6 livret distributeurs

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à une nouvelle exigence des Français. Les difficultés économiques les empêchent de pouvoir accorder une part trop importante de leur budget à l’alimentation, donc les prix doivent être nécessairement plus bas s’ils veulent continuer de manger. Seulement derrière ces prix très modestes, se cache une vérité que bien trop peu réalisent : si Leclerc est capable de vendre ces produits si peu chers, c’est qu’il les a achetés encore moins chers que cela.

« Ne prenez que le meilleur ; Pour nous, être moins cher, c’est être 3 fois moins cher ; La croissance oui, sauf celle des prix » peut-on lire sur ces affiches faisant la promotion des hypermarchés Leclerc. Les publicités de Leclerc ne sont qu’une surenchère toujours plus grossière du prix le moins cher. Acheter Leclerc, c’est acheter pas cher. En rentrant dans cette course aux petits prix, Leclerc semble répondre

Quand nous voyons donc la bouteille de lait bio d’un litre à 1,02€, il faut imaginer que Leclerc n’a pas payé ce prix-là au producteur de lait. La rémunération du producteur de lait bio est largement inférieure et malheureusement ne lui permet pas de pouvoir vivre dignement. En proposant des prix aussi bas, Leclerc fait une belle fleur à ses clients mais certainement pas à ses fournisseurs et producteurs. Acheter Leclerc c’est donc prendre conscience que l’on cautionne un tel système.


C’est comme ça que beaucoup de consommateurs perdent la notion et la valeur des choses et s’offusquent à la moindre augmentation des prix. Trop peu admettent qu’un aliment quel qu’il soit a une valeur réelle et sont prêts à la payer.

Ainsi, Leclerc fait toujours plus de produits à prix discount, de moins en moins bonne qualité, parfois nocifs,et les gens les achètent de plus en plus. C’est à se demander si ce n’est pas l’offre qui crée la demande, plutôt que répondre à une demande réelle.


Monoprix a décidé de rompre avec les codes classiques du packaging et de la communication des produits alimentaires en basant sa campagne de publicité sur des énoncés typographiques. Cette campagne typographique a surpris beaucoup de consommateurs qui se sont alors mis à devoir lire ce qu’il y avait sur les emballages pour comprendre ce qu’ils contenaient. Quels inconvénients observons-nous alors ?


Premièrement, ce choix exclu de manière radicale une partie de la population – certes minoritaire mais existante– que représentent les personnes illettrées. Ne sachant pas lire, ces personnes ne sauront jamais ce qui se trouve à l’intérieur d’une boîte de conserve comme celle présentée ci-dessus. Alors qu’une boîte classique donne au moins à voir une photographie sinon un dessin de tomate, celle de Monoprix n’en a que la couleur et le nom marqué dessus. Pour eux, on achète une boîte de conserve colorée, mais pas une boîte de conserve de tomates. De plus, que donne-t-on à voir du produit vendu ? Rien. Si, pour le paquet de jambon on en aperçoit le tiers, et encore. Mais quelles informations nous donne-t-on sur ce jambon ? Aucune. Du moins aucune information importante comme sa provenance géographique, son poids, sa qualité ou sa valeur nutritionnelle n’est immédiatement lisible. Nous imaginons alors qu’il faut nécessairement saisir, retourner puis lire ce qui se trouve au dos du paquet pour pouvoir espérer trouver une quelconque information qui nous semble importante.

Enfin, que penser de ce genre d’affiche ? Un texte blanc – donc seulement accessible aux lettrés – sur un fond noir qui dit que les « oeufs Monoprix proviennent exclusivement de poules élevées en plein air ». Pourquoi une information de ce type est-elle présentée de la sorte ? Pourquoi une bonne nouvelle comme celle-ci est si mal mise en valeur ? Pourquoi le noir ? Cette couleur noire qui connote le sombre, la mort, le deuil est utilisée dans un but d’information. Une information qualitative qui vise à rassurer le consommateur et à crédibiliser le distributeur. Monoprix cherche-t-il à perturber ? À marquer les esprits ? Ces affiches ne semblent pas avoir de portée pédagogique mais semblent plutôt vouloir interpeller le consommateur. En créant un décalage entre le propos et la forme, Monoprix espère peut-être marquer les esprits ?


Certains noms de la grande distribution ont cependant bien cerné les nouvelles préoccupations des consommateurs en terme de consommation et d’ecoresponsabilité et font désormais figure d’exception dans le domaine de la communication publicitaire. C’est ainsi qu’Intermarché a lancé une remarquable (et remarquée...) campagne sur les « fruits et légumes moches », symbolisant l’honnêteté et la franchise. « Les fruits et légumes moches sont aussi bons qu’ils sont moches ! » Comme s’il avait fallu attendre qu’Intermarché nous l’affirme… Le « moche » est devenu tendance, esthétique, symbolique... un vrai créneau ! Pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt ? En plus, bien souvent dans ces campagnes publicitaires, la forme des fruits renvoie à des images évocatrices et auxquelles nous pouvons nous identifier. Tout ce qu’il faut pour être rassurés et confiants. Merci Intermarché ! Et vive le business du moche ! Mais quand allons-nous arrêter de prendre les gens pour des imbéciles ? Quand allons-nous arrêter de définir ce qui est « beau » et ce qui est « laid » ? Pourquoi ne pas simplement s’intéresser au rôle essentiel de l’aliment qui est de nourrir ? Qu’apprenons-nous aux enfants en leur adressant ce genre de messages ? Qu’il y a des beaux et des moches, mais que tout est quand même bon. Mais si nous admettions directement que tout est bon sans nécessairement porter un jugement sur l’apparence physique ou la qualité esthétique ?



En bref, un « beau » coup de communication, bien rodé et bien conçu qui a sans aucun doute frappé les esprits des consommateurs. Cependant, ce qu’Intermarché ne dit pas, c’est que mis à part leur apparence en dehors des codes esthétiques de l’alimentation, ces produits ne rendent malheureusement pas les producteurs plus riches, ni mieux considérés.


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