É D I T I O N
I N T E R N A T I O N A L E
No 236 | Sptembre 2020 | 21
ème
année
20₪ 6€
LE MAGAZINE DU PROCHE ORIENT ET DU MONDE JUIF
n TOURISME :
UN SECTEUR EN PLEINE DÉCONFITURE
n BIBI NETANYAHOU DOIT-IL DÉMISSIONNER ?
n LE LAVI
LE CHASSEUR ISRAÉLIEN QUI DÉFIA LES F16
n ROLADIN,
UNE AVENTURE ISRAÉLIENNE
n TEHERAN
LA SÉRIE QUI A BATTU FAUDA
LES ENFANTS EXTRAORDINAIRES AU CŒUR DU CONFINEMENT
Israël 30 sh | France/Belgique 6 € | Suisse 9FS | Canada 15$CA | www.israelmagazine.co.il |
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Édito
"M
on ami, ne donnez pas votre démission, faites-vous seulement détacher de votre corps en expliquant à votre Administration que vous allez étudier des questions de votre ressort, en dehors des travaux de l’Etat." Honoré de Balzac
Bibi doit-il ou va-t-il démissionner ?
J
’ai lancé sur Facebook et de manière assez jubilatoire et cynique un post concernant la démission éventuelle de Bibi. J’ai reçu des milliers des réponses en quelques heures pour constater que 90% voulaient qu’il reste en place pendant que 10 % désiraient qu’il parte. Je fais partie des gens qui souhaiteraient qu’il démissionne car comme il est difficile de s’en prendre à un insaisissable virus, beaucoup ont choisi de prendre de manière flagrante le Premier ministre comme bouc émissaire. Nous nous trouvons devant une situation exceptionnelle, impensable, et disons-le, ingérable. L’équilibre à trouver entre le redémarrage économique et la situation sanitaire est impossible à deviner d’autant que le virus se fiche des statistiques, se contrefout des corrélations, et se fait un malin plaisir à déjouer tous les plans de nos docteurs et professeurs. Il s’affûte, mute, permute, culbute, ampute, et pour finir, nous bute. Ce virus possède un côté tellement chinois qu’il n’aurait pas été nécessaire de savoir qu’il nous est arrivé de la Grande Muraille. Sans tomber dans le pessimisme, il faut savoir que nous sommes au milieu d’une guerre qui ressemble plus à la guerre du Vietnam ou à la Seconde guerre mondiale qu’à une opération militaire du type de Tsouk Etan (Il y a actuellement 700.000 morts dans le monde). Pendant ce temps, chaque corporation, ici même, ne se préoccupe que ses intérêts propres au risque que faire perdurer la pandémie. Toute manifestation contre la gestion de la pandémie
est devenue l’exutoire de notre angoisse, de la peur de l’avenir, mais elle est devenue une arme pointée contre le Premier ministre. Oui, selon moi, Bibi doit partir, mais surtout pour ne plus avoir à supporter les avanies et l’ingratitude totale de ceux qui l’entourent, de ceux qui lorgnent perversement depuis si longtemps sur son poste, de ceux qui savent tout mais qui ne font rien. Oui partir pour préserver sa santé dans un période où elle est vivement, comme pour tous, en danger.
Israël Attaque
V
ous avez vu la série Téhéran, vous êtes en train de la visionner ou vous vous apprêtez à la voir bientôt. Elle raconte les fabuleux exploits des agents du Mossad dans la capitale iranienne. Mais la réalité s’est avérée bien supérieure au cinéma depuis le fameux escamotage des dossiers nucléaires iraniens par le même Mossad. De plus nous assistons depuis un mois à une longue série d’attaques informatiques, de destructions de sites sensibles, de bombardements de centrifugeuses en Iran. Ce ne sont que les répliques aux déclamations haineuses appelant à l’éradication d’Israël, ce ne sont que les représailles justifiées aux attaques venues de Syrie et à l’enracinement provocateur des ‘Gardiens de la révolution iranienne’ à quelques kilomètres du Golan israélien. Y aura-t-il des représailles iraniennes et de quel type ? Pa sûr !L’Etat hébreu a peut-être trouvé la panacée, le moyen de faire la guerre sans la faire, et surtout sans risquer d’embraser le Moyen orient. Aussi si l’on vous demande si la Guerre avec l’Iran a commencé, dites surtout que vous n’êtes au courant de rien.
André Darmon | Rédacteur en chef France : 01 86 98 27 27 | Israël : 054 254 45 20 | andredarmon78@gmail.com Abonnez-vous directement sur le site : www.israelmagazine.co.il 4 | ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020
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Sommaire
Numéro 236
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054-254 45 20 : ‰¯„‡ Conseillers politiques du rédacteur en Chef : Richard Darmon et Guy Millière Art et culture & Judée Samarie : Yaakov Ben Denoun Sociétés et Communautés juives : YYéhouda Bethléem Bonnes Nouvelles d’Israël : Albert Soued Société israélienne : Noémie Grynberg Ethique juive : Haim Ouizemann Carnets de voyage : André Darmon Grands dossiers et Economie : Elisabeth Lamy Tsahal : Yéhouda Bethléem Rencontres israéliennes et Histoire : André Darmon Histoire de la Shoah : Marc-André Chargueraud Archéologie : Hélène Lesman Agenda et tourisme : Yaël Simon Société : Johanna Afriat, Mickael Laustriat, Dahlia Ferez Tel Aviv : Johanna Bensoussan, Laure Levy Crédits photos : Dover Tsahal, GPO, Reuters, Anaël Darmon, Shutterstock, Freepik Couverture : © Freepick Ont également collaboré à ce numéro: Yéhouda Bethtéem, Yamit Rivka Darmon, Esther Amar Distribution France NMPP - Depot légal à parution Commission paritaire N°1121105407 Imprimé à Jérusalem pour Israël Distribution Israel : Steimatsky, Yedioth, Tsomet Astarim Distribution Belgique, Canada, Suisse, NMPP/Prestallis Distribution Communautaire France : Serge : 069915 40 16
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LES MAGNATS DE L'ÉCONOMIE ISRAÉLIENNE
AUTISME ET CORONA
ROLADIN LA SUCCESS STORY
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ALYA ET PANDÉMIE
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LES MAGNATS DE L'ECONOMIE ISRAELIENNE ------------------------------------
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ARTICLE RICHARD DARMON ------------------------------------
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AUTISME ET TRISOMIE
EN GUERRE CONTRE LE VIRUS
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PAGE 20 ROLADIN
LE LAVI, L’AVION ISRAÉLIEN QUI DÉFIA LES F16
UN RÊVE DEVENU RÉALITÉ
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NEWS ECONOMIQUES ------------------------------------
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ISRAEL FACE AUX
ACORDS CHINE - IRAN ------------------------------------
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LE CONFINEMENT ECUEIL OU AUBAINE ?
LE LAVI
LE DEFI AUX F16
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PAGE 34
ALYA ET CORONAVIRUS UNE NOUVELLE REALITE
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LE KIBBOUTZ KETOURA UN OASIS DE BONHEUR
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ALYA ET PSYCHOLOGIE
POUR LES JUIFS FRANCAIS
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LE CONFINEMENT
ECUEIL OU AUBAINE ?
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PAGE 42 TEHERAN
LA NOUVELLE SERIE TÉLÉVISÉE
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LE KIBBOUTZ KETOURA ------------------------------------
PAGE 50 TOURISME
EN PLEINE DECONFITURE
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PAGE 52
PRIVATISATION DE EL AL
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LE JEU DES ALLIANCES ISRAËL - GUERRE FROIDE
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LA MOINS MAUVAISE SOLUTION LA NOUVELLE SÉRIE D’ESPIONNAGE EN ISRAËL
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LE JEU DES ALLIANCES ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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ISRAEL MAGAZINE
Ils ont tiré les ficelles de l’économie israélienne pendant des décennies. No’hi Dankner, Eliezer Fishman ou Itshak Tshouva, parmi d’autres, se sont constitués des empires industriels et financiers grâce à un immense autant qu’incontrôlable endettement. L’effet de levier a été utilisé à 100%, rendant dangereux l’équilibre financier des banques et des institutions financières, mettant en péril les retraites privées épargnées tout au long d’une vie active du citoyen. Mais qui sont ces magnats ? Comment les Prêteurs, Banques et Fonds de Pension essentiellement, ont-ils pu accepter une dérive pareille. Comment l’Etat n’a-t-il pas contrôlé et régulé ces dangereux écarts pour protéger le tissu économique et les épargnants?
Las vegas , le début de la déroute des investissements de Tshouva et de Dankner
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ECONOMIE
Les Magnats de l’Économie Israélienne : la Fin d’un Règne ?
Par Elisabeth Lamy
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ans le cas d’Itshak Ts h o u v a par exemple, Menora-Mivtachim a prêté 281 millions de shekels, Harel, 224 millions de shekels, Meitav Dash, 109 millions, et Psagot, 103 millions de shekels. Au total, par le biais des Fonds de Pension, le public a investi plus de 6 milliards de shekels dans Tshouva Group pour restructurer sa dette. En effet, les fonds de pension, tels que Menorah-Mivtachim (qui gèrent les retraites des Enseignants), Harel ou Meitav Dasht, ont largement financé les pertes de ces groupes industriels, mettant en péril les retraites. Le groupe Delek pour ne prendre que cet exemple, appartenant à Itshak Tshouva, a perdu 79% de sa valeur, infligeant ainsi de lourdes pertes à ses prêteurs, les fonds de pensions et les banques. Et pourtant, cette situation préoccupante et inquiétante n’empêche pas les sociétés Miftachim et Menorah d’accorder au groupe des délais de paiement supplémentaires même si d’autres ont exigé le remboursement de la dette immédiatement. L’impact sur la valorisation des épargnes n’est pas sans effet ! En 2012, le quotidien économique The Marker avait déjà noté que, l’année précédente, loin du regard du public, la Banque Leumi avait effacé 48 % d’une dette s’élevant à 270 millions de shekels, israelmagazine.co.il
contractée par Tshouva, propriétaire du Delek Group, dans le cadre d’un accord de restructuration de son endettement. Mais pourquoi les prêteurs ne donnentils pas de garantie bancaire assurant la solvabilité des dettes en cas de problèmes ? L’effet domino dans l’attitude des banques face aux magnats n’a fait qu’aggraver le niveau d’endettement : Les banquiers ont cru dans la vision de ces chefs d’entreprise et ont élargi de plus en plus leur capacité d’endettement, jusqu’au jour ou les pertes énormes les ont forcés à adopter une autre stratégie et à stopper leur financement. Force est de constater que les Magnats font de la cavalerie avec l’épargne des Israéliens. Pourtant depuis 2016, les temps sont plus durs avec le refus des banques et des différentes institutions financières de continuer systématiquement de passer en pertes et profits dans leurs bilans des dettes considérables. Les magnats les plus influents de l’Etat d’Israël font face désormais à une pression de plus en plus forte et se voient contraints de vendre leurs actifs pour combler ses déficits gigantesques. Aujourd’hui, en 2020, le dernier des Mohicans, Itshak Tshouva, se trouve dans l’incapacité d’honorer ses dettes et se voit contraint de se séparer d’un total d’actifs évalués à 2.5milliards de shekels. A lui seul, le groupe énergétique Delek compte 10 milliards de dettes (capital + intérêts) et est cédé pour une valorisation de 1.1 milliards de shekels.
En juin 2017, le magnat des médias et de l’immobilier, Eliezer Fishman a été déclaré en faillite dans la plus grande affaire de banqueroute de toute l’histoire d’Israël. Ce jugement avait été rendu après le refus des créanciers de conclure un accord qui aurait permis d’effacer 92 % de la dette personnel de l’homme d’affaires, qui était estimée à environ 1,5 milliard de shekels. En octobre 2016, No’hi Dankner, ancien actionnaire majoritaire d'Israel Discount Bank Holding Corp., est allé en prison pour trois ans, pour manipulation d’actions et autres délits liées aux valeurs qui se comptent en millions de dollars et en tentant d’influencer le prix des actions de l’entreprise qui était alors en difficulté. En 2016, le magnat de l’immobilier Zisser meurt d’un cancer après avoir accumulé 2,5 milliards de dettes, dont 1,8 milliard qui avait été effacé. Zisser avait été placé dans l’obligation d’abandonner le contrôle de la société de portefeuille, Elbit Imaging, dont il était le plus important actionnaire. suite page 10
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ECONOMIE
ISRAEL MAGAZINE
Une concentration économique sans contrôle
Déjà en 2010, seulement 10 groupes industriels contrôlaient 30% de la capitalisation boursière à Tel-Aviv, quand 16 groupes détenaient 50% de l’argent qui circulait dans le pays !
Comme bien souvent, lorsque l’on analyse le système économique israélien, une constatation s’impose : la concentration des secteurs d’activité aux mains d’un même actionnaire majoritaire et le manque de concurrence conduit à des dérapages et des malversations financières qui ne sont pas dévoilés au grand jour et qui pénalisent le citoyen. Déjà en 2010, seulement 10 groupes industriels contrôlaient 30% de la capitalisation boursière à Tel-Aviv, quand 16 groupes détenaient 50% de l’argent qui circulait dans le pays ! De nombreux rapports et commissions ont été émis notamment pour souligner la manière dont les banques et autres instances du secteur financier – comme les fonds de pension et d’investissement – avaient pu décider d’accorder des prêts importants, quelles étaient les garanties qui avaient alors été réclamées, quelles sanctions avaient pu être prises si les dispositions du prêt n’avaient pas été respectées, et comment les institutions de régulation avaient alors appliqué les règles de protection de la stabilité du système financier. Benjamin Netanyahou – et oui encore lui - fait promulguer en 2013 une loi visant à séparer le monde financier du monde industriel et impose aux magnats de l’économie de choisir entre les deux secteurs. En 2013, No’hi Dankner cède IDB (Israël Discount Bank Holding), Eliezer Fishman fait faillite en 2017, et Elovitch perd le contrôle du groupe de télécommunications Bezeq. Quant à Itshak Tshouva, il a préféré garder ses activités énergétiques via le groupe Delek et céda la société d’assurance qu’il détenait, PHOENIX, à l’Argentin Edouardo Elsztain. Mais le processus de vente et
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l’assainissement du tissu économique sont lents : l’endettement massif des magnats et l’extinction de leurs dettes se poursuit. En juillet 2017, c’est au tour de Eytan Cabel, alors député travailliste, de déclarer ouvertement la guerre et de lancer une Commission d’enquête parlementaire sur le secteur financier qu’il juge "négligent et qui a systématiquement" élargi ou effacé ses prêts à de riches hommes d’affaires. Il a vivement condamné les banques israéliennes, les accusant de se rapprocher systématiquement des magnats du monde des affaires en leur offrant des prêts démesurés, effaçant parfois des centaines de millions de shekels de dettes puis en équilibrant leurs propres comptes en facturant davantage les services financiers offerts au quotidien à leurs petits clients. Au cours des années, note l’enquête, ces pratiques incontrôlées des banques et l’incapacité de les réguler de façon efficace, ont coûté des milliards de shekels au peuple israélien. "Les régulateurs n’ont pas supervisé, n’ont pas vérifié, enquêté, n’ont pas usé de leur autorité pour imposer des sanctions et ils n’ont pas transmis d’informations au public comme ils auraient dû le faire", note le rapport. "Le fait que les banques se montrent généreuses vers un secteur en particulier et qu’elles fassent crédit, sans même y réfléchir, à tel ou tel magnat – à ceux qui ont une "aura’’, comme le dit la banque d’Israël" – implique que d’autres sont désavantagés et que la concurrence est, elle aussi, durement frappée, ajoute le rapport. Sur le marché des capitaux, estimé à 7,1 trillions de shekels, le manque de régulation est encore plus grave, affirme le rapport. Les citoyens israélierns n’ont pas réalisé que chacun d'entre eux possède un investissement moyen de 600 000 shekels dans ce marché, via des fonds de pension n israelmagazine.co.il
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Israël Attaque
PAR RICHARD DARMON
DES INTRUSIONS SANS PRÉCÉDENT CONTRE DES SITES STRATÉGIQUES IRANIENS
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epuis la fin juin, une douzaine d’explosions, d’incendies, voire même de bombardements, ont détruit des centres et infrastructures sensibles tous liés de près au programme nucléaire de Téhéran. Alors que les mollahs ont d’emblée suspecté les ÉtatsUnis, Israël et même l’Arabie Saoudite d’avoir initié ensemble ces attaques, la question se pose de savoir par quels types de représailles l’Iran pourrait répondre à cette nouvelle donne régionale. Persuadés que leur puissant pays était à l’abri d’attaques étrangères à répétition – notamment grâce à leurs impressionnants missiles en tous genres et à leurs milices terroristes supplétives éparpillées dans tout le Moyen-Orient -, les dirigeants iraniens n’en ont cru ni leurs yeux ni leurs oreilles quand cela a commencé le 26 juin dernier près de Téhéran dans une usine de carburant pour missiles. Jusqu’à ce jour, il y a eu une inédite série d’incendies et d’explosions au rythme de deux à trois attaques par semaine qui ont détruit le 30 juin l’important complexe de production de missiles de Khojir, non loin de la centrale atomique de Parchine; puis surtout, le 2 juillet, le grand hall des centrifugeuses "avancées" du grand centre nucléaire de Natanz fabriquant de manière accélérée de l’uranium enrichi (un composant essentiel dans la préparation des deux bombes nucléaires en cours
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de montage en Iran). Et ce, sans parler d’incendies qui se sont succédés aux quatre coins du pays dans des usines de composants électroniques, métalliques, pétrochimiques ou balistiques liés au programme nucléaire, que le régime qualifie chaque fois "d’accidents du travail" !
Les services secrets iraniens complètement dépassés
Une chose est certaine : alors qu’ils se croyaient invulnérables et pensaient que leur territoire était impénétrable du fait de leurs prétendus "succès" antérieurs (comme l’arrestation et l’exécution entre 2010 et 2013 de plusieurs "espions" supposés et le démantèlement de cellules de la CIA opérant chez eux), l’arrogant Corps central des Gardiens de la Révolution islamique (GRI) en charge du contre-espionnage iranien vient de subir avec cette série d’attaques un énorme échec... En fait, au moins trois nouveaux facteurs expliquent l’ampleur sans égal de ce grave camouflet : -1/ L’état plus avancé – par rapport à l’Iran - des capacités américaines et israéliennes dans la guerre cybernétique. On l’avait déjà vu avec l’attaque du virus Stuxnet qui avait paralysé en 2010 plusieurs centres nucléaires perses. Et on vient de le constater à nouveau à la mi-juin avec
la paralysée imposée à distance par Israël pendant une semaine à d’importantes activités maritimes des mollahs dans un port du Détroit d’Ormuz en réplique à une attaque cybernétique iranienne contre le système de distribution d’eau au nord du l’État hébreu. -2/ La présence certaine d’agents israéliens et américains très efficaces opérant secrètement depuis des années, disséminés sur le sol iranien et qui semblent avoir reçu à présent un feu vert général pour agir de manière coordonnée. -3/ Enfin le rôle des nouveaux chasseursbombardiers américains furtifs de type F35 dont Israël possède une cinquantaine d’exemplaires et qui ont été utilisés lors de certaines de ces attaques (voir encadré).
L’Iran pourra-t-il riposter ?
"Les États-Unis et le régime sioniste vont devoir faire face prochainement à des jours très difficiles pour eux !’, a menacé le 15 juillet dernier le général Esmaïl Ghaani, le chef actuel de la Force AlQods des GRI qui remplace à ce poste le leader emblématique Soleimani, éliminé en janvier à l’aéroport de Bagdad par un drone américain. Mais au-delà de ces rodomontades, la question se pose de savoir si le régime iranien est en mesure de répondre "à israelmagazine.co.il
DEFENSE la hauteur" à cette vague de graves attaques qu’il vient de subir. En effet, avec une économie et une monnaie frappées de plein fouet par les sanctions américaines rétablies depuis 18 mois et subissant - sans pouvoir y réagir efficacement au plan médical et social alors que la colère gronde dans les rues - les assauts répétés du Coronavirus qui a déjà touché plusieurs millions d’Iraniens et en a tué près de 100 000, les dirigeants perses semblent manquer de moyens pour réagir. De plus, s’ils ripostaient de manière trop violente, ils risqueraient d’hypothéquer l’une des cartes essentielles - le départ escompté de Donald Trump de la Maison Blanche en novembre prochain. Ils misent dessus pour inverser la vapeur en pensant qu’en cas de victoire du démocrate Joe Biden, tout redeviendrait aisé avec les USA... Résultats : le régime iranien ne dispose que de quelques options assez mineures de riposte à l’impressionnante gifle sécuritaire et militaire qu’il vient de subir. -Il pourrait d’abord tenter d’accélérer encore tous azimuts ses activités d’enrichissement d’uranium et de fabrication de missiles balistiques... Mais au risque de se faire condamner par l’Agence Internationale à l’Énergie Atomique, mais aussi par les pays européens. Et ce, à la veille du débat onusien de renouvellement, en septembre prochain, de l’embargo occidental sur les armes à destination de l’Iran.
-Téhéran pourrait aussi mobiliser de manière plus agressive ses milices supplétives en Syrie et surtout en Irak contre les forces américaines en faisant bombarder sans répit l’ambassade américaine de Bagdad ou bien encore en rehaussant le niveau des attaques des Houthis chiites du Yémen contre l’Arabie Saoudite, voire contre l’une des nombreuses bases militaires US. de la région. - Autre option envisageable pour l’Iran, cette fois contre Israël : procéder depuis la Syrie, comme en mai 2019, à une "attaque surprise" avec ses propres missiles contre le territoire de l’État hébreu, mais en en amplifiant l’efficacité par une synchronisation avec des salves continues de missiles du Hezbollah... Avec le risque évident – que Téhéran ne veut sans doute pas prendre pour l’instant - de provoquer un embrasement régional ! Et ce, attendu qu’Israël riposterait très fermement voire même de manière préventive, comme lors des attaques sans précédent de Tsahal contre de nombreuses plusieurs positions et arsenaux iraniens déployés sur le sol syrien lors du mémorable weekend du 18 et 19 juillet derniers - qui ont fait plusieurs centaines de victimes parmi les forces iraniennes et leurs milices supplétives près de Palmyre et sur la base perse de Boukamal le long de la frontière syroiranienne.
Fissures sérieuses dans la carapace du régime des mollahs Autre aspect, et non des moindres, de tous ces derniers événements qui viennent d’ébranler l’Iran : le fait qu’il est vraisemblable que la série coordonnée, simultanée d’attaques d’infrastructures stratégiques de ce pays au moyen d’explosions, d’incendies, de bombardements ou même d’actions de cyberguerre n’auraient pu connaitre cette régularité et surtout ce haut niveau de réussite sans le concours sur le sol iranien de réseaux perses – libéraux et/ou nationalistes - en tous cas antiislamistes opposés au régime des mollahs et coopérant main dans la main et de manière très méticuleuse avec les agents sur place des "puissances étrangères" à l’origine de ces impressionnantes destructions. Dit d’une autre manière : il semble bien que le scénario original et même le suspens pourtant parfois intense voire angoissant de la fameuse série israélienne "Téhéran" diffusé depuis un mois par la Première chaîne nationale de télévision Khan soient en fait désormais complètement dépassés par les très concrètes réalités de terrain... n
LE RÔLE DÉTERMINANT DES CHASSEURS F-35 DANS LE CIEL IRANIEN L’une des pièces maîtresses des"règles du jeu" récemment imposées à l’Iran par les Etats-Unis et Israël, ce sont les survols quasi-quotidiens du territoire iranien et de ses infrastructures stratégiques"sensibles" par les chasseursbombardiers furtifs F35 de 5ième génération, dont l’aviation de Tsahal possède plus d’une cinquantaine d’exemplaires en attendant de s’en faire livrer 30 autres d’ici 2024. D’un coût de 100 millions de dollars pièce, de fabrication entièrement américaine par la firme Lockheed Martin mais équipé dès sa livraison en Israël (les premiers avions sont arrivés fin 2016) de toutes sortes de compléments-radars, de tirs et de navigation"bleus et blancs", cet avion de chasse est le plus perfectionné du monde. Et ce, pour deux raisons essentielles dans le contexte des tensions avec l’Iran : d’abord, la israelmagazine.co.il
forme et les matériaux de son fuselage d’"avion furtif" lui évitent d’être repérés par les radars ennemis et donc de pouvoir survoler incognito ses objectifs sans être vraiment inquiété. Et puis il est doté d’une longue autonomie de vol qui lui permet d’accomplir des missions vers l’Iran ou d’autres pays assez lointains de la région sans devoir, en vol, être alimenté de kérosène – ce qui l’autorise à faire des allersretours directs vers ses cibles. "L’Iran ne cesse de menacer Israël de destruction, avait déclaré Benyamin Netanyahou au début 2020 lors d’une cérémonie de réception pour la livraison de plusieurs nouveaux F-35. Or, il faut se rappeler que ces avions peuvent aller partout au Moyen-Orient, notamment en Iran et bien sûr en Syrie".. n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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ISRAEL MAGAZINE
Le Combat des familles d’Enfants Extraordinaires face au Confinement
Autistes et trisomiques en guerre contre le virus
Annaelle Attar, enfant extraordionaire
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ivre au quotidien avec un enfant présentant un retard de développement ou un comportement atypique implique une rééducation permanente. La plupart d’entre eux reçoivent à ce titre un ensemble de traitements pris en charge par l’État, que ce soit dans des établissements spécialisés (Hinouh meyouhad), via leur Koupat Holim, dans le cadre des centres de développement de l’enfant (Itpathout Hayeled) ou en privé pour leur permettre d’acquérir un maximum d’autonomie dans leur vie future. Ainsi, les enfants extraordinaires sont amenés à rencontrer chaque semaine, en fonction
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par Johana Bensoussan
Depuis le 14 mars, date à laquelle le gouvernement israélien a annoncé le confinement total du pays, certaines personnes dites "à risque" ont déconfiné plus tardivement malgré les allègements successifs du gouvernement. C’est le cas de nombre de familles d’enfants "extraordinaires", à besoins spécifiques en conséquence d’un diagnostic de troubles Dys, de TDAH, de TSA (Troubles du spectre Autistique) ou encore de trisomies et maladies orphelines, privées de soins durant cette période et qui ont vécu cette expérience de manière singulière selon l’âge et les difficultés de chaque enfant. C’est dans ce contexte que j’ai lancé un appel à témoins sur le groupe Facebook "Mamans d’enfants extraordinaires" dédié à l’échange et à l’entraide entre mamans d’enfants, des mamans qui ont accepté de témoigner pour Israël Magazine. de leurs besoins, des kinésithérapeutes (physiotherapist), orthophonistes (klinait tikchoret), ergothérapeutes (ripouy veissouk), psychologues et autres thérapeutes axés sur des domaines artistiques tels que la musique ou l’art. Vous l’aurez compris, le 14 mars, du jour au lendemain, comme l’ensemble des enfants israéliens, les enfants extraordinaires ont été à la fois privés d’école et de tout type de soins, impliquant pour les parents la nécessité de "prendre le relais" de l’école d’une part et des soins thérapeutiques, d’autre part. Paradoxalement, les structures spécialisées
ont rouvert en priorité, les autorités jugeant visiblement que les besoins des enfants diagnostiqués, nécessitaient une prise en charge urgente ; pour autant, les horaires proposés étaient disparates à la reprise, et les systèmes de transport n’ont pas été effectifs immédiatement, ce qui a rendu le retour à l’école compliqué, voire impossible pour certains. Cette période s’est révélée une chance pour certains parents, qui ont pu constater de nombreux progrès chez leurs enfants, au contact de leur cercle familial, mais pour d’autres, malheureusement, une régression ou stagnation a pu être constatée. israelmagazine.co.il
EN MARGE DU CONFINEMENT
sans fond et craignons que la situation ne continue de se dégrader".
Le syndrome du bébé secoué Rivka Azoulay est l’heureuse maman de trois enfants d’âges rapprochés, Aaron 3 ans, Noam, 2 ans et Byniamin, 1 an. Son fils aîné, malheureuse victime de maltraitance par une assistante maternelle, a été affecté par le syndrome du bébé secoué, ce qui provoque des lésions du système nerveux central graves et potentiellement fatales. Sa vie a été épargnée mais il en garde de nombreuses séquelles sur les plans moteur, cognitif et communicatif notamment, en sus d’une perte quasi-totale de la vue. Aaron est pris en charge dans une maternelle spécialisée pour enfants présentant un retard de développement. Durant le confinement, la puéricultrice d’Aaron, ainsi que son orthophoniste et son ergothérapeute ont appelé ses parents régulièrement afin de leur donner quelques conseils visant à atteindre les objectifs fixés dans l’enceinte du gan. Ils ont même mis à disposition un trampoline pour permettre au petit garçon de progresser au niveau moteur ! Rivka raconte qu’elle s’est efforcée de garder un rythme journalier, accompagné de routines mises en place pour faciliter la vie d’Aaron et favoriser son apprentissage. Emplie d’appréhension au début de la période de confinement, elle affirme que le confinement s’est révélé bénéfique à de nombreux égards pour son fils. En effet, Aaron a développé considérablement son vocabulaire, ainsi que son autonomie dans son hygiène quotidienne ; par ailleurs, ses parents ont constaté rapidement une amélioration de son comportement qui, jusque-là, était régulièrement ponctué de crises de colère. Selon sa maman, la présence de son papa "à plein temps" aurait également considérablement contribué à ses progrès. Rivka qualifiera finalement la crise du Corona comme "un miracle" ayant permis un véritable déclic dans les acquisitions de son fils Aaron. israelmagazine.co.il
Le Kibboutz Leavot Aviva
Adèle Une autre maman d’enfant extraordinaire, qui a préféré témoigner anonymement qualifie l’expérience du confinement de "cauchemar". Maman de 3 enfants dont son benjamin, de 12 ans qui a été diagnostiqué très jeune sur le spectre autistique (TSA). Scolarisé dans une classe "meshoulevet" (où les enfants neurotypiques étudient aux côtés d’enfants à besoins spéciaux), il est en principe constamment accompagné d’une sayaat (équivalent de l’Auxiliaire de vie scolaire (AVS) en France), et suit de nombreux traitements afin de se maintenir au niveau pour lequel tant d’efforts ont été fournis en 10 ans. Malheureusement, la crise du Corona a eu des conséquences importantes sur son comportement ; de nature calme, il est devenu agressif et colérique, certainement du fait de sa frustration. Incapable de se concentrer sur les cours en Zoom proposés par son établissement, il aura également stagné du point de vue des apprentissages scolaires. Cette maman raconte avoir subi la pression du corps enseignant qui semblet-il aurait "oublié" le diagnostic de son enfant et les difficultés qui le caractérisent. Sa principale crainte pour l’avenir ? Que la rentrée scolaire de septembre prochain se déroule sur Zoom. "Nous avons la sensation de nous trouver dans un puits
Valérie Attar, quant à elle est maman de trois enfants dont Anaëlle, douze ans qui s’est avérée être la motivation principale de leur Alya, depuis la Belgique, il y a deux ans. Depuis, la famille d’Annaëlle a débuté un réel parcours du combattant qui les a guidés vers la structure la plus adaptée à leurs besoins, le Maon Etgar, internat situé dans le Kibboutz Leavot Aviva. Annaëlle cumule un diagnostic de Trouble Déficient d’Attention avec Hyperactivité (TDAH) avec un syndrome rare, qui impliquent une acquisition plus lente des apprentissages. Dès le mois de mars, avant même que le confinement total soit décrété, le Maon Etgar a laissé le choix aux parents de récupérer leurs enfants ou de prendre le risque de ne pas pouvoir les voir pendant les deux mois suivants. Pour Valérie et son mari, le choix est vite fait, Annaëlle rentre à la maison et malgré l’appréhension initiale, le confinement aura été une belle expérience. L’aide du Maon Etgar a été précieuse puisque la jeune fille a réussi à suivre chaque matin des cours par Zoom d’une durée d’une heure durant laquelle elle a pu s’entrainer à développer encore et encore son vocabulaire en hébreu. L’annonce de la reprise a rendu la jeune fille anxieuse et agitée alors qu’elle s’était réhabituée à être avec ses parents chaque jour et non plus juste durant Chabbat, sa maman nous confiera qu’il s’est agi pour sa fille d’une nouvelle adaptation, difficile certes, mais pour le mieux. Comme vous pourrez le constater, le confinement aura été vécu de manière très disparate, selon la situation familiale, la fratrie, les difficultés de l’enfant et les efforts mis en œuvre par les établissements pour venir en aide aux familles, reste désormais à maintenir le niveau des enfants extraordinaires ou à le rétablir.. n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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DES CHERCHEURS DÉTRUISENT DES CELLULES CANCÉREUSES
GRÂCE À UN TRAITEMENT PAR ULTRASONS
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PAR ALBERT SOUED
ne équipe de recherche internationale dirigée par le Dr. Tali Ilovitsh du Département de génie biomédical de l’Université de Tel-Aviv a développé une plateforme technologique non invasive révolutionnaire, combinant l’application d’ultrasons et de microbulles ciblant les tumeurs, pour délivrer des traitements génétiques dans les cellules cancéreuses du sein. Une fois les ultrasons activés, les microbulles se fixent aux cellules cancéreuses et explosent comme des missiles intelligents et ciblés, créant des trous dans la membrane cellulaire et permettant ainsi la délivrance du médicament. Testée en laboratoire, la méthode est parvenue à détruire 80% des cellules tumorales. Le Dr. Ilovitsh a développé cette technologie révolutionnaire à l’Université de Stanford. La technique utilise des ultrasons à basse fréquence (250 kHz) pour faire exploser des bulles microscopiques ciblées sur les tumeurs. «Les microbulles sont des bulles microscopiques remplies de gaz, dont le diamètre équivaut au dixième de celui d’un vaisseau sanguin", explique le Dr. Ilovitsh." Exposées à des ondes sonores à certaines fréquences et pressions, elles agissent comme des ballons, se dilatant et se contractant alternativement. Ce processus augmente le transfert des substances des vaisseaux sanguins vers les tissus environnants. Nous avons découvert qu’à certaines fréquences, les microbulles peuvent se dilater considérablement, jusqu’à exploser violemment. Nous avons alors réalisé que cette découverte pouvait être utilisée comme plate-forme pour le traitement du cancer, et avons commencé à injecter des microbulles directement dans les tumeurs in vitro"n
ROBOT SERPENT, DES DÉCOMBRES À LA CHIRURGIE
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e Snakebot du Professeur Alon Wolf, développé initialement pour localiser et sauver les survivants d’une catastrophe naturelle, existe dans une version à visée médicale. Le Snakebot a été développé, au sein du laboratoire de biorobotique et biomécanique du département de génie mécanique du Technion, qu’il dirige. Initialement, le robot serpent a été conçu pour application urbaine : il est capable de localiser et de sauver les survivants d’une catastrophe naturelle, grâce à sa capacité à se mouvoir dans les décombres. Deux ans plus tard, une version à visée médicale a été développée par l’entreprise Medrobotics, cofondée par le Professeur Alon Wolf, avec les Professeurs Howie
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Choset (Carnegie Mellon University) et Marco Zenati (Harvard Medical School). Le robot chirurgical, fruit de leur collaboration, a été renommé Flex® Robotic System. Il est capable, grâce à sa flexibilité, d’effectuer des chirurgies dans des organes difficiles à atteindre par le praticien. Ces deux versions du robot serpent ont été respectivement lauréates du prix" An innovation that will shape the future", littéralement," une innovation qui façonnera l’avenir", en 2012 et en 2014 par le magazine américain PopSci (Popular Science) de vulgarisation scientifique. Flex® de Medrobotics a été récompensée à de nombreuses reprises, valorisant l’avancée prometteuse que constitue ce robot pour la pratique chirurgicale.n israelmagazine.co.il
NOUVELLE ÉTAPE DANS LE
TRAITEMENT DU CANCER
L
e système d’administration de CAPS Medical permet d’envoyer un gaz ionisé de haute énergie à l’intérieur même d’une tumeur, afin de tuer les cellules malignes. Celui-ci est indiqué, en premier lieu, dans le traitement du cancer de la vessie."Le Saint Graal de tous les traitements du cancer serait une méthode qui permette de ‘maximiser’ les dommages causés aux tumeurs, tout en minimisant les dommages affectant les tissus sains qui les entourent", déclare Ilan Uchitel, PDG de CAPS Medical. Ce dernier estime que sa start-up a peut-être trouvé la solution. La société Or Yehouda a développé un petit cathéter jetable capable d’atteindre des endroits du corps pourtant difficiles d’accès, afin de délivrer du plasma à pression atmosphérique (catégorie spéciale de
le dispositif sera également applicable à d’autres types de tumeurs des organes solides. a PAC existe depuis 15 ans, mais jusqu’à présent uniquement pour traiter les tumeurs superficielles (en dehors du corps), ou bien durant une opération. CAPS Medical permet à présent d’atteindre les profondeurs du corps Le CAP est un flux de gaz ionisé à haute énergie ("il brille en quelque sorte", souligne Uchitel), composé d’oxygène et d’azote réactifs. Lorsqu’il est appliqué à une tumeur, le CAP"provoque la mort des cellules cancéreuses, puis déclenche une réponse immunitaire dans l’organisme qui cible spécifiquement d’autres cellules cancéreuses dans la zone environnante", explique M. Uchitel.n
L
plasma pour lequel la pression approche celle de l’atmosphère). La société s’attaque d’abord au cancer vésical non invasif sur le plan musculaire (NMIBC), qui atteint la vessie par l’urètre. Selon M. Uchitel,
LE CARMEL MEDICAL CENTER
À
Haïfa, les médecins du Carmel Medical Center et les chercheurs de la faculté de génie biomédical du Technion ont développé une technologie qui permettra de protéger les voies respiratoires des enfants prématurés ayant besoin d’une ventilation assistée. Directeur de l’unité des nouveaux nés au sein du département de néonatologie du Carmel Medical Center, le professeur Dan Waisman lève le voile sur le partenariat noué avec le Technion, le plus grand institut de recherche du pays dont l’un des pères fondateurs fut Albert Einstein en 1912. Dan Waisman :" Nos travaux de recherche récemment publiés, découvrant l’un des mécanismes susceptibles d’aggraver les maladies pulmonaires chez les nourrissons prématurés ventilés, ne visaient pas à l’origine à développer un dispositif spécifique. Grâce à nos recherches, nous avons mieux compris comment les ventilateurs mécaniques actuellement utilisés peuvent affecter les prématurés et, en même temps, comment prévenir les dommages et obtenir de meilleurs résultats.n
DES CHERCHEURS PRODUISENT
DE L’ALCOOL À USAGE MÉDICAL À PARTIR DE DÉCHETS BIODÉGRADABLES
D
es chercheurs, sous la direction du Prof. Hadas Mamane, de l’Université de Tel-Aviv, ont réussi à produire de l’éthanol, le désinfectant médical le plus courant, également utilisé pour la fabrication des solutions hydroalcooliques destinées à l’hygiène des mains - à partir de déchets agricoles. Basée sur un processus innovant, la méthode permettra de mettre fin à la crainte de pénurie d’alcool pour usage médical accentuée par la pandémie du covid19. L’étude a été financée par le ministère israélien de la Science.La lutte contre le coronavirus commence par le maintien de l’hygiène. L’irruption de l’épidémie a donc israelmagazine.co.il
augmenté considérablement la demande d’alcool désinfectant. L’éthanol est le désinfectant médical le plus courant, également utilisé pour fabriquer les solutions hydroalcooliques en usage dans le grand public. À l’heure actuelle, il n’y a toujours pas de production nationale d’éthanol en Israël qui dépend entièrement des importations dans ce domaine. En 2018, le pays a importé 23 000 tonnes d’éthanol, produit en grande partie à partir de sources alimentaires telles que le maïs. Le défi est devenu plus important encore pendant la pandémie, avec la fermeture des frontières et les restrictions à l’importation.n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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UNE COOPÉRATION RÉVOLUTIONNAIRE ENTRE
ISRAËL ET L’ITALIE DANS LA GUERRE CONTRE LE CORONA
I
l y a peu de temps, l’ambassadeur d’Italie à Tel-Aviv, Gianluigi Benedetti - signait la coopération entre les pays concernant le diagnostic ultrasonore Corona. Le Collège Afeka et l’Université catholique Del Sacro à Rome développeront ainsi des outils pour diagnostiquer rapidement des porteurs corona potentiels en utilisant la technologie de traitement de la parole et l’intelligence artificielle. Président de l’Afeka Academic College, le Prof Ami Moyal:"La collaboration fournira des outils pour faire face aux futures épidémies de Virus Corona ainsi que d’autres virus" Après plusieurs mois difficiles, l’Italie, face aux défis de la Corona, travaille à de nouvelles solutions technologiques. Des solutions dans le domaine du traitement de la parole et de l’intelligence artificielle seront développées pour détecter les symptômes corona. Cette période des mois d’été et d’automne est une période intérimaire nécessitant un degré élevé de préparation au scénario d’une autre épidémie et, à la lumière de cela, la collaboration a été formée, ce qui peut constituer une percée. Les essais cliniques permettront une identification et un diagnostic précoces des porteurs potentiels grâce à l’analyse de la voix, de la parole et même de la toux des patients. Le recrutement des patients et le début de l’examen seront suivis par les hôpitaux italiens tels que"Fondation Policlinico Jumeaux" À Rome, et Rabin Medical Center, Tel-Aviv. L’ambassadeur d’Italie en Israël :"La coopération entre ces centres d’excellence est l’un des résultats fructueux des contacts intensifs à long terme entre les communautés scientifiques italienne et israélienne, qui sont devenus encore plus forts depuis la première phase de l’épidémie". Le professeur Ami Moyal concluait:"Nous espérons développer des outils technologiques qui aideront les citoyens, les pays et toute l’humanité dans la lutte contre le virus Corona et ensemble, nous sauverons des vies."n
ONCOLOGIE :
ZEALAND UNIVERSITY HOSPITAL TESTE LE CONTRÔLE SANGUIN À DOMICILE
L
’établissement de santé expérimente depuis le mois de mai une nouvelle plateforme qui permet aux patients atteints de cancer de tester à domicile leur état de préparation à la chimiothérapie. Centre de traitement spécialisé, le Zealand University Hospital (296 lits, 1600 salariés, 22 000 entrées par an), situé à Roskilde et Køge (Danemark) a débuté un partenariat pour expérimenter une plateforme (HemoScreen créée par la société israélienne PixCell), capable de réaliser des tests sanguins à domicile pour les patients atteints de cancer. Soutenu par l’initiative Changing Cancer Care (CCC du programme Interreg), le système effectue les analyses NFS (numération de
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la formule sanguine) en six minutes. Il fait gagner du temps, limite les déplacements et évite l’exposition des personnes immunodéprimées aux infections nosocomiales dans un hôpital. La première phase de test devrait se terminer en mai avec la vérification par le département de biochimie clinique de l’hôpital, de la validité de la précision des mesures et de l’utilisation de l’outil. Prévue jusqu’à la fin septembre, la phase 2 comprendra la formation du personnel du service d’oncologie clinique du ZUH puis de patients. La dernière étape, qui consistera à vérifier la faisabilité au domicile des malades, se terminera en décembre 2021.n
DES CHERCHEURS ISRAÉLIENS ÉLABORENT
UN SIMULATEUR DE SORTIE DE CRISE
L
e Technion a conçu un simulateur capable de visualiser les conséquences des différentes options concernant le déconfinement et la sortie de crise sanitaire, et d’adapter en conséquence les achats et l’organisation logistique. Une équipe pluridisciplinaire de scientifiques dirigée par Nir Gavish, et le professeur Omri Barak, de la faculté de médecine Rappaport, vient de concevoir un simulateur capable d’évaluer les conséquences des mesures gouvernementales sur l’évolution de la pandémie. Cet outil pourrait également permettre aux responsables d’établissements hospitaliers de mesurer en temps réel les incidences qu’auront ces décisions à leur niveau. Dans l’immédiat, les recherches se sont concentrées sur les données relatives au déconfinement en Israël :"Elles sont aujourd’hui agrégées et intégrées à cet outil pour mieux en appréhender les effets, mais les paramètres peuvent être adaptés en France comme dans n’importe quel autre pays". L’outil élaboré par les chercheurs israéliens permet de simuler les conséquences sanitaires de ces décisions : nombre de malades, nombre de patients ventilés, nombre de décès... Dans le secteur de la santé, ce simulateur peut ainsi permettre aux directeurs d’établissements de visualiser les conséquences des différentes options politiques de sortie de crise sur leur activité et adapter en conséquence leur organisation, leurs achats et leur organisation logistique. :" L’algorithme fournira tous les effets qui en résultent, poursuit Nir Gavish, permettant ainsi aux responsables d’établissements de santé de concentrer la discussion sur des questions spécifiques. israelmagazine.co.il
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ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
ISRAEL MAGAZINE
Roladin, Roladin,
un Rêve devenu Réalité Kobi Hakak, le président de Roladin est passionné par la fabrication de ses entremets, par le design de ses boutiques, jusqu’à celui des boites de confection de ses gâteaux. Comment ce paradis sucré des gourmets a-t-il vu le jour en Israël? Au début de cette aventure, en 1987, Kobi était un jeune soldat de Tsahal et son frère Avi Kaynan revenaient d’un périple en Europe. Ils ont commencé à vendre des pâtisseries artisanales en porte à porte durant chaque week-end, transportant la marchandise dans une voiture. Ces ventes leur procuraient juste un peu d’argent de poche mais ils ont néanmoins ressenti le potentiel du marché. Un peu plus tard, le troisième frère Doudi Kaynan, les a rejoints pour contribuer à développer la société. En 2012, Golan Einat est devenu leur partenaire commercial. Aujourd’hui, les desserts de chez Roladin sont incontournables en Israël. 20 | ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020
E
n 1989, les deux frères Kobi et et Avi décidèrent d’ouvrir une première boutique Roladin à Ramat Hasharon. Ils eurent alors l’idée de vendre des "soufganiots" tout chauds sortis du four, durant les préparatifs de Hanoukka, devant leur enseigne de Ramat Asharon, une nouvelle initiative dans l’histoire de la vente des beignets en Israël. Du jour au lendemain, des files d’attentes gigantesques se formèrent devant leur magasin ; des centaines de clients se postaient devant la boutique durant les huit jours de Hanoukka, dans l’attente de leurs soufganiots. L’entreprise ne désemplissait pas.
Par Odile Solnica
Kobi , Avi Kaynan, Doudi Kaynan, Golan Einat Le second magasin s’est alors ouvert un peu plus tard à Ramat-Aviv. En l’espace de 30 ans, l’enseigne Roladin a pu ouvrir progressivement 87 succursales. Or Kobi Hakak réalisa pendant le Corona, que l’entreprise vendait beaucoup plus de pain qu’habituellement. Aussi Roladin ouvrira bientôt une très grande boulangerie de 1.500 m2. C’est un très important investissement d’un montant de 5 millions d’euros. Le pain sera de haute qualité. Chaque jour, Roladin crée 7.000 pains faits à la main, il est aussi sur le point d’ouvrir 4 boutiques à Modin, à Hadera, à Ramat Gan, et à Kiriat Shmona. Kobi Hakak reçoit Israël Magazine et nous explique l’ascension de Roladin. israelmagazine.co.il
SUCCESS STORY
Comment se sont développés vos succursales et votre système de franchise ? Kobi Hakak : "Nous faisons très attention à la qualité de nos produits. Nous choisissons d’ouvrir maximum 6 ou 8 succursales par an. Il est précieux pour nous de trouver des personnes de qualité, des franchisés loyaux. La localité de la boutique aussi est importante. Nous n’acceptons pas que les futurs franchisés se contentent de venir avec simplement de l’argent. Après sélection, nous leur apprenons en trois mois, tout ce qu’ils doivent savoir pour diriger une boutique." Ouvrir une franchise Roladin représente un cout d’environ un million de shekels. Les franchisés achètent tout le matériel nécessaire, toutes les machines de l’usine. Roladin construit la boutique, conçoit tout le design pour chaque magasin, même si les franchisés couvrent tous les frais. israelmagazine.co.il
Tous les Israéliens connaissent aujourd’hui la marque Roladin Régulièrement, ces derniers sont encadrés par les chefs de différents départements. Aujourd’hui Roladin avec ses 87 succursales, a plus de 1000 employés en comptant toutes ses franchises, avec 200 salariés dans son usine de fabrication de 4.000 m2 à Kadima, près de Netanya. Les produits de boulangerie et de pâtisserie de Roladin sont fabriqués à la main dans son usine. Chez Roladin, les trois frères ont
chacun un rôle précis. Kobi Hakak est le président directeur général. Avi s’occupe de l’immobilier et Doudi est le directeur du développement de l’entreprise. Avez-vous un marketing particulier pour promouvoir Roladin ? Kobi Hakak : "Tous les Israéliens connaissent aujourd’hui la marque Roladin. Nous avons des produits faits maison de haute qualité, avec des prix raisonnables. Nous sommes très stricts au niveau de la qualité. Dans chaque département, nous avons un responsable et un adjoint. pour différentes sortes de gâteaux, pour les viennoiseries, pour les différents pains. Nous avons trois ingénieurs alimentaires et leurs adjoints et deux managers industriels." Les chefs pâtissiers de Chez Roladin vont suivre des cours en Belgique, en Suite page 22
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Des effets du Covid 19 sur les boutiques Roladin ?
Allemagne, en Suisse, en France pour leur inspiration. Les trois frères se sont beaucoup imprégnés des trésors de luxe des produits français en matière de boulangerie et de pâtisserie. Ils s’inspirent surtout des chefs pâtissiers français, tels que Guyon, Pierre Hermé, Michalak, et ceux de la maison Ladurée. Quelle est la période où vous avez le plus important chiffre d’affaires ? Kobi Hakak : "Pendant les festivités de Hanoukka, nous doublons notre clientèle, soit 80.000 clients chaque jour. Nous avons une collection spéciale de beignets durant Hanoukka. Une autre période de l’année est cruciale pour notre chiffre d’affaires ; c’est celle des fêtes de Pessah où nous préparons des macarons et des gâteaux sans farine."
Kobi Hakak : "Avant le Corona, nous avions chaque jour 40.000 clients en Israël. Maintenant nous avons environ 28.000 clients. Durant le premier mois, tous les commerces étaient fermés et personne ne pensait que Roladin était ouvert ; nous sommes reconnus désormais, aussi, comme une boulangerie. C’est durant le second mois du début du Covid 19, que nous avons pu proposer davantage de produits à emporter, à livrer. En juin, nous avons pu alors vendre 90% de nos produits. Nous avons pu écouler davantage de gâteaux car les Israéliens vont aujourd’hui moins au restaurant." et cela nous a profité. n
La Ténacité et la Passion de Dirigeants d’Entreprise
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Inna Braverman avec François Hollande
David Fattal
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e cet amour de la créativité dans le domaine de la pâtisserie artisanale de Roladin, après ces ventes de gâteaux de porte à porte des deux frères Kobi Hakak et Avi Kaynan en 1987, cette enseigne a réussi son pari avec ses 87 succursales. D’une idée ingénieuse avec de petits moyens, naîtra aussi dans le secteur de l’énergie renouvelable, Eco Wave en 2011, en convertissant l’énergie des vagues en électricité. Grâce aussi à la détermination d’un serveur et groom d'hôtel, un autodidacte sera le fondateur de la plus grande chaîne hôtelière d’Israël, Fattal. L’Israélienne Inna Braverman a fondé, avec son associé David Leb en 2011, Ecowave Power, avec un système de flotteurs pour transformer la force des vagues en électricité. Cette société a été crée avec quelques centaines de dollars, sans expérience dans le domaine de l’ingénierie. Elle est entrée au Nasdaq, le deuxième plus important marché d’actions des Etats-Unis. David Fattal est le fondateur de la chaîne d’hôtels Fattal, la plus grande organisation hôtelière d’Israël. Il a commencé en tant que serveur et groom et a gravi les échelons de la direction avant de créer Fattal Hotels en 1998 à l’âge de 41 ans. Fattal Hôtel possède 39 hôtels en Israël. Les hôtels Herods et Leonardo Plaza font partie de cette chaîne hôtelière et Fattal gère aussi 150 hôtels en Europe. Il possède 64% des parts de la société. Avec au départ des bouts de ficelle, de la passion, de la créativité dans le domaine de la pâtisserie artisanale à celle également dans le secteur de l’énergie renouvelable, de cette détermination dans le secteur de l’hôtellerie, ces dirigeants d’entreprises montrent grâce à leur conviction et à leur persévérance, qu’il est possible de réaliser ses rêves.n
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BRÈVES ECO MICROSOFT
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icrosoft a annoncé son intention de lancer une initiative mondiale pour aider 25 millions de personnes dans le monde d’ici la fin de l’année à acquérir les nouvelles compétences numériques nécessaires aujourd’hui. L’annonce vise à faire face à la crise économique mondiale causée par la crise du virus Corona. Un large accès aux compétences numériques est une étape importante pour accélérer la reprise économique, en particulier pour les populations fortement touchées par la perte d’emplois. L’initiative, publiée sur le blog Microsoft, comprend des étapes immédiates pour aider ceux qui ont besoin d’une formation professionnelle et qui souhaitent postuler à des postes. 1. Données et analyses : utiliser les données pour identifier les emplois les plus recherchés et les compétences et les compétences nécessaires pour eux. 2. Fournir un accès gratuit aux ressources d’apprentissage : étudiez les pistes et le contenu de Microsoft Learn, Lindkain et GitHub Afin de contribuer au développement des compétences nécessaires aux métiers recherchés. 3. Connecter les compétences aux opportunités : les certifications et certifications sont reconnues dans l’industrie à faible coût et offrent un accès gratuit à des outils de recherche d’emploi pour aider ceux qui ont les compétences et les qualifications à trouver de nouveaux emplois.n
MOINS DE VOITURES PARTICULIÈRES SUR LA ROUTE Moins de pollution: le ministère conclut un programme visant à réduire l’utilisation quotidienne des voitures. Le ministère de l’Environnement a mis fin à un programme qui a alloué plus de 20 millions de shekels à 19 autorités locales, pour 28 projets visant à réduire l’utilisation des voitures privées. Les projets comprenaient: la location de vélos, l’installation de quais de recharge pour les vélos électriques, la mise en place de services de navette vers les centres d’emploi et la création de zones à faibles émissions en Israël. La ministre de la Protection de l’environnement, Gila Gamliel: "L’utilisation quotidienne de véhicules privés entraîne des émissions polluantes préjudiciables à notre santé. Notre soutien à la révolution des véhicules électriques et à l’amélioration de la capacité du public à voyager par divers moyens non motorisés réduit non seulement la nombre de voitures sur les routes, mais contribue également
à réduire la pollution de l’air. On continue de travailler de diverses manières pour réduire la pollution de l’air par les véhicules, promouvoir les véhicules électriques et améliorer la qualité de vie des résidents." Parking à vélos : 2,5 millions de shekels ont été affectés à la construction de 8 000 parkings à vélos dans 10 autorités locales, dont Beersheva et Nes Ziona. Des études du monde entier montrent que la disponibilité d’un parking à vélos gratuit augmente l’utilisation des vélos de 11%. Location de vélos : 3 millions de shekels ont été consacrés à la création de 27 stands de location de vélos dans 4 autorités locales : Ramat Gan, Givatayim, Tel-Aviv et Bnei Brak. Deux projets supplémentaires sont toujours en cours. Quais de chargement de vélos : un quai de chargement de vélos électriques est en cours de construction à Kiryat Yam - coût de 700.000 NIS.n
8LES DÉGÂTS ÉCONOMIQUES DU CORONA
En Israël cette année il y aura exceptionnellement plus de fermetures d’entreprises que d’ouvertures. En ce premier trimestre 37000 entreprises ont fermé leurs portes plus particulièrement 1500 restaurants et 1000 entreprises de rénovation et de sous-traitance dans le bâtiment. Il y aura cette année 40% de moins d’entreprises créées pour une raison essentielle : l’incertitude. La baisse de la croissance, le chômage dans la société, empêchent les créateurs d’entreprises de croire à la rentabilité d’une future affaire.n
LE MINISTRE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS, YOAZ HENDEL, A demandé aux sociétés de cellulaires de ne pas taxer les consommateurs qui auraient explosé leur forfait pendant la période du Corona. Aussi, déjà, ces sociétés auraient remboursé 25 millions de shekels aux usagers. Des centaines de plaintes avaient été déposées contre Bezek (décidément) et autres sociétés de téléphone. C’est la communauté orthodoxe qui avait été la plus touchée car ils avaient été contraints de se mettre aux smartphones et aux ordinateurs pour communiquer pendant le confinement. Bezek a été, par ailleurs, contraint par le ministre à installer le réseau de fibres optiques dans tout le pays sous cinq ans.n
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BRÈVES ECO
L’ARTISAN-BOULANGER FRANÇAIS KAYSER ARRIVE EN ISRAËL
L
es dit-on meilleurs baguettes et croissants de France arrivent bientôt en Israël en août, et plus particulièrement au Port de Tel-Aviv. La baguette de Kayser cet artisan-boulanger qui a multiplié les ouvertures de boutiques dans le monde (250 dont 20 à Paris dont la toute première en1996) est faite sans suppléments chimiques mais avec des œufs provenant de poules élevées librement. Éric Kayser, lui-même fils de boulanger, a lancé sa première boutique rue Monge, à Paris et près de 25 ans plus tard, il produit toujours du pain de tradition décliné en bio ou en sans gluten. "Je veux faire de l’artisanat en boulangerie. Pains, viennoiseries et brioches de la Maison Kayser sont réalisés sans additif, ni conservateur, élaborés avec des farines sélectionnées et un levain liquide, fabriqués sur place". Sympa n
REMBOURSEMENT DIFFÉRÉS DES CRÉDITS
LE MARCHÉ DU RETOUR À L’ÉCOLE S’ÉCROULE
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tudes à distance, ordinateurs, on n’achète plus de cahiers, on ne se déplace plus. Cela fait trente ans que les professionnels du secteur n’avaient connu une telle situation. Les ventes sont ralenties et personne n’entrevoit ce qui se passera à la rentrée en septembre. Office Dépôt et Kravitz, deux des plus importantes entreprises du secteur, s’attendent à des baisses avoisinant les 12% par rapport à 2019. Par contre la fermeture de l’espace aérien et des livraisons de l’étranger a freiné cette baisse car les Israéliens ne peuvent plus s’y fournir. Chez ces deux mêmes sociétés, les achats se font ON LINE, trois fois plus qu’en 2019. Notons que le prix des cartables a fortement baissé (comme les ressources du pays).n
LA RABBANOUT S’INCLINE DEVANT LA RÉFORME DU CORN FLAKES
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ans l’optique de soutenir ceux qui ne peuvent payer ni leur loyer ni leur remboursement de prêts ’hypothécaires, il est possible de repousser jusque au 30-102020 et ceux qu’avaient déjà fait en avril ou mai, pourront la différer jusqu’en décembre 2020. Les crédits à la consommation pourront eux aussi être différés mais jusqu’à 6 mois et jusqu’à la somme de100.000 shekels maximum. 555 300 prêts hypothécaires ont été ainsi repoussés entre mars et juin. Pour un montant de de 7 milliards de shekels. Par ailleurs le gouvernement a prolongé l’admissibilité aux allocations de chômage pour coronavirus jusqu’à juin 2021 La décision garantit un soutien financier continu à quelque 250 000 Israéliens dont les indemnités devaient expirer en juillet, étend l’admissibilité aux subventions aux travailleurs de plus de 67 ans qui ne retourneront pas au travail. Cette décision garantit un soutien financier continu à quelque 250 000 Israéliens dont les compensations devaient expirer début juillet.n
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e Grand rabbinat d’Israël a décidé d’assouplir ses règles de surveillance et de s’associer à la lutte contre la vie chère. Pour décider de la cacherout ou pas d’un produit, elle prendra désormais conseil auprès de spécialistes et ne contrôlerons plus la production. Tout ceci afin de promouvoir les exportations parallèles et de briser certains monopoles. La procédure a été autorisée par le conseiller juridique du Grand rabbinat, Grand rabbinat placé sous l’autorité du Grand rabbin, Yossef, fils de Obadia Yossef.n
LA PIRE SITUATION ÉCONOMIQUE DE L’HISTOIRE
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e nouveau ministre des Finances, Israël Katz, a affirmé qu’Israël se trouvait "dans la pire situation économique" qu’ait connue le pays "au cours des dernières décennies", en raison de la pandémie du Covid-19."Cela ne va pas s’améliorer puisque selon les estimations, le déficit public va augmenter à plus de 10% du PIB d’ici la fin de l’année. Cela va entraîner une croissance négative, mais également un mauvais ratio PIB/endettement", a-t-il prédit. M. Katz a néanmoins indiqué que le gouvernement aide les entreprises à faire face à la crise, parlant d’"énormes sommes" d’argent
injectées dans l’économie."Nous observons une tendance inquiétante concernant la hausse du nombre de cas de contamination lors de cette deuxième vague. La courbe a commencé très haut, puis est retombée, mais elle est repartie à la hausse," s’est inquiété le ministre, tout en rejetant l’éventualité d’un nouveau confinement." Aujourd’hui, notre économie est sûre, mais tout le monde doit obéir aux règles", a-t-il exhorté, en faisant référence aux mesures sanitaires (distanciation sociale, port du masque, lavage des mains).n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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ISRAEL FACE A L’ACCORD IRAN-CHINE F La Chronique de Guy Milliere
évrier 2020. L’économie américaine se porte bien. Elle ne s’est même jamais aussi bien portée depuis plus de cinquante ans et elle est en situation de plein emploi. Donald Trump a obtenu des concessions majeures de la Chine, dont la croissance s’est effondrée. L’Iran subit les lourds effets de l’asphyxie résultant des sanctions décidées et maintenues par l’administration Trump. Donald Trump est sur la trajectoire d’une réélection quasiment assurée. Les démocrates, qui viennent de mener une tentative de destitution du Président qui ne reposait sur rien, sont en quête d’une stratégie et en plein désarroi. Le coronavirus de Wuhan plane sur l’horizon, mais n’a pas encore déferlé.
Cinq mois plus tard, tout est différent. Le coronavirus de Wuhan est devenu une pandémie, et l’économie américaine est à l’arrêt presque complet depuis trois mois. Des signes de redémarrage se dessinent dans les Etats républicains, mais les Etats démocrates maintiennent une fermeture économique presque complète. Les grands médias disséminent la peur en notant l’augmentation du nombre de gens testés positifs et oublient le nombre de décès, lui, en forte baisse. Après les émeutes
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menées par Antifa et Black Lives Matter, ce dernier est passé à la destruction de statues. Les maires, démocrates, de New York et Los Angeles ont livré leurs villes à des groupes violents, et coupé une large part du financement de leurs forces de police. Donald Trump se bat tout à la fois pour que l’ordre revienne dans le pays, que l’économie se redresse, que la pandémie soit endiguée. Il mène aussi campagne pour l’élection du 3 novembre. Ses adversaires semblent miser sur le chaos, la hantise de la mort et le chômage pour espérer gagner. Trump sait que ses décisions, sur un plan intérieur comme extérieur, va être scrutée avec malveillance, et peuvent lui coûter cher. Cela explique largement pourquoi il n’a pas pris position ouvertement en faveur du rattachement de la Vallée du Jourdain et d’une part de la Judée-Samarie à Israël. Cela explique aussi qu’il ne prend aucune décision majeure sur d’autres dossiers. L’ennemi principal des Etats-Unis est la Chine, et le dictateur chinois Xi Jinping a utilisé la situation pour écraser Hong Kong et abolir l’autonomie dont elle jouissait encore : la Chine perd une place financière importante, mais Xi Jinping pense qu’il peut se le permettre et compte visiblement sur une défaite de Donald Trump en
novembre, sachant que Joe Biden, s’il est élu, se pliera aux exigences chinoises.
L’Iran et les tarifs préférentiels
L’autre ennemi des Etats-Unis, l’Iran des mollahs, était en très grande difficulté et venait de subir une vague de cyberattaques extrêmement suffocantes pour son programme nucléaire et, au delà, pour son programme militaire lui-même : le régime, qui avait déjà des liens étroits avec la Chine, a reçu des propositions d’aide substantielles de sa part, et vient de signer avec la Chine des accords qui devraient lui permettre d’éviter l’effondrement, de se stabiliser, de réparer rapidement les graves dégâts qu’il vient de subir, et, sans doute, de remettre en ordre de marche son économie sinistrée. L’accord prévoit la vente de pétrole iranien à la Chine à un tarif préférentiel, et devrait permettre à l’Iran de vendre beaucoup de pétrole, en contournant les sanctions américaines, et il montre que la Chine est prête à risquer la colère américaine, comptant sur une défaite de Trump. L’accord prévoit des investissements chinois massifs en Iran, 400 milliards de dollars sur une période de vingt-cinq ans, 280 milliards pour les équipements pétroliers et les exploitations minières, israelmagazine.co.il
La Chronique de Guy Milliere l’Iran de frapper Israël, c’est la certitude qui fait partie de l’accord de 2015 arrivera que toute frappe iranienne contre Israël à expiration au mois d’octobre, ce qui ne conduirait à la destruction immédiate de va strictement rien arranger. l’Iran par Israël; et d’autre part, la certitude Les conclusions à tirer pour Israël sont que les Etats-Unis étaient résolument au simples. Israël devra être d’une vigilance côté d’Israël. Et l’Iran a mené contre Israël de chaque instant jusqu’à l’élection une guerre par procuration (proxy war), présidentielle américaine du 3 novembre: en finançant et en armant des groupes dès que l’argent arrivera sur les comptes terroristes (Hezbollah, Djihad islamique des organisations terroristes susdites, palestinien, Hamas), cette guerre s’était les attentats risqueront de reprendre. quasiment éteinte ces derniers mois, parce Israël doit aussi considérer que la Chine que les caisses de l’Iran étaient vides. est une puissance hostile : tout accord Si l’Iran était sanctuarisé grâce à l’arme technologique entre Israël et la Chine ne atomique et disposait de moyens antipeut être déconnecté de l’alliance Iranmissiles de plus en plus performants, Chine, et toute technologie israélienne l’Iran ne déciderait pas nécessairement de dont la Chine pourrait disposer pourra se frapper Israël directement, car la crainte retrouver en Iran. Les contrats passés entre de voir l’Iran détruit par Israël persisterait, Israël et des entreprises chinoises devront mais cette crainte serait appelée à diminuer. être sérieusement réexaminés, et c’est Si les caisses de d’ailleurs le message l’Iran remplissaient Si Trump était battu que le Secrétaire d’Etat, à nouveau, l’argent Mike Pompeo, est venu, qu’on ne par anticipation, et coulerait à nouveau (hypothèse à flots vers les peut totalement écarter sachant ce qui se tramait mains sanglantes aujourd’hui), les Etats-Unis à Téhéran et à Pékin, du Hezbollah, du transmettre en Israël Djihad Islamique et seraient beaucoup moins lors de sa visite en mai du Hamas, avec les résolument du côté d’Israël, dernier. conséquences qu’on et beaucoup plus du côté Le contrat passé par imagine. La Chine Israël avec la Chine pour n’en aurait rien à de l’Iran et les démocrates ce qui concerne le port faire : elle vient de ne s’en cachent pas. de Haïfa n’a cessé de montrer qu’elle est susciter la préoccupation prête à ignorer l’hostilité radicale et absolue de l’administration Trump, sans doute à de l’Iran vis-à-vis d’Israël. L’embargo sur juste titre. La Chine, pays totalitaire sans la vente, la livraison et le transfert d’armes scrupules a des intentions hégémoniques ou de matériels liés à l’armement à l’Iran et prédatrices.n
et 120 milliards pour les infrastructures du pays, mais il ne fait aucun doute qu’il inclut des dimensions militaires, et quiconque lit le document voit que cellesci sont omniprésentes, en filigrane de ce qui est écrit. La Chine étant une puissance atomique, il ne fait aucun doute non plus que l’Iran entend se doter grâce à la Chine des moyens de disposer de l’arme nucléaire à brève échéance, et dès lors de se sanctuariser. Des manœuvres navales conjointes entre l’armée iranienne et l’armée chinoise (manœuvres auxquelles la Russie a participé) ont déjà eu lieu, et d’autres sont prévues, destinées à montrer que quiconque attaquerait l’Iran pourrait se trouver confronté à la Chine (voire à la Russie). Quand bien même les investissements chinois en Iran se révéleraient inférieurs aux chiffres annoncés, ils se feront. L’alliance se consolide et il faut souligner que les accords portent aussi sur le renseignement : or la Chine, comme l’a dit voici peu dans un discours le ministre de la Justice américain William Barr, est responsable, à elle seule, de 80% des activités d’espionnage industriel et militaire dans le monde aujourd’hui. L’accord montre que la Chine se place en position d’hostilité déclarée face à Trump et entend renforcer l’hostilité de l’Iran envers l’administration Trump. Il place Israël face à une menace plus concrète et plus imminente. L’Iran n’a jamais caché son hostilité absolue à l’existence d’Israël. Ce qui a retenu
Les frontières d’Auschwitz
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’élection présidentielle américaine du 3 novembre prochain sera d’une importance extrême. Si Trump l’emporte, Israël aura toujours un allié à la Maison Blanche, et il est certain que Trump exercera une pression maximale sur la Chine, et se donnera les moyens de remettre en place un endiguement strict de l’Iran. Si, comme l’espèrent la Chine et l’Iran, Joe Biden devait l’emporter, la situation deviendrait différente: le monde pourrait se diriger vers une hégémonie chinoise, et les ambitions hégémoniques de l’Iran sur le Proche-Orient reviendraient à l’ordre du jour. Une administration démocrate n’abandonnerait pas totalement Israël, mais procéderait à des pressions intenses sur Israël aux fins que le gouvernement israélien accepte d’être reconduit à ce qu’Abba Eban appelait les frontières d’Auschwitz. Quiconque écoute les propos de ceux qui constituent l’extrême gauche du parti démocrate peut craindre pire encore. Faut-il l’ajouter? Erdogan espère lui aussi l’élection de Joe Biden et a parlé récemment de Jérusalem en termes menaçants. L’Union Européenne espère elle-même l’élection de Joe Biden, rêve de faire à nouveau des affaires avec l’Iran des mollahs et de continuer ses relations commerciales avec la Chine, en fermant les yeux sur ce qu’est le régime chinois. Elle porte sur Israël un regard qui ressemble souvent à celui que l’extrême gauche du parti démocrate porte sur Israël. L’élection présidentielle américaine du 3 novembre prochain sera la plus importante élection présidentielle américaine depuis des décennies. n
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Par Yehouda Bethleem
Le Lavi 1987 Photo: Nati Harnik / GPO
Le Lavi, l’Avion israélien qui défia les F16
L’histoire mouvementée d’Israël est importante pour comprendre le déroulement du programme du Lavi, un chasseur bombardier qui devait permettre l’indépendance du pays dans le domaine des avions de combat alors qu’il avait souffert souvent d’embargos sur les armes.
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nitialement, 300 appareils dont 60 biplaces d’entraînement au combat devaient être fabriqués. L’industrie israélienne de l’armement avait été chargée de donner une alternative israélienne aux armes étrangères, et de répondre aux besoins spécifiques de Tsahal. Dans les années 60, Israël retint Dassault - le constructeur formera la colonne vertébrale de l’armée de l’air israélienne - pour développer une version air-sol connue sous le nom de Mirage V. Dès 1967, dans les mois précédant et suivant la guerre, les fournisseurs d’armes traditionnels d’Israël en Europe arrêtèrent le déversement d’armes vers l’État juif. La fourniture de chasseurs Mirage et de missiles Saar 3 de France, la fourniture des chars de combat, Chieftain du Royaume-Uni, furent tous suspendus. Ce n’est que lorsque la France décréta l’embargo sur les livraisons de ces Mirage qu’Israël, clandestinement, acquit les plans du moteur Atar du chasseur et procéda à la fabrication des avions et du moteur du chasseur-bombardier Nesher. La capacité de fabrication de chasseurs de l’IAI a été développée suite à ces embargos sur les armes de 1967 qui laissèrent des cicatrices chez les Israéliens. En 1975, les États-Unis, devenus le seul fournisseur israelmagazine.co.il
majeur d’Israël, suspendirent la livraison d’avions de combat à réaction à Israël, comme stratégie de pression lors des négociations pour le retrait d’Israël du Sinaï occidental. Ce n’était que le premier de nombreux incidents, où la fourniture d’armes était liée à des concessions de la politique israélienne. En 1977, Israël a réclamé pouvoir assembler localement 200 exemplaires de l’avion en Israël. La production locale aurait permis de modifier l’avion pour répondre aux besoins israéliens. À l’époque, le F-16 était déjà coproduit en Europe, la proposition israélienne n’était donc pas sans précédent. Ce n’est qu’après le rejet de ces propositions que le gouvernement israélien autorisera le lancement du programme Lavi. Le Lavi ne devait donc pas remplacer le F-16, mais un F-16 modifié pour répondre aux besoins spécifiques d’Israël. Le gouvernement israélien avait conclu que la modification de l’avion de combat F-16 aurait été l’alternative pour répondre aux besoins des chasseurs-bombardiers d’Israël dans les années 80 et 90. Pourtant... Israël Aircraft Industries sera chargé fin des années 1970 de développer un nouveau chasseur-bombardier autochtone pour remplacer l’ancien Kfir.
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Itshak Chamir reçoit les employés en grève de l’Aérospatiale
Le Lavi (le Lionceau) Dès octobre 1982, l’objectif fut de construire un avion monoréacteur pour l’interception et l’appui-feu, importance étant accordée aux missions d’attaque au sol. Protection contre les interruptions de l’approvisionnement d’armes étrangères, le Lavi était cependant vulnérable car 40% des composants de l’avion provenaient de fournisseurs américains. La formule aérodynamique s’inspirait de celle connue du Kfir. Contrairement aux avions américains, le Lavi était censé approfondir le combat en territoire ennemi, avec un rayon de combat de 2130 km, environ 50% de plus que les F-16 C. À cette époque. Les
performances de l’appareil s’annonçaient excellentes. La position stratégique d’Israël signifiait que les planificateurs militaires d’Israël possédaient leurs propres besoins spécifiques. Parmi les réalités auxquelles ils ont dû faire face avant tout, consistait en le manque de profondeur stratégique d’Israël, tant sur le territoire que sur le plan des effectifs. Cette réalité amère a signifié que la doctrine militaire israélienne se devait de mettre l’accent sur les tactiques offensives : porter la guerre chez l’ennemi, loin des centres de population d’Israël le plus rapidement possible.
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Un bijou Équipé d’un canon de 30 mm en interne avec visualisation de casque, il disposait de quatre points d’emport sous les ailes pour l’armement air-sol (missiles, bombes, roquettes...) ainsi que de deux autres points d’emport pour des réservoirs de carburant largables. De plus des missiles air-air à guidage infrarouge pouvaient être montés en bout d’ailes. Ses commandes de vol électriques permettaient une bonne malléabilité. En 1983, le coût du programme Lavi était estimé à 6,4 Md$, financé pour 40% par les États-Unis. Près de la moitié du Lavi était destiné à être fabriqué dans des usines américaines. L’application de l’aide militaire américaine pour financer le Lavi avait été approuvée par Ronald Reagan en 1983, puis par le Congrès américain. Rapidement, émergèrent des querelles entre Israël et les États-Unis, car ces derniers craignaient de financer un rival des F-16 et F-18. Il était cependant prévu de construire 300 avions de série dont 60 biplaces destinés à l’entraînement et aptes à combattre. Il y avait peu de perspectives de ventes à l’exportation importantes du Lavi à l’étranger, mais celle réelle de commercialiser des avions supplémentaires vers l’autre pays partenaire du programme: les États-Unis. Le baptême du feu du Lavi eut lieu le 31 décembre 1986 malgré les menaces sur le programme, et IAI acheva la construction de trois prototypes. Cependant son développement fut méchamment interrompu le 30 août 1987 sous la pression des États-Unis qui ne voulaient pas que l’aide américaine à Israël serve à financer
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Les employés manifestent. Ils seront des milliers à être licenciés un concurrent du F-16. Israël après un vote serré au Parlement -une seule voix fit pencher la balance. Israël abandonna le projet. M. Moshe Nissim, ministre des Finances et Itzhak Rabin, ministre de la Défense, affirmaient alors : "le projet était trop lourd pour les finances du pays, qui est en plein redressement économique ; il aurait été réalisé aux dépens de futurs armements jugés prioritaires pour la sécurité d’Israël". C’est ainsi que d’autres programmes d’armes israéliens purent voir le jour tels que les missiles air-air Shafrir et plus tard les Python, tout comme la famille Gabriel de missiles antinavires, les missiles Saar 4, le char de combat principal Merkava*, et les chasseurs-bombardiers Nesher. Ces productions d’armes nationales ont contribué à atténuer l’impact des embargos.
Le 30 août 1987, Israël vota la mort du programme du Lavi, mettant fin à l’effort de développement d’armes le plus important de l’histoire de l’État juif. Pour le Lavi, les implications de son annulation continuent de faire des vagues sur la position stratégique d’Israël jusqu’à ce jour. Le manque quantitatif d’Israël en termes de main-d’œuvre signifiait aussi qu’Israël
resterait à jamais extraordinairement sensible aux pertes de soldats. Les soldats entraînés -et les pilotes en particulier, ne pouvaient pas être remplacés facilement. Telles sont les réalités qui façonneront à jamais la conception et le développement des systèmes d’armes israéliens. Les essais en vol du Lavi ne furent pas arrêtés immédiatement, et le troisième prototype prit même l’air le 25 septembre 1989, soit deux ans après la fin officielle du programme. Cet appareil qui vola jusqu’en 1994 servit de démonstrateur pour différents projets d’IAI. Deux autres prototypes, les B04 et B05, ne furent jamais achevés. Les Israéliens étaient devenus réputés en matière de guerre électronique, depuis que les systèmes ECM fournis par les États-Unis au début des années 1970 avaient si échoué aux pilotes israéliens pendant la guerre de Kippour. La guerre israélo-arabe de 1973 avait brisé le mythe de l’invincibilité militaire israélienne: le renseignement a échoué, les défenses au sol furent dépassées, près de 500 chars de combat principaux, détruits, et l’armée de l’air israélienne perdit près d’un tiers de ses avions de combat. Cette capacité concernait aussi la différence entre un avion qui pouvait à peine lancer une frappe aérienne sur un réacteur nucléaire à l’extérieur de Bagdad, et une plateforme capable de frapper des cibles en Iran. Une fois de plus, le Lavi était une réponse israélienne aux défis israéliens uniques. En conséquence, l’annulation du Lavi a laissé aux planificateurs d’armes d’Israël un vide dans leurs options. Tout, du israelmagazine.co.il
moteur aux ailes composites, en passant par le calculateur de vol électrique, les actionneurs qui ont déplacé les surfaces de contrôle, ont tous été développés et produits par des fabricants américains. Cela avait été fait pour permettre au Lavi de profiter de l’aide militaire américaine, mais aussi pour minimiser les coûts de développement de l’avion. Dans la mesure du possible, le Lavi avait utilisé des technologies et des sous-systèmes standards, plutôt que de tenter de les recréer.
Combien cela coûte ?
Les coûts du Lavi étaient cohérents compte tenu des objectifs ambitieux et ne devaient pas excéder 1,9 milliard de dollars en dollars 1985. Le programme de développement initial du F/A-18 avait totalisé 3,38 milliards de dollars 1985. Converti en dollars de 1985, le chasseur F-2 japonais, un dérivé du F-16, coûta environ 2,31 milliards de dollars. Le Lavi restait une bonne affaire. Le Lavi est devenu vulnérable à cause de sa petite petite production. Le coût unitaire d’un système d’armes complexe tel que le Lavi, était sensible au nombre d’avions achetés. Comme proposé en 1980, pas moins de 300 Chasseurs Lavi devaient être livrés aux FDI. Selon l’évaluation du GAO des États-Unis, le coût unitaire pour le Lavi devait totaliser 17,8 millions de dollars en 1985, sur la base d’une production de 300 avions, contre 16,9 millions de dollars pour un F-16C. Pour une augmentation relativement faible du coût unitaire, le Lavi offrait un avantage de performance significatif en termes de portée, charge utile et capacité de survie. Cependant, comme le budget de la Défense israélien a été restreint dans les années 80, l’achat prévu d’avions a dû être réduit en conséquence. Lors d’un achat de 150 appareils, le coût unitaire du Lavi bondissait de 55%. Les opposants au programme citaient le coût unitaire de l’avion sur la base d’un achat encore plus petit de 80 appareils. Le Grumman Corp, - qui avait produit les avions de chasse F-14 et A-6 pour l’US Navy, et qui avait conçu et construit la queue et les ailes composites du Lavi - avait signé un contrat pour la mise en israelmagazine.co.il
place d’une chaîne d’assemblage final basée aux États-Unis, à partir de laquelle offrir le Lavi comme alternative à l’US Air Force. À l’époque, l’USAF explorait les options pour un avion d’attaque léger - un rôle pour le Lavi. Après l’annulation du Lavi, l’USAF achètera finalement quelque 271 F-16CJ pour assurer l’anéantissement des défenses aériennes ennemies. Ces avions seraient livrés entre 1991 et 2001, précisément au moment où le Lavi devait être en production. C’était une opportunité qui aurait pu voir les ventes nécessaires pour aligner les coûts unitaires de Lavi sur ses objectifs initiaux - et qui aurait livré à l’US Air Force un avion d’attaque. Cette opportunité a bien sûr été perdue lorsque le programme a été annulé en août 1987.
du nouveau F-35 Joint Strike Fighter des États-Unis, ainsi que la première force aérienne n’importe où dans le monde à déployer le F-35 furtif dans des rôles opérationnels sur un espace aérien hostile. Israël a déjà pris livraison de 50 appareils. Les responsables israéliens recherchent depuis longtemps des alternatives pour étendre la portée effective du F-35 pour une éventuelle confrontation avec l’Iran. Ils cherchaient le type d’autonomie nécessaire pour réduire le fardeau imposé à la petite flotte israélienne de pétroliers de ravitaillement en vol, le type de rayon de frappe non ravitaillé que les plates-formes israéliennes F-15I existantes - ainsi que le Lavi - pourraient déjà offrir. n
Licenciements, manifestations et Iran.
Immédiatement après l’annulation de Lavi, Israël Aircraft Industries a dû licencier plus de 4 000 employés, dont plus de 1500 ingénieurs, l’équivalent de 220 000 travailleurs de l’aérospatiale américaine. Cette main-d’œuvre est partie finalement à l’étranger et cela ankylosera longtemps l’industrie aérienne israélienne, le budget de la défense d’Israël continuant de diminuer. L’IAI passera d’un effectif de 22.000 personnes en 1987 à 15 000 en 2019. La conception du Lavi n’a cependant pas été perdue pour tout le monde. Les britanniques financeront un chasseur furtif "Replica". Il est certain qu’elle fut réutilisée par la Chine pour le J-10. Plus récemment, le Japon a financé le vol de son propre prototype de chasseur furtif le X-2 Shinshin qui vola pour la première fois en avril 2016. L’histoire derrière le Lavi est complexe, une extraordinaire réalisation technologique, avec un rayon de frappe qui dépassait de loin ce que sa petite taille aurait pu suggérer. C’était un avion qui a fourni une réponse israélienne pour surmonter les défis stratégiques israéliens. Les planificateurs de guerre et l’industrie israélienne ont dû face avec les conséquences d’une décision prise il y a plus de 30 ans. Tsahal aura du mal à trouver un équilibre qui réponde à ses futurs besoins de chasseurs-bombardiers.. Israël fut le premier client étranger à prendre livraison
Les Merkava d’Israël
Pendant les années 1970, par exemple, à
une époque où d’autres armées nationales mettaient l’accent sur l’augmentation de la puissance de feu ou la mobilité dans leurs nouveaux modèles de chars de combat principaux, Israël développait le Merkava en mettant l’accent sur la protection de l’équipage. Pratiquement tous les autres chars sortis au XXe siècle placeraient le compartiment de l’équipage devant le moteur, pour offrir une visibilité maximale et donc une mobilité sur le champ de bataille. Le Merkava, en revanche, placerait l’équipage derrière le moteur, de sorte que si son armature n’était jamais percée, ce serait le moteur qui serait sacrifié et non l’équipage. Ce fut le début d’une philosophie de conception blindée qui perdure jusqu’à nos jours, avec l’introduction d’une armature toujours améliorée pour les modèles successifs du char.n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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HEN BITOUHIM ASSURANCES
Itsik Hen : 052-244 48 59 | Mezi Choucri 052-646 81 81 Nous parlons français Levana Guez : 055-557 58 50
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DOSSIER ALYA & CORONA
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En dépit d’une crise sanitaire et économique sans précédent en Israël, beaucoup de nouveaux immigrants ont fait le choix de ne pas différer leur Alya. Alors que l’Agence Juive et le ministère de l’Intégration affirment avoir mis en place des procédures d’urgence pour l’immigration et l’accompagnement des immigrants dès leur arrivée dans le pays, la fermeture des frontières bloque l’arrivée de futurs immigrants. Le point. par Dahlia Perez
L’Alya au temps du Coronavirus : faire face à une nouvelle Réalité
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’État hébreu doit-il se préparer à une Alya massive due au coronavirus ? La ministre israélienne de la Diaspora Tzipi Hotovely semble être de cette avis, n’hésitant pas à déclarer que "La communauté juive mondiale fait face à une nouvelle réalité après la crise du coronavirus. Il y a un réveil parmi les communautés et nous devons être préparés à une vague d’Alya en Israël (...)" Alors qu’entre 2010 et 2019, plus de 250 000 nouveaux immigrants sont arrivés dans le pays, l’Agence juive continue à se montrer très optimiste pour l’avenir. Et pour cause... Le centre d’appel international de l’organisation, débordé, reçoit des centaines d’appels par jour. En France, le nombre d’ouvertures de dossiers aurait quadruplé, la crise du coronavirus poussant nombre d’aspirants au départ à franchir enfin le pas. Malgré une quarantaine obligatoire de deux semaines et la signature d’une déclaration selon laquelle les nouveaux immigrants disposent d’un endroit où ils peuvent rester confinés, des olims ont tenu à embarquer, coûte que coûte. C’est le cas de Reouben Fahri, 22 ans, qui vit à Herzlya et qui est arrivé à la mi-mars en Israël. Il se souvient : "On a été prévenu par l’aéroport qu’on ne pourrait pas passer par les services d’immigration et que tout se ferait plus
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tard, dans les semaines qui suivraient notre arrivée." Les quatorze jours de quarantaine à l’arrivée n’ont pas dissuadé le jeune immigrant : "Cela a été un sujet de discussion à la fois avec ma famille et avec l’Agence Juive, avant de partir. On m’a proposé de repousser le départ, et puis on s’est rendu compte très vite que ça n’allait pas être une histoire de quelques semaines. J’allais entamer des études sur place, à Herzlya, j’ai pris la décision de ne pas différer." Le jeune olé est conscient d’arriver en Israël dans des circonstances exceptionnelles. Le pays fonctionne au ralenti. Les administrations et les banques sont fermées. Il y a le risque de contamination et la perspective d’une crise économique partie pour durer : "J’ai vu autour de moi mes amis qui se sont retrouvés en chômage partiel, avec un système en Israël qui est beaucoup moins sécurisant qu’en France. J’ai une image en tête qui est très précise, c’est celle où je sors de ma quarantaine de 14 jours. Je suis arrivé à mon université qui était elle-même fermée et uniquement ouverte aux étudiants qui habitent comme moi sur le campus. Un petit détail qui a son importance, c’était ce port du masque qui était maintenant obligatoire et qui montrait une différence essentielle entre la politique française et celle d’Israël."
S’intégrer dans un nouveau pays en temps ordinaire c’est une chose, mais s’intégrer dans un nouveau pays en étant d’abord confiné et dans une atmosphère comme celle-là, très singulière, en est une autre Dans quelques mois, Ruben devra se résoudre à une rentrée scolaire pas comme les autres : "Les informations sont assez floues, on reçoit des mails très souvent de l’administration de l’École mais à priori la rentrée de novembre se fera sur Zoom. Cela dépend du ministère de l’Éducation et ils n’ont pas encore de certitude sur la réouverture totale des départements. On en est à ce stade-là." Le jeune immigrant estime que dans ces conditions un accompagnement spécial devrait être fait en amont par l’Agence juive ainsi que par le gouvernement israélien pour les nouveaux olims : "Je pense que l’un des enjeux de cette vague d’Alya en pleine crise sanitaire n’est pas tant financier que psychologique pour beaucoup de nouveaux immigrants parce s’intégrer dans un nouveau pays israelmagazine.co.il
en temps ordinaire c’est une chose, mais s’intégrer dans un nouveau pays en étant d’abord confiné et dans une atmosphère comme celle-là, très singulière, en est une autre. Certes, j’ai pu compter sur une aide donnée par mon université. Mais je pense que cela n’a pas été le cas pour tout le monde. De nombreux posts sur Facebook d’ailleurs l’ont relayé, et de ce point de vuelà, je pense que l’Agence Juive n’a pas été assez réactive." Avant son départ, Ruben est reçu par l’organisation pour un briefing sur les règles sanitaires à respecter en Israël. Mais, une fois sur place, en dépit des promesses de l’organisation et du ministère de l’Intégration d’un accompagnement des nouveaux immigrants par les municipalités locales, des olims se retrouvent seuls face à leurs interrogations.
Des procédures d’Alya en souffrance en Israël Julie Daniel est avocate à Tel-Aviv et traite actuellement
nombre de dossiers liés à l’acquisition de la nationalité israélienne et aux démarches d’Alya directement entamées dans le pays. Elle précise : "Il y a des olims qui se sont tournés vers nous pour aplanir leurs difficultés avec les administrations. Avec le coronavirus, elles recevaient de manière très limitée les immigrants qui arrivent et qui doivent passer par ces bureaux, le Misrad Haklita, le Bitouah Leumi, et doivent choisir leur koupat holim, etc. La plupart n’ont pas pu régler leurs formalités tout de suite." Si cette période est marquée par beaucoup de ralentissements au niveau des procédures administratives, en dépit des efforts du ministère de l’Intégration, un autre problème se pose et concerne les futurs immigrants ayant entamé une procédure d’immigration en Israël. Sortis du territoire avec un visa de touriste, ils se retrouvés bloqués à l’étranger et dans l’impossibilité de finaliser leurs démarches dans le pays: "Il y a des gens qui étaient déjà en Israël et qui sont partis en France juste pour voir leur famille. Ils se retrouvés coincés et n’ont pas pu revenir. Il y a pas mal de gens dans ce cas-là, et il est actuellement impossible d’avoir pour eux une possibilité de rentrer en Israël. C’est très
grave parce que ce sont des personnes qui sont éligibles à l’immigration dans le pays. Quelques-uns ont des conjoints israéliens mais beaucoup sont des touristes qui voulaient rester, comme des étudiants du programme ‘Massa’ par exemple. Jusqu’à présent, ils sont toujours bloqués. Soit, ils doivent rouvrir un dossier en France, ce qui est très long, soit ils sont obligés d’attendre que les frontières s’ouvrent pour pouvoir continuer leur processus ici, en Israël, et avoir enfin leur statut d’olé. Aujourd’hui, on ne peut rien faire pour eux car ils ne rentrent pas dans les catégories des autorisations qui sont donnés par le consulat d’Israël à Paris." Avec une situation sanitaire encore bien incertaine en Europe et en Israël, des assouplissements des règles en vigueur seraient donc à envisager par le consulat d’Israël en France pour ces personnes en transit. Faire rajouter une catégorie de permis d’entrer sur le territoire permettrait en effet à de futurs immigrants d’achever une procédure laissée en souffrance, et de sortir d’une impasse. A l’heure actuelle, seuls une petite catégorie de visiteurs sans passeport israélien sont autorisés à entrer sur le territoire.n
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DOSSIER ALYA & CORONA
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Igal Palmor
Alya de France et Psychologie:
Quand l’Herbe est plus verte ailleurs
par Jessica Adjedj
A la suite de la pandémie, les Juifs français envisagent sérieusement la migration vers l’Etat hébreu. Selon le secrétaire général de l’Agence juive, Josh Schwarcz, on peut s’attendre, d’ici 2021, à l’arrivée de quelques 50.000 nouveaux immigrants venus du monde entier. Alors que la crise du Corona a rendu difficile, voire impossible l’accès à Israël, l’Agence juive enregistre une hausse de près de 50 % d’ouvertures de dossiers d’Alya de France. Quelques 1000 demandes ont été recensées le mois dernier contre moins de 300 l’an dernier à la même période.
I
gal Palmor, directeur des relations internationales de l’Agence juive, affirme que si l’engouement actuel pour l’Alya se matérialise, Israël devrait accueillir près de 10% de plus de nouveaux immigrants en 2021 qu’en 2019. L’association Nefesh B’Nefesh note la même ferveur pour les Juifs nord-américains, avec le plus grand nombre de candidats à l’Alya depuis 2002, date de la création de l’organisation. Phénomène intéressant, c’est lorsque les portes se ferment que l’on souhaite les enfoncer. Beaucoup manifestent l’envie de migrer, mais le nombre d’Alyas effective reste encore un mystère. On constate une nouvelle peur de se voir refuser l’accès au territoire israélien, ce qui explique également cet afflux de demandes. Rappelons que, toute personne juive, ayant parents ou grands-parents
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d’origine juive, peut bénéficier de la “loi du retour” et obtenir la nationalité israélienne. L’Etat doit donc faire face à une crise économique sans précédent tout en prenant en considération qu’il va devoir débloquer des fonds pour ces nouveaux immigrants. L’apologie du “au cas où” prendrait-elle le dessus sur la décision réfléchie d’un réel changement de vie ? Mais que propose Israël que l’on ne retrouve nulle part ailleurs ?
De l’Exil à la Terre promise
Vague antisémite grandissante, gestion de crise laborieuse, idéologie raciste, crise sanitaire, retour aux sources, revendication de son appartenance ethnique, sentiment de rejet, autant de motifs poussant les Juifs français à émigrer vers israelmagazine.co.il
Israël. Beaucoup d’entre eux ont envisagé l’Alya depuis plusieurs années, mais la pandémie a eu raison de leurs hésitations. S’attendent-ils à être mieux protégés en Israël alors que le pays fait face à une seconde vague infectieuse ? La protection, serait-ce donc cela que ces migrants français recherchent ? Dans un pays où les guerres ont fait rage, où le service militaire n’est pas une option mais une question de survie et où les aides sociales sont loin d’être calquées sur le modèle européen, qu’est-ce qui pousse ces Français à tout quitter pour repartir de zéro ? La population française immigrante possède des capitaux économiques, sociaux, symboliques, relativement importants, mais décide tout de même de quitter son pays pour s’installer dans un pays marqué par des batailles territoriales et religieuses, nourri par les diverses migrations et cultures. Ces futurs immigrants ne fuient pas cette fois, ils ont construit un statut et su être reconnus à leur juste valeur en France, mais c’est aujourd’hui, qu’ils décident de plier bagage, pour de nouvelles aventures. Que ce soit pour des raisons religieuses, politiques, culturelles ou même identitaires, ils souhaitent sauter le grand pas, malgré la détérioration probable de leurs capitaux acquis en France. Pour comprendre le mouvement migratoire des Français en Israël, il faut comprendre que l’envie dépasse de loin le cadre de l’initiative individuelle, mais s’inscrit dans un phénomène collectif identitaire. La France reste le pays de naissance pour certains, de résidence pour d’autres à la suite des migrations des pays d’Afrique du Nord, mais elle reste un pays d’accueil. Tandis qu’Israël est perçu comme un pays de cœur, un pays qui nous revient de droit, la terre de nos ancêtres. Devenir Israélien n’est pas de tout repos. Se défaire des traces d’un passé diasporique, éveiller ses sens à une nouvelle culture, mentalité, à un nouveau dialecte et de nouveaux codes sociaux, n’est pas une mince affaire. Dans une société qui se modifie au fil des ans et des vagues migratoires, le groupe français doit redoubler d’efforts pour s’intégrer. Le fossé entre l’Israël rêvé et l’Israël de la réalité peut être profond. israelmagazine.co.il
Le démographe Sergio Della Pergola (1996), souligne que l’immigration vers Israël, supposée être motivée par la force d’attraction de ce pays, est en fait peu liée à ce qui se passe effectivement dans la société israélienne. Il pense que l’aiguillon de l’émigration se trouve dans l’expérience d’insécurité personnelle et de tensions des Juifs face aux événements sociaux en France.
Cʼest une fois installés en Israël que ces migrants français viennent se confronter à une société, bien réelle, dont les codes, pratiques et valeurs sʼopposent en tout point aux leurs. Tandis qu’un flux de migrants se prépare, nombre de francophones ayant fait l’Alya souhaitent faire marche arrière et se résignent à repartir, confrontés à des difficultés non escomptées et à un isolement qu’ils n’auraient imaginé. Qui part à la chasse, perd sa place ! Ces candidats à “la montée”, s’imaginent-ils la réalité du terrain ou fantasment-ils un Eldorado sur fond de rêves enfantins ? Comprenons ce qui pousse ce peuple à quitter ses repères, ce qu’il a construit et maturé pour écrire une nouvelle page, qui impactera les générations futures.
Petit pays, je t’aime beaucoup
La montée de l’antisémitisme et des revendications identitaires a transformé le lien diasporique des Juifs français envers Israël. Sur fond de pluri-appartenance, leur identification à une patrie semble confuse. Percevant une grande différence sociétale, nombre d’entre eux ont choisi le repli identitaire plutôt qu’une lutte vaine et ont envisagé une migration vers leur pays d’identification. Israël détient, depuis toujours, dans le cœur des Juifs français, une place essentielle puisqu’il leur permet de se rattacher à leur identité juive. Il représente le lieu d’expression de leur judéité sans
complexe, du fait d’y être majoritaire. Ce rapport à l’État hébreu est renforcé dans les centres communautaires juifs français puisqu’ils constituent l’essence même de la perpétuation des rites religieux et de la culture juive. Il représente l’état de référence et constitue, par conséquent, une réunification autour d’une même idéologie. L’intérêt croissant envers Israël dans un contexte de repli et d’attaque identitaire, crée un sentiment d’exclusion et de désappartenance à une patrie qui semblait les avoir intégrés. De nombreux juifs peuvent alors ressentir une plus grande identification aux israéliens sous-tendue par l’idéal de l’unité du peuple juif, que prône Israël depuis toujours. C’est une fois installés en Israël que ces migrants français viennent se confronter à une société, bien réelle, dont les codes, pratiques et valeurs s’opposent en tout point aux leurs. C’est alors que l’on entre dans un entresoi tiraillé entre le “chez-soi” construit et le “chez-soi” rêvé. L’intégration en Israël n’est plus à présent conditionnée par l’abandon de ses racines et de sa culture, car nombreux sont ceux qui transposent les codes Français en Israël malgré le décalage sans conteste. L’attachement religieux est également l’ancre du lien communautaire des Juifs français au rapport à Israël. Cette union s’est renforcée à travers les conflits et non pas perçu comme des attaques d’un pays, mais des atteintes à un peuple, à une religion, à une identité. Il leur est donc difficile de ne pas se positionner face à chaque conflit, que ce soit dans l’expression d’une forte solidarité ou encore dans la critique, voire même un sentiment de culpabilité. C’est dans cet entre-deux que le choix de l’Alya leur permet de concilier la nouveauté, c’est-à-dire l’installation dans un pays inconnu, avec le familier, la culture juive. Le danger restant être, la création d’une diaspora française en Israël, en créant une trop grande zone de confort, et par conséquent saboter son adaptation. Nous retrouverons-nous donc l’an prochain à Jérusalem ? n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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Je confine, je déconfine, j’isole, je camisole, je teste, conteste, diagnostique. Certains tiquent, d’autres acquiescent ou rendent la monnaie de leur pièce. Je suis en quarantaine, en quatorzaine, reclus, prisonnier pour les uns, chanceux pour les autres. Je dispose de temps, le compose, le recompose, et m’attelle à devenir conforme à mes désirs...
Le Confinement, Ecueil ou Aubaine ? Les Artistes répondent
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Robert BENDENOUN
ntre 1603 et 1606, les théâtres de Londres étaient fermés en raison de la peste qui sévissait. Tenu de demeurer dans ses appartements, William Shakespeare écrivit "Le roi Lear". Sa quarantaine forcée avait produit un chef-d’œuvre, une pièce de théâtre majeure, qui augurait de la place prépondérante qu’occuperait cet écrivain au sein de la littérature mondiale. "Les hommes sont ce qu’est l’instant." énonce-t-il dans ce texte évoquant un roi fou en butte aux souffrances humaines, à un destin familial contrarié. En 1665, en Angleterre, la population anglaise était contrainte à un confinement massif en raison d’une épidémie de peste bubonique. Isaac Newton, qui n’était encore qu’un jeune étudiant au Trinity College de Cambridge, a ainsi été reclus dans le domaine de ses parents, au nord de Londres, durant plus d’un an. Il en profita pour élaborer les bases de ses plus grandes découvertes, comme la célèbre loi de la gravitation universelle qui changea la donne de la science physique.
Une cabane à lʼécart, au milieu des bois En 1860, au nord de Washington D.C, le Président Abraham Lincoln, comme tous les étés venait se réfugier dans un cottage,
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Portrait de Victor Hugo (1802-1885) par Léon Bonnat. fuyant ainsi les trépidations de la Maison Blanche. La tranquillité, le caractère bucolique de l’endroit, lui permirent de mener à bien des réflexions, qui l’amenèrent par la suite à rédiger en 1863, la Proclamation de l’Émancipation, qui abolissait l’esclavage aux États-Unis. Plus récemment, dans les années 2000, Bill Gates, le fondateur de Microsoft, aimait chaque année, durant deux semaines, se retirer dans une cabane à l’écart, au milieu des bois, afin de faire le point sur toutes les innovations proposées par ses collaborateurs, et c’est ainsi qu’en 1995, il put lancer le système d’exploitation "Internet Explorer". Et si le confinement, imposé, nécessaire, abruptement poignardé dans la chair de nos vies, était une aubaine pour les créatifs, les artistes, les écrivains, les musiciens, les contemplatifs et les poètes ? Et si le confinement était déjà, par essence, lié à l’âme juive en quête de perpétuel ressourcement... ? La chanteuse Dorit Reouveni, avec sa famille, israelmagazine.co.il
La chanteuse Dorit Reouveni s’est imposée dans la rue, dans son joli quartier de Hadar Yossef à Tel-Aviv. "Il est beaucoup plus facile d’avoir peur ensemble... Nous sommes des êtres sociaux, et voulons avoir le sentiment que nous ne sommes pas seuls." a-t-elle confié. Mendel Yankela, le mari de Dorit a ajouté : "Nous sommes dans une situation très difficile où il n’y a pas de salles, pas d’événements et pas de performances. Le secteur que nous devons défendre est celui de la musique et de la culture."
Les grands écrivains surtout Georges Orwell, Oscar Wilde et Jean Genêt (tous deux en prison), et Victor Hugo, ont aussi profité de leur isolement pour écrire les plus belles pages de leur œuvre. "Les Misérables", "Les Travailleurs de la mer", "L’Homme qui rit", ont été écrites à Guernesey, l’île anglo-normande, où Victor Hugo s’était réfugié pour fuir le régime napoléonien. Il occupait une jolie maison, appelée "Hauteville House", et écrivait après avoir contemplé le soleil couchant. Albert Cohen, dans son élégante robe de chambre en satin, ne quittait guère son appartement de l’avenue Krieg, à Genève, où il s’est un jour réfugié, pour n’en plus sortir. C’est là qu’il a écrit ou dicté les plus beaux fleurons de la littérature : "Solal", "le Livre de ma mère", "Mangeclous", et "Belle du seigneur", israelmagazine.co.il
qui en 1968 assurera sa consécration. En 1957, il refusera d’occuper le poste d’ambassadeur d’Israël, pour poursuivre son activité littéraire. Eclairé par le soleil de Cépahlonie, son Ile de Corfou natale, il fera de ses attaches avec son monde disparu le cordage d’amarrage à la conscience universelle. Car les idées circulent plus vite que la lumière, et notre appétence à l’esthétique ne nécessite aucune essence, aucun carburant fossile, nucléaire, ou écologique. Les déplacements limités n’entravent aucunement notre capacité d’innovation, de création. La proximité est abolie, il faut la supplémenter au
et servent de caisse de résonnance, de terrain d’expression à ceux qui sont sevrés de galeries, de scènes, de séances de signature, à tel point que certains peintres ou photographes cherchent à réinventer les modes d’exposition, que les hommes de théâtre, les chanteurs ou les musiciens, veulent transformer les mises en scène, en espace ou en situation. Ils songent à expérimenter à mettre en jeu des échanges, afin de transformer leur art et de l’adapter aux conditions qu’impose la situation sanitaire qui n’est pas prête à se dissoudre dans l’instant. Le monde culturel est en ébullition, les lieux de représentation changent, et se téléportent avec souplesse, profitant d’une baie vitrée, d’un balcon, d’une terrasse, pour devenir de nouvelles agoras où le bon vivre ensemble devient concret. La saxophoniste Yarden Klayman, a joué sur le toit d’un immeuble à Tel-Aviv après l’annulation de son concert, au tout début du confinement, fin mars 2020. D’autres ont emprunté ses pas, et les guitares et synthétiseurs ont envahi l’espace résidentiel. La fête de la musique s’est affranchie des limites du 21 juin. Le confinement, la solitude aménagée constituent des écrins propices à la créativité, à la réflexion, et
La solitude nʼest plus vécue comme une abstraction dérangeante, une source de conflit et de dépression, mais comme un tremplin pour un foisonnement fécond de solutions artistiques en plein renouvellement. moyen de technologies porteuses, tout en faisant preuve d’inventivité, de goût, d’un peu de toupet et de beaucoup de ce "doux désir de durer" dont parlait le poète Paul Eluard. Les schémas de conception se sont modifiés, les modèles théoriques ont échappé à notre contrôle, comme si les idées redevenaient pionnières. Les réseaux sociaux font état de ces bouleversements
à la connaissance de soi et du monde environnant. Certains créateurs ne donnent d’ailleurs la pleine mesure de leur génie que dans ces conditions particulières. D’autres préféreront se fondre dans la vie et s’engager à une sociabilité fructueuse. Dans le monde entier, le coronavirus a suscité de la part des créateurs un engouement certain, tant au niveau de ceux qui ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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Dédé Bandaid conceptualisent, créent, qu’à celui de ceux qui interprètent. Les opéras de Munich, Stockholm ou Vienne, ont proposé chaque jour des concerts, à la fois pour les passionnés et pour les mélomanes en quête d’initiation. Le théâtre Bolchoï à Moscou a fait de même pour certains ballets, la Philharmonie de Berlin a partagé ses concerts. La Comédie française, à Paris, n’a pas été en reste, afin de mettre en lumière les prestations de l’une des plus célèbres scènes de théâtre du monde. Les musées ont aussi fait preuve d’ingéniosité, et le Getty Museum de Los Angeles, le musée du Louvre à Paris, le National Gallery de Londres par exemple, ont partagé leur patrimoine avec tous ceux que l’art attire. En Israël les chanteurs ont ouvert leurs maisons, et ont donné des concerts improvisés, seuls ou avec leur famille. Ainsi Hanan Ben Ari, Lior Elmaleh, Aviv Geffen, Shlomo Artsi ou Ishaï Ribo, ont donné des mini concerts sur YouTube, zoom ou autres supports, ce qui leur a permis de maintenir des liens serrés avec un public avide de célébrations festives. Les enregistrements discographiques se sont poursuivis. Les singles "déconfinés" sont souvent programmés sur les radios. Eyal Golan, Shlomi Shabat et Eliad, Zehava Ben, Keren Peles, Eden Ben Oded et d’autres artistes, ont maintenu le contact sonore. Les créateurs d’art ont détourné des éléments du quotidien des habitants des cités pris dans la torpeur de la crise du Covid 19, pour élaborer des œuvres personnelles et éphémères.
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Le Challenge est enthousiasmant Hagai Farago, photographe, a créé un livret mettant en scène, sous forme de pliages, des représentations des véhicules de transport qui sont visibles à Tel-Aviv. "Un désir ardent de retrouver les rues de la ville est devenu de plus en plus intense pendant la période de confinement" a-t-il expliqué. Il a pour projet de présenter une autre brochure consacrée aux immeubles de sa ville. L’artiste de rue Dédé Bandaid, a lui ajusté des masques protecteurs sur des billets de banque réels, pour faire état des préoccupations du moment, au cœur même des accessoires les plus triviaux.
"L’idée de dessiner sur des billets, c’est quelque chose que je faisais également quand j’étais plus jeune, mais ici, cela prend une signification complètement nouvelle et complètement différente", dit-il. Le photographe Teddy Cohen a collecté plus de mille avis de fermetures collés aux vitrines des commerces de Tel-Aviv. Un pied de nez : "Chaque panneau est intéressant et unique... Certains sont réconfortants, d’autres sont drôles, optimistes, furieux." Lior Zelmanson, qui a mis en place une nouvelle communauté artistique Facebook, "Culture in Corona Days", s’est clairement exprimé sur le sujet : "il y a ici une opportunité incroyable de penser à Internet comme un substitut aux espaces culturels physiques. Il n’y a pas de théâtre physique mais cela ne signifie pas qu’il ne
Yoav Gati
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Yarden Klaympan
Hagai Farago devrait pas y avoir de théâtre. Il n’y a pas d’ouverture aux expositions d’art physique, mais cela ne signifie pas que vous devez cesser d’imaginer une exposition d’art. Tout comme les universités et les écoles reçoivent désormais un énorme coup de pouce pour l’enseignement à distance, il est temps de penser aux espaces virtuels de nouvelles façons créatives." Le confinement a démultiplié les possibilités, et les créateurs ont mis en chantier un désir d’écriture, profitant Confinement
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d’une parenthèse d’activité, d’une opportunité incroyable. De nouveaux auteurs émergeront-ils, des aspirants écrivains parviendront-ils à concrétiser une envie, des chefs-d’œuvre vont-ils être publiés ? Nous le saurons bientôt. Comme l’a écrit le critique Amir BenDavid : "les écrivains, dramaturges, musiciens et artistes diligents qui ont été coupés de leur vie ordinaire au cours des deux derniers mois, ont été jetés dans un univers parallèle d’hypersensibilité et de loisirs, dans la prison temporaire de la quarantaine forcée.
Une telle déconnexion est le rêve de tout artiste, n’est-ce pas?" A titre personnel j’ai bouclé mon tour du salon en quatre-vingt jours, doublé le cap Horn de mon bureau flottant, afin de poursuivre mon travail, et de faire du point final un objectif multiple. J’ai même entendu dire que le rédacteur en chef d’un mensuel dont le nom commence par Israël et se termine par Magazine aurait entamé un nouveau livre et aurait donné un concert sur Zoom. Alors le confinement, écueil ou aubaine ? n
LE CONFINEMENT DANS LES SOURCES JUIVES
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es sources de la tradition juive font état de confinements qui ont permis de concevoir des œuvres qui se sont imposées et servent aujourd’hui de référence. C’est le cas de rabbi Shimon Bar Yohaï, qui, selon le Talmud de Babylone, en compagnie de son fils Rabbi Eléazar, s’est réfugié dans une grotte, près de Tibériade, enfoncé dans une alvéole creusée dans le sol, ne se nourrissant que des fruits d’un caroubier et de l’eau d’un petit ruisseau, afin d’étudier la Torah pendant douze ans, et de produire des commentaires lumineux d’une intense élévation. Rachi s’est enfermé dans sa maison de Troyes pour rédiger un corpus de commentaires de la Torah et du Tanakh qui n’ont pas d’équivalence. Rabbi Yéhouda Hanassi, a assuré la compilation d’une partie de la loi orale, la Michna, constituée de 63 traités qui encodent la loi juive, et constitue le plus bel empilement de traditions juridiques du judaïsme, qui sera complétée ensuite par la Guemara, une exégèse et un ensemble de commentaires de la Michna. Il résidait à Beit Shéarim, près de Tivon, à l’est de Haïfa, au cœur d’une communauté, siège du Sanhédrin, dont il reste quelques vestiges, et une nécropole juive regroupant 400 tombes, dont celle de Rabbi Yéhouda Hanassi lui-même. n
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"Teheran"
UNE NOUVELLE SÉRIE D’ESPIONNAGE EN ISRAËL Apple TV a acquis les droits de diffusion de la nouvelle série israélienne "Téhéran" "Téhéran", créée par Moshe Zonder, l’un des scénaristes de la série à succès "Fauda", et dirigée par Daniel Syrkin. Apple TV a aussi "commandé pour plusieurs millions de dollars, deux autres saisons" à Par A.D. venir.
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l s’agit d’une des plus importantes transactions de l’industrie israélienne jamais réalisée. Elle est actuellement diffusée sur la Chaine 11 Kan en Israël. "C’est l’accord du siècle dans l’industrie de la télévision israélienne, surtout pour une jeune société, qui a commencé ses activités il y a seulement trois ans", a commenté Eldad Koblentz, le PDG de Kan. "Téhéran" qui a été tournée à.... Athènes, raconte l’histoire de Tamar Rabinayan, une jeune pirate informatique israélienne, d’origine iranienne, née en Iran, (Niv Sultan est très convaincante). Elle travaille pour le Mossad et elle est mandatée secrètement dans la capitale iranienne pour réaliser une mission mouvementée: neutraliser les défenses aériennes de l’Iran, afin que les chasseurs israéliens puissent bombarder un réacteur
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nucléaire et empêcher l’Iran d’obtenir une bombe atomique. A Téhéran, la mission se déroule mal. L’apprentie espionne se retrouve coincée dans la capitale où elle redécouvre subitement ses racines. Elle y rencontre des militants antigouvernementaux qui ont finalement les mêmes objectifs qu’elle. Fragiliser l’Iran et ramener la démocratie. Après Fauda qui narrait les exploits des commandos israéliens dans les territoires et à Gaza, presque entièrement tourné en arabe, le même scénariste nous présente Téhéran, dont les dialogues ont pratiquement tous, eux, été écrits en persan, mais comme pour Fauda, cela ne présente pas de gêne. Bien Au contraire. Téhéran met en valeur le travail en profondeur mais létal, des agents israéliens dans le monde, leurs difficultés, leur solitude. Je conseille vivement cette série à nos lecteurs. Elle est bien écrite,
très bien réalisée et n’a rien à envier aux grosses productions hollywoodiennes, l’histoire est haletante et nous permet à chaque instant de réfléchir à ce conflit aussi absurde qu’interminable mais qui n’a en fait heureusement jamais commencé avec l’Iran.
Distribution
Daniel Syrkin, le réalisateur, qui est diplômé de l’École de cinéma de l’Université de Tel-Aviv, réalise une série de haute tenue, rythmée mais sans excès, les scènes s’enchaînant sans effets de scénarisation. Tout y presque logique mais aussi surprenant. Niv Sultan joue formidablement son rôle de hackeuse israélienne, perdue dans la capitale iranienne, à la recherche d’un bon coup après avoir raté le premier. Comme par exemple, désactiver les centrales électriques de Téhéran pour plonger israelmagazine.co.il
la ville dans le noir et prendre d’assaut les stations de radio et de télévision. Shaun Toub, un acteur juif américain, d’origine iranienne, joue, quant à lui, étonnamment le rôle du chef des services secrets iraniens. Plus vrai que nature. Navid Negahban, un acteur iranien qui avait joué dans les saisons 4 et 8 de 24 heures chrono, présente les mêmes puissance et aura que Sean Connery, tout en lui ressemblant presque comme deux gouttes d’eau. Il joue, lui, le rôle d’un iranien qui travaille pour le Mossad. Nous découvrirons Liraz Charhi, mais aussi Menashe Noy, en chef du Mossad, lui qui avait déjà interprété le rôle de l’avocat amoureux de "Guet." Tamar, notre agent du Mossad à Téhéran, se sentirait presque à la maison, d’autant qu’elle rencontrera sa tante qu’elle n’avait jamais vu depuis son départ et qui n’avait jamais voulu quitter l’Iran. Elle s’était convertie à l’Islam pour se marier avec son fiancé musulman, qui lui était devenu depuis un ponte de la justice iranienne. Elle avait coupé tout lien avec sa sœur partie en Israël. Tamar finira par la mettre en danger. Je ne vous en dirai pas plus et vous laisse découvrir cette série que vous pouvez visionner sur le Net en tapant Kan en hébreu. Huit épisodes à couper le souffle. Aussi respirez bien en ces temps de Corona. n
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Pour vos dons : 053-952 34 42
L’association "Nahalat Issachar et Yossef" a été créée selon les instructions des Grands Rabbanim d’Israel, dans le but d’établir a Givat Zeev, un Centre communautaire, dans le cadre duquel sera consituée l’association humanitaire pour les gens dans le besoin, les malades ages et les pauvres. Le principe est de fournir une réponse et une aide aux populations fragilisées et en détresse sur une base universaliste. Les rescapés de la Shoah, les soldats seuls, les nouveaux immigrants, les orphelins et les veuves, et les familles dans le besoin, au moyen de colis alimentaires, vêtements, chaussures et autres. Pour tout ça, nous avons créé la "Kouppat Aguiva", car les pauvres de notre ville passent en premier. Téléphonez dès aujourd’hui et faites un don on ne laisse pas son voisin avoir faim !
mail: niyg26@gmail.com - 10, Rue Kidron, Centre Commercial Neve Menahem. israelmagazine.co.il
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Kibboutz KETOURA
Un Oasis de Bonheur en plein Désert
En 1973, juste après la guerre de Kippour, un groupe de jeunes adultes américains, membres du Young Judaea – une organisation sioniste américaine – décident de faire leur Alya. Le gouvernement leur propose de s’installer dans plusieurs avant-postes que l’armée vient d’évacuer: deux sur le plateau du Golan, deux autres autour de la mer Morte, et un dernier tout au sud, dans le désert du Néguev, à 50 Km au nord d’Eilat. Contre toute attente, ils choisiront cette dernière option. C’est ainsi qu’est né le kibboutz Ketoura.
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es premières années sont particulièrement difficiles. "On nous prenait pour des fous. Parachutés dans le désert ! C’était un défi que nous nous lancions à nous-mêmes. Mais nous étions idéalistes et avions la volonté de réussir !" raconte Julie Bar-Lev, l’une des fondatrices de kibboutz. Pendant quelques années, ils seront aidés par la WIZO (Women’s Zionist Organization of America). "Plus que l’aide financière reçue, c’est leur soutien moral qui nous a permis de tenir. Elles vont faire pression sur les responsables du gouvernement, à Jérusalem, pour qu’ils installent les infrastructures promises, à commencer
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par l’eau potable." Idéalistes, mais avec les pieds sur terre, comme Leah Kayman, de Saint-Louis (Missouri) qui rejoignit le kibboutz en 1977 après avoir appris comment gérer une ferme à l’université du Wisconsin. Pendant près de 40 ans, jusqu’en 2015, la commercialisation des dattes et l’élevage laitier seront la première source de revenus du kibboutz. Au fil des années, de nouveaux arrivants vont s’agréger au noyau des fondateurs anglophones : des Sud-Américains, des Russes, quelques Français, et même des Israéliens de souche, attirés par un environnement plus agréable et moins stressant que la vie urbaine.
Par Mickaël Laustriat Depuis la fondation des premiers kibboutzim (Degania, 1909) beaucoup de changements sont intervenus dans ces villages coopératifs : l’arrivée du libéralisme et de la privatisation a mis à rude épreuve l’idéologie d’origine, socialiste et égalitaire. Fort curieusement, sur les 274 kibboutzim existant en Israël, Ketoura est l’un des rares à avoir préservé son style de vie communautaire. Les décisions relatives à l’orientation du kibboutz, et à ses investissements sont prises en commun, en assemblée générale, après discussion de ses 170 membres. Pour eux, l’argent n’est pas le but ultime de la vie : chaque couple reçoit en moyenne 3200 shékels par mois. Ce qui pourrait les situer bien en dessous du seuil israélien de pauvreté, mais cela inclut nombre d’avantages en nature, comme les repas au ‘hadar okhel, (la salle à manger communautaire), la blanchisserie, les structures éducatives (le kibboutz compte près de 250 enfants) et le parc automobile. Question religion, le kibboutz Ketoura a choisi la voie de la pluralité. On mange cachère, on fait les fêtes. Il y a une synagogue, mais chacun israelmagazine.co.il
est libre d’y aller ou pas. Chacun respecte le Chabbat comme il l’entend – attitude rare en Israël. A tel point qu’en 1987, le porte-parole de la Knesset attribua au kibboutz Kétoura un prix pour sa tolérance religieuse et son approche pluraliste. Les 10.000 dollars reçus servirent à lancer Keren-Kolot, des séminaires ouverts à tous pour promouvoir les valeurs du kibboutz, la solidarité, l’identité juive, l’importance de l’environnement et une meilleure connaissance du Moyen-Orient
L’ÉNERGIE SOLAIRE, ÇA RAPPORTE La grande réussite du kibboutz Ketoura, c’est d’avoir pris en marche le train des nouvelles énergies. Le niveau intellectuel particulièrement élevé des membres du kibboutz – qui compte plusieurs doctorants et diplômés d’universités – va faciliter cette reconversion. En 1998, l’un d’entre eux, qui étudie la culture des algues à l‘Université Ben Gourion, propose d’en développer : elles produisent de l’astaxanthine, un puissant antioxydant utilisé en diététique. Aujourd’hui la société Algatech est l’un des leaders mondiaux sur ce marché de niche. Mais les royalties que perçoit le Kibboutz ne suffisent pas. Et comme produire du lait devient de moins en moins rentable, et que le soleil est particulièrement généreux à Ketoura, quand l’industriel visionnaire Yossef Abramowitz leur proposa en 2006
Le nouvel antioxydant puissant à base de soleil et d’algues produit au Kibboutz Ketoura est au cœur d’un accord international de 50 millions de dollars. d’ériger plusieurs hectares de panneaux photovoltaïques pour transformer l’énergie solaire en électricité, ils acceptèrent sa proposition. Et c’est ainsi qu’est née en 2006 la compagnie Arava Power. A Jérusalem, on n’y croit pas trop. Mais quand deux ans plus tard, la compagnie allemande Siemens investit 15 millions de dollars dans la compagnie, le gouvernement israélien, qui ne veut pas que les retombées du projet lui échappent, conclut un accord avec le kibboutz aux termes duquel l’énergie produite sera achetée pendant 20 ans par la Compagnie israélienne d’électricité. En juin 2011, les premiers kilowatts commencent à sortir des 18 5000 panneaux solaires. Cette installation futuriste produit actuellement chaque année de 9 millions de kWh !
BEN GOURION AVAIT VU JUSTE L’une des visions de Ben Gourion est devenue réalité. Aujourd’hui, Arava Power a donné naissance à l’Institut Arava d’Etudes environnementales (AIES). Accréditée par l’Université Ben Gourion, cette structure délivre des formations de niveau académique, accueillant des étudiants venus du monde entier. Grâce à toutes ces retombées, le kibboutz Ketoura se diversifie à présent dans l’hôtellerie de tourisme avec des maisons d’hôtes et de l’immobilier locatif sur place. Dans cette success-story discrète au milieu du désert, il y a aussi une place pour les nouveaux immigrants. Un programme d’absorption de "Bait Richon baMolédet" /Première maison dans le pays) permet à ceux qui veulent s’intégrer en Israël d’apprendre l’hébreu et un métier.n
Marc et Suzanne LEWI : les Français de Kétoura
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atif de Roanne, Marc Lewi est membre du Kibboutz Ketoura depuis 35 ans. "Quand j’y suis arrivé, c’était un hameau au milieu du désert. Maintenant, c’est devenu une véritable oasis. On fait partie du mouvement "Kibboutz Tamid" ( , le kibboutz toujours). Il regroupe une vingtaine de kibboutzim qui ont décidé de rester attachés aux valeurs d’origine de solidarité et d’égalité. Bien sûr, pour se développer, on a fait appel à des investisseurs pour nous lancer dans les nouvelles technologies. Pourquoi se priver des avantages du capitalisme ?... Après avoir accompli différents jobs dans le kibboutz, je m’occupe maintenant de l’accueil des nouveaux arrivants. On a construit des petites maisons pour loger des olim et des familles qui préfèrent vivre chez nous plutôt qu’en ville. On a des demandes constantes. Leur motivation n’est pas celle des premiers pionniers, mais chacun a le droit de vouloir vivre au calme et dans la nature... "n
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Pour cause de Corona, on ne peut pratiquement pas partir en vacances à l’étranger, alors autant profiter de cet été pour aller à la (re)découverte de notre beau pays. Israël Magazine a donc sélectionné pour vous quelques jolis lieux intéressants à sillonner.
Yehoudia et ses célèbres cascades
Spécial Vacances
Les Sites et Parcs nationaux à visiter cet été en Israël Noémie Grynberg
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u nord au sud, commençons par l’un des plus grands sites antiques d’Israël. Le très beau parc national de Beit She’ane comprend les ruines restaurées d’un théâtre romain de 7000 places, des rues à colonnades grecques, un amphithéâtre de gladiateurs, des bains et des marchés byzantins, des temples romains et grecs et une synagogue samaritaine. S’y promener équivaut à explorer les 2000 ans d’histoire de la localité. Pour mieux comprendre son passé, vous pouvez faire appel à un guide ou vous aider d’une présentation audio. Après la tombée de la nuit, un spectacle audiovisuel vous fait revivre les ruines à l’aide d’images projetées. En route vers la mer Morte, arrêtons-nous à Qumran. Surplombant la magnifique région, une falaise rocheuse abrite les fameuses grottes où ont été trouvés la plupart des anciens manuscrits de la secte juive des Esséniens, datant de l’époque du Second Temple. Bien que vous ne puissiez pas entrer dans les cavernes à proprement parler, vous pouvez cependant explorer les découvertes archéologiques de l’endroit, telles que les bains de purification rituelle (mikvé) et un bâtiment comptant les restes d’une cuisine, d’une tour de guet, d’ateliers de poterie et d’écuries. Dans le scriptorium (atelier de copistes), vous verrez des encriers en terre et en métal qui ont pu être utilisés par les Esséniens pour rédiger leurs parchemins. Plus spectaculaire, il est possible de s’inscrire à une visite guidée nocturne à la lumière de torches ou à une reconstitution vivante de la découverte et de l’achat des célèbres rouleaux dans les années 40. En continuant après Beersheva, halte à Avdat. En plus des vues incroyables sur le Néguev, vous explorerez dans ce parc national en plein désert, audessus du ruisseau Tsin, les vestiges bien préservés d’anciennes villes, dont deux grandes églises, des monastères et un israelmagazine.co.il
Le parc national de Avdat bain byzantins, une magnifique chambre funéraire romaine et une forteresse nabatéenne. Un film explicatif vous narre l’histoire de ces cités d’exception, fondées au IIe siècle avant J.-C.
Sites archéologiques En Samarie, à environ 48 km au nord de Jérusalem, le Mont Ébal s’étend sur 18 km2, à plus de 900 mètres d’altitude. On n’y rencontre de la végétation, notamment des vignes et des oliviers, que sur les premières pentes car les crêtes sont rocheuses et très dénudées. Du sommet de l’Ébal, en regardant vers le nord, on embrasse la plus grande partie de la Galilée ainsi que le mont Hermon. Vers le sud, on aperçoit les hauteurs des environs de Jérusalem et vers l’ouest, la plaine du Sharon ainsi que la Méditerranée. Enfin vers l’est, il est possible de voir jusqu’audelà du Jourdain. La disposition du lieu ne ressemble à rien de connu : un volumineux tas de pierres entouré de quelques tessons de poteries. Les antiquités découvertes au mont Ebal sont exposées au musée du kibboutz Ein Shemer. Bien que ce site archéologique soit encore peu connu du public, il constitue l’un des témoignages de l’établissement des Hébreux à Canaan. Un coin hautement symbolique à visiter,
qui marque les débuts de la Nation d’Israël sur sa terre. Plus à l’ouest, nous découvrons Gath. Au sommet du tell de l’antique ville biblique, la vue embrasse une vaste étendue, permettant d’apercevoir lors de conditions particulièrement bonnes, Ramla et Latrun au nord, le massif judéen à l’est, le haut du Néguev au sud et la plaine côtière à l’ouest. Depuis le Moyen-âge, s’élève sur la colline une forteresse, ayant joué à la fois son rôle défensif, tout en assumant aussi d’autres fonctions : cœur administratif et économique, centre de stockage, chef-lieu de collecte des impôts et des taxes, base de contrôle des populations alentours, des tribus nomades, des brigands, etc. Aujourd’hui, la ruine très avancée du château ne permet pas de préciser sa forme initiale. D’autres fouilles archéologiques ont dégagé un autel de pierre datant du IXe siècle avant l’ère vulgaire. Il rappelle les reposoirs israélites de la même période. Ses caractéristiques les plus remarquables proviennent d’une paire de cornes sur sa façade et sur une corniche au centre. Sa forme renvoie aux descriptions des autels évoqués dans les Ecritures, à la différence notable que celui du Temple était orné de quatre cornes. ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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Reprenant la route, filons vers Jérusalem pour visiter le Davidson Center (Cité de David). Adjacent au Kotel se trouve un impressionnant parc archéologique. Il contient des artefacts de différentes périodes : celles du premier et du deuxième Temple, la musulmane byzantine, celle des croisades et d’autres. Les vestiges les plus captivants sont les murs de la ville de la période du roi Salomon, les marches menant au Temple, la rue d’origine de la période du Second Temple, les magasins, les bains rituels, etc. Un canal de drainage impressionnant a également été découvert sous la rue et à l’intérieur. C’est là que les combattants ont fui, espérant échapper à l’épée des Romains. À côté du mur sud, montait un escalier creusé dans le substratum rocheux du mont Moriah (une partie originale de la période du Second Temple) qui desservait les pèlerins du Temple. Le Davidson Center présente des artefacts trouvés dans les fouilles, ainsi qu’une vidéo et un impressionnant modèle virtuel tridimensionnel qui vous permet de visiter la Jérusalem d’antan.
Davidson Center est un magnifique parc archéologique près du Mur occidental
Réserve naturelle Pour ceux qui préfèrent la nature aux vieilles ruines historiques, voici Yehoudiya, au sud du plateau du Golan. Le site est célèbre pour ses belles cascades et ces passages escarpés en roche volcanique. Il offre l’un des paysages les plus riches, propice à la randonnée. L’emplacement regorge d’une étonnante diversité naturelle : ruisseaux, chutes d’eau, rivières, marais, mares et profonds canyons. Une des curiosités du terrain : plusieurs anciens dolmens dont l’usage et la provenance demeurent encore un mystère. Pour les amoureux de la flore, la réserve Les falaises rocheuses de Qumran
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compte de vieux chênes Tabor entre lesquels pousse une savane de jujubes et de pistaches, des térébinthes, des épines du Christ, une multitude de petites plantes et d’espèces herbacées aux fleurs jaunes, ainsi que des cyclamens roses et des anémones rouges. Quant à la faune, elle comprend des gazelles, des sangliers, des renards roux, des damans de Syrie, des porcs épics et des chacals, ainsi que toute une variété d’oiseaux, dont des rapaces (faucons, crécerelles, circaètes, buses, aigles et vautours). Avec un peu de chance et de patience, vous parviendrez à les observer. Quant aux itinéraires de randonnées, longeant les cours d’eau, la plupart sont balisés suivant les différents niveaux de difficulté. Les chemins très difficiles nécessitent des échelles de descente en rappel (dans ce cas, vous devez être accompagnés par un guide professionnel). L’une des plus importantes est le sentier circulaire de la rivière Yehoudiya. Il vous guide de piscines en cascades à l’origine du cours d’eau. En bas des falaises, vous pouvez entendre le grondement de la chute avant même de l’apercevoir. Arrivés à un pont en bois, vous avez l’occasion d’admirer l’écume à travers l’étroit canyon. Pour les moins téméraires, la réserve naturelle de Yehoudiya possède aussi un terrain de camping, des aires de pique-nique et un snack-bar. n israelmagazine.co.il
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un Secteur en pleine Déconfiture AFP / JACK GUEZ El Al Des Boeing 737 sur le tarmac tarmac de l’aéroport Ben Gourion
La pandémie de Covid-19 ne cesse de gagner du terrain en Israël. La "deuxième vague" paralyse le trafic aérien tandis que l’horizon des professionnels du tourisme, lui, ne cesse de s’assombrir. Alors que le gouvernement interdit aux étrangers d’entrer dans le pays, depuis début mars, indépendants et entreprises du secteur font face à une crise sans précédent. Le point.
d’activité." Au-delà de cette sphère, on compte énormément d’entreprises qui gravitent autour du secteur du tourisme. Sont aussi touchés les chauffeurs de taxis qui travaillent beaucoup moins, les bureaux de changes, les blanchisseries qui avaient des contrats avec les hôtels, ou encore les entreprises de restauration qui cuisinaient les repas pour les compagnies d’aviation.
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En 2019, le tourisme en Israël aurait généré 22 milliards de shekels (soit environ 5,7 milliards d’euros) de revenus. Selon Globes, le quotidien financier israélien, les touristes dépenseraient en moyenne plus de 1250 € par visite. Une manne qui s’est tarie subitement au mois de mars, à l’annonce de la fermeture des frontières du pays. Le secteur, jusqu’ici florissant, aurait employé directement environ 153 000 personnes en 2019. Elles sont aujourd’hui les premières victimes d’une crise sans précédent. Pour faire face à ce chômage forcé, les aides de l’Etat mises en place ne suffisent pas. Ils précisent : "nous avons obtenu 1875 shekels, une fois. Vous savez, même ceux qui ont reçu un peu plus ont perçu une allocation qui ne permet pas de vivre plus d’un mois. Ceux qui travaillaient avec des groupes dans des bus et qui
par Dahlia Perez
i l’Etat d’Israël a accueilli au total plus de 4,5 millions de visiteurs en 2019, les chiffres pour l’année 2020 devraient témoigner, eux, d’une chute spectaculaire de la fréquentation touristique. Et pour cause. Dès le mois de février, le gouvernement a commencé à interdire les vols venus depuis la Chine. Très vite, d’autres pays, de plus en plus nombreux, durement touchés par l’épidémie de Coronavirus, ont rejoint une liste noire, leurs ressortissants n’étant plus autorisés à entrer sur le territoire. Des photos de l’aéroport Ben-Gourion déserté ont témoigné de la paralysie du secteur aérien, condamnant par là même toute une économie intérieure dépendante du tourisme. Face à l’annulation de presque tous les vols commerciaux, les
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professionnels du secteur doivent se rendre aujourd’hui à l’évidence : la crise qui les frappe est grave et risque de durer. David Mansour et David Shapira travaillent depuis plusieurs années comme guide touristique, avec un statut d’indépendant. Ils se souviennent: "Quand le gouvernement a décidé de ne plus laisser entrer d’étrangers sur le territoire, les touristes qui étaient encore présents ont vu l’étau se resserrer et sont repartis en urgence. Depuis début mars, notre activité est complètement stoppée. Elle est réduite à néant. C’est la même chose pour les compagnies de bus qui travaillaient avec les touristes, pour les magasins de souvenirs, les compagnies aériennes et les agences de voyage, qui, pour la plupart d’entre elles, n’ont plus
Une crise qui s’installe
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étaient salariés en agence ont eu droit au chômage. Pour le reste, les indépendants, les indemnités perçues sont d’un montant ridicule. Si au début on ne savait pas combien de temps la crise durerait et qu’on pensait juste se serrer la ceinture pendant quelques mois, aujourd’hui il est clair que cette situation risque au moins de durer un an, dans le meilleur des cas." Est-ce que la profession s’organise, se fédère, pour faire valoir ses droits, pour manifester, pour essayer d’obtenir de meilleures conditions d’indemnisation ? "Oui, il y a eu des manifestations dédiées au secteur du tourisme. Mais les guides ne sont pas nombreux, nous sommes quelques milliers tout au plus. Tant que les touristes ne peuvent pas venir ici, on n’aura pas de travail." En dépit d’une situation critique, ils tentent d’adapter leur activité aux circonstances. Mais les règles sanitaires sont difficiles à appliquer et l’impact sur le chiffre d’affaires s’en ressent : David Shapira: "J’ai organisé des randonnées et des visites pour les Francophones qui sont ici en Israël, seulement c’est un marché qui est très réduit. Les Israéliens francophones qui sont là sont tous aussi touchés par la crise, et louer un guide pour une journée ça coûte, c’est un luxe. Il y a un marché, mais il est infime. On ne peut pas vivre avec ça. Jérusalem qui était pleine à craquer avant le Corona est aujourd’hui vide. Les magasins sont fermés. David Mansour : Les Israéliens ne remplaceront pas les quatre millions et demi de touristes présents en 2019." Le port du masque et la distanciation sociale découragent aussi la clientèle restante, ce que l’on me confirme: "Oui, pour deux raisons : les gens ont peur de se retrouver confinés, même dans un grand bus, et puis marcher avec un masque sous la chaleur, c’est quasiment du domaine de l’impossible. C’est très pénible." La situation financière, les deux David l’évoquent sans détour: "Elle est épouvantable, comme tous les guides
et les indépendants non-salariés. On ne vous cache pas que pour l’instant que beaucoup se sont engagés dans des cours de reconversion professionnelle. David Mansour : je pense que ceux qui veulent continuer à travailler doivent changer de métier pour les deux prochaines années. La profession est sinistrée. David Shapira : Tant que persistera cette quarantaine de 14 jours et que les étrangers qui ne seront pas autorisés à revenir, l’activité ne repartira pas. Pour le moment, on a la tête sous l’eau. On est en train de se noyer."
Annulations en cascade : les agences de voyage au bord du gouffre
Tal a monté il y a deux ans "Israël just 4 you", son agence de voyages. Elle explique: "Je fais venir des groupes organisés de pays francophones. On planifie les cars, les hôtels, les entrées sur les sites, les guides locaux certifiés, etc." Comment la jeune entrepreneuse a-t-elle vécue ces 4 derniers mois ? "C’est bien simple, en mars, du jour au lendemain, on a dû annuler tous les groupes qui arrivaient. Ça a été vraiment terrible. Et puis au fur et à mesure, on a dû se rendre à l’évidence, notamment que juin, puis juillet-août, c’était fini. Septembre, on n’y croit plus et on est en train d’annuler les groupes de décembre, donc c’est vraiment difficile." Sur les six prochains mois, l’impact sur l’activité de l’agence est énorme : "Ce sont des sommes incroyables qu’il a fallu rembourser. Les groupes avaient déjà réglé leur voyage. Les hôtels avaient été payés. Il a fallu récupérer tout cet argent là et le rendre au client. Or, une agence, ça tourne, on doit faire des investissements à l’avance parce qu’on sait qu’on a des entrées, donc on peut très vite se retrouver avec des dettes. Moi je m’en suis bien sortie, mais on n’est pas tous dans le même cas." Tal décrit un marasme qui se nourrit de l’incertitude de l’avenir : "On essaie de se donner un petit peu d’espoir et je clôture des contrats pour
mai 2021 avec des groupes et des agences francophones, mais, encore une fois, on est tellement dans le flou que ça ne nous motive pas à travailler. L’Etat ne nous dit rien, nous ne savons pas si les frontières vont rouvrir dans deux mois, trois mois ou six mois. Qu’est-ce qu’on fait des groupes du mois d’octobre, qui sont ceux de mars et dont le voyage a déjà été reporté ? C’est très frustrant et angoissant." Aujourd’hui, en dépit des efforts de la cheffe d’entreprise pour redresser la barre, l’amertume pointe: "Qu’est-ce que vous voulez, qu’on ferme, qu’on cherche un nouveau travail ? On fait quoi ? On a beaucoup investi, on a mis beaucoup d’énergie là-dedans, et tout d’un coup, tout se crashe." Tal, en tant que guide et en tant qu’entrepreneuse, a néanmoins pu bénéficier du chômage et des aides de l’Etat : "La vérité, c’est qu’on vit de ça aujourd’hui. On est en train de manger nos dernières économies et on ne pourra pas tenir encore longtemps. Je suis mariée et j’ai trois enfants. Ce n’est pas un petit budget dont j’ai besoin à la maison, il me faut une somme conséquente. Quand je vois ce que je reçois du Bitouah Leumi en indemnités chômage, avec tout ce que j’ai déclaré ces dernières années, ça n’est pas réaliste. Ça correspond à un tiers de mes revenus habituels. Ça fait mal au cœur de se dire qu’on a travaillé comme des acharnés, qu’on a toujours tout déclaré pour constater que, lorsqu’on a besoin d’aide, on reçoit des clopinettes." Aujourd’hui, Tal se solidarise avec les professionnels du secteur pour essayer de faire valoir ses droits : "Je suis syndicalisée. Un de mes meilleurs amis a entamé il y a une dizaine de jours une grève de la faim. Avec lui se sont ajoutés d’autres personnes qui campent maintenant en face du ministère des Finances pour rencontrer des parlementaires. Il faut que l’Etat se bouge pour nous trouver une solution. Je suis d’une nature optimiste mais là, j’ai de plus en plus de mal à tenir le coup. On n’a jamais vu une crise aussi mal gérée même en temps de guerre."n
Effondrement du tourisme en Israël : les chiffres qui inquiètent 466 000 est le nombre de visiteurs étrangers enregistrés au mois de mai 2019 en Israël. A titre de comparaison, au mois de mai 2020, le nombre d’étrangers entrés dans le pays serait tombé à 2300. Un chiffre confirmé par le bureau central des statistiques, dans le cadre des restrictions de voyage mises en œuvre dans le pays en raison de la pandémie de coronavirus.
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Nationaliser EL AL :
Par Mickaël Laustriat
LA MOINS MAUVAISE SOLUTION ? Pendant longtemps, la compagnie aérienne porte-drapeau de l’Etat hébreu a été la fierté de tous les Israéliens. Au fil des ans – depuis septembre 1948, date de son premier vol inaugural vers Genève – EL AL a su s’imposer comme un acteur important du transport aérien en desservant 49 destinations à travers le monde. Mais l’arrêt des vols provoqué par l’apparition du Corona va révéler une grave perte de rentabilité qui courait depuis plusieurs années.
L
’inquiétude commence quand le 19 février dernier, le ministre des Transports, Bezalel Smotrich déclare dans une interview que les revenus d’EL AL accusent une perte de 50 millions de dollars, à cause d’une baisse significative des achats de billets pour la Thaïlande et de l’annulation des vols vers Hong Kong et Pékin. Se voulant rassurant, il ajoute que dans moins d’un mois, la société inaugurera sa première ligne TelAviv-Tokyo, bien que le moment choisi soit difficile en raison de la peur croissante des passagers d’atteindre les destinations d’Extrême-Orient. Dès la publication des états financiers du premier trimestre 2020, il est clair que la situation d’EL AL est très grave : au cours des trois premiers mois, la société a perdu 140 millions de dollars, soit plus de 150 % par comparaison avec la même période de 2019. Les auditeurs financiers, qui évaluent à 1,3 milliard le
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passif d’EL AL, avertissent de l’urgence d’injecter rapidement des liquidités. Pour garder la confiance de sa clientèle et rassurer le public que la mondialisation du coronavirus décourage de voyager, EL AL annonce qu’elle "permettra aux passagers d’annuler sans frais leurs réservations jusqu’à six heures avant le départ". Cette promesse ne sera pas tenue, et dès juillet le montant des remboursements demandés s’élève à plusieurs millions de shekels. Pour redresser la compagnie, le ministère des Finances se déclare prêt à cautionner un prêt bancaire de 400 millions de shekels, ventilés comme suit : 250 millions de shekels (72 millions de dollars) seront garantis par l’État, les 150 millions de shekels restants (43 millions de dollars) seront couverts par des actions en bourse, l’État s’engageant à racheter le stock qui n’aurait pas été écoulé. En fait, il s’agit d’une offre soumise à
condition. L’Etat demande qu’EL AL signe une nouvelle convention collective avec les employés, et les conditions sont drastiques: suppression de 2000 postes sur 6500 et réduction de tous les salaires, même ceux des hauts dirigeants, membres du conseil d’administration et des pilotes. Le 3 juillet, 100 pilotes sont placés en congé sans solde. Le ton est donné.
Gourmands, les pilotes
Les 1400 personnels de cabine seront les premiers à signer un accord, consentant au licenciement de centaines de personnes et à des coupes. La Histadrout affirme que le nouvel accord permettra à EL AL d’économiser 30 millions de dollars par an. Mais les pilotes, s’estimant mal défendus par le comité d’entreprise d’EL AL, commencent à négocier indépendamment. Ils sont d’accord pour réduire les coûts israelmagazine.co.il
de fonctionnement d’EL AL mais font valoir que 20 % des économies de salaire proviendraient des 650 pilotes de l’entreprise. En d’autres termes : 8,5 % des employés feraient 20 % des concessions. À première vue, cela ne semble pas injuste, si l’on considère que les pilotes sont bien mieux payés que les autres employés. Ils soutiennent que s’ils doivent fournir des concessions de manière disproportionnée pendant ces périodes difficiles, ils devraient également pouvoir partager davantage les futurs bénéfices d’EL AL. Et les pilotes exigent qu’on leur garantisse une participation de 25 % aux résultats de l’entreprise. Cet argumentaire crée non seulement des problèmes entre pilotes et direction, mais également entre eux et le reste des employés d’EL AL. La plupart d’entre eux sont en congé sans solde, alors que 280 pilotes de Boeing 787 sont retournés au travail et effectuent des vols cargo : ils n’ont donc pas souffert autant que les autres employés. Il y a aussi des négociations sur la suppression ou la restriction des avantages de voyage des pilotes et de leurs familles, éventualité que les pilotes n’acceptent pas, faisant remarquer que c’est un avantage consenti dans toutes les compagnies aériennes.
Un acheteur providentiel
La situation semble bloquée quand tout à coup, le 7 juillet, on apprend qu’un milliardaire juif américain de New York se déclare prêt à acheter EL AL. Il offre offre 75 millions de dollars pour une participation de 45% dans la compagnie aérienne. Il s’agit de Kenneth Rozenberg, propriétaire de Centers Health Care, une chaîne de maisons de retraite aux EtatsUnis. Comme la condition préalable pour se israelmagazine.co.il
porter acquéreur d’EL AL est de posséder la nationalité israélienne, il a chargé son fils Eli Rozenberg – un immigrant américain de 30 ans devenu israélien, et qui actuellement étudie la Torah dans une Yeshiva– d’en faire l’annonce aux médias. Pour montrer son sérieux, Rozenberg a ouvert un compte à la Banque Mizrahi Tefahot et déposé 15 millions de dollars, 20% de l’investissement prévu. Cela semble peu sérieux, mais, on apprend vite que l’ancien président d’IAI (Israël Aerospace Industries) a été chargé de mener des négociations entre ce Rozenberg et la famille Borovitch, qui contrôle EL AL. Pour Tamar et David Borovitch, actionnaires majoritaires, la question est : peut-on sauver EL AL ou faut-il s’en séparer ? Au premier trimestre leurs revenus ont diminué de 25 % à 321 millions de dollars, et la perte d’exploitation a augmenté de 75% pour atteindre 93 millions de dollars ! Sur les marchés, l’action d’EL AL a baissé de 40 % depuis le début de l’année, et la capitalisation boursière n’est plus que de 280 millions de shekels.
Rien n’est encore joué
De son côté, Rozenberg est déterminé à acheter EL AL, en dépit de ses difficultés financières et malgré l’état désastreux de l’industrie aéronautique mondiale en raison de la pandémie du coronavirus. Il se déclare prêt à acheter la société "telle quelle", sans aucune condition préalable. A l’heure où nous publions, la situation est toujours confuse : EL AL a suspendu tous ses vols passagers jusqu’au 31 août, soustraitant quelques vols cargo, mettant 98 % de ses personnels en congé sans solde. Les 650 pilotes d’EL Al accepteront de signer un accord qui prévoit le licenciement de 71 d’entre eux et 50 départs en retraite. Ces mesures devraient permettre d’économiser 105 millions de dollars pour l’entreprise. Et comme rien n’est simple, la justice s’invite dans le dossier : un recours collectif de 400 millions de dollars contre EL AL a été déposé devant le tribunal de district central de Lod par des passagers
furieux de ne pas avoir été remboursés pour les vols annulés. Ils avancent que cela représente 1,5 milliard de shekels, ce qui équivaut fort curieusement à l’aide gouvernementale proposée par l’Etat. Leurs avocats font valoir que le comportement de la direction d’EL AL relève du déni de service, contraignant les clients à faire preuve d’une patience sans fin. Suite à quoi, la compagnie a répondu que la loi sur l’aviation a été modifiée, et qu’elle accorde aux compagnies aériennes une prolongation jusqu’au 31 août.
Quel avenir pour EL AL ? On peut avancer que l’Etat d’Israël ne peut pas se permettre de confier EL AL à des mains étrangères, fussent-elles même juives et américaines : au-delà de l’image de l’Etat hébreu qui serait écornée, le déficit stratégique – la liberté de circuler – serait immense. La publicité donnée à la proposition de rachat par le milliardaire Rozenberg permet justement au gouvernement de faire passer la solution de la nationalisation, en laissant sous-entendre qu’une privatisation se traduirait par une suppression des lignes non rentables et des plans sociaux drastiques, comme seule l’idéologie ultralibérale sait en concocter. Il faut espérer que l’étoile blanc bleu qui orne les avions d’EL AL retrouvera un jour sa place dans le ciel, au-dessus des turpitudes du monde, en dépit du pouvoir implacable de l’argent et des virus maléfiques.
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Par Haïm Ouizemann
Le Jeu des Alliances
"Tu ne feras de pacte avec eux [les nations païennes] ni avec leurs divinités". (Ex. 23 : 30) Israël et la Guerre froide
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ans les années 50 du siècle dernier, le jeune et fragile Etat d’Israël est pris en étau entre deux superpuissances, les Etats-Unis d’Amérique et l’Union soviétique. Peutil, dans le contexte de la Guerre froide, rester neutre sans subir la menace de disparaître ? John Foster Dulles1, alors secrétaire d’Etat au sein du gouvernement Dwight D. Eisenhower, développe la thèse de "rollback (‘retour en arrière’)" visant à éradiquer le communisme. Cette politique anti-communiste s’inscrit dans la doctrine du "Containment" (‘endiguement’) proposée plus tôt par George Frost Kennan2 qui, pour juguler l’expansion communiste, décide de développer des relations économiques avec le Japon et l’Europe de l’Ouest. C’est alors que le gouvernement américain, contraint la France, de surcroît inquiète des liens rapprochés entre l’Egypte et l’Union Soviétique, à se rapprocher d’Israël. Israël est alors isolé sur le plan international, car "Pacte de Bagdad", que les U.S.A. vont rejoindre en 1958, interdit aux EtatsUnis et au Royaume Uni de vendre des armes à l’Etat hébreu. En 1956, le gouvernement américain avait imposé à Israël de se retirer de la péninsule du Sinaï en lui promettant en échange de laisser ses bateaux traverser le Détroit de Tiran. En 1958, à la suite
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du renversement du régime irakien, le "Pacte de Bagdad" se verra fortement affaibli, ouvrant la voie à une alliance forte et durable entre la superpuissance américaine et le minuscule état d’Israël. Cette alliance va grandissant, dès lors que le Général de Gaulle adopte une politique étrangère pro-arabe et pro-soviétique afin de repousser toute hégémonie américaine au Proche-Orient. La guerre des Six Jours marque la fin de toute alliance francoisraélienne, la France, ayant refusé toute aide au jeune Etat hébreu menacé, au profit d’une alliance renforcée avec les Etats-Unis d’Amérique. Or, la question de l’alliance américaine avec Israël se pose aujourd’hui avec une acuité d’autant plus accrue que le Plan Trump de paix israélo-palestinienne pourrait en définitive ne pas être mis en application par l’Etat hébreu et mettre l’administration américaine en porte-àfaux par rapport à sa propre politique proche-orientale. D’autre part, une victoire du parti démocrate aux prochaines élections porterait au pouvoir Joe Biden. Ce dernier, loin d’être pro-Israël, pourrait, comme Obama, soumettre l’Etat d’Israël à de nombreuses menaces de coupes budgétaires dans le domaine de la coopération militaire et à maintes pressions de remise en question de projets de constructions en Judée-Samarie.
Les Etats-Unis d’Amérique restent le meilleur allié d’Israël. Toutefois, cette alliance diplomatique suscite une question : sur le plan de sa politique extérieure, le petit Etat hébreu doit-il dépendre de la plus grande puissance mondiale et, d’une certaine manière, renoncer à une part certaine de sa souveraineté ?
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Les Alliances d’Israël dans la Bible Après la destruction du 1er Temple de Jérusalem (-586) et le meurtre politique du gouverneur de la Province de Juda Guédalia ben A’hikam par Shémayah ben Néthanya, mettant fin à tout espoir de reconstruction nationale en Judée, les Judéens s’enfuient en Egypte, pays où leurs ancêtres furent esclaves3, malgré l’opposition nette du prophète Jérémie4, qui rappelle les iniquités commises par les rois de Juda : "Avez-vous donc oublié les méfaits de vos pères, des rois de Juda, ceux de leurs femmes, vos propres méfaits et ceux de vos femmes, qui ont été commis dans le pays de Juda et les rues de Jérusalem ?"5. "Ah oui, tu espères prendre pour soutien ce roseau brisé, l’Egypte, qui, lorsque quelqu’un s’y appuie, pénètre dans la main et la transperce ! Car tel est Pharaon, roi d’Egypte, pour tous ceux qui se fient à lui Effectivement, le roi Josias qui réforma le culte divin à Jérusalem est tué à Mégiddo (-609), tentant en vain d’empêcher le pharaon Néko II de traverser Juda. Neko II, comprenant que la puissance assyrienne décline, décide de la supplanter définitivement. Josias, rêvant de rallier Israël (le royaume du Nord) à Juda (le royaume du Sud), conclut une alliance politique avec Babylone mais échoue à Megiddo. Son fils aîné Joachaz lui succède à sa mort mais, allié à la puissance babylonienne, se voit écarté du pouvoir après trois mois de règne pour être remplacé par son propre frère Eliakim, renommé Joaquim par Néko II7. Cette alliance avec l’Egypte est temporaire car Nabuchodonosor, roi de Babylone, remporte, en sa première année de règne, la victoire à Karkemish contre l’Egypte. Cependant, le roi de Juda Sédécias, en -597, s’appuyant de nouveau sur la puissance égyptienne, se voit trahi par celle-ci. "Ainsi parle l’Eternel, le Seigneur d’Israël: Voici ce que vous direz au roi de Juda qui vous envoie à moi pour me solliciter : Cette armée de Pharaon qui s’est mise en marche pour vous secourir, elle rebrousse chemin vers son pays, l’Egypte"8. En effet, les forces militaires du Pharaon Khephren, israelmagazine.co.il
Anne-Louis Girodet, Nabuchodonosor fait tuer les enfants de Sédécias, 1787, Le Mans, musée de Tessé parties d’Egypte pour soutenir Sédécias, font marche arrière. L’armée babylonienne écrase définitivement le royaume de Juda et détruit le Temple de Jérusalem : "Alors, dans la neuvième année de son règne, le dixième mois et le dixième jour du mois, Nabuchodonosor, roi de Babylone, marcha avec toute son armée contre Jérusalem ; il campa sous ses murs et on éleva des retranchements sur tout son circuit" . Après deux ans de siège, Jérusalem s’effondre sous la puissance de Babylone. Même le petit reste de Judéens qui demeure encore en Judée l’abandonne, malgré l’opposition de Jérémie. Rappelons que Jérémie, l’organe de l’Eternel, enjoint les habitants de Judée à faire allégeance à la puissance babylonienne en attendant de meilleurs jours. Les alliances conclues par les rois de Juda s’avèrent néfastes. L’origine de cette vision pro-égyptienne remonte au roi de Juda Ezéchias, au temps d’Isaïe, qui lui-même prit parti en faveur de l’Egypte, selon le discours de Ravshaké, chef d’étatmajor de l’armée de Sennacherib : "Ah oui, tu espères prendre pour soutien ce roseau brisé, l’Egypte, qui, lorsque quelqu’un s’y appuie, pénètre dans la main et la transperce ! Car tel est Pharaon, roi d’Egypte, pour tous ceux qui se fient à lui". Une question se pose : pourquoi l’alliance avec Babylone serait-elle plus légitime que celle avec l’Egypte ? Babylone n’est-elle point une terre de culte des faux dieux ? La réponse est sans appel: "Puis tu leur diras : Ainsi parle l’Eternel-des Armées, Seigneur d’Israël : Voici, je vais envoyer chercher Nabuchodonosor, roi de Babylone, mon
serviteur ; et j’établirai son trône par-dessus ces pierres que j’ai fait enfouir. Il y dressera son éclatant pavillon."11 Nabuchodonosor constitue, de fait, l’instrument de l’Eternel par le biais duquel Israël est frappé pour lui rappeler, d’une part, ses égarements de jeunesse et d’autre part, que les alliances politiques entre puissances sont dictées par le Divin. Finalement, Babylone sera écrasée par Cyrus, empereur perse, qui autorisera le Grand Retour des exilés à Jérusalem (Shivat Tsion) afin d’y reconstruire le Temple.
Les alliances politiques avec les superpuissances peuvent s’avérer empoisonnées. David ben Gourion, conscient de cette menace, mit toujours en avant l’indépendance de l’Etat d’Israël. Ainsi, le 12 mai 1948, alors que les membres du "Directoire du peuple" (Min’hélet Ha’Am) sont rassemblés, les Nations Unies et le gouvernement américain font pression sur lui afin de le contraindre à repousser la Déclaration d’Indépendance du futur Etat hébreu au motif que cela serait interprété comme une provocation envers les Arabes qui n’hésiteraient point à déclarer la guerre. George Marshall, Secrétaire d’Etat américain, craint en fait qu’une guerre entre Juifs et Arabes entraîne une grave pénurie de pétrole, ressource vitale pour les Etats-Unis. David ben Gourion, convaincu qu’il fallait agir sans plus attendre, campe sur ses positions et déclare officiellement le 14 mai 1948 l’indépendance de l’Etat d’Israël. n ISRAEL MAGAZINE 236 | SEPTEMBRE 2020 |
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Qu’est-ce que l’Ordonnance judiciaire de Parenté ? Introduction : traiter d’un sujet de société est la vocation du journalisme même si vous êtes opposé à une certaine évolution (régression) éthique du sujet que le journaliste traite. Aussi il m’a paru important de prévenir nos lecteurs et de le préciser. André Darmon
I
l s’agit de la reconnaissance par une personne de la parentalité de l’enfant biologique du conjoint de même sexe, sans que cela nécessite une procédure d’adoption. Un conjoint de même sexe peut se faire enregistrer comme le parent de l’enfant biologique de son conjoint au moyen d’une "ordonnance judiciaire de parenté" déclarée par le Tribunal et sans qu’il ne soit nécessaire de recourir à une procédure d’adoption, au cas où le mineur est né d’une relation existante. On ne peut pas déclarer une ordonnance judiciaire de parenté au conjoint du parent biologique si les deux parents biologiques de l’enfant sont en vie et le lien entre eux et l’enfant n’a pas été rompu. Ces options concernent une situation où un seul des conjoints a une affinité génétique avec l’enfant et leur objectif est d’apporter une solution aux cas suivants : Une grossesse issue d’un don anonyme de sperme - lorsque les deux conjoints sont des femmes et que le bébé est né d’un don de sperme. Gestation pour autrui effectuée à l’étranger lorsque les deux conjoints sont des hommes, le bébé est né du sperme de l’un d’eux et les deux conjoints sont enregistrés comme les parents du bébé dans le certificat de naissance. Dans certains cas, l’ordonnance judiciaire de parenté peut être rendue sans examen et elle peut même être rétroactive (à partir la naissance). L’application rétroactive de l’ordonnance judiciaire de parenté a des conséquences économiques et autres. Dans certains cas, les Tribunaux des affaires familiales réduisent les exigences et accordent des ordonnances judiciaires de parenté en dérogation aux règles énoncées sur la page présente. Qui a le droit de recevoir une telle ordonnance ?
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Le conjoint du même sexe que le parent biologique de l’enfant, à condition que les conditions suivantes, qui ont été déterminées par le Conseiller Juridique du Gouvernement et/ou qui ressortent de la jurisprudence, soient remplies : L’autre parent biologique n’est pas en vie ou il est inconnu (si l’enfant est né d’un don anonyme de sperme) ou le lien entre lui et l’enfant a été rompu. Selon le Tribunal des affaires familiales, au cas où les deux parents biologiques sont vivants et le lien entre eux et l’enfant est maintenu, le conjoint ne pourra pas être reconnu comme un troisième parent. Résidence : Les deux conjoints sont des résidents d’Israël et ont plus de 18 ans et au moins l’un d’eux n’a pas encore atteint l’âge de 54 ans. La durée de la relation entre les conjoints - Les conjoints entretiennent une relation conjugale depuis au moins un an et demie, y compris une vie commune (résidence commune). Cependant, dans un autre jugement, la Cour a accordé une ordonnance judiciaire de parenté à des partenaires sans leur demander de prouver la durée de la relation entre elles. Une partie essentielle des conditions de la durée de la relation est la décision conjointe de mettre un enfant au monde. Dans un jugement portant sur la date de la décision, il a été déterminé que même si la décision n’était pas partagée dès le premier instant et le père non biologique en a adopté l’idée pendant la grossesse (de la mère porteuse) - cela ne dénie pas que cette condition est rempli. L’absence de casier judiciaire du conjoint - Le conjoint qui demande l’ordonnance n’a pas été condamné pour des infractions qui font craindre un préjudice important aux intérêts suprêmes de l’enfant, tels que des délits sexuels ou de la violence. (En outre, il sera examiné si dans le passé l’autorité du conjoint lui a été retirée pour des enfants précédents).
Par Liane Kehat
Une ordonnance judiciaire de parenté ou un jugement déclaratoire est rendu lorsque l’enfant naît dans le cadre d’une relation existante. Lorsque la relation a commencé après la naissance de l’enfant, il faudra avoir recours à des procédures d’adoption. Il faut préciser que les conditions mentionnées par le Conseiller Juridique du Gouvernement faisaient référence à un cas spécifique : un couple de femmes et la naissance a eu lieu en Israël. Dans un cas de gestation pour autrui effectuée à l’étranger, où les deux conjoints avaient été enregistrés comme les parents du bébé dans le certificat de naissance délivré dans le pays où il est né, la Cour a exigé une preuve de l’affinité génétique du parent génétique avec le bébé et elle n’a pas exigé les conditions énumérées dans la position du Conseiller Juridique. Dans un cas de gestation pour autrui effectuée à l’étranger, où un seul des conjoints est mentionné comme parent sur le certificat de naissance délivré dans le pays où l’enfant est né, l’autre conjoint devra passer par une procédure d’adoption pour être reconnu comme parent du bébé. Comment formuler une demande d’ordonnance judiciaire de parenté en pratique ? Il faut déposer la demande au Tribunaldes affaires familiales dans les plus brefs délais. La demande peut être soumise environ 60 jours avant la date estimée pour la naissance, ou plus tard. Plus le couple dépose la demande tôt, plus grandes sont les chances de recevoir une ordonnance rétroactive depuis la naissance. Dans tous les cas, l’état a le droit d’examiner chaque cas individuellement et exiger une enquête pour déterminer si les circonstances le justifient. En conclusion - il ne fait aucun doute que les questions relatives aux familles homosexuelles en Israël bénéficient de plus en plus d’une promotion de la part de l’Etat et dans les décisions de justice. n israelmagazine.co.il
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COMMUNIQUE D’ANDRÉ DARMON, DIRECTEUR ET RÉDACTEUR EN CHEF
Vous avez été des centaines à répondre positivement à mon appel. Et il serait trop long de raconter les mille et unes façons dont vous m’avez montré votre attachement à Israël Magazine J’avais souvent dit à la télévison, à la radio et dans ces colonnes que mes lecteurs, mes abonnés, constituaient réellement une seconde famille. Je ne savais pas à quel point c’était vrai. Vous avez été, vous êtes et vous serez encore formidables car la guerre contre le Corona virus est loin d’être terminée. Aussi comme les mois précédents je vous encourage toujours à vous réabonner, à abonner des amis, à faire des abonnements de soutien et pour les entreprises à publier car de notre côté rien n’a changé. Je m’honore depuis toujours et depuis 21 ans de payer sans retard, tous mes collaborateurs mes imprimeries, mes graphistes, nos journalistes. Depuis 4 mois votre concours m’a facilité les choses. Les mois qui s’annoncent seront encore difficiles. Le paradoxe c’est dans ces moments difficiles, nous avons envie que le magazine soit encore meilleur. Je m’y attelle chaque jour. Il est fort possible que dans un 2eme temps vers septembre ou octobre nous ouvrions le capital d’Israël Magazine aux lecteurs, aux abonnés et à ceux qui croient beaucoup dans l’avenir du magazine. Aussi le calcul est fort simple 500 abonnés supplémentaires jusqu’à la fin de l’année compenseront la perte des revenus publicitaires. André Darmon
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