A RT FA S HION CULTUR E RENC ON TR E S
ANA GIRARDOT MF PEPE AT T R A P E - C OE UR
PIERRE NINEY EST YSL ART
JR - VHILS - L’ATLAS
N°5 INITIAL (ES)
INITIAL(ES) BY MARIE JUNCKER-COTTEN
Savourons ensemble le doux paradoxe du mot “initiales“… Des lettres précieuses, plus innées qu’une signature, qui nous appartiennent depuis la naissance sans pourtant n’appartenir qu’à nous ; un sigle universel qui puise une force certaine dans sa discrétion ; deux ou trois petites lettres qui peuvent devenir grandes. “Initial“… Cela reflète aussi la magie d’un début, l’origine d’un tempérament, d’une cause, d’un concept, d’une idéologie, d’une histoire. Car rien n’est, rien ne naît, rien ne perdure sans avoir été initialement découvert, créé, imaginé, construit. Mes pensées vont alors à Nelson Mandela, un être déjà grand et devenu extraordinaire. Nous lui dédions ce numéro. Let us savour together the sweet paradox of the word “initials”... Precious letters, more innate than a signature, which belong to us since birth yet do not belong only to us; a universal logo which finds sure strength in its discretion; two or three little letters which can become great. “Initial”... The word reflects too the magic of a beginning, the origin of a temperament, of a cause, of a concept, of an ideology and a story. Because nothing is, nothing is born, nothing continues without having been initially discovered, created, imagined, and constructed. My thoughts turn to Nelson Mandela, a being already great, become extraordinary. We dedicate this issue to him.
Initially yours, M.J.
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ZEBULE est une publication Trimestrielle édité par la société Le Pub des Créateurs - N°5 de Février, Mars, Avril 2014
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SOMMAIRE COVER ART
RENCONTRES
MODE
BEAUTÉ ATTRAPE-CŒUR VOYAGE
Pierre Niney © Thibault Grabherr Une goutte d’Art sur la ville Les Amériques Latines à la Fondation Cartier 1+1 : une galerie et un éditeur
008
Ana Girardot : une malle à malice Dojo Electric Kettle, humain visible MF Pepe habille par les bijoux
032
Signature © Stéphanie Volpato Yin & Yang © Bruno Fournier Wild Duchess © Julien Lefort
054
Precious Letters © Robert Jaso
084
Pierre Niney est YSL
101
Au-delà du Grand-Vent © Hamid Sardar-Hafkami
117
Electric, 2013 © L’Atlas
UNE
GOUTTE
D’ART SUR LA VILLE
Le Street Art, confluent de l’Art contemporain, passe de l’extérieur à l’intérieur, librement, dans les galeries du monde entier, nous rapprochant de l’épicentre de la ville. L’automne envole sur mon chemin ses origamis jaunes. Une chorégraphie chancelante de vagues et de tourbillons sous l’œil cosmopolite de passants aux bras chargés de paquets chamarrés qui pourraient presque faire oublier l’espace cher à ma vue, des murs parfois gris, de mon berceau chéri, Paris. Paris, qui ne livre qu’à ceux qui savent la désirer, au détour d’une rue, à l’angle d’un café ou sur un toit, son charme et sa beauté. Elle exalte, comme elle seule le permet, la créativité de ceux qui la découvrent, de ceux qu’elle a séduits, qui viennent, qui lui reviennent. La tatouant ici, collant leurs désirs éphémères là, la marquant encore autre part, espérant son regard, la voyant toujours différemment.
09
Je replonge dans les "Seine" de mon passé, revoyant les émules de
œuvres, traçant lui même les frontières de son atlas interne à grands
Shepard Fairey, qui lui ont rendu Obey Giant, déferlant sur les avenues,
coups de GPS. Il essaye de créer le lien universel entre calligraphie et
plaqués sur nos scooters, ouvrant nos cœurs à ce géant à l'improbable
transfert de plaques d'égout. Et comme l'Art est participatif, devant
visage, pochoir et parfois poché, à l'air facilement peint sur un côté
Beaubourg et ailleurs, il implique les passants et les enfants.
d'immeuble, inaccessible. Notre culture télévisuelle et internet, assoiffés d'exister, nous poussait à taguer, à graffer les wagons et les murs, faisant
JR, animé de la même volonté ludique, fait entrer la jeunesse du Brésil, et
passer nos messages et prenant en mains nos futurs, faisant rimer Hip-
pas uniquement dans la pause de ses créations. Lui qui par ses portraits
Hop, actualité et poésie. Des humanistes alors incompris et révoltés
rend la ville à ses habitants, qui ne sont dès lors plus des figurants mais
s'exprimaient. Les cœurs secs voulaient faire taire "les vandales" sans savoir
des acteurs à part entière. Il éveille par ce biais la conscience collective.
qu'ils chassaient alors L’Atlas. Plus qu'un soutien au monde, une boussole
Comment ne pas se rappeler aussi les inoubliables portraits de chaque
pointée vers d'autres humains aux vies lourdes s’orientant sur un trottoir.
côté du mur d'israéliens et de palestiniens. Puis Women are Heroes, qui ne révèle pas uniquement la place fragile et précaire de la femme dans
Des lendemains ouvraient grands les bras à L’Atlas comme à son confrère
les conflits mais aussi leur force, leur beauté, la détermination dans leurs
JR, s’épanouissant lui aussi dans cette trame citadine. L'un à même le
yeux. Ces images, il les balade dans les musées autour de "ce monde
bitume, l'autre sur les toits. Paris les regarde se compléter et s'exprimer
qui tourne dans le mauvais sens". La consécration vient avec Inside out,
par delà sa ceinture, là où la tension et l'injustice d'autres cités ont besoin
projet mondial aux multiples participants. Il n'oublie pas néanmoins
d'eux. L’Atlas comble sa nécessité en un lieu prédestiné “l'atlas“, le Caire,
Paris où, durant le mois de novembre, il plaque dans le bassin, sur les
revient, s'assoie dans un atelier pour ne cesser d'en ressortir, poussé sans
colonnes, contre les murs, les escaliers du Palais de Tokyo, ses portraits
doute par les battements de la ville. Reprenant l'appareil photo (qu'il
saisissants de bien-être. Ainsi offre-t-il l'Art à ceux qui ne fréquentent
maîtrise visiblement depuis longtemps), il élabore, à travers le globe, ses
pas les musées.
The Wrinkles of the City in Shanghai, 2010 © JR
Je ne peux que vous conseiller de regarder attentivement Wrinkles of the Havane de JR. Magnifique femme pleine d'espoir, le menton levé, ses rides et yeux plissés, épanouie et subtile, elle me renvoie immanquablement à VHILS qui marque La
Nuit Blanche par le portrait doux et romantique que l'on peut voir rue Morand dans le XIème arrondissement. VHILS participe à l’exposition de la tour du XIIIème rassemblant quatre-vingt participants de tout horizon. Cet iconoclaste qui a révélé son don unique sur les murs portugais post révolution des Œillets, travaille au marteau piqueur, à l'explosif et à l'acide, donnant de cette manière une première vie artistique aux murs délabrés. Bien qu'il soit le plus jeune des artistes cités, il n'a rien à envier à leur volonté et à leur détermination. "Les murs de la ville nous modèlent, nous
modelons ces murs". Transperçant les couches successives de messages politiques et publicitaires, il dévoile des visages graphiques, des identités recluses, que lui seul a su voir et exposer au monde. Sculptant aussi le polystyrène à l'acide, ils offrent des volumes tridimensionnels, qui de face offrent un portrait, et de côté une ville. Expression magnifique qui ne finit pas de nous surprendre. À vous maintenant de retrouver l'ATLAS, JR et VHILS sur les murs de Paris ! Autrement, rendez-vous au 78 rue Amelot, Galerie Magda Danysz où vous pourrez écarquiller grand les yeux sur d'autres artistes contemporains.
The Wrinkles of the City in Shanghai, Li Xuanhua, 2010 © JR
“Les murs de la ville nous modèlent, nous modelons ces murs.”
Scratching the Surface Project, 2009 © VHILS, courtesy Ian Cox No Watermark
Street Art streams from the outside to the inside, freely, through the entire world’s galleries, bringing us closer to the city’s epicentre and flowing side by side with Contemporary Art. Autumn sends its yellow origami along my path. A shaky choreography of waves and whirlwinds flies before the cosmopolitan eyes of passers-by, their arms full of bright packages which could almost make me forget this view so dear to me, of walls sometimes grey, of my beloved cradle, Paris. Paris, giving only to those who know how to desire its charm and its beauty, at the turning of a street, at the corner of a café, or on a roof, perhaps. The city inspires, as only it knows how, the creativity of those who discover it, of those it has seduced, of those who visit and revisit. Tattooing the city here, printing their sudden desires there, imprinting themselves in yet another spot, praying for the city’s gaze and viewing it always differently.
I dive into scenes of my past, revisiting Shepard Fairey’s emulators, those who gave Obey Giant back to him, whirling down avenues, clamped to our scooters, opening our hearts to this improbable giant’s face, postered, sometimes stencilled, an easily painted expression looking down from an apartment-building, inaccessible. Our media-oriented culture, thirsty for life, pushed us to graffiti, to tag wagons and walls, passing our messages and grabbing our future, rhyming news, hip-hop and poetry. Misunderstood and protesting humanists made their voices heard. Hard hearts wanted to quiet “the vandals,” unaware that they were hunting L’Atlas. More than a support for the world: a compass pointing to other humans with hard lives, directing on the pavement. Tomorrows opened their arms wide to L’Atlas, embracing him like his fellow artist JR, blossoming too in this urban space. One embracing the asphalt, the other flying on the roofs. Paris watches them dance and shout and carry their wisdom beyond its city limits, there where it is needed, where tension and injustice prevail. L’Atlas fulfils his need in a predestined place, “the atlas,” Cairo; comes back, sits down in a studio only to go out again incessantly, pulled by the city’s heartbeats. Reclaiming the camera – which he clearly mastered long ago – he develops his work throughout a world shaped by his own internal atlas. He attempts to create the universal link between calligraphy and sewer covers. Art being Participation, you can find L’Atlas in front of Beaubourg working with children and passers-by. JR, spurred by the same playful wish, works to introduce Brazilian youth to our world, and not only as an intermission in his creations. He turns extras into actors, allowing the citizens to reclaim their city through his portraits, awakening their collective conscience. How not to recall his unforgettable portraits of Israelis and Palestinians on either side of a wall? And Women Are Heroes, which reveals not only women’s fragile and precarious place in this conflict, but also their strength, their beauty, the determination which shines in their eyes. He carries these images from museum to museum, “for this world which turns the wrong way round.” JR’s consecration comes to us via Inside Out, a world-wide project featuring numerous participants. He does not forget Paris, however, where in November he covered the empty fountain basin, columns, walls and staircases of the Palais de Tokyo with his striking portraits of well-being. Thus does he offer Art to those who do not visit museums. I highly recommend looking closely at JR’s Wrinkles of the Havana. A magnificent woman full of hope, chin raised, wrinkles and crinkled eyes, radiant and subtle, she makes me think immediately of VHILS, who marked the all-night Paris art festival Nuit Blanche with the sweet and romantic portrait which can be seen on Morand Street, in the 11th arrondissement. VHILS took part in the exposition Tour Paris 13, in the 13th arrondissement, along with over eighty participants from around the world.
This iconoclast, who revealed his unique gift on post-Carnation Revolution Portuguese walls, works with drills, explosives and acid to bring artistic life for the first time to the city’s dilapidated walls. Although he may be the youngest of all the aforementioned artists, he rivals them in passion and determination. “The walls of the city create us, and we
create these walls.” Piercing through layer after layer of political messages and advertisements, he unveils graphic faces, cloistered identities that he alone knew how to see and show the world. Adding acid to polystyrene, he gives us three-dimensional sculptures which give us a portrait from one angle and a city from another. A magnificent voice that does nothing but amaze. Now it’s up to you to go find l’ATLAS, JR and VHILS on the walls of Paris! Otherwise, rendezvous at the Magda Danysz Gallery, 78 rue Amelot, to admire the work of other contemporary artists.
“The walls of the city create us, and we create these walls.”
Fort-de-France, 2013 © L’Atlas
Beaubourg, 2008, © L’Atlas
Monade, 2012 © L’Atlas
The Wrinkles of the City in Shanghai, Shi Li, 2010 © JR
Inside Out Haiti, 2012 © JR
Inside Out in Time Square, 2013 © JR
Everything is Ephemeral 01, 2013 © VHILS, courtesy Jérôme Coton
LES Managua, 1979 Š Marcelo Montecino
PHOTOS COURTESY OF THE FONDATION CARTIER TEXT BY LAÉTICIA MESSÉGUÉ
LATINES À LA FONDATION CARTIER
Les Amériques Latines, pays aux identités multiples, entre passé et futur, deviennent le motif d’une exposition. Les photographes, par leurs mots, leurs photos, leurs ratures, leurs instantanés et leurs écritures imposent leur vision de la modernité et nous interpellent à la Fondation Cartier avec America Latina, 1960-2013. Par leurs yeux et les témoignages de ceux qu’ils photographient, ce continent dense et intense devient le réceptacle des ratés politiques et historiques de l’Europe du XXe siècle qu’ils interprètent, modifient, ingèrent et transforment à l’excès. C’est un vivier d’histoires humaines hors champs et hors limite qui se crée sans cesse à travers ces œuvres. Le trait devient une écriture et la ligne un territoire qui se muent en points
impossibilité à en réchapper. Ce marquage renvoie à l’humiliation née
de départ d’une histoire passée et omniprésente. Celle-ci se construit
de la réduction et de la négation de l’identité culturelle. Pour Leticia
dans l’installation numérique de Jorge Macchi qui identifie quarante-six
Parente, la création artistique passe par le vécu de la souffrance mais
points d’intersection symbolisant les souffrances des populations
aussi, par celui de l’humiliation.
hétérogènes vivant en marge de la société. Les questions posées aux
L’on rencontre dans ces images des mondes en quête d’identité. Position
pays de l’”America Latina” quant aux causes des souffrances sociales
fœtale, tête en bas, la photo d’Elias Adasme qui symbolise l’attente et
et politiques deviennent inspirations et objets de la création artistique.
l’inconscient d’une nation, d’un territoire, se regarde comme un négatif
Une autre douleur apparaît, celle liée à l’appartenance à un territoire, à
photographique. L’analogie entre la carte du Chili et le corps installé
une culture comme Leticia Parente cherche à l’illustrer avec sa performance
tout en longueur reprenant le trait sinueux des côtes devient la
Made in Brazil où elle pose le mot à même la peau. Celui-ci est cousu
projection d’un Etat qui attend d’être réveillé. Dans d’autres œuvres
sur l’homme pour revendiquer une douleur liée à l’enfermement dans
encore, l’écriture devient une lutte, une façon de se différencier, une
l’Histoire d’un territoire et d’une culture, reflétant la souffrance d’une
inspiration et une expiration, une peinture créative de son propre devenir.
025
Les artistes pratiquant le pixação donnent à voir une écriture épurée
de cultures ancestrales et un mécanisme permettant une réappropriation
symbolisant le nomadisme au sein de leur culture et de leur propre
des utopies. Le vide des personnages de Photo Zombie de Fredi Casco
langage ; ils se réinventent dans la modernité contestataire. L’inspiration
est une nouvelle manière de retranscrire cet état de mémoire. Pour l’artiste,
vient à eux avec le sentiment d’avoir perdu la justice sociale face aux
il s’agit, par son travail d’effacer le passé politique et collaborationniste
inégalités socio-économiques.
des régimes autoritaires. Un autre créateur, Oscar Munoz, tente de laver
Le texte devient matière. photographique, il se présente comme un slo-
les événements politiques en utilisant sel et eau. De cette manière, les
gan contestataire et publicitaire. Et, c’est dans cette forme que le pho-
cubes lavent et étanchent la soif de vérité des populations. L’œuvre Lacro-
tojournaliste Marcelo Montecino puise son inspiration. La victoire des
marios semble incarner l’acceptation d’une nouvelle identité née des
sandinistes en 1979, appelant à la transformation politique et écono-
larmes de ceux qui ont souffert durant les combats révolutionnaires. Le de-
mique des masses populaires, se mue en motif artistique. Au sein de sa
voir de mémoire institué par Marcelo Brodsky dans la série Buena memo-
série Managa, où l’enfance s’incarne dans une fillette, l’artiste montre
ria from my teenager Photo Album est à mettre en parallèle. Là, il retrace
la dureté des inégalités et l’irresponsabilité des familles. Cette approche
le destin de ses camarades de classe durant les événements politiques qui
photographique cherchant à analyser les inégalités socio-économiques
ont eu lieu en Argentine. L’artiste marque d’un rond ou d’une croix les vi-
et les contradictions populaires, est à rapprocher du travail d’Adriana
sages figés sur les photographies de ces êtres selon qu’ils ont survécu ou
Lestido. Cette dernière, dans sa série Mujeres Presas montre des
ont disparu. Il recrée la mémoire de ceux qui ont été effacés, se posant
femmes vivant dans des prisons en compagnie d’enfants. L’artiste met à
en témoin de leur vie d’enfant et de la brutalité de l’Histoire.
jour la maltraitance de ces jeunes êtres, la négation de leur souffrance.
La dimension poétique et mystique des “America Latina” contribue à la
Le trait sur la peau, entre la projection d’un idéal et des souffrances
définition de son identité. Graciela Iturbide, à la manière de Frida Kahlo,
sociales, se transforme en devoir de mémoire dans les photographies
utilise des objets quotidiens, symbolique de la culture latine, afin créer un
de Rosângela Rennó. Le tatouage “AMOR“ de la photographe renvoie
lien nouveau entre culture et matière. Mais, ce qu’elle présente aussi, c’est
à l’anonymat de chaque personne qu’elle croise dans le complexe péni-
le chemin d’une artiste dans la souffrance qui s’en nourrit, s’en inspire et
tencier de Sao Paolo. Elle prend place en tant que témoin des vies de
l’utilise pour créer.
ceux qui ont marqué dans leur chair ce à quoi ils croient et rêvent. Dans ses créations le trait sur la peau mute en étincelle de vie.
Ainsi, America Latina met en place un nouveau langage photographique
La mémoire est dans les esprits et l’identité est dans la matière. Elle modèle,
original qui sert à la transmission des connaissances d’un continent.
reconstruit, redirige la réalité, recréant une nouvelle identité comme un
Le spectateur le découvre là, avec ses convergences et ses divergences,
puzzle de combats et de souffrances qui répond aux nouvelles aspirations
ses cultures ; de la confrontation de plusieurs peuples et civilisations naît
des peuples d’Amérique Latine. Ainsi l’ironie devient-elle la reformulation
l’œuvre d’art.
Tarma, Lima, 1979 © Robert Fantozzi
El habitat de les hombres..., Caracas, Bello Monte, 1968 © Paolo Gasparini
Latin America, with its multicultural countries, between the past and the future, is currently the subject of an exposition.Through their words, pictures, erasures, snapshots and writing, the photographers impose their vision of modernity and call us to the Fondation Cartier via America Latina, 1960-2013. Through their eyes and the testimony of those they photograph, this dense and intense continent becomes the canvas of political and historical failures of a 20th century Europe, failures which they interpret, change, incorporate and transform to excess. It is a breeding ground of unseen and unlimited human experience that is ceaselessly created through these works. The stroke becomes writing and the line a territory merging into starting
The artist brings the ill-treatment of these young beings to light, as well as
points of a past and omnipresent history. This history is built through Jorge
the negation of their suffering. The trace on the skin, between the projection
Macchi’s digital installation which identifies forty-six intersecting points,
of an ideal and of social suffering, becomes a duty of remembrance in
symbolising the suffering of heterogeneous populations living on the
the photographs of Rosângela Rennó. The photographer’s “AMOR” tattoo
edge of society. The questions asked to the countries of “America Latina”
links her to the anonymity of each individual she meets in Sao Paolo’s
– relating to the causes of social and political suffering – become the
penitentiary. She takes her place as witness of the lives of those who have
inspirations and objects of artistic creation.
inscribed in their flesh that in which they believe and dream. Through her
Another kind of pain appears, the pain linked to belonging to a territory,
creations, ink on skin mutates into the spark of life. Memory is in the mind
to a culture, as Leticia Parente strove to illustrate with her performance entitled
and identity in the matter. She models, reconstructs, redirects reality,
Made in Brazil, where she sewed words directly into her skin. Words are
recreating a new identity like a puzzle of battles and suffering which
sewn directly onto a human to claim a pain linked to entrapment in the
answers to the new aspirations of the people of Latin America. Irony thus
history of a territory and a culture, reflecting the sufferance of the impossibility
becomes the reformulation of ancestral cultures and a mechanism allowing
of escape. This branding refers to the humiliation born from the diminishment
for a reappropriation of utopias. The emptiness of the characters in Fredi
and negation of cultural identity. To Leticia Parente, artistic creation travelled
Casco’s Photo Zombie is a new way to retransmit this state of
both through the experience of suffering, and that of humiliation.
remembrance. It is, for him, a means to erase through his work the political
In these images we meet worlds in search of identity. Foetal position,
and collaborationist past of authoritarian regimes. Oscar Muñoz, another
upside down, Elias Adasme’s photo is viewed as a photographic
creator, attempts to cleanse various political events with salt and water. In
negative symbolising the waiting and unconsciousness of a nation, of a
this manner, the cubes clean and satisfy the populations’ thirst for truth.
territory. The analogy between the map of Chile and the sprawled-out
Lacromarios seems to incarnate the acceptance of a new identity born from
body tracing the coast’s borders becomes the projection of a State
the tears of those who have suffered in revolutionary combat. The need for
waiting to be awoken. In yet more works, writing becomes a battle, a
remembrance demonstrated in Marcelo Brodsky’s Buena memoria from my
means to distinguish yourself, an inspiration and an exhalation, a
teenager Photo Album can be placed in parallel. In the this work he retraces
painting creating its own future. The artists doing pixação project a
the destinies of his classmates through the political events which took place
purified form of writing which symbolises nomadism within their own
in Argentina. The artist marks with a circle or an X the static faces on the
culture and within their own language; they reinvent themselves via
photographs, depending on whether they have survived or perished. He
contestant modernity. Inspiration comes to them with the feeling of having
recreates the memory of those who have been erased, making himself
lost social justice in the face of socioeconomic inequalities.
witness of their childhood and of the brutality of history.
Text becomes material. Photographic, it elevates itself to a protesting and
The poetic and mystical dimension of “America Latina” contributes to the
advertising slogan. It is in this form that Marcelo Montecino finds
definition of its identity. Graciela Iturbide, in the manner of Frida Kahlo,
inspiration. The Sandinistas’ victory in 1979, which called for the
makes use of everyday objects symbolic of Latin culture to create a new
political and economic transformation of the general population,
link between culture and matter, but she also presents the path of an artist
becomes an artistic motif. At the heart of his series Managa, where
in pain who feeds from, is inspired by, and uses her suffering to create.
childhood is embodied in a little girl, the artist shows the harshness of inequality and the irresponsibility of families. This photographic
America Latina thus invokes a new, original photographic language
approach, striving to analyse socioeconomic inequalities and popular
transmitting a continent’s knowledge. The spectator discovers it here,
contradictions, can be linked to Adriana Lestido’s work. In Mujeres
with its convergences and divergences, with its cultures; of the
Presas, Lestido shows women living in prisons accompanied by children.
confrontation of many peoples and civilisations is born the work of art.
1+1 UNE GALERIE
UN EDITEUR
TEXT BY CHRISTOPHE LUNN
Initiales M+B Fondée par Benjamin Trigano à Los Angeles il y a cinq ans, la galerie
Founded by Benjamin Trigano in Los Angeles five years ago, the M+B
M+B a fait son chemin et su s'imposer sur le marché du tirage
gallery has made a place for itself in the market of art photography
photographique d'Art. Benjamin Trigano, s’il défend des photographes
prints. Trigano, while supporting photographers of renown, also has a
de renom, a aussi un flair pour dénicher les artistes émergents, comme
flair for uncovering emerging artists, like Matthew Brandt. Brandt takes
Matthew Brandt. Il aborde les problématiques de la photographie de
on the problems of photography from the image to the final object.
l'image à l'objet final. Plus récemment, le galeriste a découvert Alex
More recently the gallery owner discovered Alex Prager, an artist along
Prager une artiste dans le sillon de Cindy Sherman pour qui la prise de
the lines of Cindy Sherman, for whom taking the picture is only one
vue n'est qu'une étape du processus créatif.
step in the creative process. Photographer and self-taught filmmaker,
Photographe et cinéaste autodidacte, Alex Prager vit et travaille à
Prager lives and works in Hollywood, a place which feeds her work
Hollywood, lieu dont son œuvre se nourrit abondamment. Les univers de
abundantly. The universes of Luis Buñuel or David Lynch are often cited.
Luis Bunuel ou David Lynch sont souvent cités. Elle est également proche de
Prager is equally close to Todd Haynes in his representation of women
Todd Haynes dans sa représentation de femmes qui semblent coincées dans
who seem mired in the stereotypes of the 1950’s. Alex Prager leaves
des stéréotypes des années 1950. Alex Prager ne laisse rien au hasard
nothing to chance in her productions, where everything is recreated as
dans ses productions où tout est recréé comme au cinéma ; elle soigne tous
in a movie; she tends to all aspects of her characters so that the final
les aspects de ses personnages pour que l'image finale soit la plus crédible
image is as credible as possible. Since participating in a show at
possible. Depuis sa participation au MoMA en 2010, sa popularité n'a
MoMA in 2010, her popularity hasn’t stopped growing. The Corcoran
cessé d’augmenter. Le Corcoran Museum of Art à Washington D.C. vient
Museum of Art in Washington, D.C. has just given Prager her first solo
de lui offrir sa première exposition monographique muséale.
museum exhibit.
Des tirages de sa nouvelle série, “Face in the Crowd“, seront visibles à
Prints from her latest series, “Face in the Crowd”, can be seen at the
la galerie M+B jusqu'au 8 mars 2014.
M+B gallery through 8 March 2014.
Images courtesy of : Miyako Ishiuchi, Frida by Ishiuchi and Alex Prager, Face in the Crowd.
+
+
+ Initiales RM Cette société d'édition latino-américaine, basée au Mexique et en
Editorial RM, a Latin American publishing company based in Mexico
Espagne, a plus de cent cinquante publications à son actif.
and Spain, has published more than one hundred fifty works.
Pour "The PIGS" Carlos Spottorno reprend l'acronyme avec lequel la
For “The PIGS”, Carlos Spottorno uses the acronym with which the
presse financière anglo-saxonne a labélisé les pays européens les plus
Anglo-Saxon financial press labeled the economically weakest
faibles (Portugal, Italy, Greece, Spain). Le photographe, qui a parcouru
European countries (Portugal, Italy, Greece, and Spain). The
ces quatre "cochons" depuis 2008, rapporte des clichés anti cartes
photographer has roamed the four “pigs” since 2008 and has come
postales que les ministères du tourisme préfèreraient cacher ; une
back with anti-post card shots which tourism ministers would prefer to
décharge de pneus jouxtant des barres d'immeubles, des lotissements
hide: an old tire dump adjoining apartment blocks; housing
entiers de maisons à moitié construites et abandonnées... Avec humour
developments full of abandoned, half-built houses… With incisive
mais de manière incisive l’auteur pose la question du devenir de ces
humour the author asks what will become of these countries: former
pays, anciens conquérants, dépositaires d'immenses patrimoines
conquerors, repositories of an immense cultural patrimony, the cradles
culturelles, berceaux de la civilisation occidentale.
of Western civilisation.
Dans “Frida by Ishiuchi“, Miyako Ishiuchi fait revivre Frida Kahlo en posant
In “Frida by Ishiuchi”, Miyako Ishiuchi brings Frida Kahlo back to life by
son objectif sur les affaires personnelles de l'artiste mexicaine conservées
aiming his camera at the personal belongings of the Mexican artist,
dans sa "Casa Azul" devenue un musée. Les robes et jupes, dont les tâches
conserved in her “Casa Azul”, now a museum. Dresses and skirts, stains
et coutures sont magnifiées, font écho à la palette de l'artiste. Isolés sur
and seams magnified, recall the artist’s palette. Isolated on a white
fond blanc, les objets et produits de beauté (peigne, pots de crème,
background, the objects and beauty products (comb, pots of cream,
rimmel) révèlent l'univers intime d'une femme qui détestait les apparats.
make up), reveal the private universe of a woman who detested
Les corsets de Frida Kahlo, qu’elle a dus porter suite aux blessures subies
pageantry. Frida Kahlo’s corsets, which she had to wear following the
après un accident de car à dix-neuf ans, ressemblent à des moules de
injuries sustained in a bus accident at the age of nineteen resemble
sculpteur ou à des instruments de torture. Miyako Ishiuchi effleure ces objets
sculpture molds or instruments of torture. Miyako Ishiuchi skims these
avec son regard, dévoilant les surfaces lissées par la peau de l'artiste.
objects with his regard, unveiling surfaces smoothed by the artist’s skin.
029
AG
na irardot
PHOTOS BY THIBAULT GRABHERR TEXT BY SOPHIE FAUCILLION
Samedi 11 janvier 2014, je contacte via l'incontournable téléphone, mobile de par son nom, Ana Girardot. D'une voix joyeuse et quelque peu enfantine elle accepte de me délivrer une part d’elle-même et me dessine vocalement son parcours de vie, ses envies. Chacun bien sûr, possède une valise secrète qu'il trimballe et dans laquelle il entasse essentiels et superflus tout au long de ses jours : une donation parentale, parfois quelque peu hasardeuse. Saturday, 11th January 2014, I contacted Ana Girardot via the unavoidable telephone, mobile as its name. In a cheerful, somewhat childish voice she agreed to give me a piece of herself, her voice tracing the path of her life and desires. Each and every one of us, of course, possesses a secret suitcase which we carry along, cramming it full of essentials and non-essentials alike: a parental endowment, sometimes rather hazardous.
Dress, Maison Martin Margiela
Shirt, Maison Martin Margiela
A
“(...) Un jour on regarde enfin ses parents comme un homme “
et une femme qu'on aurait croisé dans nos vies et qu'on aurait aimé simplement pour ce qu'ils étaient.
A
Mais pouvons nous vraiment parler de valise pour évoquer la face
But can one really speak of a suitcase when evoking Ana’s hidden side?
cachée d'Ana ? Personnellement, j'invoquerais plutôt une malle, une
Personally, I would invoke instead a trunk, a descendance born of such
descendance esquissée de sublimes fantasmes comme “L'Atelier des
sublime fantasies as “L’Atelier des Trois” created by her grandparents –
Trois” crée notamment par ses grands-parents artistes peintres, Antonio
Antonio Otero and Clotilde Vautier, painters – then further sublimated by
Otero et Clotilde Vautier, par la suite sublimée par les traits et couleurs
the lines and colours of two actor parents, Hippolyte Girardot and Isabel
de deux parents comédiens Hippolyte Girardot et Isabel Otero, se liant
Otero, linking bodies and souls to other lives.
corps et âmes à d'autres vies.
I love seeing myself through other people, looking at old photographs
J'adore me voir à travers d'autres personnes, regarder de vieilles photos
without, finally, obtaining an answer; and, through these memories,
sans finalement obtenir de réponse et, à travers ses souvenirs, m'imaginer.
imagining myself. But on this second Saturday of 2014, Ana herself
Mais en ce samedi, le deuxième de 2014, c'est Ana elle-même qui m'a
opened her suitcase for me, revealing herself with modesty, sincerity
ouvert sa valise, se dévoilant avec pudeur, sincérité et malice.
and mischief.
“Petite je regardais beaucoup de films d'ailleurs, je réalisais des “courts”
“When I was little I watched many foreign films, I created short films
avec mes copines. J'ai toujours adoré jouer et inventer des histoires ou
with my friends. I’ve always loved acting and inventing stories or
faire des sketchs.
performing sketches.
Les membres de ma famille sont, pour la plupart, artistes. Ma tante
“My family members are, for the most part, artists. My aunt Mariana Otero
Mariana Otero est une excellente réalisatrice de documentaires, ma
is an excellent director of documentaries, my grandmother was a painter
grand-mère était peintre et mes parents sont comédiens, j'ai donc
and my parents are actors, so I’ve always had a lot of room to express
toujours eu beaucoup d'espace pour exprimer ma créativité. Mon père
my creativity. My father and mother passed their love for cinema on to
et ma mère m'ont transmis l'amour du cinéma, du jeu et du hasard. Je
me, as well as that for games and luck. I think I have a lot of luck, it’s a
pense avoir beaucoup de chance, c'est un métier dans lequel ça peut
profession where it can be very difficult to do what one really desires.
être très compliqué de pouvoir faire ce que l'on désire vraiment.
“I’m a great admirer of the work of my grandmother, Clotilde Vautier, as
Je suis une très grande admiratrice du travail de ma grand-mère, Clotilde
well as of that of my grandfather, who has founded an association for
Vautier, et de mon grand-père, qui aujourd'hui a créé une association
the preservation of their work.
pour faire vivre leur travail.
“I’ve always loved writing and inventing stories, although I never manage
J'ai toujours adoré écrire et inventer des histoires, mais, je n'arrive jamais
to finish them…but I never lose hope. I do not go a single day without
à les finir… mais je ne perds pas espoir. Je ne passe pas une journée
watching a film. Today I watched Ritesh Batra’s Lunchbox. When I don’t
sans voir un film. Aujourd'hui j'ai vu “Lunchbox” de Ritesh Batra. Lorsque
have time to go to the cinema I watch a DVD, but a day never goes by
je n'ai pas le temps d'aller au cinéma je regarde un dvd mais, pas un
without fiction.
jour ne se passe sans fiction.
“I moved to New York when I was eighteen, just after passing my
Je suis partie vivre à New York à dix-huit ans, juste après mon Bac ; une
Baccalaureat; it was an incredible experience which I would
expérience incroyable que je conseille à tout le monde, c'est une ville
recommend to anyone, it’s such a dynamic city. I intend to spend half
tellement dynamique. J'ai comme projet d'y vivre la moitié de mon temps.
my time there.
ma première pièce au théâtre. Jamais je n'aurais pu penser un tel travail. J'ai très peur, mais je suis très excitée, j’ai hâte mais j’ai aussi envie de tomber dans les pommes. J'ai tourné cet été le film de Julie Lopes Curval, “Le Beau monde” avec Bastien Bouillon. Quelle réalisatrice ! Quelle rencontre ! Quelle fille ! Je l'adore ! Je viens aussi de terminer de jouer dans le film de Cédric Anger avec Guillaume Canet, “A l’ombre des forêts” et celui d' Andrea di Stefano “Paradise Lost” avec Benicio del Toro. Autant dire que je rêve de petites vacances depuis quelque temps! Mais je suis une folle de travail donc
“One day, we finally look at our parents as a man and a woman who we would have met in our lives, and who we would have loved simply for what they were.
“
Je travaille actuellement avec Nicolas Briançon sur “Roméo et Juliette”,
je ne peux pas être plus heureuse qu'en ce moment. Mon année 2014 commence plutôt bien!”
G Une existence fantasque, esquissée de rêves, que l'on souhaite
“I’m currently working on Romeo and Juliet with Nicolas Briançon, my
à chacun. Mais, ce destin, cette vie aux milles facettes, on ne pourrait
first theatre piece. I could never have imagined such work. I’m very
mieux la conclure que par ces quelques mots extraits de “Pour une
scared, but also very excited – I’m looking forward to it but feel like
femme” (un film bien sûr) de Diane Kurys : “On nous donne une famille
fainting as well. Last summer I shot Julie Lopes Curval’s Le Beau Monde,
au départ et on construit sa propre histoire, là où il y a de la place,
with Bastien Bouillon. What a director! What a meeting! What a girl! I
là où il y a du jour et on grandit tant bien que mal entre les non-dits
love her!
et les questions sans réponse. Et puis, un jour on regarde enfin
“I’ve also just finished acting in Cédric Anger’s film alongside Guillaume
ses parents comme un homme et une femme qu'on aurait croisé
Canet, A l'Ombre des Forêts, as well as in Andrea di Stefano’s Paradise
dans nos vies et qu'on aurait aimé simplement pour ce qu'ils étaient.”
Lost with Benicio del Toro. Suffice to say that I’ve been dreaming of a
little holiday for a while now! But I’m completely crazy for work so I
couldn’t possibly be happier than I am now. 2014 has begun rather
well for me!” A whimsical existence sketched of dreams, an existence that we would wish for anyone. But this destiny, this life of a thousand facets, could not be summed up better than by these few words, extracts from Diane Kurys’ “For a Woman” (a film, of course): “At the start we are given a
family and we build our own history there where there is room, where
there is daylight, and we somehow grow up amongst all the silences
and unanswered questions. Until, one day, we finally look at our parents
as a man and a woman who we would have met in our lives, and who
we would have loved simply for what they were.”
STYLISM: BENJAMIN ARMAND WITH MAISON MARTIN MARGIELA’S COLLECTION HAIR: FRED BARAT USING LEONOR GREYL PRODUCTS MAKE UP: JUAN ROMERO
Pullover and pants, Maison Martin Margiela - Bracelet, Cartier
Escape, 2011
IMAGES BY DOJO ELECTRIC KETTLE TEXT BY JULIEN MORRIS D.
Sur un réseau internet saturé, j’avance à pas feutrés, élucidant par transfert de données mon intérêt pour Dojo Electric Kettle. Artiste surréaliste de l’ère électro-digital, il jongle prodigieusement avec l’ensemble des éléments, ressources et idées de notre monde moderne. Il vit son temps comme on vit une passion. Image, musique. Il dévore et rafraîchit nos pensées pour nous les rendre dans une nouvelle dynamique. Papier, colle et musique sont ses premières armes. Il avoue jouer avec les éléments qu’il finit par digitaliser avec le souci que l’œuvre soit la plus simple possible pour l’œil ; “l’image doit être permanente”. Presque trop facile pour un inconditionnel des salles obscures.
039
I proceed quietly on a saturated internet network, clarifying my interest in Dojo Electric Kettle through data transfer. This Surrealist artist of the electro-digital era juggles prodigiously with all of the elements, resources and ideas of our modern world. He lives in his era like a passion. Images, music. He devours and refreshes our thoughts and gives them back to us in a new dynamic. Paper, glue and music are his starting tools. He acknowledges playing with the elements before finally digitizing them, careful that the work be as straightforward as possible for the eye: “the image must be permanent.” Almost too easy for a dedicated movie buff. One Touch Of Venus, 2011
Une école de cinéma faite à Paris l’enrichit encore d’images, de sons et
A film school made in Paris enriches him still with images, sounds and
de questions. Comme lui, ne nous sommes nous pas déjà demandés ce
questions. Like him, haven’t we already asked ourselves what can be
qu’il peut y avoir dans la tête des acteurs, des badauds que l’on croise
going on in the heads of actors, of onlookers we pass? Pensive, sitting
? Pensifs, assis à la terrasse d’un café, sous un abri bus, absents de notre
on the terrace of a café, under a bus shelter, absent from our own world.
monde. Quels chemins étranges ou tortueux les ont entrainés si loin de
What strange or torturous pathways have taken them so far from us, from
nous, de l’heure bleue, des quotidiens parfois blancs, parfois gris.
the blue hour, from everydays sometimes white, sometimes grey?
La science nous a-t-elle aidé à travers ces données volumiques en trois
Has science helped us through these three-dimensional data, the
dimensions, les liens neurologiques paramétrés ou autres analyses
configured neurological links or other morphological analyses? Are not
morphologiques ? Nos reflets ne se retrouvent-ils pas dans la glace aussi
our reflections seen in the mirror as surely as another’s body hides a job,
sûrement que derrière un corps étranger se cache un travail, un esprit
a spirit different than ours? What indications, which colours to choose?
différent du nôtre ? Quels révélateurs, quelles couleurs choisir ? Quelles
What ideas preoccupy them behind their appearance?
idées les préoccupent derrières les apparences ? Appearances fool us. Here is “the ambiguity of humans.” For Dojo Electric Les apparences justement nous trompent. Là est “l’ambiguïté des
Kettle it is “symbol on symbol,” who commands who (Women Power);
humains”. Pour Dojo Electric Kettle c’est “symbole sur symbole”, qui
below its shoulders, would this charming body have revealed to you the
commande qui (Women Power) et, dessous ses épaules, ce corps
equation which traverses it (Feeling Strange)? Let appearances explain
charmant vous aurait-il révélé l’équation qui la traverse (Feeling Strange).
to you too the current rigor for past tastes of Romance, inspired by black
Laissez-la vous expliquer aussi la rigueur présente aux goûts passés de
and white. Simply, “a different reading of the body,” to be able to “render
Romance, par le noir et blanc inspiré. Simplement, “une lecture différente
a universal face.” Feel with force, lay bare the evidence which blinds us:
du corps”, pouvoir “rendre un visage universel”. Ressentir avec force,
this is his creed. He enriches his world as much by his voyages as by
faire sauter aux yeux les évidences qui nous aveuglent ; voilà son credo.
“other artists, the difficulty of other cities, different contexts.”
Sliced
Diktat-Fondation, 2012
Ubiquity, 2011
Il rassemble les mythologies présentes et passées et nous les retransmet, bien que ce soit par ses productions picturales et musicales qu’il s’auto-influence avant tout.
Elsewhere
Nude
He brings together mythologies of the past and present and retransmits them to us, though it is above all through his own pictorial and musical productions that he influences himself.
Feeling Strange, 2011
Il enrichit tant son monde par ses voyages que par “d’autres artistes, la
difficulté d’autres villes, des contextes différents”.
One senses an emulator of André Breton in his actions; in his lines, the clairvoyance of a Magritte. One sees also a child of Miró and Dali in his passion for going beyond, in his will to pursue. He brings together
On sent dans ses actes un émule d’André Breton, dans ses traits, la
mythologies of the past and present and retransmits them to us, though
clairvoyance d’un Magritte. On voit aussi un enfant de Miró et Dali dans
it is above all through his own pictorial and musical productions that he
sa passion du dépassement, par sa volonté de recherche. Il rassemble les
influences himself.
mythologies présentes et passées et nous les retransmet, bien que ce soit par ses productions picturales et musicales qu’il s’auto-influence avant tout.
It is still possible for us to discover everything he puts into his work in
The Age of Collage at the Gestalten Space in Berlin, through 16 January Il est pour nous toujours possible de découvrir la part entière qu’il met dans
2014. The exposition will move on to Hamburg in March 2014; you
son travail dans The Age of Collage au Gestalten Space à Berlin jusqu’au
can also look for the book from this exposition, published by Gestalten,
16 janvier 2014. L’exposition sera reconduite à Hambourg en mars 2014
cover signed Dojo Electric Kettle.
et vous pourrez aussi retrouver le livre qui découle de cette exposition aux éditions Gestalten, la couverture est signée Dojo Electric Kettle.
An exposition devoted entirely to the artist will certainly follow, an intense and delightful moment when the multiple facets of Dojo Electric Kettle
Une exposition qui lui sera entièrement consacrée devrait sans nul doute
will surely amaze you as much as they have me.
suivre, moment intense et charmant où les multiples facettes de Dojo Electric Kettle devraient vous ébahir autant qu’elles l’ont fait pour moi.
Women Power, 2011
Fishingline-Letthefishgo, 2011
MF
Maria Francesca Pepe habille par les bijoux TEXT BY CHAHRAZED METHENNI
Entre une faune et une flore techno-déco et une peinture botanique de Rousseau, Maria Francesca Pepe nous fait voyager à travers sa collection printemps-été 2014 : Tropical Souvenirs. Un univers tribal graphique, une jungle aux géométries psychédéliques, cela nous en apprend un peu plus sur sa personnalité. Maria Francesca fait partie des ces rares personnes possédant une aura mystérieuse, un mélange d’énergie positive, d’assurance et de simplicité. Rencontre.
047
ZEBULE- Comment l’aventure MFP a-t-elle commencée? MFP- Je pense que les choses se développent de façon spontanée, le départ de MFP n’a pas été quelque chose d’essentiellement programmé. J’étais passionnée par l’Art et le design tout en étudiant la littérature à Milan. Il faut se souvenir que dans les années 90 les écoles japonaises et belges étaient à l’honneur, ainsi que la mode déstructurée. J’ai donc décidé de m’inscrire à l’Institut Marangoni et j’ai ensuite travaillé en freelance avant de faire un Master à la Central St Martins de Londres. Le bijou a été une évolution naturelle. J’ai constaté à l’époque que j’aimais l’idée de l’accessoire comme élément alternatif à la construction
“J’ai constaté à l’époque que j’aimais l’idée de l’accessoire comme élément alternatif à la construction du vêtement, l’explorer comme nouveau focus.
”
du vêtement, l’explorer comme nouveau focus. Lorsque je travaillais à Londres, j’ai parallèlement réalisé une collection capsule de bijoux que
Z- Pourquoi Londres ?
j’ai présenté lors d’un salon à Paris appelé Rendez-Vous. Parmi mes
MFP- Car Londres justement n’impose rien, c’est le genre d’endroit où tu
premiers acheteurs il y eu Dover Street Market à Londres, Henri Bendel
es libre de t’exprimer sans craintes. Il y a une grande tolérance envers
à New York et Luisa Via Roma à Florence. Ainsi ai-je eu la possibilité
la différence que l’on apprécie et valorise, on la perçoit comme une
de développer des liens avec des artisans italiens qui m’ont aidés à
richesse et non comme une démence.
réaliser mes premières pièces. Ce que l’on ne programme pas peut parfois se révéler le point de départ de quelque chose dont on ne
Z- As-tu eu un mentor ?
pouvait soupçonner l’existence, et c’était, pour moi, à ce moment précis.
MFP- Oui bien sûr ! Il y a des personnalités auxquelles je suis très attachée, telles que Martin Margiela, Raf Simons, Ann Demeulemeester,
Z- Et quelles ont été tes plus grandes difficultés au début ?
mais aussi Rei Kawakubo de Comme des Garçons, Junya Watanabe…
MFP- Sûrement tout ce qui est en rapport avec l‘aspect financier, car
Ils ont cette habileté à concevoir la mode différemment. Il y a aussi Kuki
quoi que l’on en dise c’est un business! Il est difficile de trouver des
de Salvertes avec qui je collabore (fondateur de l’avant-gardiste
personnes prêtes à apporter leur pierre à l’édifice sans grand budget :
showroom Totem) et mon professeur de Central Saint Martins, Louise
il faut être créatif et également s’entourer de personnes honnêtes,
Wilson. Elle m’a aidée à mettre en avant ma personnalité, à ne pas
investies et compétentes.
avoir peur de ma différence car il est important de se concentrer sur qui tu es et non sur qui tu aimerais être. Le professeur Wilson nous mettait
Z- Quelles étaient tes plus grandes peurs à l’époque?
en crise, tout le monde pleurait…on aurait pu ramasser toutes ces larmes
MFP- Celles que j’ai encore aujourd’hui c’est-à-dire être dépassée par
et en faire une exposition ! Avoir autour de soi des personnes qui te
les événements. Mais je ne pense pas que la peur ne soit qu’une force
servent de miroir et t’enseignent à apprécier ton reflet est primordial.
négative, tu peux l’exploiter de façon positive aussi. Il est important de pouvoir regarder en face ses propres peurs afin de pouvoir les gérer et
Z- Où trouves-tu l’inspiration pour tes créations ?
ne pas perdre le contrôle.
MFP- Pas nécessairement dans des choses atypiques, plutôt dans celles considérées comme acquises, et que soudainement tu vois sous une
Z- De Foggia, ville dont tu es originaire, tu es partie à Londres.
autre perspective. Un poète que j’adore, Miguel Unamuno, a écrit “La
Comment as-tu vécu ce changement ?
beauté se trouve là où quelqu’un l’a oubliée.” Les objets ont une
MFP- Disons qu’il y a eu deux changements majeurs puisque j’ai aussi
symbolique ; cette connexion entre un objet, une forme et un sentiment
vécu neuf ans à Milan avant de m’installer à Londres. Lorsque tu changes
ou un souvenir. Mon inspiration vient souvent de ces petites choses, mais
de ville, quelque soit son envergure, la transition est la partie la plus
aussi des gens. Certes les expositions, l’Art en général, t’enrichissent et
difficile. En quittant Foggia, très belle ville par ses paysages mais assez
te font rêver, mais je suis parfois plus fascinée par la personne qui
pauvre en stimuli culturel, il n’y avait pas grand chose que je regrettais.
observe que par l’œuvre en elle-même. Mes amis sont aussi une grande
Je suis donc arrivée à Milan pleine d’adrénaline et avide de savoirs, je
source d’inspiration, j’aime démasquer leurs petits secrets, essayer de
me suis pratiquement jetée dans la foule, j’avais dix huit ans.
comprendre leurs gestes et leurs façons de se vêtir.
ZEBULE- How did the MFP adventure begin? MFP- I think things develop spontaneously; the beginning of MFP was not something that was really planned. I was passionate about art and design while studying literature in Milan. You have to remember that in the ‘90’s the Japanese and Belgian schools were prominent, as well as unstructured fashion. I then decided to attend the Marangoni Institute, after which I worked freelance, before getting a Masters at Central St Martins in London. Jewellery was a natural evolution. I noticed at the time
”
that I liked the idea of the accessory as an alternative to clothing construction, [and wanted] to explore it as a new focus. Parallel to working in London, I created a capsule jewellery collection which I presented at a Paris Salon called Rendez-Vous. Among my first buyers were Dover Street Market in London, Henri Bendel in New York and Luisa
Z- Did you have a mentor?
via Roma in Florence. I thus had the possibility to develop ties with Italian
MFP- Yes, of course! There are some personalities to whom I am very
artisans who helped me realize my first pieces. What isn’t planned can
devoted, like Martin Margiela, Raf Simons, Ann Demeulemeester, but
sometimes reveal itself as the starting point of which you couldn’t have
also Rei Kawakubo of Comme des Garçons, and Junya Watanabe.
suspected the existence; and it was, for me, at this precise moment.
They have this power to conceive fashion differently. There is also Kuki de Salvertes (founder of the avant-garde showroom Totem) with whom I
Z – And what were your greatest difficulties starting out?
collaborate, and my professor at Central St Martins, Louise Wilson. She
MFP- Certainly everything having to do with the financial aspect, because
helped me to show my true self, to not be afraid of being different,
whatever you might say, it’s a business! It is difficult to find people ready
because it is important to concentrate on what you are and not on what
to contribute without a big budget: you have to be creative and also to
you would like to be. Professor Wilson shook up our ideas, everyone
surround yourself with people who are honest, committed and competent.
cried…they could have gathered all those tears and made an exhibition
Z- What were your greatest fears at the time? MFP- The same ones I still have today, that is, being overwhelmed by events. But I don’t think that fear is only a negative force: you can exploit it in a positive way as well. It is important to be able to face your own fears in order to manage them and not lose control.
of them! Having people around you who serve as a mirror and teach you to appreciate your reflection is paramount. Z- Where do you find inspiration for your creations? MFP- Not necessarily in atypical things; rather in what is considered acquired, and that suddenly you see from another perspective. A poet I
Z- From Foggia, where you were born, you left for London.
adore, Miguel Unamuno, wrote, “Beauty is found there where someone
How did you experience this change?
forgot it.” Objects are symbolic: there is a connection between an
MFP- Let’s say there were two major changes because I also lived for
object, a shape, and a feeling or a memory. My inspiration often comes
nine years in Milan before settling in London. When you change cities,
from these little things, but also from people. Certainly expositions, art
whatever the size, the transition is the hardest part. Leaving Foggia, a
in general, enrich and make you dream, but sometimes I am more
very beautiful, scenic city, but rather poor in cultural stimuli, there wasn’t
fascinated by the person who observes than by the artwork itself. My
much I missed. I thus arrived in Milan full of adrenaline and avid to
friends are also a great source of inspiration; I love revealing their little
understand, I practically threw myself into the crowd, I was 18.
secrets, trying to understand their gestures and their ways of dressing.
Z- Why London?
Z – Is there a starting point in your creations?
MFP- Because London in fact imposes nothing; it’s the kind of place
MFP- I often start with a shape like the triangle, with which I am
where you are free to express yourself without fears. There is a great
obsessed! It is a very energetic symbol. I love Art déco for its geometrical
tolerance of difference, which is appreciated and valued; it is viewed
forms. I seek first to create a balance between the forms, then I add the
as a source of richness and not as insanity.
colours. I often imagine jewellery in black and white.
Z- Y a-t-il un point de départ dans tes créations ?
Z- Que souhaiterais-tu que l’on retienne de ta marque,
MFP- Je pars souvent d’une forme comme le triangle par lequel je suis
quelle image aimerais-tu renvoyer ?
obsédée ! C’est un symbole très énergétique. J’aime beaucoup l’Art
MFP- J’aimerais qu’elle soit perçue comme une marque de qualité,
déco pour ses bases géométriques. Je cherche d’abord à créer un
d’innovation créative et de contemporanéité : ces trois éléments sont
équilibre entre les formes, ensuite j’ajoute les couleurs. J’imagine souvent
essentiels. Je tiens aussi énormément au made in Italy : mon produit n’est
le bijou en noir et blanc.
pas seulement beau, il dure dans le temps. J’essaie d’anticiper les tendances, de proposer un produit enthousiasmant qui donne envie
Z- Quelle pièce préfères-tu créer ?
d’être porté au quotidien. D’après les dires de mes clients, c’est
MFP- La bague car j’aime beaucoup sa forme. Elle est versatile et c’est
effectivement comme cela qu’ils perçoivent ma marque. Je suis ravie et
un objet très féminin. Je pense que les mains sont importantes, c’est pour
j’aimerais persévérer dans cette voie.
moi un signe d’honnêteté que de montrer ses mains. Je trouve d’ailleurs
“C’est plaisant de pouvoir
les hommes qui portent des bagues très sexy car ils n’ont pas peur de dévoiler leur féminité. Z- Utilises-tu toujours les mêmes matériaux ou as-tu recours à des matériaux plus luxueux depuis ton lancement ? MFP- Pour chaque collection j’expérimente un matériau différent mais je travaille à la base avec du laiton et de l’argent. Comme il s’agit de
collaborer avec quelqu’un sans avoir à se retenir !
”
bijoux customisés, les réaliser en matériaux précieux donnerait une stratégie de prix différente de celle destinée à mon marché. Cependant,
Z- Tu as collaboré avec différents artistes,
j’aime beaucoup les pierres sur lesquelles je fais beaucoup de
quelle a été ta collaboration la plus singulière ?
recherches : pour chaque collection je me concentre sur une pierre qui
MFP- La plus atypique est sûrement celle avec Nicola Formichetti pour
la représentera. Cette saison, j’ai étudié la labradorite : une pierre qui
Lady Gaga. Je devais faire une coiffe inspirée des ingrédients de son
symbolise la nature, elle semble liquide et solide à la fois, teintée de
parfum pour un lancement. Je m’étais vraiment laissée aller aux idées
vert et de bleu. Je pense que les pierres ont des caractéristiques
les plus folles ! C’est plaisant de pouvoir collaborer avec quelqu’un sans
magnétiques alors je vais toujours chercher leurs significations et leurs
avoir à se retenir ! Plus tu challenges Lady Gaga plus elle veux porter
propriétés. J’ai par exemple travaillé avec le quartz, pierre ayant les plus
tes créations.
grandes propriétés énergétiques et magnétiques, ainsi que la pyrite, ou encore l’hématite. Il existe un mont au Brésil où il y a une grotte
Z- Une collaboration rêvée ?
d’hématites dont tu ne peux t’approcher si tu as un pacemaker. C’est
MFP- En clin d’œil à mes débuts, je dirais sûrement MFP pour Comme
vrai ! En fait, l’idée d’offrir quelque chose avec une signification me
Des Garçons.
plait, comme celle d’apporter bonne santé par exemple. Z- Quels conseils donnerais-tu à un jeune designer Z- Comment ton concept de ”jewellerywear” ou ”vêtement-bijou”
qui débute dans le métier ?
est-il apparu ?
MFP- Au départ faire peu mais bien, exposer le plus possible son travail,
MFP- Ma conception du bijou est non conventionnelle, plus versatile, on
écouter les autres et observer les réactions : qui porte tes pièces et
peut le substituer à un habit. Je trouve très joli et moderne de porter une
comment. La mode est un dialogue, tes créations vont être portées, ce
tenue simple et de la valoriser avec un accessoire fort. Ainsi ai-je
n’est pas comme la peinture. J’essaie toujours de parler avec les
développé des pièces en suivant le patronage des vêtements grâce à
acheteurs dans les salons, aux journalistes.
ma formation de styliste-modéliste. De plus le ”vêtement-bijou” est de plus en plus tendance, j’ai conçu le premier en 2009, je me quasi-félicite
Z- Si tu étais un animal ?
d’avoir anticipé le mouvement ! Certaines pièces d’archive, telles que
MFP- J’aimerais être un oiseau.
celles conçues pour des célébrités ou pour des séries mode sont très scéniques, mais j’en élabore aussi de plus subtiles. J’adore les harnais,
Z- Si tu étais un plat ?
ce sont des bijoux de corps classiques, une quasi-extension du collier.
MFP- Les œufs car ils peuvent être simples et sophistiqués à la fois, tu
J’ai exploré dernièrement ce que j’appelle les bijoux de plage (à porter
peux en faire plusieurs choses, salées comme sucrées…
en maillot de bain), je trouve ça très sexy et cela me rappelle beaucoup les années 90 lorsque l’on portait des chaînes autour de la taille. Certains
Z- Si tu étais une pièce mode ?
modèles sont assez complexes à porter, nous les vendons, pour cette
MFP- Sûrement une bague que tu mets au doigt et n’enlèves plus. Je suis
raison, accompagnés d’une petite notice avec des dessins numérotés.
très fidèle !
Z- What are your favourite pieces to create? MFP- The ring, because I love its shape. It is versatile and is a very feminine object. I think hands are important; for me, showing your hands is a sign of honesty. I find, by the way, that men who wear rings are very sexy because they aren’t afraid to show their femininity.
”
Z- Do you continue to use the same materials or are you using more luxurious materials since launching MFP? MFP- For each collection I try out a different material but I always work
Z- You have collaborated with different artists:
with brass and silver as a base. As it is customised jewellery, making
which was your most unique collaboration?
them in precious materials would result in a different price strategy than
MFP- The most atypical was certainly with Nicola Formichetti for Lady
that destined for my market. Nevertheless I like the stones, on which I
Gaga. I had to make a hairstyle inspired by her perfume ingredients for a
do a lot of research: for each collection I concentrate on one stone
kick off. I really let myself go with the craziest ideas! It’s a pleasure to be
which will represent that collection. This season I studied labradorite,
able to collaborate with someone without having to hold yourself back! The
a stone which symbolises nature: it seems liquid and solid at the same
more you challenge Lady Gaga, the more she wants to wear your creations.
time, tinted in green and blue. I think that stones have magnetic characteristics so I always search for their meanings and properties. I
Z- A dream collaboration?
have, for example, worked with quartz, a stone with the greatest
MFP- As a nod to my early days, I would surely say MFP for Comme
energy and magnetic properties, as well as with pyrite, or also
Des Garçons.
hematite. There is a mountain in Brazil where there is a hematite cave which you can’t approach if you have a pacemaker. It’s true! In fact I
Z- What advice would you give to a young designer
like the idea of giving something with a meaning, something that brings
starting out in the business?
good health, for example.
MFP- At first make little but well, show your work as much as possible, listen to others and observe their reactions: who wears your pieces and how.
Z- How did your concept of “Jewellery Wear” emerge?
Fashion is a dialogue, your creations are going to be worn, it isn’t like
MFP- My conception of jewellery is unconventional, more versatile; it
painting. I always try to speak with buyers in the salons, with journalists.
can substitute for clothing. I find it very pretty and modern to wear a simple outfit and enhance it with a strong accessory. I thus developed
Z- If you were an animal?
pieces by following apparel patterns, which I could do thanks to my
MFP- I’d like to be a bird.
training as a fashion designer. And then “jewellery wear” is more and more fashionable: I conceived
Z- If you were a food?
the first piece in 2009, and almost congratulate myself for having
MFP- Eggs, because they can be simple and sophisticated at the same
anticipated the movement! Some archive pieces, such as those created
time, you can do many things with them, salty or sweet…
for celebrities or for a fashion line, are very theatrical, but I also create more subtle pieces. I love harnesses: they are classic body jewellery,
Z- If you were a fashion piece?
a quasi-extension of the necklace. I recently explored what I call
MFP- Certainly a ring that you put on your finger and never take off.
“beach jewellery” (to wear with a bathing suit), I find that very sexy
I am very loyal!
and it reminds me very much of the ‘90’s when chains were worn around the waist. Some models are rather complicated to wear, so for this reason we sell them accompanied by a little instruction book, with numbered pictures. Z- What would you like us to remember of the brand, what image would you like to project? MFP- I would like to be seen as a brand of quality, of creative innovation and contemporaneity: these three elements are essential. I am also very attached to Made in Italy: what I make is not only beautiful, it will last. I try to anticipate trends, to offer an exciting product which creates a desire to be worn every day. From what my clients say, this is indeed how they see my brand. I am delighted and would like to continue in this direction.
Signature PHOTOGRAPHER: STÉPHANIE VOLPATO STYLIST: JNSN
ALEXANDER Leather and knit top, Jitrois - Top, Nathalie Chaize - Collar, Isabel Benenato - On the eyes : Ear and eye muffs, Augustin Teboul Bracelet, Aethra d’Oktane Concept - Ring, Rita&Zia - Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Voluform & Luminescence milk
055
HUBERT Dress, Clarisse Hieraix - Tights, Wolford - Shoes, Walter Steiger Necklace, Elena Meyer Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Lotus volumizing mousse & silk serum enhancer
CHRISTIAN 47 Dress, Paule Ka - Jacket, On Aura Tout Vu Shoes, Minna Parikka - Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Lotus volumizing mousse & silk serum enhancer
COCO Sweatshirt, Shaun Samson - Skirt and gloves, On Aura Tout Vu Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Natural Glow
CHRISTIAN 87 Poncho, Manish Arora - Skirt and jewels, On Aura Tout Vu Hat, Etienne Jeanson by Sandrine Bourg Scarf, Astrid Sarkissian - Shoes, Walter Steiger
YOJI Coat, Avelon - Top, Nathalie Chaize - Glasses, Wildfox Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Voluform & Luminescence milk
Shirt, Paule Ka - Skirt, Amaya Arzuaga Cap, On Aura Tout Vu - Shoes, Minna Parikka Earrings, Ek Thongprasert Necklace, Lucie Saint Leu chez l’Avant-Scène Ring, Rita&Zia
YVES Jacket with feathers, Stella Cadente Tuxedo Jacket, Emiliano Rinaldi Trousers, Etienne Jeanson - Shoes, Walter Steiger Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Natural Glow
ALEXANDER Leather and knit top, Jitrois - Top, Nathalie Chaize - Skirt, Fifi Chachnil - Pants, Giorgio On the eyes : ear and eye muffs, Augustin Teboul - Shoes, Walter Steiger Collar, Isabel Benenato - Bracelet, Aethra d’Oktane Concept
YOJI Coat, Avelon - Dress, Augustin Teboul - Glasses, Wildfox - Bracelet, Mo by Monica Hair, Cyril Auchère for Leonor Greyl with Voluform & Luminescence milk
MODEL: TIFFANY @ KARIN MODELS PARIS HAIR: CYRIL AUCHÈRE WITH LEONOR GREYL PRODUCTS HAIR ASSISTANT: EMMANUELLE CARADEC MAKE UP: KASIA FURTAK WITH M.A.C COSMETICS PRODUCTS
Yin & Yang PHOTOGRAPHER: BRUNO FOURNIER STYLIST: IRMA BIRKA
MODEL CAMÉLIA @ MANAGEMENT MODELS HAIR: WALTER ARMANNO USING SCHWARZKOPF PROFESSIONAL MAKE UP: JOSÉPHINE BOUCHEREAU STYLIST ASSISTANT: CHAHRAZED METHENNI
Tutu, Jean Paul Gaultier Strapped sandal, Jorge Bischoff - Necklace, Césarée
067
Coat, Clarisse Hieraix - Swimsuit, Thapelo - Black cuff, Césarée White cuff, Viveka Bergström - Boots, Karoline Lang
Dress, Clarisse Hieraix - Gloves, Glovestory - Bracelet, CĂŠsarĂŠe
Skirt, Julien Fournié - Corsage, Zana Bayne Necklace, Césarée - Gloves, Glovestory
Dress, Emanuel Ungaro Stole, Pleats Please Issey Miyake - Shoes, Walter Steiger
Jacket and pants, Tsumori Chisato - Platform shoes, Walter Steiger Cuff, Poggi - Necklace, Jordane Somville
Bolero and skirt, 132 5. Issey Miyake Bracelet, Viveka Bergstrรถm
Wild Duchess PHOTOGRAPHER: JULIEN LEFORT STYLIST: MARIE REVELUT
074
Coat, Sandrine Philippe
Left: Mask, Augustin Teboul - Dress, Dsquared2 - Coat, Sandrine Philippe Right: Dress, Clarisse Hieraix - Boots, Vic Matie
Wild
d
Left: Leather jacket, Dirk Birkkembergs - Overalls and socks, Augustin Teboul - Shoes, Minna Parikka Right: Top, Sandrine Philippe
Left: Top, Sandrine Philippe Right: Feather Boa, Stella Cadente - Jacket, Patrizia Pepe - Underwear, Eres - Boots, Vic Matie
MODEL: ANNIQUE LONCQ JONG @ MAJOR AGENCY HAIR: RAPHAËL MARIAGE MAKE UP: MEYLOO
L
Precious etters
PHOTOGRAPHER: ROBERT JASO STYLISTS: ALICE FLEURY & ALEXANDRA RYZOW
Silver necklace, Jonas Bownman - Gold, onyx, chrysoprase and amethyst earring, Honorine at White Bird Bronze ring with eye, Bernard Delettrez - Pink gold ring, Dinh Van Yellow gold, yellow and champagne diamonds double ring, Ileana Makri at White Bird - Tulle Bra, Eres
Bronze hand necklace with eye, Bernard Delettrez - Perlee cuff bracelet, creased pink gold, Van Cleef & Arpels Gold and diamonds ring, Snake Duetto Messika - Yellow gold ring with blue stone and yellow gold ring, Bijules
Heart collection necklace in yellow gold, Poiray - Earring Icone, gilded brass, zirconium and pearls, Icepinkim Vermeil and gold cuff ; and silver cuff, Jonas Bowman - Silver ring and silver hand bracelet, Bijules - Gold ring, Trinity Cartier
Yellow gold necklace, Dinh Van - Gold bracelet Love, Cartier - Leather and silver bracelet L, Lancel - Cuff Natte, gilded metal, Initiales P.P Ring Boule d'Amour in yellow gold and silver, Garnazelle - Indrani collection ring in citrine and yellow gold, Poiray - Leather bra, Zana Bayne
Silver, malachite, crystal and agate necklace, Taher Chemirik at Galerie NaĂŻla de Monbrison - Earring Arrow in black gold and diamonds, Runa Ring Inca in white gold and diamonds, Elise Dray - Tulle bra Yasmine, Eslami
MODEL: MAYA COLINE @ MARILYN AGENCY HAIR: RAYNALD BERNARD MAKE UP: CHRISTINA LUTZ @ B-AGENCY STYLIST ASSISTANT: CHAHRAZED METHENNI
Necklace Luxuriante, Medicis collection, 35 lily flowers made of 1470 diamonds and 35 round diamonds, black velvet ribbon, 2 white South sea pearls, white gold. Convertible into a tiara, Mellerio Dits Meller - Cravate Spiky in white gold, Messika Earring Arlequin in white gold and diamonds ; and earring clip cartilage charms losange in white gold and diamonds, Elise Dray Yellow gold bracelet Pour toujours, Garnazelle - Silver ring, Bijules - Ring phalanx Arlequin in white gold and diamonds, Elise Dray Ring Snake, Gargouille collection in white gold and black diamonds, Insolyte Joaillerie
www.zebulemagazine.com
S L
Pierre Niney est YSL
PHOTOS BY THIBAULT GRABHERR & ANOUCHKA DE WILLIENCOURT TEXT BY VÉRONIQUE TROUILLET
101
Quand on lui demande son pire défaut, la réponse de Pierre Niney ne se fait pas attendre : l’impatience. Mais, quand on lui demande sa principale qualité, il bredouille, cherche ses mots et finalement, ne trouve rien à dire. Il suffit pourtant d’une petite demi-heure d’interview et de quelques questions pour qu’il les dévoile, inconsciemment, ses qualités. Et elles font chaud au cœur. When asked to name his greatest weakness, Pierre Niney’s answer surprises: impatience. But ask him his greatest virtue and he stammers, searches for words, and in the end finds nothing to say. Yet all it takes is a little half-hour interview and a few questions and he reveals, unconsciously, his qualities. And they warm our hearts.
Le garçon est donc impatient. C’est presque de l’hyperactivité. Quand il
So the boy is impatient. Almost hyperactive. When he’s standing he
est debout, il ne tient pas en place, parcourant la pièce de long en large,
doesn’t hold still, crossing the room from one end to the other, glancing
jetant un coup d’œil ici, effleurant un objet là. Une fois assis, on imagine
here, touching an object there. Once he sits you imagine his feet
ses pieds souffrant d’une discrète bougeotte. Et s’il doit s’occuper les
suffering a discrete restlessness. And if he has to do something with his
mains, un trombone fait parfaitement l’affaire. Il le fera jouer entre ses
hands, a paperclip will do perfectly. He’ll play with it in his fingers for
doigts pendant de longues minutes, résistant le plus longtemps possible
many minutes, resisting as long as possible before unfolding it completely
avant de finalement le déplier jusqu’à le rendre informe. En pleine
and rendering it useless. In the midst of promoting his new film, Yves
promotion de son nouveau film, Yves Saint Laurent de Jalil Lespert, on sent
Saint Laurent by Jalil Lespert, one senses that Pierre Niney is in a hurry
que Pierre Niney est pressé d’être déjà ailleurs. A parier, c’est sur scène.
to be elsewhere by now. Onstage, one would bet.
Il le dit lui-même, “à douze ou treize ans, j’étais déjà très énergique et j’ai
He says it himself: “At twelve or thirteen I was already full of energy
voulu mettre cette énergie au service de quelque chose.” Trop petit pour
and I wanted to put it to use.” Too small to play basketball (a
jouer au basket (une réincarnation en Tony Parker ne lui déplairait pas !),
reincarnation as Tony Parker would not displease him!), he threw
il s’est lancé dans le théâtre, plus à sa porté… verticale. “J’ai toujours été
himself into theatre, more within reach…vertically. “I was always
fasciné par les conteurs et je me suis rendu compte que le fait de jouer
fascinated by storytellers and I realized that acting out texts,
des textes, d’interpréter des personnages et de raconter de petites histoires
portraying characters and telling little stories, spoke to everyone.
parlait à tout le monde. Cette envie que quelqu’un nous raconte une
This desire we have for someone to tell us a story seems universal,
histoire semble universelle, comme un besoin assez archaïque.”
like a rather archaic need.”
De fasciné, Pierre Niney est vite devenu passionné. Son amour de l’art
Fascinated at first, Pierre Niney quickly became passionate. His love for
dramatique s’est alors nourri de bons professeurs de théâtre, de
the dramatic arts was then nourished by good theatre teachers, by the
découvertes d’acteurs comme François Morel sur scène ou Patrick
discovery of actors like François Morel on stage or Patrick Dewaere on
Dewaere au cinéma, d’une admiration sans borne pour Michel Bouquet
film, by boundless admiration for Michel Bouquet or Leonardo DiCaprio,
ou Leonardo DiCaprio, d’une première interprétation réussie… Il a suivi
by a successful first role… He followed the royal road of the French
la voie royale de l’acteur : théâtre à l’école, Cours Florent, Conservatoire
actor: theatre at school, the prestigious Cours Florent school in Paris, the
National Supérieur d’Art Dramatique de Paris et enfin Comédie-
National Conservatory of Dramatic Arts of Paris, and finally, the
Française. Il l’a intégrée en octobre 2010, devenant, à vingt et un ans,
Comédie-Française. He joined in October, 2010, becoming, at age
le plus jeune pensionnaire. “La Comédie-Française m’a appris
twenty-one, its youngest member. “The Comédie-Française taught me so
énormément de choses : être un peu plus patient, devenir humble,
many things: to be a bit more patient, to be humble, to watch others
regarder les autres travailler de façon utile, gérer mon ego... Quand tu
work in a constructive way, to manage my ego… When you leave a
quittes un plateau de cinéma, il est toujours bon de se recentrer sur la notion
film set, it is always good to refocus on the idea of work, of a troupe,
de travail, de troupe, de collectif et d’artisanat. Pour moi, les acteurs de la
a collective and a craft. For me, the actors of the Comédie-Française
Comédie-Française sont des artisans et j’aime beaucoup cette idée de
are craftspeople and I love this idea of know-how. I think it’s beautiful;
savoir-faire. Je trouve ça beau ; savoir bien raconter des histoires, connaître
to know how to tell stories well, to know the tools of the craft that are
ses outils de travail que sont sa voix et son corps. La Comédie-Française est
your voice and your body. The Comédie-Française is also a rather crazy
aussi une aventure humaine assez dingue. Tu es avec soixante personnes
human adventure. You are with sixty people who you know and work
que tu connais et que tu côtoies tous les jours. Ils deviennent une vraie famille,
with every day. They become a real family, and it’s rather “tricky”.
et c’est assez “piégeux”. A mon arrivée à la Comédie-Française, je me suis
When I arrived at the Comédie-Française, I told myself that I would
dit que j’en partirai quand j’en aurai envie, comme ça. Personne ne t’en
leave when I felt like it, just like that. Nobody prevents you, by the way.
empêche, d’ailleurs. Sauf toi. Parce que tu as des coups de cœur pour les
Except yourself. Because you fall in love with people, with plays, with
gens, pour les pièces, pour les lieux comme la salle Richelieu ou le théâtre
places like the Salle Richelieu or the Théâtre du Vieux Colombier. I am
du Vieux Colombier. J’y ai trop d’attaches maintenant.”
too attached to them now.”
Et Pierre aime cette fidélité, que ce soit dans sa vie professionnelle ou
And Pierre likes this loyalty, whether it is in his professional life or his
dans sa vie privée. Il a rencontré ses meilleurs amis au primaire et au
private life. He met his best friends in primary and secondary school. A
collège. Acteur professionnel depuis l’âge de seize ans, il était souvent
professional actor since the age of sixteen, he was often on film shoots
en tournage ou en tournée quand eux partaient en vacances. “Ma vie
or on tour when his friends left on vacation. “My life was different; I had
était différente, j’avais d’autres problèmes qui normalement arrivent
other problems which usually come later. But I always wanted that and
plus tard. Mais, j’ai toujours voulu ça et je n’ai aucun regret.”
I have no regrets.”
Aujourd’hui, leurs rencontres sont souvent faites de défis, une vieille
Nowadays their meetings are often full of dares, an old tradition, as in
tradition, façon “Jeux d’enfants” de Yann Samuell. Tout aussi mortel mais
the film “Love Me If You Dare” by Yann Samuell. Just as deadly but in a
au sens figuré, ils mettent des défis dans un chapeau, ils en tirent un et
figurative sense, they put the dares into a hat, pull one out and are
sont obligés de le relever. Le dernier en date pour Pierre : ne pas parler
obliged to carry it off. Pierre’s most recent dare: to not speak for three
pendant trois jours. Il a craqué au deuxième jour. Difficile de se taire
days. He made it to the second day. Difficult to keep quiet when you
quand on aime trop plaisanter.
like to joke so much.
Le jeune homme carbure en effet au rire. Il a un humour assez “british”,
The young man does, in fact, run on laughter. He has a rather British
léger, subtile, avec juste ce qu’il faut d’impertinence. Et de ridicule
sense of humour, light, subtle, with just a touch of impertinence; of
aussi. Il sait faire le grand écart entre l’ ”Hyppolite” de Phèdre à la
ridicule, as well. He knows how to make the leap from Phaedra’s
Comédie-Française et le “Goldman” de sa série, Casting(s). “Si le
Hyppolite at the Comédie-Française to Goldman in his TV series
ridicule tuait, je serai mort depuis longtemps. “The Big Lebowski” des
Casting(s). “If ridicule killed, I would have been dead long ago. ”The
frères Coen est un de mes films cultes (juste après “Casino” de Martin
Big Lebowski” by the Cohen brothers is one of my cult films (just after
Scorsese). Il parle de la médiocrité humaine et l’élève au rang de
Martin Scorsese’s Casino). It’s about human mediocrity elevated to the
génie. Le ridicule flirte toujours avec le génial. Regardez Molière.
rank of genius. The ridiculous always flirts with genius. Look at Moliere.
Patron de la Comédie-Française, il écrivait des comédies avec des
Head of the Comédie-Française, he wrote comedies with quid qui pros
quiproquos et des jeux de mots sur des sujets sérieux, politiques et
and puns about serious subjects, the political and hot topics of the
brûlants pour l’époque. Et c’était à se tordre de rire. Il n’est pas
time. And you laugh your head off. For me it isn’t about choosing
question pour moi de choisir entre le sérieux et la comédie. Cela
between serious drama and comedy. That would make no sense. I
n’aurait pas de sens. J’ai envie de jouer les deux. Je suis curieux des
want to do both. I am curious about both, and I always go where
deux, et je vais toujours où la curiosité m’emmène.”
curiosity takes me.”
“
J’ai aussi été touché par l’histoire d’amour entre Yves Saint Laurent et Pierre Bergé. J’avais envie de bien raconter cette histoire. Je ne prétends pas faire autre chose que ça : raconter des histoires.
“
Dernièrement, cette curiosité, loin d’être un vilain défaut dans son cas, l’a
Most recently this curiosity, far from being a flaw, brought him to Yves
portée vers Yves Saint Laurent. Un rôle qu’il ne pouvait pas refuser. “Je suis
Saint Laurent. A role he couldn’t refuse. “I am in a wonderfully lucky
dans une position de chance inouïe car je reçois des scénarios, surtout depuis
position because I receive screenplays, especially since J’aime
“J’aime regarder les filles” de Frédéric Louf (son premier rôle principal au
regarder les filles by Frederic Louf [his first starring film role]. I find it
cinéma). Je trouve exceptionnel le seul fait qu’on pense à moi pour des films.
amazing that anyone thinks of me for films. And the scripts are all
Et ce sont des scripts très différents et très surprenants : des problématiques
different and all surprising: adult issues and characters, thrillers,
et des personnages adultes, des thrillers, des films politiques… Je suis content
political films… I am pleased that people have that kind of
que les gens aient cette imagination-là. La Comédie française y est aussi
imagination. The Comédie Française has something to do with it.
pour quelque chose. “Yves Saint Laurent” est mon premier rôle d’adulte au
Yves Saint Laurent is my first adult role in a film, but in the theatre I
cinéma mais, au théâtre, j’ai déjà eu la chance d’en interpréter quelques
have already had the good fortune to play adult characters in plays
uns dans des Marivaux, des Koltès (son auteur préféré), des Racine... Tous
by Marivaux, Koltès [his favourite author], Racine... All of these roles
ces rôles ont préparé le terrain pour “Yves Saint Laurent”, pour travailler
prepared the way for “Yves Saint Laurent”, to be able to work calmly
sereinement sur un personnage compliqué, avec des problématiques
on a complicated character, with adult issues. This kind of rich, dense
d’adulte. Ce genre de rôle riche et dense arrive généralement plus tard, pas
role usually arrives later, not at age twenty-four, but I was already
à vingt quatre ans, mais j’étais déjà dans cette énergie de travail.”
doing this kind of work.”
“
I was also touched by the love between Yves Saint-Laurent and Pierre Bergé. I wanted to tell this story well. I don’t pretend to do anything but that: tell stories.
“
Si les thèmes des scénarios ont changé, ce n’est pas le cas du critère
If the themes of the screenplays have changed it isn’t because of a
de choix de Pierre : le coup de cœur. “Yves Saint Laurent a été un coup
change in Pierre’s criteria for choosing: passion. “Yves Saint Laurent was
de cœur à tout point de vue : scénario, réalisateur et au-delà de ça, le
a passionate choice any way you look at it: the scenario, the director,
personnage, la personne d’Yves Saint Laurent. Je connaissais très peu de
and beyond that, the character, the person of Yves Saint Laurent. I knew
choses sur lui : sa silhouette, ses lunettes, la marque et enfin l’idée de
very little about him: his distinctive appearance, his glasses, the brand,
perfection dans son travail.” Une notion qu’ils ont tous les deux en commun.
and, finally, the idea of perfection in his work.” A notion that the two of
Pierre s’est littéralement fondu dans le personnage, jusqu’à disparaître.
them have in common.
Il a travaillé sur le corps et la voix d’Yves Saint Laurent, passant trois
Pierre literally melted into his character, to the point of disappearing. He
mois à écouter tous les jours des interviews du couturier. Il a aussi été
worked on the body and voice of Yves Saint Laurent, spending three
coaché en dessin pour s’approcher au maximum de son trait de crayon,
months listening to the designer’s interviews every day. He was also
en stylisme pour savoir comment toucher les tissus, les reconnaître,
coached in drawing, to come as close as possible to the designer’s
apprendre les codes d’un atelier de couture, le vocabulaire et se sentir
pencil strokes; in design, to know how to touch and recognize fabrics,
suffisamment à l’aise pour improviser, mais aussi en sport pour se
to learn the codes and vocabulary of a dressmaking workshop, and to
façonner la silhouette du personnage dans les années 1970, à la
feel sufficiently at ease to improvise; and he was coached, too, in sports,
carrure d’épaule plus prononcée.
to give himself the character’s appearance of the 1970’s, with more pronounced shoulders.
Sa préparation minutieuse ne l’a pas empêché d’éprouver un doute constant. “Parce que je ne voulais pas me décevoir, ni décevoir Jalil qui
His careful preparation did not prevent him feeling constant doubt.
a écrit un scénario magnifique. Et parce qu’au-delà de ça, je raconte le
“Because I didn’t want to disappointment myself, nor disappoint Jalil, who
destin bouleversant de quelqu’un qui a existé. Mais j’ai toujours le doute,
wrote a magnificent scenario. And because beyond all that, I am telling
quelque soit le projet ou le personnage, que ce soit au théâtre ou au
the moving fate of someone who existed. But I always doubt, whatever
cinéma. Sinon, ce ne serait pas drôle.” Et il éclate de rire avant de
the project or character, whether it’s in the theatre or on film. Otherwise
reprendre son sérieux, avec néanmoins le regard doux rêveur : “J’ai aussi
it wouldn’t be fun.” And he breaks out laughing before becoming serious
été touché par l’histoire d’amour entre Yves Saint Laurent et Pierre Bergé.
again, though with the look of a dreamer: “I was also touched by the
J’avais envie de bien raconter cette histoire. Je ne prétends pas faire
love between Yves Saint Laurent and Pierre Bergé. I wanted to tell this
autre chose que ça : raconter des histoires.”
story well. I don’t pretend to do anything but that: tell stories.”
49° 38.521’ N, 99° 50.030’ E
AU-DELÀ DU GRAND VENT TEXT & PHOTOS BY HAMID SARDAR-AFKHAMI WWW.PHOTOVIVIENNE.COM
Buryat Frontier, North Taiga, Hovsgol, Mongolia, 2010 © Sardar, courtesy Photo Vivienne
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Lake Fawn, Darhat Valley, Hovsgol, Mongolia, 2010 © Sardar, courtesy Photo Vivienne
Hamid Sardar-Afkhami est un photographe et cinéaste documentariste primé. Il a obtenu un doctorat en études tibétaines de l'Université d'Harvard spécialisé dans la Mongolie. Il vit actuellement à Paris, en France, et Oulan-Bator, en Mongolie.
Dans les temps anciens, un vent terrible soufflait sur la vaste steppe reliant l'Europe à l'Extrême-Orient, les poètes grecs l'appelaient Borée et pensaient qu'il vivait dans une grotte quelque part dans les montagnes de l'Altaï. Au-delà du grand vent - dans le pays d'Hyperborée - existe une terre idéale où le soleil brille toujours, un lieu connu pour ses prêtres et ses guérisseurs, comme Abaris qui vécu dans un lieu où, selon le poète Pindare, "ni maladie, ni amère vieillesse se mêlent" et où vit la race Hyperboréenne "dans leur sang sacré, loin des labeurs et des batailles" (Pindare, Les Pythiques, dixième Ode). Les communautés nomades qui survivent aujourd'hui dans des lieux comme la Mongolie sont les descendants des mythiques Hyperboréens ; une race d'illuminés qui vivait au-delà du grand vent. Les nomades mongols conservent une vision de la vie que notre imagination occidentale associe encore à la race dorée.
Otgon Tenger Falls, North Taiga, Hovsgol Province, Mongolia, 2010 © Sardar, courtesy Photo Vivienne
Hamid Sardar-Afkhami is a photographer and award-winning documentary filmmaker. He graduated with a PhD in Tibetan studies from Harvard University specializing in Mongolia, and currently lives in Paris, France, and Ulanbataar, Mongolia.
In ancient times, a terrible wind blew across the vast steppe connecting Europe to the Far East. The Greek poets called it the Boreal, and believed it lived in a cave somewhere in the Altai Mountains. Beyond the great wind - in the country of Hyperborea - there was to be found a perfect land where the sun always shines; a place known for its priests and healers like Abaris; who lived in a place where according to the poet Pindar, “neither disease nor bitter old age is mixed” and where the Hyerborean race live, “in their sacred blood; far from labour and battle” (Pindar, Tenth Pythian Ode). The nomadic communities that survive in places like Mongolia today are the descendants of the legendary Hyperboreans; the enlightened race that lived beyond the great wind. Mongol nomads still preserve a vision of life which we in Western imagination still associate with the Golden Race.
Le mouvement perpétuel à travers les vastes pâturages et leur proximité aux animaux, à la fois domestiques et sauvages, semble leur donner une certaine immunité contre la dégénérescence mais aussi une certaine sagesse spirituelle. Cela peut paraître incompatible, même détestable, aux valeurs de la civilisation sédentaire et, demeure aujourd'hui un anachronisme héroïque, étranger à nos notions du temps et de l'histoire. Dans ces paysages ethnographiques et oniriques habités par des rennes, des ours, des chevaux, des aigles et des loups, les hommes ne sont plus au centre de l'image. Ils ne sont qu'un élément flottant à travers la scène. En fait, sans la compagnie des animaux, la vie ne serait pas possible et l'homme semblerait perdu. Le mysticisme écologique qui relie l'animal à l'homme est l'essence même de la Mongolie cachée. C'est un lieu qui est rattaché aux bêtes qui parlent, et aux voix des ancêtres, un lieu qui éveille le sentiment de guérison et de bien-être mais, qui semble toutefois contraire aux lois des hommes civilisés. Ces compositions iconiques rappellent une phase antérieure de la conscience humaine, à une époque où l'esprit animal escortait l'homme, à travers les barrières physiques et métaphysiques, vers d'autres mondes.
Perpetual movement on the open range and the proximity to animals, both domestic and in the wild, seems to impart on their kind a certain immunity from degeneration - a certain spiritual wisdom, which may appear incompatible, even abhorrent to the values of sedentary civilization, and which today remains a heroic anachronism, alien to our notions of time and history. In these ethnographic dreamscapes inhabited by reindeer, bear, horses, eagles and wolves, humans no longer occupy the centre of the image. They are just one element floating across the scene. In fact, without the animal companion life would not be possible and man would appear lost. The ecological mysticism binding animal and man is the essence of hidden Mongolia; it is a place that is bound up with talking beasts and the voices of ancestors, a place that awakens a sense of healing and well-being, yet something utterly contrary to the laws of civilized men. These iconic compositions harken to an earlier phase of human consciousness, to a time where spirit-animals escorted man across both physical and metaphysical barriers into other worlds. Catching Wild Bull, West Taiga, Hovsgol, Mongolia, 2007 © Sardar, courtesy Photo Vivienne
Deer Totem, West Taiga, Hovsgol, Mongolia, 2008 Š Sardar, courtesy Photo Vivienne
Shaman's Trance, West Taiga, Hovsgol Province, Mongolia, 2007 Š Sardar, courtesy Photo Vivienne
Dans ces paysages ethnographiques et oniriques habités par des rennes, des ours, des chevaux, des aigles et des loups, les hommes ne sont plus au centre de l'image. Ils ne sont qu'un élément flottant à travers la scène. Hamid Sardar-Afkhami est un photographe et cinéaste documentariste primé. Il a obtenu un doctorat en études tibétaines de l'Université d'Harvard spécialisé dans la Mongolie. Il vit actuellement à Paris, en France, et Oulan-Bator, en Mongolie.
Darhat Bear Whisperer, Darhat Valley, Hovsgol Province, Mongolia, 2010 © Sardar, courtesy Photo Vivienne
In these ethnographic dreamscapes inhabited by reindeer, bear, horses, eagles and wolves, humans no longer occupy the centre of the image. They are just one element floating across the scene. Hamid Sardar-Afkhami is a photographer and award-winning documentary filmmaker. He graduated with a PhD in Tibetan studies from Harvard University specializing in Mongolia, and currently lives in Paris, France, and Ulanbataar, Mongolia.
Deermaid, West Taiga, Hovsgol Province, Mongolia, 2009 Š Sardar, courtesy Photo Vivienne
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