Octobre 2015
Once Upon a Time
A New Swiss Knife
roadspirit edito
Jean-pierre pasche Founder & executive editor
Couteau Suisse, Il fallait oser ! Content executive editor Jean-Pierre Pasche editorial assistant Jacques Humbert-Droz Editorial secretary Marie-Judith Bauer Design Tibère de la Borderie Contact redaction: redaction@roadspirit.biz advertising: marketing@roadspirit.biz Administration: direction@roadspirit.biz
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Réinventer le couteau suisse: une gageure. Le couteau suisse est connu partout dans le monde. Il est en première ligne dans les boutiques de souvenirs, en Suisse et ailleurs. Qui n’a pas son couteau suisse dans la poche ? Sans doute encore beaucoup de monde pour que les dirigeants de la société Helvetica Brands investissent dans une version modernisée DU couteau suisse. Ce couteau sera vendu sous la marque centenaire Swiza. Mais pourquoi s’attaquer à une icône de l’industrie suisse? Être jurassien, c’est avant tout un état d’esprit et une fierté. Voir disparaître, les unes après les autres, des sociétés actives dans les domaines de l’horlogerie, du cycle ou de la coutellerie, c’est un véritable crève-coeur, mais qui peut engendrer des réactions positives. Il faut des personnes qui osent s’attaquer à un marché déjà occupé mais obligé d’évoluer pour survivre, qui osent affronter des monopoles réputés inattaquables et réinventer le combat de David contre Goliath. C’est une preuve d’innovation, de courage et démontre le dynamisme d’une région. Il faut bien le reconnaître, les jurassiens ne manquent ni de dynamisme, ni de courage. Cette région pourtant a été plusieurs fois qualifiée de naufragée. Cela n’empêche pas de voir y éclore une quantité de nouveaux projets. Certains meurent dans l’oeuf pour de sombres raisons politico-économiques, mais d’autres au contraire, se développent et parcourent la planète entière. Chapeau bas, Mesdames et Messieurs les Jurassiens de ne pas perdre confiance en vos racines, de renforcer votre volonté d’innover, et ce, dans quelque domaine que ce soit et surtout de croire en vous-mêmes. Jean-Pierre
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Couteau Suisse, pourquoi
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Le couteau suisse: une institution. Que dis-je, un incontournable dans les objets de première nécessité. D’abord lui et après les autres. Une institution vieille de 130 ans, immuable, qui a traversé des générations et des générations sans prendre une ride. Enfin, jusqu’à aujourd’hui. Il fallait que cela arrive un jour. Le couteau suisse évolue, c’est une première mondiale. Et ce n’est pas le fait de son géniteur, Victorinox, mais d’une autre marque suisse, centenaire elle aussi, j’ai nommé Swiza. Comment, vous ne connaissez pas Swiza ! Normal ! Cette marque est relativement discrète et s’est spécialisée dans les réveils et les pendules. Rien à voir avec le couteau suisse.
Mais laissez-nous vous raconter une histoire et découvrir le couteau suisse, modèle 2015 by Swiza et estragon. L’Arc jurassien renferme des trésors. Et pourtant, certains d’entre eux ont disparu à jamais: marques horlogères, vélos ( en 1893) et motos (en 1901) Condor et plus récemment Wenger (en 1893). Pouvez-vous imaginer, pour les personnes originaires de la région de Delémont, ce que cela fait de voir s’éteindre une coutellerie vieille de cent vingt ans ? Il est temps d’agir pour contrer ces pertes. Alors, deux hommes, Peter Hug et Florian Lachat, décident de créer une start-up avec l’ambition de créer un produit fini emblématique, manufacturé dans le Jura et estampillé
personne n’y a pensé plus tôt
Un peu d’histoire... Sans l’armée suisse point de couteau suisse. En effet, celle-ci avait besoin d’un couteau pliant pour ses soldats. Il devait leur permettre de manger et de démonter leur fusil d’ordonnance. A l’époque des Schmidt-Rubin. Les premiers furent livrés par une société allemande. Personne en Suisse n’avait la capacité de production nécessaire. A noter que le premier couteau suisse proposait: une lame, un tournevis plat, un ouvre-boîte et un poinçon. Ce n’est qu’en 1891 que la société Elsener à Ibach pris le relais – elle deviendra la société Victorinox – puis plus tard la société Paul Boéchat & Cie de Delémont – qui deviendra la société Wenger – produisit aussi des couteaux pour l’armée suisse. Dernière information, il existe cinq modèles dont le numéro correspond à son année d’introduction: 1890, 1908, 1951, 1961 et Soldat 08. 2005, Victorinox rachète Wenger. 2013, Wenger disparaît. Le modèle grand public est quant à lui rouge avec l’écusson suisse. Son nom est passé dans le langage courant pour exprimer l’idée de sa multifonctionnalité et de son côté ingénieux. Rappelez-vous l’association entre le Couteau Suisse et McGyver.
Premier couteau de l’Armée suisse, modèle 1890.* * Crédit photo en fin de magazine
Couteau de l’Armée suisse, modèle 1908 (utilisé jusqu’en 1951).*
Couteau de l’Armée suisse, modèle 1961 (utilisé jusqu’en 2008).*
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Swiss Made. Et ce n’est pas tout. Il s’agirait de revisiter un produit déjà existant, d’origine inconnue ou au contraire provenant d’une marque déjà bien installée. Quelle qu’elle soit, elle devra avoir les mêmes racines et les mêmes valeurs d’artisanat et de qualité que la nouvelle start-up. Les deux associés se sont tournés vers la marque plus que centenaire Swiza. Ensemble, ils ont trouvé un partenariat stratégique sur plus de cent ans. Swiza est une marque suisse discrète. Elle est présente sur les marchés du réveil et de la pendule murale. Depuis mars 2015, La Belle Endormie, comme la nomme Florian Lachat, s’est réveillée et a présenté à Baselworld, une collection de cinquante trois nouveaux modèles de montre-bracelet.
La présentation s’est déroulée dans un vieux tramway aux couleurs de la marque Swiza.
Quel rapport avec le couteau suisse ? S’attaquer au couteau suisse est un peu comme vouloir réinventer la roue. Pari très ambitieux de la part de la société Helvetica Brands, détenue par les deux associés. Pour mieux comprendre la démarche, vous devez savoir que Peter Hug est l’ancien CEO de Wenger (l’autre couteau suisse concurrent de Victorinox, disparu en 2013) et Florian Lachat est ce que l’on appelle traditionnellement un Serial Entrepreneur. Donc l’objectif était non pas d’inventer un nouveau type de couteau fermé, mais bien de revisiter le couteau suisse, selon les codes en vigueur dans cette catégorie.
Il a tout d’abord fallu identifier la totalité des différents codes à respecter et se demander comment pouvoir travailler à l’intérieur de ces codes. Il fallait également partir de zéro, oublier le modèle original, tout remettre en question et faire en sorte que le produit fini corresponde au rêve de départ. Une seule certitude: le futur couteau suisse sera rouge avec la croix fédérale. L’ensemble du processus, qui a abouti au lancement officiel le mercredi 21 octobre 2015 à 13h00, a duré dix-huit mois. La première phase, en interne, a permis de définir les critères de base: l’objet sera un bijou, un compagnon au quotidien, sécurisé dans son utilisation et attractif au niveau de son dessin. Dessin qui doit être original et reconnaissable tout en conservant les codes de base du cou-
teau suisse. Et, sans vouloir dérouler tout le cahier des charges, la fonctionnalité des différents outils doit être améliorée. L’étape suivante a alors consisté à trouver un partenaire à la réalisation du design du produit. Ce partenaire a été trouvé en la société estragon, de Zurich, et son fondateur Dirk Fleischhut. Le défi était loin d’être simple: il fallait en effet concilier les ambitions de Swiza – Helvetica Brands – avec la taille de l’objet à réaliser. Dirk Fleischhut comprit tout de suite que ce nouveau couteau suisse s’adressait à des personnes actives se trouvant le plus souvent à l’extérieur. L’objet devait donc être dynamique. Le travail le plus difficile pour l’équipe fut d’oublier tout ce qu’elle savait du couteau suisse. Plus facile à dire qu’à faire ! Point de départ: zéro.
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L’équipe d’estragon devait imaginer une nouvelle forme, qui ressemblerait à un couteau suisse sans être LE couteau suisse. Il fallait également respecter certains impératifs tels la fiabilité, la modernité des composants, la fonctionnalité à toute épreuve des outils, la garantie à vie et l’utilité de l’objet dans n’importe quelle circonstance. Le nouveau couteau suisse Swiza devait être reconnu à une certaine distance. Identifier l’objet comme étant un couteau suisse était important. Dirk et son équipe ont alors délibérément choisi de délaisser ordinateurs et logiciels de dessin pour réaliser les prototypes à l’ancienne: 100% à la main et en trois dimensions.
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Dirk Fleischhut l’a confirmé, travailler en 3D permet d’obtenir un meilleur ressenti, surtout
lorsqu’il s’agit d’un couteau. Le projet a ainsi évolué. Quatre-vingts prototypes ont été façonnés au départ. Il n’en est resté qu’une douzaine. Si les formes paraissaient semblables de proche abord, de nombreux détails les différenciaient comme l’ergonomie ou l’accès aux divers outils. Un détail parmi d’autres voulu par Florian Lachat et Peter Hug: le couteau suisse devait être sécurisant et pouvoir être utilisé tant par un droitier que par un gaucher. Pas à pas, défi après défi, c’est ainsi que s’organisa le travail de toute l’équipe d’estragon pour arriver à présenter un produit prêt à être industrialisé. Mais alors, à quoi ressemble-t-il ce couteau suisse? La première surprise vient du toucher de son revêtement. Il est souple, chaud, et procure une agréable sensation à la main. Cela
va également de pair avec son ergonomie légèrement incurvée. Pour parler technique, le revêtement du couteau suisse Swiza est en thermoplastique élastomère à l’extérieur et thermodur de type polyamide injection à l’intérieur. Nous reviendrons sur ce concept unique développé par Helvetica Brands. Ce matériau est résistant aux rayures, aux frottements, aux chocs et a peu de prise au vieillissement.
Une cinquième couleur (non encore dévoilée) devrait être disponible courant 2016. En regardant de plus près les outils, on voit qu’il existe un onglet traversant. C’est une innovation qu’a proposée estragon pour faciliter l’ouverture des divers outils, sans devoir y laisser un ongle !
Vous pouvez le mettre au lave-vaisselle à 80° C. De plus, de nombreux tests ont permis de constater sa résistance aux UV, y compris pour la couleur blanche.
Vous avez le choix entre deux versions du couteau suisse Swiza: le deux lignes avec onze outils et le une ligne avec 6 outils. A chaque fois dans les quatre couleurs. Selon la version, vous disposerez d’un tournevis cruciforme ou d’un tire-bouchon. A noter que les brucelles ont été entièrement redessinées tant au niveau de l’épaisseur que du biseau.
Pour conclure, le couteau suisse est disponible en quatre couleurs (rouge, blanc, bleu et noir) en hommage aux paysages jurassiens.
Revenons au tire-bouchon, qui révolutionne ce couteau suisse. En effet, la majorité des couteaux fermés (suisses et autres) possèdent
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entre trois et quatre spires. Ce qui occasionne de nombreux bris de bouchon. Celui du couteau suisse Swiza a été développé avec une société italienne – c’est la seule pièce qui ne soit pas suisse – et présente cinq spires comme les tirebouchons de sommelier.
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Tout a été repensé: de l’épaisseur des spires et leur géométrie à l’intégration dans la ligne générale du couteau. De quelque côté que vous regardiez votre couteau, le tire-bouchon ne dépasse pas. Parmi les autres outils disponibles, il y a le poinçon / alêne, le tournevis plat, le décapsuleur, l’ouvre-boîte, etc. Quelques mots sur la lame proprement dite. Elle est en acier spécifique 440 et présente une résistance au-dessus des standards. Épaisse de deux millimètres, cette lame possède un processus d’affilage propre à la marque Swiza. Le tranchant sur la surface de la lame provient du système d’aiguisage et l’affilage ensuite donne du tranchant au fil de la lame. Helvetica Brands a choisi le même système d’affilage que sur les couteaux professionnels, ceux des bouchers par exemple. Alors, gare aux doigts ! Quelques informations maintenant sur la côte (les côtés) du couteau suisse Swiza. Le choix du matériau - thermoplastique élastomère à l’extérieur et thermodur de type polyamide injection à l’intérieur – est primordial car il permet à Helvetica Brands de personnaliser le couteau en interne. En effet, 40% du marché va au couteau suisse personnalisé, pour une entreprise, une association, un club, etc. Ce type de commande demande une grande réactivité et sous-traiter le marquage à l’extérieur augmenterait le délai de livraison. D’où le choix d’investir dans une presse à injection bi-matières et bi-couleurs.
Non seulement, cette machine peut traiter les deux matières en même temps, alors qu’elles possèdent des propriétés mécaniques différentes, mais de plus le système de blocage / déblocage de la lame est conçu en même temps dans la masse. Cela procure une étanchéité maximum pour cette fonction. La personnalisation peut être effectuée sur les deux faces et vous pouvez demander votre propre couleur. La production – 10 000 pièces pour le lancement – va croître progressivement pour arriver à plusieurs centaines de milliers de pièces par jour. Pour compléter notre dossier, vous devez savoir que Helvetica Brands développe de nouveaux projets en marge du couteau suisse Swiza. Outre les montres, qui seront présentées à Baselworld 2016, vous découvrirez des produits de bagagerie, des vêtements et des chaussures. Helvetica Brands veut être en adéquation avec son ADN et respecter son slogan: Every day can be an adventure (chaque jour peut être une aventure). La dernière innovation en date est un sac à dos spécialement conçu pour transporter un drone. C’est une niche à laquelle personne n’a encore pensé. Souhaitons-leur un franc succès pour cette nouvelle aventure. Pour plus informations, visitez le site de Swiza. Vous y trouverez la liste des revendeurs et pourrez également effectuer des achats en ligne.
*Référence des photos des modèles de couteaux suisses: Premier couteau de l’Armée suisse, modèle 1890. « Wester & Co 2 » par Cutrofiano — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Wester_%26_Co_2.JPG#/media/File:Wester_%26_Co_2.JPG Couteau de l’Armée suisse, modèle 1908 (utilisé jusqu’en 1951). « SAK 1951 » par Ivlianvs — Travail personnel. Sous licence Domaine public via Wikimedia Commons https://commons.wikimedia.org/wiki/File:SAK_1951.JPG#/media/File:SAK_1951.JPG Couteau de l’Armée suisse, modèle 1961 (utilisé jusqu’en 2008). « Swiss Army Knive opened » par Simon A. Eugster — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Swiss_Army_Knive_opened.jpeg#/media/File:Swiss_Army_Knive_opened.jpeg