Art ère N°9, 2021

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N°9, 2021

artère Sous la direction complice de benoit breton

“ À l’œuvre, on connaît l’ouvrier ”, au travers de cette citation, Aristophane expose l’idée que chaque artiste possède une empreinte qui fait de son travail une œuvre (un art) unique. Depuis le début de l’histoire de l’Homme, les artistes ont toujours cherché à faire reconnaître leurs talents en se démarquant au travers des récurrences artistiques : des similitudes qui vont promouvoir leurs différences. L’écriture de l’artiste devient une marque de fabrique, et cette signature un gage de l’originalité de chaque créateur.


Par Marlone Riodin & Lizguê Sener

Introduction Né en Chine en 1962, Yue Minjun est un peintre et sculpteur principalement connu pour ses autoportraits. L’artiste est reconnaissable entre mille ; en effet contrairement à certains artistes Yue Minjun n’est pas subtil quant à son empreinte. Le grand sourire et la couleur rose de son personnage lui donnent une signature inimitable. Cette dernière est visible et identifiable par tous, de plus son utilisation de l’autoportrait le lui permet également.

Le pouvoir du sourire Yue Minjun qui est aussi surnommé « l’homme qui rit », a réussi à créer une véritable empreinte dans son art. En effet, il met en avant des personnages possédant des visages roses vifs, une bouche démesurément ouverte par un rire qui laisse apercevoir des dents blanches bien alignées

comme dans l’alignement impeccable des touches d’un piano. Ce sourire est une pièce fondamentale dans ses peintures, une signature, qui apparaît dans toutes ses oeuvres. C’est ce qui lui permet d’être identifiable aux yeux de tous. Le fait d’accentuer les éclats de rire et les bouches

grandes ouvertes donnent une image frappante. De plus, les sourires sont tellement forcés que les yeux en sont fermés comme des volets. Ces visages ne regardent pas car ils n’ont rien à regarder. Le recours au rire a plus de force que des regards selon l’artiste. Il utilise aussi l’autoportrait qui peux être également considéré comme une empreinte. En effet, ses portraits sont d’abord inspirés

«Je suis un artiste vulgaire» par ses amis et se fondent peu à peu dans un seul et même visage, celui de Yue Minjun, qui reflète les miroirs de ce que chacun veut y voir. Pour lui, reproduire systématiquement son visage, pouvait faire passer beaucoup de choses. Le fait d’accentuer les éclats de rire et les bouches grandes ouvertes donnent une image frappante.

@ Yue Minjun, Salute


Dans l’ombre du sourire Yue Minjun fait partie d’un courant d’art contemporaine connu depuis les années 90, le réalisme cynique, cette forme d’art remet en question les idées politiques et sociales en Chine lors de la révolution culturelle (1966-1970).Ce courant permet aux artistes Chinois d’avoir un regard critique sur la société. C’est comme ça que l’artiste va à partir d’un sourire, qui est une expression du visage qui nous ramène naturellement à quelque chose de positif et de joyeux, va nous apporter une tout autre approche de cette expression faciale.

À travers ce sourire faussement joyeux il dénonce la société dans laquelle il vit, marqué notamment par la répression militaire. C’est une manière pour lui de représenter sa souffrance, ses douleurs mais aussi son positionnement politique de manière radicale. Pour faire entendre sa voix il va

tant que telle et non pas la question de la signification inhérente aux images de propagande.

donc utiliser « le rire comme une arme » car pour lui elle est beaucoup plus subtile. Il explique d’ailleurs lui-même avoir trouvé « une forme comique pour dénoncer quelques choses de tragique  ». Les tableaux de Yue Minjun sont supposés mettre mal à l’aise le spectateur, avec une couleur de peau rose aussi exagérée que

le sourire, un sourire large qui crispe le visage. La répétition de cette même expression faciale synonyme de joie laisse rapidement place à l’angoisse Toutefois, l’artiste ne souhaite pas faire de son art une activité de propagande. L’iconographie de ces peintures soulève plus la question de l’image en

«Je ne cherche pas l’élégance»

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Murakami Par Marie Barrault & Julien Thige

le Warhol japonais Takashi Murakami est un artiste japonais et l’un des plus influents qu’on ait pu voir depuis plusieurs dizaines d’années. Son art va de l’iconographie bouddhiste à la peinture zen en passant par l’art « kawai ».

ses collaborations Cette ouvre représente le personnage phare de l’art de Takashi Murakami, Aya, mais aussi l’une des figures emblématiques de la maison de luxe, Gaston Louis Vuitton. Cette contribution de la part de Murakami l’inscrit réellement dans la société en tant qu’artiste commercial. Cependant, Takashi Murkami s’est également tourné vers des marques de grandes consommations, telles que Perrier, sa dernière collaboration. Lancée au mois d’octobre, deux bouteilles de formats différents (33cl et 75cl) ont été sérigraphiées en édition limitées par des créations originales de Takashi Murakami. Il met en scène deux de ses personnages préférés, Kiki et Kaikai, parmi ses fleurs souriantes aux couleurs vives. Encore une fois, Takashi Murakami fait disparaître la frontière entre la haute et basse culture, devenant le lien entre l’art commercial et l’Art.

Takashi Murakami est l’un des rares artistes à avoir autant collaboré avec des marques, que ce soient des maisons de luxe, des marques de grandes enseignes ou bien encore avec d’autres artistes. Sa collaboration la plus récente avec un artiste date de juin dernier, il s’agit du projet Kids See Ghosts, une émission lancée par Kid Cudi. La participation de Murakami consistait à la réalisation d’un clip qui servirait de teaser au projet. Ce clip se base sur l’album de Kanye West, avec qui Murakami aura longuement travaillé. L’une des plus grandes collaborations de Murakami reste celle avec la maison Louis Vuitton en 2009. Intitulée « Insolite Monogram », c’est une collection de portefeuilles qui de par ses couleurs acidulées fait référence à l’œuvre animée de Murakami « Superflat 2 ». @Kanye West / Perrier / Louis Vuitton X Murakami

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@JulienThige, Happy Screws

la sainte trinité Comment parler de Takashi Murakami sans aborder son trio gagnant, ses 3 essentiels : les couleurs, la forme, et la répétition. N’a-t-on jamais vu une œuvre de Murakami en noir et blanc ? Tout simplement, il n’en existe pas. En tant que digne successeur de Warhol, les couleurs sont l’essence même de ses tableaux et sculptures, sans compter cet univers pop qu’il a repri des mangas accentue ces couleurs pour un rendu encore plus psychédélique. Pré-

«HOMMAGE à warhol»

curseur du mouvement Superflat, il compense la platitude visuelle de ses œuvres en leur donnant du volume et de la place grace à ses couleurs saturées. Si ses tableaux sont tellement colorés, avec des dessins et des personnages presque enfantins, les thématiques abordées sont de loin moins réjouissantes. Si les couleurs vives des tableaux de Takashi Murakami sont un moyen de reconnaissance du travail de l’artiste, beaucoup l’identifient également grâce à ses « flowers ». Ce motif à la présence régulière dans les tableaux de Murakami représente une fleur, semblable à une marguerite, qui sourit. Encore une fois c’est un rappel, voire un hommage, à Warhol, et à son 5

travail intitulé Flowers series. Ces fleurs, signature des œuvres de Murakami, reflètent tout le respect que ce dernier a pour Andy Warhol, mais également un sentiment de jalousie insoupçonné. En effet, à plusieurs reprises, Takashi Murakami s’est avoué frustrer du travail de Warhol : « Il a eu un trait de génie, l’invention de la peinture facile ». Bien que jaloux de ne pas avoir eu cette idée de simplicité dans l’art, Murakami utilise et ré-utilise ce motif dans la plupart de ses œuvres. C’est une véritable répétition qui donne un rythme et un fil conducteurs à ses créations.


GILBERT & GEORGE Par Kendra Bohn & Lauren Lellouche

L’ART POUR TOUS Leur devise « L’Art pour tous » est mise avant dans chacune de leurs réalisations et revendication artistique. Présentant des photos tirées de la réalité, et allant jusqu’à se mettre eux-mêmes en scène, leur art souligne aussi bien la vie quotidienne que des aspects artistiques plus complexes. Ils revendiquent l’idée de « L’art pour tous », et tentent de prouver que tout le monde peut accéder à l’art, que tout le monde peut le comprendre.

s c u l p t u r e v i va n t e A la fin des années 60, leurs sculptures leur apportent un véritable triomphe. Un concept qu’ils poussent à l’extrême, allant jusqu’à s’associer physiquement à leurs créations artistiques, à la manière de “  sculptures vivantes “. Il faut savoir que Gilbert et George apparaissent toujours

dans un costume gris devenu leur marque de fabrique. Dans “Singing Sculpture”, ils apparaissent dans leur costume, marchant comme des robots, le visage enduit de peinture métallique. Puis leurs deux corps s’animent peu à peu jusqu’à ce qu’ils en viennent à danser et chanter. Ils exécutent

leur numéro plusieurs fois à la suite sans aucune variation, tout comme des robots, empêchant d’y voir une quelconque touche d’inspiration. Par le biais d’un mode d’expression différent, le duo dénonce la mécanisation de la société du spectacle et l’affaiblissement qualitatif des loisirs.

«Nous sommes deux individus mais un seul artiste»

@ Kendra & Lauren

@ Gilbert and George - Singing Scultpture

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@ Gilbert & George, The Beard

V i va c i t é U n e c o m p o s i t i o n e t é c l at o r i g i n a l e Les couleurs utilisées sont vives et éclatantes et s’inscrivent ainsi entre peinture, dessin et photographie. On trouve les 3 couleurs primaires, ainsi que le noir et blanc pour un effet visuel très contrasté (contraste de couleur primaire renforcé par le noir et blanc). Elles se répondent de façon symétrique et participent ainsi à la composition de l’image. Le duo adopte également le format rectangulaire dans leur photomontage.

Les compositions sont souvent sous forme de quadrillage et les images sont fragmentées, la transparence des couleurs vives et contrastées rapproche leurs œuvres de l’art du vitrail. De même le grand format et la composition bien orchestrée rappellent cet art. Quant au quadrillage, il fait référence au vitrail, le dotant ainsi d’une dimension ­sacrée. Il faut savoir que l’antinomie est la base du travail de Gilbert & George. On la retrouve dans la forme donc, mais aussi dans l’opposition entre cette forme à dessein séduisante et le sujet traité, qui est souvent pro­vocant.

LA TECHNIQUE d e f a b r i c at i o n

Les œuvres du duo, semblent faites à la machine, mais ce n’est pas le cas. La fabrication nécessite de longues opérations manuelles : chaque élément est photographié sur fond noir, tout peut ainsi être isolé et tiré sur papier. Selon des croquis très précis, chaque élément est reproduit plusieurs fois en surimpression. Le reste de l’œuvre est protégé par un carton jusqu’à ce que l’œuvre soit entièrement occupé d’une série de photos juxtaposées. Chaque élément de la composition est recouvert de gomme arabique. Gilbert & George exécutent tout eux-mêmes.

L A SY M É T R I E L’image globale est orchestrée par les lois de la symétrie : elle est organisée selon un axe centrale de symétrie verticale. L’un est toujours comme le miroir de l’autre ; c’est une façon de souligner leur similarité en tant qu’artiste. D’où l’importance de leur citation phare “ Nous sommes deux individus, mais un seul artiste”. 7


Robert doisneau Par Jules De La Chaise, Axel De Luca & Antoine Rodsphon-Bonillo

Le rêve à la française Robert Doisneau est un photographe humaniste français, durant toute sa carrière il va prendre des clichés très proches du quotidien et qui vont représenter le rêve à la française. Partout à travers le monde, les gens remarquent et apprécient le travail du photographe. Ces clichés, réalisés grâce à une immersion sans précédent, Doisneau semble toujours sensible à l’intime et au personnel, qui vont ainsi lui permettre de laisser son empreinte.

Fa i r e r ê v e r Robert Doisneau est avant tout un observateur tendre des habitants de la capitale, il prend du plaisir à photographier des gens amoureux et heureux malgré un climat des plus difficiles, il révèle comme il le dit si bien les “trésors fugitifs”, montre le merveilleux dans la vie quotidienne. Il a un héritage fort, il a photographié pendant sa carrière tout ce qui lui tenait à cœur. Artisans, gamins des rues, tous les clichés retracent la petite histoire du peuple parisien, qui tente coûte que coûte de se reconstruire. Les photos prises d’un quotidien qui semble être idéal permettent aux gens de s’émanciper, en quelque sorte un moyen de changer d’air. Doisneau est dès lors un créateur de rêves, il transporte son

@Doisneau, Dancing poeple

public. Comme exemple, la série de clichés sur les folles soirées de l’après-guerre témoigne de son état d’esprit, l’envie pour les gens “d’oublier le passé, la défaite, l’Occupation, la mort”. Tout le gratin était présent, la démesure l’était également. En nous plongeant dans son monde, Doisneau fait rêver. @Doisneau, le baiser de l’hôtel de ville

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D a n s l’ i n t i m i t é Dans ce domaine, Doisneau s’inspire et tire le meilleur de chaque cliché. C’est pourquoi, l’artiste va pendant une soixantaine d’années retranscrire la réalité qui l’entoure, figeant pour l’éternité les «  gestes ordinaires des gens ordinaires dans les situations ordinaires ». Pour lui, la photo est un moment de bonheur, alors il se doit d’être partagé à plusieurs. Il le dit lui-même, ces clichés montrent le monde comme il voudrait qu’il soit, sans violence et avec humanité. Des gens qui s’embrassent,

des enfants qui s’amusent dans la rue ou bien deux personnes qui dansent, Robert Doisneau décrit la vie française après la seconde guerre mondiale. Ces photos iconiques nous laissent un véritable témoignage visuel de ce qu’était la vie au quotidien. La série de photos “ Allons voir la mer avec Doisneau ”, nous montre son envie d’aller côtoyer les gens qui travaillent et de les prendre en photos. Ainsi il retranscrit un sentiment personnel, (toujours très proche de sa famille), Doisneau photographie à cette période l’essor du tourisme de masse.

Photographiant aussi bien le Paris populaire, que le milieu mondain, les ouvriers de Renault à Billancourt ou la banlieue, Robert Doisneau aura marqué son époque avec un regard « tendre et amusé » qui a fait son succès. « Ces photos sont toutes empreintes d’une grande familiarité et d’une gentillesse. A chaque fois qu’il partait en reportage, il avait toujours un regard bienveillant à l’égard des gens, il n’était jamais dans le sensationnel », note la commissaire d’exposition.

vite, il s’exporte lui aussi aux ÉtatsUnis, il expose pour la première fois à Rochester aux États-Unis en 1972 des nombreuses photos. Le

s’amuser font le tour du monde. L’empreinte de Doisneau à l’étranger et rapidement reconnaissable, les gens associent le charme à la française à Doisneau, cela fascine l’imaginaire des gens à l’étranger pensant même que la France est encore dans les années 50. Avec Doisneau, on a l’impression que le temps n’avance pas.

@Antoine Rodsphon-Bonillo

Le symbole est évidemment “Le Baiser de l’hôtel de Ville” qui symbolise à merveille le Paris romantique des années 50, de plus cela montre quelque chose d’inhabituel surtout pour les Américains. Humaniste, il est avec Henri Cartier-Bresson, l’un des plus connus à l’étranger puisque ces clichés de scènes de rues, d’enfants ou de personnalités font le tour du monde. Très

années 50 rêve à la française prend donc forme. Dans l’analyse de ces photos, les étrangers remarquent une forme de liberté, forme qui dans l’après-guerre, peu de pays ont réellement, ainsi voire des gens 9


PAUL MILINSKI Par Djelissa Correia, Lorena Fahmy & Sabrina Moussouni

SYMBIOSE

@Paul Milinski

Nous nous construisons tous un imaginaire, un refuge faisant barrière à nos tracas du quotidien. L’empreinte visuelle que laisse Paul Milinski dans son art contemporain incarne avec perfection cette vision.

L’ A R T I S T E Paul Milinski est un designer Australien spécialisé dans la modélisation 3D. Il exerce son activité en tant que directeur artistique au sein des sociétés Design Vaulter et LoftGarden. Artiste contemporain de l’ère numérique, Milinski doit sa notoriété aux plateformes digitales comme

Instagram où il compte pas moins de 376 000 abonnés. Ses visuels se composent d’environnements paradisiaques images qui apaisent et confortent à la fois. C’est principalement sur les réseaux sociaux et depuis son site internet qu’il partage ses productions artistiques. À l’ob-

servation de son travail remarquable, une vision récurrente s’inscrit dans ses visuels. Celle d’une association entre la nature et le mobilier intérieur. Sa marque de fabrique repose dans le choix de la composition de ses visuels qui sont essentiellement décorés de mobiliers contemporains et minimalistes avec l’emprunt d’un style Millennial Pink et d’environnements paradisiaques qui mettent avant la beauté de notre nature On pourrait presque croire que l’on voyage à vue d’œil ou que l’on entend le bruit des vagues, des feuilles, de l’environnement qu’il souhaite mettre en évidence.

« méthode de cRÉATion » Pour en arriver à de tels résultats, Paul a un processus de création très précis et en plusieurs étapes comme une recette de cuisine. Il pense son projet en faisant abstraction de toutes formes d’inspirations externes.

@Lorena Fahmy

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@Paul Milinski

n at u r e & i n t é r i e u r Il réalise ses premiers croquis qui représentent le concept envisagé souvent à partir de l’Ipad Pro, ou de l’iMac. Milinski modélise et texturise via divers applications prévues à cet effet telles que Cinéma 4D, Octane Render, World Creator et Photoshop, par la suite il finalise les dernières retouches sur Lightroom pour l’harmonie des couleurs et l’ajustement des lumières. La dernière étape est la publi-

Il place la nature au cœur de ses productions en tant qu’élément fondamental et questionne la place de l’homme dans en son sein, son traitement et la façon dont l’Homme s’approprie les ressources naturelles. Environnementaliste, Milinski revendique la vision d’une faut arriver à équilibrer nos constructions avec la nature, en faisant en sorte que les deux mondes se complémentarisent et se servent.

cation de son projet lorsqu’il juge que le résultat obtenu est suffisamment satisfaisant. « Les visuels artistiques ne sont jamais finis mais abandonnés au bon moment » déclare t-il lors d’une interview accordée à Visual Atelier 8. Mais au -delà de son identité esthétique, le message qu’il délivre dans ses créations est profond.

harmonie entre les deux mondes, celle de la nature et de l’Homme ,et de l’Homme et la nature. C’est la symbiose, terme par lequel émane l’inspiration de notre illustration. Cette création est le résultat d’une fusion entre les constructions humaines (les bâtiments) et la nature (les arbres) pour ne former qu’une sorte de

beau universelle. Paul nous met en avant un modèle d’utopie, un monde surréaliste voire éco-futuriste. L’homme doit créer et construire pour son propre confort, mais quelle en est la limite ? À mesure que l’on se rapproche de conséquences environnementales irréversibles, il

«un monde où la nature est le bâtiment et le bâtiment est le mur d’accent» 11


ren hang Stefano Cavagnoli & Laurine Daguier

Reconnaissance immediate Ren Hang est le premier surpris face à la reconnaissance immédiate de ses photographies. Les corps et les objets mis en scène s’épousent en formant des portraits inattendus, uniques dans le style, et identifiables dans la forme.

L’ e s t h é t i q u e de la nudité Ce pionnier de la photographie contemporaine chinoise ne revendique aucun message politique. Néanmoins, dans son pays natal où la censure et le totalitarisme règnent, il ne veut pas « que les autres aient l’impression que les chinois sont des robots sans bites ni chattes. ». Il exhale alors les corps minces, glabres et essentiellement nus. Ses mises en scènes, touchées par la grâce et la poésie avec son flash qui galvanise les couleurs et sublime les corps dénudés, séduisent. Les placements et positions des modèles ne suivent ni les règles ni les codes de beauté, au contraire elles sont perçues comme curieuses et inhabituelles. A tout cela s’ajoute son esthétisme insolent, érotique et humoristique qui rend ses œuvres reconnaissables. L’artiste n’a pas de préférences de sexe dans ses photos, il choi-

@Ren Hang

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sit de photographier aussi bien les femmes que les hommes. Il prend beaucoup de risques à faire ce qui lui plait. Le caractère nu ainsi que les scènes érotiques qu’elles soient homosexuelles ou orgiaques lui ont valu une forte censure auprès des autorités chinoises. « Il était souvent arrêté par la police. Pour lui, c’était du théâtre, un jeu. Ce n’était pas son problème, mais celui de la société ». Néanmoins, cela ne l’arrête aucunement puisque selon lui son travail n’a pas d’intention politique, il se contente de faire ce qui lui plait sans tabou. Il choisit d’ailleurs lui-même les modèles ainsi que les lieux qui lui sont familiers (notamment son studio) afin d’être à l’aise pour photographier. Ces choix permettent d’instaurer un climat de confiance entre le modèle et le photographe : le résultat n’en devient que plus authentique.


@Ren Hang

L’ e s t h é t i q u e d e l’ a b s u r d e Grâce à Ren Hang la beauté des corps et des visages chinois s’est imposée dans un décor peuplé d’animaux et d’objets les plus disparates : serpents, poulets, oiseaux, paons… On retrouve des rencontres fortuites, inopinées, au sein même des photographies

« Je fais ça parce que j’y trouve encore un sentiment. cela remplit le vide de mon cœur»

qui témoignent d’un esthétisme de l’absurde. Effectivement, les éléments que l’artiste associe dans une même photographie semblent improbables, étranges et anormales. Ces combinaisons forment des portraits inattendus et un style unique représentant Ren Hang. Les choix associatifs ne sont pas dénués de sens pour autant puisque ce “désordre” est agencé par une symétrie, un fil rouge liant les différents éléments de l’image entre eux. Ren Hang est obsédé par les corps jeunes, la cigarette, les lèvres colorées des femmes ainsi que le sexe. Le corps est sublimé grâce aux éléments qui les accompagnent. Ces rencontres sont très perturbantes car elles sont empreintes de son identité ; elles laissent une trace dans le 13

@Laurine Daguier

temps avec une image forte et assez graphique. La représentation de la naturalité des corps peut servir à se poser des questions identitaires et sexuelles.


l’empreinte bleue Par Manon Duran, Mattéo Henaff & Selin Meyer

Un précurseur Yves Klein est sûr d’avoir pour mission de “changer les émotions” selon ses mots. Avec un goût pour l’absolu, l’invisible et l’immatériel, sa démarche est de rendre l’invisible visible. Dans ses œuvres, c’est avant tout l’esprit qui voit avec les yeux.

Yves Klein

L’art du monochrome Yves Klein est l’inventeur du monochrome en France et dans le monde. Même si Kasimir Malevitch en est l’initiateur (carré rouge et son carré blanc sur fond blanc). Yves Klein s’en est approprié la paternité avec son très célèbre “bleu Klein”.

Son importance dans l’art conceptuel est indéniable. Une de ses devises était “Pour la couleur, contre la ligne et les dessins”. Ainsi, Klein prend clairement position dans le débat millénaire de la peinture; entre la ligne et la couleur, il choisit la couleur. Il est un artiste de la spiritualité.

Yves Klein souhaite libérer la couleur de la prison de la ligne. Il se tourne vers le monochrome, car pour lui, seul le monochrome peut visualiser l’absolu. “La beauté existe déjà à l’état invisible”, il cherche donc à toucher cette beauté. Le bleu Klein qui porte son nom, est sa signature. Il le nomme IKB, qui signifie International Klein Bleu. Il crée une vibration colorée qui engage le regard des specta-

« Le ciel est ma première œuvre » teurs, mais qui va encore plus loin car c’est l’esprit qui voit avec les yeux. Cela devient sa marque de fabrique. C’est grâce à un nouveau solvant que Klein parvient à mettre au point son célèbre IKB , poudreux et magnétique, que l’on peut voir dans son œuvre : Monochrome bleu sans titre (IKB 75) de 1960. Il cherche l’harmonie parfaite dans ses monochromes ainsi @Marquée, Duran, Henaff et Meyer

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@Anthropométries, Yves Klein, 1960

que l’unité absolue. Klein est convaincu que dans l’art du futur, les artistes ne peindront plus que des monochromes. Pour lui, l’essence même de l’art réside dans la pureté de la couleur, qui doit imprégner celui qui la regarde. Il a alors décidé de se concentrer sur une teinte, celle qui fit son succès. « Ce sera du bleu, rien que

du bleu, je vais y consacrer ma vie ! ». Pendant plusieurs mois, le pigment bleu outremer devient le centre de ses recherches. Obsédé par sa découverte, Klein dépose la formule de son bleu à l’institut national de la propriété. La formule exacte de l’IKB n’a jamais été révélée ni commercialisée. Seul Klein détient le secret de la

formule, bien que celle-ci ait souvent été imitée. Klein s’inspirait du ciel. Un espace au-dessus de la Terre, un vide immense, libre de toutes choses matérielles. Il place le ciel au centre de tout son travail artistique : « Le ciel bleu est ma première œuvre », remarquera l’artiste, plus tard dans sa carrière.

Le corps à l’œuvre Les œuvres de cette série sont réalisées d’une manière tout à fait inédite. Le peintre choisit de se libérer du pinceau et de se placer en chef d’orchestre pour réaliser ses œuvres. Il appelle ses modèles à plonger leurs corps nus dans sa fameuse peinture bleue, l’IKB, puis à les appliLe vide est également une de ses marques, car s’il n’est ni visible à l’œil nu, ni palpable par le toucher il reste sensible. Il fait donc questionner sur l’objet d’art en lui-même et la représentation.

quer sur de grandes toiles. De cette façon, l’artiste se met à distance de la peinture et utilise les corps d’autres personnes pour laisser son empreinte artistique. En employant des éléments de la nature, il parvient à manifester leur force créatrice : il a conçu une œuvre qui traverse les frontières de l’art conceptuel, corpo-

rel et du happening. A l’époque, dans un climat encore loin de la libération sexuelle, les pinceaux vivants de Klein sont considérés comme une véritable provocation et ont l’effet d’un coup de poing dans le monde de l’art. Klein s’impose en précurseur de la performance artistique.

«La beauté existe déjà à l’état invisible» 15


Tyler Spangler Par Camille Bruère & Paloma Jonville

artiste digital Tyler Spangler ou le melting pot qui contient images du passé détournées, distorsions photoshopesques et courant psychédélique de conscience

une empreinte californienne Originaire de Huntington Beach en Californie, Tyler Spangler baigne dans la surf culture depuis toujours. Il a commencé a développer son style alors qu’il travaillait comme graphiste et vendeur à la boutique Jack’s Surfboards de Newport Beach.

C’est en prenant une année sabbatique complète qu’il réalise environ 2 000 pièces qu’il partagera par la suite au monde de l’art sur son site, créant petit à petit sa réputation d’artiste original, haut en couleur. Son art, façonné par la culture du surf et de la musique, est, comme il le dit lui-même, chaotique, organique et quelque peu obsédant tant il produit régulièrement.

Contrairement à beaucoup d’artistes graphiques qui ont commencé leurs premiers dessins sur des feuilles ou des carnets, Tyler Spangler, a lui, utilisé des planches de surf et skates comme premiers supports et a donc répandu son style à travers toute la galaxie du surf, skate, et du snow gear. Il a d’abord entamé des études en psychologie avant de découvrir sa passion pour l’art et de se donner les moyens de la développer.

Il a également dirigé un lieu punk illégal qui lui a permis de faire treize spectacles jusqu’à ce qu’il soit fermé par la police. Tous ces éléments combinés jouent leur rôle pour influencer et construire son esthétique. En bref, Tyler Spangler est un véritable surfeur californien avec les cheveux clairs et la peau hâlée et une garde robe qui s’accorde avec son art. @Tyler Spangler, Collage du 28 Octobre 2020

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@ Tyler Spangler, Tryptique de skateboards avec incrustation graphique

c o l l a g e d i g i ta l Grand adepte du collage digital, Tyler Spangler est considéré comme un designer, plasticien, collagiste et GIF-maker. À travers ses œuvres il souhaite inspirer, faire rire et transmettre quelque chose de beau. Ses collages sont

@Tyler Spangler, Collage du 30 Octobre 2020

«JE fais quelque chose de nouveau chaque jour et n’ai pas peur de le partager !» un véritable melting pot de styles, incorporant à d’anciennes photos en noir et blanc des couleurs lumineuses tout en transportant des images du passé dans le monde d’aujourd’hui, empli de tonalités 17

fluos et de gifs. Sur des thèmes aussi variés que l’anxiété, la vibration, l’harmonie et la contemplation, Tyler Spangler interpelle et fait donc naître l’émotion. Désignant son propre art comme commercial, il n’a qu’une devise « fais quelque chose de nouveau chaque jour et n’aie pas peur de le partager ! ». En effet, la patte graphique de l’artiste est largement reconnaissable et se situe à la croisée du Pop Art, du surréalisme et du mouvement Dada. Il s’est fixé comme objectif de produire au minimum 2 œuvres par jour et a l’air de s’y tenir d’après son site qui regorge de ses créations toutes plus colorées et déjantées les unes que les autres.


Botero Par Jade Vid, Lia Lockart & Chloé Varatojo

sa signature Fernando Botero, artiste colombien né en 1932, est mondialement connu pour son audace et son empreinte artistique si particulière et à la fois si intrigante. C’est un artiste figuratif renommé pour ses représentations voluptueuses d’objets et de personnes.

SES ORIGINES Botero est connu pour ses reprises d’œuvres mondialement connues. Son univers est à l’image de ses origines latines, en effet son pays natal est la Colombie. En Amérique du Sud, les habitants sont connus pour leur amour de l’opulence et aussi pour leur façon de voir les choses

en grand. C’est-à-dire qu’ils organisent toujours de grandes fêtes, de grands repas de familles puisque ce sont des familles nombreuses. Botero a été bercé par cette notion de grandeur et d’exagération qu’il exprime dans ses œuvres. De plus, l’artiste retranscrit des scènes bien connues

des pays latins telles que la prostitution, la fête, la religion, les combats avec des taureaux. Par ailleurs, ils sont sa phobie, qu’il extériorise à travers ses œuvres. Botero insiste sur l’utilisation des couleurs froides afin de mettre en avant, la tristesse de ses personnages. Cependant, il utilise des couleurs chaudes lors de la représentation de scènes festives qui ont pour but de nous faire

«inspirations latines» ressentir bonheur et convivialité,mais ces émotions se trahissent de par l’expression faciale des personnages. Le silence et la tristesse que l’on aperçoit dans les peintures de Botero, laisse imaginer que celui-ci a voulu partager toute la peine de la Colombie, pays meurtri par tous les problèmes de trafic de drogues, de violences et de meurtres. @Frida Kalho à la façon Botero, production personnelle

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L’apologie de l’opulence est la signature de Botero. Son style artistique, appelé le Boterismo, représente la rondeur dans l’esthétique du corps et des objets.

son ART

@Maison de Marta Pintuco, 2001, huile sur toile

L’apologie de l’opulence est la signature de Botero. Son style artistique, appelé le Boterismo, représente la rondeur dans l’esthétique du corps et des objets. Botero peint le monumental et c’est ce qui le différencie des autres. À travers ses œuvres Botero met en avant l’exagération de la grosseur tout en gardant une harmonie. En effet, il y a une similitude dans la représentation physique des personnages de Botero, ils ont le même physique et la même expression du visage. Botero éprouve une obsession pour les formes et la rondeur qu’il retranscrit dans son art.

Il peint ses personnages d’une manière botérienne c’est-àdire, en leur donnant de grosses cuisses, un cou exorbitant, des bras consistants et des doigts imperceptibles. En revanche, les parties du visage ne s’accordent pas avec le physique dessiné. Les yeux, la bouche et le nez accentuent le style

L’empreinte de Botero dans l’art se caractérise par sa vision et son origine.

artistique de Botero. À travers l’expression des visages, l’artiste transmet un sentiment de tristesse et de mélancolie, les personnages sont comme vides, ils ne sourient pas et n’ont pas l’air heureux. Certaines œuvres reflètent cette expression en utilisant des couleurs maussades. De plus, il peint des objets reconnaissables par-

tous mais à sa guise. Le dessin d’une guitare à la façon Botero ne sera pas le même que le dessin d’une guitare d’un autre artiste. Lorsqu’on regarde ses œuvres on ne voit pas tout simplement une guitare ou une femme on voit un Botero.

«OBSESSION DE LA RONDEUR»

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la griffe haring Par Emma Prudhomme, Chloé Raynal & Philippine Garcin

Keith Haring, une révolution de l’art contemporain Keith Haring, artiste fortement engagé est un pionnier de l’art contemporain. Il révolutionne le monde du pop art et du street art et a su marquer les esprits par sa répétition de formes synthétiques colorées entourées d’une ligne noire continue. C’est ce qui en fait à l’heure actuelle son empreinte.

technique graphique

Keith Haring est un artiste américain dessinateur, peintre et sculpteur du XXe siècle qui a marqué les esprits de par son talent et sa carrière hors-norme. En effet Haring est un artiste qui comme Jean-Michel Basquiat déposa sa marque basée autour de ses œuvres afin d’en créer des produits dérivés. Aujourd’hui encore,

cette marque est reprise par les grandes enseignes. Seulement sa carrière se verra écourtée puisque qu’il décédera à 32 ans en 1990. En si peu de temps, comment cet artiste connu de tous a su laisser son empreinte à travers ses œuvres ? Les œuvres de Keith Haring se caractérisent comme nous le savons tous par

une répétition de formes synthétiques entourées de noir et souvent remplies de couleurs éclatantes. Haring utilisait des aplats plus communément appelées “couleurs pures”, c’est-à-dire qu’il n’effectuait pas de mélange de couleur. Tout son art était fait et conçu à partir du réel. Il représentait dans ses œuvres des éléments du monde qui nous entoure comme des animaux, des télévisions, des enfants, etc afin de constituer un récit permanent.

«art conçu à partir du réel» Le graphisme de ses œuvres est relativement simple et épuré, mais il donne l’impression que les acteurs de ses productions sont en mouvement grâce à des traits qui les humanise. Il utilisait les objets du quotidien, les logos publicitaires et toute cette culture BD pour réaliser de véritables fresques comparables à ce que produisait la civilisation égyptienne ou maya.

@ Tseng Kwong Chi, Muna Tseng Dance Projects, Inc. Art & Keith Haring Foundation

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@Chloé Raynal

Peu importe le support qu’il utilisait, la ligne continue reste l’élément indissociable du style Haring. Il utilisera différentes techniques pour faire naître ses œuvres comme la craie, le graffiti, la peinture ou l’argile. La singularité de Keith Haring se caractérise alors par la répétition infinie de symboles soulignés de noir qu’il illustre. Ces symboles sont révolution-

naires et distinguables car Keith Haring les dessine à sa manière qui est contraire aux illustrations que nous pouvons retrouver à cette époque. Le style de dessin de Haring ainsi que la répétition de symboles en font son empreinte autrement appelée la « griffe Haring».

un musée populaire C’est à travers des formes qui pourraient paraître simplistes que se cache une réelle complexité de l’artiste. “Être au monde” ou encore “ma contribution au monde est ma capacité à dessiner” sont les propres termes de Haring. Il souhaitait dévoiler sa vision du monde aux populations, son art

était pour lui un moyen de s’exprimer aux yeux de tous. Pour cela, il créa un musée populaire en laissant son empreinte dans des lieux de tous les jours comme le métro de Manhattan à Brooklyn. Alors si Keith Haring dévoilait des œuvres quotidiennement dans la ville de New York il décida d’aller plus loin en laissant son

Haring aura révolutionné l’art contemporain par toutes les émotions qu’il transmettait dans ses œuvres. Il aura réussi à faire voir à toutes les populations sa vision du monde.

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empreinte dans des endroits historiquement marquants afin d’évoquer son engagement et son parti pris. Haring abordera dans ses œuvres des sujets tabous pour l’époque, comme le sida, l’homosexualité ou le racisme. Il peindra même une fresque de 300 mètres sur le mur de Berlin !


groening Par Léa Roussel, Alex Saint Jalmes & Olivia Vuong

un style unique

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Matt Groening a marqué le 20ème siècle par sa vision du monde et de la caricature. Il a su marquer de son empreinte des personnages, des moments de culture de manière critique. L’artiste a su trouver le coup de crayon juste entre caricature et réalité.

------- --- - ---biographie -------

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lier qu’il insuffle à chacune de ses œuvres. Ses dessins sont reconnaissable de part et d’autre par ses traits très rudimentaires qui permettent d’accentuer une certaine forme de caricature. Les couleurs qu’il utilise ne sont pas commune à tous puisque ses choix se portent sur des couleurs vives et des couleurs qui ne se rapportent pas à la réalité comme les personnages jaunes des Simpson peuvent le démontrer. Il n’y a pas que la couleur de leur peau qui soit farfelue, il y a aussi la couleur de leur cheveux de leurs habits… Ce choix n’est pas anodin, grâce à l’utilisation de ces couleurs, Matt Groening fait ressentir aux téléspectateurs qu’ils sont compris. La création des personnages phares de Matt Groening apporte un aspect à la fois attachant

«un coup de crayon» Matt Groening de son vrai nom Matthew Abram Groening est un auteur, dessinateur, scénariste américain, et célèbre créateur des Simpson et de futurama. Matt a commencé à dessiner pour distraire son entourage. Mais au lycée ce passe temps est vite devenu une réelle passion , poussé par les encouragements de son père Homer Groening lui même dessinateur. Mais l’envie de devenir écrivain le pousse à s’installer à Los Angeles. C’est finalement son coup de crayon qui fera mouche. Cette ville lui inspira ses nombreux personnages névrosés qui feront plus tard son succès dans les Simpson. Matt Groening a un style particu-

@Personnages : Homer, Bender, Bean

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@Montage : univers futurama et simpson

c a r i c at u r e et complexe ce qui permet de se reconnaître à travers eux, pas par leur physique mais par l’univers offert par le dessinateur et par l’unicité de chacun d’entre eux. C’est ce qui renforce une signature propre à cet artiste.

Futurama ou dans désenchanté. Au sein de ses trois œuvres Matt Groening arrive à caricaturer trois époques distinctes : le moyen age avec Désenchanté, le présent avec les Simpson et enfin le futur avec Futurama.

D’ailleurs, à travers ses personnages, il fait ressortir un caractère satirique et critique de la société américaine cela peut se voir aux physiques des personnages que ce soit dans les Simpson, dans

Dans la caricature il existe un réel enjeux politique qui est de savoir développer la bonne caricature au bon moment. Matt Groening a compris cet enjeu et maîtrise l’art de la caricature à la perfection. À travers ses dessins Matt Groening nous offre une satire de la société américaine mais en y ajoutant sa touche personnel et en utilisant l’humour à la perfection. Dans les Simpson de multiples problèmes sociaux sont représentés. Ils sont

«une satire de la société»

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semblables à ceux rencontrés dans la société américaine  : pollution, violence, problèmes familiaux… Son but est de dénoncer et critiquer des faits ou des sujets quotidiens qui touchent la société américaine, tout en divertissant son public.

@Croquis : Lisa Simpson


Un montage littEraire Par Juliette Gervais-Marais & Camille Genot

Le cinéma de la littérature L’écriture, matérielle, apparaît sous plusieurs formes dans toute l’œuvre de Jean-Luc Godard. Il peut s’agir d’écriture manuscrite, que l’on voit grâce à un plan sur un journal ou une lettre. Elle apparaît également souvent dans les décors de ses films par des signes filmés : affiche, néons, peinture, lettre d’un commerce. Godard fait aussi un usage très personnel des cartons.

Écrire : Jean-Luc Godard entre dans le cinéma par l’écriture. Il est dans les années 1950, critique de cinéma pour les revues Les Cahiers du Cinéma, La Gazette du Cinéma et Art, d’abord sous le nom de Hans-Lucas, puis sous son véritable patronyme. Au cours des années 1950, il réalise également de nombreux courts-métrages.

C’est en 1958 qu’il réalise son premier long métrage : À bout de souffle. C’est un des films fondateurs de la Nouvelle Vague ; mouvement emblématique du cinéma français des années 1960. Godard est connu pour son art de la citation, son utilisation des couleurs primaires, des faux raccords, ou pour ses références à

d’autres films dans son œuvre. Mais ce qui rend uniques les films de Godard, et indiscutablement réalisés par lui c’est l’utilisation tout à fait particulière du texte et de la typographie dans ses films. Si sa carrière se clôt aujourd’hui avec Adieu au langage et Le Livre d’images, deux titres qui laissent à penser que Godard en a fini avec

@ J-L GODARD, Pierrot le fou, 1965 Ferdinand au bureau de tabac

@ J-L GODARD Les inscriptions du petit livre rouge, La Chinoise, 1967

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Monter : la lettre, ils sont paradoxalement très riches en insertion textuelle en particulier le livre d’images et sa bande-annonce entièrement constituée de textes à l’écran. L’écriture manuscrite agit comme témoin de la réflexion d’un auteur dans Adieu au langage, les plans sur des notes de réflexion sont particulièrement présents. L’écriture manuscrite coupe l’image et interpelle le spectateur en lui montrant soudainement une réflexion nouvelle. Dans Pierrot le fou, on voit apparaître le journal de Ferdinand. Ces notes manuscrites, rouges ou bleues marquent une halte dans le film, le spectateur est témoin d’une pensée en dehors du récit. Ces notes témoignent d’une réflexion de nature essayiste. C’est un genre nouveau au cinéma : l’essai fiction, un film ou l’on trouve un équilibre entre la fiction et le documentaire. Les mots lisibles par le spectateur qui appartiennent au décor ont des fonctions différentes, mais souvent légères. Ils font soit apparaître des rapprochements inattendus en décomposant les mots, soit ils sont amusants, soit ils suggèrent quelque chose quant à l’intrigue. Ainsi dans Nouveau Monde, 1962, on lit : « CINE », puis « PIS-

CINE. », grâce à un travelling et dans Une Femme mariée, 1964, on lit avec le même procédé : « ÈVE », puis « RÊVES » et « ANGE », puis « DANGER ». Ces mots dans le décor jouent aussi ironiquement avec la situation des personnages, ainsi dans Pierrot le fou, un film qui aborde à la fois la guerre du Vietnam et le fait diver, Ferdinand, en cavale, sort d’un tabac nommé : « Le meilleur des mondes » Godard utilise de nombreux cartons qu’il insère dans ses films non plus comme un commentaire sur l’image ou sur une réplique, mais un commentaire sur son propre film. Dans La Chinoise, on lit le carton :

Légende photo @Juliette Gervais-Marais

« UN FILM EN TRAIN DE SE FAIRE », indiquant clairement l’aspect à la fois expérimental, et nécessaire de l’œuvre. Dans Masculin Féminin, Godard filme les relations entre vingtenaires parisiens, et explique leurs oppositions sociologiques et leur appartenance à la même génération grâce au carton : « LES ENFANTS DE MARX ET DE COCA-COLA. » Toujours dans une volonté d’expliciter son travail Jean-Luc Godard précise par exemple l’origine du film : c’est le cas de Week-End, avec le carton : UN FILM TROUVÉ À LA FERAILLE. C’est un film charnière dans l’œuvre de Godard, il se radicalise, il ne veut plus être aimé d’une société qu’il déteste. Pour ses cartons, comme pour les autres insertions textuelles Godard choisit 25

toujours des couleurs primaires, le rouge, le bleu, et parfois du noir et blanc, dans un souci de lisibilité et de clarté. La police est toujours la même, sobre, proche de l’Helvetica que nous utilisons. D’ordinaire, le cinéma cherche par le montage des éléments visuels et sonores à créer une forme de fluidité qui permet au spectateur d’avoir l’impression d’assister à une réalité non fabriquée. Chez Godard, tout est fait pour accentuer le décalage avec ce principe. Il faut que le processus de fabrication soit visible. L’interruption, rompant la fluidité des images, est alors signalée, par le texte notamment. Le texte est toujours en relation avec l’image, soit il l’accompagne, soit il est en rupture avec elle. Il forme un second degré de lecture, qui permet au spectateur de sortir de l’image, et de la voir dans un contexte nouveau. Qu’il s’agisse de carton, de quelques mots blancs sur fond noir, de plans sur des manuscrits, invitant le spectateur à prendre du recul sur les images qu’il voit, ou des mots appartenant au décor, le spectateur est toujours rappelé au fait qu’il regarde un film écrit, une œuvre d’art.


Richard Avedon Par Manon Lenormand & Kamila Radjibaly

L’empreinte artistique se définit comme une signature, une empreinte est plus forte qu’un prénom car elle y dévoile à la fois le visage de celui ayant créé l’œuvre mais également ce qu’il pense à un instant T, sa personnalité, son âme. L’empreinte c’est finalement la capacité à ce qu’au fil des années les œuvres que nous voyons nous renvoient directement vers l’artiste. Photographe de mode et portraitiste américain.

qui est richard avedon  ? Richard Avedon né le 15 mai1923 à New York et mort le 1er octobre 2004 à San Antonio au Texas est un photographe américain de beaux-arts et de mode. Il est connu pour ses portraits emblématiques de célébrités, couvrant plus de la moitié du XXe siècle, dont Marilyn Monroe, Ezra Pound, Dwight Eisenhower, Andy Warhol et Tupac Shakur. « Dans mes portraits, il s’agit plus de moi que des personnes que je photographie », observe-t-il. Son impact en terme de style vient sans doute du fait de sa décision d’avoir des sujets expressifs, au moment où la tendance est aux portraits figés et sombres. Ses photos se distinguent par leurs expressions intimes et vivantes. A New York, il étudie avec Alexey Brodovitch à son Design Laboratory à la

@Richard Avedon, Marilyn Monroe, 1957

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New School. Avedon travaille pour des magazines, d’abord pour Vogue en 1964 en tant que photographe de rédaction avec Diana Vreeland, puis comme photographe en chef de 1973 à 1988. En-dehors du monde de la mode, Avedon est surtout connu pour sa série qui capture des personnalités de l’Ouest américain comme des mineurs, des cow-boys et d’autres vivant en marge de la société contemporaine. Publiée dans le livre In the American West (1985), la série est considérée comme une collection pionnière en matière de photographie. De nombreuses récompenses lui sont remises, dont le National Arts Award for Lifetime Achievement en 2003.


Lasingularité de l’artiste Pendant toute sa vie, Richard Avedon marque de son empreinte différents genres de la photographie américaine. En tant que portraitiste, photographe de mode et publicitaire, il est un nom central dans l’histoire de la photographie, « L’inexactitude n’existe pas en photographie  ». Ses images sont immédiatement reconnaissables, l’objectif anticonformiste de ce maître de la photographie contemporaine donne sa marque à une époque et à un style, son

regard unique transforme l’art photographique, l’art du portrait et celui de la mode, il raye le statique et le monotone en quelque chose de vivant et d’actuel. Son style précis et très reconnaissable, il se construit à travers l’élimination du superflu, il souligne la présence du sujet en faisant abstraction de ce qui l’entoure. En photographiant ses modèles, il donne la priorité au naturel et au mouvement à la manière d’un reporter. Il s’intéresse à la manière dont le por« Les photos trait photographique traduit ont pour moi la personnalité une réalité que et l’âme du sujet. Tandis que les gens sa réputation comme phon’ont pas » 27

tographe est grandissante, il amène dans son studio de nombreuses célébrités et les photographie avec un grand format 8 x10cm. Il est avant tout un abonné au noir et blanc, avec une grande maitrise, ses mises en scène ne laissent apparaître que les sujets, il crée une nouvelle voie, parvenant à bousculer l’art du portrait. Il s’attache à révolutionner les codes de l’époque, alors que le « glamour » d’après-guerre impose son style, il fait voler en éclats l’image d’icône des stars du spectacle, de la mode, de la littérature, de l’art et de l’élite politique des États-Unis. Et contribue à mettre en valeur l’interprétation psychologique de chacun de ses sujets.


Sur la route de Tokaido Par Romane Pillon et Marie Martinez

La traversée de hiroshige Considéré avec Hokusai comme le maître de l’estampe japonaise, Hiroshige, de par ses œuvres, nous offre une invitation au voyage. Les Cinquante-trois Stations du Tokaido, représentent les 53 étapes qui relaient Edo à Kyoto. L’artiste nous propose, à travers des couleurs chaudes, un procédé créatif singulier et des paysages traditionnels japonais, une idée de traversée très présente.

La poésie du voyage Ando Hiroshige, se focalisa en d’Edo, il intègre majoritairement premier lieu sur des estampes des estampes. représentant des portraits de Embarquons dès maintenant dans femmes et d’acteurs du monde japonais. À la mort de son maître, celui-ci se penche de manière plus approfondie sur les paysages et le goût du voyage pour publier en 1833 la planche des Cinquante-trois stations de la route du Tôkaidô. Artiste aux 5400 œuvres, c’est aujourd’hui sur celle-ci que @ Hiroshige, Arrivée de la route du Tokaido : Sanjo Ohashi à Kyoto notre regard va se porter. Débutons notre voyage en nous l’univers poétique et les caractéfocalisant sur le mouvement de ristiques propres à Hiroshige. Dans l’ukiyo-e ou « image du monde un premier temps on retrouve une flottant », largement utilisé par idée de traversée très présente, Ando Hiroshige puisqu’au travers qu’elle soit grâce à des ponts, la de ses œuvres, il accorde une mer ou encore des rivières. Ces place prépondérante au paysage éléments peuvent relier les deux à travers ce mouvement. Mais bords du tableau créant une poéqu’est-ce qu’est l’ukiyo-e ? sie et nous permettant d’imaginer Mouvement artistique ayant vécu la suite de celui-ci en hors champs. son apogée durant l’époque Souvent comparé à Hokusai avec 28

sa série Les Trente-six vues du mont Fuji, Hiroshige utilise un dégradé de bleu de Prusse présent dans la majorité de ses tableaux. Il ne traite plus le paysage comme un décor pour une scène narrative mais pour lui-même. Des éléments tels que la végétation, l’atmosphère ou encore la lumière forment un ensemble et permettent à l’homme d’être pleinement intégré dans le paysage. Le but, transmettre une émotion en partageant la beauté des choses, parfois de façon explicite. Hiroshige exerce une approche poétique de la nature et suggère avec lyrisme les différentes saisons grâce aux caprices du temps, la floraison des cerisiers ou encore la chute soudaine des fleurs. Il nous offre un charme inouï par la beauté des paysages dépeints au gré des saisons.


l’ a r t d e s o n a r t Enfin, plongeons-nous dans les procédés stylistiques de l’artiste. Chez Hiroshige, le travail de la réserve est essentiel puisqu’il s’agit de laisser une partie de la zone blanche pour créer une zone de lumière sur les tableaux. Cet effet lumineux contraste avec les couleurs chaudes utilisées par l’artiste dans la majorité de ses tableaux. Abordons maintenant le traitement de l’aplat par celui-ci. Pour rappel un aplat est une surface de couleur uniforme, qui ne varie ni en luminosité, ni en pureté. Chez notre artiste, on remarque l’utilisation de cette technique dans son œuvre Les Cinquante-trois stations de Tokaido. En effet, hormis le dégradé du bleu de Prusse utilisé, les couleurs restent souvent les mêmes à travers ses différents tableaux et elles ressortent tout

«transmettre une émotion en partageant la beauté des choses parfois de façon très explicite»

@Hiroshige, 28e station : Mitsuke-juku et détail : Mitsuke

de suite car elles sont utilisées sur une grande partie de celui-ci. Les trois couleurs les plus présentes dans cette œuvre sont le bleu, le vert ainsi que le jaune. Enfin chez Hiroshige, chaque élément est dessiné avec précision, cela nous permet de découper le tableau en différentes parties mais aussi de délimiter celui-ci. Cet effet est permis grâce au traitement du cerne qui correspond à un trait délimitant une forme dans un dessin ou une peinture. Nous voilà arrivés à la fin de notre périple sur l’empreinte d’Hiroshige dans son œuvre. Mais avant de vous laisser découvrir un autre artiste, sachez que l’œuvre d’Hiroshige a fortement influencé les artistes européens de la fin du XIXème siècle. C’est notamment le cas d’impressionnistes tels que Monet, Whistler ou encore Van Gogh. Bonne fin de voyage.

@Les Carpes Koï

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David Fincher Par Arsène Vittenet, Leo Thomas & Marin Roche

Ingénieux et obsessionnel David Fincher réalisateur américain, est surement l’un des cinéastes le plus obsessionnel et ingénieux de son époque. Ayant eu une carrière dans la réalisation de clips musicaux et de publicité, pour David Fincher chaque plan doit procurer le sentiment juste, chaque détails a son importance, c’est à travers cette obsession qu’il a su trouver une place au milieu des plus grands réalisateurs.

La folie du détail Beaucoup de choses viennent à l’esprit quand on pense à un film de David Fincher, tout d’abord cette distinctive palette de couleurs métallisées, mais aussi les effets spéciaux. Son ingéniosité dans le travail de l’image est impressionnante mélangé à cela son obsession du détail et vous obtenez par exemple The social Network un film documentaire sur la vie de Mark Zuckerberg (créateur de Facebook) qui compte plus d’effets spéciaux que le film Godzilla qui pourtant est un film de genre fantastique . En effet, Fincher a toujours été passionné par les nouvelles technologies il fut immergé dans le monde des effets spéciaux dès le début de sa carrière. Cela a commencé avec son expérience a Industrial Light & Magic (ILM) pour « Star Wars : Le retour du Jedi ».

« Il faut du titane, de l’aluminium, de l’acier, du verre et des lasers pour faire une seule chose : transmettre des sentiments et c’est ça la magie du cinéma »

Pour vous donner un exemple simple de cette obsession, Fincher n’a jamais utilisé dans ses films de faux sang ! Le réalisateur fou du détail préfère traiter ça en images de synthèses, pour donner sa propre vision de la scène et en faire ce qu’il veut. L’obsession de Fincher est que chacune de ses scènes correspondent le plus justement à la réalité.

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@The Social Network (2010)

@Seven (1995)

LE jaune: sy m b o l e du mensonge

@Gone Girl (2014)

Fincher utilise ces techniques pour apporter de la profondeur à la narration. Ce sont ces effets qui transmettent l’émotion mais ils ne sont jamais flagrant. Dans un film de Fincher, les effets spéciaux sont toujours là pour servir l’histoire, ils ne sont pas la pour impressionner , ils sont là pour immerger. L’approche particulière de Fincher face aux effets spéciaux en fait un réalisateur unique en son genre.

The Social Network, Fight Club, Seven, Gone Girl, David Fincher nous livre de sombres récits et s’amuse à jouer avec la couleur, en opposant ou en associant différentes teintes. Ces différentes techniques permettent de suggérer le conflit ou de souligner le déséquilibre des personnages. David Fincher a été qualifié de «  prince des ténèbres », cela est surement dû au sujet qu’il traite à l’intérieur de ses films, comme par exemple la douleur psychique ou physique, l’aliénation, l’usure du temps. Mais aussi car ses films sont principalement conçus avec une palette de couleurs signature qui se compose de tons sombres, principalement verts/ bleus qu’il met souvent en opposition avec le jaune. En effet la couleur préféré de Fincher est sans aucun doute le jaune. On retrouve le jaune dans tous ses films et cela est toujours en cohérence avec ce qu’il veut nous montrer, il a su tout au long de sa carrière s’approprier cette couleur pour qu’elle devienne un outil personnel. Le jaune a pour connotation négative en occident d’être la couleur des menteurs, des trompeurs, des tricheurs, mais aussi la couleur de l’ostracisme, que l’on plaque sur ceux que l’on veut condamner ou exclure des connotations que nous pouvons facilement mettre en relation avec les histoires de ses films.

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michel ocelot Par Allexa Baijot & Maelle Adelis

l’homme

Michel Ocelot est un réalisateur français créateur de Kirikou et d’Azur et Asmar. Son dernier film en date est Dilili à Paris, récompensé d’un César en 2019. Il a étudié aux Beaux-Arts de Rouen, puis aux Arts-Décoratifs à Paris et enfin au California Institute of Arts.

L’ a r t i s t e Pour Michel Ocelot; le cinéma d’animation n’est pas uniquement destiné aux enfants et en effet, ses œuvres ne s’adressent en réalité pas à ces derniers. C’est peutêtre ce qui l’a conduit au succès. Dans ces films, il traite des sujets importants. Dans Azur et Asmar, il prône l’acceptation entre les dif-

férentes religions, les différentes couleurs de peau. Dans Dilili à Paris, il dénonce le sexisme et tous les obscurantismes de ce monde. Dans chacun de ses films, Ocelot nous fait voyager à travers les lieux qu’il connait : Paris, le monde arabe et l’Afrique noire où il a grandi. Ses films sont un

véritable périple au travers du monde et des siècles. Il accorde une importance quasi-totale aux paysages et décors de ses films. Ses personnages ont un caractère ; une histoire particulière mais n’ont pas de caractéristiques physiques poussés. Le succès de Michel Ocelot est dû à ce mélange de techniques. Michel Ocelot à su élever le cinéma d’animation français au rang qu’il mérite.

«le père de kirikou» En somme, Michel Ocelot a su ouvrir le monde grâce à son univers merveilleux et ses couleurs lumineuses. Les voyages et les causes qu’il défend inspirent chacune de ses œuvres.

@ Allexa Baijot

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Légende photo

décors vs perso Michel Ocelot utilise plusieurs techniques d’animation pour créer un univers tout en couleurs, mais aussi riche de textures diverses. Il choisit de créer une distinction flagrante entre ses personnages et ses décors ainsi que les autres détails du film. Les personnages de Michel Ocelot sont simplement représentés sans aucun relief ni imperfection, grâce à des aplats de couleurs présents également sur leurs vê-

Lorsqu’on on regarde les films d’Ocelot de plus près, on peut apercevoir un grand contraste entre les personnages ou animaux et les lieux/objets. C’est le cas dans kirikou et la sorcière par exemple. En se concentrant sur les couleurs utilisées, les personnages sont en aplats, ainsi que les vêteDans Les Contes de la Nuit et Princes et Princesses, Ocelot choisit de laisser uniquement l’ombre des personnages, ils n’ont donc aucun trait et sont simplement des silhouettes noires ce qui permet au spectateur d’apprécier le décor.

tements. En revanche, les détails du paysage et des décors sont méticuleusement réalisés. Il a la volonté de reproduire à l’identique les lieux et l’ambiance de l’époque en question des pays présents dans ses films en leur apportant couleur et vivacité. En conclusion, Ocelot choisit de lier deux techniques artistiques dans son œuvre c’est ce qui crée son empreinte artistique .

ments qu’ils portent : la couleur est uniforme et les habits sont seulement marqués par quelques plis pour créer du mouvement. Mais ce qui est extraordinaire, c’est la façon dont sont créés les bijoux et les décors, De l’arbre, jusqu’au bout de ses feuilles, chaque détail est méticuleusement créé. L’artiste veut mettre un point d’honneur

aux lieux réels qui servent de “décors” aux films. Dans Azur et Asmar, le traitement des bijoux de la nourrice semble être en relief, on peut percevoir chaque grain des épices reproduit. Chaque carreau qui constitue le mur des maisons marocaines est représenté.

«je fais des compositions dans un rectangle» 33


claude monet Par Sasha Berlinson & Maxence Bondin

reproduire les sensations Claude Monet (1840-1926) est l’un des pionniers historiques du mouvement impressionniste. Il se démarque des mouvements néo-classiques et réalistes qui régissent alors la peinture à succès des Salons du XIXème siècle. Son émancipation se note par l’intérêt qu’il porte à l’espace et à la répartition de la lumière dans la couleur de sa peinture à l’huile. A la fin de sa vie, l’artiste est malvoyant, mais il comble sa cécité par ce qu’il ressent à travers le prisme de sa vision artistique.

p e i n d r e l’ e s p a c e En rupture avec les peintres académiques et les critiques de son temps, Claude Oscar Monet préfère peindre ce qu’il ressent dans son présent. Il reproduit sur sa toile ce qui vit entre ce qu’il voit de ses yeux et ce qu’éprouve son cœur. Pour peindre cela, l’artiste s’exprime en peignant sur le motif, c’est-à-dire en quittant l’atelier et en emportant son matériel de peintre en plein air, pour peindre au gré des heures et du temps. Monet doit s’accommoder de l’humeur de la lumière qui bouge, apparaît et disparaît, au fil de son travail de peinture. Techniquement, cela se traduit par un coup de pinceau léger et énergique, comme pour capturer en un geste l’immédiateté de sa perception de l’instant. Peindre sur le motif, c’est pour Claude Monet le moyen de représenter

le plus fidèlement ce qu’il ressent, à l’instant T. Claude Monet rompt aussi avec la tendance du Salon qui accordait une importance extrême aux personnages qui étaient représentés comme des héros de la mythologie antique. Le père des impressionnistes ne donne pas plus d’importance aux êtres humains qui peuplent ses œuvres qu’à la nature, ils sont représentés par de petites

touches de couleurs sombres, qui s’opposent à la circulation de la lumière dans la représentation de la nature. Dans Le déjeuner sur l’herbe (1873), le fils et la femme de Monet ont une place secondaire. Ils s’effacent presque dans l’espace. C’est le moyen pour l’artiste de figurer la manière dont il appréhende le monde, comme une symphonie dont la lumière organise les couleurs.

@Imitation du bassin aux Nymphéas de Monet réalisée sur Photoshop

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@Le Déjeuner, Monet, 1873

f i g e r l e f u g ac e Monet vit en même temps que ce qu’il peint, et sa quête est de « représenter ce qui vit entre l’objet et lui ». Selon Cézanne, un peintre impressionniste admiratif du père de ce mouvement artistique, peindre l’instant a été le but de sa vie, et ce sera aussi son désespoir car «  il y a un paradoxe à vouloir fixer l’éphémère de l’instant sur une toile »1. A la fin de sa vie, l’artiste développe une cataracte des deux yeux altérant sa vue et sa perception des couleurs. Mais à travers son art, il avait déjà développé une autre manière de voir le réel. Il élabore sa série d’œuvres la plus connue, 1

les Nymphéas, qui sont le reflet de son art. La succession des peintures du même sujet ne sont pas répétitives, car c’est l’artiste lui-même qui plonge dedans pour rapporter sur sa toile sa vision intérieure et personnelle du réel. Dès lors les formes et les couleurs s’éloignent de la réalité de la matière à mesure que son

handicap s’aggrave, pour se rapprocher de l’impression pure qu’il en a. Les peintures Impressionnistes de Claude Monet sont un exutoire qui lui permettent une catharsis de son angoisse du temps qui passe et de ses propres émotions qui sont toutes aussi fugitives.

« il y a un paradoxe à vouloir fixer l’instant sur une toile »

HEINRICH, Christoph, Claude Monet, TASCHEN, 2000.

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Larry Clark Par Alma Lelievre & Victoire Mougin-Souleau

obsessions Larry Clark est un photographe et réalisateur américain né le 19 janvier 1943 à Tulsa. C’est une figure emblématique de la photographie qui aborde un croisement entre l’intime et le reportage.

Thèmes récurrents et analyse visuelle Le photographe nous plonge à travers ses œuvres dans ses fantasmes les plus profonds. Ses fantasmes sont construits en trois mots : sexe, drogue, et rock‘n roll. Les thèmes récurrents, comme la violence, la drogue ou encore la jeunesse dévergondée ne sont pas des tabous dans ses créations : en effet, l’artiste se trouve fréquemment censuré,

ce qui rend son travail reconnu et intriguant. Dans nombreuses de ses œuvres, les adolescents sont mis en avant. Dans The Smell Of Us sorti en 2015, le réalisateur met en scène une bande de jeunes parisiens dépravés, drogués et sans limite. Le principal sujet abordé dans ce film est la prostitution des mineurs.

@Photographie de Jonathan Velasquez & Tiffany Limous, par Larry Clark

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Dans Wassup Rockers sorti en 2004, Larry Clark traite de la culture skateboard et du passage de l’adolescence à l’âge adulte au travers de sept adolescents d’origine latino-américaine d’un milieu défavorisé. Il est considéré comme son film le plus intimiste. Son obsession pour la jeunesse et ses débauches constituent son empreinte.


Euphorie éphémère par Alma et Victoire, octobre 2020

Victoire Mougin

Dans ses œuvres, Larry Clark ne cherche pas à mon- nudité explicite en photographiant énormément de trer le « beau », mais une réalité objective. Avec ses jeunes adolescent(e)s dans des situations improvifilms, il est dans la continuité de son travail photo- sées et très intimistes. graphique. Le réalisateur refuse le pur documentaire, Dans The Smell Of Us, de nombreuses scènes de il préfère un travail d’immersion . sexes explicites sont présentes, Sa volonté est d’animer ses phone laissant peu de place à l’ima«sa tographies. Le film Wassup Rocgination du spectateur, ceux-ci kers est construit sur le « repordans une situation presque de maVolonté tage » d’une bande de skaters, laise devant ces scènes longues en banlieue de Los Angeles. On animer ses et brutes. Il fait de même dans y suit les personnages dans leurs ses photographies, où des jeunes, photos» vies à la manière d’une caméra souvent dénudés, se droguent, embarquée, nous donnant ainsi font l’amour sous l’œil attentif de l’effet de vivre leurs aventures, en pleine immersion. Larry Clark, à la limite du voyeurisme. Dans certaines scènes, il y a peu de dialogue et la Le travail de Larry Clark se traduit donc par cette temporalité est presque figée à la manière d’une singularité, cette objectivité dans ces sujets qui photographie. laisse place à la vraie vie : la jeunesse, ses découLarry Clark accorde beaucoup d’importance à la vertes, ses faux-pas et ses interrogations.

@Skip’s First Shot Tulsa par Larry Clark, 1971

@Cigarette soporifique par Alma et Victoire, octobre 2020

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Antony GORMLEY Par Emma Lejas & Imane Hamdani

Le corps humain dans l’espace selon Antony Gormley Actuellement l’un des artistes contemporains les plus célèbres d’Angleterre, Antony Gormley est un sculpteur réputé. L’anthropologie qu’il a étudié, ainsi que l’architecture et le bouddhisme sont des thèmes récurrents dans les œuvres du sculpteur. Il tente de nous faire prendre conscience de l’importance de l’extérieur du corps. A travers ses œuvres, l’espace transfigure : une salle vide n’est plus une simple pièce, mais une partie inhérente de ses sculptures. Pour rajouter plus de profondeur au réalisme de ses sculptures, Gormley utilise une technique de moulage bien particulière, en prenant pour base son propre corps.

L’empreinte du sculpteur dans ses œuvres Dans ses travaux antérieurs, Gormley utilisait son corps à la fois comme source et comme outil, créant des formes et des répliques de sa propre silhouette. Bien qu’il se soit aujourd’hui éloigné du côté de la production de ses œuvres, il continue d’utiliser des moulages ou des modèles de son propre corps dans plusieurs de ses créations. Ainsi, sa forme existe à la fois comme lui-même et comme un « every man » représentant la population au sens large, comme il l’explique dans une citation qui exprime parfaitement sa visée : «l’instrument est particulier, l’ambition universelle». Les personnages de Gormley sont posés de manière neutre, simplifiés, répétitives et ne possèdent pas de traits ou d’expressions faciales. Cela annule la capacité du spectateur à tirer des indices émotionnels tirés de l’expression et de la posture de la sculpture. Ainsi il est donc difficile d’établir quelconque interprétation ou schéma narratif sur ses œuvres. Les personnages existent simplement dans l’environnement dans lequel ils ont été placés, mais leur présence et leur apparence conduisent à un sentiment d’étrange et de bizarre. Manifestement ils sont humains, en particulier de loin, mais en regardant de près, leur humanité est moins apparente. De la même manière, leur placement dans le paysage habite l’espace, mais les personnages semblent manquer de sensibilité à ce qui les entourent.

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Ainsi se caractérise l’empreinte du sculpteur. La présence même de sa silhouette dans certaines de ses œuvres est ma,ifeste du thème récurrent du corps dans l’espace et les techniques de moulage sont véritablement la signature de l’artiste. L’approche du corps qu’il met en scène comme quelque chose de vide, à travers ces silhouettes inexpressives, traduis sa volonté de prouver que nos corps ne sont que ce qui englobe des choses plus profondes. Notre perception de l’environnement, nos sentiments, sont notamment ce qui se cache en nous. Il parvint à refléter dans ses œuvres sa philosophie, influencer par le bouddhisme et des questions existentielles puissantes comme la signification et le but derrière les créations réalisés par les Hommes. C’est ainsi que ses œuvres sont aussi reconnaissable, puisque le fruit de son travail provient directement de sa perception, de ses questionnements concernant les sujets qu’il traite.


exploitation du corps et de l’architecture Le sculpteur Anglais qualifie son travail comme une langue, ainsi, chaque nouvelle exposition raconte une histoire qui se raconte par le biais des œuvres présentées. Gormley assume une certaine obsession vis à vis du rapport de l’être dans l’espace. Comment nous humains nous adaptons mais aussi parfois, domptons et exploitons les éléments et superficies nous entourant. Parfois il nous arrive de prendre le dessus sur ces derniers, notamment à travers l’architecture. Mais la nature parvient aussi à reprendre ses droits sur nous, et nous écrase par une force qui nous semble infinie. Antony Gormley traduit bien ce rapport de force entre l’Homme et l’espace, notamment à travers son œuvre « Ange du Nord ». Les ailes de cette sculpture en acier sont incurvés, de manière à ce que l’ange semble vouloir englober l’espace l’entourant. Pourtant, la sculpture

de 54 mètres de hauteur, soit aussi grande que la Statue de la Liberté, paraît dépassé par la nature qui la surplombe. Pour une autre sculpture, c’est l’inverse. Exposé à Milan, « New Sculpture » (1984) possède des bras très longs. L’œuvre semble chercher à repousser les limites physiques, nous pouvons observer cela à travers ses deux bras touchant chaque extrémité de la pièce. Cependant, elle n’est pas enfermé dans cet espace, elle s’étend. Tentant de prendre sa place dans un monde trop étriqué. Mais Gormley n’exploite pas uniquement les corps. Il joue aussi l’illusion, notamment par le biais de créations architecturales. Dans une de ses récentes expositions «  In habit  », le sculpteur Anglais installe des barres d’aluminium dans une pièce vide, les faisant se croiser entre elles. Ces barres qui s’emmêlent donnent l’illusion de faire face à un mur ou à l’op-

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posé un seuil, invitant à être traversé afin de mener le spectateur à un nouveau volume de la pièce. Les créations de ces nouveaux espaces, invite le spectateur à rejoindre l’œuvre par le biais d’une chorégraphie. Entre seuils et murs, quand est ce que ce dernier peut franchir ou doit marquer un arrêt. Ainsi, les corps deviennent impliqués, notamment en s’adaptant à l’environnement les entourant. Gormley, c’est prendre une pièce vide et lui donner de nouvelles dimensions, exploiter toutes ses surfaces. Ici, les barres sont faites d’aluminium. Un matériau qui n’est pas choisi au hasard puisque ce dernier reflète la lumière de manière intéressante la lumière étant un élément qui influence sur la dimension d’une pièce.


J.P. GAULTIER Par Estelle Bourgoing & Dorothée Cheval

l’enfant terrible Jean-Paul Gaultier, c’est avant tout un mélange entre la couture classique et un monde de fantasmes. Son univers s’appuie sur le non genré. il laisse place à une joie de vivre et son empreinte marque les esprits, en particulier grâce à l’influence de sa marinère, qui deviendra une pièce emblématique du créateur et le symbole d’un style androgyne. @Jean-PaulGoude

la MARINIÈRE On le surnommait “l’enfant terrible”, styliste, créateur de parfum et grand couturier français, né le 24 Avril 1952 à Bagneux, Jean-Paul Gaultier est aujourd’hui le fondateur de l’entreprise JeanPaul Gaultier. Bien que ses débuts n’aient pas été simples au vu de l’échec de sa toute première col-

lection, le styliste se relève et n’abandonne pas.

Dans les années 1980, il révolutionne la mode et devient un homme incontournable. Grâce à ses défilés spectaculaires et originaux, il renverse les conventions du vêtement : il habille les hommes

en femmes, habille les femmes de corsets, il fait défiler des mannequins qu’il croise dans la rue et qui n’ont pas les caractéristique même du mannequin de l’époque. Osant renverser les codes de la mode, c’est en 1983, qu’il revisite la célèbre marinière au goût du jour. Cette pièce devient alors l’un de ses symboles. Le célèbre couturier français intègre donc cet essentiel dans sa collection de prêt-à-porter masculine “ Toy Boy”. L’homme a réussi à s’approprier ce basique en a fait un vêtement rappelant l’esprit de marin viril. Cette vision est nourrie par le film “Querelle” de Rainer Fassbinder, adaptation du roman “Querelle de Brest” de Jean Genet. Ce film met en scène un personnage suscitant le désir féminin et masculin. La fameuse marinière de JeanPaul Gaultier est perçue comme une pièce sensuelle, qu’il a su remasteriser en faisant diverses découpes, en ajoutant des boutons et des couleurs. Mais le styliste ne s’arrête pas là, il intègre éga-

@dorothéecheval

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@marieclaire

lement ce fameux symbole à la collection de prêtà-porter pour femme “Dadaisme”. Dans celle-ci, il met en lumière la marinière de manière toujours élé-

gante, et cette fois-ci, sous forme de corset (étant lui aussi une des signatures du couturier).

mixité assumée “J’aime inverser les rôles, briser les codes établis qui n’ont plus de sens aujourd’hui. Je ne crois pas que les tissus aient un sexe, pas plus que certains vêtements.” En effet, le créateur se démarque aussi par son ouverture d’esprit et sa manière de penser. Le couturier se plaît à dévoiler la sensibilité de

Jean Paul Gaultier bouscule donc les conventions avec sa jupe pour homme et remet en cause les les clichés vestimentaires propres à chaque sexe. il se fait le roi d’une mixité assumée et explosive : cette pièce a le mérite de briser les tabous et de susciter de nouveaux questionnements sur

l’homme et à revendiquer la puissance féminine : il le prouve à l’occasion de sa collection “Et dieu créa l’Homme” en 1985. Dans cette nouvelle ligne de vêtement, il confectionne un vêtement en trompel’œil. Il s’agit d’un pantalon à très larges jambes muni d’un plan rabattable sur le devant.

l’identité sexuelle. Pour le couturier, la réponse est simple : « Un homme ne porte pas sa masculinité dans ses vêtements. Sa masculinité est dans sa tête. » Il lance l’année d’après la collection “une garde robe pour deux”, sa première collection mixte. Entre décolletés pour les hommes et bustiers smoking pour les femmes,

Jean Paul Gaultier s’amuse à manipuler les clichés entre chaque sexe. Le créateur, un des précurseurs de la mode unigenre, a su adapter cette mode au fil des années et y mettre sa pate artistique, de sorte que la mode androgyne lui soit maintenant associée. On reconnait son style par cette mixité des genres.

«je défend une chose: ne pas avoir honte de sa différence»

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2021, N°9

2021, N°9

PROPOSITIONS DE COUVERTURE ARBITRAIREMENT NON RETENUES ?

Sous la direction complice de benoit breton

artère Sous la direction complice de benoit breton

“ A l’œuvre, on connaît l’ouvrier ”, au travers de cette citation, Aristophane expose l’idée que chaque artiste possède une empreinte qui fait de son travail une œuvre (un art) unique. Depuis le début de l’histoire des Hommes, les artistes ont toujours cherché à faire reconnaître leurs talents en se démarquant au travers des récurrences artistiques : des similitudes qui vont promouvoir leurs différences. L’écriture de l’artiste devient une marque de fabrique, et cette signature un gage de l’originalité de chaque créateur.

“ A l’œuvre, on connaît l’ouvrier ”, au travers de cette citation, Aristophane expose l’idée que chaque artiste possède une empreinte qui fait de son travail une œuvre (un art) unique. Depuis le début de l’histoire des Hommes, les artistes ont toujours cherché à faire reconnaître leurs talents en se démarquant au travers des récurrences artistiques : des similitudes qui vont promouvoir leurs différences. L’écriture de l’artiste devient une marque de fabrique, et cette signature un gage de l’originalité de chaque créateur.

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artère

Par Émilie Roques & Eugénie Sonntag 2021, N°9

2021, N°9

Par Sasha Berlinson & Maxence Bodin

artère

Sous la direction complice de benoit breton

Sous la direction complice de benoit breton

“ A l’œuvre, on connaît l’ouvrier ”, au travers de cette citation, Aristophane expose l’idée que chaque artiste possède une empreinte qui fait de son travail une œuvre (un art) unique. Depuis le début de l’histoire des Hommes, les artistes ont toujours cherché à faire reconnaître leurs talents en se démarquant au travers des récurrences artistiques : des similitudes qui vont promouvoir leurs différences. L’écriture de l’artiste devient une marque de fabrique, et cette signature un gage de l’originalité de chaque créateur.

“ À l’œuvre, on connaît l’ouvrier ”, au travers de cette citation, Aristophane expose l’idée que chaque artiste possède une empreinte qui fait de son travail une œuvre (un art) unique. Depuis le début de l’histoire des Hommes, les artistes ont toujours cherché à faire reconnaître leurs talents en se démarquant au travers des récurrences artistiques : des similitudes qui vont promouvoir leurs différences. L’écriture de l’artiste devient une marque de fabrique, et cette signature un gage de l’originalité de chaque créateur.

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Par Anna Julius Ekambi, Chloé Mazingue & Lilaï Rizki Jourdan

Par Alizée Remond & Mathilde Vanderhaegen


PROPOSITIONS DE PUBLICITÉS ARBITRAIREMENT NON RETENUES  ?

Par Darya Chernenko & Mahau Conti Granteral

Par Rania Hatimy & Diane Martignac

Par Lauryne Louchet & Sara Mahbobi

Par Léa Brondello & Léo Garel


L’univers Miyazaki Anna Julius-Ekambi, Chloé Mazingue & Lilaï Rizki Jourdan

qui est-il ? Hayao Miyazaki est un dessinateur de manga et un réalisateur de films d’animation. Né à Tokyo en 1941, il fait partie de la génération d’après-guerre, il a grandi dans un Japon traumatisé par la bombe, ce qui a fortement influencé son œuvre.

L’impact de la bombe En Août 1945, le Japon est frappé par deux bombes atomiques dans les villes de Nagasaki et Hiroshima. Ces bombardements ont créé un traumatisme profond dans la société japonaise, ils sont les piliers du mouvement littéraire Genbaku.

Le Genbaku bungaku traduit du japonais “ ”, désigne tous les écrits de Nagasaki et Hiroshima et plus largement tous les écrits relatifs à la bombe atomique. Il peut s’agir de témoignages, documentaires, poésies, œuvres de fiction dont les thèmes récurrents sont les bombardements.

L’art de Miyazaki à été profondément influencé par ce mouvement. Dans ses films, le réalisateur porte un regard critique sur les événements du passé et dénonce le goût de la dévastation chez les hommes. Pour lui, les hommes imposent leur cruauté et leur violence; ils dégradent et profanent la nature et entament des guerres. Les militaires sont d’ailleurs les seuls personnages qu’il méprise

«imposent leur cruauté » réellement. À plusieurs reprises Miyazaki a montré la folie des militaires et ses conséquences dans des scènes extrêmement dures où l’on y compte les morts par milliers. La violence dans ses films est symbolique ou dissimulée par des métaphores, le sang aussi est très peu présent dans ses films. La possibilité de voir le monde détruit du jour au lendemain est au cœur de son œuvre .

@Nausicäa et Princesse Mononoke, 1984 et 1997

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W

@Le château ambulant, 2004

. . . s u r l e p ay s a g e Miyazaki place ses histoires dans des décors utopiques, féeriques mais aussi désertiques, abandonnés. Il met la nature au premier plan dans son œuvre, sous différentes formes avec beaucoup de couleurs, de lumières et de détails. Dans ses films la

Les décors désertiques de ses films sont largement inspirés des paysages de guerre et de ruines que Miyazaki a pu voir autour de lui. Il a imaginé pour ses œuvres plusieurs paysages stériles, sans vie. Les ruines et lieux abandonnés présents dans ses films sont généralement le ré-

nature n’est jamais inerte, elle est même un acteur important de la lutte contre sa destruction par l’homme. Miyazaki va porter une attention particulière à la création de paysages toujours plus féeriques et magiques qui sont le reflet de son envie d’un monde utopique.

sultat de la guerre ou d’une mauvaise utilisation de la technologie. Ces paysages sont souvent de couleurs ternes, pâles. Les scènes de guerre prennent vie dans un ciel assombri par la fumée des flammes qui fait écho au ciel lors des bombardements. Ces batailles aériennes reflètent sa passion pour les machines volantes.

La notion d’explosion est très importante dans le cinéma de Miyazaki, cette menace plane souvent au-dessus de la vie du personnage qui arrive à échapper au feu et au souffle qui s’ensuit, mais il n’en fait pas pour autant son sujet principal. Anna JULIUS, Chloé MAZINGUE Lilaï RIZKI

«Le reflet de son envie d’un monde utopique » @Nausicaä et la valée du vent, 1984

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LE VOYAGE DESINSTANTS Par Faustine Schuhmacher & William Bradford

Henri cartier-bresson Photographe français du 20e siècle, il a su se démarquer dans son approche de la photographie avec des photos instantanées. Spécialisé dans la photographie de rue et la représentation des aspects insignifiants de la vie quotidienne, il crée de ce fait le concept d’instant décisif qui deviendra son empreinte visuelle.

@Henri Cartier Bresson, Derrière la gare St-Lazare, 1932

LE PARADOXE CHEZ HCB Les grands artistes ont le pouvoir de créer des choses qui nous étonnent, nous fascinent et parfois même nous transcendent. Henri Cartier Bresson, photographe qui a marqué son époque ainsi que le monde de la photographie tant son empreinte visuelle demeure puissante, portait son regard sur les moments minuscules et éphémères de la vie.

Il considérait l’appareil photo comme un carnet de croquis, un dessin en accéléré. En réalité, le photographe voulait être peintre mais après avoir découvert un cliché illustrant trois jeunes garçons courant vers la mer réalisé par le photographe hongrois Martin Munkàsci, il déclare : « J’ai soudain compris que la photographie peut fixer l’éternité dans un instant. C’est la seule photo qui m’ait influencé ». C’est après cela qu’il décide de se consacrer à la photographie. Il a ensuite fait de la rue son terrain de jeu et a su se différencier avec ses photos instantanées, en noir et blanc, jamais recadrées au tirage. Le paradoxe chez HCB c’est qu’il considérait la photographie comme un art mineur. Le sujet le plus important pour lui était de pouvoir exprimer la constance de la condition humaine : « Tu comprends, la photographie ce n’est rien, il n’y a que la vie qui m’intéresse, la vie, tu comprends » a t-il confié à Vera Feyder. Par conséquent, il ne se qualifiait pas lui-même comme photographe et était loin de comprendre son impact et le concept qu’il créait et maîtrisait à merveille.

@Martin Munkàsci qui a influencé Henri Cartier-Bresson, 1931

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«il faut mettre sur la même ligne de mire, la tête, l’oeil et le coeur» @Henri Cartier-Bresson par John Loengard, 1987

L’ i n s ta n t d é c i s i f En 1952 Henri Cartier-Bresson publie Images à la surprenants. C’est un véritable jeu d’esprits. Sauvette et pour la version américaine de son ou- Une intellection qui permettrait de réussir vrage ses éditeurs cherchent un titre plus accrocheur à saisir les instants les plus subtils, les plus : « The Decisive Modoux, les plus exalment ». tants. Rien ne pour«La photo, c’est la Si Cartier-Bresson rait faire vivre ces concentration n’a lui-même jamais infimes moments qui théorisé la notion passent parfois plus du regard. C’est d’instant décisif, en vite qu’un claquephotographie cette ment de doigts. La l’œil qui guette» notion est aujourd’hui photo, saisir l’instant devenue un concept capital. Une sorte de formule fatidique concéderait à rendre ces moments magique qui donnerait naissance à des clichés intemporels et c’est pourquoi tout était important pour HCB de la composition au sujet. Il s’agit de figer dans un cadre spécifique un su@Faustine Schuhmacher, 2020 jet, une action, un événement dans des conditions qui ne se reproduiront plus. Contrairement à l’idée que l’on pourrait se faire, le timing n’est pas le seul élément à prendre en considération. L’environnement, l’espace, le graphisme, le cadrage, la composition. L’association espace/temps/émotion serait la recette qui expliquerait la réussite des œuvres d’Henri Cartier Bresson. Ce concept c’est l’héritage que nous a laissé cette figure immortelle de la photographie qui continuera d’influencer encore des générations de photographes de rue.

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spectredelumiEre Par Darya Chernenko & Mahau Conti-Granteral

l’art de mettre ses fantômes en lumière La fille Cactus, illustratrice aux œuvres chaleureuses, future bédéaste, aux coups de crayon assurés et aux créatures originales nous emporte dans son univers où gravitent « mythologie, contes revisités, ambiance fumante de vieux jazz et fantômes ».

Un autoMNe éternel La fille cactus s’approprie la couleur. Elle utilise avec talent les camaïeux de couleurs chaudes et intenses d’automne qui illuminent toutes ses œuvres. S’ y ajoutent des couleurs froides dans les bleus, gris et vert qui sont harmonieuses et qui, par contraste, mettent en valeur et en lumière sa palette aux tons si chaleureux. Puis, la présence de points lumineux qu’elle égrène poétiquement, donne vie et apporte une délicatesse infinie à ses dessins. Ses œuvres baignent dans une lumière extrêmement chaleureuse,

réconfortante et bienveillante. Son univers si authentique est ainsi reconnaissable à l’ambiance tamisée qui s’en dégage. L’auteur souligne que “ses créations sont des illustrations qui s’inscrivent toujours dans l’espace temps se situant entre crépuscule et aube”. A ces heures où les sentiments les plus intimes sont mis en exergue et où l’on se confie à soi-même plus volontiers. La fille Cactus est reconnaissable par son style graphique. Elle utilise les techniques du fusain, du feutre ainsi que

.le crayon à papier, qui donnent à ses dessins des allures structurées. Ses coups de crayons sont affûtés et le travail du mouvement montre combien son trait n’est pas figé. Son œuvre finie laisse apparaître les lignes des croquis initiaux, comme une confession sur ses tourments ou une mise à nu. Adepte des lignes nettes et abouties, le grain fort de ses couleurs produit une densité palpable et émouvante. C’est avec beaucoup de douceur dans le trait, qu’elle trace des contours nets et qu’elle laisse la lumière s’infiltrer au travers de ses illustrations. Le contraste entre la force de ses couleurs, la précision de ses traits et la lumière si chaleureuse rend

.ses créations uniques, personnelles et identifiables. Elle nous présente ses personnages fantastiques, ses créatures mythologiques et ses autoportraits qui incarnent tous une émotion, une atmosphère, un sentiment, qu’il s’agisse d’amour, de solitude, d’enfermement et de dépression. Ses personnages récurrents et très attachants traduisent ses pensées et états d’âmes la mettant en scène tel “un cactus piqué par ses propres épines”. Il y a une redondance des masques froids et neutres attribués aux personnes et aux foules dans ses dessins qui sont totalement déshumanisés, donnant plus d’importance alors au reste des scènes et des personnages. @La Fille Cactus

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une trace flamboyante La fille Cactus, aussi jeune soit-elle, sait nous séduire. En découvrant son œuvre lumineuse, il est impossible de ne pas être saisi par le charme incontestable de ses illustrations qui nous inondent de son univers unique, chaleureux, profond et très esthétique. Même si l’on perçoit les lointaines influences d’autres auteurs tels que Enki Bilal, Moebius et Loisel mais aussi celles d’arts japonais, floral et art nouveau, la fille Cactus sait marquer notre sensibilité et nous toucher profondément et durablement car elle a sa propre signature. Elle incarne en effet toutes ces qualités et caractéristiques techniques auxquelles s’ajoutent une fraîcheur entachée de profondeur, une douceur feinte, au travers d’une excellente maîtrise graphique, d’un talent à jouer avec la lumière, la chaleur, l’univers magique de ses personnages et de ses ciels étoilés, comme autant de souvenirs rassurants de l’enfance.

@La Fille Cactus

Car en effet, les fantômes qui hantent ses illustrations font partie intégrante de sa signature : lorsqu’ils ne sont pas des personnages à part entière, ils s’invitent dans le décor ou, de manière subtile, dans l’œuvre. On les retrouve dans la fumée, la vapeur, glissés discrètement près d’un personnage ou d’un objet : ses fantômes ne la quittent pas. Un autre personnage, lui aussi récurrent, et fort symbolique est celui de la fille-chat. Elle incarne la fille cactus sous les traits d’un chat.

« un monde où l’inanimé devient vivant»

Cette apparence est à son image lorsqu’elle est triste et désemparée. La fille cactus la met en scène comme un rempart face à l’adversité et aux conflits intérieurs qui la bouleversent. Ces masques permettent à l’illustratrice de se protéger de ses démons et il semble qu’elle mette son art au service d’une thérapie intime qui, par la lumière et la force de ses traits, la soulage. Sa vérité, même si elle la tait pudiquement, existe sous ces traits positifs et sa force c’est de nous en laisser une empreinte tenace.

Celle d’une jeune femme émouvante, hantée et meurtrie qui dresse des fantômes dans un monde où l’inanimé devient vivant et où le vivant devient spectre. La lumière cache chez elle, le sombre, le noir, le terne et l’angoisse. La peur et l’art pouvant aussi être une puissante thérapie @Darya CHERNENKO l’aidant à trouver un chemin pour une paix intérieure. Comment oublier cet artiste qui sait si bien nous émouvoir en jouant la mélodie du bonheur alors que c’est bien celle du malheur qui hante douloureusement Darya CHERNENKO et Mahau CONTIses nuits du crépuscule à l’aube. GRANTERAL 49


claude viallat Par Karine Girardo & Apolline Havard

ET SON EMPREINTE DANS L’ART Claude Viallat est une figure essentielle de l’art contemporain. Il jouit d’une renommée internationale. Il invente une forme neutre, ni naturelle ni géométrique, répétée sur une toile libre, sans châssis, déterminant la composition de l’œuvre. L’affirmation de son style, avec l’invention de cette forme, immédiatement reconnaissable, est le point de départ d’une exploration infinie des potentialités de la couleur et des matières.

LA FORME Claude Viallat se lance dans l’aventure de la répétition, à partir d’un motif, avec l’idée que cette empreinte devienne sa signature. C’est en 1966, qu’il invente une forme, un croisement entre un haricot, une palette et un osselet, qui devient sa forme, déclinée à l’infini. Pour le peintre, la forme n’a pas d’importance, il s’en libère totalement en adoptant une forme née du hasard, quelconque, abstraite, toujours la même qu’il applique régulièrement sur la toile à l’aide d’un pochoir ou d’une éponge. Son travail est fondé sur cette répétition d’une forme simple mais fonctionnant comme un logo, elle a cette capacité à parcourir indéfiniment l’espace et offre un effet illusionniste. Son usage permet de former un tout et donne à ses œuvres un rythme vivant et cohérent. Claude Viallat, joue avec ces formes qui se répètent à intervalles réguliers.

De part leur ordonnance, et du fait de leur multiplication et de leur répétition, elles prennent une grande beauté et acquièrent une grande sérénité. L’invention de sa forme renommée « forme-Viallat » est sa base arrière pour montrer au front de l’art ébranler les certitudes sur le châssis, lors de la révolution Support/Surfaces en 1969, il en est la figure principale. En effet, le peintre découpe une forme quelconque dans une plaque de mousse en polyuréthane et l’applique directement sur la toile non tendue sur châssis, de façon aléatoire. La découverte de cette forme de hasard, sans qualités particulières, lui permet de résoudre le problème du style et surtout de continuer de peindre en toute liberté. L’empreinte de l’éponge n’est pas entière sur le bord de la bâche pour permettre au regard d’imaginer la suite de l’œuvre.

@Claude Viallat - LA COULEUR À PERTE DE VUE installation view, Luxembourg, 2014 @Bernard Ceysson

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@Apolline Havard

LES COULEURS La couleur est l’une des empreintes fondamentales des œuvres de Viallat. Elle est, plus qu’un simple outil de l’artiste peintre, une présence vivante à ses côtés, et il avoue lui-même un lien infrangible avec elle.

‘‘ Je m’arrête quand la couleur m’a mis dehors ’’

Claude Viallat travaille beaucoup ses couleurs. Elles sont d’ailleurs très riches autant que sont riches le caractère et les formes données par les tissus divers qu’il emploie. Ses couleurs sont lumineuses. Elles ont une parenté avec Cézanne et surtout Matisse Le peintre joue avec les contrastes de couleurs, chaudes, froides, complémentaires. La couleur est fluide ou épaisse, elle traverse la toile, coule, provoque des bavures et des aléas. La peinture à l’huile étant trop épaisse, est abandonnée en 1964 pour un mélange plus fluide de gélatines, de pigments

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et d’eau qu’il utilise comme une teinture. La teinture permet de porter la couleur au cœur du support. L’arrière des œuvres, qui est habituellement caché, devient alors visible comme le recto. Il explore aussi les effets des interventions climatiques, physiques, chimiques. Parfois l’artiste soumet son travail à l’épreuve de l’eau, de la pluie, de la terre et du feu. Il utilise, par exemple, le principe de la solarisation.


Pierre & Gilles Par Jeanne Perrone & Jade Mortureux

UN ART POPULAIRE Connus pour leurs productions de portraits dans des mises en scène toujours plus extravagantes, devenu leur empreinte  : Pierre et Gilles mêlent photographie et peinture pour obtenir un travail graphique kitsch et haut en couleur.

UNIVERS kitsch Pierres et Gilles forment un couple épanoui dans leur activité artistique. Ils s’installent ensemble à Paris pour donner la pleine puissance à leur collaboration. Pierre est photographe de formation mais les moyens d’impressions limités dans les années 1970 ne permettent pas de traduire tous les contrastes recherchés par l’artiste. Gilles a alors l’idée géniale de corriger les lumières en peignant à l’acrylique les photographies. En ce sens, Gilles est un précurseur de la retouche photo à coup de pinceaux, il est vain de rappeler que leur travail n’est pas de la retouche numérique. Ils mettent en scène leurs proches souvent célèbres, Iggy Pop, Jean Paul Gauthier, Isabelle Huppert, Stromae ou encore Catherine Deneuve. Ces œuvres sont toujours à tirage unique et bénéficient d’un encadrement spécifique à chacune pour en rehausser l’unicité. Les deux

@Zahia, Nouvelle Eve (2011)

@Stromae, Forever (2014)

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artistes font, toujours au préalable, une longue étude de conception du décor à l’aide de croquis avant d’en réaliser une version réelle. Ce qui contribue à l’empreinte des artistes ce sont ces fonds toujours originaux et très colorés s’inscrivant dans un univers totalement kitch, pourtant pas recherché. On y voit toujours des couleurs pimpantes, des motifs variés, parfois un cadre fleuri avec de nombreux détails : maquillage, éclairage et coiffures, inscrivant donc les œuvres dans un univers involontairement kitch devenu propriétaire. Leur style peut se caractériser aussi par l’usage volontaire d’éléments démodés ou de mauvais goût. Leurs décors surchargés et non authentique révèlent un univers irréel, également visible sur les modèles aux traits parfaits et une lumière pailletée, le tout représentant un idéal, une perfection : ceci est leur marque de fabrique.


@jademortureux @Jade Mortureux

décor trompeur Pierre et Gilles ne changent jamais les fondamentaux de leur style. Leurs œuvres procèdent de la même façon de faire avec cette même vision artistique si particulière. « Derrière le rêve d’enfant et les couleurs, il y a beaucoup de mélancolie et de tristesse, disent-ils. Dans chaque œuvre il y a un double regard. » C’est au travers de leurs fabuleuses mises en scène que ces artistes abordent des thèmes aussi différents que le POP, la mort ou encore l’étrangeté de la vie. Contrairement

«dans chaque œuvre ilya un double regard»

à ce que l’on croit, Pierre et Gilles n’avait pas pour but de représenter la culture gay qui semble apparaître dans leurs portraits. Ils créent une récurrence d’une exposition artistique au prisme d’une forme de violence de l’image : soit le personnage central est blessé, (comme Saint Sébastien transpercé de flèches) ; soit par l’expression d’un mal-être visible par des larmes qui sont souvent présentes dans les portraits. C’est aussi cet aspect qui représente l’empreinte artistique de Pierre et Gilles. Les personnalités d’aujourd’hui contribuent à faire revivre les icônes d’autrefois en abolissant la distance entre les générations. Passionnés par leurs cours d’histoire, ils transposent les icônes modernes que sont les stars ou des inconnus 53

venant de partout dans des représentations de personnages célèbres de l’histoire. Au travers des figures bibliques ou mythologiques, des costumes ou simplement de la mise en œuvre d’une nudité parfaite, ces artistes osent toucher à ce qui est de l’ordre du sacré, avec toujours une touche de provocation ludique comme par exemple Zahia Dehar, ancienne prostituée, est représentée en Ève ou la représentation du Paradis de la religion musulmane avec des guirlandes ainsi que des paillettes et trois garçons nus qui se tiennent la main à l’entrée etc. Leur empreinte représente ainsi l’Humanité dans sa globalité en se servant de l’actualité et de l’histoire.


CINDY SHERMAN Par Laureen Tourneur, Sarah El Gaïdi & Léa Gaily

mÉthamorphoses Au fil de ses autoportraits et de ces incessantes métamorphoses se révèlent ses obsessions et sa fantaisie.

@Untitled #96

m i l l e v i sag e s Cindy Sherman est née en 1954 à Glen Ridge dans le New Jersey. Elle habite et travaille à New York. Considérée comme l’une des artistes les plus influentes de sa génération, elle a connu la célébrité à la fin des années 1970 avec le groupe d’artistes Pictures Generation. Son œuvre photographique est dans sa majeur partie consacrée au portrait, sans jamais recourir à d’autres modèles qu’elle-même. Paradoxalement, c’est en disparaissant maquillée, sous sa perruque, affublée de postiches, vêtue de costumes, posant dans des décors que Cindy Sherman est devenue une icône. Depuis ses Untitled Film Stills, de 1977, fausses photographies de films dans lesquelles elle joue des rôles et des actrices inspirés du cinéma des années 1950 et 1960, Cindy Sherman a instauré un protocole encore inchangé aujourd’hui: devant son appareil, elle est à la fois ac54

trice, costumière, modèle, technicienne, éclairagiste, truqueuse, accessoiriste, retoucheuse et… actrice. Elle seule fabrique son image et en décide. Parfois avec le souvenir d’un film, la mémoire d’un tableau, la fantaisie d’un vêtement, le goût des contes de fées ou tout simplement avec son imagination, elle déconstruit les archétypes tout en explorant les visages multiples de la féminité. Elle est dans l’exploration constante d’une multitude d’identités. Abolissant la frontière entre réalité et fiction, elle incarne des images aussi saisissantes que complexes. D’une photo à l’autre, elle est tout juste méconnaissable. Et pourtant, quelque chose nous semble familier, dans le regard, dans l’intention. Mais il n’y a qu’une seule personne et c’est elle, grimée sous une panoplie d’artifices.


UNTITLED Depuis les « Untitled Film Stills », Cindy Sherman n’a jamais titré aucune de ses images. Elles sont mentionnées Untitled (sans titre), suivies d’un numéro correspondant à leur ordre de production. Utilisés dans cet ouvrage par les auteurs sont des noms employés communément par l’artiste ou ses commentateurs au fil des années, ils ne sont pas des titres.

«et PArfois, je disparaîs dans mes photos»

@Untitled #LSL

En 1975, dans les cinq images de Untitled A-E, transformée par le maquillage et les costumes, Sherman incarne différents personnages, notamment une petite fille et un clown. La figure du clown, que l’on retrouve à plusieurs reprises dans ces œuvres associée au masque, à l’enfance, au divertissement, mais aussi à la régression et à la monstruosité, donne la mesure du jeu constamment entretenu par Cindy Sherman entre l’artiste et son «sujet». Cet écart, qui donne au spectateur la liberté d’articuler et de compléter l’histoire des personnages qu’elle incarne, traverse et singularise en effet toute l’œuvre. Aussi sa démarche ne s’apparente pas à la

@Untitled #574

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tradition de l’autoportrait, mais à celle du changement d’identité, portée ici à la dimension d’une réappropriation critique des apparences sexuelles et sociales. S’offrant comme miroir et modèle à ses contemporains, Cindy Sherman examine les définitions de l’apparence et du genre dictés par les médias modernes. Seule à figurer dans ses photographies, elle nous renvoie à la fragilité du « moi » face aux mécanismes de l’identification et de la reconnaissance sociale. Elle questionne donc le genre par le travestissement et la caricature, à travers ces autoportraits: c’est ce qui caractérise l’empreinte de Cindy Sherman dans son œuvre.


InEs Longevial, le nEo-cubisme Par Chloé Boutin & Noa Bessard

Inès Longevial est une jeune artiste française qui continuera de faire parler d’elle. Dans un esprit néo-cubiste, elle a su trouver et construire sa signature grâce à l’utilisation des aplats de couleurs, la décomposition des représentations ou encore d’une représentation de la nature qui lui est propre. Sa signature lui permet de représenter le vivant d’une manière singulière, à la fois poétique et naïve.

la singularisation des êtres singularise la représentation des êtres humains. C’est donc dans sa déstructuration et dans son appropriation de la réalité que cette artiste trouve à la fois le sens de son œuvre et sa signature. C’est à la fois dans sa représentation des êtres humains que Inès se distingue des autres artistes, mais c’est aussi dans sa façon de représenter le vivant en général.

Une des caractéristiques de ses peintures est l’expression de la sensualité, qu’elle représente depuis peu avec plus de confiance. Les couleurs qu’elle utilise sont beaucoup plus «nudes» qu’à ses débuts. Elles ont tendance à rappeler des couleurs que l’on retrouve directement dans la nature, autre empreinte significative chez Inès Longevial. Cette artiste qui utilise des aplats de couleurs dans des formes prédéfinies décomposent les représentations réalistes des êtres vivants. Cette décomposition résulte d’une intention de l’artiste d’accentuer la réalité à laquelle nous ne faisons pas toujours attention ainsi que de son inspiration néo-cubiste. C’est cette décomposition qui fait sa signature, qui la distingue des autres et fait d’elle une artiste singulière. Grâce à son travail sur la peau des individus, Inès

«accentuer la réalité par la fragmentation » @Inès Longevial, autoportrait

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@Inès dans son atelier parisien, en 2020

u n e n at u r e n a ï v e La place de la nature est centrale dans le travail de cette jeune artiste. Que ce soit grâce à des touches discrètes, dans le fond ou encore au cœur de l’œuvre, la nature est toujours présente. Le milieu naturel d’Inès se distingue des représentations traditionnelles en lui donnant un aspect unique dans le style. Les formes sont très épurées et de couleur unies. Cela s’observe notamment au niveau des fleurs, qui sont propres à son style mais dessinées de façon assez naïve dans ses débuts

de carrière. Les papillons sont les nouveaux venus au cœur de l’œuvre d’Inès longevial. C’est une nouvelle particularité de l’artiste qui ne représentait jusqu’à lors comme êtres vivants uniquement des êtres humains. Ces nouveaux venus témoignent à nouveau de l’ADN si particulier de cette artiste qui est la représentation du vivant dans une réalité poétique qui lui est propre.

« Les papillons sont les nouveaux venus au cœur de son œuvre » @Chloé Boutin, Le Surf, inspiration de la nature d’Inès Longevial

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mangas Par Thomas Blanchard & Mathieu Boudjema

hirohiko araki Précis et brouillon, élégant et sale, beau et moche, c’est comme ça que la plupart des gens décrivent l’empreinte artistique de Hirohiko ARAKI, maître du manga. Pour ARAKI lui-même, cette œuvre est une ode à l’humanité et place les personnages au-dessus de l’histoire grâce à un style inoubliable tant critiqué qu’adoré.

u n pa r a d ox e Sa vision de l’esthétique graphique est atypique pour un auteur qui est un moteur de la maison d’édition Shueisha. Plusieurs auteurs de mangas déclarent

vénérer le talent d’Araki. Son style est à la fois beau et moche, élégant et sale, précis et brouillon. Araki n’est pas un illustrateur ordinaire, son dessin représente

environ 50% de son succès car n’existant nul part ailleurs. Araki semble avoir la volonté de parodier Ken le survivant dès le début, tant la violence et la caricature

sont exacerbées. Mais plus tard, tout doucement dès Golden Wind, Araki fait migrer son style graphique vers quelque chose de différent, de plus « racé ». Bien que plus brouillon et toujours aussi excessivement violent, le dessin est plus élégant. On dit de JoJo’s bizarre aventure que c’est un manga crypto-gay. Araki est un parodiste. Il parodie la pop-culture en général en insérant des références cinématographiques qui arrivent comme un cheveu sur la soupe, en faisant poser ses personnages de manière inutilement lascive et efféminée quelque soit leur gabarit. Et pour que tout ça marche, il s’appuie sur ses capacités en dessin, très puissantes, qui lui permettent parfois de dessiner des objets de manière extrêmement précise, d’autres fois de représenter des situations abstraites, mais surtout de «designer» des personnages de telle manière qu’ils soient à la fois élégants et ridicules. Hirohiko Araki, c’est un auteur qui se joue de ses lecteurs depuis le début, en leur faisant avaler naturellement cette antinomie permanent.

«et pourquoi pas?»

@ThomasBlanchard

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@HypeBeast

araki & la mode Inspiré de Michel-Ange, son style baroque va se faire reconnaître dans le domaine du manga et le mangaka de JoJo’s bizarre adventure va en profiter pour combiner ceci avec sa deuxième passion : la mode. Chez Araki, elle a toujours été un domaine qui le passionne et qu’il décrit comme étant le domaine dans lequel il aurait travaillé si le manga n’avait pas fonctionné. En effet, on retrouve très souvent des références de la mode dans ces oeuvres de part les poses que vont prendre les personnages, imitant à merveille les modèles présent dans les magazines fashion mais aussi dans les habits que le mangaka va dessiner pour ses personnages. Les protagonistes secondaires vont généralement tous avoir un physique disgracieu qui les rend drôles. Très influencés par la mode, les personnages de son manga deviennent androgynes et adoptent des traits

fins. Ils ont même les lèvres ouvertes de manière sensuelle, comme peuvent le rappeler les photographies de mode. Dès lors, le design général du manga peut paraître plus nébuleux, moins précis, plus biscornu par moments. Mais en réalité, c’est parce que Araki innove. Il conserve son aspect violent et

tulant: “Le Louvre invite la bande dessinée» et plus tard au musée de Tokyo pour une exposition qui lui sera entièrement consacrée.

parodique mais en lui mettant un masque froid inspiré de l’imagerie de la mode. Pour les 90 ans de Gucci, la marque n’a pas décidé de faire appel à un photographe ou à un graphiste connu, mais de faire appel à Hirohiko ARAKI qui, de part ses performances graphiques, à été le point d’ancrage de la nouvelle campagne

de la marque intitulé: “Jolyne fly high with Gucci”. Enfin un défi à la hauteur de ce dessinateur, dont les références à la thématique de la mode sont courantes dans ses œuvres. Le mangaka réussi même à se faire une place au louvre à Paris lors de l’exposition du vendredi 3 avril 2009 s’inti-

«Un aficionado de la mode»

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CLINT EASTWOOD Par Flavia Martin & Eden Pautler

hÉros du clair obscur Depuis plus de 60 ans, le cinéma a produit des œuvres qui ont atteint le sommet de la perfection. Certains réalisateurs, acteurs et producteurs sont devenus des génies du septième art. En effet, l’industrie du cinéma a révélé des légendes, dont Clint Eastwood : « Le dernier des géants ». L’utilisation du clair obscur en a fait sa marque de fabrique. En quoi cette technique a-t-elle marqué le cinéma Hollywoodien ?

L e r é a l i s at e u r Il ne dit jamais « Action » et « Coupez ». Il va plutôt dire « Allez-y » et « Arrêtez ». Il dit «Je fais ce que je veux ! » Et quand il joue, il regarde le kodak, quand il en a assez il fait une grimace pour dire d’arrêter. Il ne veut pas qu’on intellectualise, qu’on réfléchisse trop. Il ne fait pas beaucoup de prises. Cela résume parfaitement la filmographie de celui qu’on appelle aujourd’hui « le dernier des géants d’ Hollywood » #Clint Eastwood. Eastwood se concentre sur des histoires qui l’interpellent et le sensibilisent ( sociétés, guerres ) et pour les faire ressortir, son moyen de prédilection est l’utilisation du clair-obscur et son jeu de lumière. Le natif de San Francisco met son incroyable talent ainsi que toute @photo sous copyright son énergie en totale transparence tant au niveau de la réalisation que du montage. le réalisateur californien s’est laissé tomber sous

l’utilisation du clair-obscur, un procédé cinématographique qui appuie fortement la complexité de son œuvre. Il en fera sa trace, son empreinte, sa signature. Le jeu de lumière devient sa morale et la thématique principale de ses œuvres. Le clair-obscur est une technique artistique inspirée par la peinture et permet la production d’images contenants des effets de relief par la superposition d’effets d’ombre et de lumière. Eastwood a choisi d’en faire son essence cinématographique. Entrer dans l’univers de Clint Eastwood, c’est aussi entrer dans l’âge d’or du cinéma hollywoodien. Cet homme reste un monument du cinéma couronné de cinq Oscars, six Golden Globes, quatre Césars et deux Lions d’or à la Mostra de Venise… Un héros solitaire et une légende du cinéma américain.

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@Flavia Martino - Eden Pautler

entre ombre et lumière

«Je fais ce que je veux ! »

Le producteur a traité la technique du clair obscur sur tous les genres de films possibles: thriller, western, biopic ou film dramatique. le réalisateur travaille avec on fidèle directeur de photographie Tom Stern et récemment Yves Bélanger. Aujourd’hui, Il fait le choix de travailler avec des personnes en qui il a toute confiance et à qui il peut déléguer son travail. Leur technique est un mélange d’ombre et de lumière qui projette à l’écran le duel entre ambiguïté et imprévisibilité des situations de vie. Parfaitement maîtrisé, le clair-obscur sensibilise le spectateur sur le fait que le drame se joue aussi bien la nuit que le jour ( la mort de Kevin Costner dans Un monde parfait ) voire en pleine lumière ( l’accident de Maggie dans Million Dollar Baby ). C’est dans l’un de ses chefs d’œuvre, Million dollar Baby, que Clint Eastwood utilise énormément le clair-obscur. Les instants forts de son film dramatique ressortent du a ce procédé. En effet, le visage de ses personnages principaux sont plongés dans le noir où à moitié dans le noir. Le réalisateur fait apparaître une vraie figure de style, cette technique trouve son aboutissement dans l’euthanasie finale qui rappelle que la vie tient à peu de chose et participe amplement à l’ambiance crépusculaire du film que l’on retrouve fréquemment dans la carrière d’Eastwood. Le procédé cinématographique utilisé par Clint Eastwood montre un autre aspect de son travail récurrent. Il l’utilise pour évoquer l’image de la société à travers ses yeux et faire passer un message.

De façon générale, son travail de réalisateur ne s’arrête pas au point de vue technique, à la couleur de ses films. Cette dernière l’inspire pour ses films et l’évocation incessante et récurrente de la vie sociale aux USA. En fait, le clair-obscur n’est plus simplement son empreinte artistique mais devient sa technique morale, la thématique principale de ses œuvres. Clint Eastwood invite toujours les spectateurs à se poser des questions et s’interroger sur la position du héros dans ses films. Si savamment dosé, les personnages, leurs postures , leur visage et leurs esthétiques prennent du sens grâce au clair obscur.

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WES ANDERSON Par Camille Oberti & Jade Osmont

une symétrie HAUTe EN COULEUR Le réalisateur Wes Anderson s’est imposé comme le réalisateur le plus fantaisiste et le plus branché de sa génération, en surfant sur les codes rétro dans sa vie comme au cinéma.

@The Grand Budapest Hotel (2014)

UN artiste L’univers du Texan est vintage et ultra coloré, chargé de poésie et surtout d’espiègleries. Il cultive une élégance rétro, que ce soit dans les costumes, les accessoires ou la musique de ses films. L’artiste a un style qui allie ralentis, plans subjectifs, fantaisie et mélancolie absurde dans chacun de ses films, on reconnaît ainsi sa patte dès le premier plan. Derrière ce réalisateur, se cache dans l’ombre, le directeur de la photographie Robert David Yeoman qui permet la réalisation de productions complètement uniques avec une signature artistique affirmée. Ce binôme permet la genèse d’un univers naïf sur l’ensemble de l’imagerie des films réalisés. Wes Anderson est un artiste qui met énormément de sa personne dans chacune de ses réalisations. Son style est bien sûr à l’image de ses films. Il s’habille

coloré et aime le raffinement de ses tenues. Il reste dans un esprit vintage qui peut d’ailleurs parfois sembler « kitsch » comme avec son pantalon de velours côtelé « pattes d’eph’ » ou encore ses indétrônables Clarcks Wallabees. Ce réalisateur, au style tout droit sorti des greniers de nos grands-parents, ressemble plus à notre bon vieux professeur de philo qu’au cinéaste décoré de dizaines de récompenses. Et pourtant, ses accessoires au style pop contiennent une puissance visuelle que permet de retranscrire ses propres vêtements dans ses films à succès. Wes Anderson n’a jamais eu peur de forcer les styles vestimentaires de ses personnages en affirmant son identité à travers des habillements de plus en plus cocasses. Et pourtant, ça marche.

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des Musiques Au-delà de l’image, de l’omniprésence des couleurs, ou encore de la symétrie des plans, l’empreinte du cinéaste se retrouve aussi dans ses choix musicaux. Son goût prononcé pour les musiques pop folk lui vaut l’étiquette de hipster. On remarque que les différents protagonistes, jouent et écoutent souvent de la musique. Que ce soit à travers des vinyles, des walkmans ou encore des iPods. La musique est partout. C’est une partie intégrante de son univers. Rien d’étonnant lorsqu’on voit à quel point le réalisateur est fasciné par la nostalgie qui est perçue dans ses films par des personnages toujours coincés entre l’enfance et l’adolescence mais jamais vraiment près a devenir des adultes. Wes Anderson est conscient de la puissance narrative et visuelle que peut alors avoir une musique au cinéma. En effet, la musique est complémentaire de l’image. Elle crée alors un dialogue secret entre le film et le spectateur qui reçoit des informations sur les personnages et sur leur identification.

Photos crée par PHOTOSHOP Camille et Jade

une obsession des couleurs Dans ses films, le cinéaste ne laisse aucune place au hasard, esthétique et précision, voilà ses maîtres mots. Les personnages, à l’esprit gentiment dérangé, évoluent dans un monde souvent trop étriqué pour eux : un univers droit, carré et symétrique, en totale opposition à leurs pensées loufoques. Obsédé par l’équilibre, Wes Anderson réalise ses films dans une symétrie plus que parfaite. Toutes ses œuvres en passant de Rushmore à The Grand Budapest Hôtel, peuvent être coupées en deux par une ligne droite, l’image de droite et de gauche seront quasiment identiques. Pour Wes Anderson, cette géométrisation de l’espace est presque maladive et rend ainsi son art complètement unique et se distingue de tous !

Pour fabriquer son univers onirique et crépitant, Wes Anderson n’hésite pas utiliser des combinaisons de couleurs explosives très assumées. Il utilise les couleurs dites « complémentaires » pour leur capacité à se mettre mutuellement en valeur. Ses films passent par l’intégration de tendances actuelles comme le choix des couleurs pastel, un habillage très hipster et des filtres qui nous rappellent ceux d’Instagram dans une allure d’époque complètement rétro. C’est un style unique pour une réelle signature qui sait se distinguer. Pour aller plus loin, nous pouvons pousser notre analyse en annonçant que les couleurs choisies dénoncent la condition du monde actuel : dégradé de couleur passant d’un rose très angélique et rassurant à un sombre noir vide.

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kaws Par Léa Dahan & Céline Pigasse

crosses everywhere

@ Kaws, BFF Companion Pink, 2017

Certaines caractéristiques peuvent nous faire penser à un artiste en particulier. Des figurines avec des yeux en croix ? Ça ne serait pas Kaws ? Et bien si. Kaws, de son vrai nom Brian Donnelly, est un américain né en 1974. C’est un artiste et créateur multidisciplinaire. Sa passion pour la Pop Culture se reflète dans son travail.

l’ a r t d e j o u e r Il a développé un intérêt particulier pour les figurines, qu’il nomme Art Toys, en travaillant chez Disney dans les films d’animation. La première apparence qu’il donne à ses figurines est une tête de Mickey avec un crâne de pirate et les fameux yeux en X. Cette combinaison, victime d’un grand succès, a par la suite été modifiée et c’est alors plusieurs corps de célèbres personnages qui ont été utilisés. On peut y voir, par exemple, le corps du bonhomme Michelin. De plus, la tête est parfois divisée en deux et c’est un crâne ouvert laissant apparaître le cerveau qui se trouve sur un hémisphère. Kaws s’est créé un nom dans ce milieu, et surtout une identité visuelle. On pourrait croire que ces petites figurines (même si parfois on doit lever les yeux pour en voir la tête) sont destinés aux en-

fants. Mais ces yeux en forme de croix, ou ces cerveaux apparaissant nous prouvent le contraire. Il a adapté ce monde en de véritables jouets pour adultes. Grâce à son amitié avec le jeune créateur Nigo, il a par la suite ouvert une boutique, sous le nom d’Original Fake, présentant des dérivés de ses œuvres en teeshirts, baskets, portes clés… On peut retrouver ces petits personnages aussi sur des albums, celui de Kanye West par exemple. Ses produits sont toujours vendus en stock limité dans sa boutique, au pied du célèbre musée du Louvre.

@Céline & Léa 2020

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@Photographie de Kaws, galerie Perrotin, 2018, Hong Kong

À côté de ses personnages en trois dimensions, Kaws s’oriente également vers la confection de tableaux. Souvent caractérisé par de vives couleurs, ils représentent une fois de plus de célèbres personnages, ceux de l’univers Disney tels que Chum, Les Simpson, ou encore des héros inspirés d’Hello Kitty ou Astroboy. Les croix et les assemblages de différents personnages, qui font par-

«Graffiti is like building a career»

tis intégrante de sa signature, ne manquent pas à l’appel. Kaws étant également passionné par les graffitis depuis son plus jeune âge, on peut apercevoir dans ses tableaux que la technique adoptée y fait référence. Cette familiarité qu’il impose reflète à la perfection son univers. Par exemple, son tableau « Kimpsons » réalisé en 1999, reprend l’ensemble des personnages de la série télévisée américaine Les Simpson, auxquels il substitue les yeux aux croix et ajoute également un de ses personnages au groupe. Le titre du tableau dénonce parfaitement cette façon de revisiter la culture urbaine et de se l’approprier selon sa vision personnelle.

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en peinture

p o p c u lt u r e


LA COULEUR EN MOUVEMENT Par Elza Borkhosh & Emma De Gruttola

est un artiste abstrait contemporain qui a une patte artistique distincte. S’inspirant de l’action painting et de l’art cinétique, il va donner l’illusion d’un mouvement naturel de la couleur. La pièce, dont le résultat est imprévu, va alors prendre vie à travers les multiples interprétations du public.

98% de préparation L’action painting est un dialogue entre l’artiste et la toile par la projection, l’écoulement ou la propulsion de peinture de manière non figurative. Aujourd’hui, beaucoup d’artistes incarnent ce mouvement tel que Callen Schaub. Basé à Montréal, il est aujourd’hui reconnu comme ayant développé une patte artistique unique autour du mouvement, de la couleur et du

hasard. C’est avec le public en tête que Callen Schaub continue à développer son empreinte artistique, permettant ainsi une immersion totale dans son œuvre. Cette même immersion commence avec les performances en direct que l’artiste fait. Le spectateur devient alors plus qu’un observateur, il va échanger avec l’artiste autour de son processus de création.

Les outils créés par Callen vont permettre de projeter la peinture et d’obtenir un mouvement harmonieux dans ses œuvres. En effet, il a recyclé un vélo pour en faire un plateau tournant où poser ses toiles. L’artiste a également construit un trapèze qu’il suspend au plafond. Cet objet va donner naissance à une technique propre à Callen : le “trapèze painting”. L’artiste mélange ainsi deux courants artistiques ;

« La nature est la plus grande sculpture du monde » l’action painting et l’art cinétique qui désigne des techniques qui donnent l’illusion du mouvement. La perception de l’individu est ainsi placée au centre du travail de l’artiste. A ses techniques s’ajoutent des supports dont les sphères, les squelettes, qui sont aussi variés et inattendu que le résultat final. Que ce soit les outils ou les supports, ces formes se retrouvent dans la nature. En effet, selon l’artiste : “La nature est la plus grande sculpture du monde”. @Trapèze painting par Callen Schaub

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‘ @«Paso Doble», 2019

@«Fiesta En La Calle», 2019

2 % d e c r é at i o n La fluidité du mouvement ressenti dans les œuvres de Callen Schaub provient aussi des multiples couleurs qu’il utilise. Il déploie sur chacune de ses œuvres un arc en ciel de couleurs claires et sombres pour faire ressentir toute une palette d’émotions à Le hasard est aussi au cœur du travail de Callen. Malgré le fait qu’il contrôle la préparation avec les outils et les couleurs choisies, l’artiste dit “Je ne sais pas ce que je vais créer”. C’est le mouvement de rotation naturel produit par ses outils et la gravité qui rendent la disposition des couleurs aléatoires L’interaction unique qu’à Callen Schaub et son public va dans les deux sens. Il enrichit sa patte artistique des retours positifs comme négatifs qu’il reçoit. Il transforme ainsi les commentaires négatifs les plus récurrents comme “ce n’est pas de l’art”, “ma fille de 5 ans pourrait le faire” en oeuvres uniques.

son public. Son travail reflète le fait que l’être humain est aussi complexe que la multitude de couleur qu’il utilise. “ No rain, no rainbow», dit- il.

et qui vont donc donner une part de hasard décisive au travail de Callen. Le hasard est également présent dans l’interprétation de ses œuvres, qui va différer selon l’œil qui le voit. Malgré cette notion de hasard omniprésente, le fil rouge de Callen Schaub dans ses œuvres est de faire vivre à son public ce qu’il voit dans la nature.

L’artiste veut que le résultat procure la même émotion pour le spectateur que s’il voyait un coucher de soleil ou encore les tourbillons des rivières. Le résultat final est donc brut, sans changement mais aussi beau et apaisant, comme la nature peut l’être.

« no rain, no rainbow »

@«Flamboyance» , 2018

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InvadeR  entre hacker et pixelS Par Grâce-marie Youakim & Johanna Setrouk

zoom sur un artiste anonyme Un virus qui se propage rapidement à l’échelle mondiale. Il provient de France et se diffuse principalement la nuit. Dans certains pays, les autorités peinent à prendre des mesures radicales pour éradiquer le virus de manière efficace. C’est ainsi que l’artiste de rue Invader se fait une place dans le monde de l’art urbain. Un artiste anonyme connu pour son art viral inspiré du jeu d’arcade space invader. Il réalise des œuvres en mosaïque donnant l’illusion de pixels et les expose dans des lieux publics en toute illégalité.

la mosaïque et le pixel Invader s’exprime à travers des œuvres réalisées en mosaïque ou en petit bout de carrelage. Ces mosaïques représentent initialement des petits virus mutant sortie tout droit de l’univers des jeux d’arcades “space invader”. L’artiste utilise la technique de division de carreaux de mosaïques pour donner l’illusion de pixels. Ainsi, il réussit à faire passer le virtuel au réel. Mais outre ce passage du virtuel au réel, l’une des spécificités de l’artiste est d’en-

vahir les espaces publics de ses œuvres à travers le monde. En 1998, l’artiste installe entre 20 à 50 petites “bestioles” dans les lieux publics de sa ville natale Paris sans accords préalable. Cette pratique illégale oblige donc l’artiste à garder l’anonymat. En effet, il travaille la nuit, porte un masque et insiste pour que son visage soit pixelisé lorsqu’il apparaît devant une caméra. Mais au fil du temps, la raison de son anonymat va prendre une nouvelle tournure. Il y

s’en dégage maintenant une démarche artistique. Effectivement, du fait de sa notoriété, il affirme que personne n’a besoin de le voir installer son œuvre pour savoir que cette dernière vient de lui. Son anonymat fait alors pleinement partie de sa signature. Depuis 2004, il crée des œuvres d’art en utilisant les Rubik’s Cubes, aujourd’hui reconnu comme un nouveau courant du 21ème siècle.

« Installer moi-même mes œuvres sur les murs des villes fait partie de l’œuvre, du concept » 68


@ INVADER, Veggietown

Processus d’invasion planétaire Cet artiste de rue ne cache pas son envie de propager son art comme un virus. Il définit son art d’art “viral” et cet aspect fait pleinement partie de la signature de l’artiste. En effet, il envahit les espaces publics du monde entier en utilisant des “tactiques de guérilla” qu’il appelle “vagues d’invasion”. Ces œuvres ont ainsi apparues dans plus de de 30 pays à travers le monde et l’une des invasions les plus improbables est celle de l’œuvre exposée sur le D du panneau Hollywood le soir du nouvel an 1999. Mais Invader ne s’arrête pas à l’espace urbain. L’artiste a déjà envoyé une de ses

œuvres dans les airs à plus de 35kms de haut tandis que d’autres se trouvent au fin fond des côtes mexicaines ou encore dans l’espace. Mais cette pratique illégale à des risques et des conséquences. Invader a déjà été arrêté par les autorités de différents pays et a même été interdit d’entrer dans certains d’entre eux.

@Le virus

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Martin Parr Par Elise Berthelot, Louise Boulassier & Victoria Quentrec-Storoni

l’artiste subversif Associé à Magnum Photos, une agence de presse photographique, le photographe contemporain britannique Martin Parr propose une approche nouvelle de la photographie documentaire. Il s’éloigne des codes traditionnels du photo-reportage en mélangeant les genres et se réapproprie ceux de la photographie amateur. @Autoportrait, Dubai, United Arab Emirates, 2007. Espagne. Benidorm., 1997

à la croisée des genres Martin Parr casse les codes du photo-reportage classique en mélangeant les genres. En effet, points de vue perspectifs et gros plans sont au rendez-vous. Des techniques qui viennent renforcer l’aspect critique et grotesque de ses œuvres. La singularité de Martin Parr repose alors sur sa subversivité, c’est cela sa véritable empreinte. Bien que travaillant pour une agence de presse photographique, il se différencie des autres en associant l’art documentaire à une forme d’amateurisme. Des photographies dénonciatrices, brutes de décoffrage, mettant en scène des gestes, des expressions qui révèlent un aspect de la société que Parr souhaite critiquer. L’artiste veut véritablement ajouter un coté décalé et humoristique à de la photographie documentaire trop conventionnelle.

Cet aspect non conventionnel se reflète dans ces choix de couleurs étonnants. Reprenant les codes de la photographie amateur, l’artiste n’hésite pas à utiliser des angles de perspective surprenants et des couleurs criardes accentuant le côté kitsch de ses œuvres. Une autre manière pour lui de laisser son empreinte dans son travail se retrouve à travers ses divers autoportraits. Le rendant davantage unique et reconnaissable, il en résulte toute une palette de portraits conservant l’ironie et la dérision qui lui sont propres. Toujours dans cette volonté subversive, l’esthétisme de ces autoportraits se baladent entre les photographies de rues et les photographies de studios, en passant par d’abondantes manipulations numériques.

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@Espagne, 1997

«il y a une portée humaniste dans mon travail» Son travail, caractérisé par l’humour et la dérision propose une analyse nouvelle de la société, qui se positionne en désaccord avec celle diffusée par les médias. Martin Parr se veut alors miroir des mœurs, des phénomènes sociétaux, en traitant notamment de la consommation et de la mondialisation. Ainsi, contrairement aux médias qui l’idéalisent en proposant des visuels parfaits, l’artiste diffuse sa propre image de la société : accepter les excentricités au-delà des individualités. En effet on retrouve dans ses œuvres un aspect très sociologique, presque politique, qui dénoncent les comportements sociétaux. D’ailleurs, on aimerait bien qu’un artiste tel que Martin Parr prenne part au débat écologique. Par exemple, en dénonçant le réchauffement climatique, qui est une conséquence des phénomènes sociétaux qu’il ne cesse de critiquer.

@Elise Berthelot

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DANIEL AR(T)SHAM Noé Lénel & Mandresy Ramarojaona

création intemporelle En observant les travaux de Daniel Arsham, on se rend compte que son empreinte est présente à différents niveaux. Sur le plan de la couleur, de la déstructuration des textures, de l’intemporalité mais aussi dans la recherche permanente de simplicité et de pureté.

ARCHÉOLOGIE FICTIOnNELLE Œuvrant dans les domaines de la sculpture, de l’architecture, du dessin. L’empreinte de Daniel Arsham réside en grande partie dans une esthétique uchronique qui se fonde sur un concept d’archéologie fictionnelle. Il crée et cristallise des espaces et des situations correspondant à un entre-deux ambigu en scène, ce qu’il décrit comme les reliques futures du présent. Ces moulages érodés d’objets modernes et de

cemment découverts, après des siècles d’ensevelissement.

«esthétique uchronique» silhouettes humaines contemporaines sont réalisés avec habileté à partir de matières géologiques telles que le sable ou encore la cendre volcanique, de façon à ce qu’ils semblent avoir été ré-

@Réalisation inspirée du style de Daniel Arsham

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Daniel Arsham fait l’expérience du caractère intemporel de certains symboles et de certains gestes interculturels. En choisissant des objets iconiques, facilement reconnaissables et symboliques dans le temps, du présent comme du passé des objets qui sont considérés comme fonctionnellement archéologiques ou iconiques dans le présent. Il change la forme et la structure afin de rendre l’objet illogique. Ces objets sont basés sur un choix symbolique et iconique, et combinés à la transformation de leur forme. Daniel Arsham donne une valeur artistique et transforme des objets du passé en dehors du temps. L’artiste dit “Je les rends immortels”. C’est ce caractère intemporel, immortel qui fait toute la patte du créateur New-Yorkais.


@Daniel Arsham dans son atelier

SIMPLICITÉ Il peut sembler évident de penser qu’une œuvre d’art doit être complexe et chargée de détails. C’est une vision que ne partage pas Daniel Arsham. En effet, il recherche constamment la simplicité, la pureté. Cette empreinte artistique épurée, on la retrouve notamment dans sa palette de couleurs qui est extrêmement réduite. Il travail même quasiment exclusivement avec la couleur blanche. Il se trouve que Daniel Arsham est atteint d’achromatopsie. Cette

«Il a fait de sa maladie une force»

maladie affecte le système visuel et surtout la perception des couleurs. Pour faire court, Daniel Arsham voit le monde en noir et blanc. Il affirme percevoir tout de même légèrement deux couleurs : le bleu et le rose. Ce sont d’ailleurs les deux seules couleurs (hormis le blanc) que l’on retrouve dans sa palette. Il a donc fait de sa maladie une force, une caractéristique singulière de son style qui le rend reconnaissable aux yeux de tous. Pour l’artiste, cette simplicité permet au spectateur de se concentrer sur l’œuvre en elle-même. Cela permet de ne pas être perturbé par des couleurs, des artifices, qui viendraient perturber le 73

message et la démarche artistique. De plus, au-delà de la simplicité, le style de Daniel Arsham est finalement assez paradoxal. Il est difficile de le catégoriser puisqu’il se situerait lui-même entre hyperréalisme et surréalisme. Finalement, il a créé des œuvres fictives en cherchant le plus possible à se rapprocher de la réalité, tout du moins en apparence. Il est donc toujours très troublant de voir ses œuvres puisque l’on ne sait jamais s’il s’agit d’objets antiques ou futuristes. Daniel Arsham est, selon nous, un des artistes actuels les plus perturbants, intéressants et inspirants.


Les nanas Par Erynn Epaulard & Coralie Guen

Engagée politiquement, féministe, Niki de Saint Phalle n’a cessé d’intégrer des épisodes de sa propre vie au sein de ses œuvres. Expliquant avoir été élevée « pour le marché du mariage » et refusant de ressembler, un jour, à sa mère, elle commence à créer ses célèbres Nanas en papiers collés et résine dès 1964. Ces femmes monumentales sont « libérées du mariage et du masochisme », explique la sculptrice.

@ Erynn Epaulard & Coralie Guen

u n m e s sag e Dans son œuvre “Les nanas”, Niki de saint Phalle choisit de sculpter des corps de femmes rondes. En effet, la tête ainsi que les extrémités du corps tels que les mains et les pieds sont réduits pour mettre en valeur la rondeur. Les tenues qu’elles portent sont des tenues courtes, elles sont recouvertes de la poitrine jusqu’en h a u t d e s cuisses, pour montrer des femmes libres de leur corps et de leur façon de s’habiller. Malgré leur statisme, elles nous entraînent dans leur danse, ces femmes libérées nous inspirent la joie et la bonne humeur. Ces femmes deviennent imposantes à travers ces traits phy74

« une danse de femmes libres » siques ainsi qu’au moyen des couleurs utilisées. Elles sont pures, brutes et saturées. Elles n’ont ni été assombries, ni éclaircies. Installées dans un espace rural, ses œuvres ne passent pas inaperçues. Ces corps indomptés sont la représentation de la femme moderne et indépendante face au patriarcat, d’où l’utilisation de ce terme. Ce mot de langage familier, “nanas” se veut connoter un champs lexical de l’émancipation, et se réfère à la femme libre, vivante et émancipée.


@ Niki de Saint Phalle, Nanas

son univers Niki de Saint Phalle choisit aussi de faire un rapprochement entre le moderne et l’ancien en reprenant les codes des “Vénus”. Les Vénus sont des statuettes féminines caractéristiques du Paléolithique supérieur eurasiatique. Ces statuettes ont des caractéristiques presque similaires proportionnellement à celles des nanas avec des formes rondes prononcées au niveau de la poitrine et des fesses. C’est à travers ce procédé que l’artiste choisit de laisser son empreinte dans son œuvre, elle représente la femme moderne en mèlant l’ancien au présent, et c’est de cette façon qu’elle réussi à montrer son engagement ses valeur et le message qu’elle sou-

haite faire passer. Dans l’ensemble de son œuvre elle utilisera les mêmes codes, la même idée de mouvement, les mêmes couleurs ainsi que les mêmes formes. Cependant les matériaux changeront au cours du temps. Avec le temps, les matériaux employés pour donner vie aux Nanas évoluent. Niki de Saint

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Phalle abandonne le papier et les tissus collés. Elle sculpte ses œuvres dans des blocs de polystyrène. Elle recouvre cette base de laine de verre et de résine polyester pour la rendre dure comme la pierre. Les Nanas sont ensuite peintes de couleurs vives ou décorées de morceaux de céramique colorés, des miroirs, des billes de verre… Ces sculptures si joyeuses causeront paradoxalement des souffrances cruelles à l’artiste. Au fil des années, les vapeurs et les poussières de la résine lui brûleront les poumons et provoquent une insuffisance respiratoire chronique. Elle aura finalement sculpté tout au long de sa vie.


edward Hopper Leo Garel et Lea Brondello

la peinture mélancolique Largement inspiré par l’American way of life du XXème siècle, Hopper représente des scènes de vie aussi mystérieuses qu’intimes. Avec cette atmosphère singulière mais tout aussi troublante, l’artiste met à jour l’expérience de la vie moderne. Cafés, gares, chambres d’hôtels : le peintre affectionne ces lieux anodins auxquels il apporte un sentiment de solitude et de tension psychologique. Mais comment Hopper, au travers de sa technique révèle des œuvres mélancoliques aux personnages froids ?

intime froideur Edward Hopper est l’artiste peintre qui a le mieux capturé la solitude et l’aliénation de la vie moderne. Au travers de couleurs sobres et ternes, ainsi que par des teintes inquiétantes, le peintre invite à accompagner les personnages, dans ce qui semble être une errance éternelle. Ce voyage solitaire qu’effectuent les hommes et les femmes de ses tableaux, insuffle aux spectateurs une mélancolie qui les plonge dans un profond malaise. Une ambiance pesante et déroutante, renforcée par cette sensation que les personnages sont pris au piège dans les

@Chair Car, 1965, huile sur toile

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limites du tableau, coincés dans un décor vide et isolé. Ce qui marque le plus dans le travail d’Hopper c’est ce paradoxe entre l’inaccessibilité de ses personnages et l’exposition de leur intimité. Le fait qu’ils semblent profondément déconnectés de la réalité qui est la notre et qu’ils évoluent dans un monde dystopique ou plus rien ne les retient, dans un monde dénué d’amour et de partage, laissant place à une anxiété maladive qui gangrène le monde. Mais, d’un autre côté l’artiste décide de représenter des lieux privés, comme des chambres d’hôtels, mais aussi des moments relevant de l’intimité de chacun. Hopper réussit à montrer des tranches de vies d’inconnus, scènes qui semblent banales, mais qui au final embarrassent tant elles sont personnelles, à la limite du voyeurisme.


C o v i d w aY o f l i f e En surface l’enfermement des personnages ne semble que physique. Mais lors d’une observation plus minutieuse des œuvres, l’analyse prouve que le retranchement est plus profond. Les personnages semblent en effet dans leurs pensées, face à eux-mêmes. Tout cela crée une attente pour le spectateur, comme s’il allait se passer quelque chose au-delà du tableau. Le réalisme des œuvres est tel qu’il laisse presque croire à une photographie. L’artiste joue de la transparence des vitres et provoque l’hésitation du spectateur entre ce qui est réel ou ce qui ne l’est pas. «  Réel  », c’est ce qui résonne cette année en chacun de nous.

«À la limite du voyeurisme» @Double réfléxion, 2020, Léa BRONDELLO et Léo GAREL

Cet univers si particulier qui intriguait, effrayait et fascinait un grand nombre est aujourd’hui bien réel. Le quotidien d’un grand nombre d’individus ressemble étonnamment à celui d’une peinture de l’artiste. « Nous sommes tous des peintures d’Hopper maintenant » avait réagi un internaute lors du premier confinement en mars dernier. Enfermés à contempler le paysage derrière une fenêtre, seuls face à nous-mêmes, marchant dans des rues désertes ; autant de situations qui évoquent le travail du peintre américain. Livrés à cette expérience de solitude absolue, d’arrêt sur image, le monde semble s’introduire dans une toile de l’artiste pour toucher du doigt sa réalité. Étant sourd, l’exclusion sociale et quotidienne d’Hopper est retranscrite dans ses travaux. Toujours spectateur de ce qu’il peint, ce vide qui se dégage de ses créations ainsi que cette profonde tristesse et psychose sont l’empreinte de cet acteur essentiel de l’histoire de l’art américain. La touche si reconnaissable d’Hopper n’aura jamais fait autant écho aux sociétés modernes qu’en ce moment. @Maison au bord de la voie ferrée, 1925, huile sur toile

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LIU bolin Par Yasemin Durmaz & Manon Louchet

Célèbre artiste, connu internationalement pour ses photographies hors du commun. Liu Bolin est un photographe et sculpteur chinois vivant et travaillant essentiellement à Pékin. Né en 1973, c’est en 2005 qu’il marque le début d’une série photographique particulière et remarquable montrant son engagement face à des sujets polémiques.

L’H o m m e i n v i s i b l e Liu Bolin, pour son travail remarquable ainsi que de part ses engagements, son imagination et ses performances techniques, est surnommé “l’homme invisible”. En effet, connu pour ses photographies où il se dissimule dans chacune d’entre elles, l’artiste se rend invisible pour se faire remarquer.

Sa méthode, étant de poser pendant des heures, les yeux fermés, sans aucune émotion devant un paysage, un mur ou encore un monument, lui permet de se fondre dans le décor grâce à un camouflage hors pair de la part de ses peintres-assistants. Le décor engloutit le personnage. Aucun trucage numérique n’est utilisé dans ses œuvres. Il fige la performance de tout ce travail grâce à la photographie. De plus, sa série “Camouflage” est une métaphore du sentiment d’anonymat et de l’ostracisme que rencontre Liu Bolin en tant qu’artiste contemporain en Chine.

À ses débuts, le photographe s’installe dans le quartier d’artistes à Suo Jia Cun, une banlieue de Pékin et y établit son propre atelier. Mais en 2005, ce quartier est détruit sans préavis par le gouvernement chinois en vue des travaux de préparation aux Jeux Olympiques de 2008. Cet événement est déclencheur et pousse Liu Bolin à protester à sa manière. L’artiste se met donc en scène devant les ruines de son atelier et se prend en photo afin de dénoncer le gouvernement. Il souhaite protester contre le fait qu’il est impuissant et que par cet acte de destruction, on ne lui confère aucune valeur, ni à lui, ni aux autres artistes du quartier. Son cliché photographique est le premier d’une longue série. De sculpteur il devient sculpture. Il ne lui reste plus que son corps pour s’exprimer. Il décide donc de faire une protestation «silencieuse» et d’affirmer un regard critique sur le monde qui l’entoure.

@Liu Bolin, Hiding in the city - Suaja Village 2006, Impression Pigmentaire, 126 X 160

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U n c o n t e s tata i r e L’artiste s’exprime sur des sujets polémiques par le biais de ses photographies surprenantes. Il souhaite faire passer des messages en évoquant des sujets tels que la politique, la censure, la tradition, la culture chinoise, la liberté de presse et bien d’autres. Nous le retrouvons, par exemple, dans une de ses œuvres caché devant un drapeau afin de montrer comment l’individu se perd dans une identité collective. Ou encore, noyé dans le rayon d’un supermarché, entre canettes et produits importés, pour dénoncer la société de consommation. Il choisit des endroits symbolisant des causes, des clichés ainsi que la révolution culturelle chinoise et les grands changements dans le monde comme, par exemple, des décombres de tremblements de terre dans la campagne chinoise.

@Liu Bolin, Hiding in the City - Instant noodles, 2013, Impression pigmentaire, 135 X 180 cm

En 2017, Lui Bolin s’engage sur un sujet sensible, qui fait, énormément polémique à cette période là et qui actuellement est toujours d’actualité : la préservation de la biodiversité et notamment des océans. C’est pourquoi, le 11 Juin 2017, à Biarritz, en France, Liu Bolin organise une performance sous forme de vidéo dans les locaux de la Surfrider Foundation, une ONG qui défend les océans, se fondant peu à peu dans des déchets collectés sur les plages. Le projet est une collaboration entre l’artiste lui- même, la Galerie Paris-Beijing, les élèves et étudiants de Biarritz et la Surfrider Foundation Europe. L’environnement de ses œuvres change mais cet homme debout et silencieux demeure un révélateur de ce que l’on voit mal ou auquel on est habitué.

@Liu Bolin, Hiding in the City, Municipal Waste, 2014

Les différentes œuvres de Liu Bolin relèvent sa performance soit un concept unique qui ne découle pas d’un art éphémère.. Seules les traces photographiques, filmiques peuvent laisser des traces, d’où l’importance de ses nombreuses séries de photographie. De plus, l’art de la dissimulation est une performance que l’artiste sait manier, notamment grâce à la récurrence présente dans ses nombreuses photographies. Une performance avec une symbolique forte mélangeant la photographie, l’art visuel, le body-art et la culture vivante. 79

« C’est ma façon de transmettre toute l’anxiété que je ressens pour les êtres humains »


HASSAN HAJJAJ Par Ann Perryn Goda, Inès Goraguer & Samantha Keghida

le pop art d’aujourd’huI Un artiste qui n’hésite pas à sortir des cases, mixant son héritage marocain et sa culture underground londonienne tout en présentant un point de vue critique sur la société de consommation. Designer, styliste, photographe, Hassan Hajjaj est un peu tout cela.

s e s i n s p i r at i o n s Né au Maroc en 1961, il puise son inspiration dans les marchés, les souks, là où la vie se déroule. Londonien depuis 1973, Il fréquente les milieux de la musique underground et créer sa propre marque de streetwear avant de se lancer dans la photographie autodidacte. Dans son atelier boutique à Londres, on trouve tous les objets de son univers, nattes, coussins, tables, babouches… Tout s’empile dans un désordre structuré. « Certains artistes ont besoin d’espace, d’être seuls, je suis à l’opposé, j’ai besoin de bruit, de gens, d’odeurs, de poussière, ce qui va avec mon travail ». Son univers artistique traduit ainsi sa capacité à créer des ponts entre ces deux cultures, en faisant se croiser les styles, les univers et les icones sans jamais les opposer.

Des célébrités comme Madonna, Billie Eillish ou encore Cardi B se sont fait tirer le portrait dans son riad à Marrakech mais ses véritables stars sont des gens ordinaires d’origine arabe ou africaine. Avec Hassan Hajjaj, rien n’est laissé au hasard d’où la singularité de son travail. Couleurs flashy, imprimés kitsch, boîtes de conserve alignées y encadrent des portraits et ensoleillent l’espace. L’air de rien, le hip-hopeur quasi s e xa g é n a i r e a inventé une nouvelle forme de post-colonialisme, haute en couleur et décontractée. Tout ce qu’il créé renvoie à une image à la fois traditionnelle orientale et moderne occidentale, étendard d’un Maroc qui évolue dans la mondialisation sans perdre ses repères.

@De gauche à droite: Nana, Hassan Hajjaj 2009 ; illustration inspirée d’Hassan Hajjaj, Samatha Keghida 2020

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Time Out, de la série «Vogue: The Arab Issue» Hassan Hajjaj 2007

u n s t y l e e n g ag é

Des bancs faits de cageots de répétés créant un effet mosaïque. une réflexion sur la société de sodas en plastique couverts de « Chaque cadre est pensé en re- consommation, la mondialisacoussins en tissu ou toiles de ré- lation avec le sujet, la couleur a tion par une sorte de « pop cupération, des pots de peinture un sens, mais ne joue pas forcé- art d’aujourd’hui  ». Dans ses transformés en tabourets... L’artiste ment le premier rôle. Cela peut images, ce ne sont pas réellerécupère, accumule les objets du être l’image, le graphisme  ». Il ment les marques qu’il montre quotidien, joue de tous les cli- s’amuse des clichés sur son pays mais des imitations. En utilisant chés, les détourne. Un panles marques il est très neau de signalisation sert «rÉflexion sur facile de communiquer de table et des boîtes de avec le public. Hassan la société de conserve deviennent des se sert d’elles pour atlustres. La réincarnation tirer l’attention des gens consommation» de l’objet au croisement et ensuite pouvoir les de l’engagement environnemen- et détourne les grandes marques emmener plus loin. Ainsi au tal, c’est peut être là une façon occidentales. L’humour et cet es- cœur de son travail se love d’y voir un engagement artistique. thétique kitsch qui se dégagent son intérêt pour l’univers de Boîtes de sauce tomate, de sar- des œuvres d’Hassan Hajjaj ne la mode, sa vision singulière dines, d’olives ou autre enca- font que renforcer son propos du monde ou bien encore le drent les photos d’Hassan, un peu engagé. Ainsi, le détournement quotidien des gens qu’il côtoie comme une signature, les motifs de l’imagerie des marques sert amis ou inconnu.

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Emir Shiro, Par Mona Abida, Jenny Dok, Niakalé Camara & Julia Besançon

des œuvres intrigantes Originaire de Grenoble, Rémi Pisicchio alias Emir Shiro fait fortement parler de lui, tout particulièrement sur les réseaux sociaux. Engagé, il se plaît à faire passer un message socio-politique dans la plupart de ses œuvres. Depuis le début, et encore aujourd’hui, il prône lui-même un travail autour de la censure pour dénoncer celle-ci.

Un graphiste c o l l ag i s t e Émir Shiro est connu comme étant un artiste collagiste mais c’est avant tout un graphiste. Il tire ses inspirations de la mode, de la pop culture, de la street culture et surtout de l’érotisme à travers le corps de la femme dans son intimité. De part ses inspirations il s’est créé un univers à part entière. La raison pour laquelle son travail marque les esprits est la présence très remarquable de son procédé stylistique, laissant comme une trace de lui dans chacune de ses œuvres. Son travail et son écriture graphique sont très reconnaissables, Émir Shiro se concentre constamment sur la juxtaposition et la superposition de deux photos.

En effet cette technique lui permet de déconstruire deux images pour en construire une troisième, c’est un moyen pour lui de cacher la vérité tout en la suggérant à son public et de créer ce qu’il appelle un « trompe l’œil.» Il souhaite ainsi provoquer des réactions de la part de son public et ainsi le faire réfléchir sur deux points : ce qu’il voit et ce qu’il interprète. Il travaille également sur la gestion de l’espace dans ses œuvres, auxquelles il apporte un soin particulier, en jouant sur les dimensions, les lignes et les formes qui arrivent à s’imbriquer parfaitement entre elles.

@Trop d’la balle, Mona Abida

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censuré ? Après avoir été censuré par Instagram pour son travail autour du corps et de la sexualité, Émir Shiro trouve un autre moyen de le poursuivre. Son style change alors radicalement avec l’apparition de collages résultant de la juxtaposition de deux images déjà existantes, sans rapport spécifique entre elles. Il déclare dans une interview : « J’ai commencé le collage quand Instagram a fait sauter mon compte, le jugeant « inapproprié » pour sa communauté. Mes illustrations étaient principalement sur le thème du corps et de la sexualité, il me fallait donc une technique me permettant de parler de sexe tout en cachant ce qu’il y avait à cacher ». Après cette mésaventure avec la plateforme, il décide de s’engager dans un réel travail autour de la censure. Par “technique”, il entend juxtaposition ou bien parfois, superposition. Cette méthode l’a alors mené à une langage très graphique. En effet, l’artiste travaille uniquement avec des lignes et des découpes horizontales et verticales. Son art traite principalement de la féminité et de la nudité, il n’hésite pas à choquer son public en accrochant et en surprenant l’œil dès le départ.

@Emir Shiro, Hot air balloon

«J’ai commencé le collage quand Instagram a fait sauter mon compte» 83

Il provoque ainsi le réseau social Instagram suite aux nombreuses censures auxquelles il fait face encore aujourd’hui. Ses réalisations sont très colorées, et esthétiques, notamment grâce à l’usage de nombreux animaux, formes et objets C’est ainsi qu’Emir Shiro laisse une trace indélébile dans le monde de l’art grâce à son empreinte unique et son style intrigant.


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artère Sous la direction complice de benoit breton

Une oeuvre c’est toujours un fragment de soi. Un moment, un souvenir, une émotion. Une bribe d’une vie qui permet à l’artiste de laisser son empreinte. Cela dépend de la personnalité et de la sensibilité du plasticien, mais lorsqu’on observe une série de réalisations d’un même artiste on retrouve des similitudes. Qu’importe le support, l’oeuvre réside dans le fait d’exprimer quelque chose, de laisser un morceau de soi-même et de se construire une identité. Notion complexe donc, l’empreinte est propre à l’artiste. Elle est explicite ou implicite, mais elle permet à tout le monde de reconnaître l’auteur en question, de le comprendre. L’empreinte serait une sorte de carte d’identité de l’artiste qui représenterait finalement une invitation où celui-ci dirait “bienvenue dans mon monde”.

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