The Private Banker (automne 2023)

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“Les marchands d’art, les galeries et les maisons de vente aux enchères sont complémentaires.” Marianne Hoet Head of Business Development et vice-présidente de la maison de vente aux enchères Phillips, Marianne Hoet est la mieux placée pour lever un coin du voile sur les coulisses du marché international de l’art.

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THE

PRIVATE BANKER


Edito

Chers membres de la PBA-B, Après plusieurs belles journées de fin d’été, l’automne pointe le bout de son nez. C’est le moment de l’année où l’on range les meubles de jardin, où l’on reconstitue la réserve de bois en préparation de l’hiver, et où l’on se retrouve un peu plus souvent à l’intérieur de la maison pour y passer des moments agréables avec ses proches, famille et amis. Nous avons choisi de consacrer ce numéro de notre magazine The Private Banker aux conseils en matière d’art. Bien entendu, la plupart des banques privées disposent d’un département spécialisé en la matière, mais le banquier privé peut aussi apprécier d’échanger des points de vue avec son client sur ce sujet. Dans ce cadre, nous avons souhaité vous fournir quelques outils et conseils par le biais de ce numéro. Les angles d’approche sont si nombreux que ce dernier est exceptionnellement un peu plus épais. Marianne Hoet, l’une de nos anciennes étudiantes, est aujourd’hui très active sur la scène artistique internationale. Elle nous parle de sa passion pour l’art et de la manière dont sa formation en planification patrimoniale auprès de la PBA-B s’est conjuguée avec son poste au sein de la maison de vente aux enchères Phillips. Par ailleurs, des artistes, des galeristes, des directeurs de musée, des experts financiers et d’autres experts encore jettent un regard unique sur les coulisses du monde de l’art dans ce numéro bien particulier. Nous vous souhaitons un automne plein d’enchantements artistiques.

Sommaire

Bonne lecture!

04 “Les collectionneurs Peter Van der Smissen Secrétaire général de la PBA-B

privés rendent l’art accessible à un large public” Table ronde

Ours The Private Banker est le magazine trimestriel des membres de la Private Bankers Association Belgium. Rédacteur en chef et éditeur responsable: Peter Van der Smissen Rédaction: Content Republic https://trustmedia.be/services Numéro 8: octobre 2023 Crédit photo: Frank Toussaint Prix par numéro pour les non-membres: 10 €

08 “L’authenticité et l’origine priment dans l’expertise d’une œuvre d’art” Dossier - Taxation et succession


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12 L’art dans un monde digital

De l’art physique numérisé à l’art numérique

13 Quand l’amour de l’art,

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l’expérience bancaire et la formation en planification patrimoniale se rencontrent

Une ancienne élève sous le feu des projecteurs - Marianne Hoet

14 “Une assurance œuvres

Agenda

d’art est envisageable dès la première œuvre”

Lundi 30 octobre (14h)

Webinaire sur le nouveau droit des obligations avec Alain Van Geel, Partner chez Tiberghien

Cinq conseils pour assurer une œuvre d’art

Mercredi 22 novembre (14h)

The Minsky Moment: Active versus Passive continuum, webinaire avec Ben Granjé, CEO de la Fédération flamande des investisseurs (VFB) et membre du Securities and Markets Stakeholders Group (SMSG) auprès de l’ESMA

Mercredi 20 décembre

Début de la formation Patrimonial Approach 2023-2024 pour le groupe FR

Mercredi 13 décembre (14h)

Webinaire sur la législation MICA‘ marchés de crypto-actifs’ par Thomas Faelli, founding partner Ethikos Lawyers Brussels

Vendredi 19 janvier

Publication du premier numéro de The Private Banker en 2024

15 Vous prêtez votre œuvre

d’art: quelles précautions prendre?

Ce qu’il faut éviter, et ce à quoi il faut absolument penser


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TABLE R ON DE

“Les collectionneurs privés rendent l’art accessible à un large public” “Les banques sont à la fois plateforme, prêteur et mécène; elles rendent l’art visible au public.” Koen van den Broek

La Belgique est connue internationalement pour ses collections privées. De plus en plus de banques conseillent à leurs clients d’investir dans l’art. Koen van den Broek, Brecht Callewaert, Goedele Bartholomeeusen et Christine Mostert soulignent le rôle des collectionneurs privés et des banques dans la visibilité du secteur artistique. La privatisation du secteur artistique est en cours depuis un certain temps déjà. Comment entrevoyez-vous son évolution? Christine Mostert (Degroof Petercam): “Cette privatisation est très importante. Les collectionneurs donnent plus de visibilité aux artistes de leurs collections. Il suffit de voir ce qu’ont fait Bernard Arnault, avec la Fondation Louis Vuitton à Paris, et François Pinault. Le mécénat, ou du moins les partenariats avec les entreprises, permettent d’élargir le public. À Bruxelles aussi, bon nombre de centres travaillent avec leurs propres fonds. Ils sont parfois gérés de manière plus professionnelle que les musées, qui doivent se contenter de moyens limités. Certains musées sont un peu en sommeil pour cette raison.”

Koen van den Broek (artiste): “À l’étranger, certaines salles et certains musées portent le nom de mécènes. Pensez à The Broad à Los Angeles, qui y fait la pluie et le beau temps sur le marché. Nous nous rapprochons progressivement du système anglo-saxon. Le collectionneur privé est également devenu plus visible. Les collections privées belges sont connues dans le monde entier.” Goedele Bartholomeeusen (musée Dhondt-Dhaenens): “De tout temps, les collectionneurs privés ont existé. C’était déjà le cas à la Renaissance. L’argent est toujours venu des particuliers, de l’Église et des bienfaiteurs. Notre musée a constamment entretenu des relations étroites avec les collectionneurs privés, et généré un pourcentage élevé de ses propres revenus.


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“Le musée DhondtDhaenens est un excellent exemple de la privatisation du secteur artistique.” Goedele Bartholomeeusen

“L’achat d’œuvres d’art est un investissement émotionnel et financier.” Brecht Callewaert

Il a été fondé en 1968 par des collectionneurs privés et, au fil des ans, il a présenté des artistes qui n’étaient pas exposés au Muhka ou au Smak.”

“Les collectionneurs mentionnent rarement le rendement financier de l’art en tant qu’investissement.” Christine Mostert

Brecht Callewaert (galerie CallewaertVanlangendonck): “Les galeries sont toujours la première plateforme pour les artistes. Les collectionneurs y achètent des œuvres d’art et deviennent ensuite des mécènes. Ils dirigent et déterminent l’avenir de l’œuvre. Avec le temps, les œuvres entrent dans les musées, mais le processus est lent. Dans notre galerie, nous exposons principalement des œuvres de la période d’après-guerre, une génération d’abord restée dans l’ombre en Belgique. Grâce notamment aux collectionneurs de cette période, ces artistes bénéficient à nouveau d’une visibilité dans les musées. Ceux-ci nous demandent régulièrement si nous pouvons prêter des œuvres, car ils n’en ont pas acquis suffisamment dans les années 1950 et 1960. En Belgique, nous avons d’abord donné trop peu de place à l’abstrait d’après-guerre; aujourd’hui ces œuvres

sont recherchées par les collectionneurs. La privatisation de l’art est un défi, même pour les musées, qui sont cependant forcés de suivre. Regardez par exemple ce que Fernand Huts fera de sa Boerentoren à Anvers. La portée sera considérable au niveau international. Les musées doivent rester en alerte.” Goedele Bartholomeeusen: “Parfois, les musées ‘corrigent’ le marché de l’art parce qu’ils font des recherches historiques. Ils ne considèrent alors pas les œuvres particulières d’un point de vue commercial.”

Les banques investissent elles aussi dans l’art. Quelle est votre expérience en la matière? Brecht Callewaert: “Notre galerie travaille depuis 10 ans avec Delen Private Bank. Les œuvres d’art accrochées aux murs des agences de la banque nous appartiennent. Delen est très sensible à l’art. Elle nous offre une plateforme et cela fonctionne. Elle aime beaucoup la période que nous


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TABLE R ON DE

proposons, ainsi que l’art contemporain. On pourrait y voir une extension de notre galerie.” Koen van den Broek: “Mais on peut aussi inverser les choses: la galerie fournit une décoration gratuite. Le rôle de Cera, de Belfius et de Proximus ne doit pas être sous-estimé. Les banques sont à la fois plateforme, prêteur et mécène; elles rendent l’art visible au public. Leurs partenariats avec des salons artistiques comme Art Brussels et Brafa sont également importants.” Brecht Callewaert: “En donnant une place à l’art dans une banque, on s’adresse à un public qui est un peu plus fortuné mais qui n’est pas nécessairement amateur d’art ou connaisseur. Lui présenter des œuvres d’art par l’intermédiaire de cette plateforme est utile, c’est évident. Beaucoup de gens s’intéressent à l’art et peuvent vouloir acheter une œuvre qu’ils apprécient, mais ils veulent aussi savoir ce qu’ils achètent. Il convient donc de le leur expliquer. Nous donnons ces informations dans le cadre de nos visites guidées, notamment.” Christine Mostert: “En effet, il faut une explication. Si des œuvres d’art sont exposées aux murs de la banque, elles doivent séduire un public large et diversifié. L’art n’est pas seulement esthétique, il suscite des discussions et des conversations avec le personnel, les visiteurs, les clients et les fournisseurs. C’est un excellent moyen d’engager la conversation, de nouer des liens et d’apprendre des choses sur soi-même et sur les autres. Mes collègues ne sont pas des collectionneurs mais ils aiment regarder, savoir, comprendre et avoir eux-mêmes quelques connaissances en histoire de l’art.”

Comment les clients investissent-ils dans l’art? Christine Mostert: “Lorsque je discute avec des collectionneurs, peu évoquent l’art en termes d’investissements produisant un rendement financier. Leur plaisir est émotionnel et intellectuel. Dans un monde où tout évolue vite et où il existe une

pression à l’achat, les personnes prennent parfois peu de temps pour chercher, lire, visiter ou écouter, et se demander si elles aiment l’art. Lorsqu’on achète une oeuvre d’art, il faut savoir à quoi correspond son prix. En quoi consiste le travail de cet artiste, comment a-t-il évolué au fil du temps, quelles galeries travaillent avec lui? Je n’ai jamais rencontré de collectionneur qui investisse dans l’art pour en retirer un profit.” Brecht Callewaert: “Et pourtant, ils existent! Je n’aime pas l’idée d’acheter des œuvres d’art pour les ranger ensuite dans un coffre-fort. C’est inconcevable. Il ne s’agit alors plus d’art, mais d’un simple investissement financier, comme l’achat d’une action. Il faut vivre avec l’art, il fait littéralement partie de notre vie quotidienne. Plus tard, il ne faudrait pas regretter de l’avoir acheté, pas même financièrement.” Goedele Bartholomeeusen: “Si vous êtes un collectionneur réputé pour vendre rapidement ses œuvres d’art, vous avez moins de chances d’accéder à certaines œuvres primaires. Il est utile d’entretenir de bonnes relations avec les galeries et d’établir un lien de confiance. Elles ne vous vendront pas une œuvre si elles pensent que vous la revendrez rapidement.” Koen van den Broek: “On ne peut jamais le vérifier à 100%, ceci dit.” Christine Mostert: “C’est vrai, mais certaines galeries prévoient des contrats interdisant la revente de l’œuvre dans un délai de cinq ou dix ans. Elles veulent ainsi éviter les effets de la spéculation. Lorsque j’ai découvert que l’œuvre d’un jeune artiste avait été vendue pour 350.000 euros, j’ai été choquée, car cela comporte des risques pour l’artiste et la galerie. Que peut-on espérer ensuite? Le risque est réel de ne pas pouvoir installer une carrière à long terme.” Koen van den Broek: “J’ai percé à 27 ans lors d’une exposition de mes peintures, mais ce fut progressif. Aujourd’hui, certains artistes sont déjà réputés

Christine Mostert Head of Art Advisory Services chez Degroof Petercam Goedele Bartholomeeusen Directrice du musée Dhondt-Dhaenens


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Koen van den Broek Artiste Brecht Callewaert Galeriste chez Callewaert-Vanlangendonck

à 22 ans. Et leur cote ne cesse de grimper. Où en seront-ils à 30, 40 ou 50 ans?” Goedele Bartholomeeusen: “Le collectionneur aurait tort de croire qu’il peut acheter n’importe quelle œuvre. Certaines galeries exigent d’abord un rapport de confiance.” Koen van den Broek: “Aux États-Unis, l’art est plus intéressant d’un point de vue fiscal. Heureusement, en Flandre, une législation permet de payer les droits de succession en œuvres d’art, à l’exemple de la baronne Dora Janssen. Ce qui est fou, c’est que les lunettes de soleil, le café et le pain sont déductibles, pour ainsi dire, mais pas l’art, parce qu’il n’est pas encore réglementé au niveau fédéral. Fiscalement, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir.”

Considérez-vous l’art comme une forme alternative d’investissement? Brecht Callewaert: “On me demande souvent si l’achat d’une œuvre d’art est un bon investissement. Au début, je trouvais cette question difficile, maintenant je réponds par l’affirmative. Il s’agit d’un

investissement émotionnel – vous achetez une œuvre parce que vous l’appréciez – mais aussi d’un investissement financier – vous devez savoir ce que vous achetez. Et fondamentalement, le marché de l’art est transparent.” Koen van den Broek: “Je donne toujours cet exemple aux collectionneurs: si vous achetez une Mercedes, une BMW ou une Bentley, elle ne vaudra plus rien après quatre ans d’amortissement. Ce n’est pas le cas d’un tableau.” Brecht Callewaert: “Ces dernières années, le monde financier a présenté l’art comme un bon investissement. Mais il faut bien sûr informer le public de manière adéquate et complète. Les personnes qui investissent s’informent auprès de leurs banques et de spécialistes. Généralement, le public ne sait pas grand-chose des évolutions dans le domaine de l’art et exige dès lors d’être bien conseillé. Cette tâche revient aux galeries, aux conseillers artistiques et aux artistes eux-mêmes.” Goedele Bartholomeeusen: “Il y a 15 ans, il n’existait pratiquement pas de conseillers

artistiques en Belgique. La donne a changé. Bien sûr, il faut bien choisir les personnes qui vous conseillent.” Christine Mostert: “C’est une question que l’on m’a posée dès le début de mon activité de conseillère en art: je veux constituer un portefeuille d’œuvres d’art, dans quoi dois-je investir? Si vous voulez commencer une collection, vous devez trouver ce qui vous plaît, faire des recherches, lire, poser des questions et visiter des musées, des galeries et des salons. Nous sommes des intermédiaires, et nous le faisons de la manière la plus indépendante et transparente possible, car nous n’avons pas d’intérêts en jeu. Nous voulons être proches de nos clients et partager nos expériences avec eux.” Koen van den Broek: “J’aime l’idée que l’art ait son existence propre. Par exemple, jusqu’à tout récemment, j’ignorais que l’ancien président du Conseil européen, Herman van Rompuy, avait un de mes tableaux au mur de son bureau. Les gens apprennent à connaître l’art sur les murs des entreprises, ce qui est fascinant. C’est une sorte d’éducation à l’art.”


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TA X AT IO N E T SUC CE S SIO N

TA X AT ION

“L’authenticité et l’origine priment dans l’expertise d’une œuvre d’art”

Johan Swinnen est un expert en art indépendant et reconnu. Dans son travail d’expertise, il tient compte d’une douzaine de paramètres, les principaux étant l’origine et l’authenticité de l’œuvre. À ses yeux, “l’expertise d’une œuvre d’art s’apparente toujours à un instantané”. La valeur d’une œuvre dépend du marché de l’art. L’avis d’un professionnel est essentiel, selon l’expert Johan Swinnen, professeur émérite d’histoire de l’art à la VUB et à la Sorbonne. “Le commerce de l’art et des biens culturels n’est pas sans risque. L’imprévisibilité des prix est une réalité. Mais heureusement, des critères émotionnels et esthétiques entrent en jeu lors de l’achat: la beauté, la préférence, la fierté, l’engouement, l’intérêt et, bien sûr, l’amour.”

qu’elle est effectivement due à l’artiste en question. La démonstration de l’authenticité est cruciale.”

Authenticité

Rapport d’expertise

Faire appel à un expert indépendant permet au collectionneur de se forger une idée de la valeur réelle de l’œuvre. Johan Swinnen admet que l’évaluation des œuvres d’art n’est pas une science exacte. Il s’appuie pour cela sur les paramètres classiques de l’histoire de l’art. “Bien qu’il s’agisse d’un travail sur mesure, la première étape consiste toujours à dresser l’inventaire de la collection. L’attribution à l’artiste est un élément important. Ce n’est pas parce que l’œuvre est signée

Johan Swinnen tient également compte de l’exécution technique de l’œuvre et de son état de conservation. “L’analyse visuelle, stylistique, historique et pigmentaire joue un rôle majeur. J’examine la période, le sujet et la qualité de l’œuvre. Ce travail de longue haleine aboutit à un rapport d’expertise. Je ne me contente pas de dresser un tableau Excel rapportant les dimensions, le nom de l’œuvre et l’année de sa réalisation: je donne aussi une interprétation artistico-esthétique de l’œuvre.”

“Déterminer l’origine d’une œuvre est un défi intellectuel que j’aime relever.” Johan Swinnen Expert en art

L’origine de l’œuvre d’art est tout aussi importante. “Je recherche les propriétaires précédents ou les lieux où l’œuvre a été exposée ou vendue. C’est un défi intellectuel, mais c’est passionnant. Jusqu’où peut-on remonter dans l’histoire de cette œuvre et de ses propriétaires?”

En outre, il intègre constamment la question des contrefaçons dans l’équation. “Plus largement, il faut être conscient des conséquences du vol, du commerce illégal, des conflits et des guerres. L’expérience est vitale à cet égard. C’est pourquoi je me félicite d’avoir une formation académique. Je suis éduqué aux arts visuels, et ma réflexion peut sortir du cadre.” L’indépendance de l’expert confère une plus grande crédibilité au rapport d’expertise. “Ce rapport peut être utilisé à plusieurs fins: vente, assurance, dommage, donation ou distribution.” L’expert établit deux valeurs: la valeur d’achat (valeur de substitution pour l’assurance) et la valeur de vente. “L’art reste un bon investissement mais il faut le réévaluer tous les trois à cinq ans. L’aide d’un expert dans la gestion du patrimoine est pertinente, dans la mesure où elle atteste de la gestion attentive et durable de la collection. Par ailleurs, elle est avantageuse sur le plan fiscal.”


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L’AR T E T LE F ISC

“L’achat d’une œuvre directement à l’artiste entraîne une TVA de 6%. Par l’intermédiaire d’une galerie d’art, la TVA s’élève en revanche à 21%.” Michel Maus Fiscaliste

Investir dans l’art? Le fisc veille!

L’art ne se réduit pas à la beauté. L’achat, la vente et la mise aux enchères d’une collection ont aussi des implications fiscales. “Dans l’économie de l’art, certains aspects devraient être uniformisés, comme le taux de TVA”, estime le fiscaliste Michel Maus. Les collectionneurs d’art nourrissent des motivations variées. Ils peuvent être séduits par la valeur artistique d’une œuvre ou l’envisager comme un produit d’investissement. “Les personnes qui sauvegardent ensemble un patrimoine artistique doivent en retracer l’histoire non seulement artistique, mais aussi financière”, avance le fiscaliste Michel Maus. “Comme dans le cas d’un portefeuille d’investissement classique, il faut pouvoir prouver l’origine des actifs. Sinon, vous risquez d’avoir des problèmes. Pas tant au moment de l’achat de l’actif, ceci dit, que plus tard, lorsque vous le vendrez ou en hériterez. Les banques sont soumises à toute une série de lois sur le blanchiment d’argent et sont de plus en plus pointilleuses sur ce sujet. Si des sommes considérables se retrouvent soudainement sur un compte privé, elles s’interrogent.”

6% ou 21% de TVA? La TVA s’applique à l’achat d’œuvres d’art. Les personnes qui achètent une

œuvre d’art directement à l’artiste versent une TVA de 6%. Par l’intermédiaire d’une galerie d’art, la TVA s’élève en revanche à 21%. “Cet écart de 15% rend le passage par les galeries plus coûteux pour l’amateur d’art. À moins que le galeriste n’utilise le régime de la marge, auquel cas la TVA n’est due que sur la marge. Si le galeriste applique ce système, il perd lui-même le droit à la déduction, ce qui n’est pas vraiment intéressant. Un cas comme celui de Banksy en Belgique, sachant que l’artiste souhaite rester inconnu, n’est donc pas une option avantageuse d’un point de vue fiscal.”

Leasing et location L’achat d’œuvres d’art par l’intermédiaire d’une structure d’entreprise n’est pas fiscalement intéressant parce qu’il n’est pas amortissable. Contrairement au design, par exemple. “Cette différence de traitement a ouvert un débat par rapport à la définition de l’art”, indique Michel Maus, qui constate du reste un intérêt croissant pour d’autres formes d’acquisition d’œuvres, telles que la

location et l’usufruit. Le cas échéant, le particulier achète l’œuvre d’art et la loue ensuite à son entreprise ou lui en cède l’usufruit. “Les options fiscales sont alors plus nombreuses. Le leasing d’œuvres d’art est également en plein essor. Tant pour la location que pour le leasing, il est possible de récupérer fiscalement les frais encourus.”

Planification successorale Planifier sa succession à temps est essentiel. “On voudra en effet éviter que le patrimoine du pater familias comporte un trop grand nombre d’œuvres d’art”, explique Michel Maus. “Les options classiques sont notamment la donation avec réserve d’usufruit à des sociétés ou à des fondations. On a parfois tendance à sous-estimer les œuvres d’art dans les déclarations fiscales. Il arrive que certaines œuvres d’art classiques soient comptabilisées avec les meubles. Le poste figure alors dans la déclaration d’impôts, mais à la vente, il sera difficile de prouver à la banque que les règles ont été respectées.”


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D O CUMEN TAT ION E T O RIGINE

De l’acquisition à l’héritage: “Une bonne documentation est essentielle”

La création, la constitution et la transmission d’une collection d’art soulèvent de nombreuses questions pratiques. Gwendolina Willems, Art Collections Manager chez KBC Private Banking & Wealth, ouvre à ses clients une porte sur cet univers, et leur offre des conseils pour profiter pleinement d’une collection. KBC possède son propre musée à Anvers. La Maison Snijders&Rockox abrite notamment des œuvres de Van Dyck, Rubens et Brueghel. “Nous organisons fréquemment des visites guidées pour les clients Private Banking et Wealth”, souligne Gwendolina Willems. “L’un de nos services consiste à conseiller nos clients sur leurs collections d’œuvres d’art. Nous l’avons lancé pour répondre à la demande de nombreux clients qui ont constitué une collection d’art assez importante, qui a fini par représenter une grande partie de leurs biens mobiliers.” L’une des séances d’information animées par Gwendolina Willems s’attache au thème “Commencer une collection”. “Je m’adresse à des personnes de tous âges. Les jeunes s’intéressent aussi au sujet. Ils achètent souvent des œuvres d’art de leurs pairs. Le premier conseil que je leur donne? Commencez par faire vos devoirs.

Autrement dit, notez l’endroit où vous avez acheté l’œuvre et ses dimensions, et prenez une photo du recto et du verso.” Elle familiarise également ses clients avec le monde de l’art. “Nous les laissons explorer leurs préférences. Ont-ils envie d’une collection figurative ou sont-ils plus portés sur les photographies ou les œuvres sur papier?”

L’itinéraire d’une œuvre Elle recommande aux collectionneurs de conserver précieusement toute leur documentation. “De quelles pièces se compose votre collection? À quels prix les avez-vous achetées? Les certificats délivrés par l’artiste ou les lectures sur des œuvres, des artistes et des expositions particuliers constituent une partie majeure de la documentation. L’origine joue aussi un rôle crucial, c’est-à-dire le chemin qu’emprunte une œuvre d’art à partir du moment où elle quitte l’atelier de l’artiste. Ce parcours devrait idéalement dessiner une ligne droite.” Gwendolina Willems revient par ailleurs sur la distinction entre le marché primaire et le marché secondaire. “Le marché primaire est celui des galeries et des artistes eux-mêmes. Les collectionneurs ne doivent pas avoir peur d’approcher les artistes, y compris pour discuter du prix. Sur le marché secondaire, ce sont surtout les maisons de vente aux enchères qui sont actives. Beaucoup de collectionneurs débutants ont peur de pénétrer dans cet univers. Il n’y a pas de règles écrites, mais des pratiques dont ils doivent tenir compte.”

La question de la gestion Entre l’acquisition et la vente d’œuvres d’art, il y a la conservation et la gestion. “Il faut préserver la collection dans les meilleures conditions. À ce stade, il est également important de prêter certaines œuvres pour des expositions.” La dernière étape est la vente ou le don. “Il faut en discuter en famille. Quelles sont les œuvres que nous possédons? Quelles sont celles avec lesquelles nous avons un lien particulier? Quelqu’un a-t-il envie de prendre soin des œuvres dans les années à venir? Il arrive parfois que la génération suivante ne veuille pas conserver les œuvres, ce qui peut être un constat douloureux pour le collectionneur, qui devra trouver une filière pour les vendre.”

“Mon premier conseil: commencez par faire vos devoirs.” Gwendolina Willems Art Collections Manager chez KBC Private Banking & Wealth


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Payer les droits de succession avec des œuvres d’art: plus intéressant que jamais Dans notre pays, les droits de succession peuvent être payés en œuvres d’art. En Flandre, le régime a été simplifié et étendu le 1er juillet 2023. Il ne concerne plus seulement les œuvres d’art, mais aussi les biens culturels tels que les objets d’intérêt scientifique. Les héritiers qui exploitent cette possibilité bénéficient du reste d’un cadeau fiscal supplémentaire. La possibilité de payer les droits de succession en œuvres d’art existe depuis longtemps. Des conditions strictes s’appliquent en Wallonie et à Bruxelles, ce qui explique que cette possibilité y soit peu exploitée. “On ne peut pas payer des droits de succession avec n’importe quelle œuvre d’art”, indique Jeroen Bruls, Head of Wealth Analysis & Planning chez ING Private Banking. “On ne peut le faire qu’avec des œuvres d’art qui appartiennent au patrimoine mobilier de la Belgique, qui ont un certain intérêt pour la vie culturelle belge et dont la renommée internationale est reconnue par le ministre des Finances. L’œuvre d’art ne doit pas nécessairement faire partie de la succession. Les œuvres d’art appartenant au conjoint survivant, à un héritier, à un légataire ou à un donataire sont également éligibles.”

Retrait de l’offre Dans un premier temps, une commission spéciale expertise les œuvres d’art. Les frais ne seront remboursés que si le dossier est accepté. Si la valeur des œuvres

d’art est inférieure aux droits de succession dus, l’héritier peut retirer son offre. “Si elle est supérieure, le propriétaire peut retirer une ou plusieurs œuvres de l’offre, retirer complètement l’offre ou confirmer l’offre dans son intégralité, mais payer alors plus que nécessaire, sachant que le solde ne lui sera pas remboursé”, détaille Jeroen Bruls. “Toutefois, le solde peut éventuellement être imputé sur les droits de succession dus par les autres héritiers. En tout état de cause, la valeur établie continuera de servir de base au calcul des droits de succession.”

Biens culturels À l’origine, ce régime s’appliquait également à la Région flamande, mais il n’a pas eu beaucoup de succès en raison de sa complexité et des conditions strictes qu’il imposait. Le 1er juillet dernier, cependant, la Flandre a élargi et surtout simplifié considérablement le régime. Désormais, tous les biens culturels d’une importance exceptionnelle en tant que chefs-d’œuvre ou pièces maîtresses d’une collection sont

“On ne peut pas payer les droits de succession avec n’importe quelle œuvre d’art.” Jeroen Bruls Head of Wealth Analysis & Planning chez ING Private Banking

éligibles. “Il peut s’agir de pièces archéologiques, de bijoux, de manuscrits, d’objets d’intérêt scientifique, etc. L’intention du gouvernement flamand est d’éviter la disparition d’un patrimoine majeur à l’étranger, et d’assurer sa conservation en Flandre. En outre, les droits de succession ne sont pas les seuls à pouvoir être réglés avec des biens culturels: entrent aussi en ligne de compte les frais assimilés tels que les intérêts successoraux, les amendes administratives ou encore les frais de justice.” Autre nouveauté intéressante en Région flamande: la valeur des biens culturels est augmentée de 20% dans le cadre du versement. “Les biens culturels acceptés en paiement des droits de succession le sont donc à hauteur de 120% de leur valeur marchande. Par exemple, si vous offrez une œuvre d’art dont la valeur est estimée à 1 million d’euros, cela vous permettra de payer 1,2 million d’euros de droits de succession. Cette évaluation ne s’applique qu’au paiement, et non à l’évaluation des actifs de la succession elle-même.”

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E X PER T : R OBBE VAN H AUWERMEIREN

L’art

dans un monde digital L’art n’existe pas seulement sous forme physique: il est de plus en plus numérisé sous la forme de NFT. Les banques suivent de près cette évolution. Belfius participe notamment à un projet dans le cadre duquel les parties intéressées peuvent devenir propriétaires d’une œuvre d’Ensor. La digitalisation a un impact sur notre façon de travailler et de vivre, mais aussi sur l’art. L’art physique est numérisé, bien sûr, mais une autre forme d’art émerge: l’art numérique. Robbe Van Hauwermeiren, Senior Investment Strategist chez Belfius, y voit surtout des avantages pratiques, comme la facilité des transactions. “L’art se démocratise, tant pour les artistes que pour les acheteurs. Auparavant, l’artiste devait passer par la galerie d’art pour se faire connaître, ce qui n’était pas toujours évident. Aujourd’hui, il existe des plateformes d’autopromotion sur l’internet. En ligne, vous n’êtes du reste pas soumis à des restrictions géographiques. Enfin, l’artiste perçoit davantage, car il supprime les intermédiaires.” L’art numérique, en particulier sous la forme de jetons non fongibles (NFT), présente en revanche l’inconvénient d’être risqué et peu réglementé. Même les systèmes de pump-and-dump ne sont pas sans risque. “Les NFT sont proposés à un prix élevé, et lorsque le grand public intervient, la valeur s’effondre. Il est préférable de passer par un intermédiaire fiable, comme une banque.”

“Inutile d’avoir des millions en banque: les Art Security Tokens vous permettent d’investir dans l’art et de diversifier votre portefeuille.” Robbe Van Hauwermeiren Senior Investment Strategist chez Belfius

Ensor

Diversification du portefeuille

Belfius, qui possède la plus grande collection d’œuvres d’art de Belgique, cherchait depuis longtemps un moyen de mettre des œuvres à la disposition de ses clients. Ces derniers peuvent désormais acheter une part virtuelle d’une œuvre d’art accessible au grand public: des Art Security Tokens (AST). “Les clients moins fortunés peuvent de cette façon investir dans l’art et diversifier leur portefeuille”, souligne Robbe Van Hauwermeiren.

Tous les morceaux virtuels du Carnaval de Binche n’ont pas encore trouvé preneur. “De nombreux amateurs d’art ne connaissent pas encore très bien la blockchain. En tant que banque, nous avons un rôle éducatif à jouer à cet égard: nous devons présenter les avantages de ce système.”

La banque est partenaire du projet du musée royal des Beaux-Arts d’Anvers, où le Carnaval de Binche d’Ensor est virtuellement divisé en un grand nombre de parts égales. Les personnes intéressées ont la possibilité d’acheter ces morceaux virtuels de l’œuvre. “Ces AST sont entièrement réglementés et offrent la même protection qu’un investissement dans une action ou une obligation. Si l’œuvre d’art est vendue dans les 10 ans, les investisseurs reçoivent un pourcentage du produit de la vente.”

Et ils sont réels: “Vous investissez dans une œuvre d’art à laquelle vous n’auriez jamais eu accès autrement parce qu’elle est trop chère. Et vous diversifiez ainsi votre portefeuille. En 2022, actions et obligations ont perdu du terrain. Les clients voulaient se diversifier, mais ils ont parfois investi une trop grande proportion de leur portefeuille dans une seule œuvre d’art. Et au lieu de diversifier leurs avoirs, c’est le contraire qui s’est produit: ils les ont concentrés. Avec ce système, vous éliminez également le risque de contrefaçon. En enregistrant tout via la blockchain, vous pouvez voir l’historique complet des transactions liées à l’œuvre en question.”


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UN E AN CIEN N E ÉLÈ VE SO US L E F EU DE S PR OJE C T EUR S - M AR I AN N E HOE T

“Souvent, nous dirigeons les personnes qui viennent nous présenter certaines œuvres vers une maison de vente aux enchères locale.” Marianne Hoet Head of Business Development chez Phillips

Quand l’amour de l’art, l’expérience bancaire et la formation en planification patrimoniale se rencontrent

Head of Business Development et vice-présidente de la maison de vente aux enchères Phillips, Marianne Hoet lève un coin du voile sur les coulisses du marché international de l’art. Au terme de ses études de droit, Marianne Hoet a travaillé à la Générale de Banque avant de devenir Private Banker chez Mees Pierson Fortis, où elle a eu la chance de suivre la formation en planification patrimoniale. “Je m’intéressais davantage à la dimension patrimoniale qu’à l’aspect boursier. Cette formation m’a permis d’élargir mes horizons. J’ai appris l’importance d’avoir une vision de l’avenir, de penser à la prochaine génération et de voir au-delà de la simple gestion d’actifs.” À 42 ans, elle est entrée chez Christie’s. “Je ne connaissais rien aux ventes aux enchères, mais plusieurs mondes se sont alors rencontrés: ce que j’avais retenu de l’art depuis l’enfance, mes études, mon expérience bancaire et ma formation. Quand le CEO de Christie’s est parti chez Phillips voici six ans, je l’ai suivi.”

Une rotation plus rapide “Les marchands d’art, les galeries et les maisons de vente aux enchères sont complémentaires. Les galeries opèrent sur le marché primaire. Elles assurent le travail le plus crucial: placer les artistes sur la carte.

Elles visitent les ateliers et font des découvertes. Elles se retroussent les manches.” De leur côté, les marchands d’art et les maisons de vente aux enchères sont actifs sur le marché secondaire. “Ils se concentrent sur les œuvres d’art qui ont déjà fait partie d’une collection et qui sont ensuite reproposées à la vente. La rotation des œuvres d’art est nettement plus rapide qu’il y a 20 ans, les collectionneurs conservant les œuvres moins longtemps. Auparavant, le changement de propriétaire découlait généralement d’un divorce, d’un décès ou d’un règlement de dettes. Aujourd’hui, dès qu’une personne présente une offre intéressante, les propriétaires sont tentés de céder leur œuvre.” Alors que les salles de vente accueillaient principalement des marchands d’art, les collectionneurs sont fréquemment des particuliers, désormais. “Ils sont par ailleurs beaucoup mieux informés.” Marianne Hoet fait la distinction entre les maisons de vente aux enchères internationales et locales, qui sont complémentaires. “Souvent, nous orientons les personnes qui viennent nous trouver avec certaines œuvres vers une maison de vente aux enchères locale. Les

artistes n’ont pas forcément besoin d’explorer le marché international – ils peuvent même espérer recevoir plus de respect pour leur travail dans une maison de vente aux enchères locale.”

Spécialistes dans le monde entier Les estimations sont toujours réalisées en équipe. “Nous avons des spécialistes dans le monde entier”, indique Marianne Hoet. “Si un Américain possède un Marlene Dumas ou un Luc Tuymans, j’interviens toujours. À l’inverse, un Andy Warhol sera examiné par des collègues américains. Dans une expertise pour une vente aux enchères, nous définissons une fourchette comprise entre une estimation basse et une estimation haute.” Les maisons de vente aux enchères proposent de plus en plus de mettre une œuvre en vente à titre privé par l’intermédiaire de leur plateforme. “Parfois, les personnes préfèrent éviter les enchères pour que l’œuvre ne risque pas d’être vendue à l’estimation la plus basse. Toutefois, si vous êtes détenteur d’une œuvre de grande qualité destinée à un large marché, les enchères demeurent la formule la plus intéressante.”


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Private Bankers Association

CINQ C ON SEIL S P OUR A S SURER UNE ŒUVRE D’AR T

“Pour assurer des œuvres d’art, il n’est pas nécessaire d’avoir une vaste collection.” Myriam Klug Experte chez Hillewaere Assurances

“Une assurance

œuvres d’art est envisageable dès la première œuvre” Les collectionneurs d’art ne pensent pas toujours à assurer leur collection. Myriam Klug, experte chez Hillewaere Assurances, tord le cou à cinq idées reçues.

1

a collection d’œuvres d’art L relève de l’assurance incendie classique ou de l’assurance contenu

“Il convient de faire la distinction entre le contenu général de la maison, les objets de valeur et les œuvres d’art. Chaque œuvre d’art est unique et a une valeur unique. C’est ce qui la distingue de l’assurance habitation classique, où les objets particuliers ne sont souvent pas assurés de manière adéquate. Certaines personnes pensent que l’assurance œuvres d’art est chère, mais c’est souvent tout le contraire. L’assurance n’offre que des avantages, tant en termes de garanties que de primes. Ces garanties sont souvent exemptes de franchise et couvrent tous les risques. Les situations non assurées sont limitées et évidentes.”

2

’assurance œuvres d’art n’est L possible que pour une vaste collection

“Elle est déjà intéressante à partir d’une faible valeur, mais elle est bien entendu conseillée dans le cas d’une vaste collection privée de maîtres classiques et

d’œuvres d’art contemporain. Chacun vit l’art différemment. Certaines personnes achètent des œuvres pour des raisons émotionnelles, d’autres les reçoivent en cadeau, d’autres encore les considèrent comme un investissement.”

3

’assurance œuvres d’art n’est L nécessaire qu’en cas de vol

“Les dommages accidentels aux objets fragiles et non fragiles sont nettement plus fréquents, qu’il s’agisse de bris, de dégâts d’eau ou de suie. Les dommages peuvent par ailleurs survenir lorsque vous accrochez l’œuvre au mur ou lorsque vous la décrochez. Avec cette assurance, chaque œuvre est inventoriée afin que la description correcte figure sur l’inventaire, de même que la valeur pour laquelle les œuvres sont imposées et assurées.”

4

a couverture du transport L n’est pas nécessaire, parce que l’œuvre d’art est accrochée à un mur de la maison

“Le transport est inclus dans l’assurance œuvres d’art, à condition que celles-ci soient emballées et transportées de

manière professionnelle par un transporteur spécialisé. Dans certaines situations, il est important que les œuvres d’art soient exposées. Ce détail exige une certaine attention, notamment pour ce qui touche à l’emballage, au transporteur et à la couverture d’assurance. Il s’agit donc aussi du séjour dans le musée, la galerie ou d’autres lieux en Belgique et à l’étranger. C’est pourquoi il est utile, en ce qui nous concerne, de mieux comprendre à la fois le propriétaire et la collection elle-même.”

5

’assurance œuvres d’art est L figée dans le temps

“Lorsqu’une œuvre d’art est restaurée après avoir été endommagée, sa valeur peut être inférieure à ce qu’elle était auparavant. Cette diminution a un impact sur l’assurance œuvres d’art. L’inverse est aussi vrai: les œuvres d’art peuvent prendre de la valeur avec le temps. Prenons par exemple le travail de jeunes artistes dont les œuvres prennent de la valeur. Il faut réétudier et, le cas échéant, adapter le contrat d’assurance. Nous recommandons de revoir régulièrement la collection. À la demande du client, une réévaluation peut être effectuée.”


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CE QU ’IL FAU T É V IT ER , E T CE À Q UO I IL FAU T AB SO LUMEN T PEN SER

Vous prêtez votre œuvre d’art:

quelles précautions prendre? Les collectionneurs privés prêtent parfois des œuvres pour leur importance sociale, afin de les faire connaître à un public plus large. “La plupart considèrent comme un enrichissement l’exposition de leur œuvre dans un contexte différent”, note l’experte Els Vermeersch. Quelques précautions d’usage s’imposent, cependant.

“Essayez de connaître la destination de l’œuvre. S’il s’agit d’un prêt à un musée, aucun problème ne devrait se poser. En revanche, il arrive que des conservateurs indépendants organisent des expositions dans d’autres lieux. La situation est différente si votre œuvre se retrouve dans un espace non sécurisé.”

Le collectionneur privé reçoit généralement par courrier la lettre officielle du musée ou du conservateur indépendant. “Cette lettre précise le thème de l’exposition, s’il s’agit d’une exposition individuelle ou d’un groupe d’artistes, et sa durée”, détaille Els Vermeersch. La lettre est en principe accompagnée d’un contrat de prêt que le prêteur doit remplir. “La procédure peut sembler intimidante la première fois, mais vous pouvez toujours faire appel au personnel du musée.”

Certains propriétaires appréhendent le transport. “Dans la plupart des cas, c’est l’emprunteur qui assure le transport professionnel. Un manutentionnaire décroche l’œuvre de votre mur et l’emballe. L’œuvre est assurée ‘de clou à clou’, du moment où elle quitte votre mur jusqu’à ce qu’elle soit exposée dans le musée, et vice-versa.”

Assuré “de clou à clou” Le prêteur doit faire procéder à l’expertise de l’œuvre. “Pour une œuvre contemporaine, on peut avoir facilement une idée du prix d’achat. Pour une œuvre plus ancienne, il peut être intéressant de la faire évaluer par un expert en assurance.”

Le prêteur devra décider s’il souhaite être mentionné dans l’exposition ou s’il préfère

l’anonymat de l’expression “collectionneur privé”. “Certains insistent pour que leur nom soit indiqué, d’autres ne le désirent pas du tout. Il en va de même pour le catalogue. Si l’œuvre est exposée plusieurs fois, elle prendra logiquement de la valeur.” Le prêteur sera également invité à l’avant-première ou au vernissage, et recevra un ou plusieurs exemplaires gratuits du catalogue.

En bon état Els Vermeersch recommande de vérifier soigneusement que l’œuvre est en bon état. “Lorsqu’elle est exposée publiquement, l’œuvre peut être moins éclatante que ce que l’on pensait. Ou pourrait être moins bien mise en valeur si elle est accrochée dans une pièce immaculée. Parfois, les œuvres sont accrochées au mur depuis des années, et le propriétaire ne se rend pas compte que le cadre est abîmé ou que l’œuvre s’est un peu salie. Enfin, examinez attentivement le système de fixation. La responsabilité incombe en partie à la personne qui suspend l’œuvre, mais aussi au prêteur.”

“Parfois, l’œuvre est accrochée au mur depuis des années, et le propriétaire ne se rend pas compte que le cadre s’est abîmé ou que l’œuvre s’est un peu salie.” Els Vermeersch Conservatrice Compagnon d’Art


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