡DYDLV SHXU GH SDUOHU DYHF -HDQ )UDQoRLV %L]RW TXL SRXU IDLUH FH TX¡LO YRXODLW VH GpPHUGDLW SRXU FRQYDLQFUH ,O QH GLVDLW SDV Š c’est moi le patron ÂŞ VLQRQ LO Q¡DXUDLW SOXV HX GH FRSDLQV 6L 0DWWKLHX PH GLW Š j’ai dĂŠcidĂŠ ça ÂŞ ERQ HK ELHQ VDOXW 0DLV V¡LO PH GpPRQWUH

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TXH OD GHUQLqUH FRXYHUWXUH F¡HVW GH OD PHUGH MH VXLV SUrW j O¡HQWHQGUH ² VRQ DYLV YDXW DXWDQW TXH OH PLHQ Matthieu Pigasse insiste aussi sur une plus forte politisation du journal. Avec ce nĂŠologisme : user d’un regard de ÂŤ dĂŠconnivence Âť. /D ERQQH GLVWDQFH HQFRUH 1H SDV IDLUH XQ MRXUQDO GH PLFURFRVPH ² Oj GHVVXV WRXWH OD UpGDFWLRQ HVW DVVH] FRPEDWLYH 7DSHU R oD IDLW PDO &¡HVW ELHQ G¡rWUH XQ MRXUQDO pQHUYDQW dD YHXW GLUH DYRLU XQ SRLQW GH YXH XQH FDSDFLWp G¡LQGLJQDWLRQ VH PHWWUH HQ FROqUH /HV FKRVHV VRQW DVVH] OLVVHV HQ FH PRPHQW IRQW DSSHO j OD SHXU -¡DL HQYLH G¡HQJDJHPHQW FLWR\HQ GH SDUOHU DX FHUYHDX GHV OHFWHXUV HW oD F¡HVW GH OD SROLWLTXH TXL dĂŠpasse les partis. A qui s’adresse cette nouvelle formule ? 2Q SHXW pODUJLU OH OHFWRUDW 3UHQRQV OH URFN G¡XQH PXVLTXH F¡HVW GHYHQX XQH FXOWXUH &¡HVW j FHV JHQV TX¡RQ YHXW SDUOHU j TXL SUpIqUH FODTXHU VHV WKXQHV GDQV XQ FRQFHUW SOXW{W TX¡DX UHVWR (Q pYRTXDQW FHX[ TXL ERXVFXOHQW O¡establishment &¡HVW FRPPH oD TXH OD sociĂŠtĂŠ se rĂŠinvente.

Ça m’intÊresse de parler aux gens qui s’impatientent, au monde de demain,

en rupture, peu importe leur âge :

LO \ D GHV JHQV TXL VRQW WUqV MHXQHV WUqV YLHX[ G¡DXWUHV TXL VRQW WUqV YLHX[ WUqV MHXQHV /¡LGpH Q¡HVW SDV GH le lifter, le nouvel Inrocks sera vraiment un autre journal. Se rĂŠinventer comme le faisait Actuel 2Q LUD DVVH] ORLQ La rĂŠdaction ronronnait un peu ? $K QRQ 3RXU WHQLU OD WrWH KRUV GH O¡HDX oD ERVVH EHDXFRXS ,O Q¡\ DYDLW SDV EHDXFRXS GH IULF HW FHW LQFRQIRUW Oj oD JDUGH pYHLOOp &H VRQW GHV JpQpUDWLRQV TXL VH PpODQJHQW LO \ D XQ IURWWHPHQW GX GpEDW &H TXL HVW H[WUDRUGLQDLUH GDQV OH MRXUQDOLVPH F¡HVW TX¡RQ recommence toutes les semaines pour faire le numĂŠro SDUIDLW (W RQ Q¡\ DUULYHUD MDPDLV Cette couv’ est naze ! Pourquoi on a mis autant de trucs dessus ? Que fout ce papier-­lĂ ? Fin septembre, j’ai ĂŠcrit un article sur les SULVRQV HW MH SHQVH TX¡HQ TXHOTXHV SDJHV M¡DL UpVXPp WRXW FH TX¡LO QH IDXW SDV IDLUH 0DTXHWWH KRUULEOH OHV SKRWRV TXL QH YRQW SDV DYHF OHV HQFDGUpV (W SRXUWDQW on ĂŠtait pile dans l’actu. Le journalisme, c’est tout VDXI GH ERQQHV LQWHQWLRQV ,O IDXW GH OD SrFKH GH O¡HQYROpH &¡HVW XQ PpWLHU GH GpWDLOV 3OXV TXH WRXW Le FKRL[ GH OD ERQQH SKRWR GH OD ERQQH SKUDVH GH OD ERQQH TXHVWLRQ L’Êchec de Volume, mensuel 100 % musique lancĂŠ par les Inrocks en juin 2008 et stoppĂŠ neuf mois après, ça pèse ? -H Q¡pWDLV SDV Oj PDLV MH Q¡DL SDV O¡LPSUHVVLRQ TX¡LO \ DLW GHV VpTXHOOHV 'pMj LOV DYDLHQW FKRLVL XQ PDXYDLV WLWUH LOV DXUDLHQW G€ DSSHOHU oD Les Inrocks Musique (Q IDLW oD D PDUFKp &¡pWDLW OLPLWH SXLV LO \ D HX OD FULVH /¡LGpH Q¡HVW SDV DEDQGRQQpH ORLQ GH Oj Revenir Ă la presse ĂŠcrite après vingt ans de tĂŠlĂŠ, c’est facile ?

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Tu reprends ton papier, coco ?

En 1946, George Orwell ĂŠnonçait dans l’essai Politics and the English Language six règles pour une ĂŠcriture HIĂ€FDFH

N’UTILISEZ JAMAIS UNE MÉTAPHORE, UNE COMPARAISON OU TOUTE AUTRE FIGURE DE STYLE QUE VOUS AVEZ L’HABITUDE DE VOIR IMPRIMÉE. N’ÉCRIVEZ JAMAIS UN MOT LONG SI UN MOT COURT FAIT L’AFFAIRE. S’IL EST POSSIBLE DE SUPPRIMER UN MOT, SUPPRIMEZ-LE. N’UTILISEZ JAMAIS LA FORME PASSIVE SI VOUS POUVEZ UTILISER LA FORME ACTIVE. N’EMPLOYEZ JAMAIS UN TERME SCIENTIFIQUE, UN MOT DE JARGON OU UN VOCABLE ÉTRANGER SI VOUS CONNAISSEZ SON ÉQUIVALENT DANS LA LANGUE DE TOUS LES JOURS. DÉSOBÉISSEZ Ă€ CES RĂˆGLES AVANT D’ÉCRIRE QUOI QUE CE SOIT DE BARBARE.

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6

/D WpOp IRQFWLRQQH GH PDQLqUH LQGXVWULHOOH FHUWDLQV MRXUQDOLVWHV IRQW OHXU URFN VWDU LO \ D XQH SUHVVLRQ WHUULEOH SDUFH TXH WRXW FR€WH WUqV FKHU LO IDXW DOOHU YLWH $ORUV TX LO \ D OH SODLVLU MXELODWRLUH PDJLTXH GH IDEULTXHU XQ MRXUQDO OD PDTXHWWH FKRLVLU OHV SKRWRV discuter des papiers. C’est

artisanal et un peu

romantique.

Graphiquement, comment Êvoluera la maquette ? 8Q Š SV\FKDQDO\VWH JUDSKLTXH ª QRXV GLW DFWXHOOHPHQW TXL RQ HVW ,O HQWHQG QRV GHVLGHUDWDV GH MRXUQDOLVWHV HW OH WUDGXLW HQ LPDJHV 2Q Upà pFKLW j FKDQJHU OH ORJR

OD W\SR 5LHQ Q¡HVW GpFLGp Et le site ? 2Q YD OH IDLUH pYROXHU DYHF XQH LPSOLFDWLRQ SOXV JUDQGH GH OD UpGDFWLRQ *URV WUDYDLO Oj GHVVXV 3RXU TXH oD VRLW SOXV UpDFWLI SOXV FRQVXOWp DX FDUUHIRXU GH OD PXVLTXH HW GHV news. A nous d’occuper ce WHUUDLQ Oj XQ SHX PLHX[ Qui seront vos concurrents directs ? 2Q YHXW rWUH FODVVp QHZVPDJD]LQH QH SOXV rWUH XQ MRXUQDO VSpFLDOLVp 2Q YHXW DOOHU MRXHU GDQV OD FRXU GHV JUDQGV KHEGRV Le Point, L’Obs, L’Express. Combien de ventes chaque semaine ? dD RVFLOOH DXWRXU GH 'RQW DX PRLQV par abonnement. Quels mĂŠdias consultez-­vous ? 0D V\PSDWKLH YD KLVWRULTXHPHQW YHUV LibĂŠ 0DLV

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je lis aussi Le Monde HW MH VXLV DVVH] EOXIIp SDU OH Herald Tribune. 4XRL G¡DXWUH " L’Equipe, Les Echos, La Tribune, Le Parisien, le Guardian, de temps en temps le New York Times, Le Point, L’Express. Le Nouvel Obs, VSD, Paris-­Match, Marianne, Grazia, Voici, Vanity Fair, Courrier International‌ Je vais tous les jours sur Mediapart, Rue89, Lenouvelobs.com, un petit tour sur Ozap‌ /D SUHVVH F¡HVW XQ NLI (Q YDFDQFHV VXU XQH SHWLWH vOH

je peux faire chaque jour quinze kilomètres

en scooter pour

trouver des journaux. La radio, la tÊlÊvision ? J’aime bien Canal+ [il a travaillÊ pour Le vrai journal, Nulle part ailleurs et L’Êdition spÊciale], je regarde assez souvent CNN, l’Êmission de Taddei, le JT de France 2 et C dans l’air. Le seul moment oÚ j’Êcoute la radio, c’est le matin : RTL, Europe 1, France Inter, France Culture.

Les Inrockuptibles

en kiosques chaque mercredi. Nouvelle formule le 15 mars

Les conseils d’Orwell au-­dessus de votre bureau [voir encadrĂŠ page prĂŠcĂŠdente], c’est l’essentiel de vos règles d’Êcriture ? 1RQ PDLV M¡\ DGKqUH -¡DL HX OD FKDQFH G¡DSSUHQGUH DYHF 0LFKHO $QWRLQH %XUQLHU %L]RW HW 3DWULFN 5DPEDXG >IRQGDWHXUV G¡Actuel @ ,OV pWDLHQW DVVH] IHUPHV Oj GHVVXV Aviez-­vous une formation de journaliste ? 1RQ -¡DL FRPPHQFp SUHVTXH DFFLGHQWHOOHPHQW -¡KDELWDLV 1HZ <RUN HW M¡pWDLV le mec sympa avec un appart. Les gens d’Actuel GpEDUTXDLHQW FKH] PRL MH OHV EUDQFKDLV DYHF OH PRQGH GH OD PXVLTXH TXH MH connaissais bien, je leur trouvais des images pour remplir les pages ÂŤ nouveau et intĂŠressant ÂŞ (W XQ MRXU XQ DYLRQ HQWLHU HVW DUULYp GH 3DULV ,OV RQW RUJDQLVp DX 5LW] OD IrWH OD SOXV FRXUXH GH WRXWH OD YLOOH DYHF 7X[HGRPRRQ -DFN 1LFKROVRQ 'DYLG %\UQHÂŤ -H VHUYDLV GH Ă€[HXU HQ IDLW 3XLV MH PH VXLV GLW TXH MH SRXUUDLV pFULUH PRL PrPH Premiers papiers signĂŠs ? Dans Soho News, puis Spin et The Face YHUV 0RQ SUHPLHU UHSRUWDJH F¡pWDLW VXU OD PRUW GH -RKQ /HQQRQ PDLV MH QH VDYDLV SDV WUDYDLOOHU GRQF oD Q¡D SDV pWp XQH DIIDLUH $SUqV LibĂŠ, par O¡LQWHUPpGLDLUH GH 5pP\ .ROSD .RSRXO >YRLU Standard no @ /H SUHPLHU F¡pWDLW VXU OH VD[RSKRQLVWH -DPHV &KDQFH LO DYDLW SHUGX VD FRSLQH ² FKLQRLVH PH VHPEOH W LO ² LO GRQQDLW XQ FRQFHUW KRPPDJH j WURLV KHXUHV GX PDWLQ KDOOXFLQDQW -¡DYDLV UpGLJp WURLV IHXLOOHWV GLFWpV SDU WpOpSKRQHÂŤ Suivis d’un autre DUWLFOH VXU FH FLQpDVWH j PRXVWDFKH GH 3KLODGHOSKLH FRPPHQW LO V¡DSSHOOH GpMjÂŤ -RKQ :DWHUV Vous aviez quoi, 25 ans ? (QYLURQ &HV GpEXWV FH Q¡pWDLW SDV FRPPH XQH TXrWH

une vocation, c’est arrivÊ naturellement et c’Êtait DVVH] MR\HX[

J’Êtais ÂŤ fauche man  : MH QHWWR\DLV OHV FXLVLQHV G¡XQ UHVWDX EUDQFKp GH 6RKR R MH VXLV GHYHQX PDQDJHU DX ERXW G¡XQ PRLV -H VRUWDLV GDQV GHV VRLUpHV SRpVLH WKpkWUH DX FÂąXU G¡XQH SHWLWH FRPPXQDXWp R SHUVRQQH n’Êtait personne, mais avec une effervescence, GHV FURLVHPHQWV VWXSpĂ€DQWV GHV WDOHQWV LQFUR\DEOHV 9UDLPHQW GH OD PDWLqUH j MRXUQDOLVPH -HDQ )UDQoRLV %L]RW YHQDLW VRXYHQW RQ pWDLW DVVH] SRWHV 8Q PDWLQ LO P¡DSSHOOH Š 0DLV TX¡HVW FH TXH WX IRXV EUDQOHXU 9LHQV ERVVHU j Actuel ÂŞ ,O IDLVDLW FKDXG M¡DYDLV GHV SUREOqPHV M¡DL SULV O¡DYLRQ Pour devenir grand reporter ? &¡HVW oD $ PRQ UHWRXU GH 1HZ <RUN LO \ DYDLW XQ SHX pFULW Š -RH *KHWWR ÂŞ VXU PRQ IURQWÂŤ M¡pFULYDLV sur le rap, la street M¡DL KDELWp XQ PRLV j 6RZHWR >$IULTXH GX 6XG@ SXLV HQ 2XJDQGD HQ &{WH G¡,YRLUH HQ $OJpULH DX .HQ\D HQVXLWH MH PH VXLV LQVWDOOp HQ EDQOLHXH SDULVLHQQH SRXU FDVVHU OHV FOLFKpV YRLU OHV IrWHV OD JDvWp OD FUpDWLYLWp IDEXOHXVH 3XLV je me VXLV HQJRXIIUp GDQV FHWWH KLVWRLUH GH KLS KRS YLD OD tournĂŠe New York City Rap j 3DULV /RQGUHV %HUOLQ >HQ @ SXLV HQ &DOLIRUQLH DYHF ,FH 7 ² XQ ELGH 2Q YHQDLW DX %DWDFODQ DYHF OHV IXWXUV 170 ,$0 HW les gens se disaient : ÂŤ Mais oĂš est le groupe ? Ton truc de rap, ça va durer deux semaines. ÂŞ ,O \ DYDLW $IULND %DPEDDWD GHV Ă€OOHV DYHF GHV FRUGHV j VDXWHU OHV JUDIIHXUV 3KDVH HW )XWXUD TXL SHLJQDLHQW VXU VFqQH HW '67 FH '- SURGLJLHX[ TXL D VFUDWFKp Rock It d’Herbie Hancock – bref, un souk inouĂŻ. ,OV UpLQYHQWDLHQW OH ORRN OH ODQJDJH OD PXVLTXH OH FLQpPD O¡pFULWXUH ,O \ D XQ PRPHQW GH JUkFH GDQV WRXWHV OHV FKRVHV TXL V¡LQYHQWHQW ² DYDQW TX¡HOOHV QH se pervertissent. Sur le point de se conclure, cette conversation est thÊâtralement interrompue par l’entrĂŠe dĂŠlicate de Michel-­Antoine Burnier, 67 ans, posant sa sacoche tandis que Bernard Zekri nous introduit : ÂŤ C’est PRQ GRFWHXU HQ pFULWXUH PRQ FKDVVHXU GH FOLFKpV &¡HVW OH PHLOOHXU SRXU OHV DFFURFKHV OHV UHODQFHV HW O¡RUWKRJUDSKH 4XDQG LO \ D OLWLJH VRQ DYLV HVW indiscutable : tout le monde tombe d’accord avec lui. ÂŞ Ainsi, en coulisses, les vieux incorruptibles d’Actuel veillent Ă l’avenir des ,QURFNXSWLEOHV. — * Co-­directeur gĂŠnĂŠral de la banque Lazard, Matthieu Pigasse est devenu le 17 aoĂťt 2009 propriĂŠtaire Ă 77,5 % des Inrockuptibles.

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SÉRIAL SÉRIE

Lost, la Tradition retrouvĂŠe

4XHVWLRQ P\WKRORJLTXH GHYDQW OH GHUQLHU chapitres de LOST : oÚ les personnages se sont-ils perdus, si ce n’est dans notre monde ? par Pacôme Thiellement

Perdus. Dans Le Roi du Monde XQH pWXGH GH OH PpWDSK\VLFLHQ IUDQoDLV 5HQp *XpQRQ V\QWKpWLVH l’ensemble des donnĂŠes traditionnelles concernant OH P\WKH GX FRQWLQHQW SHUGX $SSHOp 6KDPEKDOD $JDUWKD $WODQWLV RX 7KXOp FHOXL FL UHQYRLH j XQ FHQWUH VSLULWXHO UHSUpVHQWp FRPPH XQH vOH ,PPXDEOH DX PLOLHX GH O¡DJLWDWLRQ GHV Ă RWV O¡vOH HVW GHYHQXH LQDFFHVVLEOH j O¡KXPDQLWp RUGLQDLUH HW VLWXpH KRUV GH O¡DWWHLQWH GHV FDWDFO\VPHV TXL ERXOHYHUVHQW OH PRQGH KXPDLQ j OD Ă€Q GHV SpULRGHV FRVPLTXHV UHSUpVHQWpHV SDU OH FKDSHOHW VKLYDwWH GH JUDLQV ÂŤ chaĂŽne des mondes Âť HVW ÂŤ un des nombres cycliques fondamentaux Âť SUpFLVH *XpQRQ $X FÂąXU GH FHWWH vOH UpVLGH OH 5RL GX 0RQGH VDQVNULW Manu /pJLVODWHXU SULPRUGLDO LO LQFDUQH O¡,QWHOOLJHQFH FRVPLTXH TXL UpĂ pFKLW OD /XPLqUH VSLULWXHOOH SXUH HW IRUPXOH OD Loi (Dharma /H 0DQX HVW ÂŤ celui qui fait tourner la roue Âť (ChakravartĂŽ 3ODFp DX FHQWUH GH WRXWHV FKRVHV LO HQ GLULJH OH PRXYHPHQW VDQV \ SDUWLFLSHU OXL PrPH 7HQDQW j OD IRLV GH -XOHV 9HUQH HW GH 3KLOLS . Dick, Lost ne contredit jamais cet ensemble de GRQQpHV pVRWpULTXHV PDLV OXL GRQQH XQH IRUPH actuelle, associant le background WUDGLWLRQQHO j XQH UHSUpVHQWDWLRQ SDWKpWLTXH GX PRQGH PRGHUQH /D SXLVVDQFH GH VRQ UpFLW WLHQW j OD FRQIURQWDWLRQ G¡XQ XQLYHUV UpJL SDU GHV IRUFHV VXSUD KXPDLQHV HW GHV KRPPHV GH QRWUH WHPSV DX SRWHQWLHO FRQWUDULp &H VRQW GHV rWUHV G¡H[FHSWLRQ V\VWpPDWLTXHPHQW EULVpV SDU OHXU HQYLURQQHPHQW HW OHXUV SURFKHV -DFN .DWH 6DZ\HU /RFNH +XUOH\ 6D\LG 6XQ HW -LQ VRQW LQFDSDEOHV GH GRQQHU DXWUH FKRVH TXH OH pire d’eux-­ mĂŞmes GDQV OHXUV YLHV HW FH MXVTX¡j FH TXH O¡vOH les extraie de notre pourriture contemporaine et les UpRULHQWH YHUV GHV VLWXDWLRQV R penser, agir et ĂŞtre ne font plus qu’un.

TrouvĂŠs. Lost D V\VWpPDWLTXHPHQW UHPLV HQ cause les certitudes des spectateurs concernant OHV EDVHV GH VRQ UpFLW O¡vOH Q¡HVW SDV GpVHUWH PDLV KDELWpH VDLVRQ OHV Š DXWUHV ÂŞ QH VRQW SDV GHV DXWRFKWRQHV PDLV RQW pWp UHFUXWpV SRXU GHV UDLVRQV SUpFLVHV VDLVRQ OH UpFLW QH V¡DFKqYH SDV TXDQG OHV SHUVRQQDJHV TXLWWHQW O¡vOH PDLV LOV GRLYHQW \ UHWRXUQHU SRXU DFFRPSOLU OHXU GHVWLQ VDLVRQ :LGPRUH Q¡HVW SDV O¡DGYHUVDLUH GH %HQ PDLV VRQ SUpGpFHVVHXU GDQV OD GLUHFWLRQ GH O¡vOH VDLVRQ HQĂ€Q VDLVRQ FHOXL TXH O¡RQ GpVLJQH VRXV OH QRP GH -DFRE Q¡HVW SDV

Des ĂŞtres d’exception systĂŠmatiquement brisĂŠs par leur environnement et leurs proches. Jacob mais un autre dieu se faisant passer pour -DFRE 0pWDPRUSKRVDQW VDQV FHVVH OD PpWDSK\VLTXH LPSOLTXpH SDU O¡DYHQWXUH GH VHV KpURV Lost pousse le spectateur aux limites de son attention, dans l’objectif de le rĂŠorienter et de le sortir de sa passivitĂŠ VWUXFWXUHOOH 2 OHV SHUVRQQDJHV VRQW LOV SHUGXV dans Lost si ce n’est dans notre monde " (W TX¡HVW FH TXH O¡vOH VL FH Q¡HVW FRPPH O¡DSSHOOH /RFNH Š OD WHUUH GHV YLYDQWV ÂŞ F¡HVW j GLUH OH OLHX GH OD Š GpOLYUDQFH ÂŞ (en sanskrit : moshka GH OD Š OLEpUDWLRQ KRUV GH OD IRUPH ÂŞ vidĂŞha-­mukti " $LQVL Lost est dans le monde GH OD WpOpYLVLRQ FRPPH VRQ vOH VXU OD 7HUUH ² TXLWWH j FH TXH GHV VSHFWDWHXUV PRLQV SUpSDUpV KXUOHQW WHOOH &KDUORWWH Š &H OLHX HVW OD PRUW ÂŞ this place is death ! —

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Lost

sixième et dernière saison Dès le 2 fÊvrier sur le Net

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ARCHIVES

AccusÊ, levezvous Sortie en DVD des trois retransmissions tÊlÊvisuelles du TRIBUNAL DES FLAGRANTS DÉLIRES, interrogeant, entre deux bons mots, les limites de l’humour. par Richard Gaitet

ÂŤ 203 pages de romantisme dĂŠcapant pour le prix d’un kilo de dĂŠbouche-­Êvier. ÂŞ 9RLOj FRPPHQW le ÂŤ Procureur gĂŠnĂŠral de la 5pSXEOLTXH 'HVSURJHV IUDQoDLVH ÂŞ pYRTXH VRXULUH FKDIRXLQ GH OpJLVODWHXU ]pOp OH SUHPLHU URPDQ GH 3DWULFN 3RLYUH G¡$UYRU DQV PqFKHV EORQGHV SUHPLHU DFFXVp des trois retransmissions FDWKRGLTXHV GX Tribunal des Flagrants DĂŠlires. 'LIIXVpH FKDTXH MRXU YHUV PLGL VXU )UDQFH ,QWHU HQWUH VHSWHPEUH HW MXLQ (interruption du programme HQ FHWWH SDURGLH judiciaire conceptualisĂŠe SDU &ODXGH 9LOOHUV VLV GDQV le fauteuil du PrĂŠsident et VXUQRPPp OH Š 0DVVLI &HQWUDO ÂŞ ² RQ GLUDLW XQ JURV FKDW ² HXW GURLW j WURLV pPLVVLRQV VXU $QWHQQH ÂŤ Sous la robe noire de la justice ÂŞ DX[ F{WpV GH 9LOOHUV HW 'HVSURJHV /XLV 5HJR LQFDUQH O¡DYRFDW GH OD dĂŠfense ÂŤ le plus bas d’Inter ÂŞ 'DQV OD SUHPLqUH pPLVVLRQ 33'$ se dĂŠfend bien. Dans la seconde, F¡HVW V\PSD 6RXFKRQ GLW Q¡LPSRUWH

TXRL HW -HDQ &DUPHW IDLW OH FORZQ FRQVLGpUDQW DYHF MXVWHVVH TXH ÂŤ plus un personnage est vulgaire, piètre, plus il faut le jouer avec distinction, ĂŠviter le graveleux et l’effondrement dans le pathĂŠtique. ÂŞ /D VXLWH HVW PRLQV GU{OH PDLV SOXV instructive. Chanson pirate /¡HQWUpH GX WURLVLqPH LQYLWp glace l’Êcran : accusĂŠ de ÂŤ reconstitution de ligue dissoute par propagation d’idĂŠes

ÂŤÂ Les chiffres sont accablants : il y a de plus en plus d’Êtrangers dans le monde.  Pierre Desproges FLWDQW /XLV 5HJR totalitaires ÂŞ F¡HVW VRQ SUHPLHU SDVVDJH VXU 5DGLR )UDQFH HQ YLQJW DQV GH SROLWLTXH 6RQ JRLWUH GH pĂŠlican dĂŠpasse de son costume EOHX VRQ ÂąLO GH YHUUH ]LJ]DJXH 4XL " /H 3HQ DQV (WUDQJH confrontation. Desproges sourit, 5HJR SRUWH XQH pWRLOH GH VKpULI /H QDWLRQDOLVWH pYRTXH Š une invasion en provenance des grands

continents ÂŞ HW Š le spectre d’une guerre mondiale thermonuclĂŠaire causĂŠe par l’hĂŠgĂŠmonie communiste politico-­militaire internationale ÂŞ dĂŠtaille son estime pour PĂŠtain et se plaint de ÂŤ l’intelligentsia journalistique ÂŞ )LQ UKpWRULFLHQ 9LOOHUV OXL WLHQW WrWH FKHUFKH OD FRKpUHQFH DX VHLQ GH FHWWH SHQVpH nausĂŠabonde. &¡HVW O¡KHXUH GH OD UpSOLTXH 'HVSURJHV VRUW VRQ FpOqEUH Š On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui ÂŞ UDFRQWH VREUHPHQW OD IRLV R LO D IDLW FURLUH j XQ FKDXIIHXU GH WD[L UDFLVWH TX¡LO pWDLW $UDEH HW FRQFOXW SDU FHW KDELOH HPSUXQW j VRQ FRPSOLFH 5HJR Š Les chiffres sont accablants : il y a de plus en plus d’Êtrangers dans le monde. ÂŞ &H GHUQLHU FRQQDvW VRQ PRPHQW de gloire en dĂŠcrivant, K\VWpULTXH OD MRXUQpH W\SH G¡XQ 66 ² FH TXL SURYRTXH PLQFH O¡KLODULWp GX IURQWLVWH /H QXPpUR GH Ă€Q VHPEOH LUUpHO /H 3HQ LQWHUSUqWH ÂŤ une chanson pirate ÂŞ DFFRPSDJQp G¡XQ SLDQLVWH PpWLV 2Q DSSHOOH oD Š XQ PRPHQW GH WpOpYLVLRQ ÂŞ Âł Le Tribunal des Flagrants DĂŠlires

DVD Studio Canal

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PAGES COORDONNÉES PAR FRANÇOIS GRELET ET BENJAMIN ROZOVAS

Quatre Avalanche dans les bacs de numÊros  2 ª TXL WLHQQHQW HQÀQ OHV SURPHVVHV GH OHXUV aÎnÊs. On ne s’est pas fait avoir là ?

Transcender coÝte que coÝte l’œuvre matricielle.

Uncharted 2

Sony/Naughty Dog modern warfare 2

$FWLYLVLRQ ,QĂ€QLW\ :DUG Left 4 Dead 2

EA/Valve Assassin’s Creed 2

Ubisoft MontrĂŠal

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LES JALONS DE L’HISTOIRE /H ULVTXH F¡HVW TX¡j IRUFH GH JRPPHU XQ j XQ OHV GpIDXWV GH O¡pSLVRGH SURWRW\SH LOV RQW Ă€QL SDU OH UHQGUH FRPSOqWHPHQW REVROqWH MHWDEOH VDQV SpUHQQLWp 9RXV Q¡DXUH] SOXV $8&81( UDLVRQ GH MRXHU DX premier Left 4 Dead/Modern Warfare/ Uncharted/Assassin’s Creed DSUqV DYRLU WkWp GX VHFRQG $ XQ GpWDLO SUqV TXDQG PrPH LOV UHVWHURQW OHV SUHPLHUV 0rPH V¡LOV Q¡pWDLHQW SDV DXVVL JpQLDX[ TX¡LOV DXUDLHQW SX PrPH V¡LOV Q¡pWDLHQW TXH GHV brouillons, ce sont eux les jalons. L’Histoire VH VRXYLHQGUD G¡HX[ (OOH VH VRXYLHQGUD GH MHX[ GpSDVVpV DX[TXHOV SOXV SHUVRQQH QH MRXH 8QH +LVWRLUH PRUWH " Âł

Š DR

Ă la sui -te !

$ +ROO\ZRRG OHV FKRVHV VRQW FODLUHV GX PRLQV GHSXLV TXHOTXHV pWpV IDLUH XQH VXLWH F¡HVW URXOHU VXU GX YHORXUV SKRWRFRSLHU GX JLPPLFN QH ULHQ UHPHWWUH j SODW HW WRXW YDJXHPHQW j MRXU 3DVVHU GH 0HJDQ )R[ YHUVLRQ Q\PSKHWWH j 0HJDQ )R[ YHUVLRQ Q\PSKR 8QH EURXWLOOH XQH pYLGHQFH 5HJDUGHU OHV FKRVHV DFWHXUV 6); WUDQTXLOOHPHQW pYROXHU HW DWWHQGUH TXH OH SXEOLF Ă€QLVVH SDU V¡HQ ODVVHU 3DUFH TXH OD OLFHQFH HVW LQVFULWH GDQV VRQ FRGH JpQpWLTXH OH MHX YLGpR OXL VDLW TXH OH VHTXHO VH GRLW VXUWRXW G¡DOOHU H[SORUHU OHV ]RQHV TXH VRQ SUpGpFHVVHXU DYDLW ODLVVp KRUV FKDPS &¡HVW 0DULR DXTXHO RQ DGMRLQW XQH TXHXH GH UDWRQ ODYHXU SRXU TX¡LO SXLVVH YROHU &¡HVW 'XNH 1XNHP TXL OkFKH OD SODWHIRUPH JULVkWUH SRXU DOOHU Up LQYHQWHU OH )36 downtown in / $ &¡HVW O¡LGpH GH WUDQVFHQGHU FR€WH TXH FR€WH O¡¹XYUH PDWULFLHOOH '¡rWUH FRQWUH Tout contre. &HW KLYHU R WRXV OHV QRPV GHV EORFNEXVWHUV VH WHUPLQDLW SDU XQ Š ÂŞ OHV GpYHORSSHXUV RQW XQDQLPHPHQW FKRLVL GH IDLUH GDQV O¡DXWRFULWLTXH GDQV OH UHJLVWUH GX Š PrPH PDLV HQ PLHX[ ÂŞ HQFRUH SOXV dingue visuellement, encore mieux calibrĂŠ en termes de gameplay HQFRUH SOXV ULFKH HQ PRGHV GH MHX /¡DYDQWDJH F¡HVW TXH OH JHVWH HVW V\PSWRPDWLTXH G¡XQH LQGXVWULH KDELWpH par un dĂŠsir de divertissement massif, et encore capable de tenir des engagements DQQRQFpV j JUDQGV FRXSV GH FRPPXQLTXpV GH SU RP HVVH V

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JEUX VIDÉO

GONZO LIVE

Questions pour un candidat moyen

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Des rires et quelques Êtranglements avec  1 contre 100  sur le X-­BOX LIVE.

'DQV OD YHUVLRQ YLGpR OXGLTXH GX FpOqEUH SDV WDQW TXH oD HQ )UDQFH Š FRQWUH ÂŞ SUpVHQWp DXWUHIRLV SDU %HQMDPLQ &DVWDOGL WRXV OHV SRLQWV HW VXFFqV TXH YRXV DFFXPXOH] FKDTXH VRLU ORUV GH SDUWLHV Š j YLGH ÂŞ GpWHUPLQHQW YRWUH future place dans l’Êmission du MHXGL j K OH VRLU GX prime. &¡HVW OH SUHPLHU JUDQG UHQGH] YRXV j KHXUH Ă€[H GX ; %R[ /LYH une messe inratable, avec un petit F{Wp YR\HXULVWH j OD Running Man. 6L YRXV DYH] pWp ERQ le reste de la VHPDLQH YRXV DYH] GHV FKDQFHV G¡DFFpGHU DX 0XU 6L YRXV DYH] pWp H[FHOOHQW YRXV VHUH] SHXW rWUH VHXO FRQWUH (W oD F¡HVW O¡DIĂ€FKH DEVROXH /H ERQKHXU GH FH W\SH GH TXL] j FKRL[ PXOWLSOH, c’est de pouvoir passer son ignorance VRXV VLOHQFH TXDQG RQ SHUG HW G¡KXUOHU VD VXSpULRULWp TXDQG RQ JDJQH /H Š ÂŞ QH SURMHWWH TXH GH O¡LJQRUDQFH 3DXYUH W\SH TXL QH VDLW PrPH SDV TXH O¡DVSHUJH HVW XQ OpJXPH 3RXUWDQW RQ HVVD\H G¡rWUH OXL WRXV LQODVVDEOHPHQW 8Q FRQVHLO VZLWFKH] OH ODQJDJH de votre console en anglais. $ OD TXHVWLRQ Š Qui interprĂŠtait le personnage principal d’,O IDXW VDXYHU OH VROGDW 5\DQ ? ÂŞ LOV RQW rĂŠpondu Tom Hanks. Les ânes. ÂŤ Who plays the title character in Saving Private Ryan ? ÂŞ 0DWW 'DPRQ FKHUV Âł

SPÉCIAL MARIO

si vous avez...

Si vous avez 5 minutes

MARIO & SONIC AUX JEUX OLYMPIQUES D’HIVER Nintendo Super le slalom. Sympa le bobsleigh. Cool le saut Ă skis. Pour peu qu’on ait une balance board dans son salon. Et puisque c’est un party game, il s’agirait mĂŞme d’en avoir quatre Ă portĂŠe de pieds. Sinon pas la peine de s’agiter de la wiimote ni de tortiller du nunchuk : la sensation de glisse n’y est pas, les ĂŠpreuves frisent l’injouabilitĂŠ et le fun promis dĂŠgĂŠnère, le temps d’une descente dans les platanes.

Si vous avez 1 heure

SUPER MARIO BROS. WII

Si vous avez 1 mois

MARIO & LUIGIÂ : VOYAGE AU CENTRE DE BOWSERÂ

Nintendo Mario tombe, Mario vole, Mario tombe, Mario glisse et picore (avec son nouveau costume pingouin), Mario saute, Mario tombe‌ Il se passe vingt trucs à la seconde dans le nouveau mariolle, Êvidemment dÊmultipliÊ par le nombre de joueurs à l’Êcran (jusqu’à quatre). C’est Êpuisant. Mais d’une telle profondeur qu’il faudra penser à comptabiliser ces petites sessions d’une heure pour voir à combien elles s’additionnent.

Alpha Dream/Nintendo Le coup de gÊnie de cette fausse suite au somptueux Brothers In Time est de rendre Bowser jouable pour tous les fans du plombier rital. D’oÚ ce parfait Action RPG en forme de rêve de gosse oÚ Bowser fait le show selon une formule arrivÊe dÊsormais à un stade de maÎtrise (rythmique, formelle, gaJXHVTXH UpHOOHPHQW VWXSpÀDQW C’est possible d’avoir Yoshi pour le prochain ?

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BACK

Rétro 2009 Ok, Game Over. On pose les manettes et on rend les copies.

LE MOINS BIEN QU’IL EN AVAIT L’AIR Les nominés : Prototype Brutal Legend Madworld Le gagnant : Prototype ! 5DGLFDO

Comment vendre un jeu ? Souvent à l’aveugle, parfois en mentant, toujours au détriment du consommateur, qui ne sait plus rien, il l’avoue volontiers. Prenez Prototype. Grosse ambition. Grosses couilles. Gros succès. Petite déception. Un produit confus, « pas fini », dans un packaging sensationnel. Bien joué Activision. En attendant, il y avait peutêtre un grand jeu là-dessous.

LE PLUS « PARKOUR » Les nominés : Uncharted 2 Assassin’s Creed 2 Prototype Le gagnant : Assassin’s Creed 2 ! 8ELVRIW

Aucun jeu ne mérite mieux le terme de « bac à sable » que celui-là (gestion, plateforme, fight, infiltre). AC2 touche au sublime lorsqu’on l’envisage comme une balade sur les toits en tuile de l’Italie de la Renaissance. Courir des heures durant sur les façades des immeubles de Florence, zapper les missions, ne garder que les chromos des livres d’Histoire. Comme une Delorean à sens unique coincée dans notre console.

LE PLUS OLD’S COOL Les nominés : Street Fighter 4 Jump ! Shadow Complex Le gagnant : Shadow Complex ! (SLF

Définir le plaisir retro gaming. Pas facile. Il fallait être là, quoi. Il faut avoir vécu la grande (petite) histoire des jeux vidéo, avoir fait l’expérience de ses évolutions et de ses invariantes, pour savoir de quoi on nous parle. Aventure high-tech à la Jack Bauer ou bain de jouissance dans les prairies side-scrollées de Metroïd, Shadow Complex est un grand jeu. Sous tous les angles.

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LE MIEUX FILMÉ Les nominés : Uncharted 2 Modern Warfare 2 Resident Evil 5 Le gagnant : Uncharted 2 ! 1DXJKW\ 'RJ

Le nouveau dada des jeux Triple-A ? Faire « comme au cinoche », se prendre à la fois pour Keanu Reeves et pour Michael Bay. Ça tombe bien : Hollywood ne sait plus le faire. Pas dur de s’imposer l’année de G.I. Joe et de Transformers 2 ? Uncharted 2 met pourtant la gomme. Péripéties « jouables », accélérations folles, souffle coupé… Dix heures d’extase pop-corn à la pointe du joystick.

LE MOINS NUL QU’IL EN AVAIT L’AIR Les nominés : X-­Men Origins : Wolverine 50 Cent : Blood on the Sand Wolfenstein 3D Le gagnant : X-­Men Origins : Wolverine ! 5DYHQ 6RIWZDUH

Sa jungle en plastoc et Technicolor 50’s, ses labos en carton-pâte, ses punchlines douteuses et sa « gorerie » exaltée en ont fait le B-game le plus excitant de l’année. Mieux, son gameplay méchamment nerveux, allégrement pompé sur God Of War, en fait l’un des hack’n slash les plus recommandables depuis des lustres. Pas sûr qu’on ose un jour le remettre dans le lecteur, mais, bon sang, quel pied !

LE PLUS « PHYSIQUE » Les nominés : PES 2009 Trials HD Forza 3 Le gagnant : Trials HD ! 5HG /\Q[

La lourdeur d’un ballon de foot, la vélocité d’une voiture de course, le poids d’un corps humain sur une moto… Le tout, c’est de le sentir. Trials vous fait sentir à la milliseconde la physique merveilleuse du cascadeur et de sa moto, les flexions et les extensions, les roues avant et les saltos non prémédités. Il vous fait sentir que si vous n’y arrivez pas, c’est entièrement de votre faute. Belles mécaniques.

LE PLUS NEW’S COOL Les nominés : Batman Arkham Asylum Borderlands DJ Hero Le gagnant : Borderlands ! *HDUER[

Bouffées d’air dans la production, propositions irréfutables (Be Batman, Man!)… 2009 est riche en expériences nouvelles, à défaut d’être toujours neuves. Borderlands ? Un terrain de jeu désertique rendu en cell-shading, des armes customisables à gogo, et tiens : invite tes amis. Sur aucun autre jeu, cette année, la tentation de « disparaître » sur le Live n’a été plus dévorante.

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LE MIEUX ÉCRIT Les nominés : Uncharted 2 Brutal Legend GTA 4 : Lost and Damned Le gagnant : GTA 4 : Lost and Damned ! 5RFNVWDU

Personne dans ce métier ne maîtrise l’art du storytelling, tout le monde essaie, jusqu’à en faire péter les coutures du médium. Rockstar y arrive en dormant. Les aventures de Johnny Klebitz ont plus de mordant et d’épaisseur Noir que celles de Niko, parce que plus courtes, et culminent dans un final amer comme le plomb. Meilleure fiction « biker » de l’année, loin devant Sons of Anarchy.

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ARCADE FIRED

ÂŤ Barthes, la fac, l’acide Âť DĂŠtachĂŠ d’Arcade Fire, le Š Ă€QDO fantasyste Âť violoniste canadien OWEN PALLETT, 28 ans, ose le conte orchestral amoureux. Et rĂŠpond au tĂŠlĂŠphone, PrPH TXDQG il est au volant. Gaffe Ă la biche !

Salut Owen. Tu fais quoi, là , maintenant? Owen Pallett : Je conduis mon PLQL YDQ j WUDYHUV OHV JUDQGHV IRUrWV GH 9LUJLQLH SRXU  Un fermier violent et XQ FRQFHUW j :DVKLQJWRQ FH courageux est un contraire VRLU -¡HVSqUH tout à fait attirant.  voir une ou GHX[ ELFKHV 2ZHQ 3DOOHWW Heartland tient-­il son titre du jeu vidÊo de 1986 ? 0HF F¡HVW LPSRVVLEOH MH Q¡HQ DL MDPDLV HQWHQGX SDUOHU &HOD IDLW GHX[ DQV HW GHPL TXH FH QRP PH WURWWH GDQV OD WrWH GHSXLV TXH MH O¡DL

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YX VXU XQ SRVWHU j 7RURQWR ,O P¡D LQVSLUp XQ XQLYHUV TXH MH Q¡DYDLV SDV PrPH EHVRLQ GH Š FUpHU ÂŞ SDUFH TXH GqV TX¡RQ pFULW RQ HQ LQYHQWH XQ QRXYHDX 0rPH VL WX pFULV VXU 1LFRODV 6DUNR]\ > @ FH VHUDLW XQ SHUVRQQDJH Ă€FWLI GDQV XQ PRQGH Ă€FWLI Et Roland Barthes, très prĂŠsent sur le disque ? Pendant l’Êcriture des textes, j’ai relu Fragments d’un discours amoureux > @ SRXU DUWLFXOHU PHV SHUVRQQDJHV /HZLV HW 0pSKLVWRSKpOqV dD P¡D SHUPLV GH PH UHFRQQHFWHU DYHF PRQ Š PRL ÂŞ GH OD IDF 7X YRLV M¡DVVRFLH %DUWKHV DYHF OD IDF HW O¡DFLGH OH O\FpH HW PHV YLHX[ MHDQV j PHV DQV >LO VH PDUUH@ -¡DL aussi beaucoup relu mes gros pavĂŠs prĂŠfĂŠrĂŠs, comme les deux premiers tomes d’A La Recherche du temps perdu. Comme la phrase proustienne, les morceaux d’Heartland sont très longs et très denses. >,O ULW@ 7RXW j IDLW -H YRXODLV XQ DOEXP RUFKHVWUDO TXL

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entretien TimothÊe Barrière

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MUSIQUE

et aussi Le disque

THappy Tindersticks Sur Falling Down a Mountain (4AD / Beggars), Stuart Staples cesse de pleurer Ă chaudes larmes, poursuit sa sĂŠrie de duos avec des filles (le très amusant Peanuts) et s’offre des intermèdes free jazz et flĂťtes de pan. Pas la grosse dĂŠconne non plus mais toujours aussi beau. T. B.

Dense et mÊticuleux, HEARTLAND repousse les limites de la pop via de (très) longues phrases orchestrales.

Lorsqu’il se nommait encore Final Fantasy (les concepteurs du jeu vidĂŠo homonyme viennent de lui interdire l’usage de ce pseudo), on ĂŠtait passĂŠ Ă cĂ´tĂŠ des bricolages alambiquĂŠs des deux premiers albums d’Owen Pallett – surtout de la mythologie très Donjons et Dragons du second He Poos Clouds en 2006. On saute donc Ă pieds joints dans le nouveau monde d’Heartland. Après avoir enluminĂŠ pour Arcade Fire – dont il est le violoniste en chef – comme sur les derniers %HLUXW HW 0LND 2ZHQ DSSOLTXH HQĂ€Q j OXL mĂŞme ses arrangements mĂŠticuleux, fricotant avec l’orchestre symphonique de Prague. En LO DQQRQoDLW Ă€HU j EUDV SUpSDUHU XQ ÂŤ album sur le nĂŠant Âť : Heartland s’avère aussi dense qu’un tome de La Recherche, repoussant les limites de la pop par de (très) longues phrases orchestrales. Et mĂŞme sans se passionner pour les relations tumultueuses entre un paysan bourru et son CrĂŠateur – voire HQWUH 3DOOHWW HW XQ GLHX MDORX[ ² GLIĂ€FLOH d’être insensible Ă ce talent d’arrangeurconteur. La complexitĂŠ de la matière se laisse facilement apprivoiser dans cet accĂŠlĂŠrateur

X Sun is Shiding

de particules oĂš s’entrechoquent Can, Depeche Mode, le new age et Fiona Apple. Owen nous promène avec une fausse fantaisie militaire (Midnight Directives) sur le Mont Alpentine pour une incantation aux divinitĂŠs post rock, dĂŠvale les montagnes russes de The Great Elsewhere dans le rollercoaster d’une boĂŽte Ă rythmes cheap qui atteint les 180 bpm, et rend le diable sympathique en lui donnant des airs de Sufjan Stevens (Tryst with Mephistopheles). En sortant d’Heartland, on se recoiffe et on a juste envie de tomber amoureux – un truc de grand disque. T. B.

UHĂ qWH PHV FRQFHUWV R JUkFH j PD QRXYHOOH SpGDOH de loop M¡DUULYH j FUpHU FHWWH GHQVLWp &¡pWDLW WUqV GXU de tout faire seul, les arrangements, la direction G¡RUFKHVWUH &H JHQUH G¡DOEXP QpFHVVLWH EHDXFRXS GH PR\HQV -¡DL OX XQH LQWHUYLHZ GH -LP 2¡5RXUNH TXL VH SODLJQDLW GH QH SRXYRLU HQUHJLVWUHU OH GLVTXH GH VHV UrYHV Š parce qu’il coĂťterait un million de dollars et cinq ans de travail ÂŞ -H OXL DL pFULW TX¡DYHF PRL RQ \ DUULYHUDLW HQ XQ DQ HW GROODUV %RQ LO QH P¡D pas encore rĂŠpondu. Qui est Lewis, ton hĂŠros ? 8Q FRQFHQWUp GH WRXWHV OHV SHUVRQQHV TXH M¡DLPH PHV IUqUHV PRQ FRSDLQ PHV H[ /H SOXV GU{OH F¡HVW TXH /HZLV HVW XQ IHUPLHU YLROHQW HW FRXUDJHX[ DORUV TXH MH VXLV XQ XUEDLQ SDFLĂ€VWH 8Q FRQWUDLUH WRXW j IDLW attirant. Tu rĂŞvais d’un album d’amour ? Pendant des annĂŠes, j’ai eu des relations ĂŠtranges

DYHF PHV DXGLWHXUV 4XDQG j’avais l’impression de faire de WUqV EHDX[ FRQFHUWV MH OLVDLV GHV FRPPHQWDLUHV DWURFHV VXU ,QWHUQHW 0RL M¡DL XQH SURIRQGH DIIHFWLRQ SRXU OHV JHQV HW OD PXVLTXH HVW l’extension de mon amour pour PRQ SURFKDLQ 6XU Heartland, j’ai voulu faire la concubine et partager cette affection, non seulement composer des morceaux TXL SRXUUDLHQW PH SODLUH PDLV VpGXLUH XQ W\SH j 7DLZDQ RX j 6WRFNKROP Âł

Heartland

Domino / PIAS

Saviez-vous que l’un des meilleurs magazines du monde reste Shindig, spÊcialisÊ garage, power-pop, soul, folk, psychÊdÊlisme & Co ? De la substance et zÊro hip. L’anti NME. J.-E. D.

X Bouvard&PĂŠcuchet critiques-rock Nos facĂŠtieux confrères Basile Farkas et Josselin Bordat, respectivement chroniqueurs Ă Rock&Folk et Brain Magazine, publient Dictionnaire de la mauvaise foi musicale (Chiflet et Cie), un rigoureux ÂŤ traitĂŠ scientifique sur la musique Âť rempli d’aphorismes sabordant les clichĂŠs langagiers des mĂŠlomanes professionnels. A l’entrĂŠe ÂŤ instrument japonais Âť, cette citation de Nicolas Godin de Air : ÂŤ Pour Pocket Symphony, je suis allĂŠ spĂŠcialement Ă Okinawa pour apprendre Ă jouer du koto et du shamisen avec un maĂŽtre japonais. Quant Ă Jean-BenoĂŽt, il a enfin trouvĂŠ les figurines des Chevaliers du Zodiaque qui lui manquaient (ShyriĂť et Shun), et aussi appris l’art ancestral de devenir transparent comme de l’eau. Âť R. G.

T Full Marianne Compilation soignĂŠe de Marianne Faithfull avec titres rares et copieux livret. Pas ĂŠtonnant quand on sait que Come my way sort sur l’Êpatant label de Joe Foster, Revola. J.-E. D.

Louise Le May = Debussy S Tout en subtilitĂŠ, la Londonienne Louise Le May fond dans l’Êcrin des arrangements gracieux de Louis Philippe et son Tell me One Thing That is New (Folkwit) se hausse au niveau des plus belles heures de Van Dyke Parks, Ravel, Debussy et Robert Wyatt. Bon d’accord, j’en fais un peu trop. J.-E. D.

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NOIR C’EST NOIR

Contrat rompu WEEKEND

ne mord plus. Des problèmes de dents ? par Richard Gaitet

DĂŠception, tristesse. Les proprets 1HZ <RUNDLV G¡(]UD Koenig – ÂŤ des personnages d’un roman de J.D. Salinger habillĂŠs en Ralph Lauren ÂŞ GL[LW OH NME ² pFKRXHQW FRPPH G¡DXWUHV avant eux au ‹Š WRXMRXUV GLIĂ€FLOH GHX[LqPH DOEXP ÂŞ /D WkFKH LPSRVpH GHX[ DQV DSUqV FRPPHQW transformer l’essai original et UDIUDvFKLVVDQW FRQWHQDQW RK GL[ UHIUDLQV XVpV MXVTX¡j OD FRUGH SRS LQWHOOR EODQFKH SODTXpH VXU GHV U\WKPLTXHV DIULFDLQHV arrangements prĂŠcieux et guitares high life " /H TXDWXRU HVW SHXW rWUH SDUWL HQ ZHHN HQG MXVWHPHQW Car s’ils font les couillons dans 0DQKDWWDQ VXU OH FOLS GH Cousins, personne ne sera dupe : Contra ne FRQWLHQW QL FKDQVRQ QL PpORGLH Tout au plus, des resucĂŠes crevĂŠes

RĂŠminiscences

Gym-Ghana

de Mansard Roof. Sur Taxi Cab, I Think Ur A Contra, California English, Diplomat’s Son, c’est fou : LOV HVTXLVVHQW XQH KDUPRQLH GRXFH et dĂŠsinvolte, un plan de guitare cool‌ puis semblent carrĂŠment VRUWLU GX VWXGLR (Q JXLVH GH GLUHFWLRQ PXVLFDOH XQ FOLQ G¡¹LO DX IDPHX[ MHX YLGpR GH DXWRXU G¡XQ FRPPDQGR Ă LQJXDQW des aliens en pleine jungle – ce TXL GRQQH TXHOTXHV blips et des V\QWKpV cheaps. Horchata tourne j YLGH 1RQ OH PHLOOHXU WLWUH HQUHJLVWUp SDU .RHQLJ HQ QH Ă€JXUH SDV VXU Contra : invitĂŠ sur le moelleux Warm Heart of Africa de 7KH 9HU\ %HVW SURMHW GX 0DODZLHQ (VDX 0ZDPZD\D ORFDOLVp j /RQGUHV LO UHWURXYH KXPEOHPHQW GH VD VXSHUEH DQV OD YLH GHYDQW lui. —

Le HIGH-LIFE, ce n’est pas que des guitares Ă l’eau claire : c’est aussi du rock et de la soul sous acide. A un moment, on croyait la question rĂŠglĂŠe. Grâce aux compilations Ghana Soundz de Soundway et le chouette Ghana 70 de Syllart, on avait saisi que le high-life, c’Êtait de jolies guitares en ligne claire et funky juste-ce-qu’ilfallait, tenues par des mecs du siècle dernier payĂŠs au vin de palme, et que Joe Mensah n’avait rien Ă voir avec son homonyme footballeur. MĂŞme que Vampire Weekend, entre autres, ils savaient vachement bien s’en servir, de ces guitares-lĂ , pour accoucher d’une pop plus adaptĂŠe Ă l’Êpoque que les vieilleries ghanĂŠennes. Bon. Courte vue. Ou presque : ce Ghana Special 1968-1981, ĂŠquivalent des très rĂŠussies sĂŠries Nigeria Special SHUPHW GH UDIĂ€QHU

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Contra

XL / Beggars

un peu mieux notre jugement. On retrouvera quelques artistes prĂŠsents sur les prĂŠcĂŠdentes sorties, mais dont on ne connaissait que le cĂ´tĂŠ funk. Ici, on dĂŠcouvre toute la face LQVRXSoRQQpH GX high life, qui s’acoquinait aussi bien de rock psychĂŠdĂŠlique (The Wellis Band, que l’on aurait adorĂŠ voir accompagner Gainsbourg), de soul sudiste amĂŠricaine (Sawaaba Sounds), de disco spatiale (Dr. K.Gyasi, Ă passer en soirĂŠe juste après Orchestra Baobab), de blues Ă l’harmonica bizarre... En appuyant de temps en temps sur skip, il y a largement de quoi faire avec trente-fois titres qui permettent de se coucher moins bĂŞte (Ă six heures du matin). T. B. Ghana Special – Modern High Life Afro Sound and Ghanaian Blues 1968-1981

Soundway / NaĂŻve

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Avec Contra, l’afro-pop de VAMPIRE

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MUSIQUE

ÂŤ Je suis une crème glacĂŠe Âť 'DQVDQW HW PpODQFROLTXH le premier maxi des Newyorkais de THE DRUMS enrobe sept jolies comptines surf d’une sophistication cold wave. C’est par oĂš la plage ? entretien Nicolas Roux

Le disque

L’ÊtÊ en hiver

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Fantasme de rock star ? En juin dernier, Jonathan Pierce et Jacob Graham quittent la Floride pour New York avec leurs ĂŠconomies et leur planche de surf sous le bras. Deux mois plus tard, les clubs de la ville qui ne dort jamais se battent pour programmer les prophètes de ce croisement trĂŠpidant entre l’ÊlĂŠgance froide de Joy Division et un 33tours des Shadows passĂŠ en accĂŠlĂŠrĂŠ. A l’image de I felt stupid et de leur single Let’s go surfing, dont les mĂŠlodies ne lâchent pas pendant deux jours, Summertime! est aussi immĂŠdiat que le succès de ses auteurs qui, malgrĂŠ la grosse vague, gardent les pieds sur terre. Il faut dire qu’avec un nom trouvĂŠ dans l’inventaire d’un magasin d’instruments de musique et un humour pince-sans-rire, le quatuor de la grosse pomme ne risque pas de prendre le citron. N. R. Votre maxi Summertime! semble rĂŠpondre Ă cette question : ÂŤ Et si Joy Division avait fait un album plus optimiste ? Âť Right ? Jacob Graham [guitariste] : 2Q V¡HVW SRVp FHWWH TXHVWLRQ WRXWH QRWUH H[LVWHQFH (Q SURQRQoDQW exactement ces mots dans un vide immobile et sans vie. Et l’album que vous prĂŠparez ? ,O VHUD OpJqUHPHQW GLIIpUHQW XQ SHX SOXV VRPEUH FDU OHV FKDQVRQV Summertime! OHV SOXV FKDOHXUHXVHV VRQW VXU Summertime! Les paroles resteront Moshi moshi / WULVWHV DYHF XQH PXVLTXH HQFRUH Discograph

SOXV HQWUDvQDQWH 2Q D SUHVTXH Ă€QL le mixage. Le NME vous proclame ÂŤ le groupe le plus cool de New York Âť. La pression ? -H QH VDLV SDV FH TXH F¡HVW OD SUHVVLRQ (W RQ Q¡D MDPDLV HVVD\p G¡rWUH cools, F¡HVW SOXW{W O¡RSSRVp 'LVRQV TXH VL FH TX¡RQ IDLW HVW frais, M¡LPDJLQH TXH MH VXLV XQH FUqPH glacĂŠe. Entre surf des annĂŠes 50 et cold wave des annĂŠes 80, en quoi ĂŞtes-­ vous reprĂŠsentatifs de la musique d’aujourd’hui ?

+p ELHQ MXVWHPHQW F¡HVW oD OH WUXF QRQ " 1RXV Q¡DYRQV MDPDLV IDLW SDUWLH GH OD PXVLTXH DFWXHOOH HW WRXV QRV JURXSHV PRGHUQHV SUpIpUpV 7KH (PEDVV\ 7KH /HJHQGV Q¡RQW SDV O¡DLU G¡HQ rWUH WUqV UHSUpVHQWDWLIV QRQ SOXV -H VXSSRVH TXH QRXV HVVD\RQV de creuser notre propre trou. Et si vous deviez reprendre une chanson de 2009 ? 3DUPL QRV FKDQVRQV SUpIpUpHV FHWWH DQQpH LO \ D French Navy de Camera 2EVFXUD HW A teenager in love GH 7KH 3DLQV 2I %HLQJ 3XUH $W +HDUW ³

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LAC DES SIGNES

entretien TimothÊe Barrière

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Les gars, c’est quoi cette pochette new age ? Tim Smith [chanteur] : Les costumes V¡LQVSLUHQW GX Ă€OP G¡$QGUHM 7DUNRYVNL AndreĂŻ Roublev > VXU OD YLH G¡XQ HQOXPLQHXU G¡LF{QHV UXVVH GX XVe VLqFOH@ -H O¡DL DGRUp j FDXVH GH mon obsession pour les peintres du 0R\HQ $JH HW GH OD 5HQDLVVDQFH GH %RVFK j %UXHJHO /H SDVVp PH UDVVXUH /H PRPHQW TXH QRXV YLYRQV PDLQWHQDQW VHUDLW SUHVTXH PLHX[ GDQV XQH VHPDLQH Eric Nichelson [guitariste] : 2Q YRXODLW XQH SRFKHWWH WUqV SLFWXUDOH '¡R O¡HIIHW GH V\PpWULH DX PLOLHX TXL IDLW DSSDUDvWUH GH GU{OHV GH VHQV FDFKpV +LHU PD FRSLQH P¡D IDLW UHPDUTXHU TXH O¡RQ YR\DLW XQH WrWH GH OLRQ GDQV OHV DUEUHV HVW FH O¡HVSULW TXL KDQWH OH GLVTXH " Tim : PrĂŠcision : nous ne faisons SDV GHV MHX[ GH U{OHV GDQV QRWUH jardin >5LUHV@

Ce goĂťt du Moyen Age est liĂŠ Ă votre passion pour le groupe progressif anglais Jethro Tull ? Tim : D’eux, j’adore tout : les tentatives rock SURJUHVVLI OHV LQVSLUDWLRQV IRON OH FKDQW WpQpEUHX[ GH ,DQ $QGHUVRQ 0DOKHXUHXVHPHQW PDOJUp WRXV PHV HIIRUWV ² MH PH VXLV PrPH PLV j OD à €WH ² MH n’arriverai MDPDLV j VRQQHU FRPPH HX[ $YRLU OH VRQ GH 5DGLRKHDG F¡HVW XQ SHX SOXV IDFLOH 1RWUH FKDQVRQ Bring Down SRVVqGH G¡DLOOHXUV OHV PrPHV DFFRUGV TXH leur morceau Exit Music (For a Film) >VXU OK Computer, @ 4XDQG MH O¡DL FRPSRVpH DX SLDQR MH QH P¡HQ suis pas rendu compte. Est-­ce important de trouver de nouvelles suites d’accords ? Tim : Toutes OHV FRPELQDLVRQV RQW GpMj pWp XWLOLVpHV 3OXV MHXQH M¡DYDLV SHXU GH IDLUH VLPSOH MH FKHUFKDLV GHV GLVVRQDQFHV GHV DFFRUGV ELVFRUQXV $ORUV TXH OHV PHLOOHXUHV FKDQVRQV VRQW EDVpHV VXU FHX[ GHV DQQpHV 3RXU OD SRS LO Q¡\ D SDV YUDLPHQW OH FKRL[ Eric : 'L[ FKDQVRQV DYHF OD PrPH VWUXFWXUH SHXYHQW VRQQHU GH PDQLqUHV GLIIpUHQWHV F¡HVW WRXWH la beautĂŠ du genre. Pendant l’enregistrement de The Courage of Others RQ Q¡DUULYDLW SDV j WURXYHU

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De plus en plus sensibles au spleen europĂŠen, les Texans de MIDLAKE SLTXHQW The Courage of Others de folk EULWDQQLTXH HW GH SHLQWXUH mĂŠdiĂŠvale. Trop sombres ? Tim Smith allume le barbecue.

ÂŤ Tomber sur un trĂŠsor Âť

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MUSIQUE

Le disque

Prospectives 2010 X Two Door Cinema Club

Pour une bonne digestion, pensez Midlake Le quinquet a le courage de reconnaĂŽtre ses limites. De ne pas se contenter d’invoquer une inspiration quasi divine, Ă laquelle ne croient que les naĂŻfs. Depuis leur premier album en 2004 (Bamnan and Silvercock), Tim Smith et ses compères de Denton se retrouvent toujours au milieu du guĂŠ – Ă dĂŠfaut d’un lac –, guettant leurs envies dans les Ĺ“uvres des autres. Pas comme des bandits de grand chemin mais comme des musicologues. Après un essai seventies (The Trial of Van Occupanter, 2006), ils remontent le temps avec The Courage of Others, thèse sĂŠrieuse appuyĂŠe sur les travaux de la scène anglaise des annĂŠes 60, elle-mĂŞme inspirĂŠe du jeu de leurs ancĂŞtres baladins. Exercice de style ? Les Texans ont une bonne digestion et savent parfaitement marier la mĂŠlancolie spirituelle Ă ces nouveaux sortilèges : arpèges polychromiques, riffs tournoyants Ă demi LPSURYLVpV à €WHV TXDVL PpGLpYDOHV PDLQWHQXV ensemble par la voix traĂŽnante et dĂŠsespĂŠrĂŠe de Tim Smith, Christ verdâtre en forme d’icĂ´ne orthodoxe dorĂŠe. La bande-son d’un nĂŠo-Robin des %RLV IUDJLOH HW UDIĂ€Qp T. B.

Une basse qui cavale, une guitare hystĂŠrique et une batterie en surchauffe. Ces trois Irlandais ont dĂŠjĂ deux ĂŠnormes hits ĂŠlectro-rock : I Can’t Talk et Something Good Can Work, qui font danser ta mère et ton fils ensemble. Superficiels Ă souhait, mais plus qu’efficaces. Potentiel de win : leurs morceaux feront encore le bonheur des teufs d’appart en 2015 et deviendront aussi insupportables que Take Me Out.

X Vrelo Trois bonnasses serbes balancent des chants traditionnels du XIIIe siècle sur du post punkÊlectronica qui gicle : la rÊvÊlation exotique des dernières Transmusicales de Rennes pourrait bien tailler des croupières au pÊnible kuduro. Ou pas. Potentiel de win : ce sera toujours moins pire que le deuxième Miss Platnum.

W Beach House

The Courage of Others

Cooperative Music / Universal

Victoria, la nièce de Michel Legrand, et son copain Alex Scally ont tout compris aux harmonies aÊriennes. Après deux albums passÊs complètement inaperçus, Teen Dream devrait être le bon. Potentiel de win : chiper le titre de nÊo-hippie en chef à Fleet Foxes. En plus, ils sentent meilleur.

X Clara Clara le bon arrangement, on a pu refaire dix versions avec OH PrPH RUGUH GHV DFFRUGV Pourquoi s’inspirer du folk anglais des sixties ? Tim : ,O IDOODLW FKDQJHU GH GLUHFWLRQ 1H SDV UHIDLUH The Trials of Van Occupanter >OHXU GHX[LqPH DOEXP @ (Q UHQWUDQW GH WRXUQpH MH PH VXLV PLV j ĂŠcouter Fairport Convention ou Pentangle. C’Êtait FRPPH WRPEHU VXU XQ WUpVRU HQ PDUFKDQW GDQV XQ FKDPS /HV DXWUHV V¡\ VRQW PLV HW QRXV DYRQV GpFLGp G¡DSSUHQGUH j MRXHU FRPPH HX[ SHQGDQW XQ DQ 6DQV FRSLHU 3OXW{W intĂŠgrer OHXU VW\OH $YHF WRXWHV FHV LQĂ XHQFHV HXURSpHQQHV YRXV YRXV sentez bien au Texas ? Eric : Attends, notre petite ville de Denton n’a rien j YRLU DYHF *HRUJH %XVK HW OHV FRZER\V TXL FULHQW yeehaa (OOH D pWp FRQVWUXLWH DXWRXU GH OD IDF GH PXVLTXH R QRXV QRXV VRPPHV UHQFRQWUpV >HQ @ HW LO \ D XQH pQRUPH FRPPXQDXWp DUWLVWLTXH 8Q SHWLW 3RUWODQG -¡DGRUH TXDQG OHV PpGLDV QRXV UHQGHQW YLVLWH HW YRLHQW j TXHO SRLQW OHXUV SUpMXJpV VRQW IDX[ -¡LQYLWH j FH SURSRV WRXV OHV MRXUQDOLVWHV TXL RVHQW pFULUH TXH QRXV VRPPHV sombres j YHQLU IDLUH XQ EDUEHFXH FKH] QRXV Âł

François Virot Ă la batterie, un bassiste et un synthĂŠ cheap : si l’on ne sait pas grand-chose sur son nouvel album, ce trio de Dijon a tout pour dĂŠpasser son statut d’Animal Collective du pauvre. Potentiel de loose : y aura toujours de la place pour eux Ă Mains d’Œuvres.

T De Tropix

ÂŤÂ Notre petite ville n’a rien Ă voir avec les cowboys qui crient yeehaa !   7LP 6PLWK 0LGODNH

Pas d’album en vue pour ce duo londonien formĂŠ autour de Cherry B, l’ancienne choriste de M.I.A., repĂŠrĂŠe sur la compilation Girl Powder (voir Standard n° 22). Mais un gros tube, Adeyhey, publiĂŠ sur Warp 2010, carambolage entre le dancehall chic et l’Êlectropicale. Prometteur. Potentiel de loose : suite Ă une plainte de Tropicana, De Tropix change son nom en De Tropox. T. B.

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VIVA LE FRANCE

Anglophones et stylés : nos meilleurs espoirs. W Fairguson New Tales from the 47th Willows Coco Records Le multi-instrumentiste Thomas Sadoun a longtemps tâté du punk-pop avant d’atterrir avec Fairguson sur les terres civilisées du folk-rock contemplatif chantonné (mâchouillant). Après un premier album dispensable en 2005, le bonhomme revient avec ce New Tales from the 47 Willows, où il miaule « on s’est rendu compte qu’on est comme tout le monde, à suivre le même chemin ». On ne le contredira pas tant les six membres de Fairguson creusent avec ferveur le sillon de leurs glorieux cousins américains de Wilco, Midlake et Grandaddy. Mais quand même : pour les fulgurances mélodiques de Lost Again et l’aisance gracieuse de l’ensemble, on les invite à déclamer tout l’hiver ces contes dans notre salon. T. B. Live! Le 29 janvier à Saint-Ouen et le 12 février à Paris (Truskel).

Gaspard

T

Royant You can have me (if you want to) EP Bellevue Music

C’est une vieille histoire entre nous : Gaspard Royant donna son premier concert solo lors des deux ans de Standard. Cinq chansons solennelles, grattées sur sa guitare toute neuve au sous-sol d’un showroom éclairé de lumière mauve. Vêtu d’une chemise western tel un roadie de The Band (en plus propre), ce jeune homme taciturne interpréta ce soir-là The Big Sleep, présent sur ce premier maxi. Il y évoque à demimot la mort, et ce qu’il aurait pu être, comme un fantôme. Gaspard Royant chante comme s’il avait 80 ans, c’est lui qui me l’a dit. Comme

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s’il pouvait disparaître à tout moment. On le sent au cœur du joli gospel post-apocalyptique Things I want to remember (at the end of the world) et sur Last song of a Pistolero, hommage funèbre à La Tour sombre de Stephen King, saga sur laquelle il écrivit un article dans ce journal. Il sait aussi se faire léger : la ballade romantique Yours, le délicat Grow qui doit énormément au crépusculaire Avenue of Hope de ses idoles I Am Kloot. Je le dis honnêtement : sa voix est à tomber, son accent irréprochable et quand il reprend sur scène Elvis, Neil Young ou le negro-spiritual Amazing Grace (a cappella !), tout le monde se tait. Je dis pareillement qu’il

Gush

n’aime pas se coucher tard et parle un peu trop de religion et de Star Wars. Mais rien qu’en réécoutant ces foutus ces morceaux entendus cent fois, je me suis mis à pleurer. Alors que je suis un dur, un cowboy moi aussi. R. G. Live! Le 30 mars à Vanves en première partie de Dominique A.

X

Everybody’s God Cinq 7 / Wagram C’était la fin de l’été, au Cabaret Sauvage. Pour les 40 ans de Woodstock, quelqu’un suggéra à divers bands de reprendre les standards du festival baba. Certains s’en sortirent au poil (David Carroll et son Freedom tout nu, par exemple), d’autres moins. Et puis Gush mit ses tripes sur Soul Sacrifice : onze minutes de puissance, de groove total et un batteur fluet qui frappe fort. Assistance conquise, cris de filles. L’air de rien, ils osèrent ensuite l’exact inverse : Black Bird en acoustique, proférés de leurs quatre voix très impressionnantes. Salauds. Voilà leur premier album, 4 ans et 201 concerts

après un EP autoproduit bourré de hits (rejoueront-ils un jour Dragster Cowboy ?). Obsédés par George Clinton, Prince et les Beatles, ces minets ne donnent pas dans la facilité : le funk-rock d’Everybody’s God part dans tous les tempos et tout n’a pas l’évidence de Back Home, No Way, You Really Got Style. Reste ce gros P.nis, entre Queen et Stevie, assez littéralement consacré aux choses du sexe, et le blues de conclusion, Jealousy, renversant. R. G. Live! Le 11 mars à Paris (la Maroquinerie).

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The Great Escape ElevÊ à la britpop, le french crooner SOURYA a fomentÊ une Êvasion avec les machines de Dawdlewalk. Rattrapez-le, ce premier album est prÊcieux ! par TimothÊe Barrière

Š EGLANTINE AUBRY

Dawdlewalk

Massive Central/Discograph Live!

Sourya balade sa DS dans toute la France cet hiver. Les dates sont sur le blog standardmagazine.com

4XDQG LO D FRPPHQFp OD PXVLTXH 6RXU\D 9RUDYRQJ Š de Lognes dans le 77 ÂŞ DYDLW XQH coupe au bol, un appareil dentaire et des UpĂ H[HV GH geek $XMRXUG¡KXL VRQ JURXSH et leur premier album Dawdlewalk sont FRQVLGpUpV GHV GHX[ F{WpV GH OD 0DQFKH FRPPH OH SOXV EHO HVSRLU GH OD SRS Ă€QDXGH IUDQoDLVH HW DQJORSKRQH (QWUH OHV GHX[ Š 6RX ÂŞ D ODLVVp WRPEHU VRQ MRE GH YHQGHXU G¡pFUDQV SODWV j OD )QDF HW WURXEOH GRUpQDYDQW OHV Ă€OOHV ODLVVH] WRPEHU LO HVW PDULp GHX[ HQIDQWV TXDQG LO VH PHW j MRXHU GX V\QWKp VXU 1LQWHQGR '6 ² DFKHWpH SRXU VHV P{PHV HW GpWRXUQpH JUkFH j XQ IDEXOHX[ pPXODWHXU GH V\QWKp .RUJ 0rPH 6DQWLJROG avare en compliments, lui tape sur l’Êpaule HQ OXL GLVDQW TX¡HOOH l’adore (PEDOOHPHQW GpUDLVRQQp GH O¡DSSDUHLO j K\SH TXL j VHV dĂŠbuts, lui prĂŠfĂŠrait les baby-­rockers " 0rPH pas. L’ART DU CONTREPIED %LHQ V€U RQ pYROXH GDQV GHV XQLYHUV IDPLOLHUV 8QH RUHLOOH H[HUFpH VRXOLJQHUD GHV UpPLQLVFHQFHV GX %OXU SpULRGH Great

Escape GX 3LQN )OR\G G’Animals, GX 0XVH de Showbiz RX GX 1HZ 2UGHU GH Low Life. 0DLV FH VHUDLW O¡LQMXULHU TXH GH O¡HQIHUPHU GDQV OH U{OH G¡DQLPDWHXU :LNLSHGLD GH OD SDJH EULWSRS &DU OH VRXUQRLV 6RXU\D DYHF sa voix de crooner triste, cite avec justesse dans un souci permanent de contrepied : un riff d’accord incongru dans une suite ORJLTXH The Ballad of the Star Gigolo XQ beat ĂŠlectro surpuissant au milieu d’une EDOODGH PpODQFROLTXH Sleep Stage ZĂŠro une bande inversĂŠe bien placĂŠe en revers G¡XQH SDUWLH RUFKHVWUDOH NumĂŠro 3 6XU le plus beau morceau, Anatomy Domine, FH TXL SDUDLVVDLW Q¡rWUH TX¡XQH GRXFHUHXVH FRPSWLQH pOHFWURQLTXH DJUqJH DX IXU HW j PHVXUH OHV FRXFKHV VRQRUHV SRXU DERXWLU j XQH SUHPLqUH H[SORVLRQ GH JXLWDUHV DYDQW GH Ă€QLU HQ DSRWKpRVH TXDVL GDQFHĂ RRU dans XQ YUDL IDX[ GLDORJXH R OHV KXPDLQV GLVHQW OHXUV TXDWUH YpULWpV DX[ URERWV 7RXW XQ V\PEROH SRXU XQH IRUPDWLRQ TXL D EHDXFRXS j GLUH HW SDV VHXOHPHQW DX[ geeks, sur les PpULWHV FRPSDUpV GH O¡KXPDLQH KDUPRQLH HW GH OD WHFKQRORJLH SDV WRF Âł

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Carte blanche

Gee up! Bilan de dÊbut d’annÊe pour FLAIRS. 7RXW YD SOXV TXH ELHQ -XVWH XQ GRXWH garder la cadence ou laisser le cheval s’emballer ? par Guillaume de Maria, Lionel Flairs et JÊrôme Laperruque

0RQWHU XQ JURXSH TXL WLHQW OD URXWH WLHQW GX VSRUW GH WUqV KDXW QLYHDX 'HSXLV TXH MH PH VXLV DXWREDSWLVp )ODLUV F¡HVW OD VL[LqPH IRUPDWLRQ j FH MRXU HW FHOOH FL F¡HVW OD ERQQH MH UHVVHQV TXHOTXH FKRVH GH WUqV VSpFLDO SURFKH GH O¡DPRXU 2Q D IDLW XQ FRQFHUW LQFUR\DEOH OD VHPDLQH GHUQLqUH RQ D MDPPp pendant les balances, si on avait continuÊ on aurait pu Êcrire le GHX[LqPH DOEXP HQ TXHOTXHV KHXUHV HW F¡HVW G¡DLOOHXUV FH TX¡RQ YD IDLUH HQVHPEOH PRL TXL G¡KDELWXGH WUDYDLOOH GDQV une totale solitude. Ce fameux GHX[LqPH DOEXP $SUqV WRXWHV ces annÊes seul devant mon laptop, F¡HVW XQH YpULWDEOH OLEpUDWLRQ TXL V¡DQQRQFH TXH GH VH VDYRLU ELHQ entourÊ.

ENFANT SAUVAGE $XWUH FKRVH TXL PH UHWRXUQH HQ FH PRPHQW F¡HVW OD PXVLTXH GRQW MH m’entoure : pendant un long moment, M¡DL UHIXVp GH UHGHYHQLU Š IDQ ÂŞ SRXU QH pas empiĂŠter sur mon ĂŠcriture... Depuis TXHOTXHV VHPDLQHV MH GpFRXYUH SOHLQ GH JURXSHV GRQW M¡pWDLV SDVVp j F{Wp VXUWRXW GHV YLHLOOHULHV <HOORZ 0DJLF 2UFKHVWUD Can, Human League, ou des plus rĂŠcents comme Kindness (Gee up!, une SHUOH MH FURLV TXH FD YD DXVVL EHDXFRXS LQĂ XHQFHU OD VXLWH (W OHV YLGpRV ELHQ V€U DSUqV Better Than Prince GH -RQDV )UDQoRLV RX Truckers Delight de JĂŠrĂŠmie PĂŠrin, on en tourne une nouvelle en janvier, Radio avec %HQ -XOLD XQ FRXSOH GH UpDOLVDWHXUV LQFUR\DEOHV KDELWDQW j %HUOLQ DYHF HQ guest star PRQ Ă€OV %UXFH TXL WLHQW OH U{OH d’un enfant sauvage de l’espace...—

Live !

Le 27 janvier au Social Club (Paris), le 6 FĂŠvrier Ă Toulon, le 20 mars Ă Stockholm et le 27 mars Ă la Flèche d’Or (Paris).

Retrouvez dans chaque numÊro la chronique de Flairs. Après Sweat Symphony, premier album Êlectro-funk, le trio a composÊ avec Riad Sattouf la bande-originale des Beaux-Gosses dont le DVD vient de sortir chez PathÊ. Il publie un nouveau maxi, Truckers Delight (3rd Side Records), dont le clip pixelisÊ met en scène un routier moustachu très inquiÊtant.

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PLANCHES 7+eÇ75(

VOILĂ€ MAGUY

L’art de la guerre

par MÊlanie Alves de Sousa

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IRUPDWLRQ FODVVLTXH HW ODV G¡XQ FRUSV RXWLO GpVLQFDUQp LOV FKHUFKHQW j VH UHFRQQHFWHU DX UpHO Š ne plus faire uniquement de la dĂŠcoration, du beau, mais trouver le centre, ce qui ĂŠbranle ÂŞ GLW OD GDQVHXVH FKRUpJUDSKH 0DJX\ 0DULQ V¡pORLJQH GHV FRUSV Š LGpDOLVpV ÂŞ TXHVWLRQQH OH SRVVLEOH LQĂ€QL G¡XQ JHVWH MXVTX¡j ĂŠpuisement, expĂŠrimente le ÂŤ comment vivre ensemble, QRXV LFL HW PDLQWHQDQW ÂŞ GpSRVH GHV FULV GHV PRWV VXU VHV SODWHDX[ HW GpUDQJH FHX[ TXL YHXOHQW VDYRLU HVW FH GH OD GDQVH RX GX WKpkWUH " $ 5LOOLHX[ OD 3DSH YLOOH QRXYHOOH GH OD EDQOLHXH O\RQQDLVH R HOOH GLULJH GHSXLV FLQT DQV OH FHQWUH QDWLRQDO FKRUpJUDSKLTXH OD SUREOpPDWLTXH HVW SOXV essentielle : comment inscrire l’art contemporain dans XQ HVSDFH VRFLDO SHX HQFOLQ " ÂŤ C’Êtait une nĂŠcessitĂŠ d’avoir un lieu d’ancrage et d’Êchange pour s’interroger concrètement : comment on s’adresse ? A qui ? ÂŞ ,O D IDOOX rWUH SDWLHQW 0DJX\ 0DULQ VRXULW Š Vous savez, il y a cette phrase de RenĂŠ Char : ÂŤ,PSRVH WD FKDQFH VHUUH WRQ ERQKHXU HW YD YHUV WRQ ULVTXH $ WH UHJDUGHU LOV V¡KDELWXHURQW Âť ÂŞ

Descriptif d’un combat

Conception : Maguy Marin, en ĂŠtroite collaboration avec ses neufs interprètes Compagnie-maguy-marin.fr Du 23 au 27 mars au ThÊâtre de la Ville, Paris TEXTE CHORÉGRAPHIÉ Avec Descriptif d’un combat, WLWUH HPSUXQWp j .DIND 0DJX\ 0DULQ FUpH XQH ULWRXUQHOOH LQFDQWDWRLUH TXL UpYHLOOH OHV JXHUULHUV PRUWV HW QRV PpPRLUHV DPQpVLTXHV )LOOH GH UpIXJLpV HVSDJQROV HOOH prĂŠcise : ÂŤ Il y a une urgence Ă faire ressortir les voix souterraines qui se sont battues et qui sont maintenant enfouies, pour ne pas oublier. ÂŞ (OOH FRQYRTXH OH UpFLW GHV SOXV JUDQGHV ÂąXYUHV pSLTXHV VXU O¡H[LO HQ Ă€O conducteur L’Iliade et l’OdyssĂŠe G¡+RPqUH HW VHORQ ÂŤ une grille de polyrythmie ÂŞ GpĂ€QLH SDU XQ FDOFXO PDWKpPDWLTXH TXL VHXO OXL DSSDUWLHQW GLVWULEXH OD parole aux neuf danseurs. Ce ne sont plus les corps PDLV OH WH[WH TXL HVW FKRUpJUDSKLp 6XU OH SODWHDX UqJQH XQH SpQRPEUH pSDLVVH HW JUDYH /H JURXSH HVW HQ PDUFKH VXU XQ VRO FKDRWLTXH UHFRXYHUW GH FRXFKHV G¡pWRIIHV TXL SURJUHVVLYHPHQW UHWLUpHV KDELOOHURQW OHV FRUSV HW GRQQHURQW VHV FRXOHXUV DX FKDPS GH bataille : bleu, rouge et or. Les cuirasses dĂŠsincarnĂŠes GHV KpURV YDLQFXV MRX[WHQW OHV UREHV VRPSWXHXVHV GHV GpHVVHV TXL OHV SOHXUHQW HW F¡HVW FRPPH VL QRXV QDYLJXLRQV VXU OH 6W\[ Š entre ce passĂŠ et ce futur qui QH FHVVHQW GH Ă€QLU RX GH FRPPHQFHU ÂŞ Âł Š DR

La chorĂŠgraphe MAGUY MARIN divise : Ă la prĂŠsentation de Descriptif d’un combat au festival ImPulsTanz de Vienne, les uns invectivaient ÂŤ dansez ! Âť, les autres s’enfonçaient dans les 3DUPL OHV SLRQQLHUV GH OD QRXYHOOH GDQVH IUDQoDLVH strates de DX GpEXW GHV DQQpHV LO \ D 'RPLQLTXH %DJRXHW la guerre 5pJLQH &KRSLQRW 'DQLHO /DUULHX 3KLOLSSH 'HFRXĂ p de Troie. HW 0DJX\ 0DULQ 3UHVTXH WRXV VRQW LVVXV G¡XQH

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THÉÂTRE

CÔTÉ COUR

Les yeux bleus Isabelle a-vait Quand JAN LAUWERS prĂŠsenta La Chambre d’Isabella au dernier Festival d’Avignon, on entendit rĂŠsonner pendant des jours dans la ville le refrain de la pièce : ÂŤ Just go on and on and on. Âť

Š Maarten Vanden Abeele

par MĂŠlanie Alves de Sousa

La Chambre d’Isabella

de Jan Lauwers Le 16 mars, MC2 de Grenoble Le 27 mai, L’Arsenal de Metz needcompany.org

/H %HOJH -DQ /DXZHUV HVW GLIĂ€FLOHPHQW pWLTXHWDEOH 3ODVWLFLHQ GH IRUPDWLRQ LO HVW DXVVL PHWWHXU HQ VFqQH ² GDQVH HW WKpkWUH VDQV FOLYDJH ² pFULYDLQ FLQpDVWH HW SUHVTXH PXVLFLHQ FHUWDLQHPHQW 6D WURXSH GRQW LO QH VH VpSDUH MDPDLV LO O¡D QRPPpH , QHHG FRPSDJQ\ HOOH UDVVHPEOH GHV SHUIRUPHXUV WRXW DXVVL SRO\YDOHQWV HW GH WRXWHV QDWLRQDOLWpV 6XU OHV plateaux, s’articulent toutes les disciplines pour mieux servir le rĂŠcit : ÂŤ /RQJWHPSV MH PH VXLV PpĂ€p GH OD QDUUDWLRQ M¡XWLOLVDLV OHV LPDJHV OHV fragments et puis j’ai eu envie de choses plus claires, de raconter des histoires. Je suis devenu un narrateur par nĂŠcessitĂŠ puis par goĂťt. ÂŞ (Q crĂŠant La Chambre d’Isabella, -DQ /DXZHUV Q¡DYDLW SDV HQYLVDJp GH VXLWH VRQ SqUH YHQDLW GH PRXULU OXL OpJXDQW XQH LPSRVDQWH FROOHFWLRQ G¡REMHWV DQWKURSRORJLTXHV HW HWKQRORJLTXHV $ OD TXHVWLRQ Š TXRL HQ IDLUH " ÂŞ LO D UpSRQGX Š XQH KLVWRLUH ÂŞ 3OXV WDUG VXLYURQW Le Bazar du Homard puis La Maison des cerfs SRXU IRUPHU XQH WULORJLH VXU OD FRQGLWLRQ KXPDLQH intitulĂŠe Sad Face/Happy Face. TENANCIĂˆRE ROCK’N’ROLL ÂŤ -H VXLV OD Ă€OOH G¡XQ SULQFH GX GpVHUW TXL D GLVSDUX ORUV G¡XQH H[SpGLWLRQ ÂŞ /H UpFLW GH OD YLH G¡,VDEHOOD 0RUDQGL FRPPHQFH SDU XQ PHQVRQJH j O¡LPDJH H[RWLTXH 9LHLOOH IHPPH DYHXJOH DX[ DOOXUHV GH WHQDQFLqUH URFN¡Q¡UROO LQFDUQpH SDU O¡DFWULFH IROOHPHQW LQFUR\DEOH 9LYLDQH GH 0X\QFN ,VDEHOOD UDFRQWH VRQ HQIDQFH GDQV OH SKDUH DYHF GHV SDUHQWV DGRSWLIV DOFRROLTXHV OHV KRPPHV QRPEUHX[ ² Š 73 ÂŞ HOOH GLW GRQW XQ TXL OXL IHUD SHUGUH OD WrWH HW OD YXH ² %XxXHO HW 3LFDVVR TX¡HOOH FURLVH +LURVKLPD XQ MRXU HW VD TXrWH GX SqUH WRXMRXUV 7RXW FHX[ TXL RQW FRPSWp PrPH PRUWV VRQW Oj TXL O¡HQWRXUHQW GDQV VD FKDPEUH SDULVLHQQH HQFRPEUpH GH PLOOLHUV G¡REMHWV YHQXV GH O¡(J\SWH DQFLHQQH HW G¡$IULTXH QRLUH ÂŤ Au bout de quinze ans de travail, un artiste est Ă la recherche de ce grand rĂŠcit qui rassemble ÂŞ FURLW -DQ /DXZHUV 0DLV SDV GH VDQJORWV ORQJV SRXU ,VDEHOOD TXH OD PpODQFROLH DQJRLVVH O¡+LVWRLUH VRPEUH HW OH VLqFOH WUDJLTXH VRQW LFL FpOpEUpV Š Il n’y a pas d’autre chemin, il y a toujours un lendemain Âť FKDQWH W HOOH /D PXVLTXH HVW XQH SXLVVDQWH VpGXFWULFH /DXZHUV HQ DEXVH SHXW rWUH PDLV oD PDUFKH RQ GLW HQFRUH RQ OHV YHXW WRXV IDFH j QRXV j FKDQWHU HQFRUH RQ YHXW OD IRUFH GH FHWWH GLPHQVLRQ FROOHFWLYH TXL FKDQWH WRXV HQVHPEOH RQ YHXW FKDQWHU RQ FKDQWH HW RQ FRQWLQXH j FKDQWHU Š Just go on and on and on. ÂŞ Âł

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PLANCHES 7+eÇ75(

PETITES ANNONCES

Au thÊâtre ce soir

Deux spectacles et un festival à ne pas louper DORUV TXH O¡KLYHU QRXV dÊvore. sÊlection MÊlanie Alves de Sousa

Le souffle Vanves

Ce fut l’une des surprises du dernier )HVWLYDO G¡$XWRPQH 2Q D VHQWL notre oreille se tendre, ĂŠtonnĂŠ par XQH ODQJXH DX U\WKPH SDV KDELWXHO Notre terreur rejoue, autour d’une grande table de confĂŠrence, cette FRXUWH SpULRGH R OD )UDQFH HQ SOHLQH UpYROXWLRQ I€W GLULJpH SDU XQ FRPLWp GH VDOXW SXEOLF j VD WrWH 5REHVSLHUUH HW GHV KRPPHV j ERXW GH IDWLJXH TXL Ă LUWHQW DYHF OH GHVSRWLVPH HQ KXUODQW OLEHUWp &HV MHXQHV FRPpGLHQV RQW IDLW YÂąX GH crĂŠation collective et travaillent l’improvisation, inventant le rĂŠcit DX IXU HW j PHVXUH GHV UpSpWLWLRQV HW laissant sur le plateau la place aux malentendus. Les prises de paroles VH FKHYDXFKHQW GHV SKUDVHV VRQW FRPPHQFpHV VDQV MDPDLV rWUH WHUPLQpHV DORUV RQ V¡\ FURLUDLW SUHVTXH

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12 Festival ArtdanthĂŠ e

52 spectacles/40 compagnies/ 16 crÊations/3 focus/2 rÊsidences ThÊâtre de Vanves Du 25 janvier au 27 mars

Schizo Schnitzler $SUqV XQ F\FOH GH FRPpGLHV OpJqUHV OD FRPSDJQLH 7* 6WDQ H[SORUH HQ FLQT DFWHV OHV SDVVLRQV KXPDLQHV OHXUV PHQVRQJHV HW OHXUV WUDKLVRQV avec Le Chemin solitaire G¡$UWKXU 6FKQLW]OHU 'HSXLV YLQJW DQV FH collectif anversois a mis en place XQH PpWKRGH SUHVTXH GHYHQXH XQ ODEHO TXL QRXV GpVKDELWXH GHV FRGHV GH MHX FODVVLTXHV HW RSqUH XQH GHVWUXFWLRQ GH O¡LOOXVLRQ WKpkWUDOH 6XU XQ VRO HQ SODVWLTXH EODQF GHV REMHWV GX TXRWLGLHQ HW TXHOTXHV ERXUJHRLV YLHQQRLV TXL DSUqV DYRLU menti toute une vie, ne peuvent plus garder leur secret. Comme dans Cet Obscur objet du dÊsir de %XxXHO OHV rWUHV VRQW K\EULGHV HW UHQGHQW VFKL]RSKUqQHV OHV DFWHXUV TXL LQWHUYHUWLVVHQW OHV U{OHV

Notre terreur

Le Chemin solitaire

Mise en scène Sylvain Creuzevault & collectif D’Ores et dĂŠjĂ Nouveau thÊâtre d’Angers Du 17 au 25 mars

Texte d’Arthur Schnitzler Un spectacle de et avec la compagnie TG Stan TG Stan fête ses vingt ans, les dates sur stan.be

Š MARINE FROMANGER/RACHEL GARCIA/THOMAS WALGRAVE

Anarchie sous perruque

A cĂ´tĂŠ de Paris il y a Vanves. A Vanves il y a un thÊâtre. Au thÊâtre de Vanves il y a un directeur dont toujours on entend dire de lui : il est curieux, il est passionnĂŠ, il est honnĂŞte. JosĂŠ Alfarroba Ă la cote avec les artistes qu’il aime rencontrer au bistrot. Son grand intĂŠrĂŞt pour la scène ĂŠmergente lui fait prendre des risques rares pour l’institution qu’il dirige. En 1998 il crĂŠĂŠ le festival de danse contemporaine ArtdanthĂŠ, un espace de libertĂŠ ouvert aux expĂŠrimentations radicales qui accueille artistes confirmĂŠs et jeunes compagnies du monde entier. Vanves c’est au bout de la ligne 13 sur votre plan de mĂŠtro !

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Carte blanche

DĂŠni d’initiĂŠs '¡HVFDOH DX 0H[LTXH QRWUH duo de auteurs-metteurs HQ VFqQH IDYRUL GLVVqTXH sa nouvelle hypothèse, LE DÉNI COMME FONDEMENT DES COMPORTEMENTS OCCIDENTAUX. par Allio-Weber

9RXV rWHV j 0H[LFR HW YRXV FKHUFKH] XQ DFWHXU PH[LFDLQ 2Q YRXV GHPDQGH VL YRXV SHQVH] j XQ DFWHXU LQGLHQ RX j XQ DFWHXU EODQF %LHQ V€U TX LFL YRXV SHQVH] j OD FRXOHXU GH SHDX GHV DFWHXUV HW DX VW\OH GH OHXUV WUDLWV HW j WRXW FH TXH FHOD UHSUpVHQWH 9RXV Q¡RVH] SDV HQ IDLUH XQ FULWqUH DVVXPp 9RXV YRXV VHQWH] VRXGDLQ DXVVL VWXSLGH TXH FHX[ SRXU TXL HQ )UDQFH OD VLPSOH SHUVSHFWLYH GHV VWDWLVWLTXHV HWKQLTXHV est une transgression scandaleuse. Les distinctions selon l’origine et la couleur de la peau sont partout prĂŠsentes, mais dans OHV GpPRFUDWLHV VXSSRVpHV rWUH OHV SOXV progressistes, on fait gĂŠnĂŠralement mine de QH SDV O¡DYRLU UHPDUTXp 0DOJUp FH TXH QRXV FUR\RQV rWUH QRWUH JUDQGH OXFLGLWp QRXV VRPPHV pJDOHPHQW WRPEpHV GDQV FH SLqJH LE SPECTATEUR INTIMEMENT DIVISÉ '¡R FHWWH K\SRWKqVH OH GpQL Q¡HVW il pas au fondement de la plupart des FRPSRUWHPHQWV RFFLGHQWDX[ " '¡R FH SURMHW IDLUH XQ WKpkWUH TXL FRQVLVWHUDLW j GpEXVTXHU GDQV QRV ORJLTXHV RUGLQDLUHV WRXW FH TXL SHXW V¡\ UDWWDFKHU '¡R FHW HIIHW : un spectateur occidental ne devrait jamais rWUH FRPSOqWHPHQW j O¡DLVH DYHF OXL PrPH ORUVTX¡LO DVVLVWH j FH JHQUH GH VSHFWDFOH 1RXV VRPPHV ORLQ G¡XQ WKpkWUH TXL ODLVVH OH VSHFWDWHXU LQGHPQH HQ OH FRQYLDQW j VH SHQVHU GX F{Wp GHV YLFWLPHV RX GH FHX[ TXL rĂŠsistent courageusement. Lever un dĂŠni, F¡HVW G¡DERUG V¡H[SRVHU VRL PrPH j XQH pSUHXYH FULWLTXH &HWWH PLVH j O¡pSUHXYH YDXW j OD IRLV SRXU OHV DXWHXUV HW SRXU les spectateurs. Cela suppose ensuite G¡LQYHQWHU XQ GLVSRVLWLI R FH UDSSRUW DX dĂŠni va s’effriter. Dans ce dispositif, c’est QRWUH FRPPXQH IUDJLOLWp TXL HVW HQ MHX

&HOD VXSSRVH HQĂ€Q GH YpULĂ€HU O¡LPSDFW GH FH GLVSRVLWLI ORUVTXH OD UHSUpVHQWDWLRQ RX OD SHUIRUPDQFH RQW OLHX &RPPHQW " (Q pFRXWDQW FH TXH OH VSHFWDWHXU SHXW HQ GLUH 6¡HVW LO UHFRQQX GDQV FH GpQL " $ W LO pSURXYp TXHOTXH FKRVH FRPPH XQ UHQYHUVHPHQW GH VRQ SRLQW GH YXH " 6H VHQW LO WUqV LQWLPHPHQW GLYLVp " VACILLEMENTS 5pFHPPHQW QRXV DYRQV DLPp YLYUH FHWWH expĂŠrience de spectatrices : dans Made in Paradise, le performer 2PDU *KD\DWW UDFRQWH OH 6HSWHPEUH GX SRLQW GH YXH pJ\SWLHQ HQ LQYHVWLVVDQW OHV SUpMXJpV occidentaux les plus ordinaires sur les PXVXOPDQV ,O UDFRQWH TXH FH MRXU Oj HQ (J\SWH LO \ DYDLW XQH OLHVVH GDQV OHV UXHV HW TX¡LO pWDLW IRX GH MRLH 1RXV OH FUR\RQV QRXV VRPPHV HQ SOHLQ FKRF GHV FLYLOLVDWLRQV 2PDU *KD\DWW GHPDQGH DX VSHFWDWHXU V¡LO D YUDLPHQW FUX j FH UpFLW FRPSOqWHPHQW LQYHQWp &H VRQW FHV PRPHQWV GH YDFLOOHPHQW TXH QRXV FKHUFKRQV j YLYUH HW j FUpHU FDU FH Q¡HVW TX¡DX SUL[ GH FHWWH LQTXLpWXGH SDUWDJpH TXH QRXV SRXYRQV encore parler de spectacle vivant. — Made in Paradise

de Yan Duyvendack. Les 15 et 16 janvier à Arles, les 18, 19, 20 à Nantes (Lieu Unique), les 28 et 29 à Rouen (Scène Nationale du Petit-Quevilly) et les 4 et 5 fÊvrier à Genève, ThÊâtre du Grßtli

Retrouvez dans chaque numĂŠro la chronique de Patricia Allio et ElĂŠonore Weber. Leur spectacle Un inconvĂŠnient mineur sur l’Êchelle des valeurs, crĂŠĂŠ Ă la Grande Halle de la Villette 2008 puis, dans une seconde version Ă la MĂŠnagerie de verre l'annĂŠe suivante, sera repris du 15 mars au 3 avril au ThÊâtre de la Villette Ă Paris.

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RETRO PHOTOGRAPHIE

 C’est un cauchemar de shooter chez vous 

de

ens age

Pause-image pour MARTIN PARR, 57 ans, qui termine le tour du monde de l’exposition Luxe dont il prĂŠsenta le livre Ă Paris, avant de retrouver l’Angleterre pour curater le festival The Brighton Photo Biennale. entretien Librairie Artazart, au bord du canal Saint-­Martin, un Magali Aubert soir de novembre. Martin Parr arrive avec une attitude

FRQYLHQQHQW &RPPH G¡DLOOHXUV Q¡LPSRUWH TXHOV VHQWLPHQWV GX PRPHQW TX¡LOV VRLHQW PL[pV HW que son sourire voulait nonchalante et en tenue de SURYRTXHQW O¡DPELJXLWp 0HV SKRWRV SHXYHQW rWUH OXHV gentleman farmer, on lui sert une thĂŠière. Un homme GH WRXWHV OHV PDQLqUHV VL DX Ă€QDO RQ UHVVHQWH XQH commun, trahi par le regard qu’il promène sur la DPELJXLWp 7RXW HVW Oj Ă€OH G¡DWWHQWH YHQXH SRXU OD VLJQDWXUH GH VRQ GHUQLHU C’est le mot-­clĂŠ de votre d’humour ? livre Luxe, avec le dĂŠtachement amusĂŠ et l’empathie 2XL RX O¡LURQLH 0DLV HQ IDLW SRXU PRL O¡LURQLH HVW distanciĂŠe que l’on connaĂŽt de ses photos. Sommes-­nous GLIIpUHQWH GX VHQV GH O¡KXPRXU VXIĂ€VDPPHQW FULDUGV HW RUGLQDLUHV SRXU captiver son Seriez-­vous l’inventeur de l’empathie ironique ? Ĺ“il ? Combien de clics a imaginĂŠ ce photographe qui >5LUHV@ -H FURLV TXH MH Q¡DL ULHQ LQYHQWp GX WRXW dĂŠteste la mise en scène avant de prendre place Ă sa Alors comment expliquez-­vous l’engouement pour table apprĂŞtĂŠe – drapeau anglais, joueur de cornemuse vos photos ? HQ NLOW HW ERLV GH FHUIV GRUpV " 6HUDLW FH KRQRULĂ€TXH -¡DL WURXYp PD YRLH /D VHXOH FKRVH TXH M¡DL SX ou insultant d’être captĂŠ par son viseur aussi aiguisĂŠ LQYHQWHU F¡HVW PRL PrPH DX Ă€O GX WHPSV /¡XQH GHV qu’authentique ? Avec un peu d’humilitĂŠ, ce serait un FDUDFWpULVWLTXHV GHV $QJODLV F¡HVW TX¡LOV QH SHXYHQW orgueilleux privilège. jamais parler d’eux sans avoir peur de passer pour Combien de temps aurons-­ TXHOTX¡XQ GH SUpWHQWLHX[ nous pour l’interview, L’inverse de la Monsieur Parr ? population de Luxe ! ÂŤ Aucun chroniqueur ÂŤ /H WHPSV TX¡LO IDXW WDQW Ces riches qui, voulant d’art anglais ne parle TXH FH Q¡HVW SDV WURS ORQJ Âť se distinguer, se de mes expos. Âť Evidemment, c’Êtait trop ressemblent tous‌ Martin Parr court. 2XL &HV JHQV VH ressemblent, et dans WRXV OHV SD\V /HV PrPHV PDUTXHV GH YrWHPHQW Aimez-­vous mettre des mots sur votre travail ? XQH ERLVVRQ HW XQ FKDSHDX O¡XQLIRUPH VWDQGDUG /H Martin Parr : Pas vraiment. Je n’aime pas faire des PRQGH HQWLHU HVW VWpUpRW\Sp GH WRXWHV IDoRQV SKUDVHV G¡LQWURGXFWLRQ VXU PHV SKRWRV TXH MH WURXYH C’est affreux pour un photographe, non ? DVVH] SDUODQWHV $X FRQWUDLUH oD P¡LQVSLUH G¡DXWUHV SURMHWV Vous avez pourtant un blog* avec pas mal de rĂŠjouissants. La standardisation, ou l’uniformisation, texte‌ HVW XQ FKDQJHPHQW FRPPH XQ DXWUH $ OD IRLV WULVWH HW &¡HVW GLIIpUHQW M¡\ pFULV VXU FH TXH MH YHX[ >KXLW posts MR\HX[ GH QRXYHDX O¡DPELJXLWp GHSXLV GRQW OH UpFLW G¡XQH GHVFHQWH G¡DYLRQ HQ Quelle classe sociale ĂŠprouvez-­vous le plus de XUJHQFH HW GHV FRQVLGpUDWLRQV KXPDQLWDLUHV@ MH SHX[ plaisir Ă photographier ? HQWUHU GDQV OHV GpWDLOV HW VXUWRXW oD Q¡D ULHQ j YRLU -¡DL XQH JUDQGH FRPSDVVLRQ SRXU WRXWHV (W M¡DL DYHF PHV H[SRVLWLRQV 9RXV Q¡\ WURXYHUH] ULHQ VXU Luxe WUDYDLOOp DXWRXU GH FLQTXDQWH DXWUHV WKqPHV SDUPL par exemple. OHVTXHOV LO P¡HVW pJDOHPHQW LPSRVVLEOH GH FKRLVLU 0HV Comment vous parvenez Ă cette ĂŠmotion SKRWRV VRQW FRPPH PHV HQIDQWV ĂŠtrangement situĂŠe entre la compassion et la D’oĂš vient votre intĂŠrĂŞt pour les loisirs ? moquerie que procurent vos photographies ? Le temps consacrĂŠ au divertissement ou au tourisme $K 0RTXHULH et FRPSDVVLRQ " /HV GHX[ PH

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PHOTOSYNTHÈSE

Portrait de Martin Parr à la manière de Julian Opie

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RETRO PHOTOGRAPHIE

Martin Parr quicksnappĂŠ

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HVW XQH JUDQGH SDUW GH FH TX¡RQ IDLW GRQF GH FH TX¡RQ HVW 0DLV HQFRUH XQH IRLV HQ TXDUDQWH DQV GH FDUULqUH MH Q¡DL SDV IDLW TXH oD HW M¡HQYLVDJH WUqV ELHQ de travailler un jour sur le monde ouvrier. Allez, avouez : les mondains de Luxe, vous les dĂŠtestez ! 1RQ QRQ -H OHV DGRUH HW OHV GpWHVWHQW WRXV 9RXV DXUH] compris comment je fonctionne avec les sentiments contradictoires. Vous n’avez jamais eu de problèmes avec vos ÂŤ modèles Âť ? 7UqV SHX HW FH Q¡HVW MDPDLV DOOp MXVTX¡DX WULEXQDO 3RXU XQH SHUVRQQH j 'XEDw HW XQH DXWUH HQ $OOHPDJQH on D G€ VXSSULPHU OHV SKRWRV GH O¡H[SRVLWLRQ D’ailleurs, il Q¡\ D TX¡HQ )UDQFH TX¡RQ HVW REOLJp GH IDLUH VLJQHU GHV SDSLHUV &¡HVW XQ FDXFKHPDU GH shooter FKH] YRXV Etes-­vous plus sensible aux couleurs ou Ă la composition ? La couleur est plus importante pour moi. Le cadrage HVW MXVWH XQ PR\HQ GH PHWWUH HQ YDOHXU FH TX¡RQ SHQVH rWUH LPSRUWDQW GDQV O¡LPDJH Au vu des collections prĂŠsentĂŠes lors de votre exposition au Jeu de Paume cet ĂŠtĂŠ, question pratique : oĂš stockez-­vous tous ces objets ? -¡DL XQH WUqV JUDQGH PDLVRQ HW MH QH PHWV ULHQ GDQV des cartons. Je suis en train de faire construire un KDQJDU SRXU PLHX[ OHV HQWUHSRVHU TXDQG OD WRXUQpH mondiale sera terminĂŠe. Ce besoin d’amasser rejoint-­il celui du photographe : arrĂŞter le temps ? Les deux sont effectivement similaires, mais ce n’est SDV SRXU oD TXH MH SUHQGV GHV SKRWRV (Q DSSX\DQW VXU OH GpFOHQFKHXU MH Q¡HVVDLH SDV G¡DUUrWHU OH WHPSV SXLVTXH OH FOLFKp OH IDLW GH OXL PrPH -H OH IDLV SRXU LQWHUSUpWHU OD YLH PRGHUQH HQ LPDJHV 4XDQG DX[ collections, c’est devenu une maladie. Parce que vous trouvez ces objets intĂŠressants ? ,QWpUHVVDQWV PDJQLĂ€TXHV DIIUHX[ WRXW FH TXH YRXV YRXOH] -H QH SHX[ SOXV P¡HQ HPSrFKHU FRPPH XQ DGGLFW j O¡KpURwQH RX j O¡DOFRRO Quelle importance accordez-­vous Ă la technique ? -H WUDYDLOOH DX QXPpULTXH HW M¡DGRUH WHVWHU OHV QRXYHOOHV WHFKQRORJLHV /¡DUJHQWLTXH UHVWHUD OD SDVVLRQ DUWLVWLTXH GH TXHOTXHV XQV PDLV GDQV YLQJW DQV F¡HVW Ă€QL Vous arrive-­t-­il de prendre des photos avec votre tĂŠlĂŠphone ? 2XL PDLV SDV EHDXFRXS -H QH OHV XWLOLVH SDV HQ

JpQpUDO 2Q D EHDXFRXS SURJUHVVp PDLV LO \ D HQFRUH j faire dans ce domaine. Vous ĂŞtes sensible au cĂ´tĂŠ low tech de certains clichĂŠs ? Welcome j WRXW oD -¡LPDJLQH WUqV ELHQ TX¡XQ quick snapper SXLVVH GHYHQLU FpOqEUH JUkFH j VRQ EORJ '¡DLOOHXUV OD SKRWR OD SOXV FpOqEUH VXU OD JXHUUH G¡,UDN D pWp SULVH DYHF XQ WpOpSKRQH La guerre, que vous vous interdisez de photographier, n’est-­ce pas ? Je ne pense pas en termes nĂŠgatifs donc je ne P¡LQWHUGLV ULHQ -H IDLV XQLTXHPHQW FH dont j’ai envie. (W MH Q¡DL SDV HQYLH GH SKRWRJUDSKLHU WURLV FKRVHV OD guerre, la famine et les maladies. Comprenez-­vous que la photographie, pourtant sollicitĂŠe par le public, ne soit pas acceptĂŠe comme une discipline d’ art contemporain Âť ? &¡HVW VD FDUDFWpULVWLTXH OH SXEOLF IDQ OHV LQVWLWXWLRQV PRLQV ,O Q¡\ D SDV G¡H[SOLFDWLRQ j SDUW TXH F¡HVW XQ DUW WUqV GpPRFUDWLTXH 0DLV YRXV Q¡DYH] SDV O¡DLU GH YRXV UHQGUH FRPSWH FRPELHQ YRXV rWHV FKDQFHX[ HQ )UDQFH (Q $QJOHWHUUH HOOH HVW SUDWLTXHPHQW LJQRUpH par l’establishment. &¡HVW XQ SD\V SOHLQ GH PRWV HW GH PXVLTXH HW GHSXLV SHX G¡DUW FRQWHPSRUDLQ PDLV OD SKRWR QRQ (OOH Q¡HVW SDV SULVH DX VpULHX[ HW Q¡D SDV GH VWDWXW $XFXQ FKURQLTXHXU G¡DUW QH SDUOH GH PHV expos, par exemple. Comment se renouveler en gardant un style ? /H UHQRXYHOOHPHQW VH IDLW DXWRPDWLTXHPHQW SDU O¡H[FLWDWLRQ TXH MH UHVVHQV HQ SKRWRJUDSKLDQW FH TXH MH Q¡DL MDPDLV SKRWRJUDSKLp 4XDQW DX VW\OH MH Q¡\ SHQVH SDV SDUFH FH TXH VL MH SUHQGV XQH SKRWR FH VHUD XQH SKRWR GH 0DUWLQ 3DUU J’en veux une ! Combien coĂťte la moins chère ? ,O IDXW GHPDQGHU j OD JDOHULH .DPHO 0HQQRXU mon point de vente en France. Je ne vends rien GLUHFWHPHQW FDU MH SURWqJH PRQ dealer. Referez-­vous un jour du noir et blanc ? Never again. — * martinparr.com

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MARTIN PARR

LE LIVRE

Une Parr de poésie Ce qui est passionnant pour l'amateur de photographies devant ces gros plans de churros roses, de bouteilles de ketchup sales, de casquettes NY sur têtes burinées (le peuple de la série Mexico), ces plans larges sur coupes de Cherry, couronnes dentaires, Rolex et Vertu (les jet-setters de Luxe), c’est le zoom ajusté sur cette ère sacrificielle dont il est lui-même le consommateur en instance de béatification. Où s’arrête le bon goût, où commence le mauvais ? La graisse, les fruits sous plastique, les pantoufles, la viande grillée, les cuir-chevelus… De cette outrance colorée du quotidien international, Martin Parr a fait, l’humour en plus, ce que Rimbaud avait fait du mot « wagon » : il en a le premier crée l’usage. M. A. Luxe

Textuel 114 pages, 35 euros

« J’imagine très bien qu’un quick snapper devienne célèbre grâce à son blog. » Martin Parr

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Numéros lecteurs

« Burning down the house » 1st in a series of 10 ©D. G.

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