Le String Minimum
Spleen l’Ancien
Photographies : Tonio Cazin
Paddock "On the road again !" Je suis arrivé en bas de chez moi il était à peine deux heures du mat’, j’ai juste sorti la guitare, un sac. Le reste, on verra plus tard… On avait joué une bonne heure et demie, tout s’était bien enchaîné, belle écoute, rappels, retours chaleureux, mais j’ai pas réussi à mordre dedans, trop peu de public, pas de vrai trac, j’ai pas réalisé, je me suis pas lâché. Après, j’ai pas fait long feu. J’ai taillé la route, trente bornes, et je me suis retrouvé le cul sur une chaise, dans la cuisine, solo plombé, sale impression, glauque sur les bords ! Et là, maintenant, à l’instant, 2 heures 27 du matin, le chanteur naïf se plante, se scotche, hébété, devant l’écran de l’ordinateur. "Spider Solitaire", je fais des réussites, je gagne, je perds, comme si rien ne s’était passé ! Drôle de vieux chanteur, qu’est-ce que tu fais là, quinze ans plus tard, à revenir traîner tes guêtres sur scène ? Qu’est-ce que tu as de si urgent à confier à l’Humanité ? Tes peines, tes rêves, tes petits cris de révolte ? Mais elle s’en fout, l’Humanité, elle a d’autres chats à fouetter ! Tu veux prouver quoi ? Que tu es un mec pas si mal que ça, un peu sensible, au fond quand même ? Ou bien tu veux dire que le Monde est bien nase mais qu’il y a quand même moyen de déconner là-dessus, hein, gamin ?! "Personne ne t’attend nulle part", je me suis dit, "personne n’attend personne, peut-être qu’on se croise, c’est tout". J’ai mis mon pantalon de scène dans la machine. Il avait pas mal morflé dans ce trou perdu, vaguement boueux, au bout d’une route, en pente, toute cabossée. Alors, c’est ça ton itinéraire bis, c’est ça tes chemins buissonniers, mon coco ? Come-back to the paddock, vieux cheval de retour ! Je me mets au pieu. Il est trois heures pile. Quelques piafs commencent à chanter dehors. Matinaux, matinaux, les oiseaux ! Et, même si je sais que je serai debout avant, je mets quand même le réveil pour pas louper Télé-Foot.
Patinage artistique J’ peux pas r’garder l’ patinage artistique Ça m’ fait mal oh ça m’ fait trop mal Ça me stresse ça m’angoisse ça me panique Ces filles qui glissent sur le cristal J’adore les voir tourner toutes ces oiselles J’adore ces libellules graciles, Le triple lutz après le double axel Avec elles ça paraît facile Regarde-la, la petite japonaise Comme elle est mignonne et mutine Chang’ment de carre grand écart c’est balèze C’est beau la vie quand elle patine ! J’ peux pas r’garder l’ patinage artistique Ça m’ fait mal oh ça m’ fait trop mal Oui ! j’apprécie ces filles et leur plastique Pirouette arabesque et spirale...
Mais tout-à-coup c’est la bûche de Noël C’est l’horreur je ferme les yeux La belle se prend une pelle, elle se gamelle Le cygne devient canard boiteux Adieu tous les petits pas de côté Adieu l’envol adieu la grâce, C’est le retour à la réalité Au moment où elle se ramasse La chute finale, les deux fesses sur la glace, C’était pas prévu au programme Figure implosée, espoir qui se casse Elle sourit mais elle est en larmes Adieu jour J, adieu Jeux Olympiques Tu vois, ça s’explique c’est normal : J’ peux pas r’garder l’ patinage artistique Ça m’ fait mal oh ça m’ fait trop mal.
Nouveau Synopsis Rien dans les mains, rien dans les poches, tout dans la tête, Spécialiste du genre humain, J’écris depuis longtemps des poésies simplettes, Je suis le slamiste "Spleen l’Ancien" ! "Spleen l’ancien", oui bien sûr, car le spleen est ailleurs, Car le spleen est hier au rayon "oubliettes". L’amertume est un os à ronger pour le cœur Et cet os, allez zag, je le jette ! J’ai pleuré toute ma vie les galères, Aujourd’hui, j’ai une pêche d’enfer C’est tip-top, ça déchire, j’ suis open Et j’arrive à parler comme les jeunes ! La vie, c’est juste une péripétie Inutile d’en faire un fromage Tu me dis "ah mais non" je dis "si" ! Ou alors tu stresses et y’a dommages… Moi qui suis un gars d’août, j’aim’rais mourir l’été Au moment des étoiles filantes, Sortir deux-trois conn’ries, ouais, j’aim’rais plaisanter À l’instant où la vie me plante ! J’ veux mes frères musiciens, mes amours féminines, Si possible quelques bandonéons furieux, Des tangos argentés, le béguin des frangines Et je veux qu’on en prenne plein les yeux ! J’ veux du jaune du rose et du fuchsia, J’ veux du rire du kitsch et la fiesta Pas de noir le jour où on m’enterre Je veux une teuf extraordinaire !
Pourquoi pas un air de cornemuse À l’instant où mon soleil se couche ? La vie ne sert que si l’on en use, J’ veux pas voir le match depuis la touche ! Je remonte la rivière comme n’importe quel saumon, Je balance les trucs à la gomme, Et je sais où les mots, bulles de savon, s’en vont Aujourd’hui je slamme, homme, je slalome ! "Si tu aimes le chien tu aimes aussi les puces" La vie est noire et grise, la vie est rose bonbon, Il faut faire un looping ou trouver une astuce, Ėviter l’autobus en plein front ! Premier jour de l’automne 2006, Premier jour et nouveau synopsis : La terre est folle et moi le bouffon J’ai un rôle, le sens de la Mission La vie c’est "file ou passe", t’as ta chance La vie c’est rien, et c’est quoi en plus ? Un faire-part, acte de re-naissance Et alors c’est bénef, tout bonus ! Rien dans les mains, rien dans les poches, tout dans la tête, Témoin du grand bordel terrien, Je viens pour m’amuser, pour vous conter fleurette Je suis le slamiste "Spleen l’Ancien" ! Coco joli, je t’aime jusqu’à ma dernière rime, Appelle-moi "Spleen" tout court, on aura l’air intimes.
C’est qui, ce citoyen ?! C’est qui, ce citoyen ?! J’ai dit que je voulais voir qu’une tête ! Et là, il y en a une qui dépasse ! Mais on va te faire rentrer dans le rang Mon coco, on va te casser les dents C’est qui, ce citoyen ? Un poète ! un musicien !? Mais on va te faire ramper à quatre pattes On va te faire bouffer ta merde Et même que tu en redemanderas ! Tu sais, là où on est, c’est comme si On était entre quatre murs Alors tu peux en être sûr Rien ne sortira d’ici Allez, balance-les tes couplets, ! Des trucs de trous du cul, ouais ! Poète, lopette ! T’as vu, ça rime, je fais de la poésie ! Sors-les, tes paroles à la gomme Vas-y qu’on rigole, joue à l’homme ! On va te la fourrer dans le cul, ta plume ! On va te la coller dans la lune ! C’est quoi, ce citoyen Qui marche au pas pas bien ?! Tu peux toujours faire le mariole et l’intéressant
Tu vas marcher comme les copains, On va te faire rentrer ça dans le sang, On n’est pas pressés on a tout le temps On a tout le temps qu’il faut, On va te faire rentrer le tempo Dans la peau "Une-deux, une-deux" Ça suffit pour faire de la musique ! Pauvre échevelé, Ici c’est pas le bureau des pleurs, Ta société de consolation On va te la carrer dans l’oignon Dans le fion, bien profond ! Ça va te donner des couleurs ! Allez, rampe mon pote, rampe ! Le retour à la terre, rien de meilleur... Et quand t’auras bien rampé Quand t’en auras bien béqueté De la réalité, Tu seras trop fatigué Pour nous bassiner et nous bourrer le mou Avec tes comptines à deux sous Alors, rampe citoyen, rampe ! Rampe, citoyen ! rampe ! J’ai bien dit que je ne voulais voir qu’une tête !
Si d’aventure... Si d’aventure Votre mari vivait un terrible accident de voiture Sur une route un peu trop glissante un soir Vous en auriez quelque désespoir Si d’aventure Il mourait de mort immédiate De préférence sans aucune souffrance Vous en auriez quelque chagrin Je saurais venir vous tenir la main Parenthèse : J’ai appris incidemment Par le voisin d’à côté Qu’il est inspecteur des impôts Cela ne va pas Cela ne va pas du tout Cela n’est pas bien Cela ne vous convient pas Il paraît qu’il est très gentil Mais il n’a vraiment rien pour lui Si d’aventure et par malheur Vos deux si jolies petites filles Dans le même véhicule
Connaissaient le même sort Ce serait terrible évidemment Votre vie basculerait Je sais ce n’est pas très charitable D’avoir ces pensées-là Mais je ne vois pas d’autres solutions – Je n’ai pas beaucoup d’imagination – Et vous me plaisez tant Je n’ai jamais croisé voisine aussi charmante Oh j’imagine votre douleur Je saurais me montrer capable De recueillir vos pleurs De vous prendre sur mon épaule D’embrasser votre tempe Et après j’irai voir plus loin Vous seriez veuve et désirable J’aimerais vos seins un par un Jusqu’au petit matin Et votre visage en larmes Votre tête inclinée Ferait le reste.
Touareg Je sors du désert et j‘aperçois Toutes les lumières de la ville Je me suis ensablé, quelquefois Mon chameau n’est pas si docile De dune en dune et malgré moi J’ai cramé pas mal de carburant J’ai perdu la soif et la foi Et je me suis égaré souvent Je me redresse, je regarde au loin Le soleil est au top au zénith Je me prends pour un vrai bédouin Et mon burnous est comme un cockpit J’ai dit qu’il était midi, je crois ? Pas du tout, il est minuit pile Puisqu’au bout de mon doigt je vois Toutes les lumières de la ville Touareg, fais halte là !
Le désert et la mer, quelle blague, C’est du pareil au même sous la lune Des fois la dune a vraiment l’air vague Et la vague a l’air d’une dune On aurait pu crever, à court d’eau Le poil brûlé et la goule sèche On s’en est sorti et mon chameau N’a pas volé une bière bien fraîche ! Touareg, fais halte là ! J’ai rêvé au moins mille oasis Dans le simoun et les typhons, D’une princesse avec un iris Dans ses cheveux d’un noir profond Quand la dune dessinait son corps Et quand la houle creusait sa croupe Mon fol esprit divaguait à tort Depuis sa proue jusqu’à sa poupe ! Holà ! Touareg ton cinéma !
J’ai dû dériver dans des mirages Qui m’attendaient au tourment Je pensais "elle est sympa cette plage Et le ciel est très bleu, au couchant" Nageant dans le sable fin sans fin Je me disais "marcher me lasse ! J’espère que la mer n’est plus très loin Et que ce n’est pas marée basse…" Touareg, fais halte là… Je sors du désert et j’aperçois Toutes les lumières de la VILLE !
Mon satellite me dit Mon satellite me dit Arrête la drogue douce Arrête la bière blonde Arrête le verre de vin rouge Mon satellite me dit Va voir ton banquier Vous avez des choses à vous raconter Appelle ton conseiller fiscal Au lieu de jouer aux dés Et d’écouter du blues Arrête de fumer ton baobab Mon satellite me dit Arrête de blasphémer Sur toutes les religions Les faiseurs d’illusions Il en faut, c’est comme ça ! Mon satellite me dit Je sais tout de toi Je te connais par cœur Remets-toi dans la ligne Achète-toi un portable Et gère tes stocks-options Et tes émotions
Comprends, Ressens le sens du vent Collabore, bordel, collabore ! J’ai toute confiance en toi Tu vaux beaucoup mieux Que ces coliques frénétiques Que ces colères d’ado attardé Mon satellite me dit Choisis ton camp Il est grand temps Quand ça va charcler Y’aura pas d’ quartier Mon satellite me dit Réfléchis Je te laisse la nuit.
Si tu n’es pas là Si tu n’es pas là Si tu ne viens pas À mes côtés Comment je vais faire Pour continuer ce long combat Contre la bêtise armée ? Pour sortir la colère Pour que la poésie Tienne toute la nuit, Comment je vais faire Pour garder le flambeau allumé Si tu ne viens pas Si tu n’es pas là ? Comment je vais faire Pour envoyer ces mots Qui ne sont pas à moi Et pour prêter ma voix Et la faire vibrer haut Et en pleine lumière Comment je vais faire ?
Si tu gardes ma main Et si tu tiens mon bras On ira encore loin On ira au-delà, On ira encore loin On ira au-delà Si tu gardes ma main Et si tu tiens mon bras Au moins jusqu’à demain Les coups et les douleurs Non, je n’aurai pas peur Si tu es dans mon cœur Là, là, lalalala ! "El pluebo unido" Sera fort, sera beau Si je t’ai dans la peau Si tu es à mon bras Tu comprends, coûte que coûte Je dois tenir la route Tout seul, je pourrais pas Si tu n’es pas là.
Abonné absent Je suis aux abonnés absents Nulle envie de communiquer Veuillez rappeler ultérieurement Toutes les lignes sont occupées. Enfin se suffire à soi-même C’est le lot de l’occidental, Le cœur vitreux et l’esprit blême Je me forge un nouveau mental ! La ligne est en dérangement Et moi, sous-marin sans torpilles, À la suite d’encombrements Je referme les écoutilles. Je dégoupille le silence J’en fais mon allié principal Je préserve les apparences… Vu d’avion, ça va pas si mal ! Je débranche les écouteurs Les circuits neurolinguistiques Je m’envoie me faire voir ailleurs Sur quelle banquise, sous quels tropiques ?
Et, sans savoir si j’ai raison De délaisser les antilopes, J’avise la ligne de flottaison, Je vérifie le périscope. Télégrammes, messages en morse, Je n’y comprends ni quoi ni qu’est-ce Je n’ai pas les codes et à force J’envisage une paire de boules Quiès. Je déserte, avec mon œil louche, La théorie du paradoxe Et je me colle sur la bouche Le sparadrap du père Haddock ! Je suis aux abonnés absents Bip-bip-bip, la ligne est coupée Veuillez rappeler ultérieurement Veuillez raccrocher, S. V... Paix !
Coup de gueule ! J’en ai ras l’ cul d’ la politique, De l’état d’ la tête de l’État, Ça d’vient carrément pathétique, Moi, j’ vais faire la grève sur le tas. Faut pas m’ baver sur les rouleaux : J’ les connais tous, les marchands d’ zéph’ Les fesses-mathieu, les narvalos Qui viennent pour chourave le bénef ! Ces seigneurs de la manigance Ils sont jamais à cours d’idées : Et que j’ bidouille dans la finance ! Et que j’ bouine la fiscalité ! La gueule de faux derche en sautoir, L’air faux-cul comme Légion d’Honneur, Tous ces vérolés du pouvoir On dirait l’ palais des horreurs ! Ces gonzes, la main sur le cœur, Qui dégoisent à la terre entière Qu’ils se dépouillent pour not’ bonheur Ça commence à m’ gonfler sévère ! Sourire de fiotes pour la photo, Ils inaugurent les chrysanthèmes, Serrent des louches à tire-larigot Et, en plus, faudrait qu’on les aime !
La grande partouze "Famille-Patrie" C’est toujours le même fond d’ commerce, La morale, toute la panoplie, Ça fait un moment qu’on nous berce ! Vas-y que j’ te ! "Mérite", "Travail" ! Ils nous prennent vraiment pour des caves Et, les arpions en éventail, Ils veulent nous fait croire qu’ils en bavent ! Ah ! les fumiers ! Ils sont balaises Tous ces grands modèles de vertu Et faut les voir ram’ner leur fraise Avec dix mille cass’roles au cul ! Pas vu, pas pris, vas-y, j’ t’embrouille ! Faut arrêter d’ se berlurer : Ça joue des coudes et ça s’ papouille C’est pire que la cour de récré ! Ils ont beau péter dans la soie Ils se tirent la bourre, pas d’ cadeau, Ils sont à cran et, croyez-moi, Quand ça flingue c’est pas du pipeau. Avec eux, tous les coups sont bons Et c’est sûr’ment pas un hasard, Si celui qu’attrape le pompon, Forcément, c’est le plus vicelard !
Et là, y’a l’ rase-bitume ! Il s’ croit Sorti d’ la cuisse à Jupiter ! Il arrive à être à la fois Roi et bouffon ! Bravo, super : Admirez l’ Prince de la Pignole Sapé chez Hermès et chez Dior, Il est pas mature, le mariole, Mais pour la tchatche, c’est un cador ! Ah ! c’est pas p’tit Pierre ou p’tit Paul, Ils ont d’ la particule eux z’aut’s Et ça s’ pavane dans les people, Et ça s’ paluche à bord des yachts ! Eh ouais, délinquant en col blanc – Réseaux, jet set, carnet d’adresses – C’est un job, un taf à plein temps, C’est du sérieux, du vrai bisness ! Les caïds à la p’tite semaine Qui s’ font serrer dans les quartiers Il faut qu’ils en prennent de la graine : Truander, c’est un vrai métier ! L’enn’mi public numéro 1 Qui nous nique dans les grandes largeurs Il a su s’ donner les moyens, Ben ouais, c’est pas un enfant d’ chœur !
La Terre d’Accueil, l’Égalité, La Déclaration des Droits d’ l’Homme, C’était choucard, y’avait d’ l’idée ! Mais, là, on brade et on dégomme, Là, on est rev’nus à Versailles Et p’têt’ même à l’Antiquité ! Ils peuvent compter sur la flicaille, Les Compagnies d’ Sécurité, Ces fils de prolo, ouais, ces "jaunes" Qui viennent bouffer à la gamelle Et fonctionnent avec deux neurones… Sous la visière, la vie est belle ! Et les médias ? Ils font d’ la lèche, S’ partagent les p’tits fours en loucedé, C’est bonnard, ils sont tous de mèche Pour mieux nous empapaouter ! Y’a l’ensuqué dans sa lucarne Qui nous blablate son boniment, Y’a les sénateurs, ces vieilles carnes Avec leur os entre les dents, Ils sont là, quasi-grabataires, À nous gonfler jusqu’au tombeau Et pas pressés d’ lâcher l’affaire, Ah, y’a des résistants, chapeau !
Et y’a toujours un traîne-couillon, La langue tirée comme un clébard Qui vient tortiller du croupion Pour quelques miettes, trois grains d’caviar ! J’oublie rien ? C.A.C 40, MEDEF, Couilles en or et cœur en béton, Des bras cassés, des mafieux, bref, Ces têtes de nœuds me pèlent le jonc ! Délits d’initiés, tout l’ bastringue, Immobilier, bourrage des urnes, Ah ! c’est le grand bal des baltringues Ça fout la gerbe, ça casse les burnes ! Tous ces empafés puissance dix, Tous ces suce-boules Neuilly-Plaisance Politicards de père en fils Et qui nous pourrissent l’existence, J’ les entends dire "Démocratie" ! C’est pire qu’un gros mot dans leur bec Mais j’ suis pas né d’ la dernière pluie Ça va saigner, j’ défends mon steak !
Mais on va pas causer des plombes, Y’a mieux à faire : ouais, quelques baffes, Commencer à creuser leur tombe P’is réfléchir à l’épitaphe, Vite fait défriser quelques têtes, Ratiboiser un brin la secte Les bichonner, leur faire leur fête Parc’ que là, ça pue, ça infecte ! Ça nous débecte, ras la casquette !
Rencontre au sommet Je suis allongé, j’ai plus mal… Ça y’est, j’ suis mort, à c’ qu’il paraît. J’ vais m’ la couler douce, c’est génial, Jusqu’au bout de l’Éternité. Je découvre le septième ciel, Je vole, je glisse dans un bain d’iode, Je vis ma mort en temps virtuel Et je réécoute tout Pink Floyd ! Y’a pas photo, j’y gagne au change, Mes oreillers c’est d’ la plume d’ange. Je suis à mon aise, allongé, J’ me sens des ailes, mais on m’a dit Que je dois encore m’alléger Avant l’entrée au Paradis. Ici, c’est une sorte de clinique Je suis comme en observation, On est nombreux, là, toute une clique, Chouchoutés et aux p‘tits oignons ! L’infirmière me fait des tisanes, J’ lui pince les fesses, j’ai la banane !
Je plane, j’ai le sourire aux lèvres, Je prends enfin de la hauteur Car je vais rencontrer l’Orfèvre, Le Grand Nabab, le Créateur ! On m’a prév’nu : je vais voir Dieu Au maxi dans quinze jours trois s’maines. Je l’imagine, l’air prétentieux, Lunettes fumées, petite bedaine… C’est d’enfer, l’envers du décor, Je suis zen, motivé à mort ! Dieu m’appell’ra par mon p’tit nom "Hervé, natif de Coulommiers, Sois le bienvenu" mais non, non, C’est moi qui parlerai l’ premier ! J’ lui dirai "à nous deux, mon vieux, C’est dommage mais j’ suis rancunier, Regarde-moi bien dans les yeux... Tu as trois s’condes pour dégainer !"
Longue maladie Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie Ça m’a pris, oui, tout petit Au berceau au saut du lit. C’est une maladie mortelle Qui peut traîner en longueur, Je dois l’accepter telle quelle Même si ça fait mal au cœur. Depuis mon premier matin – Déjà c’était mal parti – Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie ! Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie D’abord, on ne m’a rien dit Nada, que dalle et que tchi ! Et puis cette maladie-là Il paraît qu’on s’en sort pas, Il me reste encore combien Trois mois, cinquante ans, demain ? Non non, je n’en ferai rien Après vous, je vous en prie Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie !
Cette chose irrémédiable Qui m’est tombé sur le râble, Ce machin à sens inique Qui use la mécanique Comment ça s’appelle déjà ? J’ai l’ mot sur le bout du doigt, C’est un mot plutôt joli Ah oui, ça m’ revient : la vie ! Ah la la, oh, c’est pas bien, C’est pareil pour vous aussi ? Ça alors, vous êtes atteints De la même longue maladie ! Charme et rêve, marche et crève, Aucun vaccin ni médecin. Le miel, l’azur et le glaive Ça nous rend loufs et zinzins ! Arrivés tête en avant On repart les pieds devant Avec, dans le crâne, du vent Et on se demande souvent Est-ce qu’on a tout assouvi Tout bu, tout reçu, tout ouï ? Et est-ce qu’on a assez joui De la vue et de la vie ?
Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie Ça me coûte, c’est hors de prix C’est de la triche, moi je dis ! Pareil pour mon canari Mon poisson rouge et mon chien ! Je proteste, je me plains Il se peut que toi aussi… C’est comme ça, c’est le destin J’en ai pris mon parti pris Oh oh oh je suis atteint D’une longue maladie.
Blues again ! C’est du blues, c’est d’ la tristesse, Ça s’appelle pas autrement, Y’a un moment où ça cesse Mais c’est là, c’est là, maint’nant. Même en déroulant du câble Le long de ma chienne de vie, J’ me vois toujours incapable D’éviter les avaries ! Dans ma vie, y’a rien d’ bâti Tout est en kit, en morceaux, Juste quelques pilotis En prévision des grandes eaux… À l’hôtel de la mélasse J’ai une ardoise en souffrance Et des agios qui dépassent Les limites de la décence ! Y’a pas grand chose qui tient d’bout Dans ma maison intérieure, À part des pierres, des cailloux Y’a plus grand chose qui demeure. Dans cette cahute en jachère Sans murs, sans portes et sans toit, Je profite de la lumière Et je bronze pendant douze mois !
C’est d’ la tristesse, c’est du blues, Je trépigne et je m’exalte À cause d’une fausse Andalouse Ou d’un chat mort sur l’asphalte, À cause du soir qui nous plombe Au crépuscule de la vie Et du temps qui creuse les tombes Tic-tac jusqu’à l’agonie, Et c’est comme un coup d’ fatigue, Comme une lame de fond ancienne Qui passe par dessus les digues, Un maelström qui fait des siennes… Excellent sujet d’étude Qui raque après et avant, J’ai niqué la solitude, J’étais son meilleur client ! Souvent jalouse, exclusive, Cette fille de mauvaise vie Dans le style "qui m’aime me suive" C’est pas une bonne compagnie ! Alors, avant l’andropause, Pourquoi pas, j’ me verrais bien Titiller "la vie en rose" Et changer de méridien.
Ce blues, en douce, fait des vagues Entre le zest et le zist, Entre le zig et le zag J’oscille et aussi j’existe. Ça, c’est mon côté russkof, Tchekhov, tout le tremblement, Vodka orage, Molotov, Ivresse et grands sentiments ! Et, bien sûr, j’en fais des tonnes Je crie au loup, j’exagère Mais si je braille, si j’ claironne C’est pour éviter l’ulcère. Blues toujours, yes, blues again ! Ce chagrin qui passe à l’as, Cette mélancolie rengaine On dirait Michel Jonasz. J’ai le cœur qui lâche du lest, Ma vie met un bonnet d’âne Quand j’entends, venu de l’Est, L’écho d’un violon tzigane. Mais peu à peu la tristesse, S’éloigne en catimini, Le blues se casse en vitesse, Tu vois : c’est déjà fini.
Péché original Je n’ai pas cotisé à toutes vos magouilles Je n’ai même pas été chef de la patrouille J’ai pas dit "oui, mon colon" non, j’ai dit "non" ! J’ai pas cané devant les cons les canons. Mais oui mon p’tit chéri j’ai servi la patrie ! "Grenadier voltigeur" un an dans ma vie, À l’époque, c’était l’Urss de Sibérie l’enn’mi Maint’nant on est tous potes, la guerre froide est finie ! Le papa général N’était pas content En général De son enfant Péché original J’ai marché marché Au pas cadencé J’en ai pris plein la gueule mais j’ai pas lâché On m’a pistonné mais j’ me suis pas retrouvé – La quille, bordel, la quille ! – petit soldat de plomb Que dalle sous le béret, tout dans le caleçon ! Même si des fois ça a fait "bing", "bang", "paf " et "splatch" Avec le recul je crois que j’ai fait mon match J’ai fait trembler les filets de la vie à mort, Coupé les couilles la queue des vieux toréadors !
Le papa général N’était pas content En général De son enfant Péché original J’ai marché marché Au pas cadencé Mais j’ai pas calanché ! Chacun ses drôles de guerres chacun ses combats On sait à quoi on tient et on voit où on va, D’où je suis d’où je vis je conchie toujours Vos cervelles mortes sous le casque lourd ! 2e classe, 2e classe, j’ai pas pris le même train Et je voyage toujours sur un strapontin, Je vous emmerde à pied, à ch’val et à vélo Mort à toutes les armées et vive le pédalo !
Bout d’an Je caresse mon saumon dans le sens du poil et mon oie me regarde d’un air déconfit. Je parle à ma douzaine d’huîtres. Je leur dis "soyez courageuses" et je leur bande les yeux. Je mets l’index gauche, celui du cœur, dans le cul de ma dinde car elle a toujours le même problème : elle est sèche. Il faut qu’elle se détende et s’humidifie le croupion. Elle me fixe avec reconnaissance mais j’évite de croiser son regard, je suis dans la gêne car je n’ose lui avouer le four crématoire qui l’attend. Je vais m’en mettre jusque là et lever ma flûte à l’Holocauste de la Faim ! Quarante millions d’humains qui claquent du bec sous d’autres méridiens... Massacre planétaire cinq ou six fois plus meurtrier, chaque année, que ce qui se passa jadis du côté d’Auschwitz. "Tu veux un blinis, Fritz ?" Mais j’y peux quoi, moi, à tout ça ? Ai-je le Shoah ? Ouah la la, non, décidément, on ne s’amuse pas avec ces choses-là, il y a des sujets sur lesquels on ne rit pas, même jaune, et, j’en conviens, faire rimer "toast" avec "holocauste" n’est pas du meilleur goût. De toute façon, tout ceci est une farce, j’encaisse les marrons, je fais péter les bulles et je m’apprête pour la suite... Car c’est lourd à porter, la bûche, et je sens quelques courbatures déjà, du côté de l’estomac. Les mouettes se frottent les mains. Dès demain matin, elles pourront sucer les coquilles d’huîtres, chiner des restes de foie gras aux reflets bientôt verdâtres et dépouiller la carcasse de leurs sœurs volatiles. Happy dinde ! Elles vont s’en mettre jusque là, et moi je vais trinquer à l’humain, je vais trinquer à rien et déposer une gerbe au pied du sapin.
demain je tuerai mon patron demain je tuerai mon patron et je lui ferai rendre l’âme juste un joli trou dans le front demain je tuerai mon patron pas de procès pas de prison je retournerai le canon de l’arme vers mon propre crâne après avoir tué mon patron j’abrègerai son ascension en jouant mon dernier joker liés à jamais nous irons main dans la main jusqu’en enfer enfin libéré de la chaîne des diktats de la production j’oublierai le cri des sirènes dès que j’aurais tué mon patron puisqu’il n’y a plus rien à dire que quelque chose est mort en moi et que j’ai décidé le pire je vais moi aussi faire ma loi avant de passer à la caisse de me faire sauter le caisson je vais présenter l’addition à l’ordure qui m’a mis en pièces
il me dira "hé, négocions nous sommes faits pour nous entendre" mais il aura moins d’illusion après une balle dans le ventre demain je tuerai mon patron j’œuvrerai pour le bien public l’esprit en paix et sans passion demain je tuerai mon patron arrivé à l’instant critique il aurait dû faire attention à trop tirer sur l’élastique un jour il pète pour de bon et on peut tuer son patron et on peut tuer son patron
Lazy song Loin de la vie parfois hard Je bulle je glande je flemmarde J’ suis pas aux pièces pas de stress J’ suis pas Speedy Gonzales Tranquille, je me la coule douce Je n’en fous pas une secousse Pas une rame pas une ramée Je fais l’ogresse matinée Pas de scoops et pas de tchatche J’ suis pas sur la feuille de match J’ vis ma vie tutti chianti La cervelle au ralenti À mille lieues du grand bordel Je regarde le ciel bleu ciel Loin de la foule déchaînée Je laisse glisser la journée Lazy song Drôle de vacance À la longue Je m’en balance...
Juste une précision quand même : Tirer comme il faut sa flemme Ne rien faire, farniente, rien C’est un travail quotidien Et loin des radio-réveils Levé après le soleil Si j’envisage la sieste C’est pour la beauté du geste Ni projets ni objectifs Tout à fait improductif J’oublie portable after-shave Dans mon living je fais grève Je vois les mouettes planer Un arbre encore déplumé Sans horizon sans destin Je prends l’air dans un jardin Lazy song Drôle de vacance À la longue Accoutumance ? Ah, ça commence ! Loin de la vie parfois hard Je bulle je glande je musarde Les jours rallongent peu à peu La nuit descend bleu à bleu.
Intime idée Dix heures dix, je viens de me lever des deux mauvais pieds Eh oui j’ai les moyens et tendance à en rajouter Bref j’ai les nerfs en pelote une sale humeur des vapeurs Et l’impression déplaisante que ma vie traîne en langueur Je ne sais pas très bien si je suis hyper-lucide Carrément dans les vapes ou bien en manque de glucides L’esprit aussi joyeux qu’un prisonnier d’Alcatraz J’ai aussi une rime féminine sur le gaz Flash-back sur le passé les amours météorites Je broie du noir foncé du charbon anthracite "Avec le temps va" c’est tout vu tout est foutu Je compte sur mes doigts de pieds les années perdues Et là, à l’instant où j’attaque le treizième orteil Tout-à-coup dans la salle un grand rayon de soleil ! Alors je réagis Hé Chéri-bibi arrête De tricoter le cafard et de faire ta majorette J’ai une intime idée Un délire en loucedé Mais j’en parle à personne Un élan personnel Vers une Mère Noël Je déconne and so on
Oh la vie ça déroule et on perd du temps au péage Avant de voir du ciel bleu et d’arriver à la plage Quoi faire quand l’existence prend un caractère d’urgence Reculer de trois cases ou tirer une carte "chance" ? Démon de midi et quart pas forcément équivoque J’envoie ce message en morse pour faire marrer les phoques Message subliminal en provenance du Pôle Nord Sous mes airs de vieux glaçon c’est chaud-bouillant sur les bords C’est le cliché clic-clac du mec sur le retour d’âge Et qui, dans la semoule, fait du rétro-pédalage Il a déjà enclenché chrono compte à rebours Et se demande angoissé "encore combien d’amour ?" C’est banal à pleurer mais je me verrais bien faire Un tour en bord de mer tout à fait terre-à-terre Un remake romantique un beau mélo sirop Duo chocolat chaud et la buée sur les carreaux J’ai une intime idée Un désir en loucedé Mais j’en parle à personne Un élan personnel Vers une Mère Noël Maldonne, je confusionne !
J’ai un stock d’invendus de frissons et de caresses J’apprécierais un lifting me faire un coup de jeunesse Mais un sioux est un sioux je reste sur ma réserve Je fais mon "pow wow" solo et à la longue ça m’énerve J’ai beau mettre des patchs contre les grands sentiments Je m’emballe, dum-dum, le cœur qui bat c’est palpitant Ah que choisir ? l’accent groove ou bien l’accent aigu ? Entre chienne et louve ça peut paraître ambicul Mais c’est juste une pensée folle un plan d’oiseau de nuit Ça ne tient pas la route c’est plein de sens interdits Ça pourrait tout au plus faire sourire le badaud Quand je me rêve Zorro et me réveille Bernardo Quelle est l’idée idéale oh dis-moi Lady X La descente aux amphores ou la traversée du Styx ? Boum, bang, oublie le boomerang et ramène-toi dans mon gang On fera ce qu’il faut pour parler la même langue ! J’ai une intime idée J’ai une intime idée.
Extravagance Au risque d’y brûler mon âme Ce midi place du marché Je regardais la jeune femme À la peau si douce au toucher. La prunelle qui part en vrille Sous le fin chemisier de soie, Je regardais la jeune fille En oubliant mon quant-à-soi. Au lieu d’effleurer du regard J’avais tendance à m’attarder Sur ce corsage et ce falzar Qui venaient troubler mes idées. Je regardais la jouvencelle, Longs fuseaux, un bras en arrière Qui vient dévoiler une aisselle Où aller sniffer la bruyère. Fallait-il rester les mains jointes Sans reluquer sous le body Ces beaux seins à l’heure de pointe Qui promettent le paradis ? Et ce corps moulé à la louche Que la fantaisie déshabille Aurait-il pris vraiment la mouche Que je m’y crame les pupilles ?
Ô demoiselle, printemps venu, Je me suis senti en vacances… J’affûtais mes calots de myope En la zyeutant oui tant et plus, J’avais l’œil louche du Cyclope Les quinquets du géant Argus, Je glissais vers la déraison, Son cou sa taille et son visage M’imposaient soudain la vision D’un espace hors de tout bronzage Et j’avais beau me dire "arrête D’avoir ces yeux de merlan frit" Ce jeu de miroir, de mirettes M’avait hypnotisé l’esprit. Ô demoiselle, printemps venu, Je me suis senti en vacances. Fines bretelles, épaules nues, Juste un instant d’extravagance ! La belle, au soleil, grâce à toi J’avais midi à quatorze heures Et je dirai une autre fois Toute ta beauté intérieure.
Quarante degrés Quarante degrés Est-ce tout le rhum que j’ai bu ? Est-ce la hauteur de l’escalier ? Quarante degrés Est-ce la fièvre de mes hallus Ou la sueur sur mon front brûlé ? S’en aller toujours sans retour… De quel hier me parlez-vous Et de quel voyage au long cours ? Vos paroles me semblent floues Aller rechercher la lumière, Sans port d’attache, jamais de pause ! Pour être tout à fait sincère Vos yeux me disent quelque chose Quarante degrés Est-ce tout le rhum que j’ai bu ? Est-ce la hauteur de l’escalier ? Quarante degrés Est-ce la fièvre, le palu Ou la chaleur sous l’olivier ? Vos yeux me disent quelque chose Vos yeux me disent quelque chose ? Vos yeux me disent… Quarante degrés.
Le fou du roi Je n’ai jamais compté Les congés R.T.T Les heures supplémentaires, Je cherche à satisfaire Chaque jour être drôle C’est ma vie c’est mon rôle Je mets mon grain de zèle Le nez dans les poubelles.. Je suis le fou du roi Je dis n’importe quoi Je me fous de sa fiole Je danse et cabriole Je dis tout et je crie "Le roi est gros gras gris !" Je moque ses manières Et son blaire de travers Je balance de la rime Je grimace et j’escrime Je taille je pique j’agrafe Et le bon roi s’esclaffe Il s’éclate sur son trône Mais autour ça rit jaune Car tous ces peignes-zizi Je les allume aussi
Oui ces faquins, ces princes Ont les chicots qui grincent Quand je viens contrarier Le jeu sur l’échiquier. Ces pitres je les vois Serviles et aux abois L’humeur est si pesante, Il faut bien qu’on plaisante ! Et lorsque je balance une saillie Dans le mille bien saignante bien sentie Le roi s’ tape sur les cuisses et me dit "Oh la la, elle est bien bonne !" Hé oui ! Tu n’as pas vraiment tort Si tu penses haut et fort Que je suis la caution D’un roi pire qu’un bouffon Si tu me vois complice D’un système établi Et valet au service D’un imposteur bouffi C’est un peu vrai Oui mais…
Quand le roi part en chasse Flinguer le sanglier Moi je reprends la trace D’une biche égarée Je cavale cavalcade Je cours vers sa tourelle Mon cœur bat la chamade Quand je retrouve ma belle.. Je la flaire je la sens Ses baisers sont pointus Je la mords presque au sang Du museau au joufflu Et tout s’envole pêle-mêle Elle retrousse ses jupons Je froisse ses dentelles Et tout est beau bien bon ! Elle enlève ses faux cils Et moi plus fou que sage De biais et de profil Je pousse mon avantage, Je couronne hors d’haleine Et je m’écrie "c’est bath Ah, quel échec et mat Quand je nique la reine !"
Et lorsque celle-ci a défailli Quand les yeux mi-clos elle me sourit Moi aussi en souriant je me dis "Oh la la, elle est bien bonne !" Ah oui ! Il me l’a dit en aparté, le roi Est très content très satisfait de moi La reine aussi, elle m’en a dit deux mots… Je mets la joie dans le château.
et alors, et alors ? "et alors, et alors ?" il me disait dis-moi un peu tout ça quel sens ça a il me disait ça sert à quoi venir sur terre tracer son sillon faire des plans sur la comète il me disait on construit des maisons on fait des enfants on se projette et puis tout ça ça ne dure pas cinéma tralala ça nous emmène où ça nous rend fous "et alors, et alors ?" il me disait est-ce que la vie ça ne serait pas un peu comme la barbe-à-papa tu trouves ça génial et puis au total finalement tout ce sucre t’écœure et tu te retrouves avec de la poisse plein les doigts "et alors, et alors ?" et je lui disais tu n’as pas tort l’image est juste et assez jolie tu devrais faire de la poésie
"et alors, et alors ?" il me disait on cherche le sens on nous dit c’est par là c’est tout droit vous ne pouvez pas vous tromper et puis on se retrouve un soir comme ça sans repères et sans rien piger et puis le temps qui va et puis le temps qui va dis-moi un peu tout ça quel sens ça a et je répondais de mon point de vue de sens y’en n’a pas y’en n’a jamais eu "et alors, et alors ?" il demandait et moi je ne savais quoi faire de ces mots de cette impuissance mise à nu de tant de solitude entre soi et soi je ne savais quoi faire de ces émois et j’avais beau dire carpe diem à chaque jour suffit sa joie à chaque soir suffit sa peine je n’avais aucun recours "et alors, et alors ?" aucun réconfort juste lui dire "allez on trinque" et lui resservir à boire.
vos yeux bordés... allez j’affûte ma plume je la taille mieux que mieux tant que peux vaille que faille éternel charlatan du boniment je m’y colle, sujet-verbe-compliment ! je me dis "au fond c’est ma très grande faute si mon baobab manque de sève" faut-il que je m’enlève une côte pour me fabriquer en douce une Ève ? vos yeux bordés de rouge est-ce le shit ou, j’hésite, la conjonctivite ? dites-moi ça Marguerite est-ce votre cœur qui palpite votre émotion comme une invite ? et je me disais en moi-même "ah oui ce monde a-gla-gla nous glace les glaouis dans ce train sans chaleur sans tête ni queue parfois il vaut mieux voyager à deux" j’avais tourné les pages, vu les images mais jamais lu Robinson Crusoé ce type qui peaufinait son bronzage en criant au loin "ohé ohé"
vos yeux bordés de noir est-ce la peine ou la gêne face à la déveine ? dites-moi ça Madeleine quelle est cette impulsion soudaine, votre émoi qui rejoue la scène ? j’allais ainsi au fil des solitudes sans bien savoir où trouver mon chemin avec en moi une seule certitude celle de ne comprendre rien à rien pas futé au lever je me sentais assez égaré comme Petit Poucet garçon terre-à-terre pas du tout lunaire la nuit noire me m’était pas familière vos yeux bordés de rouge, Marguerite vos yeux bordés de noir, Madeleine vos yeux bordés... est-ce la peine ? est-ce la peine ?
Mélancolie malouine Ma vie reste toujours suspendue à trois rimes, À quelques pensées floues tirées par les cheveux. J’ai souvent navigué, comme on dit, "à l’estime" Et j’ai suivi des caps plus ou moins hasardeux. Sur le sable, ces mots écrits à l’inconnu Je le vois : un à un, la vague les efface, Je mesure la faille et ma vie mise à nu Et j’évalue aussi le fil du temps qui trace. "Romantique imbécile embourbé dans le spleen" J’ai écrit ce vers-là l’été soixante-dix ! Sans avoir rien vécu, j’étais déjà has been Exclu d’un paradis qui rime avec jadis. Par esprit Don Quichotte, en fait Sancho Pansu, Bon élève, appliqué à son gentil pensum Je psalmodiais ce chant d’adolescent déçu, La même litanie toujours ad libitum. Pirate occasionnel, j’ai eu ces soirs de veille Où l’on boit, où l’on trinque en rêvant d’un trois-mâts. Au réveil, on le trouve au fond d’une bouteille Merveilleux et parfait, mis à part le format ! Aucun transatlantique, aucun fjord, nul Brésil ! Flux et reflux... Sans cesse, un refrain me rappelle Que j’ai quitté une île et trouvé un exil Et l’écho me renvoie ma rengaine éternelle.
Oui, l’écho me répond "À quoi bon ? À quoi bon ?" Capitaine Nemo maudit qui ne dit mot, Clandestin en transit sans cargo en partance, J’ai divagué à quai ou vogué à vau l’eau Et ce soir je me laisse aller aux confidences. Loin des cornes de brume accrochée à l’enfance, Je me soûle de son et du roulis des vers. Dans mon cœur, un éclat de granit gris m’élance, Le cri des goélands me met l’âme à l’envers ! Mortes-eaux ? Cale sèche ? Où en suis-je à présent ? J’avais le pied malin, jamais le mal de mer Mais ce soir tout m’échappe : amour, musique, enfant Et je me sens déboussolé, seul et amer. Solitude orgueilleuse ? Obstination, que sais-je... Peu importe, en tout cas, entre tempête et bruine Je n’en finis jamais d’égrener les arpèges D’un hier révolu, mélancolie malouine... "À quoi bon ? À quoi bon ?"
Sur ma route J’ suis à la bourre, j’ai pris du r’tard et j’ai pas suivi le plan d’ route y’a du trafic, y’a du brouillard sous la pluie je roule goutte que goutte. J’ai pas d’ boussole, une vraie toupie aucun sens de l’orientation et j’ vais encore risquer ma vie à la prochaine bifurcation. J’ mets la radio, une chanson passe c’est à peu près la même histoire, un mec qui roule dans la nuit noire et le tempo des essuie-glaces. Qu’est-ce qu’il dit ? "Sur ma route on my road j’ai des doutes, Helmut" La nuit arrive, y’a moins d’ lumière mais ça vient quand même un peu vite, trop tard pour faire machine arrière ou réfléchir à ma conduite. Pas foutu d’ respecter les codes je flirte avec la ligne blanche je suis limite et – oh My God ! – à chaque virage je tangue et penche.
Trompette bouchée, voix de crooner le morceau est plutôt groovy, du blues mélangé à la vie avec des p’tits morceaux d’ bonheur. "Sur ma route on my road j’ai des doutes, Maud" Dans un couplet, ça raconte que la bagnole c’est une vieille caisse et que tous les voyants lumineux du tableau de bord sont out. Le mec a peur de se retrouver en rade, en panne, en chien, le cul sur le talus, sans même savoir sous quel fuseau horaire il se trouve. À un moment, il fait rimer "étoiles" avec "gas-oil" ! Il est un peu gonflé, il a peur de rien, le mec ! Sans portable et sans G.P.S je me mets vraiment en danger, c’est excitant, je gère le stress tout en restant pied au plancher ! Je sais plus où j’ai mis l’adresse et si c’est bien l’ jour du rancart, j’ suis à cent bornes de Cadaqués j’ suis à la bourre, j’ai pris du r’tard... mais final’ment y’a rien qui presse.
Spleen l’Ancien
Poignée d’amour
Illustrations K et HubbubHum Graffiti et pochoir : Oré
La fin du Père Noël Ah, ça ne va pas, ça ne va pas du tout ! Je viens d’apprendre une mauvaise, une fâcheuse, une très triste nouvelle : le Père Noël est mort. Non, pas un accident de traineaux, une indigestion de marrons glacés, un refus de priorité des sept nains ou un truc comme ça, non, non... Il s’est suicidé, il a mis fin à ses jours ! Je suis sous le choc. Et tous les vrais enfants comme moi sont sous le choc. Hé oui, ça devait arrive ! Voilà ce qui s’est passé : incidemment, il a appris que Dieu n’existe pas. Il a pris ça très mal, tout son univers s’est écroulé comme un château de cartes. Mais non, pas un jeu de 7 familles, un jeu normal ! 52 cartes ? Non, peut-être 32, je sais pas moi, je peux pas dire, j’ai trop de peine... Mais bien sûr, c’est vrai, tout le monde sait que Dieu c’est du pipeau mais personne ne voulait lui dire. On savait tous que ça risquait de le fragiliser, le pépère. Parce que, pour lui, Dieu c’était quelque chose, c’était son truc, son trip, ça le branchait à mort. Toute cette histoire, Jésus qui crèche dans une étable, les animaux de la ferme, les mages qui suivent une étoile pour apporter des cadeaux un peu bizarres, bref, Dieu, l’hiver, la neige, pour lui ça faisait quelque chose de logique, d’évident, comme une sorte de paquet-cadeau, c’est ça oui, un paquet-cadeau. Ça le motivait un maximum, il se sentait utile, incontournable, un peu comme si Dieu c’était un tonton, voyez, ou un collègue, un partenaire.
Il se disait "si les gens croivent en moi, alors, forcément, ils croivent en Dieu aussi". Ben oui, il parlait pas toujours bien, mais ça on s’en fout, qu’est-ce que ça peut faire maintenant, hein ? Il a appris ça le lendemain de Noël. Il était un peu cuit, sur les rotules, mais il faisait le tour des popotes comme chaque année pour voir si les enfants sont contents. Dans un square, il a vu un môme avec une carabine de cow-boy. Il était en civil, le Père Noël, pas avec sa tenue de travail, son "rouge" comme il disait. Il disait "allez zou, j’enfile mon rouge !" C’est bête, je sais, mais rien que d’y penser, je suis tout retourné, ça me met les larmes à l’œil. Alors, il dit au môme qui avait cinq ans pas plus, il lui dit "alors, mecton, t’es jouasse?" C’est comme ça qu’il causait : très nature, très simple. "T’as eu ce que t’as demandé au Père Noël ? Et le môme, il répond "waouh, la belle couillonnade ! Le Père Noël, tout ça, ça existe pas, c’est que des menteries pour faire croire aux parents et pour qu’ils lâchent la tune !" Et, après, il ajoute "c’est comme ils avaient fait pour Dieu, c’est la même entourloupe. Ça, Dieu, c’était rien que du cinéma, une invention pour faire peur aux gens ou pour qu’ils rêvent, pour qu’ils se tiennent tranquilles." Bref, le môme, il a pris tout le temps pour casser bien comme il faut la baraque au Père Noël. Lui, il faisait "non, non" de la tête, il voulait pas y croire mais, bon, à force, il s’est rendu à l’évidence, il a couché les pouces.
Ben oui, comme tout le monde ! C’est affreux. Alors, nous, on a fait tout ce qu’il fallait pour rester discrets et voilà, zag, c’est un p’tit morveux qui vient tout foutre par terre ! Et, à la fin, le môme, il lui dit "tiens, tu me fais tiep !" et il le vise avec sa carabine en se foutant de lui et il lui dit "pan, t’es mort !" Ah oui, ça, on peut dire qu’il a pété un neurone, l’ancien ! Il est rentré chez lui, il a cramé son "rouge" dans la cheminée et après, "pan, t’es mort !", il s’est mis une bastos dans la cafetière ! C’est terrible. Déjà qu’il y a pas mal de gens qui s’étaient écroulés quand on a été sûrs pour de bon que le paradis, l’enfer, tout ça, c’était de l’esbroufe, de la poudre aux yeux, comme les loteries de la foire "à tous les coups l’on gagne". Pour eux, c’était dur à encaisser ,ils s’étaient faits berner par un canular quand même drôlement tiré par les cheveux. Et voilà, et maintenant, paf, le Père Noël, out ! Ah, ça va faire de la couv’, c’est sûr, mais moi j’ vous le dis, on est mal barrés, on est mal barrés. Va falloir trouver autre chose...
Murs En ce temps-là, la vie était ainsi : Les hommes toussaient dans la fumée, La mer débordait des baignoires Et les murs se taisaient. Les murs étaient interdits, Les murs n’avaient même plus d’oreilles, Les murs ne disaient mot. Les murs lançaient leur plainte Sans écho, sans écho. Murs… Mur… aïe ! Dans son béton amer Le mur pleurait sa mère Mots tus, bouche cousue, Le mur n’en pouvait plus, Sans relief et sans graf Le mur crevait de soif ! Sans coulures, sans peinture Le mur devenait dur !
Et puis paf ! Âme, slam, graf ! Pim, pam, poum ! Une nuit, le mur a mis Son nez rouge de clown, Le mur a mis la vie Dans la ville endormie, évanouie... Oui, En ce temps-là, la vie était ainsi : Les hommes toussaient dans la fumée, La mer débordait des baignoires, Les gens du Bangladesh Apprenaient à nager la brasse coulée. Comme disait le sage : "L’erreur est humide, Tout le monde peut se tremper" Oui, En ce temps-là Les murs s’étaient tus.
Mistigri Jim ! Misty (mini bikini vichy) Lilith (fille mi-psy, mi-pythie) Sylvie (bibi chic si mimi) Midi pile, dring, visitent Jimmy Jim : zig ni cynique ni grizzly Style gin-fizz, simili titi, "Hi-fi sixtees, tipi type hippie, Jim gîte ici" briefe Sylvie Zizi viril, pine rigide, Jimmy biche : il trique, hiiii, vil crime !! Rififi, bisbilles, speech qui pique, Sylvie crise : Jim l’irrite (Chipie !) Mille cris qui crispent, limite rixe ! Si Miss Sylvie s’immisce Lilith, mystique frigide, dit "fi" Misty, qui s’y fie, kif-kif, l’imite Trip difficile ! hic ! grise mine, Cible inique, Jimmy flippe, tique, Spleen qu’il discipline (tic typique) Livide, il frime, Jim rit ! Ni guili-guili, ni grigris, Kiki vite riquiqui, Idylle finie, lit, vie vide... Ci-gît, sidi Jim, Mistigri Jim !
Une belle balade en treize carrés noirs et blancs. Quel plaisir de glisser entre tes rimes un souvenir. Et que ce fut bon d’arpenter mon quartier, les routes d’Extremadoure ou les rivages normands, à la recherche d’une résonnance, d’un clin d’œil ! Souvent, c’est un détail, un reflet qui m’ont attiré. Mais le plus souvent, je ne sais pas... Peut-être une nuance de gris en écho aux subtiles variations de tes mots ? Cela faisait un bout que j’attendais ce livre. J’ai remis ça sur le tapis plus d’une fois : – Alors, ce string, c’est pour quand ? Merci de m’avoir emmené à bord. J’ai fait un beau voyage, un joli p’tit tour dans ton univers, entre mélancolie et coup de gueule, à fleur de mot. Je suis heureux, j’ai mis mes yeux sur tes mots. Tonio
Crédits : Spleen l’Ancien : mots, voix. Tonio Cazin : photographie, conception et mise en page du recueil. K et HubbubHum : illustrations et mise en page de "Poignée d’amour". Oré : graffiti-pochoir. Daniel Anne : peinture originale. Bubu Bricole : conception musicale, tous instruments, voix. Simon Deslandes : trompette, tuba. Yo du "Milieu" : duo "coup de gueule". Christian Belhomme : musique de "paddock". Sylvain Vaugeois : photo disque. Grégory Salles : prise de son, mixage. Isaac Azoulay : mastering. … oui, 13 artistes pour cette belle aventure. Le titre "Questionz" est la synthèse de deux textes parus dans "le cri de l’omelette norvégienne". Credo : Mes pensées vont au-delà de ces seuls amis artistes et des seuls horizons normands. Elles naviguent vers toute cette tribu affective, d’ici et d’ailleurs, rencontrée depuis 2006. 2006-2011, cinq années de partage et de bonheur. Cinq années, soit un lustre ! Merci pour toute cette lumière ! Je ne vous dois rien, mais je vous dois beaucoup. Hervé/Spleen
déjà paru chez LSAA-Éditions Un an au potager (4 saisons) Caen l’amère Pourquoi je pleure Le Kinzdé Davaï La révolte de papier Boulange J’irai taguer sur vos tombes Choco-Ecuador La plume dans la plaie Tondue
déjà paru Hervé Gissot Tournée d’adieux (Vinyle 33 tours, chansons) Recto-Servo (K7, chansons) Le cri de l’omelette norvégienne (recueil de chansons)
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Achevé d’exprimer en avril 2011
Spleen l’Ancien Bubu Bricole
Nouveau synopsis Sur ma route Vos yeux bordés Demain, je tuerai mon patron Touareg Si tu n’es pas là Le fou du roi Bonus : Paddock Coup de gueule