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ANAHITA GHABAIAN ETEHADIEH

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VII THEA FILOPATRA

VII THEA FILOPATRA

space vital est le nom donné au livre consacré aux femmes photographes iraniennes qui vient de paraître aux éditions Textuel.

Un titre qui, vu la situation dans le pays, ne dit rien de précis mais suggère cet espace réduit au minimum pour pouvoir survivre.

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Cette métaphore résume, discrètement, l’invraisemblable situation dans laquelle un art photographique riche et engagé parvient à s’épanouir. Conçu et réalisé par Anahita Ghabaian Etehadieh, directrice de Silk Road Art Gallery, la seule consacrée exclusivement à la photographie, à Téhéran, Espace vital nous fait découvrir le travail de vingt-trois artistes qui, dans un contexte politique et économique en suspens, gardent une sidérante créativité et combativité. Comment un doctorat d’histoire et des études en informatique mènent au métier de galeriste à Téhéran ?

Au début des années 1990, une fois achevées mes études à Jussieu, je suis retournée chez moi, à Téhéran. Au lendemain de la longue guerre Iran-Irak qui fit beaucoup de morts, je trouve un paysage culturel désertique où, miraculeusement, il existe encore des galeries d’art tenues par des femmes, ce qui est toujours le cas aujourd’hui.

Voir “Sept Hivers à Téhéran”, un documentaire poignant, ode à la liberté Qu’est-ce qui, d’un coup, a motivé votre intérêt pour la photographie ?

J’étais novice.

Il n’y avait rien pour l’image, pas même de laboratoire professionnel, pourtant les photographes disaient déjà des choses intéressantes avec leur appareil.

Hengameh Golestan et Rana Javadi, par exemple, ont photographié la révolution de 1979. Shadi Ghadirian et Gohar Dashti ont créé des mises en scène pour évoquer la guerre Iran-Irak (19801988)…

La géopolitique, métier qui m’intéresse, n’étant pas, en Iran, une profession que je pouvais me permettre, c’est mon ami le réalisateur et photographe Abbas Kiarostami qui m’a encouragé et m’a amenée petit à petit vers le métier de galeriste.

La série « Nil, Nil » (2008) de Shadi Ghadirian offre un point de vue féminin sur un sujet le plus souvent (suit page 12)

(suit de la page 11) photographié par des hommes: la guerre.

Comment la photographie iranienne entre sur la scène internationale ?

Avec Kiarostami je trouve le nom de la galerie : Silk Road art Gallery (La Route de la soie).

Le logo montre un chemin qui zigzague symboliquement entre l’Orient et l’Occident. Puis, en 2001, je me lance. Je loue un local au sous-sol d’un immeuble pour exposer Abbas Kiarostami.

Le critique et commissaire Christian Caujolle nous rend visite en 2002, la galerie est présentée pour la première fois à Paris-Photo, en 2004.

Nous participons à Photoquai, au musée du Quai Branly, en 2009, où j’étais la directrice artistique.

La galerie est présente aussi pour la première fois à Paris-Photo en 2004, tout cela va donner une visibilité internationale à nos artistes.

Dans le contexte actuel, que se passe-t-il ?

Silk Road art Gallery vient de déménager en centre-ville dans un bel et vaste endroit, en rez-de-jardin, les fumeurs (et ils sont très nombreux chez nous) y seront à l’aise.

Mais va-t-on, dans les conditions actuelles, pouvoir l’inaugurer ?

Nous proposons pour l’instant des expositions virtuelles en ligne et continuons à travailler à la promotion de nos artistes à l’étranger.

En quoi la photographie iranienne est-elle singulière ?

La photographie permet sans un mot de révéler beaucoup de choses.

La singularité des sujets abordés, ici, par les Iraniennes est qu’ils le sont par nécessité et rarement neutres.

Tragiques, tristes, tournés vers le passé… ils s’imposent au photographe.

On y évoque la perte, la guerre, l’impossibilité de montrer certaines choses taboues, comme le corps nu.

Un photographe français, par exemple, n’a pas ces contraintes.

Et j’ajouterai comme traits communs aux vingt-trois artistes réunies dans le livre, en plus de l’engagement, la poésie.

Elle est partie intégrante de notre culture.

Il n’est pas rare, pour n’importe quelle occasion, d’ouvrir un livre de poèmes de Hafez, de Molana (Rûmî) ou de Ferdowsi.

Comment retrouve-t-on cette poésie à l’image ?

Elle est partout.

Prenez les natures mortes de la série Nil, Nil (2008), qui est un point de vue féminin sur la guerre, par Shadi Ghadirian.

Les compositions de Quand tu étais mourant, de Rana Javadi, réalisées avec des archives, des fleurs séchées et des tissus anciens.

Ou les mises en scène de la série Lire pour les rues de Téhéran (2014-2016) par Maryam Firuzi. Indifférente aux passants, la photographe, un livre à la main, est assise sur un tissu rouge dans une rue en escalier. Je vous assure qu’il n’y a rien de plus difficile pour une femme que d’être assise dans la rue, au Moyen-Orient, où ce sont les hommes qui occupent l’espace. La scène évoque aussi la relation intime des Iraniennes à la lecture et à l’éducation ; beaucoup font de brillantes études supérieures. Les hommes sont là, mais sans visage ?

Dans un pays en crise constante depuis des décennies et où des fresques de soldats recouvrent les murs des villes, certaines comme Ghazaleh Rezaei avec Les Martyrs, ou Maryam Takhtkeshian avec Aucun soldat n’est revenu de guerre, témoignent toutes deux de la vulnérabilité de tous ces hommes à la destinée tragique. La première, en escamotant par exemple d’un coup de flash la figure d’un soldat mort à la guerre, et la seconde en utilisant une pellicule périmée qui floute les visages.

Être photographe en Iran n’est donc pas impossible ?

On peut faire des photos à partir du moment où l’on demande une autorisation. Ensuite il faut résoudre des problèmes financiers, techniques, et négocier pour réussir à faire ce que l’on a à faire. On retrouve dans cet ensemble beaucoup d’images mises en scène et d’assemblages de photos de famille.

Mais je suis bluffée par l’audace de la jeune génération. Comme Morteza Niknahad, qui vit dans une petite ville dans le sud du pays et a réalisé un magnifique sujet sur la dépression de sa mère.

Frédérique Chapuis

Espace Vital : Femmes photographes iraniennes, de Anahita Ghabaian Etehadieh, éditions Textuel (160 p., 45 €).

Une image de la série « Lire pour les rues de Téhéran », de Maryam Firuzi (2014-2016).

Humans Beings

rompre ce cursus.

En 1974, il part pour l’Europe. Son parcours le mène à Prague, Berlin Est puis Berlin Ouest.

En 1976, il s’établit à Münster, en Allemagne de l’Ouest, où il étudie l’archéologie, avant d’être admis à l’Académie des Beaux-arts de Düsseldorf.

La scène artistique allemande est alors en plein renouveau. Si elle est dominée par Josef Beuys, on assiste à la percée du néo-expressionisme et au retour à la peinture, avec notamment Georg Baselitz, Anselm Kieffer, Jörg Immendorff, Markus Lüpertz ou Norbert Tadeusz, dont Bahram Hajou suivra l’enseignement. Influencé par ce courant, il expose pour la première fois en solo en 1983, au Musée de Bochum.

Dès le début des années 1990 son travail est exposé dans de nombreux autres pays européens (Belgique, Hollande, Royaume-Uni, Autriche, Hongrie) puis en 1995 à New York (Galerie Artopia).

Au même moment le musée Guggenheim présente la première grande rétrospective américaine de Baselitz.

La presse fait le rapprochement entre ces deux artistes néo-expressionnistes, ce qui assoit la notoriété de Bahram Hajou aux Etats-Unis.

Sans titre (2021), 140x120 cm. a galerie GNG a le privilège de représenter en France

Bahram Hajou, artiste allemand d’origine kurde syrienne, dont l’œuvre suscite un vif intérêt chez les collectionneurs internationaux.

Reconnu comme l’un des plus éminents peintres néo-expressionnistes de sa génération, sa cote sur le marché de l’art s’est envolée depuis la fin des années 2010.

D’origine kurde syrienne, Bahram Hajou est arrivé en1976 en Allemagne de l’Ouest, à l’âge de 24 ans, aprèsun périple qui l’a mené à Bagdad, Prague et Berlin Est.

Il s’est imposé sur la scène artistique de son pays d’adoption dès les années 1980 avant d’acquérir une envergure internationale et partage désormais sa vie entre Münster et New York.

La galerie GNG présente du 11 mai au 17 juin 2023 une sélection de toiles de ce grand artiste néo-expressionniste, rarement exposé en France.

Une œuvre en clair-obscur

Ce qui frappe en premier lieu, dans les tableaux de Bahram Hajou, c’est le contraste entre la douceur caressante de ses larges aplats de couleur et l’inquiétude qui habite l’humanité qu’il met à nu, au sens propre comme au sens figuré.

Le clair-obscur produit par la délicatesse de ses tons qui vient en contrepoint des sentiments de solitude, d’insécurité, de désarroi, qui émanent de ses personnages. Leurs regards nous fixent avec insistance et nous interrogent sur les paradoxes de notre condition, comme l’artiste, lors de son processus de création, interroge la peinture pour les faire surgir.

Au commencement : la couleur

Toile posée sur le sol, Bahram Hajou commence par réaliser une composition abstraite en étalant des couleurs au couteau, au pinceau ou avec des chiffons, sans pour autant recouvrir toute la surface de la toile. Puis il répand du sable et des pigments qu’il mélange à la peinture encore humide sèche, «je tourne la toile dans tous les sens pour établir un dialogue avec elle, un peu comme lorsqu’on cherche des formes en regardant les nuages. J’imagine alors des sujets en accord avec les couleurs que j’ai travaillé », explique-t-il.

Ce qui nous fait semblables

C’est au fusain qu’il donne ensuite vie à ses personnages, le plus souvent représentés dénudés et, lorsqu’il s’agit d’hommes, sans cheveux, à l’image de leur créateur. L’artiste interroge la toile comme un miroir de l’âme et se représente sans décors, sans fioritures, dans son humanité la plus simple, la plus poignante, pour mieux toucher du doigt ce qui nous fait semblables.

Qu’il explore les territoires universels de la solitude, de la finitude, de la violence, de la sexualité, des rapports de couple, sa peinture introspective nous interpelle au plus profond de notre être dans un jaillissement de couleurs subtiles, sans jamais chercher à nous provoquer, mais avec tact, force, pudeur, beauté, maîtrise… Et, pour tout dire, avec une exceptionnelle et admirable élégance.

Né en 1952 en Syrie, dans l’actuel région Kurde du Rojava, Bahram Hajou part à 20 ans à Souleimaniye, au Kurdistan irakien, pour suivre des études de dessinateur en génie civil.

L’année suivante il commence à étudier à l’Académie des Beaux-arts de Bagdad, mais le contexte de guerre au Kurdistan irakien l’amène à inter-

En 1999, il est pour la première fois exposé en France où il reçoit en 2014 le Prix Henri Matisse, décerné lors de la Biennale organisée au Château Musée Grimaldi (suit page 14) (suit de la page 13) (Cagnes-sur-Mer) par L’UMAM (L’Union Méditerranéenne pour l’Art Moderne), association fondée en 1946 par Henri Matisse et Pierre Bonnard.

Installé à Münster, en Allemagne, depuis les années 1970, Bahram Hajou partage depuis 2016 sa vie entre cette ville et New York, où il dispose d’un atelier. Son œuvre est internationalement reconnue : en Europe, en Amérique du Nord et du Sud et, plus récemment, au Moyen-Orient, avec des expositions à Doha, Riyad, Le Caire, Istanbul… Ses œuvres, dont la cote s’est envolée depuis la fin des années 2010, suscitent un vif intérêt des collectionneurs et des institutions.

Il est aujourd’hui reconnu comme l’un des plus éminents peintres néo-expressionnistes de sa génération

’est un petit bout de Grèce qui va s’inviter, à partir de ce vendredi 17 février 2023, à Trouville-sur-Mer (Calvados).

Une trentaine d’œuvres du peintre et sculpteur crétois Yannis Markantonakis sont exposées, depuis ce jour, à la boutique

De temps à autre, dans la rue des Bains. Patrick David, le directeur des lieux, nous présente l’artiste, fortement influencé par le monde maritime, où les navires sont souvent les seuls indices qui distinguent le ciel de la surface de l’eau : « Son père était armateur et ce qui l’intéresse dans les bateaux, c’est d’aller vers l’inconnu, l’invisible, l’au-delà », explique-t-il.

« Comme tout Grec, il est influencé par l’Iliade, l’Odyssée, il baigne complètement là-dedans, poursuit Patrick David, beaucoup de gens y voient l’influence de Nicolas de Staël (1914-1955) à cause de ses carrés de couleur blanche et rouge.

Lui se revendique plutôt de Joaquín Torres García (18741949) ».

Mais Yannis Markantonakis, ce ne sont pas que des tableaux, comme le souligne Patrick David : « Il s’est pris de passion pour une artiste américaine assez peu connue, Louise Nevelson (1899-1988), dont il s’est beaucoup inspiré pour faire des maquettes». Sur plusieurs étagères reposent ainsi d’étranges assemblages de morceaux de bois qui prennent la forme, là encore, de bateaux.

L’homme pousse le sens du bricolage au point de concevoir lui-même les cadres de ses tableaux à partir de matériaux récupérés : « C’est l’art du recyclage avant l’heure ! », s’émerveille le galeriste.

Qui annonce déjà la suite des réjouissances : « On va refaire des expositions à Pâques et en fin d’année, on espère présenter des nouveaux tableaux à chaque fois ! ».

Du 17 février au 5 mars, du 21 avril au 7 mai, du 13 juillet au 24 août 2023, à la galerie De temps à autre, 93 rue des Bains

Trouville-sur-Mer Calvados

Ouvert tous les jours de 11 h à 18 h, sauf le mercredi, de 14 h à 20 h.

Plus d’informations au 06 88 39 46 88 ou 06 15 09 58 90. à retrouver chez GNG rue Visconti 75006 Paris

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