27 octobre 2009
LES COMPLEXITES DE LA CRISE : UNE AUTRE LECTURE DE LA MONDIALISATION* Jean-Marc, Y.M., Salmon ETOS-Institut Télécom Evry, France jmsalmon@gmail.com
Le cycle néolibéral, vieux d’une trentaine d’années, est en crise profonde. Le processus de mondialisation marque le pas. Les connectivités économiques s’affaiblissent. La capacité de liquéfaction de la finance s’amoindrit. Mondialement, la dépression économique de 2008 se compare à celle de 1929. Leurs mécanismes s’apparentent facilement: crises bancaire et boursière se renforcent l’une, l’autre ; une crise socio-économique s’ensuit. L’instabilité du capitalisme est de retour. Cependant les deux dépressions présentent deux différences majeures. Les réseaux connectifs propagent bien plus rapidement une crise. Et celle d’aujourd’hui bute sur les limites physiques et écologiques de la croissance économique. Avec un afflux sans précédents de liquidités, au début du XXIe siècle, parallèlement au gonflement de la bulle immobilière, dont l’explosion va entraîner la crise bancaire, les prix du pétrole flambent. Par contrecoup les hausses des prix agricoles aggravent la crise alimentaire. Les pressions sur les prix des céréales sont amplifiées, de surcroît, par la crise climatique. Avec la crise financière de 2008, les cours du pétrole et des denrées agricoles s’effondrent. Mais, à la moindre reprise de la croissance économique, le prix du baril de brut pourrait dépasser les 100 $, entraînant probablement une aggravation de la crise alimentaire. Les différentes crises jouent entre elles. Bien qu’elles aient des caractéristiques et des temporalités différentes, elles peuvent se nourrir les unes, les autres, ou, elles peuvent produire des effets de yo-yo : quand l’une monte, l’autre baisse, et vice-versa. Elles se coalescent en un complexe de crise, une multicrise. Elles interagissent comme dans un système. Serions-nous entrés dans un cycle historique de crises chroniques ? Au point qu’apparaisse, autour de la ligne de faille Washington-Beijing, une nouvelle tectonique géopolitique ? Les États et les organisations mondiales sont mal armés pour faire face à ce complexe de crises. Leurs décisions sont pensées dans des cadres étroitement sectorisés. Ces processus de décisions nationales, étroitement spécialisées, entravent le débat public sur des réponses transversales et transnationales à une multicrise qui affecte l’humanité. D’autant qu’une crise des compréhensions du monde, de l’humanité, de la nature, et plus particulièrement celle des modes de pensée classiques, étroitement disciplinaires, entrave l’émergence d’approches stratégiques transversales. En l’absence de mouvements sociaux puissants, les gouvernements, tirant, à leur façon, les leçons de la crise de 1929, concentrent leurs efforts sur un rouage essentiel du capitalisme néolibéral : ils donnent la priorité au sauvetage des grands établissements bancaires nationaux. *À partir d’un papier rédigé dans le cadre du séminaire « crise de civilisation : différents regards ? », Université fédérale de Palmas, Tocantins, Brésil, 22-24 juin 2009.
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