ISBN 978-2-7080-1329-2
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Marie-Christine Hazaël-Massieux
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Marie-Christine Hazaël-Massieux, professeur émérite de linguistique (Université de Provence/CNRS : Laboratoire « Parole et Langage ») et spécialiste des langues créoles, a publié de nombreux articles et plusieurs ouvrages sur les créoles. On peut mentionner notamment : Écrire en créole (L’Harmattan, 1973), Les créoles : l’indispensable survie (Éditions Entente, 1999), Textes anciens en créole français de la Caraïbe : histoire et analyse (Publibook, 2005).
M.C. Hazaël-Massieux
Qu’entend-on par « créoles à base française » ? Il s’agit de langues dont la formation aux XVIIe-XVIIIe siècles s’enracine dans le français mais aussi dans d’autres langues, les langues des esclaves. Nées dans les contacts linguistiques, pendant les colonisations européennes, ces langues résultent donc d’interprétations et de réanalyses effectuées dans le cadre de communications essentiellement orales, en dehors de toute pression normative. Le but de cet ouvrage est de donner un aperçu du fonctionnement d’ensemble de ces langues. Le lecteur intéressé trouvera ici une présentation synthétique, claire et concise concernant la petite dizaine de créoles à base française connus, illustrée par de nombreux exemples. De courts extraits de textes dans trois des créoles (guadeloupéen, haïtien et réunionnais) sont en outre proposés. Le lecteur découvrira que les créoles répondent à des règles précises quant à leur prononciation et à leur écriture, que leurs grammaires sont décrites et bien connues et qu’il existe des dictionnaires des créoles français. Il verra également que ces langues ont déjà donné lieu à une littérature significative et que, bien qu’ils conservent encore de nombreux traits de langues spécifiquement orales, les créoles sont utilisés dans la presse ou sur Internet. La question de l’avenir des créoles s’avère donc cruciale, aujourd’hui où seules les grandes langues (internationales et officielles) semblent avoir la possibilité de survivre.
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Collection L’ESSENTIEL FRANÇAIS dirigée par Catherine Fuchs Formes et notions La conséquence en français, par Charlotte Hybertie La concession en français, par Mary-Annick Morel Les ambiguïtés du français, par Catherine Fuchs Les expressions figées en français, noms composés et autres locutions, par Gaston Gross Les adverbes du français, le cas des adverbes en -ment, par Claude Guimier Les formes conjuguées du verbe français, oral et écrit, par Pierre Le Goffic L’espace et son expression en français, par Andrée Borillo Les constructions détachées en français, par Bernard Combettes L’adjectif en français, par Michèle Noailly Les stéréotypes en français, par Charlotte Schapira L’intonation, le système du français, par Mario Rossi La cause et son expression en français, par Adeline Nazarenko Les noms en français, par Nelly Flaux et Danielle Van de Velde Le subjonctif en français, par Olivier Soutet La construction du lexique français, par Denis Apothéloz La référence et les expressions référentielles, par Michel Charolles Le conditionnel en français, par Pierre Haillet La préposition en français, par Ludo Melis Le gérondif en français, par Odile Halmøy Le nom propre en français, par Sarah Leroy Les temps de l’indicatif en français, par Gérard Joan Barceló et Jacques Bres Les verbes modaux en français, par Xiaoquan Chu Le discours rapporté en français, par Laurence Rosier Les déterminants du français, par Marie-Noëlle Gary-Prieur Variétés du français Le français en diachronie, par Christiane Marchello-Nizia La variation sociale en français, par Françoise Gadet Les expressions verbales figées de la francophonie, par Béatrice Lamiroy (dir.) Les variétés du français parlé dans l'espace francophone. Ressources pour l'enseignement, t par Sylvain Detey, Jacques Durand, Bernard Laks et Chantal Lyche (dir.) Approches de la langue parlée en français, nouvelle édition, par Claire Blanche-Benveniste Outils et ressources Dictionnaire pratique de didactique du FLE, E par Jean-Pierre Robert Instruments et ressources électroniques pour le français, par Benoît Habert Les dictionnaires français, outils d’une langue et d’une culture, par Jean Pruvost Construire des bases de données pour le francais, par Benoît Habert Rédiger un texte académique en français, par Sylvie Garnier et Alan D. Savage Dictionnaire des verbes du français actuel,l par Ligia Stela Florea et Catherine Fuchs
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Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays. Toute représentation, reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. Par ailleurs, la loi du 11 mars 1957 interdit formellement les copies ou les reproductions destinées à une utilisation collective. © Editions Ophrys, Paris, 2011 Imprimé en France ISBN 978-2-7080-1329-2 Editions Ophrys, 25 rue Ginoux, 75015 Paris / www.ophrys.fr
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Table des matières
Introduction.......................................................................................................1 Chapitre I : Les créoles à base française : données géographiques, historiques et sociologiques .................................................................................................7 1. Les créoles à base française : leur place dans le monde ............................... 7 2. Histoire et évolution des langues créoles.................................................. 12 3. Quelques données sociolinguistiques ...................................................... 17 Chapitre II : Questions de phonétique et de phonologie...................................31 1. Quelques caractéristiques majeures des créoles français ........................... 31 2. L’exemple d’un système phonologique : le guadeloupéen......................... 33 3. L’intonation en créole ............................................................................. 38 Chapitre III : L’écriture des créoles ...................................................................41 1. Transcription phonétique et écriture d’une nouvelle langue ..................... 42 2. Des différences entre les créoles ............................................................... 43 3. Quelques conséquences de l’aménagement graphique des créoles ............ 47 Chapitre IV : Questions de morphologie..........................................................53 1. Le verbe .................................................................................................. 54 2. Le nom .................................................................................................. 59 3. Les déterminants du nom ....................................................................... 61 3.1. L’absence de marque de détermination ............................................ 62 3.2. L’indéfini ......................................................................................... 62 3.3. Le défini .......................................................................................... 63 3.4. Le démonstratiff ............................................................................... 65 3.5. Le possessiff ...................................................................................... 65 4. Des pronoms personnels et de quelques autres ....................................... 67 5. Les adverbes ........................................................................................... 70 6. Y a-t-il des adjectifs en créole ? ............................................................... 73 7. Les connecteurs ...................................................................................... 73 8. Conclusion ............................................................................................. 74 V
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Chapitre V : Questions de syntaxe ....................................................................77 1. Fonctions et ordre des constituants ........................................................ 77 2. Ordre des constituants et caractérisation des parties du discours ............. 78 3. Retour sur la question des adjectifs ......................................................... 79 4. Retour sur la question des connecteurs.................................................... 81 5. Le passif ................................................................................................. 84 6. Le groupe de mots est-il un mot ? ........................................................... 85 7. Conclusion ............................................................................................ 86 Chapitre VI : Questions de lexique ...................................................................89 1. Les origines du lexique créole .................................................................. 89 2. Les développements du lexique : la composition ..................................... 91 3. La dérivation .......................................................................................... 92 4. Les dictionnaires : inventaire, nomenclature, caractéristiques .................. 93 4.1. L’inventaire dans les dictionnaires créoles......................................... 93 4.2. Structure des entrées ........................................................................ 96 5. L’impossible définition. Vers une sémantique créole ? .............................. 98 Chapitre VII : Questions de sémantique.........................................................105 1. Une sémantique des créoles : état de la question.................................... 105 2. La question des champs notionnels ...................................................... 109 3. À propos de sémantique grammaticale .................................................. 113 3.1. Questions de valence verbale ......................................................... 113 3.2. Structures sérielles.......................................................................... 115 Chapitre VIII : Usages littéraires et médiatiques des créoles............................123 1. La littérature en français et en créole : quelques repères ......................... 124 2. La presse écrite et parlée ........................................................................ 127 3. Internet ................................................................................................ 128 Conclusion : L’avenir des créoles ....................................................................131 Annexe : Quelques textes dans divers créoles ..................................................139 Créole guadeloupéen................................................................................. 139 Créole haïtien .......................................................................................... 142 Créole réunionnais ................................................................................... 143 VI
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Table des matières
Repères bibliographiques................................................................................147 Glossaire ........................................................................................................151 Index.............................................................................................................. x 165
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ABRÉVIATIONS
Pour désigner les principales langues créoles à base française, on recourra souvent aux abréviations suivantes : haï. = haïtien guad. = guadeloupéen mart. = martiniquais guy. = guyanais réu. = réunionnais mau. = mauricien sey. = seychellois
Autres abréviations Adj. = adjectif Adv. = adverbe AKM = Akademi Kreol Morisien CV = Consonne-Voyelle (indique l’ordre de succession dans une syllabe) CVC = Consonne-Voyelle-Consonne (ordre syllabique) DOM = Départements d’Outre-Mer GEREC = Groupe d’Etudes et de Recherches en Espace Créolophone GN = Groupe Nominal GV = Groupe Verbal lat. = latin lit. = littéralement N = nom OI = Océan Indien V = verbe
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INTRODUCTION
Sous le terme de « créoles* », on désigne diverses langues, parlées dans des régions très variées du monde, nées principalement au cours des colonisations européennes qui ont eu lieu entre les xvie et xviiie siècles. Il existe des créoles « à base française » comme on dit parfois, ou plus brièvement des « créoles français » (ceux qui nous intéresseront ici), mais également des créoles anglais, des créoles portugais, des créoles néerlandais, quelques créoles espagnols – bien qu’apparemment moins nombreux, sans doute pour des raisons liées aux modalités particulières de la colonisation espagnole. Ces créoles* se sont développés, en raison du contact de langues entre le français des maîtres et les langues (multiples) des esclaves. Les colons arrivés aux Antilles au xviie siècle, ne parlaient pas la langue de la Cour, non plus que celle qui était écrite par les grands auteurs du temps. Ce français d’usage strictement oral marqué de formes régionales et populaires, repris par les esclaves qui ne devaient le saisir que de façon approximative, a alors connu une évolution accélérée. Si l’on parle encore longtemps de « français » ((français des îles, français corrompu, etc. voir chapitre I,2), les courts textes dont on dispose dès la fin du xviie siècle dans la Caraïbe, un peu plus tard dans l’océan Indien, montrent qu’il s’agit bien des ancêtres des langues créoles actuelles. Il faut rappeler que les échanges communicatifs avaient lieu dans le contexte des mouvements de populations au cours de l’esclavage (sociétés d’habitation* puis sociétés de plantation*), sous l’influence aussi – que l’on ne peut pas toujours facilement évaluer mais qui est certaine –, des langues des locuteurs non francophones (langues africaines diverses, parfois malgache, sans doute langues de l’Inde, voire un créole déjà constitué…). L’usage strictement oral du medium de communication ouvrait la voie à de multiples approximations en-dehors de toute pression normative. 1
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Les créoles à base française
Le terme de créole, qui vient d’un mot espagnol « criollo » (d’après Woll, D. (1997), voir référence en fin de chapitre), désigne à l’origine tout « produit » né dans ces terres de colonie de parentss non originaires du pays, et s’applique aussi bien aux humains qu’aux animaux ou végétaux. Au cours de l’histoire des colonies, on est passé progressivement de cette désignation comme créolee d’une certaine partie de la population à la nomination, de la langue qu’elle pratiquait ; comme l’allemand est la langue des Allemands, le français la langue des Français, originellement le créole est la langue des Créoles. Comme le terme de « créole », en référence à la population, était utilisé dans diverses colonies, on ne sera pas surpris qu’il recouvre des réalités différentes : ici il désigne plutôt des Noirs, là plutôt des Blancs, et largement des populations métissées. Les langues créoles quant à elles sont fort diverses : on le comprendra immédiatement si l’on oppose les créoles à base anglaise aux créoles à base française, mais en outre, on soulignera dès maintenant que les créoles français eux-mêmes sont des langues qui, même si pour une part leur origine française est indéniable, comportent des différences importantes interdisant souvent l’intercompréhension pour des locuteurs créolophones issus d’îles éloignées : un Haïtien ne comprend pas un Réunionnais, un Mauricien ne peut se faire entendre d’un Guadeloupéen, etc. Pour prendre une comparaison, on rappellera que le latin a donné naissance à diverses langues romanes, et que l’évolution naturelle de ces langues en a fait des idiomes tout à fait différents ; de la même façon, on peut dire que le français du xviie siècle, dans ses variétés* régionales et populaires nombreuses, utilisé et interprété dans les îles coloniales concernées, par des locuteurs divers, s’est ainsi trouvé marqué par des structures grammaticales, lexicales, sémantiques, issues de langues autres. Dans ces conditions très spécifiques sont nées les diverses langues qu’aujourd’hui on appelle créoles, sans qu’on puisse exclure que d’autres langues avant (ou après) les créoles historiques ne soient nées également de la sorte en raison de phénomènes d’interprétation et d’ajustements progressifs entre locuteurs de langues diverses pour parvenir à une communication efficace. L’évolution contemporaine des créoles dans des situations géographiques et sociolinguistiques* diverses, loin de rapprocher ces langues, accentue les différences qui les caractérisaient déjà à l’origine, du fait de leur « naissance » dans des zones variées, selon des contacts de populations non semblables. Même si l’histoire des créoles est plus courte que l’histoire des langues romanes, et les séparations dès lors souvent moins marquées, les différences qui séparent les créoles français sont suffisamment importantes pour que 2
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Introduction
l’intercompréhension de ceux des créolophones qui notamment n’accèdent pas au français – langue qui réunit presque tous les créolophones non unilingues – puisse être à peu près nulle, notamment lorsque les séparations des peuples sont anciennes et les régions concernées très éloignées. Nous comprendrons ces questions plus aisément dans les chapitres suivants avec quelques exemples linguistiques. Nous parlerons dans ce petit ouvrage dess créoles et non pas du u créole – expression qui n’a pas de sens dès que l’on connaît un peu les situations réelles, et l’on retiendra déjà que les langues dites créoless ne constituent ni une « famille de langues » ni un « type linguistique* ». Si par commodité on les classe selon leurs bases (« à base française, anglaise », etc.), on se gardera d’en déduire que les créoles sont du français, de l’anglais « déformés » – comme on l’a parfois laissé entendre à une époque plus ancienne. Ce sont de véritables langues maintenant, dotées de systèmes phonologiques* propres, de grammaires que le linguiste peut décrire à partir de corpus*, documents enregistrés ou écrits, collectés un peu partout et déjà relativement nombreux à l’heure actuelle (même si cette tentative de bilan commence à dater, on peut se reporter à M.C. Hazaël-Massieux (1996), référence en fin d’introduction), qui permettent de percevoir l’évolution des langues issues de la créolisation* (elles évoluent comme toutes les langues). Elles connaissent toutes, à un degré ou à un autre, ou ont connu récemment, un passage souvent laborieux par ce que l’on appelle l’aménagement linguistique* permettant leur codification* / standardisation* en vue de l’écriture qui, dans le monde contemporain fortement médiatisé apparaît comme un élément fondamental pour reconnaître le statut de « langue » à des variétés* linguistiques. La question est souvent très complexe, comme on le verra, en raison notamment du fonctionnement diglossique de ces langues dans le contact avec une langue européenne dotée d’un prestige important. Ainsi dans cet ouvrage, après avoir examiné les données géographiques, historiques et sociologiques indispensables pour comprendre l’apparition et les évolutions de ces langues nouvelles entre le xviie siècle et aujourd’hui, on examinera les données phonétiques* et phonologiques* qui les caractérisent, sans omettre quelques remarques sur le rôle de l’intonation dans des langues encore essentiellement orales. Quelques analyses des problèmes posés par le passage à l’écrit des créoles permettront de comprendre la complexité du développement de langues jeunes, encore peu écrites, et de saisir par là même comment les locuteurs, parfois à contre courant de ce qu’entreprennent 3
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Les créoles à base française
les linguistes eux-mêmes, peuvent retarder l’aménagement de ces langues. On entreprendra alors une description grammaticale (morphologique et syntaxique), puis lexicale de ces langues, en proposant des approches contrastives permettant de saisir les différences et les ressemblances entre ces parlers nés tous en situation de contacts de langues (mais ce ne sont pas les mêmes langues qui ici ou là ont été en contacts) et qui se développent dans des situations que l’on qualifie parfois de « diglossiques », selon cependant des modalités variées, et qui évoluent dans des contextes sociaux et politiques divers. Quelques questions de sémantique permettront notamment de proposer des pistes de recherches essentielles pour poursuivre la description de ces langues. De trop brefs panoramas concernant les littératures, les usages dans les médias modernes, sans oublier Internet, permettront de s’interroger en conclusion sur l’avenir des créoles dans le monde contemporain. Cette présentation, nécessairement synthétique, permettra cependant d’avoir des aperçus précis et concrets du fonctionnement de cette petite dizaine de langues, que l’on peut rapprocher sur certains points, et clairement différencier par ailleurs. Des exemples tout au long du livre, ainsi que quelques textes suivis à la fin de l’ouvrage permettront au lecteur de commencer la découverte de langues encore jeunes et dont l’avenir est largement conditionné par les comportements linguistiques de ceux qui les décrivent et de ceux qui les parlent. Pour aller plus loin : Outre Hazaël-Massieux, M.C. (2008) (voir référence complète dans Repères bibliographiques à la fin de l’ouvrage), pour l’origine du mot « créole » on pourra consulter : HAZAËL-MASSIEUX M.C. (1996) – « Les corpus créoles », in Revue française de linguistique appliquée, Dossier « Corpus : de leur constitution à leur exploitation », vol. 1 – 2, décembre 1996, 103-110 [il faut souligner que cet article est déjà ancien, et qu’il serait bon tous les dix ans de dresser un état des corpus dans le monde créole : corpus oraux, et très nombreux corpus écrits, textes anciens ou contemporains, qui permettent d’ailleurs de mesurer les évolutions.]. WOLL D. (1997) – « Esp. Criollo y port. Crioulo : volviendo a la cuestión del origen y la historia de las dos palabras », in Latinitas et Romanitas, Festschrift für Hans Dieter Bork zum 65. Geburtstag, hrsg. Von Annegret Bollée und Johannes Kramer, Bonn : Romanistischer Verlag, pp. 517-535.
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Questions de morphologie
4. Des pronoms personnels et de quelques autres On a signalé l’absence à peu près totale de genres sur le nom en créole (en tout cas l’absence de classes nominales) dans les divers créoles. Mais il faut ajouter maintenant que même les pronoms de 3e personne ignorent la différence de sexe. Par là les créoles vont plus loin que l’anglais dans l’indifférenciation : l’anglais n’a pas de classes nominales comme en français (deux), en allemand (trois), et comme bien d’autres langues (les langues bantoues connaissent jusqu’à seize classes nominales), mais oppose en troisième personne du singulier un « he » et un « she », et même un « it ». En créole des Petites Antilles, en revanche, I ka vinii signifie aussi bien « il arrive » que « elle arrive » : là encore c’est le contexte qui permet de déterminer s’il convient de rendre cette phrase par un pronom féminin ou masculin lorsqu’on la traduit en français. Les variations* qui apparaissent dans la zone américano-caraïbe ne correspondent pas à une « flexion » des formes pronominales : elles sont strictement conditionnées par le contexte* morpho-phonologique. Ainsi alors qu’aux Antilles tout particulièrement les pronoms de la 2e et de la 3e personne du singulier connaissent des formes courtes et des formes longues, celles-ci sont, sauf volonté d’emphase particulière qui peut modifier les règles usuelles, surtout marquées par le contexte. En position inaccentuée d’abord – ce qui correspond à la position du sujet –, on a le plus souvent la forme courte i ou ou. En position de complément par ailleurs, la présence d’une voyelle ou d’une consonne en fin de verbe a aussi des conséquences sur la forme retenue puisque le pronom complément est postposé au verbe. Ainsi alors que l’on dit couramment en Guadeloupe mwen vwè-ii ou mwen vwè-ou (« je l’ai vu, je t’ai vu ») – avec un pronom réduit à une (semi-)consonne après voyelle, la présence d’un verbe se terminant par une consonne entraîne obligatoirement la forme longue : mwen bat-li, mwen bat-vou (« je l’ai battu, je t’ai battu »). De même en haïtien on trouvera tantôt ll, tantôt li, tantôt m, tantôt mwen selon des règles purement contextuelles. Dans l’OI, on peut parler de morphologie du pronom, à la différence de ce qui se passe pour les créoles de la Caraïbe. En mauricien alors que déjà, dans quelques cas, les formes des particules personnelles peuvent changer quand elles servent de déterminants (possessifs) ou de pronoms, il y a une distinction pour les deux premières personnes entre la forme du pronom sujet et celle du pronom complément. On peut ainsi écrire le tableau des marques personnelles en mauricien : 67
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Les créoles à base française
1re personne 2e personne 3e personne
Pronoms sujets
Pronoms comp.
mo (mo santé)
–mwa
to (fam.) / ou (formel) li (li santé) (« il chante »)
–twa –li (li ti apel li)
4e personne
nou
–nou
5e personne
zot
–zot (remet zot anba pié)
6e personne
zot
–zot
Déterminants possessifs mo (mo liv, mo santé) (« mon livre, ma chanson ») to (to liv) (« ton livre ») so (so santé) (« sa chanson ») nou (nou pei) (« notre pays ») zot (zot pei) (« votre/vos pays ») zot (zot lizié) (« leurs yeux »)
À la Réunion le pronom complément est toujours distinct du pronom sujet. On a : moin / amoin, ou /aou ; li / ali ; nou / anou ; zot / azot ; zot / azot. On voit que les pronoms, se présentent selon des formes variées d’un créole à l’autre, avec toutefois deux grandes tendances : le système de la zone caraïbe et le système de l’OI. Ceci explique qu’il peut y avoir de véritables erreurs de compréhension : on pense en particulier à la forme zò z t qui dans la Caraïbe concerne la 2e personne du pluriel, alors qu’elle est aussi employée dans l’OI pour la 3e personne du pluriel (alors que l’on a yo dans les Petites Antilles et en Haïti, yéé en Guyane). Il faut signaler encore qu’en Haïti les élisions sont très nombreuses, entraînant des variations* formelles importantes. Ces règles d’élision complexes ont été décrites et bien explicitées par Jean-Robert Cadely (notamment 1995 et 1997, voir références en fin de chapitre) ; en mauricien il existe un certain nombre de modifications liées à l’environnement et au débit rapide (Didier de Robillard (1993), référence en fin de chapitre). On peut présenter dans un tableau les principales formes des pronoms, tous issus à l’évidence de formes françaises ou dialectales (zòt< t vous autres, eux autres) :
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Questions de morphologie
Petites Antilles Haïti Guyane Pers. 1 moin/man (an–) mwen /–m– mo Pers. 2 (v)ou / w Pers. 3 l(i) / y
ou li / –l–
to /ou li
Pers. 4 nou Pers. 5 zòt Pers. 6 yo
nou / –n– nou / –n– yo / y
nou zot yé
Réunion mwin / mi / amwin ou / aou li / lu / èl / ali nou / anou zot / azot zot / azot
Maurice mo / mwa to / twa li nou zot zot
En Guyane, mais aussi dans tout l’océan Indien, on voit à la 3e personne lii (pronom) remplacé par so dans le paradigme des déterminants possessifs puisqu’on a mo, to, so, nou, zot, yé. é Les possessifs sont en outre préposés au nom : so frèè (Guyane, Maurice) « son frère » ; mo chatt ou mo satt (mêmes pays) « mon chat », etc. Ainsi, si le mauricien ne distingue pas à la première personne « je chante » et « ma chanson » mo santee [attention : en mauricien on ne représente pas d’accent graphique puisqu’il n’y a pas d’opposition [e] ~[ε] mais le « e » graphique se lit [e]), il oppose li santee « il chante », et so santee « sa chanson »]. Le yé, é spécifique q du gguyanais y (yyé livv « leur livre ») est remplacé p par zott en mau. : zot liv. À la Réunion, on a comme déterminants possessifs, toujours antéposés au nom mon, out, son, nout, zot, zott (ce qui distingue assez largement ce paradigme de celui des pronoms : out papaa « ton père » (réu.)). Aux Seychelles où les formes sont très proches de celles de Maurice, on trouve mon / mwaa comme pronom de première personne, et ou (plus rare à Maurice, bien qu’attesté en valeur de politesse) comme deuxième personne. Les possessifs sont mon, ou, son, nou, zot, t zott également antéposés. Les pronoms relatifs proprement dits sont peu nombreux dans les créoles ; on dispose toutefois de procédés qui permettent de montrer qu’un groupe ou une phrase sont liés au nom qui précède et qu’il détermine. On mentionnera le pronom relatif sujet : ki, attesté à peu près partout : nonm ki vini sé bon moun an-mwen (guad.) « l’homme qui est venu est un de mes amis ». Aux Antilles, les formes qui correspondraient à des relatives objets en français ne sont pas introduites par un pronom, mais la solidarité des éléments dans le groupe nominal est soulignée par l’usage d’une particule laa déterminante, reprise en fin de groupe : nonm-la mwen vwè la « l’homme que j’ai vu » (guad.) ; wòb sa a Nana renmen an, koute twò chèè « cette robe 69
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Les créoles à base française
que Nana aime coûte trop cher » (ex. haï. tiré de Joseph L. Joseph (1988), référence en fin de chapitre [la virgule ajoutée ici pour séparer le GN du GV semble indispensable pour une lecture correcte]). Dans cette phrase le laa du guadeloupéen est représenté par an en contexte* de voyelle nasale. Dans l’océan Indien, on pourra citer un exemple comparable de D. de Robillard (2000, référence en fin de chapitre) où la, selon la terminologie qu’il adopte, joue le rôle de « borne syntagmatique » : Bug (ki) mo ti dir twa la, ki fin vin lakaz la, li fin fon nett « Le type dont je t’ai parlé qui est venu à la maison a disparu complètement ». On signalera toutefois, particulièrement dans les DOM des Antilles, que l’influence du français, langue en contact constant avec le créole, se fait sentir et qu’il n’est pas rare d’entendre : nonm-la ku (ou ke) e mwen vwè la, même si cet usage est dénoncé par les locuteurs quand on le leur soumet. On ne peut discuter plus complètement ici la question de l’homonymie partielle entre pronoms relatifs et pronoms interrogatifs ; on notera toutefois que dans les créoles, très souvent, l’interrogatif ne peut être kii seul, mais une forme précisant l’objet de l’interrogation : ki moun (« qui », « quelle personne »), ki bò ou ki kotéé (« où »), ki lèè (« quand »), etc. (haï.). Le lecteur pourra se reporter pour en savoir plus à Véronique (2007), article mentionné en fin de chapitre.
5. Les adverbes On cite souvent dans les grammaires des créoles la possibilité de fabriquer un adverbe par ajout du suffixe –man (voir le français –ment) t à une forme nominale : vitman (« vite, rapidement »), kouyaman (« bêtement »), blipman (« brusquement »), bònman / bòlman (« simplement »)… Ces « adverbes en –man tirés du dictionnaire guadeloupéen (Ludwig et al.l 1990), ne sont de fait que très peu nombreux, et ils le sont peut-être encore moins à la Réunion où, dans le Dictionnaire créole réunionnais / françaiss de D. Baggioni, on trouve répertoriés comme adverbes surtout des éléments issus de locutions adverbiales françaises et donc d’une grande variété morphologique : alafrèss « à la fraîche, le soir », antravèrr « de travers, en travers », dabitidd « habituellement, d’habitude », daborr « d’abord », daborinn « tout d’abord », dann fon « en bas », dann moman laa « à cette époque », kousikou « coup sur coup », souvantfwa « souvent », etc. Si l’on trouve dans ce dictionnaire dousman / ti-dousman (« lentement, prudemment »), kaziman « presque, en quelque sorte », vitman 70
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Chapitre VIII
USAGES LITTÉRAIRES ET MÉDIATIQUES DES CRÉOLES Si les débats autour de la question du créole à l’école ont souvent occulté toute autre question de diffusion, il faut rappeler qu’il existe déjà, en toute zone, les prémices d’une littérature en créole ; de la poésie au roman, en passant par le théâtre, mais aussi par ces formes plus particulières de la littérature orale que sont les contes, les fables, les devinettes, et même ces genres plus récents (caractéristiques d’un écrit avancé, alors), que sont les essais, voire même, de façon toutefois encore embryonnaire, les cours ou encore les textes législatifs ; enfin on ne peut négliger la traduction d’œuvres issues de la grande littérature mondiale (des grandes pièces classiques à la Bible, traduite intégralement en créole haïtien), ou encore les bandes dessinées, qui apparaissent un peu partout traduites et/ou adaptées en créole. Les diverses langues créoles que nous avons évoquées ici ont su rendre accessibles, plus ou moins tôt dans leur histoire, des œuvres littéraires. Il reste qu’en raison d’un faible apprentissage de la lecture en créole, ou parfois même de leur illettrisme, les populations n’accèdent que très partiellement aux écrits en créole qui n’apparaissent jamais comme une priorité. Toutefois, au cours des cinquante dernières années, tout particulièrement dans les pays indépendants que sont Haïti, Maurice et les Seychelles, l’écriture s’est développée, et de nombreux textes en créole paraissent chaque année.
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Les créoles à base française
1. La littérature en français et en créole : quelques repères Tentent l’aventure un peu partout des éditeurs, avec des moyens souvent limités car il faut bien admettre que peu nombreux sont ensuite les lecteurs au rendez-vous, du fait notamment des différences entre les créoles et des difficultés partout avouées pour déchiffrer les graphies créoles. Parfois les auteurs sont amenés à imprimer à compte d’auteur des œuvres auxquelles ils tiennent, qui n’auront alors qu’une diffusion réduite, mais qui leur permettent de prendre date. Tout ceci explique que lorsque l’on parle de « littérature créole », les lecteurs pensent beaucoup plus aux littératures francophones qui émanent d’auteurs haïtiens, antillais, réunionnais, guyanais, mauriciens ou même seychellois. Plus ou moins proches du mouvement que l’on appelle la créolité, é en Martinique ou en Guadeloupe, des auteurs s’illustrent de fait en français, mais en cultivant un certain type de « créolismes » qui est très apprécié, en France dans l’hexagone. Il convient de citer Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, mais aussi Ernest Pépin ou Gisèle Pinaud, ou encore Bertène Juminer, Daniel Maximin, Suzanne Dracius, Maryse y Condé, Elie Stephenson p en Guyane, et bien d’autres auteurs qu’on ne peut tous nommer ici. À la Réunion selon une veine différente, Boris Gamaleya, Monique Agénor, JeanFrançois Sam-Long, Gilbert Aubry, Axel Gauvin sont appréciés pour leurs œuvres en français. Certains de ces auteurs écrivent aussi en créole, même s’ils sont souvent plus connus du grand public pour leurs œuvres francophones, qui sont publiées chez de grands éditeurs métropolitains (Gallimard, Grasset, Robert Laffont et quelques autres). Certains romans francophones, en particulier aux Antilles, mais c’est aussi le cas de ceux d’Axel Gauvin à la Réunion, sont écrits dans un français profondément marqués par le créole. Il ne s’agit pas seulement pour ces auteurs d’intégrer de façon pittoresque quelques mots en créole (comme les auteurs des années 1940-1950) mais de nourrir leur langue française de la grammaire du créole, d’« écrire directement le créole en français » (voir M.C. Hazaël-Massieux (2000b), référence en fin de chapitre – article où l’on utilise cette expression à propos de Patrick Chamoiseau, auteur qui a manifesté en l’occurrence un talent tout particulier, en constituant une véritable nouvelle langue qui conjugue aussi bien les richesses du français que les richesses du créole). Dans les mondes créoles, il faudrait évoquer encore ces écrivains tellement connus que la littérature française est prête à les intégrer purement et simplement, sans même rappeler leur origine : Aimé Césaire, Léon-Gontran Damas, Edouard Glissant, JeanMarie-Gustave Le Clézio, René Depestre… Et on ne peut pas ne pas citer aussi ces auteurs haïtiens ou mauriciens, sans doute moins connus du grand 124
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Usages littéraires et médiatiques des créoles
public mais dont la valeur doit être immédiatement rappelée : Jack-Stephen Alexis, Georges Anglade, Marie Chauvet, Roger Dorsinville, Jean-Claude Fignolé, g Danyy Laferrière… p pour Haïti, Ananda Devi, Dev Virahsawmy, y Édouard J. Maunick, et tant d’autres pour l’île Maurice, en ne mentionnant ici que quelques auteurs parmi tous ceux qui se sont illustrés dans des genres divers (poésie, théâtre, roman…). À côté de ces auteurs francophones, il existe bel et bien des écrivains qui, en créole, au fil des ans, nourrissent cette littérature : des textes en créole livrent ainsi des témoignages linguistiques passionants depuis le xviiie siècle qui permettent de reconstituer en partie l’histoire des diverses langues. Si les premiers textes sont principalement des textes de chansons, parfois un peu plus tardivement réinsérés en partie dans des pièces de théâtre (genre très prisé aux îles du xviiie siècle), on a aussi des textes religieux (traduction et adaptation de passages bibliques par des missionnaires), mais aussi – même si ces documents ne méritent pas le titre d’œuvre littéraire, des morceaux de procès, des proclamations politiques rédigées en créole. La poésie se développe tout au long du xixe siècle, avec des adaptations de fables (La Fontaine, Florian…), des poèmes probablement souvent chantés, surtout dans les premières décennies ; puis ce sont les contes, toujours quelques documents religieux (des catéchismes par exemple dans diverses zones), des récits, des lettres (publiées dans des journaux notamment politiques pour prendre la défense de tel ou tel parti), des pastiches… Le nombre des poèmes s’accroît vers la fin du xixe siècle, avant que ne voie le jour ce que l’on considère comme le premier roman en créole (un remarquable témoignage sur le guyanais à la fin du xixe siècle), Atipa, œuvre d’un auteur qui prend le pseudonyme de Parépou. Au xxe siècle, les textes en créole sont beaucoup trop nombreux pour qu’on essaye de citer avec une quelconque précision tous ceux qui sont accessibles en toute zone. On a toujours beaucoup de théâtre et de poésie, des essais, de courtes nouvelles ou des scénettes, tandis que des concours annuels ici ou là (on pense par exemple aux Jeux Floraux en Guadeloupe dans les années 1940-60) se proposaient de reconnaître les talents de ceux qui s’essayaient à écrire en créole. Il convient de souligner qu’une grande partie de la production créolophone est haïtienne ; c’est en Haïti, pays où l’usage du créole est le plus généralisé, qu’on voit paraître à nouveau des romans en créole, alors que le genre semblait largement délaissé depuis la pièce unique guyanaise au xixe siècle : il est vrai qu’il n’est pas aisé de « tenir la distance », de manier des 125
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ISBN 978-2-7080-1329-2
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Marie-Christine Hazaël-Massieux
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LES CRÉOLES À BASE FRANÇAISE
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Marie-Christine Hazaël-Massieux, professeur émérite de linguistique (Université de Provence/CNRS : Laboratoire « Parole et Langage ») et spécialiste des langues créoles, a publié de nombreux articles et plusieurs ouvrages sur les créoles. On peut mentionner notamment : Écrire en créole (L’Harmattan, 1973), Les créoles : l’indispensable survie (Éditions Entente, 1999), Textes anciens en créole français de la Caraïbe : histoire et analyse (Publibook, 2005).
M.C. Hazaël-Massieux
Qu’entend-on par « créoles à base française » ? Il s’agit de langues dont la formation aux XVIIe-XVIIIe siècles s’enracine dans le français mais aussi dans d’autres langues, les langues des esclaves. Nées dans les contacts linguistiques, pendant les colonisations européennes, ces langues résultent donc d’interprétations et de réanalyses effectuées dans le cadre de communications essentiellement orales, en dehors de toute pression normative. Le but de cet ouvrage est de donner un aperçu du fonctionnement d’ensemble de ces langues. Le lecteur intéressé trouvera ici une présentation synthétique, claire et concise concernant la petite dizaine de créoles à base française connus, illustrée par de nombreux exemples. De courts extraits de textes dans trois des créoles (guadeloupéen, haïtien et réunionnais) sont en outre proposés. Le lecteur découvrira que les créoles répondent à des règles précises quant à leur prononciation et à leur écriture, que leurs grammaires sont décrites et bien connues et qu’il existe des dictionnaires des créoles français. Il verra également que ces langues ont déjà donné lieu à une littérature significative et que, bien qu’ils conservent encore de nombreux traits de langues spécifiquement orales, les créoles sont utilisés dans la presse ou sur Internet. La question de l’avenir des créoles s’avère donc cruciale, aujourd’hui où seules les grandes langues (internationales et officielles) semblent avoir la possibilité de survivre.
LES CRÉOLES À BASE FRANÇAISE
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