mensuel de l’Union des progressistes juifs de Belgique février 2011 • numéro 313
monde Hiver brûlant en Tunisie
Bureau de dépôt: 1060 Bruxelles 6 - mensuel (sauf juillet et août)
JEAN VOGEL
B
en Ali est tombé pour avoir méconnu la maxime de Napoléon « On peut tout faire avec des baïonnettes, excepté s’asseoir dessus. » À dire vrai, il devait l’ignorer, puisqu’en vingttrois ans de pouvoir il n’a pas cessé de s’asseoir sur son pays et son peuple de sorte qu’ils ne puissent ni bouger, ni parler, ni même à peine respirer. Bourguiba, autocrate charismatique, avait, comme tous ses semblables une fois la vieillesse venue, fait le vide autour de lui. Ben Ali, loyal exécuteur des opérations de haute et basse police, confronté aux effets d’une sénilité de plus en plus fantasque (« la vieillesse est un naufrage » lui rappela opportunément son collègue et ami Charles Pasqua), fit procéder aux constats médicaux adéquats et le dupa
une dernière fois. Désormais, Ben Ali allait se servir lui-même et le peuple tunisien se retrouva avec un Policier Suprême en guise de Leader. Ce régime policier dura près d’un quart de siècle avec l’immobilisme pour impératif suprême. Le monde changeait, l’économie se « développait », les touristes affluaient, les jeunes s’instruisaient, les inégalités sociales et régionales s’amplifiaient et seul restait immuable l’acharnement du pouvoir à faire de l’espace public un désert, à force de contrôles, de harcèlements, de persécutions, où le mesquin se conjuguait à l’odieux. Commentant début janvier le soulèvement populaire, Frédéric Mitterrand réitérait encore le mantra constant de toute la classe politique française, droite et gauche indistinctes : « Dire que la Tuni-
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BELGIQUE-BELGIE P.P. 1060 Bruxelles 6 1/1511
février 2011 * n°313 • page 1