Envue n°31: Innover pour survivre

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31 U N E I N I T I A T I V E D ’ E Y E N PA R T E N A R I A T A V E C E C H O C O N N E C T E T T I J D C O N N E C T | 1 9 J U I N 2 0 1 5

6 mégatendances qui révolutionnent le monde des affaires

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Comment en bénéficier?

Des formation et des logiciels pour l’innovation ouverte

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Interview de Hein De Keyzer, CEO CogniStreamer.

10 L’entonnoir de l’innovation, de l’idée au lancement

Quelle est la vision des pouvoirs publics sur les subsides?

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Interview de Veerle Lories (IWT), Katrien Mondt (Innoviris) et Daniel Collet (DGO6) au sujet de l’aide à l’innovation

Innover pour survivre

Thomas Sileghem, EY Advisory Lead Belgique et Pays-Bas © Wim Kempenaers

La manière dont nous gérons nos entreprises évolue à un rythme effréné. Nous l’illustrons dans ce cahier avec six mégatendances. Elles démontrent clairement que le business as usual ne suffit plus. Jouer pleinement la carte de l’innovation est la seule option. Une option parfaitement viable, mais à condition de combiner quatre facteurs de succès: une culture d’entreprise créative, qui s’inscrive dans la stratégie de la société, qui considère l’innovation comme un processus de bout en bout et, last but not least, qui accorde suffisamment d’attention au financement. Dans une interview avec son CEO, Hein De Keyzer, nous nous concentrons sur CogniStreamer, une plateforme logicielle qui soutient l’innovation collaborative, de l’idée au lancement. Nous passons ensuite en revue des thèmes comme l’innovation ouverte et le modèle en entonnoir. Et avec Bekaert, vous apprendrez comment le producteur de fils d’acier de haute technologie intègre l’innovation dans sa stratégie d’entreprise. Enfin, vous découvrirez, dans un entretien mené auprès des directeurs des agences régionales en charge de l’innovation, la vision des pouvoirs publics quant à l’aide à l’innovation, et le rôle du capitalrisque dans un trajet d’innos n vation réussi. Des questio Autant de sur ce sujet? ez sources it a h u Vous so d’inspiration t n égaleme pour vous inciter à consulter ce ne? g mettre le dossier en li cap sur .be/envue l’innovawww.lecho tion.


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TENDANCES

Préambule

LES 6 MÉGATENDANCES QUI RÉVOLUTIONNENT LE MONDE DES AFFAIRES

Ancrez l’innovation dans votre entreprise Nous vivons une ère révolutionnaire, où des forces transformatrices globales façonnent l’avenir par leur énorme impact sur les entreprises, les économies, les industries, les pays et les êtres humains. Des innovations technologiques et numériques réécrivent les lois fondamentales selon lesquelles les entreprises fonctionnent, et les hommes et les femmes organisent leur vie. Dans ce monde, l’accélération permanente du changement est l’une des rares constantes. Des modèles d’affaires disruptifs comme ceux d’Uber et d’Airbnb voient le jour et modifient des pans entiers de l’économie en un minimum de temps. Le business as usual n’est pas une option. Plus que jamais, s’arrêter, c’est reculer. Et même l’innovation progressive, portée par la technologie, ne suffit plus. La seule solution consiste à miser pleinement sur le développement de nouveaux modèles d’affaires, à privilégier l’innovation collaborative, ouverte, et à placer réellement le client au centre des préoccupations, en l’impliquant au maximum dans le procesL’innovation sus d’innovation. progressive, Brian Junling Li, portée par la vice-président technologie, du géant chinois de l’Internet Aline suffit plus. baba Group, a le sens de la formule: «L’innovation ne provient pas de projets organisés. Elle trouve son origine dans notre faculté à embrasser les incertitudes à venir.» Dans ce cahier, nous vous proposons des outils et des idées qui vous aideront à ancrer l’innovation dans votre entreprise. Faites-en le meilleur usage possible!

Innover: plus que jamais une nécessité absolue La crise économique freine la croissance et érode les marges. L’épargne n’apporte pas de solution. Cela dit, l’innovation offre des possibilités insoupçonnées, appelées à modifier en profondeur les pratiques commerciales au cours des décennies à venir. Analyse des six mégatendances aux sources de cette révolution.

Six mégatendances déterminent non seulement la manière dont vous gérerez vos affaires demain, mais également à quoi ressemblera le monde.

ENTREPRENEURIAT

SANTÉ

82% des lauréats de l’Entreprise

On recense déjà plus de

de l’Année® déclarent que l’innovation est la première source de croissance.

20.000 applications mobiles liées à la santé.

2015 2020

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Rudi Braes, CEO et président d’EY Belgique et Pays-Bas

Colofon Une initiative d’EY Wouter Desmet - associé EY Subsidia Marc Guns - associé EY Transaction Advisory Services Franky De pril - associé EY Tax Consultants Thomas Sileghem - EY Advisory Lead Belgique et Pays-Bas Alexander Mol - manager EY Advisory Editeur responsable: Marc Cosaert, associé EY Transaction Advisory Services

SUPPLÉMENT en collaboration avec EY

www.ey.com/be/envue Suivez EY sur twitter: twitter.com/EY_Belgium Tél.: 02 774 91 11 Une réalisation de Mediafin Publishing Coordination: Tim De Geyter, Veronique Soetaert Rédaction: Mediafin Lay-out: David Steenhuyse Photographes: Thomas De Boever, Emy Elleboog, Wim Kempenaers, Shutterstock Info? publishing@mediafin.be

Coordination EY: Anne-Sophie Jaspers CONNECT

L’entrepreneuriat a le vent en poupe

Les entreprises qui saisissent les opportunités liées à l’évolution numérique seront les grandes gagnantes de demain. Celles qui s’en montrent incapables risquent de tout perdre. Le facteur de succès par excellence réside dans l’innovation collaborative. Ouverte, elle implique une refonte culturelle axée sur l’entrepreneuriat à fort impact et la créativité, deux facteurs qui exercent une influence de plus en plus prégnante sur la croissance et la prospérité mondiales.

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La santé fait peau neuve

Technologie mobile, démographie et pression sur les coûts: ces trois forces convergent pour transformer les soins de santé en profondeur. L’explosion des mégadonnées (Big Data) et de la technologie médicale mobile permet de collecter et de traiter des informations sur notre santé en temps réel. L’accent est placé sur un mode de vie sain, la prévention et des soins là aussi en temps réel. Une pléthore de nouveaux acteurs flexibles se profile aujourd’hui sur ce marché lucratif.


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L’avenir sera numérique

La convergence des médias sociaux, du mobile, du cloud et des mégadonnées modifie la manière dont les affaires se traitent aux quatre coins de la planète. Des tendances comme l’Internet des objets, le Big Data, l’impression 3D et les drones offrent des possibilités insoupçonnées de pénétrer de nouveaux marchés et de développer des produits et modèles d’affaires innovants. Cette révolution apporte toutefois son lot de défis: nouvelle concurrence, évolution des attentes des clients, exigences inédites en termes de transparence, de respect de la vie privée et de cybersécurité.

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TENDANCES

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La mondialisation dope les pays émergents

La forte croissance économique à l’Est et au Sud est soutenue par la demande d’une classe moyenne émergente. Des start-ups s’engouffrent dans la brèche en proposant produits et services à moindres coûts adaptés aux nouveaux besoins de celle-ci. Les entreprises qui nourrissent des ambitions internationales doivent en tenir compte en innovant dans leurs processus, en faisant preuve de flexibilité dans la mise en œuvre de leur stratégie et en explorant des sources de financement alternatives.

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Une urbanisation galopante

L’urbanisation rapide des marchés émergents et matures est dans le collimateur des multinationales avides de nouveaux débouchés. Or, pour soutenir cette urbanisation en pleine explosion, il est urgent d’assurer la répartition des revenus et d’investir dans l’infrastructure, l’approvisionnement alimentaire et les soins de santé.

Une gestion innovante de notre planète

La demande croissante et l’évolution de l’offre stimulent l’innovation dans le secteur de l’énergie et des matières premières. Résultat? Une meilleure exploitation des ressources, tant traditionnelles que nouvelles. Toutefois, les évolutions écologiques, géopolitiques et économiques continueront de perturber la chaîne d’approvisionnement. Les entreprises capables de les gérer de manière innovante pourront ainsi se distinguer de la concurrence.

URBANISATION D’ici à 2030, les 750 plus grandes villes du monde accueilleront 220 millions de consommateurs supplémentaires issus de la classe moyenne.

MONDIALISATION La part des marchés émergents dans le PIB mondial passera de 38% en 2014 à 63% en 2030.

2020

2030

2035

NUMÉRIQUE

ÉNERGIE

L’Internet des objets reliera plus de 50 milliards d’appareils et capteurs en 2020.

La demande d’énergie augmentera de 33% d’ici à 2035. Il est nécessaire d’investir 420 milliards pour améliorer l’efficacité énergétique.

Conclusion

Thomas Sileghem EY Advisory Lead Belgique et Pays-Bas +32 (0)2 774 95 36 thomas.sileghem@be.ey.com

Ces six mégatendances détermineront la manière dont nous gérerons nos entreprises au cours des décennies à venir. Voulez-vous en bénéficier? Concentrez-vous dès maintenant sur l’innovation. Et adoptez un regard holistique. Comment? En plaçant l’innovation au faîte des priorités de votre stratégie d’entreprise, de votre modèle d’affaires et de vos processus. Ancrez la créativité, l’ouverture, l’entrepreneuriat et la réflexion innovante dans la culture de votre entreprise. Considérez l’innovation comme un processus ouvert et flexible. Impliquez également des experts externes, des instituts de connaissances, des fournisseurs de capital-risque et d’autres entreprises. Prévoyez du temps, de l’espace et surtout des moyens pour expérimenter. Enfin, explorez des pistes de financement externes comme le crowdfunding, le capital-risque et les mesures d’aides publiques.


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L’INNOVATION OUVERTE

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OUTILS ET STRATÉGIES POUR UNE INNOVATION COLLABORATIVE

Stratégie, culture et processus comme colonne vertébrale L’innovation collaborative et ouverte est plus efficace mais aussi plus complexe que l’innovation fermée traditionnelle. Une attention suffisante à son alignement sur la stratégie d’entreprise, la création d’une culture de l’innovation, l’utilisation d’outils adéquats et la délimitation des partenariats sont dès lors indispensables.

’efficacité de l’innovation ouverte dépend entièrement de son alignement sur la stratégie de l’entreprise. Il faut donc développer celle-ci de façon à ce qu’elle soit aisément déclinable en stratégie d’innovation. Pour y parvenir, il est indispensable de définir clairement six paramètres: l’ambition, la contribution, l’accent, la politique de partenariat, l’approche et les critères d’évaluation de et pour l’innovation. L’ambition détermine l’importance des activités liées à l’innovation dans la stratégie de l’entreprise. Elle définit le type d’innovation souhaité, comme le pourcentage d’innovations radicales par rapport aux innovations incrémentales. Par contribution, nous entendons la contribution que doivent apporter les activités d’innovation à la croissance et au renforcement de la compétitivité de l’entreprise. Par exemple en entraînant une augmentation du chiffre d’affaires ou des marges, ou en permettant le développement de nouvelles activités opérationnelles ou de nouveaux produits sur des marchés nouveaux ou existants. En définissant l’accent, vous identifiez les éléments du modèle d’affaires qui seront influencés par les activités liées à l’innovation. Pensez par exemple aux groupes cibles, aux canaux de distribution, aux produits ou services proposés... Un accent clairement défini contribue à établir le rapport entre l’innovation au niveau du produit et l’innovation au niveau du processus, et précise les technologies qui doivent être

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© Shutterstock

L’intrapreneuriat est la clé du développement d’une culture d’entreprise innovante.

explorées. Résultat? Un portefeuille d’innovations, assorti d’un budget et d’un calendrier, parfaitement aligné sur les objectifs de l’entreprise. La politique de partenariat souligne l’importance des collaborations, qui sont monnaie courante dans les trajets d’innovation ouverts. La vision des différents types de collaboration doit être définie avec précision. Privilégiera-t-on l’outsourcing, l’innovation conjointe ou un autre type de partenariat? Et selon quels critères seront-ils sélectionnés? L’approche établit les lignes de force du processus d’innovation. Elle détermine notamment les outils et les ressources humaines qui y sont alloués, mais aussi les formes de financement auxquelles vous pouvez faire appel et la manière dont vous comptez gérer les questions inhérentes à la propriété intellectuelle. Enfin, vous devez, pour chaque étape du processus d’innovation, établir des critères d’évaluation. Il est important que ceux-ci soient toujours pertinents et mûrement réfléchis. Car ils constituent les bases sur lesquelles les innovations seront évaluées et sélectionnées. En définissant ces éléments étape par étape, une entreprise parviendra à adapter l’innovation à ses ambitions réelles. Ce processus contraindra également l’entreprise à réfléchir au degré d’ouverture nécessaire pour ses processus d’innovation.

innover à un niveau supérieur. En d’autres termes, l’intrapreneuriat est la clé d’une culture d’entreprise innovante. Pour favoriser l’intrapreneuriat, vous avez tout intérêt à faire de l’innovation une priorité et à l’inclure dans les objectifs annuels de chaque collaborateur. Bien entendu, l’ensemble du management doit encourager l’esprit d’entreprise des collaborateurs. La meilleure pratique consiste à laisser à ceux-ci la marge de manœuvre – par exemple 10 à 15% de leur temps – indispensable à l’épanouissement de leur esprit d’entreprise et au développement de leurs idées. Il est cependant crucial de structurer suffisamment cette liberté, afin que la créativité et l’esprit d’entreprise s’inscrivent dans votre stratégie. Pour élargir l’horizon de vos collaborateurs, vous pouvez organiser des formations en créativité et des brainstormings tous azimuts. Personne n’est aussi proche du marché et ne connaît aussi bien vos produits et services que vos collaborateurs. Ils sont votre principale source de nouvelles idées. Assurez-vous de leur loyauté, stimulez leur confiance et leur implication et récompensez surtout leur créativité. Car vos collaborateurs gagneront en implication et en performance s’ils sont récompensés pour participer aux réflexions sur l’avenir de leur entreprise.

Intrapreneuriat

Collaboration

Esprit d’entreprise, volonté d’innover et créativité hissent la capacité à

La collaboration avec des partenaires internes et externes est un élément


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L’INNOVATION OUVERTE

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central de l’innovation ouverte et collaborative. Elle doit être soutenue par des lignes stratégiques et des procédures destinées à encadrer et clarifier les rôles et responsabilités de chacun dans le processus d’innovation. Cela apportera de la transparence et de la structure, ce qui permettra aux acteurs de concentrer leur énergie sur le cœur du problème. Vous préciserez les collaborations avec des partenaires externes dans un contrat clair qui définira les objectifs de la collaboration, sa planification, le partage de connaissances, les questions de propriété intellectuelle et les éventuelles stratégies de sortie possibles.

Outils L’innovation collaborative tranche avec l’innovation fermée par sa nature beaucoup plus imprévisible, dynamique et complexe. Elle exige donc une approche différente, dans laquelle plusieurs outils sont indispensables. Ainsi, vous mesurerez la performance du processus d’innovation dans un tableau de bord formel. Les récentes recherches consacrées aux indicateurs-clés de performance (KPI) de l’innovation ouverte ont identifié cinq mesures importantes. En première position, on trouve le temps consacré au suivi des activités liées à l’innovation par le management supérieur. Le deuxième KPI est le pourcentage du chiffre d’affaires généré par les nouveaux clients acquis grâce aux

L’innovation ouverte dépend entièrement de son alignement sur la stratégie de l’entreprise.

innovations récentes. Un troisième critère intéressant réside dans le nombre d’idées sélectionnées par rapport au nombre d’idées proposées. Il est également crucial de mesurer le délai de réalisation et le coût de commercialisation d’une innovation. Le dernier KPI mesure le temps que consacrent vos collaborateurs à l’innovation. Autre outil indispensable: une plateforme d’innovation collaborative faisant office de catalyseur pour le processus d’innovation ouvert. Un tel logiciel est susceptible de créer un workflow itératif de sélection, d’évaluation et de traitement des idées. La transparence et un système de feedback clair favoriseront l’implication et la poursuite du développement des idées. Les utilisateurs de la plateforme développent leurs idées mutuelles et peuvent ainsi les enrichir, ce qui permet d’obtenir des idées de meilleure qualité. La “sagesse des foules” est ainsi exploitée au maximum. Un tel outil peut contribuer à une gestion plus ciblée et transparente des connaissances provenant de l’inté-

rieur et de l’extérieur de l’organisation dans une banque d’idées structurée. C’est également un énorme stimulant pour l’intrapreneuriat. Une plateforme d’innovation collaborative offre en outre la possibilité de rationaliser la collaboration dans et avec de larges groupes de participants internes et externes, indépendamment de leur localisation, de leur expertise et de leur background. Tirez également parti des précieux rapports sur les processus d’innovation qui sont générés par une telle plateforme, par exemple pour préparer des demandes de brevets ou de subsides. En d’autres termes, les plateformes d’innovation collaborative sont davantage que des outils de génération d’idées: elles constituent la colonne vertébrale d’une gestion efficace d’un processus d’innovation intégral, et stimulent une culture d’innovation ouverte. Alexander Mol manager EY Advisory +32 3 270 4580 alexander.mol@be.ey.com


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FORMATION ET LOGICIEL

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© Wim Kempenaers

COGNISTREAMER, FACILITATEUR DE TRAJETS D’INNOVATION

L’innovation ouverte, un processus maîtrisable

Les entreprises sont de plus en plus convaincues de la nécessité d’adopter une approche structurée en matière d’innovation. CogniStreamer facilite les trajets d’innovation collaboratifs avec des modules logiciels, des formations et des accompagnements de projet. Hein De Keyzer, son CEO, en compagnie de Thomas Sileghem d’EY, lèvent un coin du voile.

À gauche: Hein De Keyzer À droite: Thomas Sileghem


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FORMATION ET LOGICIEL

puis portent éventuellement vers la phase suivante du processus. En connectant aussi étroitement des personnes et des idées, on obtient le terreau idéal pour faire prospérer l’innovation.”

Quelle est l’idée sous-tendant l’innovation ouverte ou collaborative? Hein De Keyzer: “Toute entreprise dispose d’un énorme stock de connaissances dont elle n’exploite généralement qu’une infime fraction. L’innovation peut certes naître spontanément, mais cela demande du temps. Innover, c’est mettre en relation des connaissances, et ces connaissances se trouvent dans la tête des personnes. Il faut donc faire en sorte que les idées puissent se croiser de manière structurée. Vous intensifierez énormément le processus d’innovation si vous vous focalisez sur ce processus et que vous l’ouvrez, à la fois au sein et à l’extérieur de l’entreprise.” Comment aidez-vous les entreprises à ouvrir leurs processus d’innovation et à en faire une priorité? De Keyzer: “Nous avons analysé les processus d’innovation, incrémentale comme disruptive, qu’elle soit poussée par la technologie ou tirée par le marché, et étudié les interactions entrant en ligne de compte. Nous avons identifié quelque 150 étapes dans le processus d’innovation, mais grosso modo, il s’agit à chaque fois de mettre en relation les bonnes personnes et les bonnes idées. C’est à partir de cette constatation que nous avons développé notre plateforme logicielle et nos services. Il s’agit de capter des idées, mais surtout de les sélectionner et de les valoriser, de stimuler et de développer des clusters d’idées et d’accompagner les concepts jusqu’à leur concrétisation.” Quelle technologie utilisez-vous dans ce cadre? De Keyzer: “Nos modules logiciels exploitent pleinement les innombrables possibilités de l’Internet, du Big Data et des médias sociaux pour approfondir et élargir la collaboration. Nous y ajoutons une couche de technologie sémantique, une sorte d’intelligence artificielle qui découvre des liens entre des données qui n’ont aucun rapport entre elles à première vue. Nous fournissons à des personnes motivées, qui partagent une même vision, les outils adéquats pour collaborer à l’innovation par un échange d’idées, d’informations et de tâches.” Comment ce processus se déroule-t-il en pratique? De Keyzer: “Imaginez que deux collaborateurs, l’un en Chine et l’autre au Brésil, travaillent indépendamment à un nouvel emballage de shampoing. La couche sémantique de CogniStreamer attribue automatiquement à leurs contributions des mots-clés pertinents dans la base de données des connaissances de l’entreprise. Dans la pratique, elle le fait en recherchant des liens signifiants. Un lien est découvert? Les personnes concernées sont invitées à évaluer leur apport mutuel et à examiner si elles ont des informations pertinentes l’une pour l’autre, voire si elles connaissent un autre expert qui possède éventuellement ces informations. Le système fonctionne également top-down: les Innovation Managers peuvent lancer un défi. Les experts pertinents de toutes les branches de l’entreprise sont automatiquement invités à y réagir. Des clusters d’idées et des possibilités de collaboration naissent de cette façon, que les Innovation Managers et les modérateurs de la plateforme soutiennent et accompagnent,

“Pour innover efficacement, il vous faut des outils de qualité afin de structurer le processus.” Hein De Keyzer, CEO de CogniStreamer

Comment ce processus se présente-t-il concrètement pour une entreprise qui commence à utiliser CogniStreamer? De Keyzer: “Le projet le plus typique est l’intégration de l’innovation durable dans l’entreprise. Ce processus se déroule en trois phases. Au cours d’une formation de deux jours, nous commençons par expliquer les mécanismes d’un processus d’innovation, de sorte que l’Innovation Team comprenne les mécanismes qui sous-tendent l’innovation et que chacun parle la même langue. Puis nous définissons les premiers défis, qui s’inscrivent dans le prolongement de la stratégie de l’entreprise. Dans une deuxième phase, nous adaptons le logiciel au style maison et l’intégrons dans le système IT. Troisièmement, nous accompagnons l’Innovation Team dans la gestion et le suivi de ces premiers défis sur la base de notre expérience pratique. Après cette phase d’essai qui dure environ six mois, le client est capable de gérer luimême la plateforme, et le processus peut être ouvert à toute l’entreprise.” L’innovation ouverte, c'est aussi innover par-delà les murs de l’entreprise. Comment facilitezvous cette ouverture? De Keyzer: “Dans les trajets de cocréation, nous aidons les clients dans la constitution d’une communauté d’experts aptes à travailler ensemble à l’innovation. Nous avons entretemps développé notre propre réseau de départements de design dans 25 universités, qui collaborent activement aux trajets d’innovation que nous accompagnons. Nous travaillons ainsi depuis trois ans en étroite collaboration avec Procter & Gamble, l’un des précurseurs du crowdsourcing, autour du design. Sept innovations sont nées de cette collaboration, dont plusieurs sont mûres pour le marché. Si vous souhaitez innover de manière radicale, vous ne pouvez le faire de façon isolée. En revanche, si vous collaborez par-delà les murs de l’entreprise, la sécurité et les droits de propriété intellectuelle constituent

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autant d’aspects délicats. Notre plateforme dispose de mécanismes de sécurité solides qui peuvent être paramétrés en toute flexibilité. Une autre manière de sortir des murs de l’entreprise est de s’associer à des sources de connaissances externes. Nous proposons ainsi un module qui parcourt une base de données de brevets en amont du processus pour vérifier si des innovations semblables ont déjà été brevetées, afin d’éviter tout frais inutile. Un autre outil veille à ce que les demandes de brevets puissent être introduites au bon moment.” Comment envisagez-vous l’avenir de CogniStreamer? De Keyzer: “CogniStreamer est né d’une mission pour le département R&D de Bekaert, qui désirait un outil pour soutenir ses processus d’innovation. Nous existons sous la forme d’une entreprise indépendante depuis 2011. J’ai vu l’innovation collaborative gagner en maturité très rapidement. Nous avons débuté avec un bureau à Courtrai; nous sommes désormais implantés à Paris, aux ÉtatsUnis et en Inde, avec une myriade de grands clients internationaux en portefeuille. Des entreprises comme Bekaert, Case New Holland, ING, Bpost, KBC, Alcatel-Lucent, L’Oréal, BNP Paribas Fortis, Eastman, AB InBev, Heineken et le groupe indien L&T nous font confiance. Durant cet exercice, nous allons plus que doubler notre chiffre d’affaires à environ 1,5 million d’euros. Nous nous donnons trois ans pour rejoindre les leaders de notre branche, qui enregistrent un chiffre d’affaires de quelque 10 millions d’euros. Cet objectif semble ambitieux, mais nous avons de bonnes références. Les bureaux de recherche Forrester et Gartner nous classent dans le Top 3 des logiciels d’innovation. Notre plateforme est le catalyseur de quelque chose de beaucoup plus grand: l’accompagnement et la gestion de trajets d’innovation complets. À présent que le marché découvre l’innovation ouverte, nous avons besoin de partenaires solides pour soutenir notre croissance. C’est pourquoi nous nous sommes alliés avec EY afin de concevoir et d’implémenter les meilleures solutions. Notre vision est identique dans ce domaine. Nous fournissons la plateforme, eux les consultants. Nous sommes prêts pour l’avenir.”



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STRATÉGIE D’ENTREPRISE

T RA NSFORM EZ VOS M ODÈ LE S D’A F FAI RE S

Basculer en douceur vers l’innovation ouverte ’

évolution rapide du contexte international modifie la manière dont les entreprises gèrent leurs affaires. Placer l’innovation au centre de sa stratégie d’entreprise est désormais une question de survie. Ce ne sera possible que si votre organisation, unie sous la bannière d’une même vision, joue pleinement la carte de la créativité et de l’ouverture. Nous sommes au cœur d’une révolution des technologies et des données qui change fondamentalement les marchés et les attentes des clients. De nouveaux modèles d’affaires disruptifs comme Uber et Airbnb voient le jour et transforment des secteurs entiers en un temps record. Le résultat? Une pression constante sur les entreprises, contraintes d’intégrer l’innovation au sein de toutes leurs activités. Pour réussir dans un environnement aussi instable, il convient de développer un modèle d’innovation flexible qui contribue à réinventer vos modèles d’affaires. Seules les entreprises qui placent l’innovation au cœur de leurs expériences, de leurs processus et de leurs modèles d’affaires remporteront la course. Le délai de commercialisation et la transformation du vécu des clients revêtent ici une importance cruciale.

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Stratégie Si vous n’inscrivez pas l’innovation dans votre stratégie opérationnelle, c’est souvent un département qui prendra les choses en main – généralement le département R&D dans les entreprises de production. De nombreuses entreprises maîtrisent bien cette forme d’innovation portée par la technologie, où le modèle en entonnoir prouve pleinement son efficacité. Toutefois, il n’en résulte généralement que des innovations incrémentales qui, dans le monde actuel, ne suffisent plus. Pour survivre, il faut remettre en cause et renouveler plus souvent et plus fondamentalement vos stratégies et modèles d’affaires. Cela passe non seulement par une implication de tous les acteurs de l’entreprise dans l’innovation, mais également par l’ouverture du processus à l’extérieur de l’entreprise.

acteurs travaillent en étroite collaboration avec leurs fournisseurs. Certaines idées qui ont jailli de l’extérieur sont ainsi intégrées dans le processus de R&D. Ce concept est aujourd’hui radicalisé et étendu. Cette fois, c’est surtout le client qui est impliqué dans le processus d’innovation. L’accent de nombreux projets d’innovation à succès n’est pas placé sur la technologie, mais sur une innovation initiée par le client (downstream). Celui-ci, enfin positionné en tête des préoccupations, joue un rôle aussi majeur que possible dans le processus, de la naissance de l’idée au feed-back sur les prototypes et à la mise en œuvre, en passant par la sélection de propositions. Néanmoins, la véritable innovation collaborative dépasse l’ouverture aux seuls clients et fournisseurs. Les experts externes, les instituts de connaissances, les bailleurs de capital-risque et d’autres entreprises peuvent être utilement inscrits dans le processus d’innovation. Une telle ouverture apporte une bouffée d’oxygène à l’innovation: les idées peuvent circuler et être testées librement, et le feed-back recueilli auprès de différents partenaires très en amont du processus. À condition, naturellement, de se montrer prudent avec les questions de propriété intellectuelle – mais il existe des outils ad hoc pour cela.

ADN La réussite d’une innovation dépend entièrement de l’ancrage de la créativité et de l’ouverture dans l’ADN de votre entreprise. Pour y parvenir, une vision globale qui porte l’ensemble de l’or-

“Seules les entreprises qui placent l’innovation au cœur de leurs expériences, de leurs processus et de leurs modèles d’affaires remporteront la course.”

Ouverture

ganisation est indispensable. Chez EY, cette vision a pour nom "Building a better working world". Tout ce que nous faisons s’inscrit dans ces principes. Elle stimule tous nos collaborateurs à rester focalisés et à innover en permanence.

L’innovation ouverte est le fruit d’une évolution tendant à opérer davantage par-delà les murs de l’entreprise. Dans le secteur automobile, cela fait plusieurs décennies que de nombreux

Markus Heinen, EY EMEIA Strategy Services Leader © DOC


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CHEMINEMENT

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U NE AT T EN T ION P OUR LE FI NANC E ME N T E ST C RUC IALE

L’entonnoir de l’innovation, de l’idée Sans innovation, votre entreprise n’a aucun avenir. Il est dès lors essentiel d’adopter une approche rationnelle et efficace. C’est possible en organisant votre processus d’innovation selon un modèle en entonnoir, qui exige de consacrer une attention suffisante au financement de chaque phase.

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LE CHEMINEMENT DE L’INNOVATION Recherche de base

L’entrée de l’entonnoir, c’est le monde au sens large, où se développent de nouvelles technologies, possibilités et tendances. Chercheurs et trendwatchers surveillent attentivement les nouveaux développements dans les instituts de connaissances, chez les concurrents, sur le marché et auprès des clients. Leurs conclusions sont consignées dans des rapports, puis rendues publiques lors de conférences ou dans des livres blancs, et pénètrent ainsi dans l’entreprise. Là, elles forment les stimuli initiaux de l’innovation.

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Sélection et évaluation

Dès que le moteur à idées s’est mis en marche, tout l’art consiste à séparer le bon grain de l’ivraie. C’est un exercice d’équilibriste: des idées trop nombreuses et sauvages alourdissent inutilement le processus; des idées trop rares et conservatrices tarissent la source.

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Génération d’idées

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Génération d’idées

Alimentées par la première étape, les idées bouillonnent au sein de l’entreprise. Votre capacité à innover dépend totalement de la réaction de vos collaborateurs aux nouvelles idées. La culture d’entreprise est donc primordiale. Les idées ne peuvent rester confinées dans le cerveau des collaborateurs: elles doivent trouver le chemin de cet entonnoir. Car la commercialisation réussie de quelques innovations de qualité nécessite un afflux d’idées suffisamment important. Il convient de favoriser et soutenir la créativité de vos collaborateurs.

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Recherche de base

Un trop grand nombre de projets d’innovation se heurtent à des problèmes liés à leur financement.

Sélection et évaluation

Fabrication d’un prototype

Mise en œuvre

Auparavant, la sélection était la tâche d’une poignée de spécialistes de l’innovation. Cette époque est révolue. Désormais, le processus de sélection et d’évaluation est de préférence collectif, itératif et ouvert. Impliquez autant de connaissances que possible dans cette phase du processus. Demandez à vos collaborateurs et à des partenaires externes de sélectionner les idées, de les évaluer, mais surtout de les adapter et de les améliorer systématiquement. Plusieurs outils intéressants peuvent être utiles dans cette phase. CogniStreamer, partenaire d’EY, propose dans ce cadre une excellente plateforme (voir article pp. 6-7). Les subsides et les instruments de financement apportent également une valeur ajoutée dans cette


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au lancement phase. Si vous sollicitez le marché des capitaux spécialisé à un stade précoce, vous recevrez immédiatement le feed-back d’experts sur la valeur de vos idées. Le crowdfunding est lui aussi un instrument intéressant. Intégrez ainsi un reality check: le monde extérieur est-il intéressé par vos idées? Cette démarche pourra vous éviter de grossières erreurs. Bien entendu, la propriété intellectuelle représente également un aspect important dans cette phase. Vos idées laissent-elles une liberté d’action suffisante? Est-il possible de les protéger? Les brevets peuvent apporter une plus-value offensive, défensive et fiscale, qui sera si possible prise en compte dès la phase de sélection.

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Fabrication d’un prototype

Dans cette phase de l’entonnoir, il s’agit de planifier, de développer et de tester les idées les plus prometteuses et les plus matures. Optez pour une planification itérative et réaliste qui comporte le plus grand nombre possible de contrôles intermédiaires. De nombreux starters restent trop longtemps isolés. Travaillez d’abord à une version aussi simple que possible du produit, un "produit minimum viable", et recueillez rapidement le feed-back d’experts externes, de clients potentiels et de bailleurs de fonds. Tirezen des enseignements et retournez à la table à dessin, ajoutez progressivement des fonctions et confrontez-les chaque fois à la réalité. Tenez toujours compte des instruments de financement lors de la planification et du phasage. Il existe des instruments adaptés aux différentes phases du développement, par exemple pour l’élaboration d’un prototype du produit minimum viable. Dans cette phase, EY peut notam-

Wouter Desmet associé EY Subsidia +32 (0)9 242 51 06 wouter.desmet@be.ey.com

ment aider une entreprise à trouver des subsides, des partenaires externes et des experts, afin de lui permettre de se concentrer sur le cœur du processus.

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Mise en œuvre

Le processus d’innovation ne s’arrête pas à la fabrication d’un prototype réussi: l’innovation doit encore être mise en œuvre. Le démarrage de la production et des ventes est la phase qui exige le plus de capitaux. On la surnomme d’ailleurs la "vallée de la mort": à ce moment, le niveau de risque est trop faible pour être subventionné par les pouvoirs publics, alors que les investisseurs traditionnels n’apportent de fonds que dans la phase de croissance. Cette phase sonne le glas de très nombreuses start-ups. Heureusement, investisseurs et pouvoirs publics ont pris conscience de cette lacune dans le processus de financement. Les seconds ont déjà lancé plusieurs initiatives, et de grands business angels et autres fonds d’investissement s’y montrent de plus en plus actifs. Il est absolument indispensable d’anticiper la "vallée de la mort". Recherchez à temps les instruments appropriés, et adaptez-y votre planification et vos objectifs le plus tôt possible.

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La co-création chez Bekaert En matière d'innovation, Matthew Taylor, le nouveau CEO de Bekaert, se concentre sur la vitesse et place le client au centre du processus. Pour le leader mondial des câbles d’acier, l’innovation est un parcours totalement structuré, depuis la génération d’idées jusqu’au lancement sur le marché. Il est géré comme un modèle en entonnoir et soutenu par la plateforme CogniStreamer. Les innovations stratégiques sont développées séparément. Les plateformes d’affaires Bekaert œuvrent à des programmes d’amélioration continue des produits et des processus, soutenues par le modèle en entonnoir (stage-gate dans le jargon) qui gère l’innovation comme un processus rationnalisé de bout en bout, de la génération des idées au lancement commercial. Les efforts d’innovation sont alignés sur la stratégie de l’entreprise par une équipe responsable de l’ensemble du processus d’innovation. Le processus repose sur la plateforme CogniStreamer, qui recueille les idées des 6.000 membres de la communauté internationale Bekaert et en évalue la faisabilité et l’opportunité dans un processus interactif. Les idées sélectionnées sont validées, soutenues, améliorées et préparées en vue de leur développement et de leur mise en œuvre. Bekaert recherche également la collaboration et la pollinisation croisée en dehors de ses murs. L’entreprise mise sur l’innovation ouverte, collaborative, et la co-création avec ses clients et ses fournisseurs, mais aussi avec les instituts de recherche et les universités avec lesquels elle a conclu des partenariats stratégiques mondiaux en matière de R&D.

Innovation stratégique Le processus d’innovation stratégique, en revanche, est généré par une Innovation Team dans un environnement distinct, à l’écart des activités opérationnelles quotidiennes. Dans la mesure où l’on y travaille à des innovations radicales, il est nécessaire de gérer de grandes incertitudes sur le plan technique et commercial, mais aussi en matière de ressources et d’adaptation organisationnelle. Ces incertitudes sont d’abord réduites autant que possible en plusieurs phases, où se succèdent expérimentations et confrontation aux attentes des clients potentiels. Une fois l’incertitude liée à la combinaison produit-marché suffisamment dissipée, le développement se poursuit au travers du modèle stage-gate.

Si l’innovation incrémentale passe par un modèle stage-gate, l’innovation stratégique suit, quant à elle, un parcours privilégié. Bekaert investit également depuis plus de dix ans dans l’innovation stratégique via Corporate Venturing, une entité distincte. Dans ce cadre, le groupe prend des participations minoritaires dans des start-ups proposant des technologies prometteuses susceptibles de compléter les siennes. La plupart de ces participations sont prises directement, mais il lui arrive de passer par des fonds de capital-risque spécialisés, surtout pour ce qui touche aux technologies propres et aux nouveaux matériaux.


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SUBSIDES

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AIDE À L’INNOVATION

© Emy Elleboog

La vision des pouvoirs publics L’innovation exige non seulement une sérieuse prise de risques mais également des capitaux élevés, souvent davantage que ce que peuvent supporter individuellement les entreprises. Les pouvoirs publics doivent donc la soutenir efficacement. En Belgique, la politique en matière d’innovation relève des compétences des régions.

ous avons donc confronté les visions de Veerle Lories, Katrien Mondt et Daniel Collet, respectivement à la tête de l’IWT en Flandre, de l’Innoviris à Bruxelles et du DG06 en Wallonie, les trois organismes publics chargés de soutenir l’innovation dans notre pays.

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Quelle est votre vision des tendances actuelles en matière d’innovation? Lories: “Les choses bougent énormément. La grande tendance est l’innovation ouverte. La collaboration au niveau local et la formation de clusters sont également importantes, mais c’est surtout la collaboration internationale qui a le vent en poupe. La globalisation est un fait, y compris en Flandre.” Mondt: “Je perçois deux grandes tendances: l’essor de l’innovation collaborative, et un glissement de l’innovation portée par la technologie vers l’innovation en matière de modèles d’affaires. La notion de créativité s’est considérablement élargie. Un aspect moins positif est que le gouffre qui sépare le monde académique et la société au sens large n’a toujours pas été comblé.” Collet: “Cette accélération est effectivement une tendance importante. Les technologies s’entrecroisent et s’alimentent mutuellement, ce qui engendre une complexité croissante, mais également davantage d’occasions d’innover. Je vois aussi une évolution en faveur de l’innovation col-

Who’s Who? (de gauche à droite) Veerle Lories, administrateur général de l’IWT, l’Agence flamande pour l’innovation par la science et la technologie Katrien Mondt, directeur général d’Innoviris, l’Institut bruxellois pour la recherche scientifique Daniel Collet, inspecteur général du DG06, le Département wallon de la compétitivité et de l’innovation

L’AIDE EUROPÉENNE À L’INNOVATION

Dans le dédale des subsides L’innovation revêt une dimension internationale croissante. Les programmes d’aide européens répondent à cette évolution: une nouvelle génération d’instruments financiers a été lancée dans le cadre d’Horizon 2020, le nouveau programme de recherche de l’UE pour 20142020. Son objectif? Aider les entreprises innovantes à décrocher plus facilement un financement, et encourager les collaborations à l’échelle européenne. Avec cette série de nouveaux instruments, comme le SME Instrument et le Fast Track to Innovation, ce sont au total près de 80 milliards d’euros d’aides financières qui seront dégagés pour la recherche et le développement. Si le montant est considérable, les candidats sont nombreux et seuls les meilleurs projets dotés d’une approche internationale seront soutenus. Trouver sa voie dans le dédale d’instruments spécifiques n’est pas une sinécure. Outre Horizon 2020, il existe en effet un large assortiment de propositions intéressantes, telles que le programme Eurostars et les clusters Eureka, Connecting Europe Facility… Mieux vaut dès lors s’adres-

ser à un spécialiste qui dispose d’une vision globale. Il faut savoir que l’aide à l’innovation au niveau européen est souvent organisée top-down, par le biais d’appels à propositions. Un projet doit alors remplir toutes les conditions. De plus, il est généralement nécessaire de faire partie d’un consortium avec d’autres partenaires européens issus de plusieurs pays. La recherche de partenaires est souvent malaisée pour une entreprise individuelle. EY dispose de spécialistes locaux des subsides dans presque chaque pays, ainsi que d’une cellule européenne globale à même d’aider les entreprises dans la création d’un tel consortium et dans l’accompagnement et la coordination de ses membres. Pour autant, mieux vaut vous atteler à cette tâche avant la publication de l’appel à propositions, faute de quoi vous arriWouter Desmet, associé EY Subsidia, verez sans vous aide à garder une vue d’ensemble doute trop +32 (0)9 242 51 06 tard. wouter.desmet@be.ey.com


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SUBSIDES

SUPPLÉMENT en collaboration avec EY

© DOC

© Thomas De Boever

“Il n’est pas question d’abandonner l’innovation au marché.” Katrien Mondt, directeur général d’Innoviris

laborative, et un plus grand accent placé sur le marché. L’innovation ne suit plus un processus linéaire, de la recherche au lancement du produit, mais provient d’un écosystème ouvert, créatif et régional.” Quelle est l’importance de l’innovation dans l’économie en général et pour les entreprises individuelles en particulier? Mondt: “Les entreprises doivent innover pour survivre, cela ne se discute plus. Cela dit, toutes les entreprises ne possèdent pas individuellement les moyens nécessaires pour y parvenir. De plus, les entreprises issues du même secteur sont encore réticentes à collaborer. D’où l’importance d’une collaboration intersectorielle autour de projets spécifiques. Dans ce cadre, je suis très partisane d’une approche axée sur les défis.” Lories: “Il est vital d’innover pour rester compétitif et pouvoir pénétrer de nouveaux marchés. Les évolutions sont de plus en plus rapides, le monde est plus ouvert que jamais. L’innovation doit apporter une réelle valeur ajoutée, sans quoi on se fera dépasser à terme. Une grande partie des entreprises sont très performantes en matière d’innovation. Mais pour de nombreuses petites entreprises, il est moins évident de

prendre conscience de la nécessité de se renouveler à un stade suffisamment précoce.” Collet: “L’innovation est indispensable pour répondre aux questions sociales et dynamiser notre tissu économique, et l’aide aux PME est un des fers de lance de notre politique d’innovation. Le dynamisme des PME est déterminant pour la création de nouveaux segments industriels et leur ancrage dans notre économie.”

“Le grand défi demeure l’efficacité générale des programmes d’aide.” Daniel Collet, inspecteur général du DG06

Comment soutenir efficacement l’innovation? Collet: “Il faut combiner plusieurs axes stratégiques. Ne pas se contenter d’accorder des subsides, mais aussi travailler à l’infrastructure, au climat d’entrepreneuriat général et à la disponibilité du capital-risque. La Wallonie possède tout un arsenal de leviers, du plan Marshall 4.0 au Small Business Act en passant par Creative Wallonia. Il est également important

de couvrir l’ensemble du trajet d’innovation. Aider les entreprises à transformer des prototypes prometteurs en succès commerciaux constitue à cet égard un chantier important. Par ailleurs, il est nécessaire de rechercher une masse critique en se concentrant sur les niches mises en avant dans notre politique de clusters.” Mondt: “L’innovation ne peut être laissée au marché. Souvent, la recherche appliquée n’est pas rentable pour les entreprises individuelles. On constate également une grande aversion au risque. Une approche collective qui aide à supporter le risque profite à toute la société.” Lories: “Les pouvoirs publics disposent de budgets importants pour soutenir l’innovation. Nous devons nous focaliser sur l’élimination d’un certain nombre d’obstacles sur le chemin de l’innovation. Dans ce processus, nous sommes toujours très attentifs au retour sur

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investissement pour la Flandre en matière d’emploi, d’investissements futurs et de durabilité.”

À combien se montent les budgets d’innovation et comment sont-ils répartis? Mondt: “À Bruxelles, notre budget s’élève à 43 millions d’euros par an. Cet argent part environ pour moitié vers des instituts de connaissances, l’autre moitié allant aux entreprises. Pour ces dernières, le budget est attribué selon un processus bottom-up. Autrement dit, nous répondons à des demandes d’aide. Pour le monde académique, nous travaillons top-down: nous sélectionnons nous-mêmes les innovations que nous soutenons.” Collet: “Le fonds public pour la recherche et le développement s’élève à 330 millions d’euros afin de répondre aux questions sociales et dynamiser notre tissu économique. Ce n’est toutefois qu’une partie du total. Il faut y ajouter l’aide aux pôles de compétitivité, le plan Marshall 4.0, Creative Wallonia et les aides européennes avec notamment Horizon 2020 et le FEDER. Le grand défi demeure l’efficacité générale des programmes.” Lories: “En 2015, le budget de l’IWT se chiffre à 305 millions d’euros. Plus de la moitié de ce montant est directement adressée aux entreprises. Nous procédons toujours en fonction de demandes, avec un système très ouvert. Nous investissons le reste de manière plus ciblée: une partie reflue aux entreprises par le biais d’organisations intermédiaires, une autre va aux universités et aux centres de recherche.” Que pourrait-on améliorer ou changer dans la collaboration entre pouvoirs publics et entreprises? Lories: “Les entreprises souhaitent avant tout des procédures plus simples et plus rapides. La célérité

SUBSIDES

“L’ensemble de la société doit pouvoir récolter les fruits des investissements consentis dans l’innovation.” Veerle Lories, administrateur général de l’IWT

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revêt une grande importance, surtout pour les PME. C’est encore un défi. La fusion avec l’Agence flamande pour l’entreprise nous permettra de clarifier l’assortiment d’aides. C’est indispensable: les entreprises ne s’y retrouvent parfois plus dans la multitude de formules disponibles. Des entreprises, nous attendons qu’elles comprennent que nous recherchons une plus-value économique et sociale. Nous ne sommes pas des fournisseurs de capitaux désintéressés.” Mondt: “Les pouvoirs publics doivent avant tout simplifier les procédures administratives et raccourcir les délais de paiement. Il est évidemment nécessaire de contrôler scrupuleusement la manière dont l’argent du contribuable est dépensé, mais il faut surtout davantage de flexibilité. Des entreprises, j’attends davantage d’investissements dans les risques. Nous sommes là pour les aider à supporter les risques, mais elles doivent avoir l’audace de jouer la carte des innovations qui constituent de véritables percées. Les pouvoirs publics n’ont pas pour tâche d’aider à commercialiser un produit.” Collet: “Les pouvoirs publics peuvent créer un cadre et attribuer des budgets, mais toujours dans un dialogue continu avec tous les acteurs. Et ce doit être une préoccupation

permanente. Les entreprises doivent également s’engager en faveur du développement régional et adopter une attitude adéquate. Les plans Marshall successifs sont fondés sur un véritable partenariat dans lequel chacun supporte sa part de risques.” Quels sont les défis futurs en matière d’aide à l’innovation? Mondt: “Comment pouvons-nous être certains que le subside apporte une plus-value pour la société? Si des entreprises que nous avons soutenues délocalisent, nous perdons notre investissement. Autre préoccupation: sommes-nous suffisamment adaptés à l’évolution extrêmement rapide des modèles d’affaires et de financement?” Lories: “Nous voyons certes 200 nouvelles entreprises naître chaque année, mais le potentiel est encore plus grand. Nous devons nous retrousser les manches. L’autre grand défi consiste à faire en sorte que l’ensemble de la société récolte les fruits des mesures d’aide.” Collet: “De notre côté, le principal défi réside dans la simplification de l’offre et des procédures, et dans la complémentarité des mécanismes de soutien. Une autre préoccupation est la dimension européenne. Si l’UE souhaite préserver sa compétitivité, elle doit passer à la vitesse supérieure.”

Nouvelle réglementation douanière dans l’Union Le Code des douanes de l’Union européenne entrera pleinement en vigueur en mai 2016. À compter de cette date, les droits de douane seront prélevés sur la dernière transaction avant l’entrée des marchandises sur notre territoire. Pour de nombreuses entreprises, cela induira une augmentation des droits à l’importation. Plusieurs secteurs seront plus sévèrement touchés, comme le secteur automobile, le textile, l’habillement et les chaussures, ou encore la chimie et les importateurs de fruits. Si les entreprises innovantes considèrent le monde comme leur terrain de jeu économique, la mondialisation a son prix. Chaque fois que l’on franchit une frontière, il faut introduire une déclaration fiscale et payer des taxes sur les importations, des droits de douane, une TVA, voire des accises ou des droits antidumping. Trop d’entreprises délèguent encore ce processus de déclaration à des partenaires logistiques ou à des agents, sans veiller à ce que les informations soient directement transmises aux autorités, souvent des pays dont

elles sont moins familières. On sait également que de nombreux États sont très dépendants des droits de douane, parfois à concurrence de plus de 50% de leur budget. Les autorités réagissent par des programmes d’accréditation pour les entreprises, comme le programme “Opérateur Economique Agréé” (OEA), qui vont de pair avec des avantages opérationnels. Le statut d’OEA est également un élément important du Code des douanes de l’Union qui entrera en vigueur en mai 2016. La Commission européenne a annoncé qu’elle publierait les moutures finales liées à la mise en œuvre dans les semaines à venir. Ce code représentera une petite révolution pour de nombreuses entreprises. Les droits de douane à l’importation seront désormais prélevés sur la dernière transaction avant l’importation. Pour de nombreuses entreprises, cela entraînera une augmentation des taxes sur les importations. L’OEA est d’ailleurs la base obligatoire d’une myriade de simplifications souvent indispensables pour fluidifier au mieux les importations et expor-

tations. L’objectif final est de consolider en un endroit unique toutes les déclarations de douanes dans l’Union européenne. Ce clearing centralisé ne sera sans doute pas opérationnel avant 2022. Dans la mesure où les règles relatives aux marques commerciales ont été vidées de leur substance, on en arrivera rapidement à la conclusion que les royalties et droits de licence sont également imposables à l’importation des marchandises sous-jacentes. Les entreprises belges innovantes qui conservent leurs activités de R&D en Belgique ont un avantage: la Commission européenne estime en effet qu’elles ne doivent pas être imposées lorsque des marchandises développées ici, mais produites ailleurs, sont rapatriées dans l’Union européenne. Plus d’information sur ce qui vous attend? Contactez: Franky Depril associé EY Tax Consultants expertise: droits douanier +32 (0)2 774 94 84 , franky.de.pril@be.ey.com


CAPITAL-RISQUE

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PA S D’INNOVATI ON SANS F INA NCE ME NT

Le financement du risque est un sport de haut niveau Le rendement de l’innovation est assez incertain. Elle nécessite donc un modèle de financement adapté: le capital-risque. Alors que l’entrepreneuriat a le vent en poupe, les initiatives professionnelles en matière de financement se multiplient.

n Belgique, il existe très peu de fonds de capital-risque purs. Pour autant, personne ne veut manquer le train des start-ups. Les financiers sont de plus en plus disposés à écouter le récit de jeunes chefs d’entreprises. Des initiatives de crowdfunding voient le jour, les business angels apportent leur contribution et des patrons à succès sortent de leur coquille. Pour des montants plus importants, les entreprises belges actives dans les nouvelles technologies et autres start-ups n’hésitent plus à se tourner vers les fonds de capital-risque étrangers, principalement anglo-saxons. Trouver suffisamment d’argent demeure une mission périlleuse pour une start-up. Les starters sont souvent trop risqués pour être financés par des produits bancaires commerciaux. Même les fournisseurs de capital-risque ignorent souvent les "jeunes pousses" dans un stade précoce de leur développement. Les pouvoirs publics ont la responsabilité de proposer une solution. Car il est crucial d’offrir un accompagnement et un financement adéquats aux start-ups et autres "aventuriers" de l’entreprise. EY soutient les sociétés débutantes et en croissance avec EYnovation, notamment en attirant des fournisseurs de capitaux et en accompagnant les projets.

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Visibilité La majeure partie des innovations ne sont pas le fait de start-ups mais de PME et de grandes entreprises. Là aussi, l’innovation doit jouer des coudes pour décrocher des budgets. Les projets d’extension classiques ou les investissements destinés avant tout à réduire les coûts obtiennent plus aisément des financements. Par conséquent, l’innovation doit améliorer sa visibilité et s’exprimer dans les rapports financiers. La discussion avec un bailleur de fonds ne doit pas s’arrêter à votre ratio endettement net/ebitda. Vous avez tout intérêt à tenir vos actionnaires et banquiers informés des aspects suivants:

© Shutterstock

Pour trouver du capitalrisque, l’enthousiasme ne suffit plus. Compétences financières et accompagnement adéquat sont au moins aussi importants.

• le pourcentage de chiffre d’affaires réalisé sur des produits et services lancés voici peu de temps; • les produits existants qui ont récemment fait l’objet de nouvelles applications; • les futurs nouveaux produits; • le pourcentage des charges salariales consacré à la recherche et au développement; • le montant des derniers investissements en R&D consentis; • les subventions reçues. Mieux vos financiers connaissent et comprennent ces données, plus ils seront enclins à financer vos projets.

Moteur de croissance Logiquement, les investisseurs et les banques se concentrent avant tout sur la croissance. Or, l’innovation constitue un moteur important de la croissance d’une entreprise. L’application Growth Navigator d’EY détecte le potentiel de croissance et indique comment le réaliser. Un plan de croissance clair basé sur l’innovation constitue la base de l’obtention de capital-risque et de financements

bancaires. Souvent, ce plan de croissance comprend une stratégie d’acquisitions ciblées. Mais les acquisitions induites par l’innovation engendrent des besoins de financement considérables. Un accompagnement professionnel de la transaction ainsi qu’un audit approfondi préalable sont indispensables pour convaincre les financiers. Il en va de même pour les partenariats populaires entre grandes entreprises, start-ups et PME autour de l’innovation. Ici aussi, l’audit préalable et une délimitation claire des droits de propriété intellectuelle revêtent une énorme importance. Il faut de l’argent pour innover, et il est plus facile de trouver de l’argent lorsqu’on est une entreprise innovante. Mais l’enthousiasme ne sera pas une arme suffisante. Des compétences financières et un accompagnement adéquat importent tout autant. Marc Guns associé EY Transaction Advisory Services +32 (0)2 774 94 19 marc.guns@be.ey.com


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