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Questions d'éduc.
UN DOSSIER DE L'UNSA ÉDUCATION
#45
Déterminé · es à faire reculer les inégalités
Collection Dossiers UNSA Éducation www.unsa-education.com La fédération UNSA des métiers de l’Éducation, de la Recherche et de la Culture
NOM IC I
JANVIER 2022
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Questions d'Éduc.
Actualités
ÉDUCATIVES
2. PREVENTION Yapaka est un programme de prévention de la maltraitance à l'initiative du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique mis en place en 1998. C’est aussi un site internet qui fourmille de ressources concernant l’éducation. Avec des entrées alphabétiques, d’Adolescence à Violence conjugale en passant par Fratrie ou Sexualité, ces ressources font appel à de nombreuses expertises sous forme d’articles, de podcast, vidéos ou livres recommandés.
PODCAST L’Institut Français pour l’éducation (IFE) propose une émission mensuelle sur une web-radio « ça manque pas d’R » est un entretien croisé, entre deux chercheurs, autour d'une question vive de la recherche en éducation et formation.
https://www.yapaka.be
PLAIDOYER POUR LA JEUNESSE Le CNAJEP réunit plus de 70 mouvements et associations d’éducation populaire et de jeunesse. Il compte bien faire entendre la voix de cette spécificité dans le débat public en lançant une plateforme et un plaidoyer pour revendiquer « L’éducation populaire, une fabrique de la République ». Une série de propositions co-construites à consulter pour (re)donner de la force à l’éducation et à l’engagement citoyens et tout au long de la vie. http://www.cnajep.asso.fr
I N I T I AT I V E Lancé en 2016, le dispositif « Mon ESS à l’École » propose aux équipes éducatives d’accompagner leurs élèves dans une démarche de projet collective, entrepreneuriale et d’utilité sociale. On peut se faire accompagner par des membres de l’ESPER, association qui agit pour l’éducation par l’économie sociale et solidaire, pour suivre une session d’information et co-construire un projet ESS en partant des expériences et projets passés. Chaque année, au printemps, une semaine dédiée met en avant toutes les initiatives. https://lesper.fr/mon-ess-a-lecole/la-demarche/
Un échange sur leurs travaux et leurs résultats, afin de mieux éclairer les pratiques de terrain. De nombreux sujets y sont abordés : les derniers en date sont l’enseignement des religions, ou la comparaison internationale des politiques éducatives à partir des travaux du Centre national d’étude des systèmes scolaires (Cnesco). http://ife.ens-lyon.fr/kadekol/camanque-pas-dr
Questions d'Éduc.
C U LT U R E Molière en fête en 2022 : 400 ans et tout un foisonnement d’événements à sa gloire… avec la Comédie Française à la manœuvre. Pour Éric Ruf, administrateur général de la Troupe depuis 2014, qui signe l’éditorial de présentation de la saison, Molière revêt « mille visages et mille théâtres », et il programme ainsi de nombreuses nouvelles versions de pièces devenues mythiques : Tartuffe, Le Misanthrope, Les Fourberies de Scapin, Dom Juan, l’Avare... A voir à Paris et en tournée. Ces pièces sont également diffusées au cinéma et complétées par des expositions historiques de costumes, d’archives écrites et dessinées, d’émissions télé et radio du service public. Impossible de passer à côté de ce somptueux anniversaire. https://www.culture.gouv.fr/Actualites/Anniversaire-Moliere-en-fete-en-2022
Les livres
CARNET ROSE
PhiloDico « L’homme, disait Kant, est la seule créature qui doive être éduquée. » C’est dire que l’entreprise éducative est fondatrice de « l’humaine condition » et ne peut être menée à l’aveuglette, guidée par la seule « efficacité » à court terme : elle requiert une réflexion de fond, tant sur ses finalités que sur ses modalités, sur ses enjeux que sur mé-
thodes. C’est l’objet de la philosophie de l’éducation. Pour nous aider à y voir clair dans ce domaine, les chercheuses et les chercheurs de la Société Francophone de Philosophie de l’Éducation (SOFPHIED) ont réuni ici une centaine de notices qui permettent à toutes et tous d’accéder aux notions, aux grands problèmes et aux questions vives de l’éducation aujourd’hui. Des articles courts et précis qui apportent de la clarté à toutes celles et ceux qui réfléchissent, mettent en perspective et comparaison bref, qui ne restent pas à la surface des sujets d’éducation.
Dictionnaire de philosophie de l'éducation Alain Kerlan - Bérengère Kolly éd.ESF
Les Éditions Tsarines ont vu le jour en 2021. Une maison d'édition dédiée à la pédagogie et au monde de l'école, c’est une excellente nouvelle ! Le premier livre édité est consacré à l’enseignement de la littérature au lycée avec un titre facétieux « Comment lire de vieux textes avec de jeunes élèves ? » écrit par Sarah Alami. Comment étudier un classique sans s’ennuyer en classe ? Comment lire de gros livres ? Comment se mettre dans la peau d’un auteur ? Autant de questions que se posent tous les passeurs de culture. Longue vie et production à cette maison. https://tsarines-editions.fr
Comment lire de vieux textes avec de jeunes élèves ? Sarah Alami - éd.Tsarines
3.
SOMMAIRE R E N D E Z-VO US ANNUE L DE S M É TI E RS
No vem bre 20 21
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6 8 10
Actualités éducatives Édito
Une volonté d’éducation plus juste et pour tous La crise sanitaire a amplifié les inégalités sociales Le climat scolaire : pilier des nouvelles problématiques éducatives
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Réussir la mixité sociale et scolaire : la preuve par l’exemple
14 16 18 20 22 23
12 millions d’enfants sur la route du droit aux « colos » L’étudiant, en recherche de mieux-être social Le sport doit encore combattre les clichés liés au corps Dépasser les stéréotypes dès l’école Mobiliser les alliances éducatives Pour aller plus loin
d'éduc. édito
Agir et avancer pour plus d’égalité « Déterminé.es à faire reculer les inégalités », tel a été le thème du premier Rendez-Vous Annuel des métiers de l’éducation, organisé par l’UNSA Éducation, en novembre 2021 à Poitiers.
Frédéric MARCHAND
Secrétaire général - UNSA éducation CPE
Morgane VERVIERS
Secrétaire générale adjointe - CPE
Béatrice LAURENT
Secrétaire nationale Secteur Éducation et Culture Professeure des écoles - Formatrice INSPÉ ont coordonné ce numéro auquel ont participé : secteur ÉDUCATION ET CULTURE Hawa SALL Conseillère nationale, Chargée de mission Conseillère Principale d'éducation Stéphanie de VANSSAY Conseillère nationale Professeure des écoles Gilles LELUC Conseiller national Professeur de lettres modernes Émilie FOUCRET Conseillère nationale Professeure des écoles Christèle SAUDER, Conseillère Nationale, Directrice Déléguée aux Formations Professionnelles et Technologiques Caroline SOREZ Conseillère nationale Cheffe d'établissement Principale adjointe de collège Pascale MASSINES, Conseillère Nationale, Infirmière scolaire
Directeur de publication Frédéric MARCHAND Graphisme Cécilia Bertin - inanuiicreation@yahoo.fr Crédits photographique UNSA - Pexels - Pixabay p.12 Illustration • Crédits Hélène POUILLE "facilitatrice visuelle"- Radio France www.unsa-education.com
Les inégalités prennent différentes formes, elles touchent les peuples, les conditions sociales. Elles peuvent porter également sur les genres, ou sur l’économie. Présentes dans la société, elles n’épargnent pas les mondes éducatifs, que sont l’école, les accueils collectifs de mineurs, le monde associatif, l’université. La lutte contre les inégalités à l’école ne peut pas être la seule affaire de l’école : elle passe nécessairement par un recul des inégalités de niveau de vie entre enfants. Car la faiblesse des revenus, la précarité des conditions de logement, les privations matérielles, l’accès restreint à la culture sont autant de facteurs qui installent et font perdurer les difficultés scolaires. Mais pour autant, l’école, principal lieu d’éducation, rendue obligatoire de 3 à 16 ans, est tout à la fois temps et espace pour incarner le droit à l’éducation pour tous les enfants. Or le système éducatif français reproduit les inégalités sociales, ce n’est plus à démontrer. Il ne fallait pas moins d'une journée de réflexion pour appréhender ce sujet dans toutes ses composantes. Ce numéro de Questions d'Éduc. porte la mémoire, la trace écrite de cette journée qui a fait appel à l’intelligence collective de tous les participant.es réuni.es ainsi qu’à l’expertise de nombreux invité.es, universitaires, militant.es du monde associatif, syndical, politique ou philanthropique. Exposé de connaissances, analyses d’expériences, débats en regards croisés éclairent donc dans ces pages l’injustice subie liée aux inégalités sociales et scolaires. Questions d'Éduc. contribue ainsi à alimenter vos réflexions pour continuer d’agir avec vous, afin que se réduisent ces inégalités que les professionnels de l’éducation vivent malgré eux . L'équipe éditoriale de "Questions d'éduc."
Questions d'Éduc.
Questions
5.
Questions d'Éduc.
REN D EZ-VO U S AN N U E L DE S M É TI E RS W or ld ca fé
U N E VO L ONT É D’ ÉDUCATI ON PL U S J US T E ET P OUR TOUS
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C’est quoi une école plus juste ? L’égalité des chances est-elle une utopie ? La réussite de toutes et tous ou à chacun·e SA réussite ? Telles étaient les questions du World Café, un moment de convivialité où, en guise de brèves de comptoir, les congressistes ont pu faire valoir de véritables pistes de réflexion. Citations, redéfinitions, propositions, interpellations ; voici une synthèse de ces contributions. Une école plus juste
Équité plutôt qu’égalité
Pour qu’une école juste ne soit pas juste une illusion, ni à peine une sensation, il faudrait d’abord travailler à construire une société plus juste. L’école hérite des inégalités, alors pourquoi lui faire porter seule tous les maux de la société ? Une école plus juste c’est une école qui doit être pour tou. te.s et tous, adaptée à chaque élève, à chaque personnel, dans un cadre de coéducation. Une école plus juste, c’est une école équitable qui fait fi des déterminismes sociaux , qui prend en compte les spécificités et possibilités de chacun, de chaque territoire et de chaque structure. C’est une école qui valorise, encourage, accompagne et permet l’épanouissement. Une école plus juste, c’est enfin une école qui a des moyens financiers et humains, au service de la réduction des inégalités.
La notion d’équité est très souvent mise en avant pour être confrontée à celle d’égalité. Pour beaucoup de contributeurs, c’est bien l’équité qui est d’abord à rechercher, mais une équité qui dépasse le cadre de l’école et de l’institution scolaire car il existe une diversité transversale à bien des niveaux : beaucoup s’attardent sur la question de l’environnement familial, culturel et social, de l’ancrage territorial (et pas seulement dans l’hexagone). L’équité concerne aussi le traitement des savoirs et des enseignements, avec des savoirs manuels qui trop souvent mis de côté. Il est aussi évoqué sur ce point la question de la fracture numérique.
« L’utopie n’est pas l’irréalisable mais l’irréalisé » Théodore Monod
Utopie ? Non, mais l’idéal... Certains lui préfèrent les termes d’idéal, de moteur, d’objectif à atteindre, de but, de devoir républicain au sens le plus large possible. Nombreux sont ceux qui croient en la réalisation de quelque chose de possible même s’il existe encore beaucoup de freins, financiers, humains, politiques, générationnels, territo-
riaux. Mais les nombreuses réponses négatives à la question « L’égalité des chances est-elle une utopie ? » semblent indiquer le caractère résolument optimiste et volontaire de nos militants.
Agir par quoi, par qui ? On s’accorde à penser qu’il faut d’abord une réelle volonté politique (et certains suggèrent l’utilité des moyens de pression pour « aiguiser » cette volonté, d’autres n’hésitent pas à parler d’influencer les politiques). Il faut ensuite des moyens humains et les rendre compétents par des formations sur la gestion de l’humain, la mise en réseau des acteurs, le travail en équipe. Les moyens financiers doivent suivre pour concrétiser durablement cette action. Enfin, il faut dépasser le seul cadre de l’école et agir au plus large dans tout le champ éducatif, en partenariat et coéducation. On parle souvent ici du rapport aux familles et de l’aide à la parentalité. On évoque aussi la nécessité de retrouver de la mixité sociale et d’agir sur les environnements.
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Facteur temps Il y a néanmoins un impératif : il faut du temps pour construire cette réponse dans la durée, car c’est le temps qui cimentera les projets et leur permettra d’être féconds. Certains soulignent à cet égard que le facteur temps concerne aussi le politique ; les alternances politiques freinent ou empêchent souvent d’aller jusqu’au bout des projets et de les ancrer dans la société.
L A CA R T E ME NTA L E Qu’est-ce que la réussite ? Qui la définit ? Est-ce la société ? L'individu ou le Monde économique ? C’est quoi ? Avoir une rolex, être riche ? Avoir réussi sa vie, être épanoui et heureux ? Il y a beaucoup de préjugés sur la réussite : "Un élève de lycée professionnel a-t-il autant de valeur qu’un élève de lycée général ?" Faut-il réussir individuellement en écrasant les autres ? Est-ce une fin ou juste une étape dans le cheminement individuel ?
Quels sont les facteurs et les moyens de la réussite Le financier : "Donner les moyens à l’école publique" La pédagogie : Favoriser l'entraide, la différenciation et le respect de chacun.e Les représentations : avoir des modèles de réussite ? Différencier les parcours pour que chacun trouve sa voie.
Quelles priorités pour permettre la réussite ? Doit-on Doit-on Doit-on Doit-on
faire émerger une élite ? offrir les mêmes chances à tous ? donner plus à ceux qui ont moins ? plus individualiser ?
La réussite de tou.te.s ou chacun.e SA réussite ? Réussite personnelle et/ou réussite collective "Une école plus juste réussirait à concilier les deux ."
"Ma réussite est liée à la réussite de tous " "J’apporte au collectif et le collectif me fait gagner."
"Réussir ensemble, c’est ma réussite"
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REN D EZ-VO U S AN N U E L DE S M É TI E RS Co nf ér en ce
La crise sanitaire a amplifié les inégalités sociales La crise sanitaire a amplifié des inégalités existantes, selon Joannie Cayouette Remblière, sociologue et chercheure à l’Institut national d’études démographiques (INED). Celle-ci démontre dans son ouvrage intitulé « L’explosion des inégalités, Classes, genre et générations face à la crise sanitaire » que certaines catégories de population ont davantage souffert pendant la pandémie.
La méthode : deux enquêtes détaillées L’auteure s’appuie sur deux enquêtes conduites pendant le premier confinement : une enquête quantitative par questionnaires en ligne, entre le 30 avril et le 3 mai 2020, auprès d’un échantillon représentatif de la population de la France métropolitaine (méthode des quotas). une enquête par portraits sociologiques : il s’agit de revisites auprès d’enquêté.es dont on connaît déjà les conditions de vie en temps ordi-
Premiers enseignements à tirer Si plusieurs chiffres tendent à montrer qu’on a assisté à une crise pour tous, cette enquête révèle surtout qu’il y a trois grands perdants : les catégories sociales des jeunes, des employés et ouvriers et des femmes.
30%
13% 13%
des personnes en emploi le 1er mars 2020 ne travaillent plus deux mois plus tard.
des enquêté·es changent de logement ou de personnes avec lesquelles ils·elles vivent.
naire (21 portraits conduits par 18 chercheur.es). Ces enquêtes ont été adressées à des individus de tous âges (18 à 95 ans), de milieux sociaux différents et issus de différents contextes socio-spatiaux (des quartiers populaires ou bourgeois, parisiens ou ruraux, mixtes ou ségrégués…)
Conférence sur notre chaîne Youtube : https://youtu.be/ZmdC_YiWRHk
31% 24%
des enquêté·es déclarent une perte de revenus.
des personnes craignent de rencontrer des difficultés à payer leur loyer, leur crédit immobilier ou leurs charges et 7% redoutent même de perdre leur logement.
38% La proportion d’individus qui se déclarent isolé·es dans leur logement et leur quartier atteint 38%, contre 17% avant le confinement.
ISOLEMENT
un isolement croissant Sur le plan sanitaire, on peut considérer que les jeunes sont une population plutôt protégée par la pandémie de Covid-19. L’impact de la pandémie sur les jeunes a été amorti par les solidarités privées lorsqu’ils·elles ont pu en bénéficier.
Concernant le logement, les 18-24 ans vivent le premier confinement dans un logement moins bien doté. Ils·elles disposent dans leur logement de confinement de 36 m² en moyenne par personne, contre 50 m² par personne pour les 30 ans et plus.
Leurs difficultés ont été invisibilisées lors du premier confinement.
De plus, ils·elles craignent de perdre leur logement ou d’avoir des difficultés à le payer : 32 % pensent avoir des difficultés de loyer, de charges ou de mensualités dans les 12 prochains moins et 10 % craignent de devoir quitter leur logement.
Sur le plan de l’emploi, il est à noter qu’un jeune sur deux en emploi le 1er mars 2020 ne travaille plus deux mois plus tard.
Enfin, l’enquête révèle que les jeunes ont vécu un isolement croissant. Ils·elles sont plus isolé·es en temps ordinaire (24 % contre 17 % en moyenne) et encore plus pendant le confinement (44 % contre 38 %)
Les classes populaires touchées par la baisse des revenus Comme toutes les crises, celle-ci frappe de plein fouet les classes populaires alors qu’elles disposaient déjà de conditions d’emploi et de logement plus difficiles. Au même moment, les plus riches ont épargné (selon une étude du Conseil d’Analyse Économiques, les ménages aisés ont dégagé deux tiers de l’épargne accumulée pendant le premier confinement) alors que les plus modestes se sont endettés sur la période.
Emploi : il faut noter que les moins qualifié·es sont plus souvent précaires. Ils·elles occupent moins souvent des emplois télétravaillables et connaissent plus souvent une perte de revenus. Ainsi, chez les moins de 60 ans, 47 % des ouvriers ont perdu des revenus contre 34 % des cadres.
Logement : on constate qu’ils·elles ont légèrement plus de difficultés à ce que chaque enfant dispose d’une pièce isolée pour travailler. Ce sont ces mêmes groupes qui rencontraient déjà des difficultés à payer leur logement et qui craignent encore plus d’en rencontrer. Ce sont 44 % des ménages à dominante ouvrière sont concernés par cette crainte, contre 8 % des ménages à dominante cadre.
Les femmes impactées
par les fermetures d’école Elles sont 35 % des femmes en emploi le 1er mars 2020 qui ne travaillent plus deux mois plus tard, contre 26 % des hommes. Cette situation s’explique peu par leurs contrats de travail, niveaux de qualification et types d’emploi. Certes, les femmes
sont davantage affectées par la précarité (notamment du fait d’arrangements conjugaux) mais c’est surtout la part des femmes qui ont arrêté de travailler pour s’occuper des enfants suite à la fermeture des écoles qui explique cette situation.
revenus, notamment lorsqu’elles vivent seules avec ou sans enfants.
Enfin concernant les conditions de vie, elles ont été davantage confinées avec des enfants mineurs (femmes seules avec enfants) et ont davantage été moAu niveau des ménages, les bilisées pour en prendre soin. femmes déclarent davantage que les hommes avoir perdu des
Questions d'Éduc.
Les jeunes :
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LE CLIMAT SCOLAIRE, pilier des
nouvelles problématiques éducatives Pour Benjamin Moignard, docteur en sciences de l’éducation, qui a notamment travaillé avec le pédagogue Éric Debarbieux, spécialiste de la violence scolaire, la question du climat scolaire se révèle être un point crucial des nouvelles problématiques éducatives (NPE). Voici une synthèse de sa conférence.
Il convient au départ d’interroger la désignation de ce qui fait problème dans notre système scolaire car cela montre les enjeux qui font la politique de l’école. Ces “problèmes” se développent dans les systèmes éducatifs massifiés et sont présentés comme si l’école ne “savait plus faire”. En France l’attachement à l’école est très fort, on lui demande de tout résoudre, les NPE sont d’autant plus, chez nous, porteuses d’enjeux.
Imaginaire collectif interrogé En terme de définition, les NPE sont des problématiques qui perturbent ou questionnent le fonctionnement de l’école et dérangent dans notre imaginaire collectif le fonctionnement ordinaire de l’école. Elles interrogent l’articulation des missions traditionnelles de l’école (l’instruction)
ZOOM
avec des formes éducatives plus larges portées par notre société via des associations et organisations diverses. Elles sont perçues comme étant de nouveaux phénomènes qui n’existaient pas auparavant, renvoyant inévitablement à un “c’était mieux avant”. On peut citer par exemple : l’échec scolaire, la violence à l’école, le décrochage scolaire, les discriminations sexuées et
genrées, les discriminations ethnicisées et racialisées, la laïcité, la radicalisation, le harcèlement et le cyberharcèlement… Ces objets émergent non parce qu’ils n’existaient pas avant mais parce qu’ils préoccupent : il n’y a pas forcément plus de problèmes ou des problèmes nouveaux mais une volonté de s’emparer de problèmes qu’on ne voyait pas ou qu’on ne cherchait pas à gérer avant.
Représentation schématique autour d'objets en lien avec les "nouvelles" problématiques éducatives Vous pouvez retrouver sur notre chaine YouTube l’intégralité de l’intervention de Benjamin Moignard: https:// www.youtube.com/ watch?v=lTJ0qoPt6Jo
Questions d'Éduc.
La NPE apparaît quand elle se pose dans le débat public, par exemple pour le harcèlement on est passé de “ce sont des affaires qui doivent se gérer entre enfants” de l’époque du film culte “La guerre des boutons” au déploiement actuel d’un programme pHARe dans chaque établissement et le projet d’une loi dédiée au harcèlement scolaire.
11.
Classiquement, les NPE provoquent des actions avec une forte tentation du recours au programme “magique”. On a systématiquement un déni de la complexité qui aboutit à un empilement de dispositifs plus ou moins efficaces et pertinents qui seront progressivement abandonnés au profit de nouveaux… Il serait pourtant bien plus utile d’agir par l’amélioration du climat scolaire plutôt que par des interventions ciblées sur quelques-uns. En effet, le climat scolaire est déterminant pour la réussite scolaire des élèves des milieux populaires et bénéfique pour tous.
Appui sur la recherche Alors qu’on est dans une société qui insiste sur l’appui sur la recherche pour justifier ses actions (quand elle va dans le sens de ce qui est souhaité par le politique), on écarte le fait que les méta-analyses montrent qu’un programme éducatif ne peut être efficace que dans un bon climat scolaire. Le climat scolaire reflète le jugement qu’ont les parents, les éducateurs et les élèves de leur expérience de la vie et du travail au sein de l’école. Il ne se résume pas au bien-être même si celui-ci fait partie du climat scolaire dont les sept piliers sont : la justice scolaire, les pédagogies et la coopération, la prévention des violences et du harcèlement, la coéducation, les pratiques partenariales, la qualité de vie à l’école et la stratégie d’équipe.
Parmi ceux-ci, le pilier le plus incident sur le climat scolaire est l’équipe ; que ce soit en termes de stabilité mais aussi de modalité de travail collectif, il y a une convergence de toutes les études sur le sujet, or ce n’est pas ce qui est perçu comme premier par la plupart de nos collègues. En effet, la dimension collective est largement absente de notre culture française de l’école, donc elle est négligée, insuffisamment perçue comme étant un enjeu majeur. La deuxième variable par ordre d’importance est mieux repérée, il s’agit de la justice scolaire, ensuite viennent les pédagogies et la coopération en 3ème place.
Meilleure perception de la direction Une étude (Debarbieux & Moignard, 2018) montre que la perception du climat scolaire selon 12 critères est meilleure chez les
personnels de direction et moins bonne chez les enseignants avec les CPE se situant très exactement entre les deux. La première hypothèse a été que cela était dû au face à face avec les élèves, or en étudiant les données il apparaît que ce sont les relations avec les collègues et la hiérarchie qui dégradent leur perception du climat scolaire. C’est entre enseignants qu’il y a le plus de conflits signalés. Nous voilà donc avec la désignation claire et sans ambiguïté des leviers sur lesquels agir pour prendre en compte les nouvelles problématiques éducatives actuelles et à venir, de façon efficace et systémique. Reste à trouver comment agir concrètement dans le sens d’un meilleur climat scolaire en s’attachant tout particulièrement à tout ce qui peut améliorer le travail en équipe.
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REN D EZ-VO U S AN N U E L DE S M É TI E RS La bo ra to ire d'I dé es
RÉUSSIR LA MIXITÉ SOCIALE ET SCOLAIRE : LA PRE UV E P A R L’ EX EM P L E Le conseil départemental de la Haute-Garonne a décidé de conduire une politique de mixité sociale et d’en faire une priorité. A Toulouse, une expérimentation est menée depuis 2016 pour améliorer la mixité dans les collèges et favoriser la réussite scolaire de tous. C’est une véritable politique en faveur de l’égalité des chances qui a été menée et les premiers résultats sont encourageants. Etienne BUTZBACH, chercheur associé au CNAM-CNESCO, a suivi et accompagné les acteurs de l'initiative. Il nous en fait retour. La mixité sociale et scolaire est un des leviers pour favoriser la réussite de tous les élèves. Cependant, on constate une ségrégation et une absence de mixité dans de nombreux territoires. Les parents d’élèves ont des craintes quant à la réussite de leur enfant. L’enseignement privé leur permet alors de contourner la sectorisation et contribue à la séparation de notre jeunesse et à la constitution d’établissements « ghettos ». L’expérimentation menée à Toulouse intitulée « projet mixité » montre qu’un changement est possible et que les pouvoirs publics peuvent agir et doivent prendre en main cette problématique.
Fermeture de deux collèges Rep + En concertation avec l’Éducation nationale, la communauté éducative et les parents d’élèves des quartiers concernés, la décision a été prise de fermer progressivement deux collèges Rep + Raymond Badiou et Bellefontaine situés dans le quartier du Mirail où la ségrégation urbaine et scolaire est une réalité. En parallèle, des travaux de revalorisation ont été réalisés dans trois autres collèges situés aussi en éducation prioritaire, l’objectif étant de faire revenir les populations favorisées dans ces collèges qui subissent un phénomène d’évitement. Une modification de la sectorisation n’aurait pas pu remédier à la situation. Ce projet mixité a donc conduit à réaffecter plus de 1 000 élèves de ces
secteurs dans 11 établissements plus favorisés de l’agglomération toulousaine.
Large concertation Ce projet a reposé sur une large concertation organisée avec les familles, la communauté éducative et les associations dans le but d’établir des actions et des solutions adaptées. De nombreuses réunions publiques ont été organisées pour expliquer, pour convaincre ou encore rassurer. La mise en place d’un comité de suivi a permis de poursuivre les échanges et de rendre compte de l’avancée du projet. Dans la discussion, on a recherché l’adhésion de toutes les familles avec un véritable accompagnement global.
Les résultats suivent La première cohorte d’élèves ayant bénéficié de ce projet, a passé le brevet en juin 2021. Les résultats sont plutôt prometteurs et traduisent une meilleure réussite de toutes et tous. Ce sont plus de dix points de pourcentage d’élèves qui ont eu plus de 10 sur 20, et treize points de plus de taux de réussite au DNB pour les élèves de la première cohorte ayant bénéficié du dispositif (voir encadré). Une concertation réussie, des moyens sur la table, une volonté politique d’améliorer la mixité : cela nous rappelle qu’il n’ y a pas de fatalité. L’égalité des chances est possible et on peut réunir dans nos établissements scolaires des jeunes qui vivent dans des territoires différents pour les faire réussir ensemble.
Questions d'Éduc. 13.
21%
SCOLARISATION
DES CH I F F R E S QUI PA R L E N T
des élèves ont eu entre 10 et 12 là où ils n’étaient que 11 % au collège Raymond Badiou en Rep (+ 10 points).
33%
des élèves ont eu
plus de 12
63 % des élèves ont obtenu leur diplôme à la fin de la troisième. Ces élèves devaient initialement rejoindre le collège Raymond Badiou en Rep, collège qui affiche 50% de réussite au Brevet selon les statistiques de l’établissement.
alors qu’ils n’étaient que 4,6 % au collège Raymond Badiou en Rep (+ 28 points).
DES MO Y E N S ET DES A C TE S
La nomination de maîtres inter-degrés : des professeurs des écoles chargés de faire le lien entre écoles et collèges.
pour le "projet mixité"
56
Des formations à destination des enseignants comprenant des rencontres inter-degrés.
millions d'€
C'est le budget du département de la Haute-Garonne pour mener à bien ce dispositif. Cette enveloppe comprend la reconstruction de deux nouveaux collèges et les mesures d’accompagnement des élèves réaffectés dans les collèges de l’agglomération de Toulouse. Ce sont environ 900 000 euros dédiés au transport scolaire et consacrés à l’organisation d’ateliers thématiques sur la pause méridienne assurés par l’AFEV (Association de la Fondation Étudiante pour la Ville).
25
La limitation des effectifs des classes de 6ème à 25 élèves.
Le renforcement des moyens de vie scolaire considérée comme un véritable temps éducatif. Une mobilisation renforcée des corps d’inspection dans le suivi pédagogique.
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12 MILLIONS D’ENFANTS SUR LA ROUTE DU DROIT AUX « COLOS » « Chaque enfant a le droit de partir en vacances ! » Tel est le message de Christian Dominé, président de la confédération jeunesse au plein air, lors de sa présentation de la JPA et de son action en faveur du développement des séjours collectifs et des colonies de vacances auprès des jeunes. La société a beaucoup d’attentes vis à vis de l’école. Mais ni l’école ni les familles ne peuvent agir seuls. Le mouvement d’éducation populaire (EP) a généré de multiples associations complémentaires à l’école telle que la Jeunesse en plein air (JPA). LA JPA regroupe 35 organisations comprenant des syndicats, des organisateurs de séjours, des partenaires de l’école publique, des organisations de jeunes et des comités sociaux et économiques d’entreprise. Elle s’étend sur l’ensemble du territoire à travers des comités locaux qui développent de multiples actions chaque année, partageant des valeurs communes et visant à s’associer pour amplifier et coordonner leurs actions dans le but de faire partir le plus d’enfants possible en vacances.
Lieux privilégiés de socialisation Les séjours collectifs (colonies de vacances, séjours adap-
tés, séjours scolaires…) et les centres de loisirs sont pour les enfants et les jeunes des lieux privilégiés de socialisation, d’éducation, de découvertes, d’échanges et d’amitié, complémentaires de l’école et de la famille. Lors de séjours collectifs, les enfants développent des compétences psycho-sociales ayant des effets sur leur bienêtre au travers d’une expérience éducative et pédagogique. Ils permettent aux enfants et aux jeunes d’expérimenter le vivre-ensemble et l’autonomie, participant ainsi à la construction du citoyen de demain. C’est avant tout un outil de prévention contre certains « fléaux » tels que l’illettrisme, les maternités précoces, les addictions diverses, la malbouffe pour ne citer que quelques exemples.
Classes intermédiaires La JPA constate que : « La classe moyenne basse n’est pas assez pauvre pour avoir des aides, ni assez riche pour se les payer. »
La création d’un PASS COLO permettrait d’offrir la possibilité aux enfants et adolescents de partir en vacances au moins une fois dans leur vie. Aujourd’hui un million d’enfants partent en colonie de vacances, ce qui n’est pas significatif pour agir sur la société. L’objectif est de passer à 12 millions en 5 ans. Pour cela, il faut agir sur le recrutement des animateurs et développer la filière professionnelle pour qu’elle soit plus attractive. Les AED et les lycéens sont des cibles à conquérir en proposant des financements à ces jeunes pour passer leur BAFA et s’engager dans l’animation volontaire. Un plaidoyer est en cours de préparation pour informer plus de 300 000 jeunes. L’UNSA Éducation est investie dans la création de ce projet. Plus les enfants partent tôt en colonie de vacances plus ils ont envie d’y retourner et par la suite ils ont envie de devenir animateurs à leur tour. C’est un cercle vertueux qu’il faut donc encourager.
Questions d'Éduc. 15.
LO COLO SS CO PA PASS Le sénateur JacquesBernard MAGNER a déposé, dans le projet de loi de finances pour 2022, un amendement en faveur de la création d’un « PASS COLO » doté d’une enveloppe de 30 millions €. « Ce « PASS COLO » pourrait dans un premier temps être expérimenté auprès de 100 000 enfants, en ciblant prioritairement les cités éducatives ou les territoires ruraux éducatifs. »
RE OIRE STOI HIST D'HI U D' PEU UN UN PE La Jeunesse au Plein Air (JPA) est une confédération d’œuvres laïques reconnue d’utilité publique depuis 1949. Elle s’est donnée pour mission de faciliter l’accès aux vacances et aux loisirs des enfants et des adolescents. En 1938 est créée la Fédération Nationale des Œuvres Laïques de Vacances d’Enfants et d’Adolescents (FNOLVEA). Plusieurs associations issues du monde syndical et des mouvements laïques, dont la Ligue Française de l’Enseignement, La Fédération des Pupilles de l’Enseignement Public, la Confédération générale du travail rejoignent cette association. À partir de 1939, une collecte est organisée sous la forme de vente de timbres et de cartes. Les premiers timbres sont dessinés par Francisque Poulbot. La FNOLVEA est dissoute temporairement pendant l’occupation et le régime de Vichy. Elle renaît en 1945. La campagne de vente de timbres est relancée en 1947 sous le nom de « Jeunesse au Plein Air ». En 1949, l’association adopte le nom de Jeunesse au Plein Air.
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REN D EZ-VO U S AN N U E L DE S M É TI E RS La bo ra to ire d'I dé es
L’étudiant,
en recherche de mieux- être social
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La Fédération des associations générales étudiantes (Fage) milite pour de nombreuses réformes visant à une amélioration de la condition sociale étudiante. Paul Mayaux, son président, est longuement revenu sur les chantiers en cours, santé, aide sociale, logement, orientation, dont l’urgence a été ravivée par la crise sanitaire. Voici quelques points saillants de cet atelier. Santé et chèque psy Comment faire en sorte que les étudiants soient en bonne santé ? L’offre de santé doit être la même partout sur le territoire. Il existe des centres de santé universitaires de droit commun mais d’autres qui ne le sont pas et il y a là un enjeu d’égalité d’accès aux soins. Dans les centres de santé de droit commun, on peut recruter des personnels salariés plus facilement, ce qui facilite aussi l’entrée des étudiants dans un parcours de soin coordonné avec le médecin traitant habituel. La crise sanitaire a renforcé ce besoin avec l’octroi du chèque Psy permettant aux étudiants d'obtenir une aide psychologique par le biais d'un accès à un parcours de soins gratuit auprès d'un psychologue professionnel. Une enquête menée par Ipsos montre que 76% des étudiant.es interrogé.es déclarent avoir
été affecté.es au niveau psychologique, affectif ou physique depuis le début de la crise. Cette tendance est confirmée par le Centre National de Ressources et de Résiliences basé à Lille (CN2R) qui indique que dès la première vague de la pandémie 43% des étudiant.es suivi.es présentaient des symptômes sévères de détresse, stress, idées suicidaires, anxiété, dépression. Selon une étude récente du CN2R, 20% des jeunes souffrent de stress post-traumatique. La plateforme nationale d’accompagnement psychologique des étudiant.es a été lancée en mars 2021 sans avance de frais et entièrement gratuite, puis reconduite jusqu’en août 2022. Ce dispositif donne droit à 8 consultations psychologiques.
Dossier social unique Autre
point
crucial,
celui
du social avec, dans son prolongement, tous les sujets qui y sont liés. La Fage revendique un guichet unique qui permettrait de centraliser la constitution du dossier social étudiant. Ce guichet fonctionnerait comme une sorte de hub, c’est-à-dire le point de contact de toutes les aspects du dossier : logement, aide sociale, santé etc. L’étudiant n’aurait plus qu’un seul dossier à remplir. Aujourd’hui, seuls 31,2% des étudiants sont boursiers et faute de bourses sur critères sociaux, de nombreux étudiants sont contraints de se salarier au cours de leurs études ou de faire des demandes d’aides d’urgence. Les critères d’accès aux aides sociales pénalisent fortement les classes moyennes. La Fage propose l’Aide globale d’indépendance (AGI) qui vise à lutter contre ces inégalités économiques en permettant une meilleure répartition des aides sociales selon les catégories socio-professionnelles. Avec
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la mise en place d’un dossier unique regroupant les aides actuelles du Crous et les aides au logement de la Caf, ce dossier pourra être utilisé par tout étudiant, quelle que soit sa filière d’origine, souhaitant bénéficier de ces aides. La Fage propose aussi que le Fonds national d’aide d’urgence aux étudiants, indispensable pour les étudiants en situation de précarité, soit indépendant de l’AGI.
Par ailleurs, la Fage considère la professionnalisation des formations par les seuls stages insuffisante. Comment peut-on rendre Parcoursup plus efficace ? En développant l’information en amont, ce qui permettra aux étudiants d’aller sur la plateforme avec une meilleure préparation.
Enfin, la Fage préconise la création d’un centre national chargé de la qualité de vie étudiante qui pourrait avoir un rôle d’alerte auprès des pouvoirs publics. Ce centre fournirait des informations quant aux problèmes de santé, de stages, de niveau de vie rencontrés par les étudiants, aidant très en amont à ajuster les politiques publiques à leurs difficultés quotidiennes.
R NIR TENI RETE À À RE
Orientation et parcoursup
Selon une enquête :
La question de l’orientation est également abordée. Si la Fage juge positif le doublement des professeurs référents en Terminale, la mesure n’est toutefois pas encore effective ni efficace. Beaucoup de filières ne renseignent pas sur la poursuite d’études et il faudrait songer à revoir la manière d’approcher les filières avec une entrée par compétences.
76% des étudiant.es interrogé.es déclarent avoir été affecté.es au niveau psychologique, affectif ou physique depuis le début de la crise. 43% des étudiant.es
suivi.es présentaient des symptômes sévères de détresse, stress, idées suicidaires, anxiété, dépression.
Création en 2021 de la plateforme nationale d’accompagnement psychologique des étudiant.es sans avance de frais et entièrement gratuite. Ce dispositif donne droit à 8 consultations psychologiques. Projet soutenu par la Fage : l’Aide globale d’indépendance (AGI) mise en place d’un dossier unique regroupant les aides actuelles du Crous et les aides au logement de la Caf.
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LE SPORT DOIT ENCORE COMBATTRE LES CLICHÉS LIÉS AU CORPS Le sport est encore source d’inégalités malgré les efforts visant à mieux faire connaître la mixité chez les amateur.ices comme au haut niveau. Aurélie MARTIN, responsable de programmes et de fonds individualisés à la Fondation de France revient sur les raisons d’une si longue évolution.
La fondation de France héberge plus de 200 fondations qui interviennent sur de nombreux domaines. Les données mettent en évidence le manque d’équipements sportifs souvent corrélé aux déserts médicaux. L’inactivité des jeunes menant à des situations de surpoids et des problèmes de santé, agir sur la pratique sportive est donc primordial dans un objectif de santé publique. Le public féminin est tout particulièrement touché.
Des horaires trop tardifs Les femmes sont les premières lésées par le manque de créneaux disponibles sur les installations, notamment dans les quartiers populaires. Reléguées sur les horaires tardifs, les freins à l’activité se multiplient. A la difficulté de faire garder les enfants, s’ajoutent l’insécurité dans les transports la nuit (quand ils existent) et la fatigue de la double journée de travail. En effet, la majorité des femmes en couple avec enfant invoquent comme cause de l’arrêt du sport le manque de temps et les
Fondation de France www.fondationdefrance.org
contraintes familiales. Le temps consacré aux tâches ménagères et à la parentalité est encore très déséquilibré dans le couple.
Abandon du sport à l’adolescence On constate que 69% des adolescentes abandonnent le sport contre 34% des garçons. Les causes invoquées sont issues de la culture implicite. Les filles se concentreraient-elles plus sur leur travail scolaire et auraient moins besoin de se défouler ? Pourquoi le rapport au corps féminin à l’adolescence serait davantage un obstacle à la pratique sportive que celui des garçons ? Les programmes de la Fondation de France ont pour but de déconstruire ces stéréotypes et de faciliter la pratique sportive féminine. Les projets sont là pour initier des pratiques qui seront ensuite reprises par l’État.
La moindre exposition médiatique du sport féminin (20% des retransmissions télévisuelles en 2016 source CSA), même si elle est en progression, limite également les possibilités de projections à travers les performances des sportives de haut niveau. L’engouement suscité après de grands événements, surtout si les résultats sont au rendez-vous, reste principalement attaché au public masculin.
S’affirmer et s’épanouir Le sport permet l’appropriation de son corps loin des images hypersexuées véhiculées par les médias. Il augmente la confiance en soi et les capacités relationnelles. L’activité physique est un complément nécessaire au tra-
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Médiatisation
vail scolaire pour les adolescents et contribue à leur équilibre et leur santé. Se satisfaire qu’un tiers seulement des adolescentes pratiquent un sport c’est accepter une situation néfaste pour la santé publique surtout pour les territoires défavorisés. Un appel à projet est actuellement en cours à la fondation de France afin de construire un parcours de santé intégrant la pratique d’une activité physique ou sportive pour le patient vivant en zone rurale ou en quartier prioritaire. www.fondationdefrance.org
Sport et santé en territoires fragiles : www.fondationdefrance.org/
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Taux d’activité sportive : Les femmes progressent mais restent encore 15 points en dessous des hommes en début de vie familiale : tranche 26-29 ans.
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Des activités sportives encore très genrées selon les stéréotypes. ©Fondation de France
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D É PA S S E R L E S S T É R É O T Y P E S D È S L’ É C O L E Virginie Houadec, inspectrice de l’Éducation nationale (IEN), membre de l'équipe genre et éducation, docteure en sociologie, a coordonné deux ouvrages intitulés « 50 activités pour l'égalité filles-garçons » (Canopé). Elle propose une réflexion sur la mise en œuvre d'une politique volontariste de dépassement des stéréotypes sexués dès le stade de l'école.
Les lois Jules Ferry (1881-1882) instituent l’obligation d’instruction pour les filles et les garçons, en primaire. Dès 1957, la mixité s’établit jusqu’à devenir la norme en 1975 avec la loi Haby. En 2000, la notion d’égalité filles-garçons entre dans les textes et porte sur les interactions dans la classe, l’éducation à l’orientation et la prévention contre les violences sexuelles et sexistes. Actuellement, il existe encore une sous-représentation des filles dans les filières les plus prestigieuses et les plus porteuses d’emplois.
Une notion affirmée dans les textes Forte de son expérience dans le primaire, Virginie Houadec décortique les programmes scolaires des cycles 1, 2 et 3. L’égalité filles-garçons dans les programmes de l’Éducation nationale est présente puisque c’est la première compétence professionnelle du référentiel des métiers du professorat et de l’éducation. La notion égalitaire est réaffirmée par la loi de 2019 dite pour une école de la confiance dans son article 6. Dans les trois cycles, la volonté de l’Éducation nationale est énoncée sous différents termes et pourtant un paradoxe existe entre affichage
Virginie Houadec inspectrice de l’Éducation nationale (IEN), membre de l'équipe genre et éducation, docteure en sociologie
et réalité. Un manque flagrant d’outils en est la raison selon la sociologue. Le réseau Canopé, acteur pédagogique de référence plébiscité par les enseignant.es, propose une page aux multiples liens vers des outils adaptés au second comme au premier degré, notamment le « 50 activités » auquel a collaboré Virginie Houadec. Ce n’est qu’en 2018 que l’on retrouve dans le programme des ouvrages qui portent des valeurs d’émancipation comme Rubis tête haute d’Irène Cohen-Janca. Difficile concrétisation Alors pourquoi autant de difficultés à concrétiser sur le terrain ? Virginie Houadec apporte deux réponses : la première est la faiblesse de la formation initiale et continue où seulement deux heures de formation par an par enseignant.e sont c o n s a -
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Egalité Filles-Garçons 50 activités - Tome 1 et 2 https://www.reseau-canope.fr/notice/50-activites-pour-legalite-filles-garcons_11019.html
crées à la question du genre et de l’égalité et la deuxième est la faiblesse des programmes sur cette question. L’inscription de l’égalité filles-garçons dans les programmes de 2020 est très peu structurée. Elle existe mais comme une bonne résolution sans que le champ d’action ne soit réellement développé et puisse constituer un point d’appui réel dans la mise en œuvre dans les classes par les enseignant.es.
mance (DEPP) montrent qu’en cycle 3 les performances des filles sont meilleures que celles des garçons en français avec un écart de 8 points ; il faudrait mettre en relation ce résultat avec les activités pratiquées par les élèves lors des temps de pause, selon Virginie Houadec. Aux récréations, spontanément, les garçons sont au centre de la cour alors que les filles en sont à la périphérie avec des activités à forte « valence » langagière.
Agir sur le territoire et l’espace
La cour est un territoire de l’école que doivent s’approprier les enseignant.es avec des projets de territorialité et de partage de l’espace.
Plusieurs statistiques de la Direction de l’évaluation de la prospective et de la perfor-
ES T X E T S E L S N DA L'égalité entre les filles et les garçons constitue une obligation légale et une mission fondamentale de l’Éducation nationale. L’école doit contribuer à la lutte contre les préjugés sexistes à tous les stades de la scolarité. Les recherches actuelles en sociologie, psychologie et sciences de l'éducation montrent que tout se met en place très tôt chez l'enfant par l'éducation reçue dans la famille, l'école et à travers les médias. Les stéréotypes sexués s'ancrent vite et profondément. La formation initiale et continue des enseignant.es est primordiale ainsi que des outils préfabriqués pour collaborer à l’enseignement de cette égalité.
Autre exemple avec les manuels scolaires. Virginie Houadec et Isabelle Mosconi ont travaillé pendant dix ans auprès du ministère de l’Éducation nationale et des éditeurs pour alerter sur les stéréotypes de genre. Face aux freins de l'institution, elles contournent la problématique en conseillant d’apprendre aux élèves à les reconnaître et à les vider de leur sens.
« Puisque l’école doit préparer les enfants à la vie en société autant faire en sorte que leur formation scolaire leur permettre de vivre dans une société égalitaire ». Christine Morin-Messabel, maître de conférences à l’Institut de Psychologie de l’Université Lumière-Lyon2
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REN D EZ-VO U S AN N U E L DE S M É TI E RS Ta bl e Ro nd e
Mobiliser les alliances éducatives L’UNSA Éducation est convaincue que face à l’ampleur des défis éducatifs, personne ne détient seul la réponse et qu’il nous faut la construire à plusieurs, de manière concertée et coordonnée.
Tous les jours, à bas bruit, dans les lieux d’éducation, des regards positifs sur les enfants et les jeunes sont croisés, des partenariats s’enclenchent, des alliances éducatives se nouent. Faire alliance, c’est accepter de partager les responsabilités, chacun.e à sa place, dans ses missions. L’École est la première emprise du service public sur les territoires, elle focalise tous les regards mais n’oublions pas qu’un enfant grandit dans et hors de l’école. Les inégalités se creusent aussi dans les loisirs, les vacances et tous les temps éducatifs informels qui échappent à l’École. Le capital culturel est aussi un facteur décisif. L’UNSA Éducation agit en partenariat pour changer la donne. Les inégalités sociales sont accentuées dans les mondes éducatifs, malgré nous. Nous affirmons ensemble que tous les enfants et les
Table ronde sur chaine Youtube : https://www.youtube.com/ watch?v=oZ6Gjv8Srfk
jeunes doivent pouvoir être préparés à faire des choix personnels, professionnels et citoyens qui vont jalonner toute leur vie.
Extraits de parole donnée à nos partenaires Benjamin Vételé, adjoint élu à la ville de Blois, membre du Réseau Français des Villes Éducatrices : « Poser une question de fond dans un débat public très dépolitisé sur les questions d’éducation, c’est vital. L’égalité réelle, en est une. Les libéraux ont gagné la bataille des idées avec les dispositifs d’égalité des chances, comme à Sciences Po avec les quotas ZEP aux concours. » Carla Dugault, co-présidente de la FCPE, première fédération représentative des parents d’élèves : « Nous partageons le souci de déconstruire les stéréotypes et préjugés sur la question des enfants issus de milieux sociaux défavorisés. Tous les parents souhaitent la réussite de leurs enfants et pas seulement la réussite scolaire, mais dans leur développement personnel aussi. »
Mélanie Chambon, responsable Nouvelle Aquitaine de l’AFEV : « Les dispositifs d’état ne suffisent pas. Pour que chacun.e trouve sa place dans la société, l’Afev développe le mentorat pour accompagner un enfant deux heures par semaine, on l’outille pour trouver autour de lui les ressources qui vont l’aider à prendre confiance, s’ouvrir culturellement. » Etienne Butzbach, vice-président de La Ligue de l’Enseignement : « Nous reconnaissons l’éducabilité de toutes et tous, tout humain détient un potentiel bien plus important que celui qu’il arrivera à développer. L’égalité, c’est un principe fondateur qui doit animer tout éducateur, éducatrice. Cela contredit complètement l’idée de méritocratie. »
L’Observatoire des inégalités propose des expositions, concours et jeux de société, supports à expression sur toutes les inégalités : classes, genres, générations. www.inegalites.fr Le Cnam-CNESCO a publié deux rapports scientifiques et une série de contributions thématiques sur les inégalités scolaires d'origine territoriale en Île-de-France et dans la France entière (octobre 2018) : www.cnesco.fr/fr/inegalites-territoriales La Fondation de France est le premier réseau de philanthropie, elle soutient de nombreux projets pour lutter contre les inégalités. www.fondationdefrance.org/fr La FAGE se mobilise pour l’égalité dans les études supérieures : www.fage.org et la JPA (Jeunesse au Plein Air) est une confédération qui œuvre pour le départ en vacances collectives des enfants et des jeunes : jpa.asso.fr
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Conférences : Les captations vidéo des conférences de Joanie Cayouette-Remblière et Benjamin Moignard, ainsi que la table ronde « Alliances éducativesMouvement Ambition Éducation » sont sur la chaine YouTube UNSA Éducation www.youtube.com/c/UnsaEducationFR/videos
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