La cagoule

Page 1

Source : « La Cagoule ; histoire d’une société secrète du front populaire à la 5° république », Philippe Bourdrel, Editions Albin Michel, 1970 Jean Filliol : arrêté le 13 décembre 1932 au cours d’une manifestation aux abords de la chambre des députés ; arrêté le 9 janvier 1934 en pleine affaire Stavisky ; arrêté le 6 mars 1935 près de la salle Wagram à l’occasion d’une réunion des objecteurs de conscience ; arrêté le 8 octobre 1935 au cours d’une manifestation parisienne de l’AF en relation avec le conflit italo-éthiopien ; il participe avec Corrèze le 13 février 1936 à une provocation cagoularde qui se solde par une agression contre Léon Blum ; arrêté le 9 juin 1936 devant le siège de la compagnie d’assurance l’Abeille, à la veille d’une perquisition au siège du PNR, où il vient tabasser des ouvriers en grève avec une douzaine de ses amis. Filliol est très aimé de ses militants de la 17° équipe ; c’est l’auteur majeur des exécutions de la Cagoule ; il est originaire de Bergerac, et est un ancien élève du lycée d’Angoulême ; il est ensuite entré aux Messageries Hachette, mais ce travail n’est qu’une façade ; il porte constamment sur lui un revolver (réputation exagérée mais pas sans fondements) et manie la baïonnette avec dextérité. Fin mai 1937, Filliol et sa femme Alice gagnent l’Espagne après l’assassinat des frères Rosselli. Eugène Deloncle : à la tête de la Cagoule, polytechnicien, un des maîtres conspirateurs de son époque, né de parents corse et gascon ; son père est un capitaine au long cours, mort sur son vaisseau le « Bourgogne » en 1898 ; sa mère reste veuve avec 4 enfants ; semble passer son enfance « en Gascogne » ; il finit ses études au lycée Hoche à Versailles où il se révèle extrêmement doué. Il sort de Polytechnique en 1912. il est matelot pendant son service militaire, ingénieur stagiaire à l’école de génie maritime, puis il s’engage dans l’armée avec le cadre de sous-lieutenant d’artillerie. Blessé, il est évacué du front le 28 septembre 1915 et est rappelé à l’école de génie maritime. Il est le premier de sa promotion en 1916 et retourne aux armées dès l’année suivante malgré l’opposition du ministre de la marine. Il sert alors dans l’armée d’Orient comme officier d’Etat-major de son oncle, le général Grossetti. En 1922, il démissionne de ses fonction d’ingénieur du génie maritime. Ingénieur aux chantiers et ateliers de Saint-nazaire et de Penhoët, il devient expert près la cour d’appel de Paris pour les questions de navigation et siège comme administrateur de 9 sociétés : le comité technique du bureau Veritas, le comité central des armateurs de France, le groupe des constructeurs français de réservoirs, la standard française des pétroles, les chantiers de Hollande, la société de pêche au large, la société nouvelle gérance maritime, la compagnie des constructeurs associés pour le montage d’ouvrages métalliques, la caisse hypothécaire maritime et fluviale. Il est ainsi doué d’une situation financière très confortable. Marié à Mercedes, il partage sa vie entre son appartement parisien et sa villa du Touquet. Dans le même temps il adhère à l’AF et au cercle Jacques Bainville, et tout en continuant à être administrateur de 9 sociétés, rejoint les camelots du roy dès que son chef de groupe, Filliol, l’appelle. Travailleur acharné, il ne dort que 4 heures par nuit. Féru d’ésotérisme. C’est en 1934 qu’il entame réellement son activité cagoularde. Rapidement, il tombe en désaccord avec les dirigeants de l’AF, quand celle-ci veut s’en tenir à l’utilisation de moyens légaux. Essentiellement opposé aux juifs, à la franc-maçonnerie, aux communistes (aux bolcheviques plus précisément). La Cagoule a de profonde ramifications en province et nous savons par Raymond Lainey que l’Etat-major de Paris se tenait en liaison avec les responsables régionaux au moyen de « correspondances chiffrées ». il paraît que la Sûreté nationale sera mise en difficulté par ce système de codage pour remonter les filières provinciales. Les 7 grandes régions sont : Bordeaux, Toulouse, Marseille, Nice, Orléans, le Nord et l’Est. Les groupes sont extrêmement fractionnés et largement autonomes les uns par rapport aux autres, ce qui a permis de limiter les dégâts lors des arrestations parisiennes. Chaque groupe constitue une société secrète plus ou moins autonome, une contre-maçonnerie. Le problème des relations entre le mouvement du colonel De La Rocque et la cagoule préoccupe son dirigeant : de la Rocque met en garde ses militants ; le 19 février 1938, en visite à Angoulême, De La Rocque croit utile de déclarer à l’assistance : « je dévoilerai des noms si l’intérêt du pays l’exige… » ; le petit parisien publie le 22 février 1938 une mise au point sur cet évènement : « après avoir rappelé à ses adhérents qu’un grand nombre d’entre eux ont été sollicités d’entrer dans des organisations dangereuses [...] le colonel de la Rocque a conclu : ‘’ [...] je ne peut croire [...] qu’il n’y ait, au-dessus des personnages de seconde zone actuellement emprisonnés, de plus hauts responsables, conseillers, protecteurs. Je ne peux croire que le gouvernement les ignore. Faudra-t-il exiger [...] toute la vérité sur les instigateurs, les bailleurs de fonds ? Si l’intérêt général l’exige, le PSF n’y manquera pas…’’ » interrogé le 2 mars 1938 par le juge Béteille, De La Rocque lui répond : « je suis scandalisé qu’on ne veuille faire aucun effort pour les chercher, les trouver, les faire connaître à l’opinion publique. Il est évident que cet armement a correspondu à des dépenses formidables. J’ai le droit de le dire et je le dis ». « Près de La Rochelle, deux petites caisses contenant 450 cartouches de mitrailleuses… [...] des perquisitions ont été faites chez Mr Geanty, représentant de commerce, avenue de Nangeot à Limoges et chez une autre personne, révèle la presse le 4 décembre 1937. ces perquisitions ont abouti à la découverte d’une trentaine de fusils et d’une quinzaine de revolvers ou de mitraillettes, matériel moderne [...] Mr Geanty a affirmé qu’il s’agissait d’armes d’origines et de modèles différents qu’il collectionnait et déclaré qu’il n’appartenait à aucune association » Les enfants d’Auvergne : c’est un des groupes régionaux de la Cagoule ; derrière l’intitulé folklorique se cache une organisation dont l’ambition est de mettre sur pied « un plan de défense anticommuniste » ; on y trouve François Méténier, Marcel Mouget, Gustave Vauclard et Henri Voguel, René Locuty. Cagoule Militaire – UCAD à Bordeaux : à Bordeaux, c’est Roger Orain qui est le chef de la région sud-ouest de la Cagoule. Orain est représentant de commerce ; son rôle est confirmé par Aristide Corre, qui le désigne comme l’organisateur du trafic d’armes à travers les Pyrénées. Orain voyage effectivement beaucoup, muni comme Deloncle et d’autres d’un faux-passeport ; le groupe du sud-ouest sera associé à une série de sabotage. Avec Roger Orain ou parallèlement, la Cagoule dispose d’un chef de poids en la personne du colonel Robert Franc ; Robert Franc a comme de nombreux cagoulard, un « brillant » passé militaire, notamment dans l’aviation ; installé à Bordeaux en 1919 avec sa famille, il y exerce la « profession » d’industriel ; arrêté en 1944, il y évoque ainsi son engagement dans la Cagoule : « jusqu’en 1934, je n’ai eu aucune activité politique ; à cette époque, je me suis inscrit aux Croix de Feu [...] mon but et mes désirs étaient de contrecarrer le danger communiste du moment [...] j’ai assisté aux différentes réunion, tant à Bordeaux que dans la région. En 1936, lors de la dissolution des Croix de Feu [...] je me suis inscrit au PSF. Je n’ai eu aucune activité au sein de ce nouveau parti [...] en 1937, j’ai adhéré à l’Union républicaine populaire, dirigée par Philippe Henriot, sur l’invitation de nombreux amis. Je suis resté inscrit à ce parti jusqu’à sa dissolution en 1940. je n’ ai eu aucune activité ». Robert Franc était entré auparavant en relation avec le général Duseigneur, et adhère ainsi aux UCAD : « à la suite des élections de 1936 et après que le général Duseigneur eut quitté le ministère de l’Air, je fus sollicité par cet officier supérieur, qui était mon compagnon et ami de guerre, pour organiser dans la région les groupes de l’UCAD. J’ai accepté cette offre et ai été nommé délégué régional. J’ai organisé les dits groupes par dizaines


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.