Futurs Grenoblois 2018 (n°2)

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L’ÉQUIPE

A l’heure où j’écris ces lignes, le Futur Grenoblois 2018 est bouclé, et prêt à être imprimé et distribué. Le FG, avant d’être un magazine sur l’entreprenariat et l’Innovation, c’est avant tout une aventure. Une aventure au cours de laquelle j’ai pu travailler avec une équipe de personnes motivées, impliquées et dynamiques. Nous avons pu tisser des liens d’amitié, en plus d’acquérir une dimension véritablement professionnelle, que je n’oublierai pas à titre personnel. Ainsi, j’espère que vous prendrez autant de plaisir à lire ce magazine comme j’ai pu en avoir à travailler et à le construire avec chacun d’entre eux. Au nom de toute l’équipe, je vous souhaite une excellente lecture ! Pierre-Antoine Callens Pierre-Antoine Callens Quentin Banas Emmanuelle Louis-Nicolas Roussel Dubois Berger

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Guillaume Ouallet


Sommaire

1. Dossier : Entreprenariat et innovation On a résolu le mystère incubagem Les incubés 2017-2018 de nouveaux horizons pour un nouveau projet L’expérience d’entrepreneur d’un ancien de GEM Le rôle des entreprises à Grenoble Quelle politique d’innovation pour la France de demain L’association d’entreprenariat de GEM

2. Géopolitique L’association de géopolitique de GEM Ce que l’on sait (ou que l’on peut spéculer) du Bitcoin Le retour de la Russie : une nouvelle place dans les relations internationales Pour une géopolitique verte

3. Environnement et technologie Impact, créateur de solution durable The Edge, le projet le plus vert et intelligent au monde La Grande Barrière de Corail, un trésor à protéger Grenoble, quelle politique écologique

4. Culture et tourisme Histoire de l’innovation et des Techniques en France (jusqu’au XIXème siècle) A la rencontre d’une peintre grenobloise L’art qui intrigue Pour un café de la poésie

5. sport Altigliss : L’association qui se cache derrière l’événement Les innovations technologiques les plus cool utilisées pendant les Jeux Olympiques d’hiver de 2018

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Entreprenariat et Innovation

On a résolu le mystère Incubagem Roussel Louis Nicolas

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toi lecteur, qui est peut-être intéressé par cette mystérieuse boîte à outils qu’est l’incubateur de GEM : sais-tu comment il fonctionne ? A qui il est destiné ? Alors ne perds pas le fil de ta lecture !

Pouvez-vous présenter Incubagem ainsi que vous-même en quelques mots ? Bonjour, je suis Martine Jimenez, coordinatrice de projets à l’institut de l’entreprenariat. Nous promouvons l’entrepreneuriat sous différentes formes : via le Master Spécialisé Entrepreneuriat (MSE), Incubagem, la recherche entrepreneuriale avec les professeurs de GEM… Je travaille personnellement surtout sur l’incubateur. Mon travail consiste à réellement à faire vivre l’incubateur, je m’occupe notamment de la communication des événements que nous organisons tout au long de l’année et du recrutement des startup pour Incubagem, mission dans laquelle je suis assistée par les étudiants du MSE.

Incubagem, c’est pour qui ? Incubagem est un incubateur destiné aux Gémiens, étudiants et diplômés. Toutefois, si la startup est portée par plusieurs associés, il suffit que l’un d’eux soit issu de GEM. Nous ne cherchons pas à faire concurrence aux autres incubateurs de Grenoble. L’incubateur a été créé quand nous nous sommes rendu compte qu’à GEM, nous savions plutôt bien former les étudiants, mais qu’ils manquaient d’accompagnement lorsqu’ils souhaitaient monter leur entreprise. Incubagem a donc été pensé pour se mettre au service des étudiants, pour être une boite à outils pour les startup gémiennes.

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Comment se déroule le processus de recrutement des startup ? Sur quels critères vous basez-vous pour les sélectionner ? Il y a deux sessions de recrutement par an, une en avril/mai et une en octobre, tous les 6 mois donc. La première étape du processus consiste pour les startup à déposer un dossier de candidature sur le site d’Incubagem, le dossier pouvant être en français ou en anglais puisque notre équipe parle anglais et nous cherchons à nous orienter internationalement et vers les étudiants GGSB afin d’enrichir le panel de nos activités. De plus, les experts de l’incubateur parlent tous anglais couramment. Si cette première étape est passée avec succès, l’aspirant startupeur doit passer un entretien devant un jury. Pour convaincre ce dernier, il n’est pas nécessaire d’avoir déjà officiellement créé sa startup (la plupart des porteurs de projets qui intègrent l’incubateur n’ont pas déposé les statuts de leur entreprise) ou d’avoir un business plan très précis, mais le projet doit déjà être bien structuré, le porteur de projet doit pouvoir présenter une vision claire du projet, une étude de marché doit déjà avoir été réalisée, l’équipe doit déjà être formée et structurée, et une certaine planification des besoins financiers peut être exigée.

Quelles sont les modalités de ré incubation ? Quel est alors le processus de sélection en jeu ? Une fois admis dans l’incubateur, l’incubé y est pour 6 mois et peut demander une prolongation jusqu’à 18 mois maximum. Tous les 6 mois, nous faisons un point avec l’incubé pour évaluer l’avancement de la startup, les besoins de celle-ci et voir si poursuivre l’incu-

bation est pertinent ou non. Il nous est déjà arrivé d’interrompre une incubation en voyant que celle-ci n’était plus pertinente pour une startup, qu’elle ne répondait plus à ses besoins. A chaque session de 6 mois, l’incubé reçoit un chèque de 18h pour se faire conseiller auprès de nos experts partenaires, c’est-à-dire des professeurs de GEM ou bien des professionnels extérieurs confirmés dans leur spécialité qui souhaitent aider les jeunes entrepreneurs.

Concrètement, qu’est-ce qu’on fait à Incubagem une fois incubé ? On fait vivre l’incubateur. Nous, l’équipe d’Incubagem, attendons des incubés qu’ils soient actifs, qu’ils répondent à nos sollicitations, participent aux ateliers, rencontres et discussions que nous organisons, qu’ils nous sollicitent s’ils en ont besoin … C’est du donnant-donnant. Les services que nous proposons aux startup sont les experts et le mentoring, les partenariats avec co-work Grenoble, en ville, au Totem (à Chavant), avec le village by Crédit Agricole, avec la French Tech in the Alps (activités numériques) … Nous leur faisons bénéficier d’un écosystème de co-working varié pour qu’ils rencontrent des gens et mélangent les compétences.

Y a-t-il un domaine/secteur privilégié à Incubagem ? Une tendance de startup particulière se dessine-t-elle parmi les incubés ? Avec une existence de 7 ans aujourd’hui, nous avons assez de recul pour


avoir une vision d’ensemble de nos startup : 56 sur 61 sont dans le digital, 26 dans les services. Qu’il n’y ait pas que du digital nous convient bien en fait, c’est une bonne chose d’observer une certaine diversité avec de l’industrie et des services. Nous restons très ouverts, nous ne jugeons pas un projet, nous acceptons tout type d’activité : les startup c’est pas que des applis et des sites internet.

Avez-vous un exemple de réussite de startup incubée en tête ? Je pense tout d’abord à Wizbii, un réseau social professionnel qui a été notre première startup incubée ici. Ils sont aujourd’hui 38 collaborateurs basés à Grenoble et l’entreprise se développe à l’international. Il y a aussi iskn qui produit et commercialise une tablette graphique, pépite d’industrie soutenue par le CEA, Origin qui commercialise des boissons à base de plantes bio (créée il y a 4-5 ans, 500 000 euros de chiffre d’affaire aujourd’hui), puis Homehunity qui est une plateforme de crowdfunding dans l’immobilier et tant d’autres

Quel est le plus d’Incubagem par rapport à un autre incubateur ? Comment se différencie-t-il ? Tout d’abord, Incubagem est un incubateur dédié aux Gémiens. Ensuite, nous ne prenons pas de participation dans les startup, nous n’y avons pas d’intérêt financier, nous sommes là uniquement pour leur rendre service (gratuitement). Nous nous engageons pour le service aux porteurs de projets dans la durée, nous cherchons toujours à aller le plus loin possible avec eux. Il arrive que l’on prolonge exceptionnellement une incubation jusqu’à deux ans lorsque nous voyons que cela peut être utile aux incubés, il est même possible pour un diplômé de GEM d’intégrer l’incubateur dix ans après avoir quitté l’école et de recevoir le même type de service que les étudiants encore à l’école.

Quels liens l’incubateur entretient-il avec les entreprises, les investisseurs extérieurs ? Le réseau de GEM nous permet d’aider les porteurs de projet via des mises

en relation avec des structures d’accompagnement et de subventions, de financement tel que le réseau entreprendre, Inovizi, le Crédit Agricole ou encore la French Tech in the Alps. La visibilité et le poids de GEM dans l’écosystème régional sont une véritable force pour l’incubateur et les porteurs de projets. GEM et son réseau font toute la différence grâce aux partenariats de l’école avec des banques, aux informations relayées par l’incubateur au sujet de concours de startup (pitch, business plan…) dont les incubés sont très friands.

Quel rôle les étudiants du MSE jouent-ils au sein de l’incubateur ? Chaque année, une équipe de quatre étudiants du MSE, qui ont choisi de travailler au sein de l’incubateur, nous accompagne de septembre à avril, l’équipe Incubagem et moi-même, dans le cadre de leur mission fil rouge. Ils font vivre l’incubateur, s’occupent de la communication, créent du contenu com’, animent des ateliers et suivent des incubés. Leur mission se termine en fin d’année avec la soutenance de la mission fil rouge. On constate qu’il n’y pas un grand nombre d’étudiants du MSE incubés, c’est très bien comme ça car cela montre que pour être incubé on a pas besoin d’être étudiant du MSE. De plus quand ils ont dans le MSE, les étudiants ont déjà tous les conseils dont ils ont besoin, donc l’incubateur n’est pas forcément un avantage pour eux.

« Il est même possible pour un diplômé de GEM d’intégrer l’incubateur dix ans après avoir quitté l’école et de recevoir le même type de service que les étudiants encore à l’école. » L’incubateur est-il en évolution ? Quid du festival de l’entrepreneuriat ? Avez-vous des projets particuliers à venir ? Nous avons déjà réalisé 5 ou 6 éditions du festival. GEM Entreprendre et Incubagem sont bien évidemment très impliqués dans cet événement car un concours de business plans a lieu, pour lequel étudiants et incubés montrent beaucoup d’intérêt. Cette année, c’est

l’accumulation de nombreux autres événements qui a rendu le festival impossible à réaliser. Toutefois, nous avons fait plein d’autres choses, comme participer au CES de Las Vegas qui a permis à des étudiants de MSE d’accompagner des startup de Minalogic, l’organisation de l’événement Altistart-up à Altigliss… Difficile de réaliser tout cela avec le calendrier, mais rien n’est figé et nous restons ouverts pour refaire un festival l’année prochaine ou dans les années à venir, nous nous adapterons à l’agenda de l’école. Il y a par ailleurs une passation de pouvoir qui a lieu cette année au sein de GEM Entreprendre : autrefois entièrement gérée par les étudiants du MSE, l’association s’ouvre à tous les Gémiens à la suite d’une demande des étudiants, pour devenir beaucoup plus transverse. Le festival va s’inscrire dans cette dynamique-là. Pour l’avenir d’Incubagem, nous ne souhaitons qu’une chose : continuer à le faire connaître et grandir. Nous sommes très ouverts aux suggestions que peuvent nous faire les incubés, car ce sont eux qui peuvent nous dire ce dont ils sont besoin, et aux étudiants du MSE qui peuvent être force de proposition. Nous aimerions nous diriger vers un accélérateur de startup, et ça demande de mettre des choses en place, d’avoir un suivi plus proche et plus personnalisé. Les choses s’améliorent globalement, des gens viennent nous visiter pour demander des conseils toute l’année et pas seulement au moment des sessions de recrutement, le bouche à oreille commence à fonctionner pour faire grandir l’incubateur. Interview de Martine Jimenez réalisée le 26 mars 2018

Incubagem en quelques chiffres 125 startup incubées depuis sa création en 2011 61 startup actuellement incubées Un taux de création effective de 40%

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Entreprenariat et Innovation

Les Incubés 2017-2018 : De nouveaux horizons pour un nouveau projet Callens Pierre-Antoine

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ombreux sont les projets à passer au crible devant un jury à l’Incubagem, et ceux jugés pertinents et viables sont ensuite validés et aidés par l’incubateur qui fournit alors tous les moyens afin de mener à bien la création du projet. C’est le cas de Vincent et d’Hubert, fraîchement arrivés à GEM durant cette année 2018. Leur projet Ficha a su séduire par sa dimension responsable de l’Environnement, ainsi que du caractère novateur qu’apporte leur solution.

Ficha c’est quoi ? C’est une solution de collecte des déchets pour les étudiants. Le principe est simple : 4 boxes qui permettent de séparer directement le métal, le plastique, le verre et le carton. C’est du tri a la source, dans les résidences étudiantes ,l’étudiant les descend à son local à poubelle, où il peut s’identifier à l’aide d’une carte à un conteneur connecté, où il verse ses déchets, et en échange bénéficie de points lui permettant d’avoir accès à des réductions chez des partenaires locaux, tels que boulangeries, épiceries, marché locaux…

D’où vous est venue l’idée ? J’ai rencontré Hubert dans notre groupe de travail en début d’année, et je lui ai parlé d’un projet d’affiches recyclées, généralement issues de cinéma, de publicitaires… Le principe était de récupérer ces affiches, de les valoriser pour ensuite les proposer à la vente. Du coup, dans ce contexte de valorisation du déchet, on a commencé à penser à la problématique suivante : Comment pouvait-on valoriser et collecter un maximum de déchets ? Après un sondage auprès des étudiants, on s’est rendu compte d’un manque d’équipement et de place pour trier leur déchet, et qui malgré cela

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démontraient un véritable intérêt pour le tri des déchets. Cela constituait donc une cible intéressante et oubliée des municipalités, vers laquelle nous avons souhaité nous tourner.

Aviez-vous l’intention d’entreprendre à GEM avant votre arrivée ? Oui, clairement. Et au plus vite ! Nous sommes allés à GEM justement pour cette notion d’entreprenariat. De plus, l’incubateur de GEM, ainsi que le réseau, représentaient une excellente porte d’entrée pour notre volonté d’entreprendre. Notre fibre pour le développement durable a également été l’une des raisons et des motivations.

Comment s’est déroulée la phase avec l’Incubagem ? On a monté un business model d’une trentaine de pages, et suite à la sélection de notre projet par l’incubateur, nous avons été convoqués à un entretien. 15 minutes de pitch et 10mn de questions, tel était le processus, et ainsi le temps dont nous disposions pour convaincre.

Cela nous a procuré crédibilité, l’aide dont nous avions besoin ainsi que la motivation qui n’a cessé de croitre depuis. L’incubateur est un formidable accélérateur, et s’avère crucial dans l’accompagnement d’un projet. Une phase également assez stressante, puisque de cela va découler toute la suite, donc beaucoup d’inquiétude, de préparation mais qui finalement se sont vues atténuer à mesure que notre projet se construisait, et également quand il a été validé.

Quelle suite après avoir été incubés ? Nous avons participé à plusieurs concours qui avaient essentiellement pour vocation de présenter et faire connaître le projet : Finale de la social Cup à Lyon, le Gem Startup Contest, Coup 2 Boost… Tous ces évènements présentaient en perspectives un nombre incommensurable d’opportunités. On a également recruté un troisième associé, Louis, et plus récemment un ingénieur qui va concevoir les conteneurs. L’équipe s’agrandit et nous participons au prochain Coup 2 Boost, qui se tiendra sur Paris.


Comment avez-vous abordé ces concours ? On est restés nous-même : on a misé sur l’humour, la sincérité et la communication, que l’on a souhaitée jeune et dynamique. Beaucoup de stress également, car on s’est rendus compte de la difficulté de parler devant un public large, et que ce n’était pas facile de prendre ainsi les devants. Les enjeux de la participation dans ces concours, c’est de se faire connaître, de gagner des ambassadeurs, mais aussi une importance financière: à la Social Cup, on a gagné 1000 euros, durant le Gem startup Contest 500 euros… Ce qui compte beaucoup aussi, c’est qu’on a les feedbacks des gens qui nous ont découvert et qui ont participé, ce qui nous a permis d’en apprendre plus sur leurs préoccupations, sur les concurrents qui sont déjà présents. Des idées nous sont également venues en cours de route, et des retours concrets de notre cible. De façon globale, ca nous a permis de valider l’idée aussi, car on a été retenus à 80% des concours, ce qui nous a apporté également beaucoup de motivation. Cela nous a également permis de créer des réseaux : IBM nous a contacté pour voir comment on pourrait collaborer.

Quelles difficultés avez-vous rencontré ? Trouver les compétences qui nous manquaient, notamment trouver et recruter un ingénieur : GEM étant spécialisée dans le management et le commerce de façon générale, ça a vraiment été compliqué d’identifier le profil technique dont nous avions besoin . Des baisses de motivation aussi : Une remise en cause permanente qu’il a fallu gérer et prendre ne compte (est ce qu’on ne perd pas notre temps ? Comment peut-on vraiment avancer ? Est-ce que tout cela va porter ses fruits ? …) Trouver des contacts de façon générale a également été compliqué dans la mesure où l’approche est ardue et les rendez-vous compliqués à décrocher. Après, tout s’enchaîne relativement bien pour le moment, même si nous ne

sommes qu‘au tout début de notre aventure. Finalement, le fait de se confronter à la réalité a aussi été une étape à franchir, par peur d’incertitude. Au final, elle est toujours permanente mais ça ne nous a pas empêché d’avancer.

Quels horizons pour Ficha l’année prochaine ? Les objectifs principaux de l’année vont être de lancer Ficha physiquement dans une première résidence étudiante, mais également de réaliser une première levée de fond. Cela va être la phase la plus dure, donc beaucoup d’excitation mais de la peur aussi. On va également trouver une structure incubatrice qui pourrait nous accompagner, et développer de façon optimale le réseau. Sur le plan organisationnel, la césure va se dérouler dans la start-up : Continuer à rencontrer des parties prenantes (mairie, organismes…), trouver des partenariats solides et fédérer l’engouement des gens. Lancer le concept est vraiment l’enjeu principal de cette année. Enfin, nous recherchons de nou-

veaux profils pour intégrer l’équipe : actuellement, nous sommes à la recherche d’un programmeur et d’un expert en IA dans le but de créer d’une part, l’application qui permettra à l’utilisateur de suivre sa collecte des déchets, ainsi que développer d’un logiciel permettant d’identifier les différents déchets collectés.

Un conseil pour les futurs étudiants qui souhaitent entreprendre à GEM ? « Allez-y », C’est maintenant qu’on peut faire les choses et c’est pas parce que l’on a pas la connaissance infuse d’un secteur qu’on peut pas développer une idée dans ce domaine. Même si ça peut faire peur de se lancer, il faut prendre les devants et foncer ! Une telle expérience, ça créée beaucoup d’opportunité, on a énormément appris et on est confrontés à la réalité des choses, ce qui nous donne une vision terrain et la pratique directe. En résumé, une expérience qui quoiqu’il arrive est super valorisante sur un CV. Interview de Vincent Hipault et Hubert Ménard réalisée le 5 avril 2018


Entreprenariat et Innovation

L’expérience d’entrepreneur d’un ancien élève de GEM Quentin Banas

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ntoine Carpe est un ancien élève de GEM, mais aussi le fondateur de SkiTruk

Qu’est-ce que SkiTruck ?

C’est l’idée innovante qu’est la livraison de matériel de ski en station pour être moins cher que les loueurs basés en stations ; plus précisément c’est louer à des groupes importants avec un camion aménagé en s’épargnant les frais d’un local aux pieds des pistes. SkiTruck s’adresse de base aux groupes de plus de 50 personnes pour diluer le prix d’une livraison parce qu’il y a quand même des frais de transport dans la quantité de skis loués. Mes premiers clients ont été beaucoup d’associations étudiantes puis des groupes scolaires et des colonies de vacances, je travaille aussi en partenariat avec des gites et en tant que sous-traitant pour des tours opérateurs. Depuis l’an dernier, SkiTruck c’est aussi un magasin qui est au centre-ville de Grenoble et qui, là, ne s’adresse pas aux groupes et propose de la location, de la vente, de l’entretien et des réparations.

Dans quelles stations peut-on être livrés ? Je livre dans toutes les Alpes Françaises en essayant de livrer prioritairement les stations à proximité mais ça m’arrive de livrer plus loin, l’an dernier je suis allé jusqu’en Suisse et cette année j’ai répondu à un appel d’offre pour une livraison en Andorre. Je peux donc faire de la route quand ça vaut le coup !

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Comment se divise le travail durant l’année ? Il y a plusieurs dates clés ; durant octobre-novembre, c’est-à-dire avant l’ouverture des stations on va privilégier la vente en faisant par exemple des bourses aux skis ou d’autres évènements de vente, parce que les gens préparent leur saison. C’est aussi le moment de peaufiner ses derniers achats avec les fournisseurs pour anticiper la saison et où en général on commence à avoir une vraie visibilité de comment va être la saison, en termes de réservation, en termes de ce que l’on va faire comme chiffre et du coup s’assurer que logistiquement on va pouvoir suivre et réserver les camions pour les grosses livraisons. De décembre à fin mars, c’est la période opérationnelle, avec bien sûr un gros pic pendant les vacances de Noël et les vacances d’hiver. Avril c’est la fin de saison, c’est un peu de vente aussi. Mai, juin, juillet, on pourrait penser que c’est la période de vacances mais c’est faux, c’est la période de prospection et pendant laquelle on va chercher à répondre aux appels d’offres comme ceux des groupes scolaires pour les prochaines classes de neige ou avec les associations étudiantes qui veulent organiser leurs prochaines sorties skis. Ce sont des groupes qu’il faut démarcher assez tôt. Et le mois de septembre c’est là où je prépare la saison et où je conclus les contrats.

j’en ai bien profité. L’idée de SkiTruck en général est née d’un constat, étant originaire de région parisienne, je ne connaissais que les locations en station et en arrivant à Grenoble, je me suis rendu compte que les locations en vallée étaient près de deux fois moins chères et rien à part l’emplacement ne justifiait une telle différence. Il suffirait que les gens fassent un détour d’une demi-heure pour que ça leur revienne deux fois moins cher, sauf qu’ils ne savent pas forcément que ça existe, ce n’est en plus pas pratique du tout et si le matériel ne convient pas, si les chaussures font mal, il faut redescendre tous les lacets pour repasser chez le loueur en vallée. C’est pourquoi j’ai eu l’idée de livrer directement en station avec un camion aménagé pour faire les réglages.

Vous avez ensuite été incubé par IncubaGem, comment ça se passe ? IncubaGem, c’est très simple, il y a un dossier à faire et à bien rédiger. Ce n’est pas forcément très formel, ils ne demandent pas un business plan sur 4 ans par exemple. Il faut avoir une idée, savoir l’expliquer et être assez solide sur la partie étude de marché, montrer en quoi son idée peut s’intégrer au marché. C’est un dossier qui fait une 15aine de pages mais ça vaut le coup de bien le rédiger car ça aide ensuite beaucoup lorsque l’on lance son activité.

Quand vous est venue l’idée de SkiTruck ? Je pense que l’entreprenariat m’a toujours un peu collé au corps ; mes deux parents étant déjà des entrepreneurs. Ensuite je suis fan de ski depuis petit, lorsque j’étais étudiant à Grenoble,

Ensuite il y a un premier entretien qui se déroule avec des étudiants du MS entreprendre de l’asso GEM Entreprendre


-prendre qui va être un peu une étape de pré-sélection où on va tester les points un peu hésitants du dossier et sonder la personnalité de l’entrepreneur pour voir ses motivations en tant que porteur de projet. Et s’il est concluant, il y a un deuxième entretien avec des responsables d’IncubaGem qui va donner son feu vert final en creusant un peu plus le projet. Une fois qu’on est à l’incubateur, l’aide est protéiforme et assez minime si on ne va pas la chercher soi-même. Le premier intérêt de l’incubateur c’est son réseau d’experts, on a un chéquier avec des heures d’experts à solliciter. Des heures avec un expert-comptable, un expert du marketing digital, on peut aussi aller voir un chargé de relation presse, ce sont soit des professeurs de GEM avec une certaine expertise, soit des professionnels. Sur les premières étapes de son projet, c’est super intéressant d’avoir l’œil de quelqu’un qui a de l’expérience. Quand j’ai fait mon site web, je suis allé voir un expert du référencement qui m’a donné des conseils pour le faire monter tout de suite dans les premiers résultats de Google sans que je n’aie rien à débourser, ce qui est un vrai confort, sachant qu’une agence de référencement m’aurait facturé la même prestation quelques milliers d’euros. Lorsqu’il s’est agi d’ouvrir le magasin, pour savoir s’il fallait conserver le nom de SkiTruck ou se différencier du nom du service de livraison en station, je suis allé voir Laurent Mandica qui est professeur (associé au département Marketing) à GEM et qui m’a aidé à trouver SkiTruck Le Shop qui permet de distinguer le magasin de l’activité de livraison tout en essayant de capitaliser une image de marque commune ; son appui m’a évité de rester dans une phase d’incertitude et m’a permis de trancher assez facilement.

Est-ce que vous avez rencontré certaines difficultés lors de la création de SkiTruck ? Il y en a eu beaucoup ! Le premier, ça a été le financement, heureusement j’ai réussi à bien prospecter, l’idée a vite séduit et j’ai eu pas mal de réservations

dès la première année ; j’ai obtenu un financement bancaire. Pour moi c’est allé très, très vite et c’était tout de suite une logistique lourde avec l’achat du matériel de ski, du camion et de l’entrepôt. Ensuite ça a surtout été des petits problèmes liés au transport et à l’entretien du matériel. »

Quels conseils donneriez-vous à un étudiant qui souhaite entreprendre ? Au-delà des conseils habituels mais qui restent vrais, du type ‘croire en ses rêves’ ou ‘ne pas lâcher son idée’, je conseillerais de beaucoup se challenger en s’imaginant la pire des situations et en se demandant comment je rebondis si ça ne se passe pas comme prévu, quel est mon plan B si c’est un échec cuisant. Et c’est seulement lorsque l’on a un vrai plan B et que l’on se dit que dans le pire des cas c’est pas si dramatique et que l’on a accepté ce pire des cas que l’on peut se lancer. Il faut être vraiment libre de pousser ses idées à fond, de tenter des choses, savoir ce qu’il se passe si ça ne marche pas et l’avoir accepté. C’est comme en négociation, une bonne négociation on peut la mener que si on est certain qu’on peut se dire que si la négociation échoue alors j’ai un plan B et ça me convient. Entreprendre c’est pareil, si j’échoue qu’estce que je fais ? c’est lorsque l’on a la réponse à cette question et qu’elle nous convient qu’on peut se lancer.

« Il y a beaucoup de ressources à GEM qui sont mises à disposition sans être dans l’incubateur » Quels projets pour le futur ? La vraie marche à franchir pour SkiTruck, c’est de s’adresser aux particuliers. Je ne pourrai jamais être rentable en livrant pour une famille de 4 personnes, par contre si je réussis à passer le cap où sur la même journée j’arrive à livrer plusieurs familles sur la même station, là je peux être rentable. C’est compliqué, il va surement falloir accepter de faire une première année à perte sur le secteur particulier mais je sens que c’est jouable.

Mais ce projet est trop risqué pour le financer avec un emprunt bancaire, il nécessiterait plutôt une levée de fonds et je ne sais pas si je me sens prêt à lever des fonds ni si je pourrais obtenir les fonds voulus. Il faudra peut-être attendre une ou deux autres saisons, réaliser plus de résultat pour pouvoir s’autofinancer et pour être plus crédible devant des investisseurs potentiels.

Le mot de la fin ! Je pense qu’à GEM il y a beaucoup de cours qui peuvent avoir un lien plus ou moins direct avec l’entreprenariat en général mais il y a beaucoup de choses qu’on peut apprendre par soi-même, il ne faut pas hésiter à chercher les ressources qui sont mises à disposition à GEM. On oublie souvent qu’il y a une BU qui regorge de superbes ouvrages. Il y a beaucoup de ressources à GEM qui sont mises à disposition sans être dans l’incubateur. Il y a tellement de professeurs que je suis allé voir comme ça à la fin d’un cours pour poser des questions ou bien à qui j’envoyais des mails pour demander si on pouvait se retrouver autour d’un café parce que j’ai un projet et que je souhaite solliciter leur expertise. Je n’ai jamais eu le moindre refus. Ce n’est pas quelque chose de forcément naturel chez les élèves mais il ne faut pas hésiter à le faire. Et, en plus, il y a un annuaire dans le GEM Alumni, trop peu de gens s’en servent pourtant la première chose que j’ai faite en lançant SkiTruck c’est d’aller voir les Alumnis Gémiens qui travaillaient dans le secteur du ski ou dans le milieu des sports d’hiver, et il y en a. GEM, ce n’est pas une école très ancienne mais il y a quand même des diplômés qui sont dans toutes les grandes entreprises et les ETI françaises. Ça peut ouvrir des portes et permettre de connaitre un peu le marché de l’intérieur. » Interview d’Antoine Carpe réalisée le 7 mars 2017

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Entreprenariat et Innovation

Le rôle des entreprises à Grenoble Guillaume Ouallet

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renoble est une ville qui compte de nombreuses entreprises… Qu’en est-il de la santé économique de la ville ?

Quel rôle ont les entreprises dans le dynamisme économique de Grenoble ? C’est majeur ! Une entreprise, par définition, c’est l’activité économique. Il y a trois pôles d’activité : activité résidentielle (sphère familiale ou de proximité), activité marchande (créée par l’entreprise), activité publique (pour une part réalisée pour les entreprises).

Que pouvez-vous faire en tant que maire pour que les entreprises investissent ou s’installent à Grenoble ? Depuis 2014, la compétence économique a été transférée à la métropole. On agit donc en équipe au sein de la métropole. Les entreprises prennent en compte plusieurs critères pour s’installer dans une ville : elles recherchent des réseaux, des marchés potentiels, des compétences mais aussi une qualité de vie. Par exemple, HP s’est installé à Grenoble parce qu’il y a des universités, des étudiants, de la recherche… et parce que la vie y est agréable. Nous travaillons donc sur ces atouts du territoire que nous pouvons valoriser. En tant que maire je peux travailler sur la qualité de vie, ce que je fais notamment à travers le développement des transports, la végétalisation de la ville… mais la première chose à faire est de reconnaître ces entreprises, d’affirmer qu’elles sont les bienvenues.

Comment se porte cette attractivité aujourd’hui ? Y a-t-il toujours autant d’entreprises qui investissent à Gre-

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noble ? Certes, nous avons rencontré des difficultés. Grenoble est une ville très industrielle et a souffert entre 2008 et 2013 : à cause de la crise elle a perdu près de 10 000 emplois. Aujourd’hui encore, ce qui frappe la France frappe aussi Grenoble. Par exemple, General Electric rencontre des difficultés financières, souhaite par conséquent se recentrer sur quelques filières et prévoit de supprimer plusieurs milliers d’emplois. GE Hydro prévoit la suppression de 345 des 800 postes existant à Grenoble. Mais le bassin grenoblois reste dynamique et très porteur ! Rien que dans ces derniers temps, plus gros investissement de Schneider se fait à Grenoble : 120 millions d’euros ont été mobilisés pour restructurer leur site et construire de nouveaux sites industriels. Je note également que le niveau de chômage à Grenoble (8% selon les derniers chiffres) est moins élevé que la moyenne française.

Qu’en est-il de la santé financière de Grenoble ? Grenoble a un niveau d’endettement bien supérieur à la moyenne des villes françaises… En 2014, nous étions en effet la ville de plus de 100 000 habitants avec la situation financière la plus critique. Sous le gouvernement Valls nous avons perdu un mois de budget et nous avons du prendre des décisions difficiles, notamment sur la communication de la ville.

Nous avons rétabli une situation financière qui nous permet d’avoir une action politique et nous aurons une épargne nette positive en 2018 pour la première fois depuis 2014. Interview d’Éric Piolle réalisée le 8 janvier 2018

Éric Piolle est le maire actuel de Grenoble. Né en 1973 à Pau, il s’engage en politique dès l’âge de 24 ans, alors candidat aux élections législatives en Isère. Il se lance également dans l’entrepreneuriat et devient chef d’entreprise. Membre du parti Europe Ecologie Les Verts (EELV), il est élu conseiller régional de Rhône-Alpes en 2010. Il abandonne ce mandat pour se consacrer à Grenoble lorsqu’il est élu maire en 2014 avec 40% des voix.


Quelle politique d’innovation pour la France de demain ? Guillaume Ouallet

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l était au plus influent salon de l’innovation, le fameux Consumer Electric Show (CES) de Las Vegas, en janvier 2016. Emmanuel Macron, déjà en tant que ministre de l’économie, affichait son intérêt pour les nouvelles technologies. Celui qui est devenu le président de la République a de grandes ambitions pour la France en terme d’innovation, qu’il décrivait déjà dans son programme. Alors penchons nous de plus près sur ses idées pour faire de la France une nation innovante. Au cœur de sa politique d’innovation se trouve le numérique. Parmi ses propositions phares : •

Lutter pour un meilleur accès à tous au numérique : son ambition est de couvrir l’ensemble du territoire de très haut débit. Il propose également de promouvoir des associations pour former ceux qui ont des difficultés à s’adapter à l’évolution si rapide du numérique. Dématérialiser les services publics, avec l’objectif ambitieux d’arriver à la fin du mandat à ce que 100% des démarches administratives se fassent sur internet. Avoir une politique du numérique qui aide les entreprises. Il souhaite notamment aider les TPE et PME dans la transformation numérique, et adopter un cadre réglementaire et fiscal suffisamment souple pour encourager les entreprises à investir dans le numérique.

Emmanuel Macron souhaite inscrire l’innovation à l’échelle européenne. Il a proposé de mettre en place une po-

litique européenne du numérique, qui aboutirait à la création d’un marché unique du numérique avec les mêmes règles pour tous les pays de l’Union Européenne. Le 26 septembre 2017, il a même proposé de créer une agence européenne de l’innovation. Durant sa campagne, Emmanuel Macron souhaitait également lancer un grand plan d’investissement de 50 milliards d’euros pour moderniser des filières, comme l’écologie, la santé, les transports et l’agriculture, en les rendant plus innovantes. Cinq milliards d’euros seraient ainsi donnés par exemple à l’agriculture pour moderniser cette filière ancienne et l’accompagner d’une montée en gamme. L’agriculture française est aujourd’hui en difficulté à cause notamment de la concurrence mondiale et de la place grandissante de puissances agricoles, comme la Chine, l’Inde ou le Brésil. Face à ces géants qui produisent en grande quantité, la France a plus intérêt à miser sur la qualité.

« Emmanuel Macron souhaite inscrire l’innovation à l’échelle européenne » Mais si l’idée d’une politique européenne de l’innovation est bonne en considérant la nécessité de peser plus dans le monde et de fixer un cadre réglementaire européen, les crises de l’Union Européenne risquent de la rendre peu crédible. Lorsque la Pologne, pays agricole, est entrée dans l’UE en 2004, l’agriculture française s’est affaiblie car les salaires polonais sont nettement inférieurs aux salaires français. Par ailleurs, la Pologne ne faisant pas partie de la zone euro, la fluctuation des monnaies a empiré la situation : après la dévaluation en 2008 du zloty, monnaie de la Pologne, certaines productions françaises ont perdu en compétitivité, notamment dans

le secteur des fruits et légumes. L’UE a aussi été néfaste à l’agriculture française quand elle a décidé, en 2015, d’arrêter le système de quotas laitiers qui avait été mis en place par la PAC en 1984. Cette décision a entraîné une surproduction qui a conduit à une forte baisse des prix, qui a donné la crise du lait et toutes ses conséquences connues.

La politique d’innovation d’Emmanuel Macron est donc pleine de promesses dans un monde qui change et qui va être en particulier de plus en plus marqué par le numérique. Elle est aussi très ambitieuse, allant jusqu’à prétendre atteindre l’échelle européenne. Reste à savoir quelle crédibilité attribuer à un tel optimisme.

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Entreprenariat et Innovation

L’association d’entrepreneuriat de GEM Guillaume Ouallet

Nathan Burnel Hauteville est le président de GEM Entreprendre, jeune association de 47 membres qui vise à promouvoir l’entrepreneuriat…

Quand l’asso est-elle née ? GEM Entreprendre existe depuis plusieurs années mais jusqu’à cette année elle était réservée aux étudiants du master spécialisé entrepreneur. On voulait que l’administration l’ouvre aussi aux étudiants Programme Grande Ecole. On existe en tant qu’association à part entière depuis novembre 2017. peut le mettre en relation avec les structures proposées par l’école, comme IncubaGEM.

Quelles sont vos principales activités ? Quel est votre principal objectif ? Le plus important pour nous c’est d’aider à ce que les étudiants acquièrent des compétences et appétences pour l’entrepreneuriat. On fait une première approche de l’entrepreneuriat, on crée l’envie d’entreprendre. Si quelqu’un souhaite pousser son projet plus loin, on

Les principaux pôles sont le pôle Blog, qui écrit des articles sur Medium, une plateforme utilisée par les startups ; le pôle Event, qui organise des conférences avec notamment des entrepreneurs ; le pôle Concours compétition, dont l’objectif est de faire participer les étudiants à des compétitons, comme l’Open Innovation Game avec les assos

d’entrepreneuriat d’autres écoles de commerce ; et le pôle Networking, dont le but est de créer des relations entre l’asso et des startups pour aider les étudiants à en intégrer, que ce soit par un stage ou un emploi.

Est-ce qu’à titre personnel tu souhaites entreprendre ? Oui, j’envisage de monter ma startup. Je suis très intéressé par la finance entrepreneuriale, particulièrement par le venture capital. Mon idée c’est de créer une plateforme pour mettre en relation plus facilement les fonds d’investissement et les entrepreneurs en recherche d’investissement, ce qui serait un gain de temps précieux pour les entrepreneurs ! Interview de Nathan Burnel Hauteville réalisée le 29 mars 2018.

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GEOPOLITIQUE

L’association de géopolitique de GEM Banas Quentin

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résentation de l’association GEM ONU par Ornella Toubiana, présidente 2017-2018, et Samuel Bordes, nouveau président.

Qu’est-ce que GEM ONU ? GEM ONU c’est l’association de la diplomatie et plus généralement de la géopolitique à GEM. Notre activité principale, c’est la participation des membres aux MUN (Model United Nations). Il s’agit de simulations de négociations internationales et de fonctionnement des Nations Unies face à des étudiants du monde entier, autour des grandes problématiques actuelles comme la sécurité ou l’environnement. On doit représenter un pays et défendre sa politique : on se met dans la peau d’un diplomate. Nos membres sont formés tout au long de l’année par des cours hebdomadaires. GEM ONU tient également un site internet (https://gemonu.com) où sont régulièrement publiés des articles sur l’actualité géopolitique, économique et internationale.

Quels sont les évènements organisés par GEM ONU ? En début d’année, on organise la sélection campus à GEM du Hult Prize, plus grand concours d’entrepreneuriat social au monde, avec à la clef 1 000 000$ pour lancer sa startup. Cette année, une équipe est partie représenter GEM à Tunis et une autre au Caire. Le concours est en 3 étapes : d’abord il y a la sélection campus, à GEM (nous avons été la plus grande sélection campus de France, alors que c’est la première année) ; ensuite il y a la finale régionale au Caire, à Tunis, il y en a plusieurs selon les différentes régions ; et enfin il y a la finale monde qui

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a lieu à New York. Ça vaut donc le coup de participer ! D’autant plus que c’est un jury de professionnel. Quoi qu’il arrive, c’est très formateur puisqu’on travaille sur un projet d’entreprise. Ça a été un succès cette année puisqu’il y a eu beaucoup de participants à GEM.

Ensuite le deuxième évènement c’est le GEMUN qui est notre propre simulation onusienne à GEM et qui accueille des étudiants français et européens le temps d’un week-end.

A quels autres évènements participe GEM ONU ? Là on revient du NMUN à New York qui dure une semaine. On avait précédemment participé à Londres au LIMUN, l’année dernière on avait fait le MainMUN de Frankfort. Chaque année on fait celle de New York, l’année dernière on a envoyé 12 membres de l’asso et on a eu 2 prix, cette année on a envoyé 20 participants et reçu 5 prix. On fait toujours un MUN en Europe pour faire participer ceux qui ne vont pas à New York. Et participer à d’autres grands MUN en Europe nous permet de gagner en visibilité car il y a beaucoup plus d’écoles proches de nous.

Comment se déroule une simulation onusienne comme celle de New York ? Comme à l’ONU, il y a plusieurs comités, il y a la FAO, l’assemblée générale, le conseil de sécurité, le comité économique, social, environnement… Ça se divise donc en grands nombres de comités comme à l’ONU. Chaque délégation envoie un ou deux délégués par comité et ensuite dans chaque comité, on aborde une grande problématique actuelle comme l’agriculture durable par exemple. Le but c’est de défendre la position de son pays et non sa position personnelle. Il faut se mettre dans la peau du diplomate, défendre les intérêts de son pays, coopérer avec les autres, essayer de créer des alliances, de voir qui est d’accord avec nous et qui ne l’est pas ; et ensuite, une fois qu’on a créé ces alliances, on rédige ce que l’on appelle les « working papers » qui sont les papiers de résolution de l’ONU sur lesquels il y aura un vote plus tard. Le but c’est de créer la loi, créer les résolutions de

l’ONU. Il faut aussi savoir qu’en amont, avant d’arriver, on rédige notre position sur des « position papers », ce qui permet aux autres de savoir comment on se positionne et qui sont nos alliés. Ensuite


il y a la phase de négociation avec les discours puis avec les votes et l’adoption des résolutions. C’est fait de la même manière qu’à l’ONU.

Quel est le bilan de la simulation à New York ? On a adoré ! Car il y a d’abord une rencontre avec beaucoup d’étudiants internationaux. On travaille dans un contexte international. Et à côté de ça, il y a la participation à la mission jeune de l’ONU, on est amené à faire des discours en anglais devant 50-100 personnes selon le comité, c’est très formateur. Du point de vue de l’association, le bilan est très positif car on est d’abord partis à plus que l’année dernière ce qui nous a permis d’être présent sur 10 comités puisque l’on travaille en binôme. On était donc plus présents, notre délégation était plus visible ce qui explique

notamment nos prix, on est passés de 2 l’année dernière à 5 prix cette année dont un prix sur les « position papers », un sur le meilleur binôme en comité et un qui récompense toute la délégation. Sur ce dernier, il y a trois niveaux : mention assez bien, bien et très bien ; l’année dernière on a eu mention bien et cette année mention très bien ! On a aussi pu rencontrer les missions permanentes à l’ONU de la France ou du Chili. Et pouvoir rentrer dans l’assemblée générale de l’ONU c’est classe ! Donc un très bon bilan. »

Quels sont les projets futurs pour l’association ?

évènements que l’on organise et qu’on souhaite pérenniser ainsi que sur notre site internet qu’on aimerait développer et en diversifier le contenu. Après on a aussi de nouveaux projets comme celui de créer un réseau des associations de géopolitique de toutes les écoles en France et d’essayer de collaborer un peu ensemble ; pourquoi pas aussi essayer de prendre une part un peu plus importante au festival de géopolitique et enfin développer un partenariat avec l’UNICEF, devenir antenne campus de l’UNICEF pour faire des levées de fonds UNICEF, de la sensibilisation… Essayer ainsi de tisser des liens directement avec l’ONU. » Interview de Ornella Toubiana et Samuel Bordes réalisée le 4 avril 2018

« La priorité reste la simulation à New York car c’est le plus beau projet auquel on participe. Ensuite étant donné que l’asso n’a qu’un an, on pense qu’il y a vraiment du potentiel sur les deux

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GEOPOLITIQUE

Ce que l’on sait (ou que l’on peut spéculer) sur le Bitcoin Roussel Louis-Nicolas

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ous pensez à investir dans le bitcoin ou autres crypto-monnaies ? Lisez ceci avant ! Vous souhaitez comprendre l’engouement de votre entourage pour cette monnaie virtuelle ? Cet article est fait pour vous !

Qu’est-ce que c’est ? Le bitcoin, c’est une monnaie cryptographique, c’est-à-dire une monnaie virtuelle reposant sur un réseau informatique (internet) dont le fonctionnement est décentralisé. Ainsi, le bitcoin, contrairement aux autres monnaies courantes que nous connaissons (euro, dollar, yuan…), n’est pas émis ni contrôlé par une autorité centrale (Banque centrale européenne, réserve fédérale américaine…), son cours varie uniquement en fonction de l’offre et de la demande. Des bitcoins sont générés en permanence par les « mineurs » qui contribuent à étendre le réseau Bitcoin (voir partie technique). Bitcoin, lui, est un système de paiement utilisant l’unité de compte bitcoin.

A quoi ça sert ? A titre de monnaie, le bitcoin est avant tout un moyen de paiement. Le nombre de commerçants qui l’acceptent croit de manière très importante ces dernières années. Plus de 100 000 sites internet l’acceptent dont quelques géants américains comme Dell ou Microsoft. Toutefois, la monnaie virtuelle la plus connue

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au monde souffre d’un problème d’image du fait de son utilisation importante par le passé sur le marché noir du Darknet pour divers trafics illicites (stupéfiants, prostitution). Néanmoins, depuis 2013 et la fermeture de la Silk Road (marché noir sur internet) par le FBI, les transactions illégales sont désormais minoritaires. D’ailleurs, le Sénat américain reconnaît que le bitcoin fournit des services financiers utiles et légaux.

« Plus de 100 000 sites internet l’acceptent dont quelques géants américains comme Dell ou Microsoft l’acceptent comme moyen de paiement. » Quels avantages ? Le bitcoin est une monnaie libertaire avant tout qui s’affranchit des Etats et des banques. Ainsi on peut effectuer une transaction en bitcoin depuis n’importe où dans le monde et n’importe quand (Bitcoin ne connaît pas les jours fériés) de manière très rapide entre 0 et 30 minutes généralement et à faibles frais. En effet, le bitcoin n’a cure des frais de change, il n’en fait pas payer. Autres avantages importants : il n’y a pas de plafond aux transactions que l’on peut effectuer, grande sécurité de paiement via une double clé très complexe, transparence (toutes les transactions sont consultables sur les « blocs » (voir partie technique) par tout le monde), grande résilience de la monnaie face aux krachs qui peuvent l’affecter, reconnaissance croissante par les banques et les autorités monétaires officielles Avantage pour les commerçants : frais de paiement à la charge de l’acheteur, protection pour le vendeur (irréversibilité des transactions), protection de

l’acheteur (pas de frais supplémentaires sans que celui-ci ne soit d’accord) …

Histoire Héritier de la b-money de 1999 et du bitgold décrit en 2005, le bitcoin naît en 2009 des mains d’un certain Satoshi Nakamoto. Le premier bloc genesis est créé. En février 2009, Nakamoto diffuse la première version du logiciel Bitcoin sur le site P2P Foundation et pour faire fonctionner le réseau, il met à contribution son ordinateur et engendre ainsi les premiers bitcoins. L’identité du créateur se cachant derrière ce pseudonyme reste un réel mystère. Nombreuses sont les personnes à travers le monde qui se sont revendiquées être Satoshi Nakamoto, et malgré les nombreuses enquêtes de journalistes et autres détectives, aucune piste ne s’est avérée vraiment concluante

Satoshi Nakamato et Elon Musk, 2 possibles inventeur du Bitcoin Nakamoto s’est peu à peu éloigné de la communauté bitcoin pour déléguer la suite du travail à ses développeurs. En décembre 2010, il nomme Gavin Andresen comme successeur et disparaît de la circulation. Tout ce que l’on sait aujourd’hui sur lui c’est qu’à ce jour il possèderait environ un million de bitcoins


soit presque 20 milliards de dollars au cours de décembre 2017.

La partie technique La blockchain : Le système de paiement Bitcoin repose sur un logiciel fonctionnant en réseau. Ce réseau repose sur des « blocs », c’est-à-dire des unités vérifiant, sécurisant et stockant les transactions effectuées par Bitcoin. Par mesure de sécurité, chaque bloc ne peut stocker plus de 1 Mo d’information, ensuite il faut créer un autre bloc. Il s’agit en fait d’un réseau d’ordinateurs, qui, reliés entre eux, forment la chaîne de blocs ou « blockchain ». Chaque ordinateur peut tomber en panne sans compromettre le bon fonctionnement de l’ensemble de la chaîne. La blockchain peut donc être vue comme un registre public auquel chaque utilisateur de Bitcoin a accès. Le minage : De nouveaux blocs sont créés en permanence par des mineurs. Ces personnes privées mettent à contribution la puissance de calcul de leurs ordinateurs pour vérifier-sécuriser les transactions et rassembler celles-ci sous forme de « blocs ». Ils sont rémunérés en bitcoins pour leur travail, c’est ainsi que les bitcoins sont créés. On appelle ces personnes « mineurs » par analogie aux mineurs d’or qui travaillent pour trouver de la richesse.

ce qui est extrêmement difficile et rare), les mineurs doivent donc s’associer pour recevoir une rémunération régulière. De ce paradoxe aussi découlent des ordinateurs toujours plus puissants, spécialisés et énergivores.

Les frais Bien qu’une transaction en bitcoin ne soit pas nécessairement payante, on constate que plus un utilisateur accepte de payer des frais de transaction élevés, plus sa transaction sera traitée rapidement. En cas de frais d’un montant identique, priorité est donnée aux transactions les plus anciennes. Les transactions effectuées sans frais de transaction sont traitées après toutes les autres ; pratiquement, ces transactions commencent à être traitées en moyenne à partir de 120 minutes et jusqu’à un temps potentiellement infini. En 2016, pour une taille médiane de transaction de 265 octets, cela représente un coût approximatif de 21 200 satoshis (soit moins de 0,11 €, 1 bitcoin = 100 000 000 de satoshis) quel que soit le montant de bitcoins à transférer (frais de transaction les plus compétitifs, qui permettent d’obtenir une confirmation quasi-immédiate, entre 0 et 30 minutes en moyenne). Ainsi une transaction bitcoin ne coûte quasiment rien.

Quels enjeux ? Environnemental : Fin 2016, on pouvait estimer la

consommation électrique du réseau bitcoin à 3,7 milliards de kWh par an, soit la moitié de la production d’un réacteur nucléaire. À titre de comparaison un centre Visa ne consomme que 2 % de la consommation de Bitcoin pour gérer 20 000 000 transactions par jour, alors que Bitcoin n’en gère que 350 000. En 2020, le réseau consommerait près de 14 milliards de kWh, ce qui représente la totalité de la consommation du Danemark; cela nécessiterait près de 5 500 kWh pour produire un bitcoin, soit la moitié de la consommation annuelle en électricité d’un ménage américain. La consommation d’énergie de Bitcoin est liée à ses opérations complexes de vérification rendues nécessaires pour protéger le système de la fraude en l’absence d’autorité centrale, qui nécessitent de grandes puissances de calcul fournies par des appareils spécialisés. Toutefois, pour les partisans de Bitcoin, l’utilisation d’argent liquide consomme aussi de l’énergie, notamment à cause des distributeurs automatiques, de l’impression des billets de banque et leur transport en camion blindé. Si Bitcoin souhaite réellement être

« En 2020, le réseau consommerait près de 14 milliards de kWh, ce qui représente la totalité de la consommation du Danemark » la monnaie du futur, le défi sera donc pour lui de trouver le moyen de fonctionner de manière plus économique (en énergie) et écologique. Cela passera peut-être par un changement de paradigme : restructuration du réseau pour le rendre moins décentralisé et faire des économies d’échelle en énergie, évolution du format des blocs (fin de la limite de 1 Mo ?) …

Il existe cependant un paradoxe du minage : plus le nombre de mineurs croit et plus leur travail devient difficile, concurrentiel et le nombre de bitcoin gagné et divisé par deux tous les 210 000 blocs créés (mais la récompense reste toujours plus alléchante du fait de l’inflation exponentielle du bitcoin). Leur rémunération n’est pas régulière (12,5 bitcoins, soit $200 000, pour celui ou celle qui est parvenu(e) à compléter un bloc,

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Juridique : La question juridique que pose le bitcoin est complexe. Son statut n’est pas le même selon les pays : en Europe, la Banque centrale européenne le considère comme un bien de consommation courante et non comme une monnaie. A ce titre il est sujet à l’impôt sur la plus-value sur les marchandises. Néanmoins, La Cour de Justice de L’union Européenne considère depuis le 22 octobre 2015 que Bitcoin est un moyen de paiement et qu’à ce titre il peut bénéficier des exonérations de TVA prévues pour les opérations financières. C’est vous dire à quel point la situation est complexe… On parle ainsi dans beaucoup de pays de statu quo (Union européenne, Amérique du nord, Japon, Australie, Indonésie…) alors que la Banque centrale chinoise a interdit toute transaction en bitcoin aux banques chinoises, comme c’est également le cas en Inde, en Russie, en Bolivie… Là encore les Etats mènent un double jeu car le contrôle du marché du bitcoin est aujourd’hui un enjeu stratégique. En effet, ce dernier possède un pouvoir aux conséquences potentiellement gigantesques mais encore incertaines. C’est en Chine que l’on retrouve la majorité des mineurs et où de ce fait réside la plus grande partie de la capacité de calcul bitcoin, ainsi que la majorité des données. Par ailleurs, un proche de Vladimir Poutine a déclaré vouloir lever 100 millions de dollars pour financer le minage de manière à concurrencer la Chine. La guerre des mines s’annonce féroce…

des attaques et piratages de plateformes d’échange de bitcoins qui conduisent souvent au vol de milliers d’unités, de telles attaques peuvent conduire à des krachs sur le cours de la monnaie, comme en décembre 2017 lorsque le bitcoin perdit 40% de sa valeur en 3 jours après le piratage d’une plateforme sud-coréenne. Ces krachs sont directement liés à la volatilité très importante de la monnaie contre laquelle mettent en garde de nombreuses instances monétaires officielles (BCE…) et spécialistes reconnus comme les prix Nobels d’économie Joseph Stiglitz ou encore Jean Tirole pour qui le bitcoin n’a aucune réelle utilité sociale et n’apporte qu’instabilité et risque. Paul Krugman, autre prix Nobel d’économie, va même jusqu’à déclarer « le Bitcoin est le Mal ».

Risques et controverses Outre les risques environnementaux et d’utilisation criminelle du bitcoin, il existe de multiples risques pour les possesseurs de bitcoin(s) : de manière générale, ceux-ci sont mal informés de la façon de fonctionner de Bitcoin, et peuvent potentiellement perdre leur clé privée secrète qui donne accès à leurs bitcoins. Ceci est un grand principe de Bitcoin : l’irréversibilité ; si l’on fait une erreur lors d’une transaction ou si l’on perd sa clé (comme celui qui un jour perdit 7500 bitcoins pour une valeur de $7,5 millions), cela est définitif. De plus, on constate régulièrement

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Un des points très controversés est que le Bitcoin favorise les premiers entrants, ceux qui ont acheté de cette monnaie au début de son existence, lorsque celle-ci ne valait presque rien.

Aujourd’hui, mille personnes possèdent près de 40% des bitcoins. Le bitcoin contribuerait alors à accroitre les inégalités. Néanmoins, certains économistes dans la lignée de Friedrich Hayek, considèrent que ces monnaies alternatives qui concurrencent la monnaie officielle permettent de discipliner les gouvernements qui seraient tentés de financer leur dette par l’inflation.Dans ce cas de figure, les consommateurs et les investisseurs se détourneraient de la monnaie officielle pour acheter la monnaie alternative (comme par exemple le bitcoin) et créeraient ainsi une pression déflationniste sur la monnaie officielle qui forcerait l’Etat émetteur à mettre fin à sa politique inflationniste. Enfin, beaucoup s’accordent à dire que l’évolution actuelle du cours du bitcoin est caractéristique d’une bulle. En effet, la croissance exponentielle de celui-ci est identifiable aisément et l’histoire a montré que toute envolé similaire ne peut que présager d’un krach. Il y a bulle lorsque la valeur attribuée à un produit ne correspond plus à la valeur réelle du produit, lorsque celle-ci s’envole trop haut par rapport à l’utilité réelle de l’objet. Or, on peut constater ci-dessous que le cours du bitcoin est monté beaucoup plus vite que l’utilisation qui en est faite. Le bitcoin n’est-il alors qu’illusion ou simple exagération de la réalité qui tend à être corrigé, à l’aide justement, de ces krachs à répétition ?


Quel avenir ? « Je pense qu’Internet sera l’un des vecteurs principaux dans la réduction du rôle de l’État. La seule chose qui manque, mais sera bientôt développée, c’est une e-monnaie fiable. » Ainsi parlait, en 1999, Milton Friedman, économiste américain de l’École de Chicago. Sa prédiction semble aujourd’hui se réaliser… Toutefois, donner un avis sur l’avenir du bitcoin c’est parier sur la fiabilité et la viabilité ou non de cette « e-monnaie ». Si l’on regarde l’histoire du bitcoin comme son actualité, on constate que la monnaie se remet globalement bien de tous les krachs qui l’ont touchée. Elle serait alors peut-être viable. Toutefois, la question de la fiabilité reste toute entière car un bitcoin d’aujourd’hui peut valoir le double du bitcoin du lendemain. Dès lors, comment commercer durablement avec des bitcoins ? Il semble d’ores et déjà difficile pour une entreprise d’avoir des réserves en bitcoins, puisque, au vu de la volatilité de celui-ci, ces réserves peuvent fondre du jour au lendemain. Parier sur le bitcoin, est-ce parier

sur l’individualisme face au bien commun promu par l’Etat ? Ou est-ce au contraire plutôt le moyen de redonner du pouvoir aux individus pour leur permettre de s’émanciper des banques et des administration étatiques quant à leur argent et à leurs façons de consommer ?

des comptes publics) affirmant que « la déclaration de revenus, quand il s’agit de plus-values réalisées lors d’opérations en bitcoins » est « obligatoire ».

« Je pense qu’Internet sera l’un des vecteurs principaux dans la réduction du rôle de l’État. La seule chose qui manque, mais sera bientôt développée, c’est une e-monnaie fiable. »

16 millions : le nombre de bitcoins créés pour le moment (avec un nombre de 21 millions comme plafond fixé par le créateur).

En tout cas, le bitcoin semble pour le moment bien continuer sa course vers les étoiles et on voit mal ce qui pourrait l’arrêter, puisque même les pirates n’y sont pas arrivés et que les Etats ne semblent pas prêts à l’accepter et à le réguler dans les formes.

$200 000 000 000 : valorisation de la masse totale de bitcoins en décembre 2017 (vous pouvez vous amuser à estimer la valeur actuelle en comparant avec le cours au moment où vous lisez)

Une chose est sûre, c’est que ces Etats n’ont pas dit leur dernier mot et ne sont pas prêts à renoncer à leur souveraineté sur la monnaie en cours dans leurs pays respectifs.

Le bitcoin en quels chiffres

40% : part du nombre total de bitcoins possédée par les 1000 premiers possesseurs de bitcoins 744 408 : nombre de bitcoins du vol record dont la plateforme Mt. Gox a été victime en 2014

NB : notez néanmoins, si vous avez décidé de vous lancer dans l’aventure et d’investir dans le bitcoin, la déclaration de Gérald Darmanin (ministres français

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GEOPOLITIQUE

Le retour de la Russie : une nouvelle place dans les relations internationales Guillaume Ouallet

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omment la Russie s’est-elle relevée de la perte d’influence majeure qu’elle a subie depuis l’effondrement du bloc soviétique ? Oui, c’est une vraie renaissance. En effet, les années Eltsine ont été des années de destructuration sociale, économique, politique et stratégique. C’était la fin de la Guerre Froide et les Russes ont probablement pensé qu’ils tireraient parti de l’ouverture de leur pays. Puis il y eut la guerre de Tchétchénie, et un certain nombre de déstabilisations en Europe orchestrées pour parachever un affaiblissement inespéré que l’on voulait durable et qui était couplé avec un processus accéléré d’élargissement de l’OTAN et de l’UE. Ce double élargissement mené tambour battant, présenté comme une marche naturelle et radieuse vers le progrès politique, économique, social et sécuritaire de ces petits pays enfin libérés du joug soviétique, était destiné à faire définitivement « passer à l’Ouest » tous les anciens satellites de Moscou pour réduire à jamais le poids stratégique russe en Europe. De ce fait, « l’Etat profond » russe, très au fait de la désintégration galopante du pays sous couvert de modernisation, décida alors de trouver quelqu’un capable de lancer et de mener à bien dans le temps une reprise en main du système avant qu’il n’échappe à tout contrôle interne... Cet homme, ce fut Vladimir Poutine, qui s’est rapidement révélé bien plus que l’exécutant d’un plan conçu par d’autres. Il a réussi magistralement à relever l’idée de nation, l’idée d’une fierté, l’idée d’une cohésion nationale et à les incarner symboliquement et concrètement. Il a, c’est là sans doute l’un des secrets de sa popularité et de sa longévité politique, réussi à réconcilier les Russes avec la Russie

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au-delà des périodes sombres, violentes ou troubles, à matérialiser une synthèse historique valorisante pour chacun qui inscrive les difficultés présentes dans une marche multiséculaire vers la grandeur et la résistance à l’uniformisation du monde. La montée des prix du pétrole des années 2000 a fait le reste. Et enfin, par contraste, le fiasco occidental en Irak et en Syrie lui a offert l’occasion de revenir au centre du Moyen-Orient - champ de confrontation stratégique cardinal- comme un Game changer incontournable. Ainsi, la Russie a connu une renaissance politique et symbolique inimaginable il y a seulement 15 ans.

jets de l’Organisation de coopération de Shanghai. La Russie se rapprochant de la Chine, c’est ce que j’appelle le « baiser de la mort », alliance entre un géant et une puissance indéniable mais sans commune mesure. Les Russes essayent également de faire valoir leur positionnement géographique sur les Nouvelles Routes de la Soie que la Chine développe ardemment pour ravir le marché européen à l’Amérique.

La Russie semble à la fois tournée vers l’Europe et vers l’Asie. Quelles sont ses priorités et quelle est sa stratégie ? La Russie se considère européenne, voire même comme une partie de « l’Occident ». En effet, elle se considère comme un pôle de la chrétienté, un pôle civilisationnel important du monde de l’Ouest, au sens large. Mais on lui dénie cette qualité. Il y a eu de nombreuses offres et demandes faites aux Européens pour une association, un partage, une convergence, un dialogue privilégié, une coopération. Poutine avait même, semble-t-il, proposé en 1999 de libeller les échanges de la Russie avec l’Europe en euros …. L’Europe a toujours dit non. La Russie est prise en tenaille entre la Chine et l’Amérique. Il y a l’UE qui est près d’elle, mais qui ne veut pas d’elle. Elle déploie désormais son pilier « eurasiatique » parce qu’elle a de moins en moins le choix. Elle essaie de ne pas tout perdre en se tournant vers l’Asie, d’où les forums de Vladivostok, d’où l’Union économique eurasiatique, d’où les pro-

Caroline Galactéros est géopolitologue. Elle est docteur en Science politique et ancien auditeur de l’Institut des hautes études de la Défense nationale (IHEDN). Elle dirige le cabinet de conseil stratégique PLANETING et vient de fonder GEOPRAGMA, un Think tank/Action tank français consacré à la géopolitique réaliste opérationnelle.


ne plus jamais parler de devoirs, de se cacher derrière l’OTAN, de ne pas voir ses erreurs, de n’avoir aucune stratégie et de refuser la puissance et l’influence comme des vices, l’Union Européenne se saborde stratégiquement.

La situation peut-elle évoluer ? L’UE peut elle encore renouer les liens avec la Russie ?

Dans votre livre Manières du monde, manières de guerre (2013), vous affirmez que seul un « partenariat stratégique de l’Union avec la Russie […] donnerait sa taille critique à l’Europe ». Que reste-t-il des relations entre la Russie et l’UE ? Bien sûr, il y a des relations économiques, diplomatiques… mais les sanctions neutralisent les volontés d’investissement étranger. Il y a toujours de nombreuses entreprises françaises bien placées en Russie, mais y travailler devient compliqué surtout en termes « réputationnels ». L’opprobre est jeté directement ou indirectement sur toute la classe économique russe qui compte et par extension sur ceux qui voudraient faire des affaires avec eux.... La pusillanimité de nombre d’acteurs notamment européens est donc entretenue à peu de frais par une Amérique qui ne subit pas de contrecoup commercial puisqu’elle ne commerce quasiment pas avec la Russie.

nomiques et donc d’une grogne sociale invasive. Paradoxalement, les sanctions offrent des possibilités de développer des secteurs, comme l’agriculture russe… Ce qui est fait, mais à trop petite échelle. En matière internationale tout est lié. Plus on tape sur la Russie avec des sanctions dont les Européens sont les premières victimes commerciales, plus elle cherche à agir en représailles dans d’autres parties du monde et sur d’autres thèmes.

«La Russie a connu une renaissance politique et symbolique inimaginable il y a seulement 15 ans» Cette vaste manœuvre de décrédibilisation (qui prend sa source à Washington, est relayée par une Europe sous tutelle mentale et économique consentie, ce qui rend d’autant plus urgente une lutte collective contre l’extraterritorialité du droit et des normes américaines) bat donc son plein. L’objectif ultime ? la déstabilisation politique du pouvoir russe du fait d’un manque de résultats éco-

Si seulement l’Union Européenne réalisait le tort qu’elle se porte à ellemême en traitant ainsi la relation avec sa grande voisine. A force de nier les différences entre les pays européens, de nier ce qu’est une civilisation européenne, de ne pas voir les problèmes de l’élargissement, d’accorder des droits à tous sans

Les russes sont pragmatiques, donc si la situation était amenée à changer, ils seraient capables d’en tirer les conséquences positives et de modifier leur attitude en retour. Mais ils voient bien depuis maintenant vingt ans que rien ne change. Si l’Europe ne propose rien à la Russie, si l’Amérique continue à faire en sorte de la rediaboliser méthodiquement (cf le délirant Russia gate américain depuis plus d’un an), d’en faire de nouveau son « ennemi » premier en la liant opportunément avec l’Iran dans un commun opprobre, les lignes ne bougeront pas et la déstabilisation du monde ira croissante. Il faut enfin arrêter avec la moralisation débilitante charriée par des médias qui préfèrent simplifier un problème plutôt que de le décrire dans sa complexité. En relations internationales, il peut y avoir - et l’on doit ardemment rechercher à promouvoir - une approche éthique, mais il n’existe pas de « morale ». Celle-ci est par définition contingente et diffère évidemment selon les acteurs et leurs intérêts. D’où le déficit de crédibilité occidental car nos grands principes affichés masquent des comportements parfaitement partiaux et aboutissent à des désastres humains. Et cela se voit jour après jour sur les écrans du monde entier, faisant le jeu de la contestation sous toutes ses formes. L’ennemi se nourrit de nos contradictions béantes et de notre cynisme des bons sentiments. Il faut une révolution pragmatique : une révolution du regard, en particulier sur la notion de légitimité, et une révolution de la gouvernance mondiale. Interview de Caroline Galactéros réalisée le 22 décembre 2017

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GEOPOLITIQUE

Pour une géopolitique verte Roussel Louis-Nicolas

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ous êtes venu à GEM car vous étiez passionné de géopolitique ? La cause environnementale vous tient à cœur ? Vous êtes sensible à des problématiques telles que les COP ? Vous êtes simplement curieux/curieuse d’avoir un regard (géo)politique différent sur le monde complexe d’aujourd’hui ? Didier Rod, ex député européen répond à vos questions !

En quelques mots : qui êtes-vous ? Je suis né en 1950 en région parisienne d’une famille d’immigrés du sudouest, j’ai une formation de médecin, je me suis toujours intéressé à la géographie, à l’histoire, à la science politique et j’ai été député européen Europe écologie les Verts de 1999 à 2004.

Quelle(s) formation(s) suivie(s) ?

avez-vous

J’ai fait un bac D, qui était mi scientifique mi littéraire, puis j’ai été en faculté de médecine. J’ai fait plusieurs métiers en tant que médecin : de la médecine scolaire, des urgences, de l’industrie pharmaceutique, des cours de médecine, puis j’ai été élu européen, mais en parallèle j’ai presque toujours été engagé politiquement de mai 68 à aujourd’hui. En 68, j’étais en terminale, on a occupé le lycée, dans une banlieue parisienne. On allait aux manifs à Paris. A Poissy, près d’usines automobiles où il y avait un syndicat très violent, payé par le patron et fachisant, c’était impossible de poser des affiches de gauche sans avoir des problèmes. Les gars du syndicat avaient promis de nous casser la gueule si on occupait le lycée. Du coup ça nous a déterminé pour l’occuper, on a voté pour l’occupation, on s’est organisés comme il fallait pour empêcher la venue de cette

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bande de nerveux. C’était la fête permanente, c’était la boom permanente. On allait tous les jours aux manifs à Paris. C’est un très bon souvenir.

Comment vous est venue cette passion pour la géopolitique ? J’ai toujours été passionné par l’histoire et la géographie, même petit ou je collectionnais et je collectionne encore les timbres. Les timbres c’est aussi la géographie, c’est aussi l’histoire, c’est aussi la politique… Quand j’ai eu mon bac en poche, avec une mention bien, j’ai hésité entre médecine et histoire-géo science po. Alors j’ai fait médecine pour aider, soigner les gens, mais je suis toujours resté passionné par l’histoire et la géographie. J’ai toujours été particulièrement intéressé par la 2e Guerre Mondiale. Moi, je suis né en 1950, je suis un baby boomer, cette histoire a toujours été présente dans mon enfance. J’ai baigné dedans. Quand j’avais cinq ans, la 2e Guerre Mondiale c’était 10 ans avant.

« La géopolitique c’est comment les ressources géographiques, naturelles ou non, déterminent l’Histoire hier et d’aujourd’hui » Aujourd’hui, le 11 septembre c’était en 2001 et c’est encore très présent dans les esprits, donc je vous laisse imaginer à l’époque. De plus, ma famille était engagée dans la résistance pendant la guerre. J’ai toujours été engagé, avant d’être député européen, en 68 j’étais membre du comité d’action du CA, puis je suis rentré en fac et j’ai toujours été dans des trucs étudiants, puis j’ai été au PSU en 1971, c’était le parti de Michel Rocard, j’y suis resté jusqu’en 1989 et j’ai été secrétaire national adjoint, avec des responsabilités fortes donc.

Qu’est-ce que la géopolitique pour vous ? La géopolitique c’est comment les ressources géographiques, naturelles ou non, déterminent l’Histoire hier et d’aujourd’hui. C’est-à-dire les ressources qui composent la géographie : les frontières, les montagnes, les fleuves… La politique n’est qu’un succès damné de l’Histoire. Ce qui compte c’est l’Histoire, la politique, elle, essaie d’influencer l’Histoire. Hérodote disait la géographie ça sert à faire la guerre, à la préparer. La géopolitique c’est pour faire l’Histoire de demain. Pour moi, le plus intéressant c’est l’étude de ces conditions de géographie, comment elles vont déterminer l’Histoire de demain, c’est comment en tant que politique tu peux essayer d’influencer cette histoire en te servant de la géographie d’aujourd’hui. Donc pour moi en tant que politique, la géographie est quelque chose d’essentiel.

Avez-vous des relations privilégiées en (géo)politique ? Un idéal (géo) politique ? Les relations, il y en a à la fois avec des géographes, des historiens et des politiques. Aujourd’hui vient se greffer la géopolitique, qui ne détermine plus simplement les rapports entre les différentes nations pour avoir le pouvoir sur les ressources naturelles (qui est l’aspect classique depuis plusieurs siècles). L’idée qui a surgit au 20e siècle, c’est la planète, et plus précisément, la viabilité de notre planète. Cette viabilité de la planète va bousculer la géopolitique. On ne va plus être seulement dans le conflit pour les ressources, même si cette vision persiste, mais on va inclure peu a peu cette idée dans la pensée. Cette conscience a commencé à émerger avec Hiroshima et


Nagasaki qui ont montré que la planète pouvait être détruite par l’homme et la guerre, par le réchauffement climatique, les sècheresses…donc on s’est rendu compte qu’il fallait qu’on change globalement notre comportement à l’échelle de la planète pour survire. Ainsi, il y a aujourd’hui un nouveau facteur géopolitique qui émerge : la survie globale de la planète, la géographie qui sert à faire la guerre n’est plus l’unique priorité, et cette conscience collective qui essaie de s’organiser encore de façon totalement inefficace essaie de changer la conception classique et conservatrice de la géopolitique. Donc moi j’ai tendance à privilégier cette nouvelle partie, c’està-dire ceux qui sont soit des politiques qui essaient de se battre pour la paix de manière générale, soit ceux qui essaient de trouver les éléments d’innovation qui vont permettre de sauver la planète.

En quoi l’innovation influe-t-elle sur la géopolitique ? Je ne crois pas que la technologie va nous sauver tant qu’il n’y aura pas une conscience et une volonté politique. On est déjà sur la décroissance. Je ne crois plus à la re croissance. La seule façon pour qu’il y ait une nouvelle période de croissance c’est qu’il y ait une guerre mondiale. La guerre a toujours été la solution depuis des siècles aux crises économiques. Ce qu’il faut c’est éviter les guerres. Quand je cherche à préserver la planète, je m’inquiète pour mes enfants en fait. Quelque part moi ma vie est finie. Globalement je suis plutôt dans la décroissance de ma vie (rires). Donc tout ça c’est pour vous. Ex de l’éolien : Aujourd’hui les éoliennes c’est une ressources énergétique durable, renouvelable, qui est super, il n’y pas de pollution, sauf juste un peu visuelle et sonore. Le problème c’est que le vent il n’y en a pas tout le temps, ce

n’est pas toujours au moment où il y a du vent que l’on a besoin de cette électricité. Donc un gros problème de l’éolien, c’est le stockage. Une fois que l’on aura résolu le problème du stockage, de façon non polluante, on aura fait un gros pas en avant sur l’autonomie énergétique. Donc l’éolien c’est une opportunité, un avantage pour ceux qui le maitriseront à l’avenir car le pétrole et les énergies fossiles dans quarante, soixante ans il n’y en aura plus. En cela, l’innovation est un vrai défi géopolitique. Car on va être obligé de remplacer ces énergies fossiles par des énergies renouvelables quelles qu’elles soient. Je ne sais pas si on peut dire aujourd’hui que la science permettra toujours de résoudre nos problèmes actuels dans le futur. C’est pour cette raison que je suis pour la sortie du nucléaire, car on ne sait pas traiter les déchets. Ça me dérange de laisser la charge aux générations futures de trouver les solutions scientifiques pour résoudre ce problème des déchets. Ce n’est pas la solution.

« Je ne crois plus à la re croissance. La seule façon pour qu’il y ait une nouvelle période de croissance c’est qu’il y ait une guerre mondiale »

Un autre exemple sur l’innovation : la traite d’esclaves aux Amériques. Comme les blancs mourraient de maladies et de fatigue, on a fait venir des esclaves d’Afrique, typique de la géopolitique. C’est là que la question géopolitique a joué : qu’est ce qui est le plus intéressant ? Avoir un esclave qui travaille pour soi et qu’on nourrit simplement ou avoir un salarié qui se paie et qui est capable d’acheter des produits manufacturés ? Donc au moment de la guerre de sécession on a dit « libérerez les esclaves etc » en mettant en avant l’aspect humaniste du nord, mais la vérité c’était pas du tout ça, c’était une question de modèle économique, d’innovation industrielle

dans le modèle économique. Au nord, ils avaient besoin de gens pour acheter leurs produits. Au sud, l’économie était presque que primaire (coton, tabac…) et non automatisée. C’était déjà une question de guerre économique.

Quel événement vous a marqué récemment ? L’intervention des troupes françaises avec l’opération Barkhane au Mali, Niger et Tchad, intervention contre les terroristes etc. C’est pas du tout ça en fait, c’est parce que le Niger est le principal fournisseur des centrales nucléaires françaises. Le nucléaire ça veut pas du tout dire l’indépendance énergétique pour la France. Donc l’objectif c’est de sécuriser l’uranium, on ne doit pas se leurrer, c’est cynique mais c’est de cela qu’on parle. L’autre objectif géopolitique de ces interventions dans cette zone d’Afrique de l’Ouest traditionnellement sous influence française, c’est aussi d’assurer la stabilité politique, de maintenir les responsables politiques en place pour permettre a nos entreprises de continuer a faire du commerce. Mais la raison principale ça reste l’uranium.

Comment sera la géopolitique du XXIe siècle selon vous ? La définition et la notion de géopolitique ne va pas changer : la géographie est une composante majeure de la politique et de l’histoire mondiale. Mais la vraie question est : qu’es- ce qui risque de changer dans la géographie qui pourrait influencer la politique ? Il y a notamment les problématiques de l’énergie et de l’eau. Par ailleurs, deux choses risquent de venir perturber fortement cette vision classique de la géopolitique : 1) le réchauffement climatique va avoir des conséquences sur la géographie, sur l’énergie. Par exemple des états vont être complément rayés de la carte (notamment des iles du Pacifique), il va y avoir

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Le signe d’un changement géopolitique par rapport au réchauffement climatique ?

des refugiés climatiques. Tout cela risque de perturber cette géopolitique. Le Gulf Stream est en train de ralentir du fait de la banquise qui fond, et dans certaines hypothèses du GIEC, il est possible que le Gulf Stream s’inverse, et s’il s’inverse, ça peut entrainer des conséquences sur certains pays qui sont aujourd’hui tempérés, des refroidissements ou d’autres conséquences climatiques majeures. Le sud de la France risque par exemple de se refroidir et connaitre une augmentation très forte des précipitations, et donc des inondations beaucoup plus importantes. Toutes ces conséquences climatiques sont très difficiles à prévoir, donc anticiper les conséquences géopolitiques est encore plus difficile. Ce qui est certain, c’est que ces changements climatiques vont être une des composantes de la géopolitique du 21e siècle.

le charbon par exemple. Ces ressources vont devenir des enjeux nouveaux de la géopolitique et risquent de créer de nouvelles tensions. Imaginons que l’on résolve le problème de stockage des éoliennes avec du charbon, alors la Pologne et la Belgique vont devenir de grands enjeux géopolitiques. Ou bien si on réussit à stocker cette énergie dans des batteries avec des graines de soja, alors tout le monde va vouloir se mettre à faire pousser du soja et plus creuser des mines, et c’est cette plante et sa commercialisation qui vont devenir de nouveaux enjeux géopolitiques majeurs. On ne sait pas quelle sont les innovations de demain. C’est pour cela que le pétrole est devenu un enjeu majeur du 20e siècle : car on a créé la voiture, l’avion etc… est ce que quelqu’un au 19e siècle aurait pu deviner que la géopolitique des pays du golfe allait devenir majeure au niveau mondial ? C’était impossible car on n’avait pas encore inventé le moteur a essence.

« Imaginons que l’on résolve le problème de stockage des éoliennes avec du charbon, alors la Une des questions qui se pose Pologne et la Belgique vont devenir maintenant, pour faire de la prospecde grands enjeux géopolitiques » tion sur la géopolitique, la hiérarchie des 2) L’innovation : imaginons que les découvertes qui vont être nécessaires, soit par rapport au réchauffement, ou par rapport aux énergies ou de nouvelles énergies renouvelables, impliquent des matières premières particulières, soit des nouvelles ressources, soit des anciennes qui étaient devenues obsolètes,

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puissances de demain est : où seront les innovations de demain ? En Chine, aux Etats-Unis ? Qui en profitera ? L’innovation est quelque chose de très imprévisible, c’est pour cela que je me garderai bien de faire des prédictions sur qui gouvernera le 21e siècle.

Aujourd’hui, en Russie, en Chine, en Iran, en Corée du Nord, depuis 2-3 mois, ceux qui se font arrêter, mettre en prison, suicidés, c’est des environnementalistes. En Iran, il y a deux écolos qui se sont « suicidés » en prison. En Chine, les gens qui se font arrêter c’est des gens d’associations de défense de l’environnement. Alors est-ce que ces gens gênent les pouvoirs publics parce que ça remet en cause leur vision productiviste de la société ? Comme c’est également le cas en Colombie, au Brésil… Les environnementalistes se font systématiquement descendre, comment s’ils étaient plus dangereux que les opposants politiques traditionnels. Est-ce que c’est le signe d’un changement géopolitique par rapport au réchauffement climatique ? Peutêtre. Ce n’est pas rassurant pour mes amis, mais c’est assez impressionnant. C’est peut-être un refus des Etats de voir le défi climatique, de le considérer, car ça perturbe l’aspect habituel productiviste ambiant. Les Etats n’ont aucune vision par rapport à la décroissance, sur le long terme… C’est aussi le signe de la perte de vitesse de la sociale démocratie qui laisse la place à des partis plus extrémistes. Le problème c’est qu’il n’y a plus de croissance, donc plus de fruits de croissance à redistribuer aux plus pauvres. La question qui se pose maintenant c’est : croissance ou décroissance ? Vous partez vivre seul sur une île déserte, vous n’avez le droit d’emporter que 3 objets avec vous, que choisissez-vous ? Une encyclopédie pour pas m’ennuyer, une usine de dessalement d’eau de mer pour survivre, un couteau pour me nourrir. Interview de Didier Rod, réalisée le 22 mars 2018


Environnement et Technologie

Grenoble, quelle politique écologique Guillaume Ouallet

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ric Piolle est le seul maire écologiste d’une ville de plus de 100 000 habitants… Quelle est sa politique en terme d’écologie ?

Le développement durable est une de vos priorités depuis votre élection en 2014. 50% des menus dans les cantines grenobloises sont désormais bio et locaux. Vous avez également développé les transports en commun, le nombre de vélos a doublé depuis 2014. En 2014, vous proposiez également de diminuer la vitesse sur les grands axes de circulation, qu’en est-il aujourd’hui ? Dans les cantines, un repas par semaine est aussi végétarien ! Sur la circulation, 49 communes de la métropole sont passées à 30 km/h en dehors de certains axes, au 1er janvier 2016. La base c’est 30 km/h, et uniquement certains axes à 50. De plus, nous avons œuvré pour la piétonnisation de la place Grenette.

dans des équipements plus efficaces. C’est une aide entre 800 et 1200€ qui vient se rajouter aux aides d’Etat. Nous avons encore des progrès à faire en terme de diffusion de l’information et de communication.

sible de faire en local il faut le faire, on ne peut pas attendre indéfiniment des initiatives nationales et mondiales ! Ce qui est problématique aujourd’hui dans notre société c’est qu’on est en permanence en train de décaler nos actions.

Quelles améliorations sur l’agriculture urbaine ?

On sait qu’on peut tous agir, à l’échelle individuelle comme à l’échelle collective sur un territoire. Mais il est vrai que sur certaines questions comme le nucléaire, c’est l’échelle nationale qui est concernée.

Programme « Jardinons nos rues » qui a permis aux habitants de se saisir de parcelles publiques, et de les cultiver. 80 parcelles ont été identifiées. Nous avons décidé de créer un verger par an. Pour végétaliser la ville, qui a perdu des arbres pendant 20 ans, nous avions le projet de planter 5000 arbres et nous en sommes déjà à 3400 !

Quelles améliorations sur le compostage ? La gestion des déchets se fait avec la métropole. La métropole continue de faire des formations et de diffuser à des coûts extrêmement bas des composteurs individuels. Elle a également mis en place des composteurs collectifs. Dans le domaine des déchets, on a franchi une grosse étape à l’été 2016 avec la création d’une filière de tri des plastiques.

Que pensez-vous de l’efficacité d’une politique écologique à l’échelle locale par rapport à l’échelle nationale ou mondiale ? Vous souhaitiez également réduire les poussières générées par les chauffages individuels en bois, qui en hiver polluent énormément… Nous avons mis en place une prime de conversion des équipements de chauffage au bois, pour les convertir

A l’échelle locale, il est possible de dépasser les étiquettes politiques et de faire des projets concrets. Nous sommes moins soumis aux lobbys qu’au niveau national où l’on voit bien que la puissance des intérêts financiers freine les politiques publiques. On a besoin de toutes les échelles. Tout ce qu’il est pos-

Avez-vous un modèle d’une ville écologique dans le monde qui vous inspire ? Tout dépend des sujets ! Sur le vélo par exemple, on s’inspire de ce qu’il se fait à Copenhague et à Amsterdam. Nous sommes en train de mettre en place une zone à trafic limité, nous nous inspirons de Nantes qui en a une depuis six ans. Sur le covoiturage, c’est un système qui existe depuis 25 ans aux Etats-Unis… On regarde le meilleur de ce qu’il se passe dans le monde et on l’applique à Grenoble ! Interview d’Éric Piolle, réalisée le 8 Janvier 2018

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Environnement et Technologie

ImpAct, créateur de solutions durables Dubois Emmanuelle

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lotilde Bignard, présidente d’ImpAct, nous dévoile comment passer à l’acte…

Peux-tu te présenter rapidement et expliquer ton rôle au sein d’ImpAct ? Je m’appelle Clotilde Bignard, j’ai 21 ans, et je viens de la région Rouennaise. Je suis la présidente d’Impact 2017-2018, j’ai bientôt fini mon mandat. L’année dernière j’étais aux projets Recycl’Art et Sensi’Jeunes.

Quels sont les principaux projets d’ImpAct ? Il y a neuf projets au sein d’Impact, qui touchent les trois piliers du développement durable c’est-à-dire social, environnemental et économique. Dans le social par exemple je parlerai de Ensemble. C’est un projet qui vise à l’intégration des réfugiés au sein de Grenoble. On organise des cafés-débats, des rencontres sportives, pour essayer d’enlever les préjugés, les barrières qu’il peut y avoir entre étudiants et réfugiés, qui ont le même âge et qui devraient pouvoir se rencontrer. Pour le pilier économique je vais parler de Recycl’Art. C’est le projet qui organise des ateliers de bricolage pour permettre aux étudiants et même à n’importe qui ayant un budget réduit, de venir construire un meuble avec des palettes recyclées. On lui fournit savoir-faire, outils, et bières pour qu’il puisse faire un meuble dont il sera fier. Pour le pilier environnemental, je vais parler de Ecofest, qui audite les événements et leur délivre un label. Le label Ecofest respecte un certain nombre de

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critères environnementaux, au niveau des déchets, de l’alimentation, de la sensibilisation… Environ 30 événements ont été audités cette année.

Quels types d’événements sont audités par exemple ? Il y a des événements typiques de GEM, le GEM Altigliss Challenge par exemple est audité, mais il y aussi des événements extérieurs à GEM, comme par exemple le Festival du cinéma Européen ou même des événements d’autres écoles de commerce comme le Star Trekk’ qui est organisé par l’ESCP, audité

par Ecofest. On a également des antennes dans les autres écoles de commerce. A l’EDHEC par exemple, ils ont une antenne Ecofest, à l’emlyon il y a aussi des personnes qui auditent sous le nom Ecofest.

Si tu devais résumer en une phrase le principal objectif d’ImpAct ? Je dirais que c’est promouvoir le développement durable à travers l’entrepreneuriat social.


Peux-tu me parler des nouveaux projets ou des nouvelles orientations que vous souhaitez mettre en place l’année prochaine ? Chaque année normalement on essaye d’en proposer, s’il y a un Impacteur, un membre d’Impact, qui a une idée de projet et qui respecte les critères d’Impact. Cette année il n’y en a pas eu, mais c’est comme ça qu’est né par exemple le projet Ensemble l’année dernière. L’Impacteur pitche devant l’asso son projet, et on décide ensuite de le développer ou non.

Est-ce que tu trouves que les Gémiens sont réceptifs à vos projets et sensibles à l’environnement et au développement durable ? Je dirais que les Gémiens sont réceptifs mais qu’ils ont toujours une image négative du développement durable. C’est ce qu’on essaye de faire changer. On trouve qu’il y a des évolutions, il y a de plus en plus de personnes qui prennent le Panier Terroir par exemple, ou qui participent aux ateliers Recycl’Art, mais c’est encore un début.

Tu penses que c’est trop contraignant pour eux d’adopter des nouvelles habitudes ? C’est trop contraignant, c’est toujours lié avec le côté « c’est cher », le côté « c’est juste pour faire genre mais on n’a pas vraiment un vrai impact », ou encore c’est pour être « bobo » ou « gaucho » et « en école de commerce ça n’a pas lieu d’être ».

Jean-François Fiorina a récemment tenu une conférence sur la stratégie de GEM, soutenant que GEM est engagée dans une démarche RSE, notamment pour réduire et maîtriser l’impact environnemental de leurs activités. Est-ce que vous percevez les actions que mène GEM et sontelles satisfaisantes pour toi ? On travaille beaucoup avec la personne qui est en charge de cet objectif « zéro déchet », qui est la responsable RSE de l’école. Déjà Impact réalise l’au-

dit de l’école, le bilan carbone tous les deux ans, c’est un de nos projets. Ils en sont assez loin quand même. C’est tout simple et bête mais rien que le tri n’est pas fait à la cafétéria ou dans les classes. Il y a encore plein de choses à faire, mais le fait qu’ils se soient donnés un objectif très ambitieux va les pousser je pense. Il y a ce côté challenge que les personnes de l’administration se sont mis en tête, que GEM veut être la première école à faire ça, donc c’est intéressant mais pour l’instant ils en sont assez loin.

A titre personnel, est-ce que tu souhaites t’investir ou travailler plus tard dans ce domaine ?

En quoi peut-on dire qu’ImpAct est innovante à travers ses projets ?

Interview de Clotilde Bignard réalisée le jeudi 12 avril

Je ne sais pas encore si je veux m’impliquer à 100 % dans un travail entièrement dédié à ça, par contre il est certain que je m’impliquerai dans une entreprise qui aura mes valeurs et qui sera dans une démarche RSE. Après pourquoi ne pas travailler dans la RSE ou le développement durable, je n’y suis pas fermée.

Par rapport au développement durable, on a beaucoup la vision de « on va tous mourir dans dix ans car on est en train d’épuiser toutes les ressources de la planètes », on a uniquement ce constat négatif. Je pense qu’à Impact on est innovant dans le sens où on va proposer des solutions concrètes et adaptées à chaque personne, pour que chacun puisse agir à son échelle, que ce soit les Gémiens ou les Grenoblois plus généralement.

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The Edge, le projet le plus vert et intelligent au monde Dubois Berger Emmanuelle

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as à Tokyo, New York, Londres ni Paris, mais à Amsterdam, vous pouvez trouver l’immeuble de bureaux le plus durable au monde, qui génère plus d’énergie qu’il n’en consomme. Il sait où vous vivez. Il sait quelle voiture vous conduisez. Il sait qui vous rencontrez aujourd’hui et combien de sucre vous prenez dans votre café. C’est The Edge, et c’est probablement l’espace de bureau le plus intelligent jamais construit, que s’est offert le cabinet de conseil Deloitte. Une journée à The Edge à Amsterdam démarre avec une application pour smartphone développée avec le principal locataire de l’immeuble, Deloitte. Dès la minute où vous vous réveillez, vous êtes connecté. L’application vérifie votre planning, et le bâtiment reconnaît votre voiture lorsque vous arrivez et vous dirige vers une place de stationnement. Ensuite, l’application vous trouve un bureau. Parce qu’à The Edge, vous n’en avez pas. Personne n’en a. Les espaces de travail sont basés sur votre emploi du temps : bureau assis, bureau debout, cabine de travail, salle de réunion, balcon ou « salle de concentration ». Où que vous alliez, l’application connaît vos préférences en matière de lumière et de température et adapte l’environnement en conséquence. L’autorité mondiale en matière de respect de l’environnement des immeubles, le Building Research Establishment (BRE), a décerné à The Edge le certificat « Outstanding BREEAM design ». Ce qui fait de The Edge l’immeuble de bureaux le plus durable au monde, et qui lui a valu le score de durabilité le plus élevé jamais atteint : 98,4 %. Les Hollandais

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ont une phrase pour ça : het nieuwe werken, ou grossièrement : la nouvelle façon de travailler. Il s’agit d’utiliser les technologies de l’information pour façonner à la fois notre manière de travailler et les espaces dans lesquels nous travaillons. Il s’agit de l’efficacité des ressources au sens traditionnel : les panneaux solaires génèrent plus d’électricité que les bâtiments ; mais il s’agit aussi de la meilleure utilisation de l’humain.

L’atrium est le centre gravitationnel du système solaire de The Edge. Des panneaux à mailles entre chaque étage permettent à l’air vicié du bureau de se répandre dans l’espace ouvert, où il s’élève et est exhalé à travers le toit, créant une boucle de ventilation naturelle. Les légères variations de chaleur et les courants d’air donnent l’impression d’être à l’extérieur. Même un jour de tempête, le bâtiment reste opalescent avec la lumière naturelle et les angles de verre. L’atrium et son toit incliné emblématique, inonde les espaces de travail avec la lumière du jour et fournit un cache sonore de l’autoroute adjacente et des voies ferrées.

Le bâtiment du futur a nécessité de nombreuses inventions. Plusieurs se démarquent. Les panneaux à LED, fabriqués par Philips spécifiquement pour The Edge, ont besoin d’un tel courant d’électricité qu’ils peuvent être alimentés en utilisant les mêmes câbles qui transportent les données pour Internet. Les panneaux sont également emballés avec des capteurs de mouvement, lumière, température, humidité, et infrarouge, créant un « plafond numérique » qui câble le bâtiment comme des synapses dans un cerveau. Au total, The Edge est équipé de quelques 28 000 capteurs. « Nous pensons que nous pouvons être le Uber des bâtiments », a déclaré Coen van Oostrom, directeur général d’OVG Real Estate, le développeur du bâtiment. « Nous les connectons, nous les rendons plus efficaces, et finalement nous aurons besoin de moins de bâtiments dans le monde. »

Une nouvelle façon de travailler « Un quart de ce bâtiment ne dispose pas d’espace de travail, c’est un lieu de rencontre », explique Ron Bakker, architecte de The Edge à PLP Architecture à Londres. « Nous commençons à remarquer que l’espace de bureau ne concerne pas tant l’espace de travail luimême ; il s’agit vraiment de créer une


communauté de travail, et de faire en sorte que les gens aient un endroit où ils veulent aller, où les idées sont nourries et où l’avenir est déterminé. » Environ 2 500 salariés de Deloitte partagent 1 000 bureaux. Le concept est appelé « hot desking », et il est supposé encourager de nouvelles relations, des interactions fortuites et, tout aussi important, une utilisation efficace de l’espace. Les bureaux ne sont utilisés que lorsqu’ils sont nécessaires. Certaines minuscules chambres de The Edge contiennent juste une chaise longue et une lampe, parfait pour un appel téléphonique. Il y a aussi des salles de jeux et des bars à café avec des machines à expresso qui vous rappellent combien vous aimez votre café. Les écrans plats massifs autour de chaque coin peuvent être synchronisés sans fil avec n’importe quel téléphone ou ordinateur portable.

Un tableau de bord pour tout gouverner Deloitte collecte des giga-octets de données sur l’interaction entre The Edge et ses employés. Les tableaux de bord centraux suivent tout, depuis l’utilisation de l’énergie jusqu’à la recharge des machines à café. Les jours où peu d’employés sont attendus, une section entière peut même être fermée, réduisant les coûts de chauffage, de refroidissement, d’éclairage et de nettoyage. La philosophie générale de Deloitte avec The Edge est que tout ce qui a un retour sur investissement de moins de 10 ans vaut la peine d’être essayé. Le plafond numérique était l’une des innovations les plus coûteuses. Deloitte ne voulait pas divulguer le coût, mais Erik Ubels, directeur de l’information pour Deloitte aux Pays-Bas, estime qu’il faudra 8,3 ans pour le récupérer. « Il n’y a aucun doute, dit Ubels, qu’à l’avenir tous les bâtiments seront connectés, en interne et à d’autres bâtiments. La question à plusieurs milliards de dollars est de savoir qui va le faire. Celui qui réussit sera l’une des entreprises les plus prospères au monde. »

Un parking électrique pour voitures

et vélos Lorsque vous arrivez à The Edge, l’entrée du garage est automatisée. Une caméra prend en photo votre plaque d’immatriculation, l’associe avec votre dossier d’emploi, et lève la barrière. Même le garage utilise des LED équipées de capteurs, qui s’illuminent à mesure que vous approchez, et diminuent lorsque vous partez. C’est aux Pays-Bas, donc un garage séparé pour les vélos et des chargeurs gratuits pour les véhicules électriques ne sont pas surprenants. Pas d’inquiétude, les managers ne peuvent pas accéder aux données personnelles des capteurs de The Edge et n’ont aucune idée du nombre de réunions que leurs salariés ont manquées cette année. Pour être sensible aux problèmes de confidentialité, Deloitte a interrogé les employés avant d’installer le scanner de plaque d’immatriculation. La grande majorité des répondants pensaient que c’était bien, à condition que cela facilite la vie au travail.

« Il n’y a aucun doute qu’à l’avenir tous les bâtiments seront connectés, en interne et à d’autres bâtiments. La question à plusieurs milliards de dollars est de savoir qui va le faire. Celui qui réussit sera l’une des entreprises les plus prospères au monde. » Erik Ubels, directeur de l’information pour Deloitte Propulsé par le soleil Le mur Sud est un damier de panneaux solaires et de fenêtres. Le béton porteur épais aide à réguler la chaleur, et les fenêtres profondément encastrées réduisent le besoin de stores, malgré une exposition directe au soleil. Le toit est également recouvert de panneaux. The Edge consomme 70 % moins d’électricité qu’un immeuble de bureaux typique, mais ce n’est que lorsque l’OVG a installé des panneaux sur les toits de certains bâtiments universitaires voisins que The Edge a pu se vanter de produire un résultat net énergétique positif, c’est-à-

dire qu’elle génère davantage d’énergie qu’elle n’en consomme, grâce à ses 6 000 mètres carrés de panneaux solaires. La démarche durable de The Edge est complétée par un système de récupération des eaux pluviales, qui servent à vider les toilettes du bâtiment, alimenter les terrasses végétalisées et les jardins alentours.

Un RoboCop pour le nettoyage Un petit robot sort la nuit pour patrouiller sur les terrains. Si une alarme se déclenche, l’automate équipé d’une caméra peut identifier le coupable ou faire savoir à la sécurité qu’il s’agissait d’une fausse alerte. Il navigue automatiquement ou peut être commandé par télécommande. Erik Ubels, de Deloitte, dit avoir remarqué des robots similaires dans les chantiers navals, avoir déniché le fabricant et demandé s’ils pouvaient être modifiés pour la sécurité du bureau. Pour un nettoyage plus intelligent, l’activité est surveillée par des capteurs intégrés dans des panneaux lumineux. Ainsi, en fin de journée, les personnes et les robots responsables du nettoyage peuvent se concentrer sur les zones les plus utilisées ce jour-là.

Un couloir écologique Oiseaux, chauves-souris, abeilles et insectes. Ce sont les voisins du bâtiment sur la terrasse exposée au Nord. L’OVG a travaillé avec les autorités d’Amsterdam pour établir un chemin continu de végétation qui soutient les insectes bénéfiques dans toute la ville. Les cabanes à oiseaux et les chauves-souris sont placées discrètement dans l’aménagement paysager. Ces tours soutiennent diverses espèces d’abeilles solitaires, qui bourdonnent autour des fleurs sur la terrasse publique.

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Environnement et Technologie

La Grande Barrière de Corail, un trésor à protéger Ouallet Guillaume

L

a Grande Barrière de Corail est située au nord-est de l’Australie. Recouvrant une superficie de 348 000 km² (semblable à la superficie de l’Allemagne), c’est le récif corallien le plus vaste au monde. C’est un espace naturel extrêmement riche qui lui vaut l’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1981. Cette richesse provient en particulier de la grande variété d’espèces y vivant : 4000 espèces de mollusques, 1500 de poissons, 400 de coraux, 240 d’oiseaux… La Grande Barrière de Corail abrite tant d’espèces qu’il est à la mer ce que la forêt amazonienne est à la terre : ainsi six des sept espèces de tortues marines présentes sur notre planète sont représentées dans la Grande Barrière. Son caractère exceptionnel provient également de ses 900 îles sur lesquelles la faune et la flore sont souvent abondantes. Mais aujourd’hui, la Grande Barrière de Corail est en danger. Un des principaux problèmes actuels est le blanchissement des coraux. Les coraux ont besoin pour survivre d’une symbiose, association d’êtres vivants : ils abritent des algues, les zooxanthelles, qui en échange

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leur donne de l’oxygène et des nutriments. C’est la présence de ces algues qui donne de la couleur aux coraux et surtout permet leur survie. En période de stress, qui s’explique par l’augmentation de la température et de l’acidité de l’eau, le corail expulse ses algues, perd alors sa couleur et meurt de faim, ne laissant plus que son squelette blanc. Il y a eu des périodes de blanchissement des coraux, en 1997 et en 2010, mais la plupart des coraux ont réussi à survivre car ils ont eu le temps de se recouvrir d’algues.

les espèces vivant dans la Grande Barrière qui sont concernées. Les six espèces de tortues sont menacées. La liste des poissons en voie de disparition s’agrandit. C’est le cas du requin-marteau halicorne, désormais en voie de disparition

Cependant, un blanchissement particulièrement important s’étalant sur les années 2016 et 2017 a été dévastateur, affectant principalement le nord de la Grande Barrière, où 63% des coraux sont déjà morts. Sur l’ensemble de la Grande Barrière, 93% des coraux connaissent un blanchissement au moins partiel. Les scientifiques annoncent que les périodes de blanchissement vont être de plus en plus fréquentes et que les coraux ne pourront plus s’en remettre comme c’était le cas jusqu’en 2010, puisque la fréquence de ces blanchissements ne leur donnera plus assez de temps.

Le réchauffement climatique provoque également un ensemble de troubles biologiques chez certaines espèces. Un exemple concret est le sexe-ratio de plus en plus préoccupant chez les tortues vertes : il y a de plus en plus de femelles. En effet, pendant l’incubation des œufs, la température a une grande influence sur le sexe de l’animal. 99% des tortues juvéniles sont désormais des femelles au nord de la Grande Barrière de Corail, où la situation est la plus critique. Le chiffre s’établit à près de 70% de femelles au sud, où la température est plus basse.

Au-delà des coraux, ce sont toutes

Le réchauffement climatique, surtout du fait de l’augmentation de la température de l’eau, est la principale cause de cette disparition progressive de la Grande Barrière de Corail. L’aggravation de phénomènes climatiques comme les ouragans joue également un rôle. Mais il y a aussi d’autres raisons qui expliquent une telle situation : l’activité portuaire en est une. Le Queensland, Etat de l’Australie bordé par la Grande Barrière, exploite du charbon, du gaz naturel et quelques autres ressources. Les grands ports d’Australie, comme Hay Point et Gladstone, exploitent massivement en mer et déversent ainsi régulièrement des déchets qui abîment sévèrement la


Grande Barrière. Le tourisme a également un impact non négligeable du fait du comportement de certains touristes qui jettent leurs déchets en mer et marchent sur les coraux. La présence de bateaux est aussi problématique, les allers-retours sont permanents dans des villes touristiques comme Cairns. La pêche est aussi un grave problème car elle affaiblit davantage les espèces, surtout lorsqu’il s’agit de pêche illégale sur des espèces protégées. Le requin-marteau halicorne précédemment évoqué est un exemple d’animal victime de surpêche. La pêche est aussi de manière indirecte néfaste aux coraux. Ainsi, la surpêche des requins a eu pour conséquence une perturbation de la chaîne alimentaire.

« Le grand espoir actuel pour améliorer la situation : l’innovation. » en 2015 que l’Australie en avait fait assez Une augmentation de prédateurs normalement mangés par les requins a entraîné une diminution du nombre de poissons herbivores, tels que le poisson-perroquet, qui est indispensable aux coraux car il se nourrit d’algues néfastes à leur développement. Jusqu’en 2004, la pêche n’était interdite que dans 4% de la Grande Barrière. L’interdiction concerne désormais le tiers de sa superficie. L’agriculture a également une part de responsabilité, par la présence d’agriculture intensive, en particulier dans le Queensland, avec l’utilisation et le rejet de pesticides dans l’océan. Enfin, la présence d’une étoile de mer, l’Acanthaster pourpre, qui prolifère dans la Grande Barrière (prolifération principalement due au changement climatique) et se nourrit des polypes de coraux, est responsable de la mort de nombreux coraux. Face à tous ces défis, que peut-on faire ? Bien sûr il faudrait essayer de régler le problème du réchauffement climatique à l’échelle internationale, mais les avancées sont encore très faibles… Pour ce qui est de l’échelle nationale, l’Australie a certes établi quelques réformes, concernant notamment le déversement des déchets, mais cela reste très insuffisant. Les doutes sur la possibilité de la part du gouvernement australien de régler les problèmes sont d’autant plus légitimes que Greg Hunt, ministre de l’environnement australien, a déclaré

pour la Grande Barrière de Corail, dont il a dit qu’elle serait bientôt dans un « meilleur état que depuis le début de la colonisation européenne ». Le grand espoir actuel pour améliorer la situation : l’innovation. Des solutions innovantes sont pensées, parmi lesquelles la mise en place d’un film protecteur biodégradable pour lutter contre le blanchissement des coraux. Ce film serait 50 000 fois plus fin qu’un cheveu humain et ferait office de barrière anti-soleil. Il permettrait de réduire la lumière du soleil de 30% ce qui diminuerait le risque de stress des coraux. Anna Marsden, directrice de la Great Barrier Reef Foundation, a cependant elle-même annoncé que le projet n’était pas réaliste et qu’il ne pourrait être mis en œuvre que sur des petites surfaces.

Science) a fait des recherches montrant que ces étoiles de mer évitaient les Charonia tritonis, mollusques communément appelés tritons géants. La population de tritons géants a fortement diminué. L’AIMS élève donc des tritons géants dans l’idée de les introduire dans l’océan et de chasser les étoiles de mer. La tâche se révèle cependant très compliquée. Les recherches actuelles se portent sur la capacité de développement des larves de tritons géants. Petite note optimiste : le gouvernement australien a annoncé en septembre 2017 un financement des recherches.

Contre l’étoile de mer invasive, l’AIMS (Australian Institute of Marine

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Culture et tourisme

Histoire de l’innovation et des Techniques en France (jusqu’au XIXème siècle) Banas Quentin

E

n 2016, 16 200 demandes de brevets ont été déposés en France ; ce qui en fait l’un des pays les plus innovants au monde ; ce savoir-faire scientifique et technologique n’est pas nouveau, la France a connu au cours de son histoire de nombreux novateurs. Dès l’Antiquité l’actuel territoire français était déjà une terre d’innovation notamment dans le domaine de l’artisanat. Ainsi les forgerons et les ébénistes gaulois ont par exemple inventé le tonneau cerclé de métal très vite indispensable pour transporter des liquides comme la cervoise (ancêtre de la bière), la cotte de mailles dont l’utilisation se répand partout en Europe ou encore la charrue à roues qui remplace l’araire pour labourer les champs et qui sera reprise par les Romains. En outre, avec la romanisation, la Gaule a bénéficié des techniques romaines notamment en termes de construction grâce à l’apport des cinq machines simples que sont la poulie, le treuil, le levier, le coin et la vis.

La chute de l’empire romain marque le début du haut Moyen Age (512-1024) ; cette nouvelle période marquée par l’expansion du christianisme, la naissance de nouveaux royaumes et les invasions vikings, sarrasines et hongroises est pauvre en innovation majeure. A noter tout de même l’apparition des premiers vitraux en France et en Italie à partir du VIème siècle ainsi que l’introduction des chiffres arabes et de la numérisation décimale en Europe à la fin du Xème siècle par Gerbert d’Aurillac, futur Pape Sylvestre II. C’est surtout durant le Moyen Age central (1025-1300) que les sociétés occidentales évoluent. Les populations font plus que doubler grâce aux nouvelles techniques agricoles qui se répandent comme le moulin hydraulique ou le collier d’épaules pour l’attelage et la diffusion d’outils en fer.

de peste et la déclaration de plusieurs guerres dont l’interminable guerre de cent ans. Une nouvelle ère démarre ensuite, celle des grandes découvertes, de la remise à l’honneur de la culture antique et de la diffusion de l’information par l’imprimerie. En France, la Renaissance est une période très riche en bouleversements notamment d’un point de vue technique et scientifique. A commencer par Blaise Pascal qui a su prouver l’existence d’une pression atmosphérique grâce à sa célèbre expérience des liquides et qui est, en 1642, à l’origine du calcul mécanique en inventant la machine à calculer. Quelques années après, un autre Français va s’illustrer grâce à ses travaux sur la machine à vapeur : Denis Papin. En 1690, il crée le premier cylindre piston à vapeur qui sera repris pour fabriquer la première machine à vapeur moderne.

Illustration d’une roue à aubes

Astrolabe planisphérique, fait en Al-Andalus, 1067.

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En plus de l’évolution de l’agriculture, la France connait durant cette période un grand novateur du nom de Pierre de Maricourt. Ce dernier est le premier Européen à concevoir le compas magnétique, qui permet aux navigateurs de tenir un cap beaucoup plus facilement, et l’astrolabe qui donne la possibilité de lire l’heure en fonction de la position des étoiles et du soleil. Le Moyen Age se termine enfin de nouveau avec une période noire marquée par l’épidémie

Pascaline

S’ensuit l’illustre Siècle des Lumières marqué par l’Encyclopédie, aussi appelé Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, dirigé par D’Alembert et Diderot. Cette période est sans doute en France la plus riche en avancées techniques et scientifiques et va ouvrir la voie à l’ère industriel grâce aux différents usages de la machine à vapeur. L’ingénieur militaire Nicolas Joseph Cugnot va d’ailleurs être le premier à


l’utiliser pour concevoir à partir de 1769 le premier véhicule automobile de l’histoire. D’un autre côté Claude de Jouffroy d’Abbans invente, lui, à partir de 1776 les premiers bateaux à vapeur et bateaux à roues à aubes. Après la terre et l’eau, la France a également pu voir le premier voyage par les airs, le premier vol d’un être humain en 1783 grâce à la montgolfière des frères Montgolfier qui exploite la poussée d’Archimède pour s’élever. L’Empire britannique suivait avec attention les développements des inventions françaises qui terrifiaient le premier ministre William Pitt le Jeune car en plus du véhicule automobile de Cugnot, du navire à vapeur de Jouffroy d’Abbans et des ballons des Montgolfier, la France voit émerger les calculs de Lagrange, Bélidor et Laplace, la poudre de Lavoisier ou encore les canons de Gribeauval.

La révolution industrielle est donc clairement entamée mais le XVIIIème siècle ne s’arrête pas là. Les frères Chappe inventent en 1793 le sémaphore, un procédé de communication de l’information à distance. Il s’agit des premiers entrepreneurs des télécommunications de l’histoire de l’humanité. Deux autres inventions vont bouleverser le quotidien de la population : La première est celle de la boite de conserve, une méthode de

conservation des aliments en les stérilisant par la chaleur dans des contenants hermétiques et stériles, crée en 1795 par Nicolas Appert. La seconde concerne le gaz d’éclairage expérimenté par Philippe Lebon avec son Thermolampe, breveté en 1799 et qui est un appareil destiné à l’éclairage et au chauffage à partir de gaz obtenu par distillation du bois. Enfin, le XIXème siècle continue de voir se répandre et évoluer les usages de la machine à vapeur à l’image de l’expansion des zones industrielles. Durant cette période les moyens de transports font un bon en avant grâce en 1832 à l’hélice marine de Frédéric Sauvage capable de propulser un navire ou en 1873 avec la commercialisation de la première véritable voiture à vapeur, l’Obéissante, par Amédée Bollée capable de transporter douze personnes à une vitesse de pointe de 40km/h. Ce siècle a également vu plusieurs avancées scientifiques majeures tels que le vaccin contre la rage mis au point par Louis Pasteur en 1885 et la découverte de la radioactivité par Henri Becquerel en 1896 dont les travaux seront complétés par ceux de Pierre et Marie Curie dès l’année suivante. La France est ainsi rentrée dans le XXème siècle comme l’un des pays ayant une des plus riches histoires de l’innovation, de la science et des techniques.

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Culture et tourisme

A la rencontre d’une peintre grenobloise Guillaume Ouallet

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lisabeth Montreuil, dite Elisa, est une peintre grenobloise. Elle expose son travail sur l’île d’Oléron et plus rarement sur Grenoble.

l’île d’Oléron où je me rends régulièrement.

Comment avez-vous décidé de vous mettre à la peinture ? Très jeune j’étais passionnée par le dessin. Malgré les réticences de mes parents j’ai fait les beaux-arts à 18 ans. Ensuite je suis devenue professeur de dessin au collège et au lycée, pendant trois ans. Puis j’ai travaillé dans des agences de publicité, avant d’être employée en tant qu’éducatrice dans un centre d’handicapés physiques. Ainsi, j’ai toujours fait de la peinture en parallèle, je peins depuis quarante ans et maintenant que je suis à la retraite j’ai plus de temps pour me consacrer à la peinture.

Quels thèmes abordez-vous quelles sont vos inspirations ?

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A ce propos justement, une de vos originalités est de mêler l’abstrait et le figuratif. Pourquoi ce choix ?

Vous inspirez-vous d’autres artistes ? J’ai beaucoup travaillé avec Max Laigneau, peintre grenoblois qui faisait des huiles très colorées, très structurées. Cela m’a aidé à structurer mon travail.

et

J’aborde des thèmes différents que je travaille par période. Par exemple en 2005, je travaillais sur des coquillages et des cailloux. J’ai aussi peint beaucoup de chevaux, de poupées, de marines, de paysages… Pour m’inspirer je prends des documents, comme des photos, des cartes postales… je m’inspire aussi beaucoup de paysages, et en particulier de

Je travaille beaucoup au couteau, même si parfois je reprends un peu le pinceau. Le couteau permet de faire des choses moins finies et moins détaillées. J’essaie de simplifier les choses, la photo existe et mon objectif n’est pas de la refaire !

Pourquoi avez-vous fait le choix du pastel et du couteau ? J’ai toujours fait de la peinture à l’huile mais désormais j’utilise en effet surtout le pastel, qui est plus immédiat.

J’ai toujours envie de me raccrocher à quelque chose, j’ai du mal avec l’abstrait pur et dur… mais avec le figuratif pur et dur aussi !

Combien de temps vous faut-il pour peindre une toile ? Il me faut entre dix et vingt heures… en sachant qu’il est fréquent d’en rater !


L’art qui intrigue Ouallet Guillaume

Q

u’est-ce que l’art ? L’art est une notion très vaste qui n’est pas facile à définir… Toute création estelle une œuvre d’art ? Ou faut-il autre chose pour qu’elle devienne une œuvre d’art ? Alors que pendant très longtemps, l’art était un domaine borné où peu de divergences étaient accordées, sous peine des plus vives critiques, l’art contemporain s’affranchit des frontières et s’autorise toutes les extravagances. Ainsi il existe des œuvres parfois burlesques, qui amusent ou agacent, et remettent en cause la définition que l’on peut se faire de l’art. Une œuvre d’art doit être immortelle. C’est une première idée commune que nous avons, portée par des philosophes comme Hannah Arendt, pour qui l’utilité de l’art réside avant tout dans son caractère durable. Or en 1968 est apparue une nouvelle forme d’art, le land art, dont le principe est de faire une création à partir d’éléments naturels. Nombre de ces œuvres sont éphémères car elles sont justement en connexion avec une nature changeante. Un exemple est « Spiral Jetty », réalisée par Robert Smithson en 1970. Cette spirale constituée entre autres de boue et de roches est aujourd’hui méconnaissable du fait des changements naturels.

bler être la condition première de l’attribution de la valeur d’œuvre d’art à une création. Pourtant chacun considère que le célèbre « Carré noir sur fond blanc » (1915) de Kasimir Malevitch est une œuvre d’art. Le but de Malevitch à travers cette toile était de créer une œuvre vide de sens. Son œuvre est, elle existe, mais elle ne signifie rien, elle ne représente rien et elle a été conçue justement pour n’avoir aucune signification. Mais cette création n’est-elle pas une œuvre d’art parce qu’elle a finalement tout de même une signification ? En effet, de manière contradictoire, n’a-t-elle pas un sens précisément parce qu’elle a été pensée pour ne pas en avoir ?

leur guise. C’est alors encore plus qu’une simple intervention du public, l’artiste n’est plus propriétaire de son œuvre puisqu’elle peut être changée en permanence par le public.

L’art moderne, par certaines œuvres particulières, dépasse donc largement les limites données par une définition communément admise de l’art. Personnellement je considère qu’une œuvre d’art est une création qui a été pensée et dont le but était justement qu’elle soit une œuvre d’art. Mais après tout, chacun doit avoir sa propre définition de l’art…

Une œuvre d’art est séparée du public, qui ne fait qu’observer. Allan Kaprow est l’inventeur du « Happening » : l’art peut désormais être compris comme une mise en scène impliquant la participation du public.

« Une œuvre d’art doit être immortelle. »

Une œuvre d’art doit avoir un sens. Deuxième idée commune qui peut sem-

Pour Allan Kaprow, l’art et la vie se confondent. Son œuvre « Yard » (1961) met en place 40 tonnes de pneus. Le public est invité à se déplacer sur les pneus à volonté et même à changer de place les pneus, à transformer l’œuvre à

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Culture et tourisme

Pour un café de la poésie Roussel Louis-Nicolas

Qu’est-ce que l’art ? Qu’en est-il de cet art grenoblois ? Saviez-vous qu’il nous entoure, qu’il est tout proche de nous ? Laissez-vous emporter par les mots et les vers de Saïd sur le cours Berriat…

En quelques mots, qui êtes-vous Saïd Taleb ? Je suis quelqu’un de très sociable, j’aime beaucoup le contact, être entouré de gens. Je suis quelqu’un qui ne peut pas vivre seul. Pour moi, la solitude peut être une souffrance. Je suis très proche des gens, à commencer de ma famille. J’aime bien cette citation : « quand on est entouré, on a peur des autres, quand on est seul, on a peur de la solitude ». Je suis un amoureux de tout, je suis un amoureux au sens large du terme, au sens lyrique. J’aime les belles choses, les mots, l’écriture, la littérature, le cinéma, le théâtre… tout ce qui peut m’apporter quelque chose. J’aime le contact avec les gens, je pense être très chanceux de pouvoir faire un métier en contact avec les gens, avec des jeunes (dans la restauration). D’où ma formation dans la communication, je pourrais travailler dans tout métier en lien avec la communication. J’ai un grand plaisir à travailler avec des jeunes qui font la fête et qui m’apportent leur joie de vivre. Et pour terminer en un mot : je suis rêveur. Une simple tasse de café peut me faire rêver (cf le poème sur le café), un livre peut me faire rêver, une pièce de théâtre peut me faire un rêver, un film, une conversation…

Quelle formation avez-vous suivie ? Quel a été votre parcours ? De formation littéraire, diplômé de l’université Grenoble 3 Stendhal, j’ai toujours été passionné de littérature, de po-

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Une odeur de café et de papier Une odeur d’un café au lever du jour Une odeur de papier avec la poussière tout autour Avant d’ouvrir la porte pour commencer une nouvelle journée Comme on ouvre un livre pour lire une nouvelle histoire Une odeur de café qui réveille des souvenirs enfouis par les années Une odeur de papier qui rappelle les premières histoires Une odeur d’un café pour célébrer l’amitié Une odeur de papier qui donne des idées L’encre et le café qui rappellent l’instant d’un soir Rester des heures éveillé en cherchant les mots dans le noir Noircir du papier avant le lever du jour et les premières odeurs du café Commencer une nouvelle journée qui deviendra un souvenir Comme ces odeurs du café et du papier.. (...) Saïd Taleb ésie, de romans, de théâtre, d’histoire, d’écriture, d’écrivains, de cinéma depuis mon plus jeune âge. Ma formation en communication et journalisme n’a pas du tout été une surprise. Après ma licence en journalisme, j’ai fait un master de recherche dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication, en m’orientant vers la presse écrite. J’étais plus attiré par la presse écrite que par l’audiovisuel, car j’ai toujours pensé à l’après, à l’édition, à un recueil, un roman… Le journalisme a toujours fait partie de moi. Quand j’étais à l’institut de la communication et des médias, je tenais une chronique d’actualité un peu humoristique dans le journal de l’université. J’ai écrit quelques articles dans la presse régionale, dans le Dauphiné Libéré, j’ai publié plusieurs articles dans la presse quotidienne algérienne puisque je suis d’origine algérienne, et mon mémoire de thèse touchait aussi à la presse algérienne et à la liberté d’expression dans ce pays.

Comment vous est venue cette passion les livres et la poésie ? C’est venu de mon oncle qui me parlait tout le temps des écrivains, des poètes, des livres… Et pour lui, c’était vraiment merveilleux, pour lui, c’était des gens extraordinaires. En fait, il a fait travailler mon imagination. Il y avait toujours des livres chez lui, il me donnait des livres à lire… En voyant la passion et le respect qu’il avait pour ces écrivains et ces poètes, j’ai fini par moi aussi les considérer comme des légendes, depuis mes 10 ou même avant. Il me posait des questions de culture générale, il m’encourageait, poussait ma curiosité à son maximum, m’achetait des livres… C’est tout ça qui m’a poussé à m’intéresser à la poésie. Plus tard, je me suis demandé si je ne m’étais pas mis à la poésie et à la littérature uniquement pour prouver que je pouvais être quelqu’un à ses yeux. Je pense que je suis sur la


questions de culture générale, il m’encourageait, poussait ma curiosité à son maximum, m’achetait des livres… C’est tout ça qui m’a poussé à m’intéresser à la poésie. Plus tard, je me suis demandé si je ne m’étais pas mis à la poésie et à la littérature uniquement pour prouver que je pouvais être quelqu’un à ses yeux. Je pense que je suis sur la bonne voie. Aujourd’hui il n’est plus de ce monde et je pense que le premier livre que je publierai sera un bel hommage pour lui. Heureusement, il a lu mes premiers essais avant de mourir, il a su que j’étais sur le chemin de l’écriture, il a pu partir tranquille. Mais aujourd’hui je me dois continuer à travailler sur ce projet d’écriture, c’est une promesse que j’ai faite. On écrit toujours pour quelqu’un, on écrit toujours pour quelque chose. On écrit peutêtre pour une cause, pour quelqu’un, pour une femme, pour un proche… Le premier livre, je le lui dois.

Comment en êtes-vous venu à monter votre propre affaire et à préparer des tacos et des kebabs ? Quand j’étais étudiant, je me suis dit « il faut que je trouve un boulot ». Je voulais me libérer financièrement, je ne voulais pas rester une charge pour ma famille. Il fallait quelque chose que j’aimais pour ne pas galérer. J’ai été chef d’équipe dans un supermarché, mais je n’y suis resté qu’un mois car il y avait trop de choses qui ne me plaisaient pas. En voyant comment les gens étaient traités etc, ça ne correspondait pas à mes valeurs humanistes. Ça n’était pas en accord avec ma sensibilité, avec ma personnalité. Il fallait quelque chose qui me passionne. J’ai toujours aimé cuisiner, faire le marché, sentir les épices… Quand j’étais étudiant à l’institut de la communication, je passais tous les jours devant une pizzeria dans laquelle je m’arrêtais parfois manger quand je n’avais pas trop de temps. J’ai sympathisé avec le gérant qui était d’origine italienne. On discutait, et puis un jour quelqu’un m’a dit que le gérant vendait la pizzeria. Je n’avais pas du tout les moyens de reprendre une telle affaire, j’avais juste de quoi manger, m’acheter des livres, me loger et étudier. Pourtant un jour, je me suis arrêté à la pizzeria et j’ai dit « j’achète ». Alors on m’a fait un bon prix comme je connaissais

le gérant. J’ai vu mon banquier et je lui ai parlé du projet. Il n’était pas convaincu à la base, mais je lui ai dit que je pourrais embaucher quelqu’un pendant que j’étais encore étudiant. Dès le départ, j’avais comme projet de faire un salon de thé littéraire où j’inviterais des poètes, où il y aurait des soirées musicales, des soirées de lecture de poèmes... A l’époque, dans ce petit magasin, je ne pouvais pas faire ça, mais j’avais une bonne clientèle d’étudiants. Mon oncle m’a avancé une somme d’argent qui était un apport et au bout de deux mois le projet a abouti et j’ai acheté l’affaire. Donc j’ai été auto-entrepreneur très jeune, en même temps que j’étudiais. Je n’avais pas beaucoup de cours et en parallèle j’avais un salarié. J’avais un planning très précis. Je gérais vraiment l’affaire. Puis, j’ai pris un associé pour me décharger un peu de tout ça et pour me consacrer à ma thèse en même temps que je remboursais le crédit. Puis, j’ai trouvé cette affaire sur le cours Berriat, j’ai vendu la pizzeria, j’ai remboursé le crédit et je suis venu. Et je ne me suis pas installé ici au hasard, je voulais travailler avec l’école de commerce. Car travailler avec les étudiants, c’est vraiment un plus. S’il n’y avait que le coté commercial, sans ce contact avec les étudiants, je ne pourrais pas faire ce métier. Mon truc, mon oxygène à moi, c’est le lien, ce privilège de travailler avec les étudiants. Au contraire, faire grossir un chiffre d’affaire et réfléchir a des stratégies pour augmenter le profit ne m’intéresse pas. Pour répondre à ta deuxième question, je dirais que je préfère le tacos, car malgré que j’ai fait de la pizza, je ne suis pas vraiment fan de pizza. Je ne mange pas beaucoup de kebab. Ici, j’ai travaillé deux ans sans kebab, ce sont mes clients qui m’ont imposé le kebab. Je n’aimais tellement pas ça que j’avais fait le choix de ne pas vendre de kebab. Mais c’est le business qui m’a obligé à proposer du kebab, je n’aurais pas pu pas travailler sans.

D’où vous vient votre inspiration ? Ce qui m’aide beaucoup c’est la musique. La plupart du temps, quand j’écris, c’est avec de la musique. C’est rare que j’écrive sans mettre mon casque. Car le

casque ça me permet de m’isoler du monde extérieur. Ce casque et cette musique me projettent dans un autre espace, ils me permettent de voyager. Ils me permettent de me déconnecter de l’endroit où je suis. Je suis dans le poème, dans l’écrit que je suis en train de rédiger. J’écoute de la musique très sentimentale, très douce. J’aime le piano et la flute, parfois associés avec le violon. Le violon il t’interpelle, il joue avec tes sentiments tu vois ? J’adore la musique classique mais je n’en écoute pas souvent. Je tape simplement « musique douce piano » ou autre sur google. J’écris quand l’inspiration me vient, ça peut être l’après-midi au travail, chez un ami… Mais j’écris surtout le soir en rentrant du travail. Je rentre très tard, généralement vers 2h du matin, je me douche, me repose un peu et puis j’écris. J’écris ou je lis selon les moments, selon mes envies. Je me fixe généralement un objectif d’écriture de deux heures, je me couche donc généralement vers 4h30. Je ne dors pas assez. Mais la nuit m’aide à écrire, elle m’inspire, m’ouvre les portes d’un monde à part. Je m’y sens bien, tranquille. C’est mon temps, mon espace à moi quoi.

Comment voyez-vous votre futur ? Avez-vous des projets en tête ? Je suis régulièrement l’activité de mes amis écrivains et je sais qu’eux me suivent aussi. Quand je vois de vrais encouragements comme ça, ça motive. J’ai un très bon ami écrivain à Paris qui a déjà édité une vingtaine de livre et deux-trois qui écrivains qui me poussent à publier mon premier manuscrit, à écrire mon histoire, à la libérer, à la finir, à la présenter au monde. Il y a une maison d’édition qui m’intéresse beaucoup, dont je connais la ligne éditoriale, qui a donné sa chance à de nombreux jeunes écrivains passion-

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l’information est plus fiable, l’information publiée est vérifiée. Aujourd’hui sur internet, on est tous journalistes, l’information circule beaucoup plus vite qu’avant. Moi je vois cette évolution du bon côté. Il n’y a pas si longtemps que ça, je cherchais encore où publier mes articles, mes points de vue, mes poèmes… Aujourd’hui, j’ai ma propre page

« Bientôt on ne parlera plus que d’un média : les réseaux sociaux et internet »

nés. Acte Sud, c’est une maison d’édition très sérieuse, très connue… J’aime bien leur ligne éditoriale. Je crois que je vais leur envoyer mon manuscrit, un roman. Mais mon premier livre, mon hommage à mon oncle, sera un recueil de poésie. Le roman s’appelle Le silence des montagnes, il est encore en chantier. Ça serait un peu difficile de donner une date pour l’édition. Aujourd’hui, je ressens véritablement le besoin de publier, pour me sentir bien dans ma peau, il faut vraiment que cela arrive, quitte à aller dans une petite maison d’édition. J’ai des amis qui ont déjà été édité, et je sais qu’ils vont finir par appuyer mon projet et faire en sorte que ça se produise.

Que pensez-vous de l’évolution actuelle des médias ? Je m’intéresse beaucoup à cette problématique. Bientôt on ne parlera plus que d’un média : les réseaux sociaux et internet. Des gens prédisent que dans 30 ans la télévision va disparaitre. Moi je suis prêt à parier que ça se produira encore plus rapidement. Regarde comment les appareils photos ont disparu ! Aujourd’hui, tout se fait via les smartphones et internet. Maintenant, il est vrai que tout ce qui est sur internet n’est pas vrai, qu’il faut trier, qu’il faut faire attention. France télévision, on peut déjà plus leur faire confiance, c’est des chaines publiques, c’est plus crédible,

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Facebook ! J’ai des gens qui me suivent au Liban, au Mexique, au Canada, au Maroc, en Italie… et ça me fait énormément plaisir. Ma page me donne une certaine liberté. J’ai des idées, je les écris et en 30 secondes elles sont disponibles. Je n’ai pas besoin de connaitre un rédacteur en chef et que ce dernier reconnaisse mon talent. Internet est là pour plus de liberté. Quoi qu’on dise d’internet et des réseaux sociaux, le positif prend toujours l’avantage sur le négatif. J’ai des nouvelles d’amis qui sont un peu partout en quelques secondes, en quelques secondes on échange, on discute. J’ai rencontré plein d’écrivains sur internet. C’est vraiment formidable. On a la même passion, on a l’écriture en commun. J’ai appris plein de choses sur internet, je m’autoforme tous les jours sur internet. Aujourd’hui, je regarde des conférences sur internet, c’est comme si j’étais à l’université. La presse écrite est dépassée, elle est obligée de passer sur internet, elle connait une vraie crise financière. Les médias aujourd’hui c’est internet, c’est les réseaux sociaux.

Vous partez vivre seul sur une île déserte et n’avez le droit d’emporter que 3 objets avec vous, quels sontils ? De quoi lire, de quoi écrire et du café. Il y aura certainement de l’eau parce que c’est une île (rires). Je finirai toujours par trouver un fruit ou me débrouiller comme Robinson Crusoé pour manger, mais j’aurais besoin de café, de livres et de quoi écrire. Je pense que je reviendrai avec des bouquins vu le temps que j’aurai franchement, et avec ça je ne vais pas m’ennuyer c’est sûr ! La page Facebook de Saïd déjà suivie

par près de 700 personnes : Le Journal de Saïd Taleb. On peut y trouver régulièrement poèmes, citations et pensées qui sont appelées à être partagées, commentées, débattues… Interview de Saïd Taleb réalisée le 28 mars 2018



SPORT

Altigliss : L’association qui se cache derrière l’événement Callens Pierre-Antoine

A

ltigliss est l’événement incontournable de la compétition du sport de glisse pour les étudiants français. Ayant organisé cette année la 19ème édition, le GEM Altigliss Challenge est connu de tous. Cependant, avant d’être un événement, Altigliss c’est une association de GEM, animée par des étudiants férus et passionnés de sport de montagne. Partons donc à leur rencontre!

L’association Altigliss, c’est quoi ? C’est un groupe d’amis avant tout, composé de 66 amis qui travaillent ensemble à la réalisation d’un projet : La coupe du Monde de ski des étudiants : Le Gem Altigliss Challenge. Cependant, il n’en a pas toujours été ainsi : avant, cela s’appelait Olympub, et l’événement organisé n’était pas annuel. L’association existe depuis une vingtaine d’années. Avant, l’événement ne se déroulait pas nécessairement à Val d’Isère, en fonction des contrats. Depuis 6 ans, cette station est devenue le lieu officiel de l’événement, et c’est l’image de marque autour de ce partenariat que nous souhaitons développer et mettre en avant.

Si on devait résumer ce qu’est le GEM Altigliss Challenge ? Il s’agit d’une semaine de compétition inter-écoles, ouverte à tous ! Plusieurs compétitions y ont lieu : le Challenge ski, qui s’adresse aux professionnels de la glisse, le Challenge Montagne, ou l’on s’emploie davantage à la découverte de la montagne et du domaine, et le Challenge Village, ou les non-pratiquants des sports de glisse peuvent concourir au travers d’activité ludiques sur le village. Plus que tout, c’est aussi une semaine de détente entre potes conciliant passion du sport, musique, joie de vivre et cadre idyllique. C’est également l’occasion transmettre des valeurs qui nous sont chères : la pratique du Handisport, le respect de l’environnement ainsi que l’Entreprenariat au travers des partenariats tissés et de la présence de professionnels. Concernant le Handisport, nous promulguons le trophée des valeurs , qui est une journée entière alloué aux étudiants valides qui se mettent en condition d’un handicap pour le comprendre de l’intérieur. On a des parrains qui

viennent, comme par exemple Jérome Elbrycht, qui avaient gagné les Xgames Aspen. C’est quelque chose que l’on souhaite développer davantage, pour en faire un trophée à part entière : Amener des équipes handicapés, que ce soit ouvert à tous.

Comment s’organise un tel événement ? C’est un événement sur le long terme, qui commence en mai de l’année précédente, sur 9 mois. Il repose sur le travail des années précédentes, comme par exemple avec les contrats qui ont été convenus. Pour ce faire, nous avons plusieurs pôles : le bureau qui se charge de la supervision et de l’administratif, les commerciaux qui vont aller démarcher des écoles pour trouver des participants en organisant de grandes tournées en van. Par exemple, une école canadienne est venue, mais également des équipes suisses (HEC Lausanne). La communication et également le pôle partenariat, qui sont la colonne vertébrale de l’événement. Enfin, il y a le pole Event, qui est le cœur de chaque évènement qui ont lieu, comme par exemple le Ride Her First, une compétition de cascades par des professionnels se tenant durant le GAC. Le club des sports de Val d’Isère aide aussi énormément d’un point de vue logistique pour les courses., les pisteurs ... GEM est également un gros partenaire.

Quels sont vos objectifs futurs pour l’événement ? Nous faisons face à un gros questionnement : Fait-on venir plus de parti-

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ou améliorons-nous la qualité de l’événement ? C’est très difficile de concilier les deux, par soucis de temps. La priorité est finalement misée sur la deuxième option ! L’objectif à terme est vraiment de proposer un événement all exclusive haut de gamme.

L’Alti-Startup a pris place cette année durant l’événement. Pouvez-vous nous en dire plus concernant cette initiative ? C’est un projet tout jeune qui passé sa deuxième année, et que l’on souhaite vraiment développer. Cela permet de donner des opportunités aux étudiants : rencontrer des partenaires, monter leurs boîtes… On voit qu’il y a des résultats donc ça nous motive davantage ! De plus, ça s’inscrit dans l’ADN de l’école, en plus d’être gratifiant pour l’asso.

Avez-vous d’autres projets en parallèle du GEM Altigliss Challenge ? L’asso s’occupe d’autres évènements plus mineurs : Tout d’abord, la Bourse au ski qui se tient au début de l’année. Cela permet de marquer l’identité de l’événement. mais également de proposer des skis d’essai et d’occasion qui sont vendues aux étudiants à prix cassés, ce qui permet de rendre l’événement accessible à tous. Il y a également la parad’Ice, une soirée étudiante au-dessus de la Bastille, qui permet de véhiculer l’identité de l’asso. C’est surtout l’occasion de mettre ne situation le staff, ainsi que la cohésion du groupe en vue de la gestion des équipes pour l’événement final. Les Altigliss Tours, Des groupes de 10 personnes partent en van dans des régions désignées pour visiter les écoles et faire la promotion d’Altigliss. Au total, 45 écoles ont participé cette année (Ecole d’ingénieur, de commerce, universités…) avec tout type de profils, ce que souhaite l’asso, qui veut vraiment prôner la diversité, avec des étudiants de tous horizons. Enfin, le Criterium est la Coupe du monde de ski a val d’Isère, ou l’on met à disposition nos staffeurs. C’est dans

la continuité du partenariat entre l’asso et la station.Cela se passe bien avant le GAC, ce qui permet non seulement une relation gagnant-gagnant, mais aussi de familiariser les 1A à la station.

Projetez-vous de mettre en place d’autres événements ? Pas spécialement, c’est déjà assez intense. La priorité, ça reste le GAC qu’on souhaite constamment améliorer.

Comment fonctionne votre asso ? Nous sommes organisés avec un bureau : 1 président, 1 Vice-P, des respos dans les domaines Communication, Partenariats et Commercial. Ils sont très en lien avec nos partenaires, il s’agit là de différents postes à grandes responsabilités. De plus, A peu près 30 personnes rejoignent chaque année l’asso. Beaucoup de personnes sont intéressées par Altigliss, notamment par la discipline dans laquelle nous nous inscrivons. Cela renforce énormément notre motivation.

Quelles difficultés avez-vous rencontré de façon générale ? Tout d’abord dans les partenariats, à savoir pour les renouveler mais aussi démarcher. Le budget dépend essentiellement du travail des partenariats, et il peut changer à la hausse comme à la baisse. La difficulté c’est de convaincre les entreprises qu’elles ont un intérêt à participer. La gestion des imprévus au niveau de l’événementiel a également été compliquée, on doit faire preuve d’une réelle réactivité que ce soit au niveau du matériel, mais aussi de la fatigue chez les staffeurs qui est peut être occasionnée : En effet, On travaille H24 pour les étudiants, afin de répondre au mieux aux demandes. On essaie d’anticiper au mieux pour éviter ce genre de problème. La météo reste aussi une variable dangereuse : Pour donner un exemple concret, les tireuses à bières ont gelé, à savoir deux sur trois. La priorité c’est d’être réactif et de trouver une solution immédiatement, dans n’importe quelle situation.

Quel futur envisagez-vous pour l’asso ? Un événement toujours plus qualitatif, toujours plus au niveau de l’attente des étudiants. L’objectif est également d’entrer dans la conscience collective : le GAC doit devenir l’événement culturel et sportif incontournable. C’est un événement déjà fort complet, mais on cherche à pousser davantage les limites : Diversifier au maximum les étudiants qu’on accueille : toujours plus d’étudiants internationaux, mais également en faire une référence comme une compétition sportive et faire venir des grands sportifs pour améliorer encore plus la visibilité.

Que pensez-vous du GAC 2018 ? On a été vraiment très contents, tout s’est bien enchainé : temps magnifique, de super retours de la part des gens, que ce soit pour le ski, pour les événements et même si on a eu des imprévus, ça n’a pas mis en danger le GAC. De notre côté, cela permis de créer des liens forts entre nous.

Qu’est-ce que Altigliss vous a apporté sur le plan personnel ? Apprendre à gérer un grand événement, de l’implication mais aussi prendre conscience des difficultés de l’organisation de quelque chose d’aussi gros. C’est également le plaisir de participer à un événement modulable : on s’est vraiment senti libres de créer et d’innover ! Evidemment, ça nous a aussi apporté de vraies amitiés, mais aussi un côté très professionnalisant : Travailler main dans la main avec des entreprises, avec GEM et avec la station. Interview réalisée le

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SPORT

Les innovations technologiques les plus cool utilisées pendant les Jeux Olympiques d’hiver de 2018 Dubois Berger Emmanuelle

Les Jeux Olympiques, qu’ils se déroulent en hiver ou en été, ne se limitent pas à l’athlétisme. C’est l’endroit idéal pour les entreprises pour présenter leurs dernières technologies, et l’événement de cette année a apporté le meilleur du meilleur de ce qu’il y a de mieux. Des robots aux caméras de réalité virtuelle, voici les technologies les plus cool qui ont été utilisées pendant les Jeux Olympiques d’hiver de 2018 à Pyeongchang.

Les drones ont illuminé le ciel L’une des technologies les plus remarquables utilisées aux Jeux Olympiques d’hiver de 2018 était le drone. Si les drones ne sont pas une nouvelle technologie, leur utilisation pendant les Jeux Olympiques l’est. La cérémonie d’ouverture a débuté par un spectacle de lumière époustouflant dans le ciel réalisé uniquement par des drones. Le Shooting Star Drones Light Show d’Intel, qui a battu tous les records, était la meilleure façon de lancer un événement enchanté par tant de technologies. Il convient également de noter que ces véhicules aériens sans pilote ont été équipés de caméras haute définition et d’imagerie

thermique pour assurer la sécurité et la sûreté pendant toute la durée de l’événement.

Des robots ont pris le contrôle de PyeongChang Les robots ont pu être repérés dans tout PyeongChang à partir de l’aéroport ! LG Electronics a profité de l’événement pour présenter ses dernières avancées en matière de technologie robotique. Dans leur communiqué de presse, LG Airport Robots Take Over Korea’s Largest Airport, en Juillet 2017, LG a annoncé que deux types de robots devaient être déployés dans le plus grand aéroport de Corée du Sud : des robots de nettoyage et des guides robotiques pour les voyageurs. Le robot de nettoyage d’aéroport, en plus d’être adorable (comme l’ont décrit les voyageurs), a utilisé la technologie HOM-BOT de LG pour garder les planchers de l’aéroport propres. Comment ? Dotés de technologies telles que la navigation autonome, l’évitement des objets, la détection des zones les plus fréquentées (et de la saleté), le stockage

des lieux nécessitant le plus d’attention et le calcul de la meilleure route pour s’y rendre, ces robots ont sûrement fait le travail ! Il est inutile de mentionner leurs puissantes capacités de nettoyage.

Le robot guide de l’aéroport était une autre histoire. Ces robots étaient équipés de la technologie de reconnaissance vocale et pouvaient comprendre 4 langues différentes : anglais, chinois, coréen et japonais. Ils étaient connectés au serveur de l’aéroport et pouvaient fournir des informations sur les heures d’embarquement, les magasins, les restaurants, la salle de bain la plus proche et plus encore. Ils ont également été en mesure de guider les voyageurs perdus vers la bonne porte en scannant les cartes d’embarquement.

Les caméras VR transportent les téléspectateurs sur la glace Le patinage artistique, le patinage de vitesse sur piste courte et le hockey ont été filmés avec des caméras C360 pour offrir des possibilités de visionnement en réalité virtuelle (VR). C’est la première fois que la VR est utilisée dans des Jeux Olympiques. Aux États-Unis, cette technologie était accessible sur l’application NBC Sports VR et, pour les téléspectateurs du continent européen, l’expérience olympique VR pouvait être vue sur Eurosport. Evan Wimer, PDG de C360, a déclaré à propos de ce changement

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monumental vers la radiodiffusion télévisuelle de la prochaine génération, « nous sommes extrêmement honorés d’avoir l’occasion d’apporter une dimension visuelle supplémentaire grâce à notre technologie de caméra aux Jeux Olympiques d’hiver de 2018. Nous croyons en la valeur que la vidéo immersive peut apporter aux retransmissions sportives traditionnelles, et les Jeux Olympiques de PyeongChang est l’événement parfait pour présenter notre nouvelle caméra à un public mondial ».

Les combinaisons intelligentes donnent plus de contrôle aux entraîneurs Deux patineurs de vitesse néerlandais sur piste courte ont pu porter des combinaisons intelligentes fabriquées par le géant de l’industrie, Samsung. Ces combinaisons haptiques sont équipées de capteurs et se connectent au smartphone de leurs entraîneurs où ils peuvent surveiller les données corporelles de leurs athlètes en temps réel. L’entraîneur peut envoyer des messages aux athlètes par l’entremise de vibrations dans certaines parties de la combinaison pendant qu’ils sont sur la glace, de sorte que les athlètes peuvent faire des ajustements à la posture et aux mouvements pendant qu’ils s’entraînent. La technologie n’était autorisée que pendant les entraînements et les essais, et non pendant les courses de compétition. Alors, est-ce que cette technologie a aidé les patineurs néerlandais à remporter une médaille ? Eh bien, l’un des patineurs a gagné une médaille d’argent au 1 500 mètres masculin !

L’équipe de ski des États-Unis obtient un buzz cérébral avec le casque stimulant. L’équipe de ski des États-Unis a utilisé une pièce d’équipement appelée casque Halo Sport qui délivre des stimulations transcrâniennes. Cette technologie innovante est produite par Halo Neuroscience. Il a des pointes en mousse qui envoient des courants électriques au cortex moteur pour faciliter les mouvements pendant l’entraînement.

Cette technologie est censée augmenter la mémoire musculaire ainsi que la force et l’endurance de ces athlètes d’élite. La technologie est utilisée dans le monde médical avec des patients atteints de la maladie de Parkinson.

Les lunettes stroboscopiques réveillent le côté paresseux de la vision Les skieurs américains ont également obtenu une autre technologie intéressante pour les aider à s’entraîner, les lunettes stroboscopiques REV. Fabriquées par Vima, les lunettes REV se concentrent sur l’amélioration de l’œil non dominant de l’utilisateur ainsi que sur l’entraînement d’une variété de compétences sensorielles, y compris le temps de réaction, la perception de la profondeur, l’équilibre, la mise au point et la visualisation.

connecté à une application iOS ou Android qui permet à l’utilisateur de personnaliser son expérience de formation. Sasha Rearick, l’entraîneur-chef de l’équipe masculine américaine de ski alpin, a déclaré à la BBC : « retirer l’information d’une manière stroboscopique réveille le cerveau pour prendre et utiliser l’information qu’il voit et la traiter plus rapidement et mieux ». La liste est loin d’être exhaustive. Ces Jeux Olympiques ont été de loin l’événement sportif le plus high-tech que nous n’ayons jamais vu. Avec l’arrivée de la connectivité 5G, le paysage technologique du sport atteindra de nouveaux sommets qui pourraient dépasser PyeongChang 2018 de plusieurs kilomètres !

« L’une des technologies les plus remarquables utilisées aux Jeux Olympiques d’hiver de 2018 était le drone. La cérémonie d’ouverture a débuté par un spectacle de lumière époustouflant dans le ciel réalisé uniquement par des drones. » Ces lunettes spéciales sont conçues pour aider les skieurs à naviguer dans les virages sur leur côté non dominant, qui est généralement plus lent et plus faible. Les lunettes utilisent un obturateur à cristaux liquides pour bloquer la vision dans l’œil dominant tout en créant un effet stroboscopique pour entraîner l’autre œil non dominant. Il peut également être

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SPORT

Les influenceurs sportifs Roussel Louis Nicolas

A

vant de parler d’influenceurs, dites-moi : qui s’est déjà trouvé trop gros ? trop maigre ? pas assez beau ? pas en assez bonne santé ?

Un enjeu de société aujourd’hui Ces problématiques s’imposent aujourd’hui à nous, citoyens de ce monde contemporain, consommateurs de cette ère du consumérisme, nous qui achetons ces produits de l’industrie agro-alimentaire à la qualité et aux conséquences sur notre organisme douteuses. L’obésité touche 38% des adultes américains, 15% des adultes français, tandis que 50% des Français adultes sont considérés comme en surpoids ou obèses. A l’opposé de ce phénomène, les personnes anorexiques sont de plus en plus nombreuses, victimes de la pression des réseaux sociaux et de l’importance de « l’image » que l’on doit aujourd’hui y montrer. Un mal-être peut alors s’installer et il est possible de basculer soit d’un côté, soit de l’autre, à la suite de mots blessants répétés quotidiennement ou d’un traumatisme personnel plus ou moins grand. Par ailleurs, du fait de cette nouvelle production industrialisée et de la commercialisation d’aliments mondialisés,

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de la libéralisation du secteur agro-alimentaire et des produits de consommation courante, nous avons développé de nouvelles intolérances alimentaires (au gluten et au lactose pour les plus courantes). Face à toute cette adversité que connait notre société aujourd’hui, l’hygiène de vie et la nutrition n’ont jamais été si importants. Bien que certains caractères génétiques puissent nous prédisposer à une certaine silhouette ou à certaines intolérances et autres maladies plus graves, l’alimentation et le sport jouent un rôle central pour notre santé.

« L’obésité touche 38% des adultes américains, 15% des adultes français, tandis que 50% des Français adultes sont considérés comme en surpoids ou obèses. »

6 fois par semaine, il s’agit d’adopter un mode de vie sain, une alimentation saine et équilibrée, de légère préférence protéinée si l’on veut prendre du muscle, et de pratiquer une ou plusieurs activités sportives de manière régulière. Enfin, tout cela nos influenceurs fitness, muscu et sports en tout genre vous le diront mieux que moi !

Des influenceurs motivateurs coachs sur les réseaux sociaux…

Le sport comme remède universel ? Vrai répond la science ! Il permet de lutter contre les maladies cardio-vasculaires, contre le surpoids et l’obésité, contre le vieillissement, a un effet anti-cancérigène et anti-stress, améliore les capacités cognitives, la qualité du sommeil et procure un sentiment de bien-être général.

Tout d’abord, qu’est-ce qu’un influenceur me direz-vous ? Quelqu’un qui a de l’influence évidemment. Mais sur qui a-t-il/elle de l’influence ? Sur sa communauté de followers ! Le but d’un influenceur est d’accroitre sa communauté pour accroitre son influence, accroitre sa renommée et son pouvoir, son potentiel commercial de ce fait.

Il n’est pas ici question de s’inscrire dans une salle de sport et de s’entrainer

Ces influenceurs se produisent sur les réseaux sociaux tels que Facebook,


Instagram, YouTube et un peu plus marginalement Twitter. Vous suivez peut-être Tibo Inshape ou une star de football sur les réseaux sociaux ? Ce sont des influenceurs ! Tout est une question de business model (voir partie suivante). Les influenceurs sportifs tels que Tibo Inshape (superstar française de YouTube et Instagram) proposent conseils et motivation à leurs followers. Ils contribuent à mettre beaucoup de personnes au sport et à se sentir mieux dans leur corps. Mais voici une question intéressante : ces personnalités ont-elles lancé la mode fitness ou surfent-elles seulement sur celle-ci ? Tout dépend de qui l’on parle. Les derniers arrivants sur le marché des instagrameurs et des youtubeurs sont bien sûr des suiveurs et des surfeurs de vague qui tentent de saisir l’opportunité que constitue cette mode. Certains sont des précurseurs tels que Tibo qui a lancé sa « Team Shape » dès 2014 ou même Rudy Coia qui a lancé sa chaîne YouTube de musculation il y a 10 ans. Ce qui est certain, c’est que ces personnes, que cela soit dans la musculation, le cross fit, le street workout, le football dans n’importe quel autre sport, contribuent à nous faire nous sentir mieux dans notre corps et dans notre tête. En effet, il ne s’agit pas que de sport, mais d’une manière de vivre. Nombreux sont ces influenceurs qui partagent leurs recettes healthy préférées (Juju Fitcats) et leurs routines quotidiennes (Sissy

Mua) pour promouvoir un mode de vie sain (sport, nutrition, sommeil…).

démonstrations, figures et autres défis autour du foot.

Il existe des influenceurs pour tous les goûts. Selon votre activité sportive et selon votre niveau dans ce sport. Par exemple Franck Ropers, spécialiste des arts martiaux et du penchak silat, anime une chaîne YouTube de plus de 700 000 abonnés sur laquelle il propose des techniques de self-défense simplifiées pour s’adapter à tous les niveaux ainsi que des conseils de vie pour s’épanouir dans son corps, dans son esprit et dans le monde professionnel.

Si vous êtes plus branchés musculation, vous allez être servis : débutant ? confirmé ? homme ? femme ? cool ou sérieux et déterminé ? Vous trouverez de tout sur YouTube et Instagram. C’est simple, les influenceurs et le contenu de conseils, de motivation qu’ils proposent sont aujourd’hui presque aussi personnalisables que les programmes d’entrainement de certains coachs directement en salle.

D’autres comme Séan Garnier (star aux 2,5 millions de followers sur Instagram et 1,7 millions YouTube) et Wass Freestyle (près de 2 millions d’abonnés sur YouTube et 630 000 followers Instagram) promeuvent le football via leurs

Vous êtes plus branchés running ou triathlon ? Marine Leleu sera là pour vous motiver avec sa joie de vivre (200 000 abonnés YouTube et 400 000 Instagram). Tout ceci contribue à une véritable mode autour du sport, du running, du fitness et de la musculation ces dernières années. Le nombre d’inscrits en salle de sport ne cesse d’augmenter (+5% par an !), atteignant aujourd’hui 5,5 millions d’adhérents en France ! Cette croissance est notamment tirée par les salles lowcost qui permettent de démocratiser ce sport. De plus en plus de monde se met donc à bouger du fait de la mode lancée et entretenue par les influenceurs, mais n’y a-t-il pas un envers du décor ? Trop de sport tue-t-il le sport ? #lesbodybuildeurstellementdopésquilsfinissentmortsouàlhopital

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…qui cherchent à commercialiser toute sorte de produits et s’affichent comme nouveaux ambassadeurs des marques Nombreux de ces influenceurs décident de faire de leur activité leur métier. Tous n’étant pas entraineur ou coach sportif, ils doivent trouver des moyens de se rémunérer. Il est vrai que YouTube verse un certain revenu à ceux qui produisent du contenu et alimentent son site, mais ces revenus sont généralement trop faibles pour vivre correctement à moins de faire de nombreux millions de vues tous les mois. Les marques se sont néanmoins très vite rendu compte que ces petites stars du sport aux communautés de dizaines, centaines de milliers voire de millions de fans pouvaient constituer de fabuleuses vitrines pour promouvoir leurs produits. En effet, l’impact sur le consommateur potentiel est 10 fois plus puissant et efficace lorsque c’est son youtubeur préféré qui lui présente un produit que lorsqu’il voit une simple publicité. C’est pour-

quoi de nombreuses personnes crient au scandale dans les commentaires des publications sur les réseaux sociaux dès qu’elles croient deviner un placement de produit, se plaignant d’être utilisées et manipulées. Ce qui est en partie vrai.

Les influenceurs ont notamment recours à deux sortes de partenariat avec les marques : des placements de produits ponctuels, ou des partenariats sur le long terme (un genre de sponsoring qui les transforme en des sortes d’égéries des marques). Il est notamment question de Myprotein, leader mondial de la vente en ligne de compléments alimentaires. Il n’est pas un youtubeur muscu un peu confirmé qui n’ait jamais fait de partenariat avec Myprotein. Cela soulève la question du bienfait de ces protéines et autres compléments alimentaires pour notre corps. Certains influenceurs tels que Tibo Inshape se posent comme véritables défenseurs des protéines en poudre, affirmant que de l’extrait de lait naturel ne peut être mauvais pour le corps (voir sa vidéo « visiter une usine de protéine »). Le sujet devient donc très éthique : qu’est-ce qui est correct de vendre ou non ? Certains (dont Tibo) cherchent à être transparents en expliquant l’intérêt ou non des compléments, dans une véritable volonté de dédiabolisation de ceux-ci, trop souvent confondus avec des produits dopants selon lui. Il mène par ailleurs une campagne active de prévention contre les produits dopants et notamment les stéroïdes anabolisants en invitant par exemple sur sa chaîne YouTube des bodybuildeurs à venir témoigner, à raconter leur expérience.

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D’autres influenceurs s’inscrivent dans des partenariats avec des marques plus fameuses encore : c’est le cas des youtubeurs Wass Freestyle et Birdyy qui participèrent avec le footballeur Mario Balotelli au lancement de la paire de chaussures Puma evoPower Vigor il y a un an, avec une série de vidéos totalisant plus de 3 millions de vues. On ne peut alors que constater alors : la publicité sur les réseaux sociaux via les influenceurs s’annonce comme le futur de demain, puisque cela existe déjà et que l’audience de la télévision décline depuis plusieurs années dans le monde occidental. Comme le dit le poète et journaliste Saïd Taleb dans l’article « Pour un café de la poésie » (article de la rubrique Culture de votre magasine), la mort de la télévision est programmée et son agonie a déjà commencé : « bientôt on ne parlera plus que d’un média : les réseaux sociaux et internet ». Une telle influence peut certes être dangereuse et l’on peut avoir l’impression d’être utilisé, mais cela reste une forme de publicité comme une autre finalement.

« la publicité sur les réseaux sociaux via les influenceurs s’annonce comme le futur de demain »

mêmes. D’ailleurs, le développement de vêtements, équipements et nourriture pour les sportifs est nécessaire si l’on veut que toujours plus de monde se mette au sport. Leur présence et leurs démonstrations sont à prendre avec précaution, comme tout ce que l’on trouve sur internet finalement. Il s’agit toujours de fact-checking, de vérifier la qualité de l’information ou du produit que l’on nous sert avant de l’acheter. Si de plus en plus de personnes se mettent à aider et à motiver les autres à faire du sport pour se sentir mieux dans leur peau et dans leur vie, c’est tant mieux !

Les influenceurs sont souvent bienveillants et ne cherchent pas à nous vendre des produits vraiment pourris comme certains banquiers et autres arnaqueurs. La plupart du temps, ils ne nous présentent pas des produits qu’ils n’utiliseraient ou ne porteraient pas eux-

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