Paru dans Aline BERGÉ et Michel COLLOT, dir., Paysage et Modernité(s), Bruxelles, Ousia, 2007, 396 p., p. 42-65.
Colloque international Paysage & modernité(s) CNRS / Université Paris III, 10 - 12 mars 2005
Cosmophanie et paysage moderne par Augustin BERQUE
École des hautes études en sciences sociales & CNRS berque@ehess.fr
Résumé – Après avoir critiqué la thèse de Ritter selon laquelle l’avènement du paysage aurait compensé la perte du « monde ptoléméen », puis enraciné dans le vivant la distinction environnement/milieu (Umgebung/Umwelt chez Uexküll), on argumente le concept de cosmophanie (l’apparaître d’un monde) en le rattachant à l’idée nishidienne de prédicativité du monde. La réalité est une cosmophanie, ou un rapport sujet/prédicat selon la formule r = S/P (ce qui se lit : S en tant que P), principe fondamental d’une théorie de l’écoumène (la relation humaine à l’étendue terrestre). L’avènement du paysage est analysé dans ces termes, comparaison étant faite entre diverses cultures. On souligne ensuite la décosmisation qu’a entraînée l’absolutisation moderne de l’objet (S sans P), décosmisation que n’ont surmontée ni la Naturphilosophie, ni la « logique du prédicat » mise en avant par Nishida. Un point de vue écouménal s’impose aujourd’hui. Abstract – After having criticized Ritter’s thesis, according to which the advent of landscape would have made up for the loss of the “Ptolemean world”, and rooted in life the distinction between environment and milieu (Umgebung/Umwelt in Uexküll), this paper advocates the concept of cosmophany (the appearing of a world), linking it to the Nishidian idea of the predicativeness of the world. Reality is a cosmophany, that is a relation between subject and predicate according to the formula r = S/P (read : S as P), which is the basic principle of a theory of the ecumene (the human relationship with the lie of the Earth). The advent of landscape is analyzed in these terms, by comparing diverse cultures. Then the paper analyzes the decosmisation entailed by the modern absolutisation of the object (S without P), and which neither Naturphilosophie nor Nishida’s “logic of the predicate” could overcome. An ecumenal point of view now seems inescapable. Sommaire 1/ Monde, Univers et paysage. 2/ Paysage et préservation du sensible. 3/ Paysage et cosmophanie. 4/ De monde animal en vision du monde. 5/ De l’Australie à la Chine. 6/ La décosmisation moderne. 7/ De la réaction romantique au « dépassement de la modernité ». 8/ Conclusion : « Au-delà du paysage moderne ».
情用賞為美 事昧竟誰辨
Le sentiment, par le goût, fait la beauté Chose obscure avant qu’on la dise. Xie Lingyun § 1. Monde, Univers et paysage