JULES CHOMÉ
lulCDBUTU ET LA CONTRE.RÉVOLUTION
EN AFRIQUE
TIERS-MONDE
ET RÉVOLUTION ÉDITEUR
Du même auteur;
MOBUTU
FORMOSE, OUEMOY, MATSU
ET LÀ CONTRE.REVOLUTION EN AFRIQUE
aux . Editions Politiquee .. Bruxelles 1958.
LA PASSION DE SIMON KIMBANGU aux Editions . Les Amis de
Présence Africaine ,. Bruxelles 1959.
LE DRAME DE LULUABOURG aux Editions de " Remarques Congolaises..
Bruxelles 1959.
INDEPENDANCE CONGOLAISE, PACIFIOUE CONOUETE aux Editions de
.
Remarques Congolaises
..
Bruxelles 1960,
LA CRISE CONGOLAISE _ De I'lndépendance à I'intervention militaire belge (30 juin - 9 juillet 1960) aux Editions de
.
Remarques Congolaises
'.
Bruxelleo 1960.
M. LUMUMBA ET LE COMMUNISME aux Editions de . Remarques Congolaises.. Bruxelles 1961.
LE GOUVERNEMENT CONGOLAIS ET L'O.N.U. Un paradoxe tragique aux Ediiions de
.
_
Remarques Congolaises
'.
Bruxellee 1961.
L'AFFAIRE RWAGASORE aux Editions de " Remarques Congolaises
'.
Bruxellee 1962.
L'ASSASSINAT DE PATRICE LUMUMBA ET LES REVELATIONS DE MOISE TSHOMBE aux Editions de
.
Bemarques Congolaises.,
Bruxelles 1964.
LE DRAME CONGOLAIS aux Editions de
. Droit et
Liberté
'.
Paris
MOISE TSHOMBE ET L'ESCROOUERIE KATANGAISE aux Editions de la Fondation Joseph Jacqmotte,
1964.
'
Bruxelles 1966.
JULES CHOME
MOBTJTL] et la Contre-Revolution en Afrique
Tous deoits de rcproduction et de taduction téætvés pout tous rla4gs g comptis fU-R'S.S' Copgtight bg Tierc-Monde et Réuolutton, 11, avenue Beau-Vallon, Watedoo.
Tiers-Monde et Révolution EDITEUR
< Les Puissances n'avaient pas renoncé. > Déià elles sapaient Ia Révolution elles > avaient trouvé des auxiliaires zélés. Un pays > n'est pas vraiment vendu I'ennemi au> delà de ses portes, à moins tavoir aussi des > traîtres en deçà. Pour de I'argent, pour du
et
à
pouvoir, on en trouve toujours, Une longue liste < d'hommes forts >, marionnettes volon> taires aux mains des puissances étrangères, > ont fait les gros titres non seulement en > Chine, mais dans tous les pays qui cher> chent à échapper au passé féodsl, pour > trouver le présent et luttent pour leur survie > dans l'indépendance. > Han SUYIN : I'Arbre Blessê. >
>
LA CONTRE-REVOLUTION EN AFRIQUE POSITIONS INITIALES DE
LA CONTRE-REVOLUTION
Même si tout s'était bien passé et si les pays indépendants d'Afrique avaient continué leur évolution normale vers plus de liberté et plus d'unité, ils se seraient heurtés un jour à une difficulté, un obstacle majeur: I'Afrique sous domination blanche qui occupait tout le sud du continent: les colonies portugaises d'Angola et de Mozambique, la Rhodésie, l'Union Sud-Africaine. Tôt ou tard, les deux mondes eussent dû s'affronter. Et il est certain que, même dans I'hypothèse la meilleure, celle où I'Afrique libre se serait dressée tout entière et unie, pour ( libérer > tout le continent, les Blancs eussent bénéficié d'un net déséquilibre. Economiquement, ils étaient les plus forts. Leurs territoires étaient pratiquement les seuls d'Afrique à posséder des industries importantes. Les mines exploitées par de puissants trusts américanoanglo-belges (1), étaient parmi les plus riches du monde. Militairement, leurs moyens étaient illimités. Ils pouvaient se procurer, où ils le voulaient dans le monde, les meilleurs avions, les meilleurs tanks, les armements les plus modernes. Ils surclassaient leurs futurs adversaires. Ils attendaient, sans crainte, l'épreuve de force, la préparaient avec soin. L'Union Sud-Africaine, à elle seule, pouvait, du jour au lendemain, mettre sur pied une armée de 250.000 Blancs, ayant tous reçu une préparation militaire. Deux cent cinquante mille hommes, c'est-à-dire bien plus que toutes les armées de l'Afrique noire réunies, à supposer qu'on pût les unir et les faire marcher sous un commandement unique. (1) Leur unité était tellement lorte qu'ils avaient souvent les mêmes adminis' trateurs. V. .Towards Freedom" (Chicago) de janvier 1962 et notre livre: " Moise Tshombe et l'escroquerie katangaise '. Note 5, page 29.
blanche, s'ils ne sortent pas des milieux racistes
C'est-à*dire que cet affrontement, dans la meilleure des hypothèses, ne se présentait pas favorablement pour l'Afrique indépen-
et
fascistes du
restant du monde.
dante.
Les ennemis de l'Afrique blancs et noirs avaient d'ailleurs - encore cette position tout mis en æuvre pour améliorer initiale.
LE CONGO EST DEVENU UN GRAND KATANGA Le Congo est devenu la citadelle de la clé de I'Afrique
contre-révolution- africaine. Dans des articles que nous écrivions, avant que ne se mettent en branle les colonnes qui allaient arracher Kindu et Stanleyville aux patriotes congolais, nous adressions aux chefs d'Etat africains ces appels qui ne faisaient que doubler ceux que, plus discrets, nous leur avions fait parvenir par d'autres voies. < A I'heure même, écrivions-nous (3), où les diri' > geants africains sont réunis à Addis-Abéba, nous trem> blons à la pensée que les hommes d'Etat de I'Alrique > indépendante, étourdis par les acrobaties de Tshombe > et par les diversions de sa troupe de cent comédiens aux > talents divers et variés, se laissent détourner du pro> blème essentiel : la nécessité d'interrompre coûte que > coûte la carrière criminelle de cet homme qui, malgré > ses sourireJ, JeJ poignées de main, ses protestations > d'amitié, est I'ennemi le plus résolu de I'idéal qu'ils ont > défini dans la charte de |O.U.A. et qui, s'il consolide > son pouvoir, retardera pour des années, pour des déca> des peut-ôtre, la libération de I'Alrique encore sous > domination blqnche. > Et, suppliant les hommes d'Etat réunis à Addis-Abéba d'empêcher l'écrasement des forces révolutionnaires congolaises qui tenaient Stanleyville, nous disions, dans le même article, ce que serait la chute de cette ville : << Tragique pour le Congo, mais tragique aussi pour > I'Afrique, qui aurait laissé conquérir sans combattre, > par les lorces de la contre-révolution blunche, le bastion > congolais qui jouera sans doute un rôle capilal dans > I'affrontement final entre les lorces africaines de libé-
LE KATANGA DE TSHOMBE, POSITION AVANCEE DE LA CONTRE-REVOLUTION
A un moment où ils pouvaient craindre que le Congo appartienne, sous la conduite de Patrice Lumumba, au camp de I'Afrique libre, ils s'arrangèrent pour en dissocier le Katanga, sa partie la plus riche et la plus industrialisée. Sous la conduite de Tshombe, agissant pour le compte des colons et de l'Union Minière, le Katanga devait jouer le rôle de barrage contre la révolution africaine. Il était le fer de lance au flanc de I'Afrique indépendante, un coin enfoncé dans ses lignes de défense et d'attaque. La position géographique avancée du Katanga, ses immenses richesses, son important peuplement de Blancs, acquis aux idées ségrégationnistes, tout cela renforçait le camp des Blancs et de leurs valets. Tout cela affaiblissait le camp africain. L'importance de la position avancée que constituait le Katanga explique pourquoi tant de mercenaires, venus des pays d'Afrique, sous domination blanche, se sont engagés au service de Tshombe et de sa sécession.
C'était leur propre combat qu'ils menaient dans cette avantgarde des forces blanches d'Afrique que constituait katangaise
>
la
< gendarmerie
(2).
Au moment où la sécession katangaise a pris fin, certains se sont imaginé que le Congo était gagné pour l'Afrique. On sait que c'est le contraire qui s'est réalisé. Tshombe, recevant le pouvoir à Léopoldville, a réussi à faire jouer au Congo tout entier le rôle jadis dévolu au seul Katanga. Il a, pour ce faire, eu recours aux mêmes agents, ses mercenaires recrutés dans I'Afrique (2) Si nous anticipons, nous pouvons admirer I'unité du combat que mènent les ennemis de I'Af rique. Le chef des mercenaires de Tshombe, Mike Hoare, qui a quitté le Congo à la fin de l'année 1965, est allé, depuis lors, offrir ses services au gouvernement de Jan Smith, engagé dans la même bataille.
10
!
> ration > raciste
et de progrès et la pire réaction, la
réaclion
et lasciste des Etatl; sous domination blanche. > Les partisans de Mulele el Soumialot qui se battent
l
(3) - Remarques
Congolaises
' du 12 septembre 1964.
> sans armes et sans aide, sur le sol congolais, ne se > battent pas seulement pour Ie Congo. Ils se battent pour > la libération de I'Alrique tout entière.
>
Ils sont les vrais soldats de I'O.U.A. si I'on
s'en
> comprendre à temps. Et si |'O.U.A. est un corps trop lemps, > vaste et trop désarticulé encore pour avoir, > les réactions nécessaires, puissent les Etats alricains les
à
>
plus conscients prendre, sans attendre, les initiatives qui s'imposent et envoyer à Stanleyville et à Kindu des
>
avions de chasse, de Ia D.C.A., des volontaires africains
>
> pour aider les défenseurs de l'Afrique libre à mettre en > échec les forces contre-révolutionnaires animées par le
> traître à lAfrique Moïse Tshombe. > Nos appels n'ont pas été entendus. Et nous savons aujourd'hui ce Congo que le Congo est provisoirement perdu pour I'Afrique - son centre, qui était vraiment la clé du continent, puisque situé en aux confins des Afriques d'expression française et d'expression anglaise, de l'Afrique libérée et de I'Afrique sous domination blanche,
( ) La " Société lnternationale Forestière et Minière du Congo ", créée la même année (1906) que I'Union Minière et dépendant, comme elle, de la
puissante " Société Générale de Belgique ". Les trois sociétés avaient le même président. Pour éviter toute équivoque, signalons que, dans l'esprit de Patrice Lumumba, il s'agissait de reprendre, en vue d'une exploitation nationale, une concession que la société étrangère s'était fait réserver mais dont elle n'avait pas fait usage.
La politique qu'il préconisait à l'égard des réalisations du
capital
belge et étranger au Congo était entièrement différente. Nous n'oublierons jamais cette conversation à laquelle nous avons assisté, à l'époque de la Conférence de la Table Ronde à Bruxelles' Un . socialiste' congolais (que I'on retrouve aujourd'hui aux côtés de Mobutu comme il a été aux côtés de Tshombe) ayant exprimé le væu qu'au lendemain de I'indépendance on nationalise I'Union Minière du HautKatanga, Patrice Lumumba I'avait rabroué vertement. Ç'avait été pour lui l'occasion de préciser sa politique à l'égard du capitalisme étranger. Le Congo aura besoin, dit-il, de toutes sortes d'investissements pour assurer son développement industriel. Des investissements en provenance d'Etats disposés à l'assister. Et il pensait aux Etats socialistes comme aux Etats occidentaux : Etats-Unis, France, Allemagne Fédérale, Italie, tout en réservant toujours, à conditions égales, une priorité à la Belgique. ll comptait sur son neutralisme positif pour que s'institue, à l'égard de son riche Congo, une sorte de compétition entre I'Est et I'Ouest. Mais le Congo, où tout est à laire, aura aussi besoin d'investissements privés.
12
ce Congo extrêmement riche et très peu peuplé (5 habitants au kilomètre carré), capable de se suffire à lui-même et d'améliorer, dans un délai extrêmement court, le niveau de vie de ses habitants, ce Congo eût pu être un exemple contagieux pour toute I'Afrique. Devenant fune des puissances les plus fortes et les plus équilibrées du continent, il eût pu provoquer de nombreux raliements à la cause de I'indépendance et le faire basculer, à la longue, tout entier dans le camp de la liberté. LES VUES LUCIDES DE LUMUMBA ET GIZENGA: e PAS D'INDEPENDANCE REELLE SANS INDEPENDANCE ECONOMIQUE > C'était ce qu'avaient voulu pour leru pays un Lumumba et un Girnnga.
Je n'oublierai jamais ce plan qu'avait formé Patrice Lumumba, avec quelques-uns de ses fidèles, de reprendre tout de suite à la
Forminière (4) les concessions qu'elle avait obtenues de I'adminis-
Dàe lors, dirait-ll à son lnterlocutour, y auralt-ll politlque plur lnocnsée que de laire appel au capitalisme étranger pour qu'll laase dee invootilsements au Congo, alore qu'on dépouillerait le capltaliame 6tranger qui y ott déjà inetallé et qui a à son actif deo réalisations ausei importantes 6t âussi positiv€s pour l'économie congolaise que I'U,M.H.K. Non, proclamait-il avec force, ce n'eot paa cela la politiqut à ouivrc vle-à-vls de ces grossos rociétée. ll faut parler . aflalres. à cer genr-là, leur dire qu'lls doivent r€noncor à jouer un rôle polltlque, qu'un Congo lnd6pendant ne pourra plus tolérer un Etat dans I'Etat, leur laire comprondre qu'il y aura quelque chose de chang6 aueai sur le plan économlque, qu'ils ne pourront plur exporter toua leurs béndfices, qu'ils devronl cn éinvcslir unc partie au Congo, mair qu'll faut que, pout eux, l'aflalrc demeure eullisamment rentable pour qu'ils aient int6r6t à retter au Congo et à y développer leurs cctlvltéc. Voilà le langage qu'il faut tenir aux hommec d'aflairea, dioalt-ll, rl I'on ne veut pas volr partir ceux qui sont là et luir ceut qu'on veut lnviter à s'lntéreeser au Congo. Mais, disait-il encore (et coci esl ersentlel, si I'on veut merurer h dillérence entro un homme politique conscient commo Lumumba et un démagogua comme Mobutu), il laudra exiger des Socidtég capitallstes gua, dang un délai à d6terminer pour chacune d'elles et qui dépendra chaque lolo de la complexité dea tâches à remplir, chacun de ses agents étrangers lorme un homologue congolais capable de le supplder et de le remplacer.
Ce n'eat pae Patrice Lumumba qui aurail . congollsé . l'Union Miniàre à un moment où ses deux mille agents belges étaient irremplaçables soit par dee Congolais, soit môme par d'autres étrangers.
13
, querts du
tration coloniale pour I'exploitation de mines de fer au Kasai, concessions qu'elle n'avait jamais exploitées, parce que le fer est un métal pauvre, qui ne s'exporte pas et qui ne présente donc aucun intérêt, dans le cadre d'une économie coloniale, qui se borne à vider le sol de ses matières premières dont la vente est rentable et à revendre à sa colonie des produits finis, I'exploitant donc deux fois...
Lumumba savait,
lui, que dans le cadre d'une économie indé-
fer avait une importance capitale.
pendante, le
Il voyait déjà, autour de ces mines, des aciéries, des usines de roulements à billes, des ateliers où l'on aurait assemblé des tracteurs dont il aurait doté toutes les communautés agricoles de son pays. Il imaginait déjà cinquante mille ouvriers s'affairant dans un complexe sidérurgique unique en Afrique. Certes, les tracteurs issus des usines du Kasaï eussent-ils, au début, coûté plus cher que ceux que les Etats-Unis ou I'Allemagne Fédérale auraient pu livrer. Mais quelle indépendance ils auraient conféré au Congo de Lumumba ! Après
la mort de Lumumba, son héritier spirituel, Antoine
à Stanleyville, allait continuer dans la même voie. Dans un texte qu'il faut lire et relire, cette admirable déclaration gouvernementale qu'il fit, le 15 mai 196l (5), à Stanleyville, devant le corps diplomatique assemblé, à qui il devait proclamer Gizenga, retiré
avec fierté: < Messieurs, dites > ments respectifs que > colonie. >
et en orgueil
présence
de qui
il
au monde, dites à vos gouvernele Congo ne peut plus être une
devait constater avec un légitime
:
< La solitude de Stanleyville a sauvé I'honneur du Congo et prouvé qu'il n'y q pas que des traîtres, des > assassins et des coruompus dans notre pays.> >
Antoine Gizenga allait affirmer avec une grande lucidité : < L'indépendance n'est jamais complète tant qu'il > s'agit d'une indépendance politique qui est, les trois (5) Le texte intégral de cette déclaration gouvernementale a paru dans numéro spécial de " Remarques Congolaises ' du 23 luin 1961. 14
un
temps, purement nominale. L'indépendance
doit être également économique el sociale. > Aucun pays d'Alrique ou d'ailleurs ne peut être > réellement libre tant que son économie est téléguidée > par l'étranger et que Ia majorité de sa population se > trouve dans un état de besoin économique. > >
L'on comprend pourquoi Patrice Lumumba ne pouvait pas vivre pourquoi il fallait étouffer dans des prisons une personnalité comme celle d'Antoine Gizenga. Les puissances impérialistes et néo-colonialistes ne permettront jamais que s'édifie cette indépendance économique, condition d'une
et
indépendance véritable.
Pour garder leur mainmise sur leurs anciennes colonies, elles préféreront se livrer à une sorte de charité plutôt que de permettre à lancien pays soumis de se iibérer de ses chaînes. Elles ont d'ailleurs préparé l'avenir, on le sait, en substituant, dans des pays entiers, dans des régions entières, la monoculture à des cultures diversifiées, en veillant ainsi, par avance, à ce que la seule ressource de I'ancienne colonie soit la vente de matières premières (6). Elles rendaient ainsi vulnérables économiquement et politiquement les pays auxquels elles abandonnaient officiellement une fausse liberté.
Pow compléter le système, les anciennes métropoles passent, avec leurs anciennes colonies, des accords apparemment généreux, garantissant, aussi longtemps qu'elles sont sages, à leurs matières premières un prix avantageux et leur assurant la fourniture de produits finis à des prix qu'une industrie intérieure serait incapable de concurrencer. En se donnant l'allure de le favoriser, on enlève ainsi à l'ancien pays soumis toute raison de créer sa propre industrie, on le rend ainsi perpétuellement dépenrlant. Pour les puissances impérialistes et néo-colonialistes, il ne peut jamais être question d'abandonner complètement et définitivement une position. On n'accorde l'indépendance politique que si I'on ne peut faire autrement. Mais on veille à ce qu'elle n'ait aucun contenu réel: en liant les économies, en plaçant des valets aux postes utiles, (6) Faut-il rappeler le rôle joué par le sucre à Cuba, par la cacao au etc. ?
Ghana,
en intervenant, si besoin est, politiquement et même militairement, sous les prétextes les plus divers : celui, par exemple, de protéger des vies humaines que l'on a soi-même mises en péril par une politique imprudente et malhonnête (7). C'est encore Antoine Gizenga qui, dans sa remarquable déclaration de 1961, dénonçait cette volonté des métropoles de reprendre d'une main ce qu'elles ont donné de l'autre. < Les métropoles colonisatrices thier sortent à grand > bruit pour se signaler à I'extérieur tout en tramant soi> gneusement d'ignobles complots leur permettant de revetoit ou par porte de > nir par les lucarnes, par
le
>
la
service.
d'un genre nouveQu, elles laissent sou> venl des loyers d'incendie ou des bombes à retardement > dans leurs anciennes possessions coloniales afin d'y > revenir en zélés sapeurs pompiers- > et faisant allusion à I'intervention militaire belge, après la mutinerie de la Force Publique, soulignait les responsabilités des > Pyromanes
Belges < >
qui ont mis Ie leu pour pouvoir revenir par
porte de service.
la
>
LA CONTRE-REVOLUTION N'EST PLUS.SUR LA DEFENSIVE. ELLE RECONQUIERT Jean ZieSer (8) a donné de la c contre-révolution > une définition qui est aujourd'hui dépassée. < La contre-révolution alricaine se déIinil, écrivait-il, > comrne étant Ia communqulé d'inlention et si possible > d action qui vise au maintien de la domination blanche > sur ce dernier liers du continent. > L'expérience a appris qu'il ne s'agit plus seulement de < maintenir > mais de reconquérir et que la contre-révolution gagae de proche en proche. (7) - ' Nous avons analysé l'exemple de l'intervention militaire aéroportée amerr' cano-belge de Stanleyville dans la brochure intitulée ' Le drame con$olais '. publiée par " Droit et Liberté ", Paris' (8) Dans la . Contre-révolution en Afrique.. (Payot, Paris, 1963.) t6
L'impérialisme, depuis l'assassinat de Patrice Lumumba, n'a pas cessé de remettre en cause, par la corruption ou la violence, la marche de I'Afrique vers la liberté et I'indépendance. Nous avons souligné combien le Congo, clé de I'Afrique, eût pu influencer favorablement l'évolution du continent tout entier. Inversement, sa soumission à l'impérialisme et au néo-colonialisme devait avoir I'effet contraire. Nous tenterons, plus loin, d'analyser en détail la dernière phase de la lutte contre-révolutionnaire au Congo. Elle est particulièrement instructive si I'on en démonte le mécanisme. Contentons-nous, pour le moment, d'en voir les conséquences tragiques pour le restant de I'Afrique. Depuis que Mobutu a pris le pouvoir à Léopoldville (le 25 novembre 1965), le Dahomey a fait son coup d'Etat (le 22 décembte 1965), suspendu ses relations diplomatiques avec la Chine Populaire et expulsé ses représentants. La République Centre-Africaine a vu un militaire s'installer au pouvoir (le 1" janvier 1966) et rompre les relations diplomatiques avec Pékin. La Haute-Volta a, elle aussi, depuis le début de janvier, son colonel (le 9 janvier 1966). Il suit la même ligne réactionnaire que les autres chefs militaires.
Tous les pays voisins du Congo sont menacés. On fait des vcsux pour que la courageuse équipe qui dirige à Brazzaville ait assez de vigilance et de force pour repousser les assauts de la contrerévolution. Au Soudan, pour empêcher le gouvernement d'aider les insurgés congolais, Tshombe et Mobutu ont suscité et armé des rebelles dans le Sud (9).
En Angola, la lutte révolutionnaire qui devait libérer le
pays
à partir du Congo est arrêtée. Comment en serait-il autrement lors(9) Pierre Davister, qui était alors le porte-parole de Tshombe, comme il est, depuis, celui de Mobutu, dans . Spécial " du 29/4/65, n'en faisait pas mystère : " On le sait donc aujourd'hui : Tshombe rend coup pour coup' , ôela donne à réfléchir et les Sôudanais ne sont d'ailleurs pas les derniers qu'une aide dite extérieure ne se " à le faire depuis qu'ils comprennent pas toujours à'sens unique et qu'il y a rebelles et rebelles. Après "lait tout, les rebelles congolais, tournant leurs yeux vers le Soudan, les ," rebelles soudanais pouiraient très bien à leur tour réclamer une aide
'
du... Congo
'. t7
qu'on sait les services éminents rendus. par Salazar à Tshombe, pendant et après la sécession katangaise, quand on sait que Mobutu et Salazar, quelle que soit la différence de couleur de leur peau, sont dans le même camp de la contre-révolution africaine ? LES ALIBIS DES CONTRE-REVOLUTIONNAIRES Certes,
il y a les alibis qu'on se donne pour
Mobutu, pour donner le change, fera semblant de rompre avec la Rhodésie de Jan Smith, mais les racistes rhodésiens sont les bienvenus dans les rangs de ses mercenaires où ils mènent le même combat que la Rhodésie blanche. Mobutu condamnera, du bout des lèvres, l'apartheid de I'Union Sud-Africaine, mais les plus férocement anti-Noirs des racistes sud-
ll
n'est pas mauvais de rappeler ce que l'hebdomadaire . Congo ' écrivait le 19 mars 1960, donc avant I'indépendance, de Pierre Davister: " Tu n'es pas assez clairvoyant pour te rendre compte que les temps ont changé, Les temps où I'on " bouffait " impunément du nègre. Les ' temps où, à longueur de colonnes, tu te distinguais dans tes . coins " . d'ombre " : les temps où, ensemble avec ton rédac' chef de l'époque, . tu faisais publier, dans un quotidien de la place, des phrases telles : " " Les Noirs sentent mauvais à la poste '. Ce sont là, confrère, des injures que les nègres, dont la mémoire est très fidèle, n'oublient pas '. facilement. Tu pourrais même aujourd'hui, toi Davister, . jouer " la D carte noire que tu ne serais pas réhabilité aux yeux des Congolais. Car . de tous nos confrères blancs, tu es sans doute en tête de file des . colonialistes butés dont bientôt le Congo sera heureux de se débarrasser. " Demain, confrère, la presse congolaise s'assainira et son premier 'objectif sera d'écarter les brebis galeuses du ton genre. " Heureusement, le groupe dont tu tiens la tête est peu conséquent. " Demain, tu devras partir. Nous viendrons te dire . adieu ., sans rancune. " Et même, pour prouver que nous sommes des " gentlemen D, que nous D passons l'éponge, nous sommes prêts à t'aider à faire tes valises. " Ne penses-tu pas que le plus tôt sera le mieux pour toi ?. On peut mesurer aujourd'hui combien ce telte était clairvoyant en se remémorant le rôle odieux joué par ce journaliste au moment de la mutinerie de la F.P., dans la sécession katangaise, dans le retour de Tshombe à Léo et son accession au pouvoir, puis comme conseiller de Tshombe, enfin dans le putsch de Mobutu et depuis. Le couple Davister-Monheim, aux côtés de ses intimes TshombeMobutu, n'a cessé d'avoir I'influence la plus néfaste sur les destinées du Congo, Une attitude ferme à l'égard de ces indésirables sera le critère auquel se reconnaîtra un gouvernement réellement indépendant, tel que I'imaginaient, en mars 1960, les frères Kanza, que Davister n'a pas cessé, depuis lors, de poursuivre de sa hargne,
18
le luxe de dire du mal de M. Verwoerd et de M. Jan Smith.
tromper, si possible,
I'opinion.
(10)
ceux qui donnent leur vie pour la cause du 1açi5111s africains - par lui de traquer les patriotes congolais. sont chargés Personne ne peut être dupe de ces alibis. Ce sont les mêmes que ceux dont s'affublent des journalistes racistes comme Davister (10) et des journaux comme < Spécial >. Défenseurs de la pire réaction au Congo, ils peuvent se payer
LA
RHODESIE
Le problème de la Rhodésie nous fait toucher du doigt la de la contre-révolution et I'impuissance de I'Afrique
puissance africaine.
Lorsque Jan Smith proclama I'indépendance sous domination blanche, ce fut un tollé. Les Etats membres de I'O.U.A. signifièrent à
de la la
Rhodésie
Grande-Breta-
gne qu'ils rompraient leurs relations avec Londres s'il n'était pas mis fin au régime de Jan Smith dans un certain délai. Ils étaient trente-six Etats. Huit seulement rompront effectivement leurs relations. Les autres feront machine arrière. La Grande-Bretagne se moque de la menace comme d'une guigne.
A la veille
de la réunion de I'O.U.A. (qui est aussi la veille du coup d'Etat d'Accra), M. Nkrumah déclare à un journaliste de < Punch >
:
< Au cas où les sanctions économiques ne provo> queront pas la prise du pouvoir pqr la maiorité africaine , > que se passera-t-il ? est clair que le seul recours qui > reste est une action militaire menée de I'extérieur... >
Il
Et il préconise l'occupation militaire des usines de Wankie, ce qui procurant 63 Vo de l'électricité de toute la Rhodésie étranglerait économiquement le pays. C'en est trop. Il est probable que ce sont ces intentions qui auront hâté le processus d'un coup d'Etat dont le résultat le plus clair est d'assurer la survie du régime de Jan Smith. Depuis la chute de Nkrumah, I'O.U.A. s'est réunie. Quatre pays ont quitté la réunion parce qu'on y admettait le représentant du nouveau régime du Ghana: la Guinée, la Tarlzanie, le Mali et la R.A.U. Trois autres sont partis parce qu'on ne préconisait aucune t9
mesure efficace concernant
la
Rhodésie
:
I'Algérie,
la
Somalie, le
Kenya.
Les autres s'en sont remis à la Grande-Bretagne pour le règlement du problème, vouant ainsi au ridicule l'Afrique tout entière, étalant son impuissance devant la contre-révolution triomphante. Jan Smith pouvait dire du coup d'Etat ghanéen: < C'est un des événements les plus favorables à la > cause rhodésienne qui aient pu survenir en Afrique. >
LE GHANA Ceci nous amène à dire quelques mots de la dernière victoire contre-révolution en Afrique : Ie coup d'Etat du Ghana, l'éviction de M. Nkrumah. C'est pour I'Afrique, évidemment, le contrepied de ce qu'en pense Jan Smith. C'est la plus lourde catastrophe depuis I'assassinat de Patrice Lumumba et la chute de Stanleyville. Toutes lés explications données par la presse occidentale sont des mystifications. L'impopularité de Nkrumah ? Que I'on procède donc à un vote libre, contrôlé internationalement, et I'on verra s'il n'est pas
de la
plébiscité massivement. Ses folies sur le plan économique
? Rien n'est plus faux. Se trouvant à la tête d'un pays affligé, par sa métropole, du vice de la monoculture, le cacao, Nkrumah a tout mis en æuvre pour diversifier ses productions. Aucun pays africain n'avait réalisé ce qu'il a réalisé. IJne centrale électrique géante dans la vallée de la Volta. Trente-deux industries nouvelles (1 1). (11) Dans .Remarques Africaines - du 23/3/66, Emile Lejeune donne des précisions sur ces industries et sur les chiffres de leur production. Depuis son indépendance, le Ghana de Nkrumah a édilié plusieurs usines de cigarettes et de cigares, des fabriques d'ustensiles de cuisine, en tôle émaillée, une savonnerie produisant annuellement 24.000 tonnes de savon et savon dentifrice, une usine de tissage de jute, produisant 4 millions et demi de sacs par an, une usine de chaussures, sortant 2 millions de paires de souliers en cuir par an, une usine textile, une usine de panneaux en ciment préfabriqué d'une capacité de 70.000 mètres cubes par an, une usine de traitement du caçao, d'une production annuelle de 20.000 tonnes, une clouterie produisant 200 tonnes par anr une raffinerie de pétrole .d'une capacité annuelle de 1.250.000 tonnes pouvant être portée à 2.500.000 tonnes, des usines de montage de bicyclettes, une fabrique d'articles ménagers en matière plastique, une usine d'insecticide, etc.
Ce qu'il était en train de réaliser dans le cadre du plan septennal était plus ambitieux encorc (12). Le Ghana, sous la conduite du président Nkrumah, était sans doute le seul pays d'Afrique qui marchait résolument vers la libéra-
tion économique. 'Le revenu national par tête d'habitant était déjà devenu, au Ghana, le plus élevé d'Afrique. les Etats-Unis en Sans doute, les puissances occidentales développement, de son savaient que le Ghana, à ce stade tête séquelles de des raison en était encore économiquement vulnérable, son passé colonial.
Son budget était encore tributaire pour plus de 60 Vo de la vente de son cacao. Etats-Unis et Grande-Bretagne se mirent à faire baisser artifi-
prix du cacao sur le marché. New York, on constitua un stock inouï de 4.311'"12O sacs au 15 mars 1966, là où, I'année avant, I'on n'avait emmagasiné que 59.493 sacs. Avec une telle masse de .manæuvre' et sachant que le Ghana devait vendre son cacao à n'importe quel prix, on réalisa une baisse telle que le prix ne rémunérait plus le producteur, créant ainsi à coup sûr des difficultés considérables. Le caractère artificiel de la baisse ne fait aucun doute puisque, depuis l'éviction de Nkrumah, le prix du cacao a remonté sur les
ciellement les
A
marchés mondiaux.
C'est là une des armes du néo-colonialisme. On en a usé contre Nkrumah, parce qu'il était le plus africain et le plus socialiste des chefs d'Etat. Il était en train de donner un contenu économiqtte - nous à I'indépendance de son pays, et cela, les anciennes I'avons vu
-
. L'abattoir ei la conserverie de Balgatanga-, qui dwait produire , annueliement 2 millions de boîtes de corned-beef et 795 tonnes de partir de 40.000 tonnes de ferrailles, devait " viande ; une aciérie qui, à
(12) - ' (Eo. loc.)
; une coutellerie d'aluminium ; entre autres des ampoules électri" Lne verrerie où seraient fabriquées Dques;, une entreprise de textiles, dont la production- devait être.de 14 produits chocola" àiltionr de mètres de tissus par an ; une fabrique de . tiers ; un atelier d'assemblage de tracteurs, dont la production devait , être de 400 éléments par an ; une nouvelle raffinerie de sucre, produiet environ 5 millions de litres d'alcool " sant 24.000 tonnes de sucre produits pharmaceutiques ; une usine de de une usine année chaque ; " plastiqire ; une minoterie, une conserverie de matière en chaussures " " poissons, une usine de pneumatiques, êtc. ' . produire 30.000 tonnes de produits divers
21
20
le néo-colonialisme ne pouvaient, en tout cas, pas le tolérer. Il avait fondé vingt-deux écoles secondaires nouvelles. Il y avait au Ghana plus d'écoles et de dispensaires que dans aucun des pays métropoles, I'impérialisme,
Pour cette raison, il était convenu que Ie coup d'Etat aurait lieu avqnt la réunion de la conlérence de I'Unité Africaine à Addis-Abéba. > Mais les services anglais n'étaient pas les seuls sur > I'affaire, le général Ankrah, qui devait être le respon> sable direct du coup d'Etat, était lui-même en liaison > depuis lq crise de l'indépendance congolaise, quand il >
> >
voisins.
Nkrumah avait brisé impitoyablement le tribalisme de son pays. Son éviction est un drame pour I'Afrique tout entière. Certes, il avait quelque peu affaibli sa position en expulsant des hommes qui l'admiraient et qui se seraient battus pour lui, mais que quelques-uns de ses voisins considéraient comme < subversifs >. Il avait voulu se concilier les bonnes grâces de certains chefs d'Etat dont I'Afrique ne doit, pourtant, rien espérer. fl avait aussi, peu de temps avant sa chute, commis cette erreur inexplicable de reconnaître le régime de Mobutu. Mais ces erreurs signes de faiblesse de I'Afrique elle-même plus que de sa personne ne pouvaient pas expliquer le coup d'Etat brutal, æuvre de la- c.I.A. et des services secrets britanni-
ques (13).
< Le Nouvel Observateur > (Paris), dans son supplément confidentiel du 2 mars 1966, donnait du coup d'Etat une version conforme à la nôtre et à la réalité : < Ce sont les services spéciaux brilanniques qui > avaient préparé le coup d'Etat contre M. Nkrumah. M. > Amihyia était leur instrument et c,est à lui que devait > revenir le rôle principal. Le gouvernement de M. Wilson > avait donné le leu vert à I'opération car il redoutait que > M. Quaison SaKey, ministre ghanéen des Allaires étran> gères, ne publiât bientôt un rapport accablant sur I'inef> >
ficacité totale des Rhodésie du Sud.
<
sanctions
>
économiques contre la
(13) M. Khow Ami.hyia, ancien chef de ra sûreté ghanéenne, en exir à Londres, se vantant du rôle qu'il avait joué dans le complot, . a déclaré aux journalistes qu'il avait effectué un stage de formation aux Etats-unis .' auprès de la Central lntelligence Agency (G.l.A.) avant de devenir I'un 'des responsables des services seciets-du prééident déchu.. (Reuter, A.F.P., A.P. 25/U66 i . Monde ", 26/U66.) A la.même époque, au cours d'un procès criminel qui s,ouvrait à La .. Havane, des agents américains reconnaiisaient que
la c.l.A. avait
financé
un..complot contre F.idel- Castro, pour un montant de 100.000 dollars (5 millions de francs belges). 22
> commanda le contingent ghanéen à Léopoldville avec > les représentants américains. > obtint d'eux la promesse d'un soutien incondi-
-
Il
lionnel qu cas où il renverserait M. Nkrumah à brel > délai. Fort de cette garantie, il prit les devants, mena > I'affaire à son prolit exclusil et fit savoir aux Ghanéens > de Londres que leur présence était inutile et que leur > rôle avait été secondaire... > ... il n'y a là que des rivalités de personnes et de > clans car les politiques de Londres et de Washington, > en Afrique, sont absolument similaires. > Et Ie < comité de défense de la révolution contre le régime militaire du Ghana > faisait une analyse juste du coup d'Etat lorsqu'il proclamait (14) : < Le complot d'Ankrah-Wotoka-Harley a été dirigé > par les services secrets anglais et américains, le triba' > lisme, lu vengeance personnelle, les missions religieu> ses (15), les lirmes étrangères et des traîtres à I'intérieur > du parti ont été quelques-uns des instruments utilisés. > çsrnrns çslui Est-ce à présent, pour s'encourager lui-même qui crie pour ne pas avoir peur dans l'obscurité - qu'un des derà la contreniers chefs d'Etat révolutionnaires à résister encore révolution, le président Modibo Keita, en même temps qu'il analyse (14) * Drapeau Rouge ", 23 mars 1966. (15) ll est extrêmement significatif que le . Conseil Chrétien du Ghana " ait, au lendemain de la prise de pouvoir par la clique du général Ankrah, envoyé au prétendu Conseil de libération, un message dans lequel il était dit que les chrétiens : . reconnaissaient la main de Dieu dans les événe" ments qui avaient amené I'accession au pouvoir du Comité. ll ne doute que, grâce aux prières du peuple, Dieu et son Fils, qui est la '. pas lumière du monde, éclaireront son action '. (Ghana Today, n" de mars 1e66.)
Cette assimilation de Ia main de la C.l.A. pas perdue pour lout le monde.
à la main de Dieu ne sera
23
si justement la position de I'impérialisme, minimise la puissance cet adversaire (16):
de
< Le changement d.e méthode du néo-colonialisme, qui va d'une certqine politique de sucettes et de bonbons ) à la nouvelle politique de la canonnière inaugurée de> puis un an, n'est pa,r, malgré les apparences, un signe > de lorce pour ceux qui complotent d'une façon conti> nue contre notre liberté. Les événements auxquels nous > cssistons prouvent que désormais, pour sauver Jss > intérêts économiques d'ans le < tiers monde >, I'impé> rinlisme doit se révéler tel qu'il est : un conquérant, un > ravisseur de liberté. >
>
L'IMPERIALISME N'EST PAS UN ( TIGRE DE PAPIER > COMMENT LE COMBATTRE? Je ne suis pas de ceux qui croient que I'impérialisme est un tigre de papier >. Je pense qu'hélas ! il a les retns solides, le coup de patte puissant, la griffe acérée et la dent dure. Et que ceux qui le combattent ont autant besoin de vérité que pain et d'armes. de C'est parce que j'ai la conviction de la puissance de ce tigre que je pense qu'il vaut mieux chercher à lui rogner les griffes et à lui limer les dents avant de lui tomber dessus à mains nues ou avec <
des machettes.
La révolution armée est la solution qui s'impose quand il n'y en a pas d'autre. Elle est, je le dis comme je le pense, la seule solution actuellement possible au Congo. Mais dès qu'une possibilité s'ouvre d'atteindre, pacifiquement, des objectifs moins ambitieux que la victoire totale, je pense qu'il faut la saisir. Progresser par paliers, sans effusion de sang, vaut mieux que chercher à forcer la victoire d'un seul coup par la violence avec les risques qu'elle comporte. (16) . Le Monde 24
"
du 4/3/66.
S'il faut plus de temps pour atteindre pacifiquement ses objectifs, il vaut mieux adopter cette voie que celle qui entraîne le sacrifice de la vie des meilleurs, des plus honnêtes, des plus courageux. C'est pourquoi j'ai toujours pensé que des alliances temporaires avec des hommes ou des partis, dont les objectifs sont en deçà des nôtres mais avec lesquels on peut faire un peu de chemin, sont souhaitables.
C'est pourquoi j'ai toujours pensé que la revendication d'élections libres garanties internationalement (17) était une plate-forme valable (18). Mais il est évident que lorsqu'il n'y a pas d'autre alternative que la soumission à un ordre injuste, à I'impérialisme le plus hideux, ou la résistance violente comme c'est le cas au Congo il n'y a pas, en fait, de choix, il -faut recourir à la violence. Mais dès qu'une possibilité de virage vers des voies plus pacifiques d'action s'ouvre, il faut s'y engager, avec vigilance. On abattra plus facilement le tigre après I'avoir fatigué... NECESSITE D'UN PACTE MILITAIRE
ENTRE LES DERNIERS ETATS REVOLUTIONNAIRES Dans le bilan que nous dressions de la Conférence d'AddisAbéba de septembre 1964 (19), nous écrivions déjà : (1
7) Tout dépend évidemment des moyens mis en @uvre pour garantir impartia-
lement la liberté de la propagande et du vote. ll est évident que l'O.N.U. I'O.U.A. actuellement) ne présenterait pas, à cet égard, de garanties valables. L'O.N.U. est étroitement soumise à l'influence américaine. Quant à
(ni même
l'O.U.4., voici
ce qu'en dit un officieux
algérien
:
" Algérie-Actualité .
(A.F.P. 16/1 1/66, . Le Monde. 12/11/66.) " L'O.U.A. est devenue le porte-parole des éléments modérés, soucieux " de protéger des intérêts très peu liés à ceux de l'Afrique. Nous assistons à un regain des forces réactionnaires et impérialis. tes,' qui marquent des points au détriment des forces de progrès. " L'unité africaine a perdu toute signification idéologique, parce " qu'elle a voulu être la iuxtaposition d'intérêts souvent divergents... - A quelques exceptions près, les pays qui la composent sont le
' jouet de forces extérieures. ' (18) On ne se souvient pas assez de ce qu'au Congo, au plus fort du régime Adoula, on a fait, en 1963, à |.badan, une des communes de Bukavu, une expérience-test. Alors qu'il n'existait, pour les adversaires du régime, aucune liberté d'action, les partis lumumbistes ont obtenu 11 sièges sur 13. (19) .. Remarques Congolaises ' 30,/9/64. 25
sous la menace d''une Pour n'Qvoir pas interdit l'emploi d'avions et de mili> intervenlion africaine sstts psins > taires ét angeis, pour n'avoir pas exigé des immédiate l'expulsion > de la *ê'ie ' 'o'o'tion > congolaise' < nutionale dite > mercenaires de l'armée Stanleyville' lu > luttant contre bs forces populuires de encadrée' ElIe être à bonne est l'O'U''q' > résolution de impuissance > témoignera ainsi, dans I'avenir' de I'uctuelle > > de I'Afrique' un poids Ainsi, dès le début, il apparaissait que I'O'U'A' était lutte de l'Afrique mort et que l'on ne d"uait tiËn en espérer dans la pour sa libération véritable. qui avaient Bien au contralre' les Etats les plus conscients' dit de groupe le : constitué entre eux on "-bryon d'orgànisation cette autres' les avec ôusablanca, y avaient renoncé pour fonder' <
organisation commune mort-née'
de se Pour que ses membres fassent, au Ghana' I'honneur résultat sans d'ailleurs réunir à Accra pour une de ces palabres Rhodésie' (on l'a vu pour le problème du Congo et pour celui- de la meilleurs les expulsé avait l; président ]\klumah. pu. d'Etat chefs certains que "*".pi") mais lui de à", Àfti"ài"s réfugiés auprès considéraient comme subversifs'
pour L'influence de I'O.U.A. n'a jamais été que négative n'a même pas l'Afrique. Elle n'a pas obtenu de Tshombe - et elle que I'on expulse les mercenaires de I'A'N'C' demandé à Mobutu qu'ils s'abstienMais elle a obtenu de la plupart dés Etats africains nent de toute aide aux révolutionnaires congolais' L'O.U.A. est une énorme duperie pour les peuples d'Afrique' La contre-révolution a pu' avec succès' s'attaquer à des Etats.chaque éliminé par fois isolés et dont le pouvoir civil était successivement des armées rangs les dans des militaires ayant reçu leur formation Ce n'est C'l'A' Ia de métropolitaines et a"""uunt leurs instructions une reçu ont militaires milieux ces un secret pour personne que aux soumet les et corruption Ia à formation qui les prédispose influences étrangères.
Les pouvoirs civils n'avaient d'autre force que celle qui
se
retournait contre eux pour les renverser' très L'eussent-ils vouiu qu'ils n'eussent pu, dans les délais capables populaires courts dont ils ont disposé, constituer des forces comme cela de s'opposer à un putich militaire avant de pouvoir
-
26
s'imposera
un jour
mêmes.
-
se substituer aux forces militaires
elles-
Même s'il leur avait été possible de créer des milices populaires, celles-ci dans un affrontement avec les militaires encadrés d'officiers métropolitains, surarmés par les puissances occidentales et, si nécessaire, renforcés par des mercenaires eussent été nécessairement en état d'infériorité, moins bien équipées, moins bien armées. Et dans la meilleure hypothèse, incapables d'écraser dans l'æuf une rébellion de I'armée, tout ce que I'on eût pu en espérer eût été que leur résistance conduise à une guerre civile à I'issue incertaine mais génératrice de désordres et de destructions. C'est pourquoi, dans l'état actuel de I'Afrique, il s'imposait, il s'impose que .les Etats révolutionnaires s'unissent militairement, non seulement pour se défendre contre une agression extérieure entreprise contre I'un d'entre eux mais aussi pour se défendre contre la subversion étrangère dressant, à I'intérieur d'un Etat contre le gouvernement et contre le peuple, des militaires félons. Si la seule force effective chargée de la police et du maintien de I'ordre se retourne contre le gouvernement, celui-ci est nécessairement éliminé, s'il ne peut répondre à cette force qui le trahit par une force plus puissante. Cette force plus puissante et qui seule peut enlever aux généraux et aux colonels traîtres -la tentation de faire un putsch c'est dans un pacte militaire seul qu'ils peuvent, actuellement,-la puiser.
Qu'ils demeurent ou non membres de cette lourde et inutile par tactique ou par sentimentalis il est temps, il O.U.A. est plus -que temps que ces derniers Etats révolutionnaires mettent en pool leurs forces militaires. Au premier putsch militaire, le gouvernement menacé ou renversé fera jouer le pacte pour obtenir l'intervention immédiate des forces interalliées.
Une heure après cet appel, des paracommandos de ces forces mixtes peuvent être à pied d'æuvre et rétablir le pouvoir civil. Cette seule perspective convaincra les militaires de la vanité de toute tentative. Il n'y a aucune raison pour que ces Etats craignent que leur union entraîne, de la part des autres, une réciprocité. Les anciennes métropoles, ou mieux I'impérialisme américain, (qu'on se n'ont pas besoin de pactes militaires pour intervenir
-
souvienne donc de I'intervention-éclair des forces françaises au Gabon et de l'opération aéroportée américano-belge sur Stanleyville) * pour empêcher ou mater la révolution. C'est en réponse à cette intervention permanente sinon des armées étrangères, en tout cas de la C.I.A. et des services secrets des anciennes métropoles, à ces agressions répétées contre la révolution africaine que ces Etats doiet non avec les valets noirs vent, d'urgence, constituer entre eux - d'intervention extrêmement une force africaine de l'impérialisme - Que I'on y songe ! mobile et efficace. Si cette force avait existé du temps de Patrice Lumumba, il n'eût pas dû faire appel à I'O.N.U. pour chasser les forces d'intervention de l'ancienne métropole et rétablir I'autorité de I'Etat sur .la province du Katanga en sécession. Quelques centaines de parachutistes descendant à Elisabethville, au matin du 10 juillet, pour épauler les garnisons fidèles au gouvernement central eusssent étouffé toute velléité de sécession et fait rentrer dans la gorge de Tshombe sa déclaration d'indépendance. Et les forces métropolitaines, pour ne pas s'exposer à un affrontement avec des forces africaines sur le sol africain, se fussent bien
nombreuse pour compter d'un grand poid s (21), c,est la seule parade pratiquement possible, si 1es Eàts veuleni échapper à Ia poussée inéluctable de la contre-révolution. Indispensable pour arrêter les progrès de la contre-révolution, un tel pacte aura d'autre part des ôoniéqrr"n".s incalcurables pour les progrès de la révolution africaine elle_même.
D'autres gouvern€ments
qui
pouvaient craindre jus-africains, qu'ici que leur orientation africaine et'révôrutionnaire i", aerign" comme cible aux entreprises de l'impérialisme et du néo-colonialisme et à la subversion de ra c.I.A., ,Ët.ouu".ont confiance et sécurité et décideront d'adhérer au pacte. sera Ie premier coup d'arrêt porté à la montée victorieuse de la contre-révolution. Puissent ,es chefs d'Etat les plus menacés par elre se décider avant d'être éliminés à leur tour !
gardées d'intervenir.
Plus près de nous, si le président Nkrumah, à la nouvelle du putsch, avait pu faire jouer un tel pacte, les militaires putschistes eussent été écrasés, désarmés, incarcérés avant la fin de la journée. Aujourd'hui où déjà, dans les sphères dirigeantes de la C.I.A., on prépare un putsch contre le président Nasser, contre le président Sekou Touré (20) et contre le président Modibo Keita, en se demandant peut-être dans quel ordre il faudra les abattre, il serait insensé que ces chefs d'Etat ne prennent pas cette mesure qui, seule, peut sauver leur révolution.
République Arabe Unie, Guinée, Algérie, Mali, Tanzanie, un tel pacte et, en quelques jours, mettre au point un système militaire prévoyant le déclenchement immédiat d'une force d'intervention sûre, mixte ou unilatérale, suivant les disponibilités et les possibilités d'acheminement rapide. A I'heure où la conscience politique des masses n'est pas assez formée dans le paysannat et où la classe ouvrière n'est pâs assez Congo-Brazzaville peuvent demain signer
(20) Voir, par exemple, " Le Monde libanais . Le Jour ". 28
"
du 31 mars 1966 reproduisant le quotidien
(21) Quand ses chefs svndicalistes ne trahissent pas '"p;e; les premiers, comme irs
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UN PROCESSUS TYPIQUE DE CONTRE.REVOLUTION: L'EXEMPLB CONGOTAIS
Après avoir ainsi brossé à grands traits le tableau extrêmement la contre-révolution africaine dans son ensemble, il nous a paru important de démonter et d'analyser en détail ce qui n'a pas encore été fait le mécanisme des dernières -phases de la - un pays africain : le Congo contre*révolution dans clé, nous l'avons dit, de I'Afrique tout entière. Des hommes comme Patrice Lumumba et Antoine Gizenga avaient, avec beaucoup de lucidité, compris quels étaient les impératifs d'une indépendance véritable : neutralisme en politique internationale, libération économique, condition de l'indépendance politique, et étaient décidés à conduire leur pays dans cette voie, difficile sans doute, mais pleine de promesses d'avenir. Le premier fut éliminé grâce principalement à Mobutu. C'est au Katanga, fief des officiers belges des forces interventionnistes et des grandes sociétés capitalistes, où Mobutu l,expédia, qu'il fut éliminé physiquement. sombre de
30
Le second fut jeté et maintenu en prison pendant deu-x ans et demi, à I'heure où Cyrille Adoula, de plus en plus sous la coupe du département d'Etat américain, dut payer de ce prix et de quelques autres le retour du Katanga aux conditions américaines'
Tout le monde savait que, pour Gizenga comme pour Lumumba' quelques mois plus tôt, c'étâit aux Congolais eux-mêmes qu'tl appait"rrait de [Lérer le Katanga et d'y faire régner, sans intervention étrangère, la loi congolaise. Sous ldoula, une poignée d'individus (22) va diriger et exploile ter pays dans les limites qui lui sont laissées par les maîtres étrangers. Une nouvelle < bourgeoisie de I'administration, du com*"r"J et de la petite industrie > s'installe dans la corruption et un luxe insolent qui provoque la révolte d'un peuple plus misérable et plus opprimé encôre qu'au temps du régime colonial' ^ C;'peuple, privé de l'exutôire du Parlement où d'ailleurs la plupart d" ,è, représentants I'avaient trahi * allait, sous la direction àe qn"tqo"s ao"Èttt compagnons de Patrice Lumumba' entamer sa révoiutioï, très rapidement- victorieuse' Les deux tiers du Congo sont reconquis, Léopoldville est directement menacée' CyrilleAdoulaparaît,auxyeuxdesescommanditairesbelges et améiicains, trop embarrassé encore de vieux scrupules' trop mou pour mater le PeuPle. On fait appef à l'homme fort, Moïse Tshombe, qu'aucun scrupule ne tie, qui a recours aux mercenaires racistes dont Adoula n'avait pas voulu (23). on aide d'ailleurs militairement Tshombe en lui fournissant pilotes, avions d'observation et de combat, matériel lourd, techniciens, d'Harriman l'ordre sur faudra, il le officiers, < logistiques > et quand a Spuut, on-ira lusqu,à I'intervention directe pour écraser Stanleyville, capitale de la révolution. Stanleyville tombée, la révolution continue' (22)
de l'lnstitut de recherches sur 15 millions, 4'upt9:.un ra.pp.ort 'Lovanium de Léopoldville (. Le ,ô.iàr", de I'Université puissance éco"t É;;;i;;';; 15/3/66) farviendront à r".ssembter toute la
1O0.OO0
économiques
qui ne sont pas aux mains ;;ilq;", ioutes les'riËhesses du pa.ys (celles a"t' iuiit""tts etrang;res, s'entend),.1à plupait.dê ::: no-uve-aux bourles commis de ces puissances linancieres ou
leois Atant d'ailleurJ politiques. rzgf b".i"i. il avait fait intervenir les forces aériennes de I'O.N.U' stationnant *" au Kwilu' la.marée des forces ;;;;; ;; ô;;;;; ce moment pour enraver' de Mulele. Mais, à ses yeux -- et sans doute en réalité - ce n'était pas la même chose qu'un appel aux
32
'
allreux "'
C'est alors que le jeu à Léopoldville va se faire insensiblement plus subtil. que ce soit sa Quel que soit le mobile qui va I'animer - ce soit son souci crainte devant l'étoile montante de Tshombe, que d'apaiser les leaders nationalistes africains pour obtenir d'eux plus facilement qu'ils interrompent toute assistance aux révolutionnaires (24) ou que ce soit simplement un remords tardif et un mouvele président ment de son cæur d'ancien leader révolutionnaire Kasavubu allait amorcer un virage et y entraîner- une partie du personnel politique qui I'entourait. En septembre 1965 déjà, l'on avait, sans consulter Tshombe, toujours Premier ministre, ordonné I'expulsion de dix-sept étrangers indésirables, parmi lesquels Pierre Davister lui-même, cet intime de Tshombe (25).
Au cours des premières séances du Parlement, issu pourtant d'élections truquées et sans valeur, on entend des députés et des sénateurs parler avec mépris des mercenaires. Le 12 octobre 1965, Kasavubu révoque brutalement Tshombe de son poste de Premier ministre et confie cette charge à M. Evariste Kimba, ancien ministre des Affaires étrangères de Tshombe dans le Katanga en sécession. En même temps, le président de la République dénonce les ingérences de quatre ambassades occidentales. Pierre Davister, fort navré de l'élimination de son protecteur, prédit:
à au
gauche pour dédouaner le nouvequ < On virera < sommet > gouvernement d'Accra, on revirera à > droite lorsqu'il s'agira de réconlorter les U.S.A. qui > seront rassurés en retrouvant des hommes < eux > > dans Ia nouvelle équipe. leur suflira donc d'en reve> nir à leurs premières,amours. >
>
Il
à
(24) Politique qui avait réussi au Cameroun à M. Ahidjo qui, en prenant quelques positions spectaculaires (notamment contre Tshombe) était parvenu
à isoler ses . rebelles '.
(25) " $p5ç;u1., dès le 9/9/65, fulmine : " ll faut croire que la propagande téléprochinoise de Brazzaville commence à porter ses fruits à Léo' visée où, chose curieuse, on commence à inciter la population à se ' poldville des... . impérialistes .. ' méfier On conçoit que Davister, qui avait tout fait pour qu'on se méfie des . communistes., qui n'étaient nulle part, ait reçu un choc au cceur lorsqu'il entendit parler des " impérialistes " qui étaient partout.
C'est aussi I'interprétation d'une partie de l'opinion de gauche en Belgique. < La Gauche > notamment écrit (26) : < Le nouveau Souvernement est un gouvernement
> L'on oublie trop souvent que les mercenaires ont été amenés au Congo par le gouvernement du Katanga à I époque où il était sécessionnaire. > Lorsque, au début de 1963, la sécession katangai> se fut résorbée, le gouvernement central hérita non > >
> cédent. Pour le moment, il n'essaiera sans doute que de > modifier la politique étrangère du Congo : attitude plus > nationaliste (par exemple à f égard de la Rhodésie du Chine à > Sud), vote en faveur de I'admission de R'P' de la de reconnaissance même peut'être > |'O.N.U., > Chine. >
,
> seulement de l'actif mais également de tout le passif > politique de la sécession et notamment des mercenai> res. Le gouvernement central s'elforça de liquider ce > passif , en réalisant, au sein de I'armée nationale congo> laise, conformément aux.vceux exprimés par les Nations-
la
D'autres commentateurs belges sont plus pessimistes' < Le Soir
>
(27) prêvoit:
On n'q pas fini de mesurer les conséquences du > nouveau virage pris par la politique congolaise' > Et < Spécial >, à la veille de la réunion d'Accra, prédit (28) : On parle avec insistance d'une probable < ouver> ture à gauche > de M' Kasavubu à la conlérence > d'Accra qui s'ouvre ce mardi 19' > Danslemêmetemps,lePremierministreKimba,interviewé par < Spécial >, n'écarte pas la possibilité d'une négociation avec les <, Soumialot, Gbenye et les Kanza >. Et M. Kamitatu, ministre des Affaires étrangères du nouveau gouvernement, dénonce à la radio MoÏse Tshombe comme étant <
<<
I'ami de Jan Smith. Kasavubu se rend en personne à Accra. Le 23 octobre 1965, il prononce, devant les chefs d'Etat assemblés, et notamment devant le président Nkrumah, un discours qui esquisse un net rapproche*"nt uu"" les Etats révolutionnaires d'Afrique. Il annonce une réconciliation avec le congo-Brazzaville et, abordant le problème brûlant des mercenaires, explique (29): < J'en viens maintenant à un problème qui, ie Ie > sais, vous préoccupe beaucoup et qui préoccupe beau> coup tout Africain' parce qu'il met en cause la dignité > même de t'Afrique : pour comprendre ce problème et > rechercher sa solution, il est à mon qvis essentiel de le > replacer dans son contexte historique' (26) Le 23 octobre (27') Le 16 octobre t28) Le 21 octobre
1965. 1965. 1965.
iZgi Seruice congolais d'information, " 34
> Unies,
la pleine intégration des lorces de lq
sécession.
et n'étail pas encore b entièrement terminée lorsque éclatq la rébellion. Dès > lors, je lus contraint, dans le but d'éviter l'éclatement > du pays, de laire appel à celui qui était le seul à même > de réaliser cette réintégration, qu risque de voir aug> menter le nombre de mercenaires (30). > Sur le plan interne, mon pays a fait peau neuve. > La République démocratique du Congo se tourne réso> lument vers I'avenir et s'engoge à apporter au problème > des mercenaires une solution définitive, conlorme aux > intérêts supérieurs du Congo et de I'Afrique. > Cé:tait s'engager formellement à renvoyer les mercenaires, qui constituaient une insulte permanente à la dignité africaine. Déjà très clair dans son discours, Kasavubu était plus net encore dans ses conversations de couloir et le représentant du journal < Le Monde > à Accra avait noté (31): < Décision de renoncer aux mercenaire,y et volonté > ferme d'améliorer les relations avec les Etats voisins > semblent indiquer pour les observateurs que le Congo > ve, dans les prochains jours, changer sa politique > Cette intégration s'avéra luborieuse
Nouvelles du Congo
' n'
15'
> générale. >
Interviewé par ce journal (32), le président Kasavubu allait être plus net encore, en disant des mercenaires : (30)
ll va de soi que cette explication constitue un chef-d'æuvre de ce que injurieusement sans doute pour les Pères Jésuites - faitle . jésuitisme ..- Sans Tshombe et sans les mercenaires, auxquels il a I'on appelle
appel, avec la bénédiction du chef de l'Etat, celui-ci aurait été renversé depuis l'été 1964... (31) Le 26 octobre 1965. (32) . Le Monde - du 29 octobre 1965^
Ces gens-là sont venus illégalement chez nous. > Tshombe a voulu en laire I'instrumenî de sa politique <
> personnelle. >
Plus tard, Mobutu déclarera à ses amis Monheim et J.K. (van
der Dussen de Kestergat) de < La Libre Belgique >, gue Kasavubu, à Accra, était allé beaucoup plus loin dans ses accords avec les leaders africains révolutionnaires. Francis Monheim, son commensal et son hagiographe, écrira (33): < De très bonne source, i'ai appris loutefois que le > général Mobrtlu venait d'être mis au courant de certains > accords passés à Accrq entre le président Kasavubu el >
le
Ghana.
> Au terme de c'es accords, des troupes ghanéennes devaient assurer la relève des policiers nigériens sta> tionnés à Léopoldville. Et parmi les tâches assignées à > ces troupes, figurait en bonne place la suppression de > plusieurs hommes politiques et... du général Mobutu
>
> lui-même. > Effectivement, un premier contingent de Ghanéens > était arrivé à Brazzaville au début de la semaine der> nière. >
A J.K. qui
l'interviewera (34), Mobutu déclarera: < Vous ne pouvez croire à quel point il élait temps > d'agir, le sang allait couler. Je ne peux vous en dire > plus...
Ce que le général ne dit pas (35 ), Iq rumeur > publique le dit : à Accra, le président Kasavubu s'était > engagé non seulement à faire partir les merceneires, > mais aussi à débarrasser I'Afrique de Mobutu, de > Tshombe et de quelques autres. Le Ghana, pour ce > faire, avait promis son < assistance technique >, sous > la lorme de petits groupes de spécialistes en coups > de main. La manilestation de I'ambassade de Belgï >
> que (36) étail un > congolais noyauté
premier rodage pour un groupemenl
de spécialistes.
>
(33) " gp6";u1 ", 2/12/65' (34) - La Libre Belgique " du 29/11/65. (35) C'est-à-dire ce qu'il préférait ne pas dire officiellement. 36
Nous avons anticipé pour montrer que les milieux proches de Mobutu avaient le sentiment que Kasavubu était allé beaucoup plus loin dans ses conversations secrètes que dans son discour. qrr'il était décidé non seurement à éliminei l"s ,n"rcenaires et à "i se rapprocher des < rebelles > encore à purger le congo et l'Afrique _mais
de
quelques-uns des plus grands criminels : Mobuù notamment, achetant sans doute, par le sacrifice de ses anciens complices, l'oubri
de ses propres fautes. Mais revenons en arrière. Au lendemain du discours d'Accra, la stupeur et l'inquiétude frappent les amis de Tshombe et de Mobutu. J.K., dans un article intitulé < Le président Kasavubu va-t-il entraîner le Congo dans un virage à gauche ? > (37) avertit : < Quoi qu'il en soit, la politique de M. Kasavubu > est lourde d'aventures pour le pays. L,extrémisme afri_ > cain obnubilé par la peur d'une Alrique contre_révo_ > lutionnaire qui engloberait le Congo veut obtenir le > départ des mercenaires. >
Si
M.
Kasavubu cède sur ce point,
il
est clair que
> toutes les entreprises européennes se reprieront > mercenaires. > C'est du moins ce que > semble conlorme à la vérité. >
avec
I'on aflirme ici, et
Et I'on ne sait pc.s comment la
res
cela
Betgique pourrait
> maintenir sur place ses agents de I'assistance technique > et de I'assistance militaire. On suppose que
M.
Spaak
aura lait savoir ceb très nettemenl au président li.asa_ > vubu (38)., Et plus loin, dans le même article, J.K. s,interroge: < Maintenanl, voici le pays à la veilte de retourner > dans les déchirements. Une solution _ le coup de > frein que pourrait donner M. Kasavubu mais qu,il >
> assez
illusoire d,espérer.
"rt
(36) Au cours de. laquelle des.drapeaux berges furent déchirés. Nous évoquerons plus loin cet incident. (SZ) lla Libre Betgique, du 26 octobre 1965. (38) ceci est dit avec intention r'on pense générarement que M. spaak ne -J"r -r.riJn"i."" p-orte pas Tshombe dans son - cæui et qùe re départ lèv_erait une lrypothèque sur sa poritique Ëàngotarse. Ar.;il.k:-f;itlrt un apper ou pred dans l'espoir que M. spaak reste impassible, ses maîtres américains le contraindront'à _si intervenir.
37
celle de dinterdécida colonel lorsqu'un ieune > septembre 1960 qui conduisait politique vie une momentanément > rompre >
Et la situation n'est pas loin de rappeler
à la catastroPhe' > Non, iI n'est pas certain du tout que les mêmes > cantses produisent les mêmes effets' mais si l'on veut ne peut > envisager toutes les solutions possibles' on > oublier celle-là. > à comprendre Quand on lit un tel article, on n'a pas difficile d'Etat de coup du veille la oue le gouvernement congolais ait, à du solution la qui suggérait un iootnititte étranger il;;t:;;pil; le faut-il occidentaux' gouvernements prt*tt i"ffi"ire. Bien des pareil !"' cas un patients aussi n'auraient pas été âfl" f .dans - même moment, I'autre ami très intime de Mobutu et Au < Spécial > Tshombe, Pierre Davister, écrivait dans son hebdomadaire saisie): f:g) tAo"t il n'est pas diificite non plus delescomprendre,la Bien Nkrumuh' bras de < Kasavubu se iette dans mal' > > sûr, c'est touchant, mais < cela s'explique du > M. Kasavubu danse le charleston à lheure à la plus qui sont ne > yé-yé, il réentonne des rengaines >
le
PaYs
>made.L'histoiretlel'isolementduCongodurestede
conI'Afrique. L'histoire des mercenaires' I'histoire des vieilDe étrangères' ingérences des > seillers européens et > les histoirei qut n'intéressent plus personne' Fallait-il > vraiment que M' Kasavubu les déterre? car il o Le pLfis d'Accru va peser dans la balance plaire pas > fut dit iu Ghana d'es choses qui ne doivent cas tout plaire en > à tout le monde, qui ne peuvent pas > au général Mobutu' l'inter> Le départ des < volontaires > européens et plan pas le N'est-ce > vention dis pays de fO'U'A' planpas ce n'esl-ce et > Adoula qui rivient sur le tapis ? > là que Ii générat Mobutu reietait hier avec for.ce n'engendre persistante que l'équivoque , Souhàitons > pas des iusqu'au-boutistes qui, tôt ou tard' devraient > > provoquer te réftexe d'auto-défense des mobutiste|' Et d'appeler Mobutu le < troisième homme >' >
(39) Du 28 octobre 38
1965.
Ainsi donc, deux journalistes qui au temps du Roi Soleil, certains étaient admis au petit lever du monarque ont le - de lui privilège d'être reçus par un Mobutu en pyjama et de recevoir la primeur de confidences au saut du lit ou dans la détente de l'après-whisky, font la même prophétie, profèrent la même menace: si I'on va trop loin, le général va réagir.
QUI EST MOBUTU
?
L'on sait qu'il fut, avant l'indépendance, pendant son séjour à Bruxelles, un indicateur de la Sûreté belge. Patrice Lumumba avait eu le grand tort de lui pardonner des liens aussi sordides et de garder à ce jeune homme, mûr pour toutes les trahisons, une confiance qu'il ne méritait pas. De la Sûreté belge, il allait passer aux services secrets américains. Un thuriféraire de la Central Intelligence Agency (C.I.A.), écrivant un livre (40) à la gloire de la C.I.A. et de ses interventions dans différentes parties du monde, vante, dès 1962, la découverte par la C.I.A. de Mobutu, < I'homme fort > du Congo. < On peut dire, écrit-il, sans peur de se lromper, > que Mobutu lut < découvert > par la C.I.A. > Rappelant le rôle joué par la C.I.A. auprès de Kasavubu pour le pousser à révoquer Lumumba et les difficultés auxquelles cette révocation donna lieu, Tully écrit : < C'était évident que I'indolent Kasavubu n'était pas > un adversaire pour Lumumba, mais la C.LA. disposait > de I'homme qui devait prendre I'aflaire en charge au > Cet homme était évidemment loseph Mobutu. A > dater du 14 septembre, Mobutu émergea comme t,hom> me militairemefi foft du Congo. Avec I'assentiment de > Kasavubu, Mobutu entra en fonction... >
Puis, évoquant place par Mobutu:
le
collège des commissaires-étudiants, mis
en
(40) C.l.A. lnside Story, New York 196_2, p. 221. La traduction du chapitre au Congo a paru dans " Remarques Congolaises n'" 31-3à du 99.n_sgc-r_e_ " 5/10/1962.
39
Le Coltège des Hauts Commissaires' avec l'aide lettres de > de la C.I.A., mit Iq main sur une série de <
> Lumumba... > Ia grande
A
ioie de
ses patrons américains' un
pouvoir'
> des premieis actes de Mobutu, en assumant le et de > fut de chasser du pays ces < techniciens > russes > confisquer cette littérature' du Congo ordonna capture de > L'homme
lort
la
Lumumba avant qu'il atteignît Stanleyville' > sur la Depuis ce moment, Mobuiu n'a pas cessé de rester soit par exemple, lorsqu'il s'agit de libérer Tshombe' scène politique soit dans la coulisse. arrêté à h ôonférence de coquilhatville < La pénétration- amériintitulé petii livre un dans Dès 1962, Il y était dit caine au Congo , (41), le processus était déjà prévu' garanties que si un gouvernement côngolais cessait de donner des aux Américains,
cite qu'il entend faire peser sur le gouvernement, sur I'Etat lui-même, sur toute la vie politique de la capitale. < Pourquoi Pas ? > (43) pouvait écrire :
le chef de
Ainsi toseph Mobutu pouvait prendre le pouvoir > quand et comme il le voulait. > Pas un bouton de guêtre ne manquait à son régi> menl de paras. Il y avait consacré tous ses soins (ces <
> hommes touchent
d'ailleurs une solde exceptionnelle).
>
>
<...jlsaurqientrecoursàleurhommeprovidentiel
M'
Adoula
> de septembre 1960, le général Mobutu' Si doute > nc pouvait plus servir, ils le remplaceraient sans même du > pqï une diitature militaire sous lq direction
: Mobutu, Nendaka' Bomboko (42)' plupart > Le Congo connaîtrait ainsi le sort de Ia gouverle > des républiques dAmérique latine' Lorsque
>
trio qu'en
1960
>nement de-ces républiques cesse d'être aux ordres du ren' > département d'Etat ou lorsqu'il est menacé d'être à linfluence > versé par une maiorité moins soumise suscitent > américaine, les services compétents américains > un Putsch militaire' > Mobutu, quel que soit le gouvernement au pouvoir' demeurera la force l'arbitre de la situaiion puisqu'il sera le seul à posséder
armée.Sespara-commandos,créésparletraîtreKettani(appartenant que à la même-classe de généraux prêts à tous les mauvais coups en équipés i" lerrerU Oufkir, I'asiassin de Ben Barka), éduquéslesetforces révonrà'eL n,ont jamais étê engagés dans la lutte contre jalousement à Léopoldlutionnaires. Mobutu les a toujours gardés impliville. C'est sa garde prétorienne, sa réserve sacrée, la menace (41) de Mosheje Luc, aux éditions de ' Remarques Congolaises "' iiài ô"" t.oit'hommes sont au pouvoir auiourd'hui' 40
LES COUPS DE FREIN DE MOBUTU Pour Mobutu, les dirigeants politiques peuvent aller jusqu'à un mais celui qu'ont fixé ses maîtres américains certain point pas au-delà. < [æ Peuple > dit de lui: < Il est considéré comme I'homme-clé dans les affai> res congolaises par le pouvoir de ueto de fait qu'il a > sur les décisions du gouvernement. > Kasavubu ayant annoncé son intention de renvoyer les mercenaires, Mobutu va, tout de suite, signifier qu'il n'est pas d'accord. Au lendemain d'Accra, Associated Press (44) rapporte que la déclaration de Kasavubu : < ... aurait suscité I'ire du général Mobutu, comfturn> dant en chef de I'A.N.C., qui est partisan de I'utilisation > de ces combattants dans la lutte contre les rebelles. > Et à son confident J.K., Mobutu dit (45) des mercenaires : < Ce sont des hommes vqlables qui aident réellement > les populations de I'intérieur. Cela me peine qu'on les > traite comme des mercenaires à chasser. On ne les > chassera pas. Ie sais qu'ils viennent ici pour gagner de > l'argent, mais beaucoup d'entre eux travaillent avec un > grand idéal (46). (a3) Le 2 décembne 1965. (aa) Le 27 octobre 1965. (45) .La Libre Belgique" du 1/11165. (a6) ll est bon de rapprocher cette déclaration de Mobutu de celle du chef des mercenaires, Mike Hoare, à son départ du Congo. (Assoc. Press. . La Libre Belgique " du 15/12165.) . Tuer des communistes, affirme-t-il, c'est comme tuer de la vermine. " Tuer des nationalistes africains, c'est comme tuer des animaux. Je
>
Et
s'il faut un iour les faire partir, ce ne sera pas
de cette manière-là. > Lorsque le Congo n'aurq plus besoin d'eux' ils partiront avec les honneurs qui leur sont dus' > Démentant les propos de Kasavubu à Accra, Mobutu prend sur lui la responsabilitâ dé I'appel aux mercenaires, depuis l'accession de Tshombe au Pouvoir : qu'il <. Le général Mobutu nous a fait comprendre des suiet au > saurait prendre toutes ses responsabilités généque le c'est > mercenaires. Il nous revient, en elfet, >
>
> engagé les << volontaires > signer leurs contrats (47).
européens
et signé ou fait
>
Mobutu allait marquer un deuxième coup d'arrêt lorsque Kasavubu et le Premier ministre Kimba allaient laisser entendre que I'on
ni les uns ni les autres. Mes hommes et moi-même avons ' n'aime et 10.ooo rebelles congolais pendant les 20 mois que j'ai 5,000 entre ' put"et au Congo, mais cela ne suffisait pas' ll. y a .1.7 millions de " eux . bongolais, vous savez, et je suppose qu'environ la moitié d'entre "ete âes rebelles à une é'pbque ôu à une autre, quand j'étais ànt " , là-bas. ' Quelques mois plus tard, un mercenaire allemand, animé lui aussi ioriu " d'un grand idéal ', chevalier de la civilisation chrétienne et "unr àAt"n""u. du mondè libre, est arrêté au moment où il transporte un crâne Je nèsre dans son s"t de uovag". ('^La- Libre g"tslly-1:-i' .11/q16,9') pas (42) étant de Davister dans . Spécial " du 28/1O/65, il n'est t' ' Ce teitequ'il tienne cette précision de Mobutu lui-même' Jouterx interroge, dani ' Le Soir ' du .6 octobre 1966' un mercenaire R. Détry 'deux jaribes. ll a d,abord combattu du côté de Tshombe au blessé aux puis, il y a neuf mois e-nviron, il a màment de la séiession katangaise. "
un rapprochement avec les leaders insurgés. Les deux problèmes étaient d'ailleurs liés. Chasser les mercenaires sans s'entendre avec les insurgés, c'était évidemment courir à un nouvel effondrement de I'A.N.C. devant les forces populaires : < IIs savent, écrit l.K. (48), Ia puissance latente > d'une rébellion dont les causes n'ont pas disparu: par> tout, la masse se sent abandonnée et partout elle pour' > rail s'enllammer sous la direction des agitaleurs de > Soumialot et Gbenye. > Aussi Mobutu va-t-il démentir brutalement les propos apaisants du chef de l'Etat et du Premier ministre (49). << Iamais, votts m'entendez, diral-il à son fidèle > Davister (50), jamais, tant que je serai à la tête de >|'A.N.C., les Gbenye-Soumialot et consorts ne feront > partie d'un gouvernement d'union nationale. > Me voyez-vous claquant des talons et disant > < Excellences > à ces bandits qui ont cherché à me chercherait
> tuer ?
tué
, rejoint à nouveau le Congo pôur lutter, cette Îois, avec I'armée nationale on'ie voit, il a été recruté par le général Mobutu, ".oigoi"i".. - Comme d'Etat, couP son après -'.-Ùn urtr. iblessé neuf fois au service du général. Mobutu) à.qui le
iournàliste demandait pourquoi il avait choisi dè servir Mobutu, répond: iàu". ,n sourire désarmani qu'il promettait plus d'argent que l.es €utres '. L'un d'entre eux a été te"ruié d"nt un café proche de la Porte de Namur, à lxelles. Màis en dehors de ces recruteurs clandestins fonctionnant pour Mobutu comme ils avaient fonctionné pour Tshombe, il y q le recrutement
y1'1" 9".PP-T19."-ôrasi otti"i"t àuquel se livre l'ambassade du Conso.''y.1 one. Les examens médicaux et les vaccinations sont ettectues en belglque' qui comprend neuf ;;; d.. tô."i."t dépendant de I'a.mée. Le contrat, . gouvernement de la le (Kinshasa) entre I'eopotaville a ,"i-rigno [àô.r, du Congo ".. d'une part el. celui qu'on . nomme hO-puUtiqr. D?mocratiqie ' ouàiouement 1,. aaent contractant-" d'autre part. (Voir le reportage de iji"rrL Font"ine dàns le . Pourquoi Pas ? ' du 22/9/66')
> >
Et s'ils revenaient quand même ? Ie prendrai alors, c'est-à-dire lorsqu'il le faudra,
> toutes mes responsabilités.
Le
>
a étê fort net dans ses déclarations à I'A.F.P. : < Les mercenaires ne seront pas chassés, Ies rebelles > ne reviendront pas à Léo aussi longtemps qu'il dépen> dra de lui. > Davister explique d'ailleurs avec une certaine candeur quelles sont, en dehors des ordres reçus de la C.I.A., les raisons qu'a Mobutu de ne pas vouloir le retour à Léo des nationalistes (51). Et il sera bon de retenir ce texte pour le verser à son dossier, lors du procès qui lui sera fait un jour: < Il sait que son nom n'a pas été rayé d'une liste > noire où figurent aussi celui de Kasavubu, de Bombo> ko, de Kandolo, de Nendaka, d'Adoula et bien sûr - cristallise > de Tshombe. Ce groupe-là, Iaut-il le dire, général
-
(48) Dans . La Libre Belgique ' du 29 octobre 1965. (49) M. Kimba avait dit notamment : . L'armée nationale se bat depuis des " années. Elle est fatiguée et doit se reposer et notre souci est maintenant d'éviter que le sang coule '. (. Le Monde. des 31/10, 1/11/65.) ' (50) " 5p6t;"1 " du 28/1o/65. (51) " 5p6.iu1 " du 25/11/65. 43
42
> d'ailleurs loutes les rancunes des communistes qui se> raient installés depuis longtemps au Congo (52) si ce > rempart, dont Mobutu est la pierre de base, ne s'était > révélé aussi infranchissable et aussi solide' >
jour :
Si ces gens-là devaient revenir ici, ie serai > pendu avqnt... Tshombe ! > Ce que pense Bomboko, le général Mobutu Ie >
> pense aussi. On ne saurait, dès lors, lui refus catégorique s'il en est > refus net > sa propre tombe. >
-
reprocher son
-
de creuser
Il déclaré
qux Congolais qu'ils avaient été jusqu'ici victi> mes de I'impérialisme et du néo-colonialisme, mais que > maintenant cela irait mieux. > Il morigène le ministre Kamitatu en I'avertissant de ce que les capitales occidentales sont méfiantes parce que Kasavubu avait promis à leurs ambassadeurs de laisser Tshombe en place. Le lendemain (55), J.K. titre : '< La crise congolaise pourrait mener à un coup < ...
> d'Etat. > dans coup toute manière, > d'Etat. > Si ce n'est pas M. Kasavubu qui le fait, et on ne > voit pas comment le réussirait, ce pourrait être le > général Mobutu qui rééditerait l'opération de septem-
Malgré les deux coups d'arrêt de Mobutu, Kasavubu et ses ministres semblent décidés à poursuivre le virage amorcé. Les agences de presse Inbel et Reuter rapportent (53) que le nouveau
étrangères, Kamitatu, proclame que vont modifier leur attitude à l'égard du les responsables congolais
>
mouvement révolutionnaire angolais, complètement neutralisé depuis que Tshombe, I'ami de Salazar, a pris le pouvoir. Il dit aussi tout I'intérêt attaché par son gouvernement à la reprise du dialogue avec le Congo-BrazzavtTle. l-e 4 novembre, le gouvernement ordonne l'expulsion de deux
journalistes dont J.K. (van der Dussen de Kestergat) qui vient de de calomnies -"rr"r, dans < La Libre Belgique >' une etcampagne de Tshombe faveur en contre le < virage à gauche > de Kasavubu > Davister est de < spécial Mobutu. et d,un éventuel coup d'Etat de
le prési-
> dent a entratné le Congo sur une pente extrêmement > dangereuse pqr ses tentatives d'ouverture à gauche' >
4
bre 1960. Mais on n'en est pas encore là. Le général
il
> veut resler en dehors de la politique et > certainement cette attitude aussi longtemps > possible.
Le ministre des Affaires
f53l . Le Soir ' du 3/11/65. tsai " t-" Libre Belgique " des 6/7/11/65.
I'air un
il
> avec les pays africains non alignés, prendre ses distan> ces vis-à-vis des gouvernements blancs d'Afrique du > Sud et de Rhodésie et peut-être de I'Ocam' >
(52) C'est là, tout le monde I'a compris, la littérature de la C'l'A'
il y a
De
gouvernement:
interdit. Expulsé, J.K. s'épanche dans son journal (54) : < Le moins que I'on puisse dire, c'est que
critique le rapprochement avec le Congo-Brazzaville et s'indiM. Ganao, ministre des Affaires étrangères de ce pays, ait
gne que
conservera
que ce sera
Mais peut-être ne sera-ce plus possible très longIl n'y a d'ailleurs aucun intérê| à ce que se > prolonge I'actuelle conlusion politique qui ne sert per> sonne sinon les visées chinoises. > Pendant ce temps, des autorités locales prennent déjà des mesures contre les mercenaires, tel ce commissaire général à Kindu, le major Poto-Poto, qui prend prétexte d'un incident mineur pour faire désarmer les < volontaires étrangers de |'A.N.C. >, c'est-à-dire les >
> temps.
mercenaires (56).
Les événements se précipitent. Deux officiers belges, le commandant Lamouline et le capitaine Protin des < affreux > de la première hsule sont rappelés - à Bruxelles (57) parce qu'ils appuient ouvertement d'urgence Tshombe.
Le ministre de l'Intérieur, Nendaka (55) " 16 Libre Belgique " du 8/11165. (56) " La Libre Belgique " du 8/11/65. (57) La presse du 15 novembre 1965.
-
qui connaît la musique,
lui qui, depuis cinq ans, concubine avec la Sûreté belge - dénonce un comPlot (58) : Parmi les conspirateurs, se trouvent des olliciers <<
pilotes de
> cenaires, des employés d'e commerce' des mis> lignes commerciales, des banquiers et même d'es > sionnaires, < en général des Belges >'
plus Radio-Léopoldville' avec des accents que I'on n'avait , (59), stigmaentendus depuis que s'était tue la voix de Kashamura tise
:
et de '.. Ies menées diaboliques des impérittlistes vérises de Congo le détourner qui veulent > leurs valets
> Certes, il a accepté le discours de M. Kasavubu à Accra dans ce qu'il a de symbolique et d'africain, mais pour I'aspect pratique, Mobutu <veille au grain>. Le Premier ministre Kimba, lui qui, pendant tant d'années, a pafiicipé aux entreprises de mystification de Tshombe, fait preuve d'une tardive lucidité (62). Maintenant qu'il est de I'autre côté, il doit comprendre pourquoi l'on traitait Lumumba et Gizenga de > >
< communistes
fois qu'un Congolais essaie réellement de l'intérêt de son pays, les ennemis de la > République démocrutique du Congo I'accusent dêtre < Chaque
> travailler dans
> communiste. >
<<
> tables obiectifs.
L'on relance les faux bruits, fabriqués, comme en 1960' dans qui les officines de la c.I.A. Alors, c'était un bateau polonais la de député. un payé a on Maintenant, s'approchait de Matadi. (60) _ I'Assemblée à pour affirmer _ le parti de Tshombe càaco
que
'bataillons
de troupes
ghanéennes
et
chi-
<< ... trois >noisessontbaséssurleterritoireduCongo-Brazzaville Kasa> et pourraient être appelés à soutenir le président
> vubu.
>
Mobutuaccréditerad'ailleurscesfauxbruitsendéclarantque: < '.' si les Ghqnéens essayaient d'entrer au Congo' > en traversant le fleuve depuis Brazzaville' il les lerait l'eau' > de Davister entre en transes (61) : et ce qui est << Mobutu est le dernier rempart polil'aventure contre solide > mieltx, le dernier rempart court"' tout > tique, voire même l'uventure > Mobutu dit"' < Non > et parlois même trois fois !e75q11e la marge de sécurité qu'il a lui> << Non s esprit > même délinie et qu'il situe exactement dans son > risque d'être comPromise'
> sauter d'ans
Le
-
(581 " Le Figaro ' du 22/11/65. (591 . Juma ' du 1/1/66 pariera d'ailleuns plus tard de ' ' à l'école de Kashamura ". ',
éài.".t 'La Libre Belgique'du j "1" f-" 25 novembre 1965.
1661 fOr
46
Dénonçant ensuite les menées de certains étrangers liwent à la concussion pour: < ... maintenir Ie Congo dans son état de perpétuelle exploitation
10/11/65'
' la radio se remettant
>
et qui < ... essaient de nous corrompre en mettant des som-
à la disposition de certaines personnes > lance un appel à l'union de tous les Congolais pour que leur pays < ... ioue enlin le rôle qui lui est normalement dévo> mes colossales
il
> lu
:
celui d'un Effit-pilote.
>
La Radio de Léopoldville dénonce Tshombe et Kalonji. Parlant d'eux, le speaker déclare (63): < Un complot ourdi par certains étrangers vient >
d'être découvert. > Ces deux hommes politiques ont voulu démanteler
>
le Congo.
>
< Spécial
>>.
> Les champions du chaos congolais sont auiourd'hui > parmi nous et participent aux institutions de l'actuelle > législature. > Celui qui donna le coup d'envoi du match le plus > criminel, dont I'enjeu était l'anarchie de notre pays, e$t > I'ancien président du Katanga. > Le deuxième champion de l'anarchie congoluise lut > le roitelet de I'Etat autononrc du Sud-Kasaï" >
(62) .Le Soir. du 23/11/65. (63) " La Libre Belgique " du 24/11/65. Certes, un Kimba était assez mal placé pour dénoncer le crime que fut la sécession du Katanga.
L'éditorialiste qualifie Tshombe
:
< ... de traître, assassin, néo-colonialiste
et
>
accuse:
... Tshombe et Kalonii d'avoir < vendu le Congo à > des imPérialistes étrangers- > ministre Kamitatu lui-même, parlant à la radio, procla<,
Le
me (64) :
<Nous ne pouvons pas avoir M' Tshombe au pou> voir. C'est un colonialiste' Tshombe est un valet des > impérialistes et un ami de lan Smith, le Premier minis' > tre de Rhodésie. > Deux cents jeunes gens, aux cris de < Le Congo aux Congolais >, brûlent deux drapeaux belges devant I'ambassade de Belgique. Le président du < Front des Mouvements de Jeunesse du Congo demànde la levée de I'immunité parlementaire de Tshombe et sa comparution devant les tribunaux congolais. Kasavubu, fidèle à sa politique louvoyante. aura vainement essayé de conjurer le sort qui l'attend, en reniant ses engagements d'Accra et en nommant Mobutu au grade de lieutenant général (65). C'était évidemment le révoquer qu'il devait faire, après ses incartades répétées et I'insoumission au pouvoir civil affichée par lui. Il se fût au moins présenté dans une position juridique et politique meilleure dans l'épreuve de force qu'il ne pouvait plus éviter' Quoi qu'il en soit, le vocabulaire dont on use à la radio, les manifestations de rue, les drapeaux belges brûlés, le rapprochement avec les pays révolutionnaires d'Afrique, les velléités de secouer le joug des puissances occidentales, le risque de voir chasser les mercenaires et rentrer à Léo les leaders insurgés, c'en est trop pour les maîtres américains de Mobutu' On s'attend à I'arrestation de Tshombe (66) : < C'est alors que Ie général Mobutu décide d'agir' > Dans la nuit du 24 au 25 novembre, il destitue le prési' > dent Kasavubu et prend lui-même Ia présidence de > I'Etat. > >>
. Le Monde ' du 23/11/65' pur. ordonnance n'400 du chef de I'Etat, en date du 3/11/65' 31/12/65 et fOoj V"ir. fài révélations de " La Libre Belgique " des
(641
iesi
1"
48
et 2/1/66.
Tshombe, en se déclarant < absolument ravi >, dira lui-même plus tard (67) : < Le général Mobutu m'a sauvé la vie en prenant > le pouvoir. > Il est difficile de sonder les reins et les cæurs. Qui dira à quels vrais mobiles répondait le mouvement vers l'Afrique du président Kasavubu et du gouvernement Kimba ? S'il s'agissait, comme beaucoup en sont convaincus, de pw machiavélisme, il n'y aurait eu aucune raison pour les maîtres américains de faire donner le dernier atout: Mobutu. Bien au contraire, ils eussent eu toutes les raisons de se féliciter de voir leurs collaborateurs se dédouaner auprès de l'Afrique nationaliste et révolutionnaire, à la faveur d'une comédie dont ils eussent, dans ce cas, connu par avance le scénario. S'ils ont fait agir l'< homme fort > de 1960, et s'ils ont dû, une nouvelle fois, jeter le masque, c'est parce qu'ils ont eu des raisons de s'inquiéter, c'est parce qu'ils ont décelé, dans I'atmosphère du Léopoldville de novembre 1965, des courants qui les déroutaient et qu'ils n'étaient plus sûrs de contrôler. Là est, sans nul doute, la vraie raison du putsch militaire auquel la C.I.A. a donné le feu vert. C'est ce que pense le mercenaire de Mobutu qu'interviewera Pierre Fontaine (< Pourquoi Pas ? > du 22/9/66): < Mobutu a certainement bien Iail d éloigner Kasa> vubu.qui, tout indolent qu'il soil, virait au rouge vif, si > on ose cette image. >
LE COUP D'ETAT DU 25 NOVEMBRE 1965 ET L'ETABLISSEMENT DE LA DICTATURE Davister, quelques mois après le coup d'Etat qui a rendu à > la liberté d'empoisonner l'esprit des Congolais ou de les révolter selon leur tempérament va constater (68) : < Du coup, les éléments politiques, économiques et > humains changeaient nÉcessqirement du lout au tout, < Spécial
(67) Davister dans . Spécial des
du 4/12/65.
(68) " 5p6.;"1
.
du 3/2/66.
"
du 3/1U65, . La Libre Belgique
, et . Le Soir ,
> ramassera cinq ans de prison. Le tribunal siégera au > stade, devant la foule. Et les ministres seront étroite> ment tenus en main. La moindre incartadè, crac de> dans. >
de tshombiste, l'avenir du Congo devenait mobutiste' > C'est un lait et le réqlisme commande ten tenir comp'
>
>te'>
Au
lendemain
du coup d'Etat (69), il avait poussé un < ouf >
de soulagement
du général Mobutu' > < (Jn soulagement que les Belges devraient, souligne> t-il, normalement partager car Monsieur Kasavubu était > clevenu étrangement hostile à notre pays et ne se don> nait même plus la peine de cacher sa hargne et ses < ... au coup de balai
> sentiments Personnels. > L'oublie't-on? Des excités venaient de brûler publi> quement notre drapeau lorsque Ie général Mobutu prit > brutalement le Pouvoir- > < gouverner par Mobutu (70) annonce tout d'abord qu'il
va
ordonnances présidentielles, d'application jusqu'à annulation par le Parlement ,, c'est donc, en principe, laisser aux parlementaires le soin de contrôler sa gestion. Mais à J.K., il déclare (71) : < L'armée a décidé : plus de politiciens' Aucun' C'est > clair. Et si un homme politique s'avise de tenir un > meeting, on I'enverra devant un tribunal militaire' Il (6S) " 5p6";u1
-
du 9112/65.
biographe-hagiographe, Francis Monheim, touiours u.n peu amoureux ''-' Soi J"'ron-iioict", u-uô.ié, ia veille de sa prise de pouvoir, ce portrait de Mobutu (" Spécial. du 25111/65) : . Autodi'dacte, grand amateur de musique classique,- lecteur assidu auxquels il est abonné, grand sportif " Ue jou*aui et'dihebdomadaires parachutisme, etc.), admilateur de Tisot et surtout équitation, 6ooiUall, " 'ae gauite, aimant la bonns ch.ère et les bons mots, adorant " àu le"eiat . iuq,iin.. ses amis, tiès à I'aise dans n,imporre quel milieu, détendu, Mobutu est un personnage fascinant d.ont la " uitiurr, Joseph Désiré une certaine insouciance et dont I'intelligence , oravité n'exciut iamais de spontanéité. Mobutu est, dans le vrai sens du mot, " Ë.i
izOi
HUMANISTE.. - ll"",.npr"inte " un existe des portraits très semblables de dirigeants nazis et de chefs de la Gestapo, eux'aussi grands amateurs de musique classique entre àeux séances de tontures, *-Humanistes ' à leurs heures et très tendres avec leurs amis,," Pour se rendre compte du niveau où se situent les relations entre le oeintre et son modèle, iappelons que lorsque Francis Monheim lui télé'pf,o"", f" leudi matin aprèé'le coup d'Etat, pour le féliciter de sa réussite, I"""ph iit' au téléphonà le modeste et répondit à son fidèle : . J'ai fait " mon Petit Possible '. (71) . La Libre Belgique " du 13/12165'
50
Beaucoup de dictateurs ont agi de la sorte. Peu ont eu la tranquille impudence de s'en vanter. Avec Pierre Davister (72), Mobutu va surenchérir encore : < Le Premier ministre Mulamba conduit d'ailleurs > militairement son équipe. Petit doigt sur la couture du > panlalon. Les ministres doivent se présenter chaque > matin à t heures précises à sa résidence. > Iæ 7 mars 1966, Mobutu, à la rentrée du Parlement, annonce aux députés et sénateurs qu'il leur retire le pouvoir d'examen et de discussion des ordonnances-lois du Pouvoir exécutif (73). Pouvoir qu'il leur reconnaissait au lendemain du putsch. Le régime militaire est total désormais. Le 22 mars 1966, Mobutu s'attribue le pouvoir législatif, le Parlement ne sera plus consulté, il sera simplement < informé >. Son programme est pure démagogie, comme dans les fascismes classiques. Il annonce des grands travaux, une usine sidérurgique (sans doute la reprise d'un projet de Lumumba), la centrale hydroélectrique d'Inga. Mais contrairement à ses maîtres, n'en réalisera sans doute aucun. Près de deux ans après sa prise de pouvoir, il n'a rien fait dans ce domaine. Il prend des mesures contre le marché noir et la corruption. Gageons que, tôt ou tard, à l'instar du général Ky, à Saigon, il fera fusiller spectaculairement quelque commerçant malien ou sénégalais arrêté pour avoir accumulé trop de richesses dans un pays et à un moment où la bourgeoisie au pouvoir n'a jamais édifié aussi vite d'aussi énormes fortunes. Il se préoccupe, dit-il, du sort de I'ouvrier. Mais il prend une ordonnance suspendant le droit de grève, sur tout le territoire de la République (74). Il ordonne un prétendu < retour à la terre > des chômeurs, parce que la population de la cité est loin de le rassurer. Et, s'inspirant d'une des mesures les plus impopulaires prises jadis par l'auto(72) " $p6ç;"1
-
du 9/12/65. ' du 9/3/66. (74) - La Libre Belgique " du 16/2/66 (731 " Le Peuple
51
rité coloniale, il instaure la carte d'identité spéciale réservée à ceux qu'il veut expulser de la capitale sous le prétexte de les renvoyer dans leurs milieux ruraux.
toujours comme I'ancien régime colonial, il organise des < ratissages , à ttaners les communes et zones annexes de Léopoldville et fait ramener ( manu militari >, dans son village d'origine, toute personne sans travail (75). Bîravant le ridicule, mais manifestant aussi son insécurité, il interdit le port de la barbe dans la province du Haut-congo, parce qu'elle est: ' u ...1e symbole de I'Esprit Rebelle et I'indice d'une
Et
> méchanceté soumialiste' >
Mais dans le même temps qu'il réserve aux pauvres de son pays les coups de matraque et de chicotte de ses ratissages, il accorde' pour la première fois, à l'union Minière du Haut-Katanga (qui avait, bien str, jusque-là, d'autres moyens d'exporter ses bénéfices), les >(76). devises nécessaires à une < modeste rémunération de ses actions
Grâce à Mobutu, les actionnaires de I'union Minière vont, pour la première fois depuis .l'indépendance, toucher un dividende. c'est' proclame Davister : < ... I'a première écl'aircie dans la situation du capital > investi au Congo- >
Cen'estpassansraisonque,danslamatinéequisuivitlecoup
d'Etat, le titre de I'U.M. était passé de 796 à 830 francs ! certes, Mobutu a décidé de mettre fin à l'inwaisemblable régime des < provincettes > tribales que nous avons été le premier à dénoncer avant même qu'il fût réalisé. Encore le regroupement ordonné par lui est-il insuffisant. Il répond d'ailleurs à des critères identiques à ceux qui présidèrent à la réduction de la sécession katangaise' Divisé, Çmietté, ingouvernable, le Congo devait l'être pour ses maîtres américano-belgJs aussi longtemps qu'il était susceptible de recevoir une direction nationaliste-lumumbiste. L'optique change dès
lors qu'on installe à sa tête un militaire qui va
-
du moins
le
(75) Bulletin Hebdomadaire d'lnformation de I'Ambassade de la R'D.C. n' 49 du 16/1/66. tzlerce et le bulletin d'information de la Société Générale fzol "-SpÀciai "' d, '-'de'a"nque du 1l mars i966. Voir aussi "La Libre Belgique" du 13/5/66. gie.tôt,'nous allons le voir, l',U.M.H.K. allait connaître, pour des motils purement démagogiques, dos difficultés avec le dictateur'
pense-t-on diriger le pays d'une main d'autant plus ferme qu'il - entraves d'un contrôle parlementaire. Dès lors, l'unité échappera aux redevient bénéfique. Sur le plan de la politique étrangère, mis à part les alibis que Mobutu se donne dans l'affaire rhodésienne et les coups de gueule adressés de temps en temps < pour la galerie > à Ia Belgique, en
même temps d'ailleurs que des clins d'æil manifeste que
de connivence,
le
il
est
général engage de plus en plus son pays dans le camp de la contre-révolution et du néo-colonialisme. Les mercenaires blancs racistes et fascistes, dont Kasavubu lui-même avait fina-
lement reconnu qu'ils étaient la honte de l'Afrique et une insulte à la dignité africaine, non seulement il les conserve, mais bien plus, il en recrute de nouveaux, tels ces deux contingents âyant quitté Salisbury à destination de Johannesburg, en route pour le Congo, sous la direction du commandant John Peters (77). < Un oflicier supérieur du groupe a déclaré avant > son départ que les hommes se rendraient par avion de > Johannesburg au Congo alin de participer à une impor> tante ollensive contre les insurgés, olfensive qui doil > être lancée vers le 20 lévrier Ie long de la rive du lac > Tanganyika.
>
(Cette offensive, lancée contre les
< rebelles
> de Fizi Baraka,
échouera d'ailleurs lamentablement.)
Mobutu a obtenu du gouvernement belge qu'il accepte de doubler l'effectif des militaires prêtés à I'A.N.C. au titre de I'assistance technique. (Par la suite, fin 1966, le gouvernement belge, en butte aux avanies du dictateur, lui retirera progressivement son assistance militaire. Et Mobutu devra intensifier le recrutement de mercenaires.)
La presse la plus réactionnaire (78) et Monsieur Paul-Henri Spaak (79) sont, au lendemain du coup d'Etat, d'accord pour considérer qu'il faut accroître I'aide à Mobutu. J.K. écrit, dans le quotidien catholique: < L'assislance militaire et I'assistance civile devront être renlorcées sensiblement, ainsi que I'a demandé le > général. On mesure le risque qu'un tel engagement
>
(77) " La Libre Belgique " du 25/1/66. (78) " La Libre Belgique " du 16/12/65. (79) " 16 Libre Belgique " du 17/12/65. 53
â2
> > >
dans I'expérience Mobutu représente pour
mais
la
il n'y a plus le choix. Ce risque, iI
I'assurer, avec suflisamment
Belgique, laut bien
de décision pour forcer
) la réussite. > Et Monsieur Spaak déclare (80) : < Ce sont des amis à aider. Nous nous trouverons > en présence de demandes d'aide accrue et la Belgique > sera sans doute obligée de laire un effort supplémen> taire.
>
La Belgique octroie à Mobutu un nouveau crédit d'un milliard alors que le fameux < portefeuille > qu'elle a remis à Tshombe (et dont on serait curieux de savoir ce qui, finalement, en est tombé dans l'escarcelle du trésor congolais) a fondu sans avoir provoqué le moins du monde la relance économique spectaculaire qu'avaient annoncée les supporters belges de l'astucieux Moïse.
Les Etats-Unis, au terme de six accords signés à la veille de Noël 1965, accordent à Mobutu des prêts pour un montant total de 149.200.000 francs congolais, soit environ 50 millions de francs belges. (< Le Monde > du 24/12/65.) Fin décembre, ils s'engagent à envoyer, pendant l'année 1966, pour 19 millions de dollars soit près d'un milliard de francs bel-
de matériel (81). 1966, les Etats-Unis consentent un nouveau prêt de 1.542.750.000 francs congolais (82). Mosheje Luc, dans < La pénétration américaine au Congo >, avait, dès 1962, prédit:
ges
-En janvier
Comptanl qu'il est exclu (pour la Belgique) de > reprendre le contrôle du Congo, elle s'accommode de > I'idée de voir son ancienne colonie prise en main par > les Etats-Unis. Les Belges sont convaincus que les > nouveaux maîtres du Congo auront besoin deux en > qualité de techniciens et ils sont prêts à se contenter de <
(80) Monsieur Spaak était, tout le monde le sait, extrêmement soumis aux désirs de ses patrons américains ; Mobutu étant I'homme des Américains, Monsieur Spaak se devait de le soutenir inconditionnellement. Force est de considérer que son successeur montre moins de servilité à l'égard de Washington, et, partant, moins de complaisance pour Mobutu. (81) " Le Solr " du 2/266, (82) - 1-6 Libre Belgique " du 31/1/66, 54
> ce rôIe, > autre. >
à délaut de pouvoir en jouer encore
un
L'hebdomadaire de Davister (83) soulignait, à la veille de la prise du pouvoir par Mobutu, combien les Américains était devenus < sages >. <<
Ces Américains qui, de plus en plus, s'ils ne réduï
> sent ni leur aide financière, ni leur aide logistique, Iais> sent tès intelligemment I'initiative des actions à mener > aux conutisseurs, des connaisseurs qui ont noms Congo> lais, Belges, Rhodésiens. >
Et l'ambassadeur des Etats-Unis, Monsieur Ridgway B. Knight, lui-même dans l'ambiance détendue d'une fin de banquet, au Cercle Royal Africain, allait, tout en distribuant << I'eau bénite de cour > que l'on attendait de lui, définir avec une certaine impudeur le rôle désormais dévolu aux Belges dans les plans du département d'Etat (84) : << Nous ne cherchons pas à prendre la relève écono> mique dans un marché traditionnellement belge et qui > semble d'ailleurs le rester. Ce qui est vrai, c'est que > nous cherchons à encourager le rôle joué par la Belgi> que au Congo aussi bien pour I'assistance technique que > dans l'économie du pays. Pour de nombreuses raisons, > nous pensons que la Belgique doit prendre la tête du > mouvement afin d'aider les Congolais à restaurer l'ordre > dans leur pays. > Les Etats-Unis n'ont pas de cadres francophones. >
Nous ne poumions pas lournir les techniciens même s'il était indiqué que nous le las-
> nécessqires,
sions.
>
Les réactions belges et américaines à I'accession au pouvoir de Mobutu n'avaient rien pour surprendre. Mais que les pays africains, où Mobutu a toujours été considéré comme I'un des assassins de Patrice Lumumba, se soient empressés de le reconnaître, de le congratuler alors qu'ils avaient fait bien << des manières > avec les gouvernements précédents, voilà qui n'a pas fini de nous étonner. (83) " 5p6";"1 . du 30/9/65, sous la signature d'Omer Marchal. (84) .'Le Drapeau Rouge ' du 21/1/66. 55
Il est évident que cet
empressement
ne pouvait manquer
d'accroître encore la confusion au sein des peuples africains. Que le président Nkrumah ait été I'un des premiers à déliwer un brevet de légalité à Mobutu constitue, dans son chef, une erreur égale à celle qui, par complaisance pour des chefs d'Etat, agents de la contre-révolution, lui avait fait chasser du Ghana, quelques semaines plus tôt, comme < subversifs >, les meilleurs des fils de I'Afrique.
D'autres ont, heureusement, réagi avec santé
à la
< divine
surprise >. < L'Agence Algérienne d'Information >, par exemple, ne se trompait pas en écrivant : < L'impérialisme, pressentant à nouveau le danger, > vient donc d'utiliser une deuxième fois son < homme > fort >, Mobutu, pour éliminer le président de la Répu> blique, qui commençait à représenter un obstacle à ln > perpétuation de la mainmise étrangère sur l'économie >
du pays.
>
Et les < Izvestia > : < Le présiàent Kasavubu a été balancé comme une > vieille banane qui ne pourrait plus satisfaire les colo> nialistes belges ni les colonialistes américains. Il leur > laut une < personne forte > qu'ils puissent manier au >
doigt et à l'æil. Mobutu remplit parlaitement ces condi-
> tions (85).
o
Mobutu, <. ce chien courant des impérialistes > (agence < Chine Nouvelle >), a rallié, dès le début, les chefs syndicalistes qui avaient déjà, hélas ! une longue tradition de trahison de la classe ouvrière et du patriotisme congolais. Malgré l'institution de la ( carte d'identité spéciale > et les c ratissages > rappel des heures les plus sombres de l'ère coloniale - Générale du Travail du Congo (F.G.T.C.) inaula Fédération
-
(85)
ll semble, hélas, que depuis cette réaction lucide, les dirigeants soviétiques aient fait quelque chemin. Le message de Monsieur Kossyguine au
à I'occasion de la réunion de I'O,U.A. à Kinshasa, a dû être ressenti avec douleur parmi les milieux lumumbistes congolais. Après que les représentants soviétiques aient été ignominieusement chassés à deux reprises du Congo par le seul Mobutu, faut-il qu'ils ne soient pas dégoûtés pour lui faire aulourd'hui leur cour?... général Mobutu,
56
< chef d'Etat >, le génêral Joseph Mobutu (86). En présence de Monsieur Louis Major, secrétaire général de la F.G.T.B., et des délégués de la C.I.S.L., le nouveau président de la F.G.T.K., Monsieur Raphaël Bintou cet ancien collaborateur des deux sécessions de Tshombe et de Kalonji allait faire ovationner le dictateur militaire. Le vieux maître à penser de ce syndicalisme, Monsieur Alphonse Nguvulu, qui fut, on s'en souvient, un des voyageurs de commerce du régime de Tshombe, chargés d'expliquer aux chefs d'Etat africains que Tshombe était un démocrate progressiste, défenseur des intérêts des travailleurs, etc., habitué depuis 1960 à se traîner sur le ventre, s'est empressé de dédouaner le fûhrer congolais auprès des socialistes belges. Il écrivait, dès le 6/l/66, dans << Le Peuple >, ce texte affli-
gurait son congrès en présence du
geant
:
<,Le lait que des militaires prennent Ia direction du pays ne m'effraie nullement. > Dans les pays jeunes comme le Congo, les militai> res ne lorment pos une caste réactionnaire. > Monsieur Alphonse Nguvulu n'a pas tardé à recevoir sa récompense. Il a été nommê, pat son nouveau protecteur, < ... Haut-Commissaire à la Reconstruction natio> nale (87). > Même la seule organisation syndicale de gauche au Congo, la < Confédération Générale du Travail du Congo > (C.G.T.C.) allait apporter son soutien à Mobutu. Sa servilité à l'égard du dictateur ne devait .d'ailleurs rien lui rapporter puisque, le 19 novembre 1966, trois de ses dirigeants, Monsieur Jean Henry Malhongo, seciétaire général, Monsieur Philippe Sassa, secrétaire confédéral, et Monsieur Pierre Botuli, en >
même temps que de nombreux militants, étaient arrêtés et jetés dans les cachots de la prison de Ndolo. Le 8 décembre 1966, les activités de ce syndicat étaient interdites. Les mesures de discrimination à l'égard des seuls milieux syndicalistes progressistes qui pourtant appuyaient la politique - gèné les milieux socialistes et même de Mobutu 1'e1[ jamais
-
(86) " Le Peuple ' du 29/3/66,. Le Soir. des 13-14/3/66. (82; " 506.;t1 " du 24/3/66. ll aurait été révoqué en avril
1967.
communistes de Belgique qui, au mépris de tous les enseignements
de I'histoire, croient voh en Mobutu un combattant africain contre l'impérialisme et le néo-colonialisme.
UN ASSASSINAT POLITIQUE : LE ( COMPLOT DE LA PENTECOTE
>
orchestrées de la foule, qu'ils n'avaient pas fait d'un gouvernement civil à laquelle des officiers l'intention de mettre fin.
ils avaient pu s'expliquer, avaient affirmé autre chose que d'envisager la formation destiné à remplacer la dictature militaire supérieurs de I'armée avaient manifesté
Ces officiers supérieurs, après avoir inspiré < les conjurés >, les avaient ensuite dénoncés et livrés. Cette < provocation > ne semblait pas discutable puisqu'il était
Pour mieux asseoir sa dictature et le régime de terreur qu'elle impliquait, le général Mobutu fait arrêter, le 30 mai 1966, quatre personnalités qui seront immédiatement accusées d'avoir trempé dans le complot dit < de la Pentecôte >. Le matin même de leur arrestation, le haut-commissaire à I'Information du Congo, Monsieur Jean-Jacques Kande, avait annoncé, au nom du gouvernement, que: <, Messieurs Kimba, Anany, Bamba, Mahamba vont > maintenant comparaître devant un tribunal militaire qui > les condamnera à mort et ils seront pendus. > Cette annonce du châtiment qui attendait ces quatre personnalités avant même qu'une instruction ait été ouverte à leur charge, manifestait, dès l'origine, I'absence de toute loyauté dans les poursuites. Le lendemain de I'arrestation, le 31 mai, le général Mobutu ctée, par ordonnance présidentielle, un < Tribunal militaire d'exception > chargé de juger et de condamner, le jour même, les quatre
I'Afrique, I'horreur et I'indignation qui ont soulevé le reste
accusés.
monde.
Ceux-ci, après avoir été présentés au général Mobutu lui-même, pieds nus, en guenilles et portant la trace de sévices qu'ils avaient composé subis, avaient comparu devant ce prétendu < Tribunal > Nkude trois colonels: Pierre Ingila, Ferdinand Malila et Honoré où, en l'absence de lufa, subordonnés directs du chef de l'Etat toute instruction, de toute inculpation précise,- de tout réquisitoire et de toute défense, ils s'étaient vu infliger, après cinq minutes de < délibération >>, la peine capitale. Quarante-huit heures plus tard, ils étaient exécutés devant une foule évaluée à deux cents mille personnes. Il était pourtant constant que les prétendus < conjurés > n'avaient pas eu d'armes à leur disposition et que le complot dont on les avait accusés n'avait pas reçu le moindre commencement d'exécution et n'avait pas fait la moindre victime. Les accusés, pendant les quelques minutes où, sous les huées 58
officiellement reconnu que des officiers étaient intervenus dans les pourparlers et que les accusés avaient été arrêtés au cours d'une conférence avec le gouverneur militaire de la capitale. Mais leur demande d'être confrontés avec les officiers qui les avaient provoqués fut repoussée purement et simplement par le < Tribunal > qui avait mission de les condamner. Rarement, sinon jamais, on n'avait vu semblable précipitation, procès politique s'apparentant aussi clairement que celui-ci à un ni assassinat.
Plus grave peut-être que
le crime, est la
passer ses victimes pour ( des hommes vendus
capitalisme, travaillant pour
tentative de faire à I'impérialisme, au
le compte et dans I'intérêt de milieux
étrangers >.
C'est grâce, sans doute, à l'équivoque qu'il a créée de cette manière, que le général Mobutu a pu éviter, dans une partie de du
Messieurs Kimba, Anany, Bamba, Mahamba quelles qu'aient étaient de ces hommes qui avaient combattu avec courage le gouvernement de Moïse Tshombe. Monsieur Anany, par exemple, ancien ministre de la Défense nationale du gouvernement Adoula, et qui, à ce titre, avait pourtant lutté
pu être leurs erreurs passées
contre l'insurrection de Pierre Mulele au Kwilu, avait, par la suite, avec beaucoup de courage, refusé de participer aux élections organisées par Moïse Tshombe si celles-ci n'étaient pas précédées d'une réconciliation avec ceux que l'on appelait ( LES REBELLES > et du renvoi des mercenaires. Monsieur Bamba, dignitaire de cette église kimbanguiste, dont la doctrine est toute de non-violence, avait passé plus de dix ans dans un camp de concentration du régime colonial, en raison de ses opinions religieuses. Avec Monsieur Mahamba, il appartenait à ce groupe d'hommes
modérés qui avait encouragé le président Kasavubu dans l'évolution qu'il arrait amorcée vers une politique plus africaine, moins engagén en faveur des puissances occidentales.
C'était cette évolution que le coup d'Etat du général Mobutu avait brusquement interrompue. C'est parce que ces quatre hommes n'y avaient pas renoncé qu'on les a supprimés. On sait à présent la vérité sur ce prétendu < complot >. Dans les mois qui suivirent le coup d'Etat, de nombreux militaires haut placés, qui avaient apporté leur appui au général Mobutu, étaient mécontents de le voir établir une dictature. Certains de ces militaires avaient fait connaître à des hommes politiques, dont les quatre condamnés, leur intention de mettre fin au régime de dictature et de rétablir la légalité. Ils avaient demandé à Messieurs Anany et consorts s'il leur serait possible, dans cette éventualité, de constituer un gouvernement provisoire.
Le seul rôle de Messieurs Anany, Bamba, Mahamba, Kimba avait été d'établir une liste de personnalités capables de faire partie d'un tel gouvernement provisoire, au cas où la dictature s'effacerait. On comprend pourquoi il était impossible de faire aux prétendus < conjurés > un procès honnête et loyal. Quelques semaines plus tard, I'ancien ministre des Affaires étrangères, Monsieur Cléophas Kamitatu, allait à son tour être condamné par le même tribunal dans des conditions aussi scandaleuses, à cinq ans de prison. Il est, paraît-il, interné depuis lors dans l'île de Bula-Bemba, où Antoine Gizenga a vécu pendant deux ans et demi, sous le régime de Monsieur Adoula. Nul ne peut dfue aujourd'hui si Monsieur Kamitatu vit encore.
I'NE POLITIQUE DE MYSTIFICATION CONTINUE Ceux qui ont connu, en 1959, à Bruxelles, le journaliste stagiaire Mobutu, se souviennent de ce qu'il proclamait volontiers qu'il était le seul Congolais athée. Un an plus tard, lorsqu'il neutralisa et arrêta Patrice Lumumba,
il confiait à la presse que ( c'était Dieu qui l'avait inspiré >. Lui qui devait, plus tard, défenestrer le président Kasavubu et qui 60
cherche aujourd'hui à pendre Moise Tshombe,
il
a donné
au baptême à son fils, né en 196ô, au plus fort àe la sécession kataÇise, tes -Ëuravubu prénoms de Joseph-Moise, en I'honneur de ses purruin. et Tshombe. Cette sécession- du Katanga qu,il impute à Moïse Tshombe comme un crime, il en était si peu l,adversaire, à t,époque, qu,it s'est rendu lui-rnême à Elisabethville au lendemain de l,assassinat de Patrice Lumumba, pour conclure avec Moise Tshombe et Albert Kalonji' président de la République minière du Sud-Kasaï, également en sécession, un pacte militaire dirigé contre I,O.N.U. Détail plaisant: il est rentré de cË pèlerinage dans le même avion que Monsieur Rothsch'd, chef de la missioi ueÇ auprcs oe Moise Tshombe, en route, lui, pour New york où l aerîait àâtenore, dans la coulisse, I'indépendan"à du Kutunga et son droit à l,auto_ détermination. Auparavant, Ie octobre 1960, le colonel Mobutu rencontre _-16 Moise Tshombe à Erisabethvilre et lui ài, u ron admirarion pour ra
tenue des gendarmes katangais > (< Essor du Congo >
da 17/lO/6O) qu'en sa qualité de chef dà l'armée nationale, il avait pour'mission de combattre, mais à ce moment, Lumumba vit encore et l,on se demande comment s'en débarrasser.
La sécession katangaise est donc bien utile et Mobutu fait sa cour à Tshombe. A son retour à Léopoldville, le colonel Mobutu, qui a reçu quelques millions, déclare à la presse (< Essor du
octobre 1960):
Congï, a,,
fS
u ... Co'il avait I'appui entier, I,appui économique, moral et linancier du président Tsho'mbe. Ie putis mê_ b me vous dire que je ne considère pas Tshomb) comme > un séparatiste. > Et comme, à r'époque, r'o.N.u. faisait mine de lité et d'imposer la ribération ae rurnumba, le rétablir ra réga_ colonel Mobutu précise aux journalistes que: < ... Monsieur Tshombe était prêt à lassister en c(u > de différend avec I,O.N.II. > > Lorsqu'on lui demand,e s,il pouvait compter sur > une aide militaire, le colonel Mobutu ,,"rt àort é > ravi. > (< Essor du Congo > du Ig/10/60.) Mobutu a belle mine aujourdihui en feignant de considérer >
la
sécession
du Katanga comme un crime, alors qu'il en a étê,
à
l'époque, le complice. Depuis qu'il s'est emparé du pouvoir, à la fin de I'année 1965, à la faveur d'un coup d'Etat dont le caractère contre-révolutionnaire était manifeste (88), le général Mobutu a pu mener sa politique de mystification sur une bien plus grande échelle et avec un succès qui étonnera les futurs historiens de l'Afrique. Considéré jusqu'alors comme un des grands responsables de
et à juste titre, puisqu'il était le l'assassinat de Patrice Lumumba maître de ce Collège des Commissaires-généraux qui expédia Lumumba à Elisabethville, capitale de la sécession tshombiste, aux fins de
-
il a, depuis qu'il a pris le pouvoir, prol'éliminer physiquement clamé sa victime < héros national du Congo >>. Il vient, le 19 juin dernier, de donner solennellement aux trois premiers paquebots de la Compagnie Maritime Congolaise, les noms de Patrice Lumumba et de ses deux compagnons de lutte, assassinés en même temps que lui: Joseph Okito et Maurice Mpolo. Et comme pour donner à la farce une touche supplémentaire de cynisme, il a confié la charge du discours à prononcer à cette occasion à son ministre des Transports, Monsieur Victor Nendaka, I'ancien administrateur de la Sûreté, qui avait traqué les hommes politiques lumumbistes et envoyé onze d'entre eux à la boucherie de Bakwanga. capitale, à ce Alors qu'en 1962, les étudiants de Lagos le chasplus d'Afrique pays conservateurs les moment, d'un des >, < Mobutu aujourd'hui, assassin cris de aux saient de l'Université MM. Nyerere et Massemba-Debat, chefs des Etats les plus progressistes de I'Afrique centrale, opinent du bonnet quand le même homme fait, devant eux, l'éloge de Patrice Lumumba que, plus qu'aucun autre, il a contribué à faire disparaître. Moïse Tshombe ayant reçu au Caire I'accueil que I'on sait, le général Mobutu, qui était solidaire de la rancæur de son Premier ministre, avait organisé lui-même, au stade de Léopoldville, la gigantesque manifestation destinée à dénoncer les Arabes comme les ennemis permanents des Noirs et c'étaient ses soldats qui avaient joué le rôle des paisibles villageois attaqués par les odieux esclavagistes arabes et c'étaient ses mercenaires blancs qui avaient repré-
senté, dans ce grand spectacle, les courageux antiesclavagistes belges volant au secours des Congolais. Aujourd'hui qu'il veut dissiper les dernières réticences des Etats arabes, tels la R.A.U. et I'Algérie dont la mémoire est moins courte que celle des pays d'Afrique noire, le général Mobutu est prêt à offrir aux < frères arabes > la tête de son représentant à |O.N.U., qui a commis la maladresse de s'abstenir, dans le vote sur I'annexion de Jérusalem par IsraëI, habitué qu'il était à le pauvre - Etats-Unis. aligner ses positions sur celles du représentant des S'il est prêt à faire un marché avec les Arabes pour pouvoir s'offrir la tête de Moïse Tshombe: < Vous me livrez Tshombe > et < Moi je vote contre Israël >, pour tout le reste, il est résolument dans la ligne américaine. Il a rendu plus étroites encore les relations de son pays avec la prétendue < Chine > de Formose. Il est d'une extrême discrétion au sujet du Vietnam et, interrogé, lui chef d'Etat africain, au sujet du problème noir aux Etats-Unis, il répond : < Ceci ne nous concerne pas, c'est un problème inté> rieur américain., (u La Libre Belgique > du 5/l/67.) Il traîne en toutes occasions les grandes sociétés dans la boue et accuse leurs dirigeants d'être des < vautours >> mais il reçoit ces dirigeants eux-mêmes (89) avec la plus grande aménité sur un yacht de I'Office des Transports Congolais, le << Baron Liebbrecht > (débaptisé depuis) et, à l'occasion de I'anniversaire de l'indépendance, il décore même certains d'entre eux (notamment le directeur génêral de I'Union Minière, cible préférée de ses discours démagogiques) de I'ordre du Léopard. Il y a quelques mois, le gênéral Mobutu a déclaré la guerre à l'Union Minière du Haut-Katanga. Comme nous I'avions prévu, le morceau était trop dur à avaler, même avec l'aide des Américains. Ceux-ci n'étaient évidemment pas en mesure de lui fournir les deux qui se solimille agents francophones spécialistes de surcroît - (90). darisaient avec leur employeur Le général a dû capituler puisqu'il a laissé à la société, qu'il < congolisait ), non seulement le soin de vendre à l'étranger les (89) Les représentants notamment de I'Union Minière, de Kilo Moto, de la C.F.L., de Lever, de la Cotonco, d'lnterfina, de Pétrocongo, de Ia Colectric,
de la Société de l'Hévéa, de la
(88) Voir notre article du * Monde Diplomatique 62
"
du mois d'août
1966.
Compagnie du Kasaï, etc.
(90) On se souviendra que, sur 1.468 agents de I'U.M.H.K. interpellés, deux seulement avaient déclaré vouloir rester au service d'un nouvel exploitant. Tous les autres demandaient leur rapatriement.
la charge de planifier celle-ci (91). congolais et d'engager les agents non C'est pour lui permettre de sauver la face que l'Union Minière a accepté de substituer désormais à son sigle trop Haut-Katatg? du voyant l'appellation nouvelle de < Société Générale des Minerais >, ce qui a permis au général Mobutu de faire passer une capitulation pour une victoire sur le capitalisme et le néo-colonialisme (92).
Il
produits de I'exploitation mais encore
I
l
(91) Pour ceux qui croiraient encore à la " victoire " de Mobutu sur l'U'M.Fl.K" voici les textes : Le bulletin hebdomadaire de la Société Générale de Banque du 24/2/67 résume comme suit la convention signée le 17 février 1967 entre la Société Congolaise Gécomin et la Société Générale des Miherais' . Par convention, la Société Générale des minerais s'engage à fournir - à la Gécomin un ensemble de prestations. Celles-ci concernent, tout généraux requis pour le bon fonction" d'abord, l'étude des programmes
nement de I'outil et son développement, pour l'emploi du personnel, pour la gestion minière industrielle et commerciale de I'entre" ainsi que 'ensuite prise, des programmes retenus par le .con.seil d'ad'. minisration 'deI'exélution la Gécomin, le recrutement et la mise à la disposition africain nécessaire au bon " de la Gécomin du personnel technique non de l'entreprise, enfin la mise sur le marché de la pro' fonctionnement .. " duction de la Gécomin C'est bien plus que ce que Monsieur Walleff préconisait, à l'Assem' blée générale de |'U,M.H.K. du 26 mai 1966, à un moment où la guerre ne lui avait pas encore été déclarée par Mobutu : . Toute solution, disait'il, devrait sauvegarder à tout prix sa structure industriel par l'organisation d^e ses " qui se manifeste lant sur le planrecherches en Belgique et au Congo, importants services d'études el de ' que le plan commercial où son organisation, conjointement avec ' iellesur de ses filiales belges, lui permet de livrer des produits de plus ." en plus élaborés dans un grand nombre de pays "(92) Lorsqu'on entend un Mbeka, ambassadeur de la République Démocratique du Congo à Paris, déclarer: . Dàns la voie de la décolonisation économique de l'Afrique, la conplus importante depuis " golisation de l'U.M.H.K. est, à coup sûr, l'étape la . l'affaire de Suez ", on a le sentiment d'une énorme plaisanterie' Elle est plus énorme encore lorsqu'on sait que Mobutu n'entendait pas dépouiller I'Union Minière pour en faire bénéficier le peuple co.ngolais, mais pour lui substituer une autre banque belge ; la compagnie L-ambert et dei enreprises étrangères, notamment l'américaine Newmont Mining, D
la Penarroja et la Roan selection Trust. Les Egyptiens seront sensibles sans doute à la comparaison de la nationalisation du canal de Suez avec cette substitution, d'ailleurs avortée, au néo-capitalisme belge d'un néo-capitalisme international bien plus redoutable.
Dans
le
même temps qu'il f aisait son opération-propagande avec
l'U.M,H.K., Mobutu accordait au journaliste belge, Pierre Davister,60 0/o des actions de la télévision de Kinshasa et l'exclusivité en fait des actualités cinématographiques (Congovox) et photographiques (l'agence Star). 84
est aussi parvenu à faire croire à des africanistes distingués redressé la situation financière du Congo et assuré, pour la première fois, l'équilibre d'un budget alors que, depuis qu'il est au pouvoir, la course de son pays vers la faillite s'est encore accélérée (93). L'on sait, en effet, que les prix sont sept fois plus élevés qu'en 1960 et qu'il a fallu consacrer I'effondrement de la monnaie congolaise en la dévaluant de 3OO Vo. Pour marquer un peu plus la sujétion du Congo aux Etats{Jnis, ceux-ci ont constitué la seule couverture de la monnaie nouvelle par un soutien de 27 millions de dollars en provenance du Fonds Monétaire International et de 17 millions de dollars du Trésor
qu'il avait
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américain.
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L',ENLEVEMENT DE MOISE TSHOMBE (94)
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1
Le rappel de quelques-unes des mystifications qui constituent le style du chef actuel de I'Etat congolais paraît indispensable si I'on veut essayer de comprendre les événements récents. Dans ce cadre, la livraison de Moïse Tshombe et son exécution prennent une importance exceptionnelle. Supprimer l'homme qui représente, aux yeux du monde africain, I'image même de la trahison, c'est se dédouaner définitivement aux yeux des nationalistes noirs. C'est en même temps enterrer pour toujours I'affaire Lumumba. Tout procès loyal contre les assassins du grand leader congolais exigerait, au banc des accusés, aux côtés de Moise Tshombe, ex-chef de I'Etat sécessionniste du Katanga où il a trouvé la mort, et de Godefroid Munongo, son ministre de I'Intérieur, qui l'a sans doute tué, I'ex-président Kasavubu, le général Mobutu lui-même ainsi que Monsieur Nendaka, ancien chef de la police. (93) On peut lire à cet égard l'intéressant témoignage de Gloria Stewart dans le . New Statesman. du 14 juillet 1967. (94) ll n'est pas besoin sans doute de préciser que nous nous élevons contre le procédé même de I'enlèvement, quelle que soit sa victime et quels que soient les crimes qui lui sont reprochés. L'illicéité de l'acte devrait d'ailleurs le priver de tout effet juridique. Nous reproduisons ici en grande partie un a'rticle 'que nous avons publié dans * Le Monde Diplomatique . d'août 1967. 65
Dans un tel procès, I'on rechercherait sans doute quels sont les plus coupables de ceux qui ont envoyé Lumumba à une mort certaine ou de ceux qui I'ont tué ou laissé tuer à son arrivée au Katanga. L'on comprend pourquoi un tel procès n'est pas possible dans le Congo du général Mobutu (95). C'est pourquoi, bien que M. Tshombe soit désigné par tous
comme un assassin de Lumumba, il n'a pas été question de cette accusation dans le procès que le général Mobutu lui a fait faire et qui a abouti à sa condamnation à mort.
(95) Notre sentiment à ce sujet (et nous avons publié, les 25/1/62 et 21/J/64, deux études consacrées à ce crime dans deux numéros spéciaux de la revue ( Remarques Congolaises " à laquelle nous collaborions avant que, sous le nom de . Remarques Africaines., elle apporte son soutien au général Mobutu) est que la responsabilité directe de Moïse Tshombe dans I'assassinat de Patrice Lumumba n'est pas jusqu'ici établie. Certes, il n'a rien fait pour empêcher le meurtre. Dans sa propre thèse, il n'a apporté aucun secours à un homme maltraité à mort pendant son transport en avion ; il a couvert ses assassins. Mais il semble bien qu'il n'a pas demandé qu'on lui livre Lumumba. Nous avons recueilli des témoignages divers suivant lesquels il aurait trépigné de colère en apprenant que Léopoldville lui livrait ce " colis ,, non certes par affection pour le Premier ministre qu'il détestait, mais parce qu'il pressentait les ennuis que vaudraient sa présence et sa liquidation au Katanga, en sécession.
. M.ais _la. culpabilité des autorités de Léopoldville et au tout premier chef- de Mobutu, dans la disparition de Patrice Lumumba, est, elle, indiscutable. C'est Mobu.tu qui a donné ordre au Procureur Général (un Belge, à l'époque) de délivrer un mandat d'arêt contre le premier- ministie. C'est Mobutu qui l'a fait arrêter par la suite, qui l,a mis en résidence surveillée, puis qui I'a incarcéré au camp militaire de Thysville. Mobutu était le vrai chef du Collège des Commissaires généraux qu'il avait créé. Ce sont deux commissaires généraux qui ont été chercher Lumumba au camp de Thysville pour le conduire non à Elisabethville, mais à Bakwanga où Kalonji, son ennemi mortel, I'avait réclamé. C'est un commissaire qÉIÉ19!, Monsieur Jonas Mukamba, qui, apprenant- que _des troupes l,aérodrome de i3akwanga, {q l'9.f .U, occupaient a détourné I'avion vers.Elisabethville, de peur que son prisonnier échap-pe au. destin pour lequel les hommes de Léo l,avaient embarqué. C'est' iui qui .ordonna ou permit les mauvais traitements décrits par'le personnel de I'avion. ce Jonas Mukamba, le générar Mobutu scellant ainsi la soridarité - un qui I'unit .à lui dans I'opération en a fait de ses principaux gou_ verneurs de province. Peut-être qu'il a assisté à ses côtés aux cérémonies au cours desquelles Mobutu a eu I'affreuse impudeur de proclamer Lumumba héros national et de décréter que la villa où il est mort serait un centre de
pèlerinage national.
66
C'est pourquoi aussi le Procureur général du Congo, Monsieur Kabeya, proclame que la condamnation à mort prononcée par contumace contre Tshombe n'est susceptible ni d'opposition ni d'appel. La pendaison de Moiise Tshombe sans débat public, sans déballage gênant quant aux circonstances de la livraison de Lumumba aux autorités katangaises, ce serait un coup magistral, la mystification suprême. Moise Tshombe payant seul pour un crime dénoncé par tous mais pour lequel il n'a même pas été condamné (96), ce serait faire de ses exécuteurs qui ont au moins autant sinon plus de - le meurtre du 17 janvier 1961 les responsabilité que lui dans vengeurs du grand leader congolais et africain. Promener Tshombe dans les rues de Kinshasa et I'exécuter le jour anniversaire de l'indépendance du Congo eût apporté à I'affaire la dernière touche qui aurait ravi les connaisseurs. La méthode de I'envoi de < Colis précieux > est chère at géné-
ral Mobutu depuis fort longtemps. Il avait à peine, en septembre 1960, < neutralisé > Patrice Lumumba, qu'il proclamait que si Félix Moumié, qu'il soupçonnait
d'être I'un de ses conseillers, tombait entre ses mains, il I'expédierait comme un < colis > à son adversaire, le président Ahidjo. (Félix Moumié n'est pas tombé entre ses mains, mais il mourait, quelques mois plus tard, empoisonné à Genève.) Quand Patrice Lumumba fut, le 17 janvier 1961, expédié à Elisabethville, Moïse Tshombe en fut averti par un coup de téléphone de Léopoldville lui annonçant l'arrivée d'un < colis >. C'est le même vocable qui fut adopté par la radio de Kinshasa
lui a été fait par défaut devant les trois colonels qui ont envoyé au gibet messieurs Anany, Bamba, Mahamba, Kimba, Moise Tshombe était poursuivi pour avoir organisé la sécession katangaise (et ce n'est pas nous qui minimiserons ce crime après avoir publié un livre de 420 pages pour le dénoncer. Mais Mobutu et Nendaka, qui ont appuyé la sécession, tant qu'elle était dirigée contre Lumumba, sont bien mal placés pour faire ce procès), entretenu des mercenaires en Angola (ceux dont Mobutu s'est servi par la suite pour combattre les forces populaires), provoqué la révolte des gendarmes kaquestion de tangais à Kisangani. ll n'a pas été et pour cause
(96) Au cours du simulacre de procès qui
I'assassinat de Patrice Lumumba,
-
-
Pour donner une idée de ce procès, signalons que les accusés ont comparu sans défenseur et que le seul civil du lot, Emery ou Luther Katteng, ancien chef de cabinet au département des " Affaires sociales ",
ayant réclamé un avocat,
. On en cherche un dans la salle, puis on tente d'en contacter " en ville par téléphone. Mais il ne se présentera pas. r
un
67
nouvelle du < kidnapping > de Moïse Tshombe. l-e général Mobutu attend, depuis lors, le précieux < colis >. Certes, Moïse Tshombe n'avait pas renoncé à ses ambitions politiques. Et qu'il ait été disposé. à donner un coup de pouce au destin qu'il estimait être le sien n'est pas douteux. Sans doute n'y aurait-il rien d'invraisemblable à ce qu'il ait stipendié quelques partisans en vue de procéder à des sabotages et quelques mercenaires pour qu'ils soient prêts à le seconder, à toutes fins, Ie moment venu. Mais I'homme était trop réaliste, trop rusé pour songer à et les incoreprendre le pouvoir par la force. Il était convaincu - conviction hérences du régime du général le confirmaient dans cette tôt ou tard, le pouvoir lui tomberait entre les mains comme -un euo, fruit mûr (97). Intrigues et sabotages pouvaient hâter ce moment et justifiaient quelques mises de fonds, mais c'était tout. Et il est certain qu'au moment où I'avion qui le transportait a été dérouté vers Alger, Moïse Tshombe ne se rendait pas au Congo et n'accomplissait aucune tâche qui fût en rapport avec ges ambitions politiques. Commerçant virtuellement en faillite en 1958, Moise Tshombe se trouvait, à la fin de la sécession katangaise, à la tête d'une fortune considérable. Un ministre belge, qui avait quelque raison de connaître sa situation, évaluait son avoir, à ce moment, à six cent cinquante millions de francs belges, répartis entre des banques suisses, espagnoles et belges. Il n'est pas douteux que son passage à la tête du gouvernement du Congo lui a permis d'arrondir encore son magot. Ses loisirs forcés dans le domaine politique I'ont, tout naturellement, amené à chercher d'heureux placements. Et c'est manifestement dans le cadre de telles préoccupations qu'il a fait le voyage qui lui fut fatal. Appâté par le projet de création d'une chaîne d'hôtels (il était question de créer une société au capital de 45 millions de dollars dont il aurait été le président), il est tombé dans le piège qui lui a été tendu. Au profit de qui ? Du général Mobutu sans aucun doute.
à la
(97) Une première fois déjà, au moment du déclenchement de la " rébellion ", le Premier ministre Adoula et le général Mobutu l'avaient appelé à Léopoldville pour lui transmettre le pouvoir, 68
Mais par qui ? Il n'existe pas, à I'heure actuelle, de certitude à cet égard et bien des précisions ont êtê données puis démenties, qui n'avaient d'autre but, sans doute, que de semer la confusion. S'il est à peu près certain que c'est le Français Bodenan qui a, dans l'avion, mené l'affaire en jouant du revolver, il est à peu près aussi certain qu'il ne pouvait songer à maîtriser tout le monde sans une complicité au moins parmi ses compagnons de vol. Le Belge Hambursin est un co-auteur possible. Il y eut, entre lui et Moise Tshombe, au lendemain de la sécession katangaise, un conflit très aigu au cours duquel furent échangées des accusations extrêmement graves. Il s'est révélé, au couis des poursuites, que Monsieur Hambursin avait remis à Monsieur Pierre Davister des fonds importants (plu-
sieurs millions de francs belges) appartenant à Moïlse Tshombe. Monsieur Pierre Davister est, on le sait, ce journaliste belge qui, après avoir lancé I'hebdomadaire c Spécial ) au moyen de fonds fournis par Moise Tshombe, alors Premier ministre du Congo, et en avoir fait l'organe officieux du gouvernement Tshombe, a, aussitôt après le coup d'Etat du général Mobutu, proclamé, èxpressis verbis, que le Congo, de < tshombiste > était devenu < mobutiste > et modifié sans autre forme de procès, sa ligne politique en conséquence. < Spécial ), eui est, depuis lors, le moniteur du < mobutisme >, baigre, comme il fallait s'y attendre, dans une joie sans mélange depuis le kidnapping de Moise Tshombe, à la pensée du sort qui attend le précieux < colis > lorsqu'il parviendra au Congo. Nous savons, d'autre part, qu'au lendemain de la sécession, d'anciens mercenaires de Tshombe étaient acharnés à sa perte et prêts à tout pour I'abattre. Certains hommes, qui avaient exposé leur vie à son service, qui gardaient de leurs blessures des infirmités définitives, et qui voyaient dans la misère des veuves de mercenaires tués dans les combats, en voulaient à mort à Moïse Tshombe de ne point avoir tenu ses promesses et de les laisser sans secours alors qu'il menait, lui, une vie opulente au moyen des centaines de millions qu'il avait a planqués >. L'ex-avocat belge Sigal ne peut davantage être écarté. En dehors du fait qu'il a servi d'intermédiaire entre Moïse Tshombe et la société-appât, il nous revient qu'il a été, en 196I, I'avocat du général Mobutu.
Les gardes du corps espagnols ont pu être achetés; le fait
qu'ils aient été libérés les premiers plaiderait plutôt en faveur d'une telle hypothèse. Et nul ne peut dire avec certitude aujourd'hui que le personnel anglais de l'avion est au-dessus de tout soupçon. Quels que soient, parmi les compagnons de voyage de Moïse Tshombe, les exécutants du rapt, I'hypothèse la plus waisemblable actuellement est qu'il s'agit d'un coup monté par la C.I.A. On sait que le général Mobutu est I'homme fort de la C.I.A. au Congo depuis septembre 1960. Depuis qu'il a pris le pouvoir, à la fin de 1965, Ie représentant de la C.I.A. à Kinshasa a provoqué le rappel de I'ambassadeur des Etats-Unis parce que ce diplomate ne lui était pas assez favorable. Le quotidien démocrate-chrétien belge < La Cité > du 15 juillet
1967 rupportait que c'était Monsieur Devlin, patron des services qui avait mis sur pied toute l'opération (98). L'on savait que la C.I.A. exerçait une partie de ses activités en Europe, sous le couvert d'une société installée au Liechtenstein. C'est une société établie dans la Principauté qui s'est abouchée avec I'ex-avocat Sigal en vue de I'opération immobilière qui a servi d'appât ; c'est la même société qui a réservé l'avion du rapt. Elle a d'ailleurs été dissoute aussitôt après I'enlèvement, comme si celui-ci avait été son seul objet réel. Pour la C.I.A., si l'enlèvement devait conduire à la livraison de Moise Tshombe au général Mobutu et à son exécution, ce serait un succès fracassant puisqu'elle aurait permis à son < homme fort > de redorer son blason de nationaliste luttant contre I'impérialisme et le colonialisme et que suprême astuce elle aurait fait jouer - un rôle inconscient à I'intransigeante Algérie sans doute mais - de plus, conduit le président essentiel dans l'o1Ération et aurait, - à cautionner le régime du général Mobutu. Boumedienne secrets au Congo,
LA REVOLTE DES MERCENAIRES Nous avons vu (99) que s'il y avait encore des mercenaires au Congo, c'était par la volonté du général Mobutu lui-même. (98) Les parlementaires du Parti Social Chrétien belge, appartenant à la majorité gouvernementale d'un des pays les plus étroitement f idèles à l'alliance américaine, ont fait connaître qu'ils considéraient que la C,l.A. était responsable de la dégradation continue du Congo (* La Libre Bel-
gique. du 14 juillet
1967).
(99) Voir plus haut, pages 41 et suivantes, 70
C'est d'ailleurs pour emPêcher leur expulsion par le président Kasavubu, qui s'y était engagê au sommet d'Accra, que le général
Mobutu s'est emparé du potryo;t. A ce moment, conscient rnieux que personne de I'impuissance de son armée face aux forces populaires lumumbistes qui n'avaient pu être réduites que grâce âu)l mercenaires, il rendait hommage à ceux-ci et affirmait qu'ils avais.t étê engagés par lui-rnême et non par I'ancien Premier ministre Tshombe. par la suite, c'est grâce à ses mercenaires qu'il vint à hut de la mutinerie des gendarmes katangais. Jusqu'à une époqUe récente, il continua d'ailleurs à recruter des < volontaires > étaèngatr, notamment dans les locaux de I'ambassade du Congo à Bruxe1.r. Dès I'abord, il apparaît donc q.r" c'est à la faveuf d'un singulier paradoxe que le chef de I'ttat congolais a cru pouvoir qualifier d'< agression impérialiste , la Évolte de ses propres hommes de main (100). C'est pourquoi sans 6[o\b, sentant la faiblesse d'une telle position, les services de propagnde de Kinshasa imaginèrent I'existence d'un commando de deul cents parachutistes qui avait, dans une première version, été reqr16 pour délivrer Molle Tshombe et qui, dans une deuxième vergiqn, await éte largué sur l'aérodrome de Kisangani pour déclencher I'agression impérialiste. Comme on comprend la pry6"n"e du représentant de la France au Conseil de Sécurité, Monsisur Seydoux, qui, après avoir vu les délégués américain et soviétiqxe le pas au représentant "-boîte. congolais, a exprimé le souhail que celulci < complète les informations qu'il a données au Consgl par d'autres renseignefnents sur les faits et sur les événements Qui se sont déroulés sur place, afin que le Conseil puisse délibérer ave( le maximum de clarté >. Ce septicisme valut, le len46ultt, au micro de Radio-Kinshasa, Monsieur à Seydoux, une volée de bois vert et à la France de figurer dans la liste des Etats impériahlss sgesseurs (101). (100) Epinglons ici une autre rodonlqntade du dictateur Mobutu, Dans un grand discours prononcé au stade de Kinshasa devant 3O.OOO personnes, il avait proclamé virilement ; . En ce qui concerne lêq mercenaires de Lisbonns, je dis qu'ils
.
viennent
'.
Et le jour où ses propr€s mercenaires se mutinent, il ameute en pleurnichant le monde entier e1 imolore I'aide de l,O.N.U. (101) Rappelons en passant que pas un'e seule fois depuis l2 prise de pouvoir du général Mobutu, le Congo.
11'a
fait allusion à i'impériaiisme des Etats-
Unis en Afrique ou même au Vietnam.
Et pourtant maintenant, tout le monde reconnaît, même Pierre Davister (102), qu'il n'y a pas eu de largage de parachutistes expédiés par des agresseurs étrangers. Le général Mobutu était pourtant lui-même à l'origine de la mystification puisqu'il avait déclaré, dans son allocution radiodiffusée du 15 juillet: < Deux avions non identifiés ont débarqué des commandos étrangers qui occupent I'aéroport >. Que s'était-il donc passé dans la réalité ? Depuis quelque temps, les mercenaires ne recevaient plus leur solde. D'autre part, la réforme monétaire allait, de toute manière, rendre leur situation beaucoup moins rémunératrice. Comme la plus grosse partie de leur solde leur était payée en monnaie étrangère, ils pouvaient, jusqu'ici, en pratiquant des échanges au marché parallèle, la tripler, voire la quadrupler en fait. La création du < zaïre > allait, au moins pendant quelque temps, rendre ce trafic impossible. C'est dans le mécontentement causé par cette mesure et le retard dans le paiement des soldes qu'il faut chercher la cause de la mutinerie (103). Il tombe sous le sens que si celle-ci s'inscrivait dans un processus
tendant à la reprise du pouvoir par Moïse Tshombe, elle ne se serait pas déclenchée au moment où celui-ci était privé de sa liberté et où aucun leader noir n'aurait été aux côtés des mercenaires blancs pour exploiter politiquement, le cas échéant, sur place, leurs (102)
. Spécial " sérieux '.
du 13 juillet
1967
: . Le largage résiste
à un examen I'optique a évolué. mal
(103) Depuis lors, cependant, pour certains mercenaires, Et leun attitude ne peut plus s'expliquer par la seule considération d'un intérêt pécuniaire. ll est manifeste que chez le colonel Schramme, par exemple, le ressentiment contre le général Mobutu et la volonté d'abattre son régime I'emportent actuellement sur toutes autres considérations. Pour ceux qui se souviennent du fait que Mobutu s'est servi des mercenaires pour écraser les forces populaires, il est difficile de pousser des cris d'indignation, au moment où ces mêmes mercenaires se retournent contre un pouvoir qui n'existe que par eux. Et les gens de gauche sont une fois de plus les dupes d'une mystification . mobutiste ", lorsqu'ils rattachent à la lutte de I'impérialisme contre I'indépendance africaine ce qui n'est qu'un règlement de compte entre un dictateur sanglant au service de l'impérialisme et les hommes de main qu'il a utilisés jusqu'ici dans son action contre-révolutionnaire.
le régime du général Mobutu pour le plus mauvais et le plus inhumain qu'ait connu le Congo, il est diff icile de s'indigner de tout ce qui peut contribuer à y mettre un terme. Pour ceux qui tiennent
72
succès militaires. (L'intervention
qu'après
du colonel Monga ne s'est produite
la prise de Bukavu.)
Il est aussi certain que, dans ce cas, c'est au Katanga, où elle êtait assurée de rencontrer des populations favorables à Moïse Tshombe, que la révolte aurait pris naissance. Or, il ne s'est rien
passé dans cette région.
Il est exclu également que les mercenaires se soient mouvement pour venir en aide à Tshombe.
mis
en
Leur mutinerie devait, au contraire, en lui permettant de lier l'arrestation de son adversaire politique à I'action des mercenaires, aider providentiellement le général Mobutu dans ses démarches auprès du gouvernement algérien. Ce n'est pas le fait que l'un ou I'autre mercenaire aurait déclaré à des journalistes, tombés fortuitement entre les mains des mutins, qu'ils serviraient d'otages pour la libération de Moïse Tshombe, qui peut établir la réalité d'un lien dont tout démontre l'inexistence. En effet, aucune tentative de négociation ne fut même ébauchée dans ce sens et les mercenaires ne gardèrent leurs otages que juste le temps d'assurer leur propre sécurité. La plupart de ces ( otages > se félicitent d'ailleurs d'avoir été protégés par eux contre la folie meurtrière de I'A.N.C. de Mobutu. Dans tous les cas, les mercenaires décrochèrent sans avoir été battus par I'armée du général Mobutu et tous les témoins s'accordent
pour dire qu'il y eut un hiatus entre leur départ et l'arrivée des soldats qui, comme à leur habitude, compensèrent par de faciles
représailles leurs insuccès militaires. Le grand battage fait par Kinshasa autour de cette prétendue agression impérialiste n'a pas eu malheureusement que les effets
qu'on en attendait: I'influence sur la décision d'Alger et I'octroi d'une aide militaire américaine. Il s'est traduit par une violente campagne de haine contre les Blancs, a entraîné quelques massacres, un nouvel exode et des démissions massives, même dans le domaine privé. Il coûtera au général Mobutu une révision drastique de I'aide apportée par la Belgique à son pays ainsi que le départ sans retour de tous les militaires belges de l'Assistance technique, furieux d'avoir été confondus avec les mercenaires.
D'ores et déjà, le général Mobutu, privé de ces militaires en même temps que des mercenaires, doit songer à se trouver des forces de remplacement.
En dehors d'une aide américaine sur laquelle il peut évidemment compter, il va se retourner vers l'Afrique. Mais quelle Afrique ? L'Ethiopie, qui lui a promis des avions de chasse. læ Ghana (qui n'est plus, aux yeux du général Mobutu, le mauvais Ghana de Nkrumah), qui lui enverra des pilotes. Gageons, en tout cas, que même si I'Algérie devait lui expédier le < colis précieux > qu'il attend, en trépignant d'une joyeuse impatience, il ne ferait pas appel à des militaires algériens pour s'opposer, le cas échéant, à une teprise éventuelle de la rébellion lumumbiste. Il resterait compter à cette .fin sur ses maîtres américains, des Cubains anticastristes, et sans doute de nouveaux mercenaires.
Il fallait, pensons-nour, nor, ,rnr", U cette démystification d'un qui, s'il se maintient au pouvoir, fera basculer l'Afrique entière dans la contre-révolution, tout en la berçant de slogans
personnage
démagogiques.
Certains, effrayés, nous disent : < Mais après Mobutu, quoi ? Par qui le remplacer ? >. Ce n'est pas à nous à répondre à ces questions. Mais nous pensons qu'il n'est pas, porrr son pays et pour I'Afrique, de solution pire que la solution Mobutu et qu'il y a, au Congo même et en exil, assez d'hommes honnêtes, compétents et conscients qui, après la dure leçon de ces sept années perdues, pourraient s'unir, en vue de constituer un gouvernement provisoire qui n'aurait d'autre mission que de rétablir la démocratie et d'organiser des élections générales libres et contrôlées internationalement. Si le peuple congolais demeure frustré, comme il l'est, de son indépendance et de sa révolution,
il reprendra
les armes tôt ou tard.
Avril
1966.
Septembre 1967.
74
TABLE DES MATIERES POSITIONS INITIALES DE LA CONTRE-REVOLUTION Le Katanga de Tshombe, position avancée de la contrerévolution
9 10
Le Congo est devenu un grand Katanga
1l
Les vues lucides de Lumumba et Gizenga: <
Pas d'indépendance réelle sans indépendance écono-
mlque
La
>
1.3
contre-révolution n'est plus
sur la
défensive,
elle
re-
conquiert
1,6
Les alibis des contre-révolutionnaires
La Le
18
Rhodésie
1,9
Ghana
L'impérialisme n'est pas
20
un < Tigre de papier >. Comment
le combattre ? Nécessité d'un pacte militaire entre les derniers Etats révolutionnaires UN PROCESSUS TYPIQUE DE CONTRE-REVOLUTION:
L'EXEMPLE CONGOLAIS Qui est Mobutu ? Les coups de frein de Mobutu Le coup d'Etat du 25 novembre 1965 et l'établissement la dictature Un assassinat politique : le < complot de la Pentecôte > Une politique de mystification continue L'enlèvement de Moïse Tshombe La révolte des mercenaires
24 25
3I 39
4l de
49 58 60 65 70
E
67 Cet ouvrage a été achevé d'imprimer en novembre 6 Bruxelles pour M. Jules Chomé , 34, rue Capouillet,
DÉPOT
.
LA COI{TBE-REVOLUTION AFFICAINE
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No 1 to6
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