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Vers une pratique p.24-25
AVANT-PROPOS
Pourquoi choisir de faire l’HMONP Les cours d’architecture reçus pendant les années d’études à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg mettent l’accent sur le projet, plus spécifiquement sur la conception d’un projet architectural, et fournit aux étudiants un savoir théorique. Nous appliquons et interrogeons ce savoir à travers nos parcours ainsi que durant nos expériences professionnelles.
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HMONP se révèle comme une évidence pour acquérir l’apprentissage nécessaire afin d’être reconnu comme Architecte. Elle permet d’arriver sur le marché du travail avec les connaissances requises pour débuter une carrière d’architecte et de comprendre les fonctionnements liés à son exercice. Cette formation est une opportunité enrichissante qui mêle cours professionnalisant et activité concrète en agence. Elle nous permet de poser un bilan sur notre capacité d’adaptation et notre conviction à nous projeter dans le futur en tant que praticien conscient de nos responsabilités juridiques, administratives, éthiques mais également relationnelles.
Elle nous permet un savoir concret, solide et un outil de travail acquis durant les cours en permettent d’intégrer des mécanismes de réflexion mis en place au sein de l’agence. Plus largement encore, elle constitue un esprit critique au niveau de la profession. Une conscience professionnelle se forme et permet de mieux appréhender le nouvel environnement dans lequel on évolue.
Ainsi, c’est le moment où l’on réalise que l’agence d’architecture, au-delà du lieu de création, se doit d’être une entreprise pérenne capable de répondre de manière satisfaisante à la commande et d’entretenir un bon relationnel avec les maîtres d’ouvrage, les entreprises et les autres intervenants du projet afin de rester viable. L’obtention du titre d’architecte HMONP est une étape essentielle dans le cursus de formation et est une mention obligatoire pour l’acte de construire. La formation tend à nous rendre légitime sur la pratique de la profession et modifie notre statut au sein de l’agence
L’HMONP représente également une étape structurante et une opportunité insoupçonnée dans les échanges qu’elle fait naître au sein de l’agence, notamment lorsque la réflexion menée dans le mémoire professionnel est indissociable de la structure d’accueil. C’est un temps d’approfondissement, d’enrichissement et de structuration d’un projet professionnel cohérent.
Diplômé de l’ENSAS en 2019, je me suis fait une idée de ce qu’était le travail en agence d'architecture. Le souhait de présenter mon habilitation à la maîtrise d’œuvre en «mon» nom propre s’inscrit dans la continuité de mes réflexions sur les enjeux de la profession et de ma volonté de m’associer plus tard au sein de l’agence BGL Architecture.
En tant qu’architecte diplômé d’Etat, je serai amené à me former et à apprendre tout au long de ma carrière. Néanmoins, pouvoir appréhender dès le début de mon exercice le contexte professionnel dans lequel j’évolue à travers le prisme d’une déontologie et d’une éthique professionnelle me permet d’envisager plus sereinement mon avenir.
Le contexte professionnel C’est dans l’agence BGL Architecture que je fais ma mise en situation professionnelle. Agence dans laquelle j’ai réalisé mon stage de Master. Cette structure me paraissait être un excellent choix pour comprendre les rouages d’une agence en cohérence avec les objectifs de la HMONP. J’étais certain que Jean-Marie Lefèvre (gérant de BGL Architecture) avait beaucoup de savoir à me ‘transmettre’. Cette expérience n’est pas différente de l'enseignement philosophique que peut recevoir un disciple de son maître. La profession d’architecte demande d’acquérir un savoir considérable en vue de sa pratique. Elle illustre l’ingéniosité de l’humanité et son sens de l’harmonie ; reflet profond des motivations complexes des individus et des sociétés. La formation HMONP est l’occasion de questionner la profession. C’est une quête à recherche d'un sens à donner à la discipline ; une quête à la recherche de la compréhension de la discipline. BGL Architecture est une agence créée en 1999 par trois associés, puis repris par un de ces associés, Jean-Marie Lefèvre, en 2011. Elle est actuellement composée de 9 personnes ; 1 Architecte ENSAIS, 1 Architecte DPLG, 2 Architectes D.E., 1 Economiste-métreur, 2 Dessinateursprojeteurs et de 2 Assistantes.
Les domaines d’intervention de l’agence sont, comme suit : • Equipements publics • Industrie & bureaux • Enseignement • Domaine médico-social • Agro-alimentaire • Logements-Hôtels-Maison individuelles 50% PUBLIC - 50% PRIVE
Il y a un organigramme classique et hiérarchisé, ainsi les rapports entre les collègues sont formels. Les dessinateurs-projeteurs, très expérimentés, sont à l’origine des premiers dessins de plans suite à un travail de relevé minutieux. Ils mettent en place un support de travail précis. L’exactitude des plans d’origine est très importante au sein de l’agence puisque c’est l’outil de réflexion architecturale et de métré. Les plans une fois dessinés, avec le respect des calques et des épaisseurs de tirets imposées par la charte graphique de l’agence font l’objet de mise en page pour une impression à l’échelle 50ème ou 100ème . Le gérant élabore l’esquisse sur la base de l’étude de faisabilité et met place un ensemble fonctionnel. Les intentions volumétriques ainsi que les plans sont esquissés à la main, à cette étape sans rentrer dans les détails des façades. Les projeteurs mettent ces plans au propres sur les logiciels et l’envoi au maître d’ouvrage pour validation.
Au fur et à mesure des modifications de plans selon les demandes de la maitrise d’ouvrage en échange constant avec le gérant, le projet évolue. Après cette étape, le dossier est remis à un architecte salarié qui fait l’avant projet définitif, même s’il est évident que les associés ont plus d’expériences, ils sont là pour aiguiller les architectes plus débutants dans toutes les phases d’une mission. Ces modèles d’équipes, à savoir architectes, économiste, dessinateurs, amènent souvent à une mixité générationnelle appréciée dans l’élaboration du projet architectural. Cela apporte également une polyvalence des compétences individuelles qui, une fois mises au service du projet architectural, permettent de créer une équipe pluridisciplinaire. On peut observer une capitalisation du savoir au sein de l’équipe de projet, savoir qui sera ensuite mutualisé afin de pouvoir servir à l’ensemble de l’agence. La philosophie de l’agence est d’avoir un chargé de projet référent sur chaque affaire en cours. C’est lui qui sera la mémoire du projet, puisqu’il suivra le projet de la phase conception à la phase chantier.. C’est pourquoi, comme bien souvent le maître d’œuvre est le seul intervenant qui ne varie pas au cours du processus de réalisation du projet, l’idéologie de l’agence est de conserver un unique référent qui sera capable de se souvenir de toutes les évolutions du projet.
J’ai commencé mes premiers projets par l’aménagement d’un cabinet médical pour mise aux normes PMR et sécurité incendie. J’ai suivi ce projet de la phase esquisse (ESQ) à la phase réception des ouvrages (AOR). Pendant la période de formation, j’ai suivi 10 projets significatifs (cf. book). Parfois j’étais tenu à exécuter les demandes du gérant, et parfois j’étais complètement libre de dessiner entièrement le projet. L’une des expériences les plus marquantes a été le concours d’architecture pour la création de nouveaux locaux de l’EHPAD et de l’ITEP à Sarreguemines. Pour quelqu’un qui n’a jamais fait de concours, cette expérience a été très enrichissante pour moi. C’est à ce moment précis que j’ai été persuadé que cette agence répondait à mes critères. En effet, une jeune architecte et moi avons été totalement libres pour dessiner le projet. Que demander de plus quand on est jeune architecte ? Bien évidemment, tout le long du travail de concours nous avions sollicité le gérant pour les aspects critiques et pour avoir ses recommandations. La découverte des pages et pages de programme, son étude et son analyse, ainsi que la réponse architecturale ont été épanouissantes. L'objectif de ce mémoire est de proposer une analyse de la transmission du savoir dans la pratique architecturale. Comme chaque agence d’architecture a sa propre méthode de formation d’un architecte, alors elle est semblable à une école de pensée. Mon observation de BGL Architecture et la manière dont Jean-Marie Lefèvre exerce la profession me fait ressentir que la méthode d’apprentissage, plus précisément sa méthode de tranmission est semblable à une école de pensée. Intéressons-nous de près en quoi consiste la transmission du savoir dans la pratique et comment une agence d’architecture peut initier un jeune architecte à sa philosophie.
«Je suis un âne mais qui a l'œil. Il s'agit de l'œil d'un âne qui a des capacités de sensations. Je suis un âne ayant l'instinct de la proportion. Je suis et demeure un visuel impénitent.» -Le Corbusier, Mise au point, Éditions Forces Vives, Paris, 1966
INTRODUCTION
Le savoir est défini selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexical (CNRTL) comme « Avoir dans l’esprit, avoir la révélation de l’existence, de la réalité, de l’identité, de la véritéde quelque chose; avoir présentà l’esprit un ensemble de connaissances rationnelles (concepts, idées, notions, images, représentations, affects), acquises par l’étude et par la réflexion, et constituant une synthèse ordonnée sur un objet de connaissance»1 Partant du principe Confucéen «Je ne cherche pas à comprendre les réponses, je cherche à comprendre les questions», ce mémoire a fait l’objet d’interrogations sur le savoir que doit acquérir un architecte pour exercer la profession. Il y a chez BGL Architecture un besoin de transmettre son savoir afin de collaborer à long terme. C’est durant la période de mon stage de Master 1 que j’ai compris que cette agence avait beaucoup à m’apporter. L’agence m’a proposée de rejoindre l’équipe à la sortie des études. Mon choix s’est naturellement porté vers elle pour faire la formation HMONP. Je me suis fixé comme premier objectif de participer à l’ensemble des missions de base pour la maitrise d’œuvre pendant la mise en situation professionnelle. Ce mémoire tente de faire connaitre la question du temps long nécessaire dans la pratique du métier en vu de présenter l’HMONP et d’affirmer les prémices du positionnement d’un jeune architecte dans l’optique d’être un futur praticien. Cette étape passe par l’acquisition du savoir que reçoit le jeune architecte durant la mise en situation professionnelle. La transmission du savoir a été un acte fondamental dans l’histoire de l’architecture pour préserver une tradition et pour innover une société en perpétuelle métamorphose. Dans un premier temps, il conviendra de s’intéresser à l’enseignement de l’architecture dans les écoles. Pour cela, il s’agira de mettre en évidence la formation à travers la construction d’une culture architecturale, de théorie de projet et l’enseignement par la mise en situation à travers les stages. Dans un second temps, l’analyse se déclinera dans le contexte professionnel pour comprendre le fonctionnement interne d’une agence d’architecture et quelles sont les méthodes employées pour pouvoir transmettre le savoir de la structure. Enfin, l’étude s’achèvera par une mise en perspective personnelle pour une approche afin d’étudier les outils nécessaires pour devenir un praticien. Cela est possible en pérennisant mon expérience chez BGL Architecture et par le recul critique inspiré par la HMONP.
1 SAVOIR : Définition de SAVOIR (cnrtl.fr)
«Objet touchant a l’esthétique, l’architecture est sujette aux engouements comme aux détestationles plus subjectives. Certes, tout un chacun est libre d’exprimer son avis sur ce qui constitue son cadre de vie, mais on peut estimer que, là comme ailleurs, unpeu de culture ne gâche pas le jugement».
Philippe Trétiack
I- ENSEIGNEMENT - de la théorie dans les écoles d’architecture à la pratique architecturale
1.- Acquisition d’une culture architecturale Premièrement, une langue évolue au fil du temps et les mots qui la composent apparaissent, disparaissent ou changent de sens. De nouveaux termes naissent pour décrire de nouvelles réalités. Une langue, comme les mots, s’adapte aux changements de la société. Elle reste sous influence de cette réalité empirique. Le champ d’un mot peut s’élargir ou se rétrécir selon des situations. Il n’est jamais figé. Et c’est sans compter les significations particulières qu’un mot ou qu’une expression a d’une langue à une autre. Le mot ‘culture’n’a évidemment pas échappé à cette vérité. Plus encore, il a été profondément marqué par les aléas de son histoire. Nous allons définir le mot pour saisir sa profondeur avant de développer nos propos. Son étymologie du latin cultura, culture, agriculture, dérivé du verbe colere, habiter, cultiver2 La culture est l’ensemble des connaissances, des savoir-faire, des traditions, des coutumes, propres à un groupe humain, à une civilisation. Elle se transmet socialement, de génération en génération et non par l’héritage génétique, et conditionne en grande partie les comportements individuels3 On peut dire que sur le plan individuel, la culture est la connaissance, l’instruction, le savoir acquis d’un être humain. Sur le plan collectif, elle représente les valeurs, les références intellectuelles et artistiques communes à un groupe donné. C’est l’état de civilisation d’un groupe humain. Par conséquent l’architecture étant indissociablement l’expression de la culture4 , nous allons nous intéresser à son enseignement dans les écoles d’architecture. Tout d’abord, l’aventure architecturale commence par la construction d’une culture. L’enseignement varié des écoles d’architecture amène à s’interroger de manière permanente ; il ne résulte pas une vérité fondamentale. Les cours suivi tout au long du cursus apportent une approche critique et non des réponses exhaustives sur la façon de faire de l’architecture. L’école permet de constituer un bagage culturel, lequel impacte et influence l’étudiant au point de créer des obsessions personnelles. Les études d’architecture est une recherche permanente de soi, de son égo, de son identité, de son caractère. On crée un musée imaginaire dans lequel nos esprits déambulent. Je peux dire que j’ai trouvé mon Moi à travers les théories de Rem Koolhas mais cela n’est pas le sujet de ce mémoire.
2 CULTURE : Etymologie de CULTURE (cnrtl.fr) 3 Dictionnaire de l’Académie française, 9e édition . 4 . Loi n° 77-2 du 3 Janvier 1977 sur l'architecture, Journal officiel du 4 janvier 1977 (Version consolidée au 11 juillet 2016)
Ensuite, les années de licence se composent de thèmes variés, comme suit ; Théorie et pratique de l’architecture, Technique de la construction, Dessin, Cours artistiques, Histoires, Villes/Territoires, Sociologie, Infographie, etc… Ces cours permettent, à mon sens, de provoquer une sensibilité aux étudiants et d’acquérir un esprit curieux. La curiosité nourrit l’envie de découvrir et permet d’accéder à une culture pour les plus investis. Nombreuses questions se posent durant cette période d’apprentissage et elle donne un aperçu sur l’orientation pour le Master selon les facultés intellectuelles, les affinités mais aussi selon les faiblesses. Appréciant la philosophie, je trouvais que la méthodologie de celle-ci à savoir se questionner toujours devait s’appliquer au champ architectural. Elle permet de comprendre les raisons d’une pratique singulière. Antoine Albalat disait On ne pense bien qu’avec les mots , et Condillac l’Art de bien penser se réduit à l’art de bien parler5 . Je pense que pour transmettre un savoir le rapport à la linguistique est nécessaire, parce-que la parole est le rapport sensuel avec l’idée dont elle est la condition. Les paroles ne sont pas là pour dire ce que l’on pense mais pour faire créer la pensée elle-même, la parole est création de la pensée. Elle devient claire quand elle trouve les mots, tant qu’elle n’a pas trouvé les mots elle n’est qu’une intuition aléatoire. La plupart des philosophes, psychologues et linguistes, au début du XXe siècle, partagent cette idée: le langage étant le propre de l’homme, c’est lui qui donne accès à la pensée. Sans langage, il n’y aurait pas de pensée construite: nous vivrions dans un monde chaotique et brouillé fait d’impressions, de sensations, d’images fugitives. Une des conséquences majeures est que le langage n’est pas le seul «propre de l’homme»6; il n’est qu’un dérivé de la capacité à produire des représentations mentales, précisément des images mentales organisées en catégories. En licences construire écologique, nous avons fait un Master Classe de printemps sur la Résilience Environnementale des Territoires avec les étudiants master de l’ENSA Versailles à Paris. Nous avons constitué des équipes pluridisciplinaires dans l’objectif de concevoir des projets éco-responsable. Cette expérience était marquante puisqu’à ce moment là je ne faisais pas d’étude d’architecture. Et j’ai pu observer le point de vue des étudiants architecte, parfois complètement ignorant sur la question, voir même irresponsable dans la démarche du projet alors que l’objet même du Master Classe était de proposer une approche sensible en faveur des questions énergétiques. Il s'agit à terme d’offrir un cadre d’excellence tout en accélérant l'innovation et le transfert de technologies ou de connaissances en favorisant la mise en synergie des mondes de l'enseignement, de la recherche et de l'entreprise dans l'Euro-Région du Rhin Supérieur. En favorisant les coopérations systémiques, il s’agit d’explorer le concept de résilience s’appuyant sur les théories développées par Rob HOPKINS. En écologie, il s’agit de fait référence à la capacité d’un écosystème à s’adapter à des évènements (chocs) extérieurs et des changements imposés.
5 Étienne Bonnot de Condillac ; La Logique ou les premiers développements de l’art de penser (1780), chapitre IV, 1780 6Jean-François Dortier, L’Homme, cet étrange animal: Aux origines du langage, de la culture, de la pensée, 2e éd., Sciences Humaines, 2012.