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(à l’occasion des salons de la alya)

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DR RAPHAEL ABERGEL

DR RAPHAEL ABERGEL

PAR ELIE KLING

Cher Binyamin Zéèv,

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Sais-tu que près de 120 ans après ta mort, tu es sans doute le Juif dont la simple évocation suscite encore les passions les plus vives ! Pourtant, on en a connu des Juifs controversés ! De Flavius Joseph à Maimonide, de Spinoza à Leibovitch ! Mais, les années passent et les esprits s’apaisent. Le temps finit par entrainer tous les grands noms dans une sorte de consensus encenseur. Songe par exemple que tout le monde trouve naturel aujourd’hui que Jabotinsky, l’autre grand Zeev du sionisme, soit enterré à Jérusalem sur la montagne qui porte ton nom. Et pourtant que de polémiques avant d’en arriver là! Mais qui s’en souvient encore ? Jabotinsky et Ben Gourion, les deux frères ennemis de ton mouvement de libération nationale, semblent aujourd’hui définitivement réconciliés et leurs querelles sont devenues de simples travaux d’historiens. Toi, non. Tes opposants n’ont pas désarmé. J’ai même l’impression qu’ils t’en veulent davantage encore. Malgré la réussite flagrante de ton projet et probablement à cause d’elle. Qu’une idée aussi saugrenue ait à ce point réussi alors qu’ils avaient martelé qu’elle n’avait pas la moindre chance d’aboutir, ils n’en sont pas encore revenus! Trop nombreux sont ceux que ton fantastique projet dérange encore. Idéologiquement, ce sont les mêmes qu’à ton époque. D’abord les assimilationnistes, ceux à qui le sionisme rappelle qu’ils n’appartiennent probablement pas à la nation du pays dans lequel ils résident. Et puis, à l’opposé, un certain nombre de rabbins qui ne se remettent toujours pas du fait que, pour réaliser les antiques prophéties concernant le rassemblement des exilés, l’Eternel notre Dieu, ne les ait pas même consultés. Ainsi, sans leur demander leur avis, le Saint-Béni-Soit-Il, cherchant un ‘chaliah’ efficace pour mener à bien cette tache, arriva à la conclusion que tu ferais, tout compte fait, très bien l’affaire! Ah, s’Il les avait prévenus, ils Lui auraient certainement fait remarquer que tu ne portais pas de kippa et que, pour ce genre de mission, la barbe seule ne saurait suffire! Alors, si je t’écris aujourd’hui, Binyamin Zeev, c’est pour te faire plaisir. Et pour rafraichir ta mémoire. Te souviens-tu du 17 Novembre 1895, à Paris? La journée avait bien commencé. Tu avais rencontré Max Nordau et il était immédiatement devenu un adepte. Tu n’en revenais pas de l’avoir convaincu si vite. Tu pensas tout de suite qu’il ferait un bon ministre de l’éducation dans ton futur état! Mais l’après-midi, tu étais reçu chez le grand rabbin de France, Zadok Kahn. Etaient conviés également des représentants éminents de la communauté juive de France. Le cou- rant ne passait pas. Tu as dû répéter plusieurs fois tes arguments. Lorsque l’un d’entre eux insista pour dire qu’il était avant tout de nationalité française, tu perdis ton sang froid: « Comment ? N’appartenons-nous pas, vous et moi, à la même nation ? Pourquoi donc avezvous frémi lorsque Lueger (chef politique autrichien antisémite) a été élu maire de Vienne ? Et pourquoi aije souffert lorsque le capitaine Dreyfus fut accusé et dégradé ? » Mais les français israélites semblaient sourds. Lorsque tu leur assénas que décidemment « vous et vos pareils, vous ne marcherez jamais avec moi », il n’y eut que le Rabbin Weil pour dire: « moi, je suis avec vous ». Les autres gardèrent un silence glacial. Déçu, tu auras cette phrase en rentrant chez toi : « les juifs français, pour le moment, ne se laisseront pas gagner à ma cause, leur situation est encore trop bonne… » Je t’écris pour t’annoncer que la diaspora française semble bien être la prochaine à vouloir rentrer à la maison pour participer, à son tour, à l’écriture des prochaines pages de l’histoire d’Israël. As-tu remarqué, Binyamin Zéèv, l’air décidé de tous ces jeunes qui portaient dans leur regard tout l’amour de Sion ? Les enfants spirituels des participants à la réunion de chez Zadok vont vainement essayer de les retenir. Mais les successeurs du Rabbin Weil monteront avec eux en sachant qu’ainsi, ils marcheront dans le sens de l’Histoire. Finalement, tu auras donc réussi, même avec eux! Je savais que ça te ferait plaisir de l’apprendre...

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