DOSSIER
DTF : le nouveau Graal du marquage textile ?
« C’est la technologie de demain. Elle va probablement prendre de l’ampleur et cela nous offre de nouvelles opportunités » Julien GARAT, business development manager Textile chez Hexis
PRUDENCE CHEZ LES GRANDS FABRICANTS
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Si, bien entendu, le DTF pique la curiosité des grands fabricants de matériel d’impression, ils font, globalement, encore preuve de prudence. Certains d’entre eux multiplient les tests à l’abri des regards, avant d’hypothétiques lancements en cours d’année. Il faut avouer que la tâche s’annonce ardue pour les constructeurs, car la marge de manœuvre est bien plus étroite qu’à l’époque de l’avènement du DTG. « Les premières imprimantes DTG importées étaient catastrophiques. Nous attendions impatiemment que des fabricants renommés débarquent sur le marché. Mais aujourd’hui, c’est différent. Les solutions DTF actuelles sont encore perfectibles, mais elles sont déjà au point. Les grands constructeurs vont peut-être avoir quelques difficultés à révolutionner le DTF comme ils l’ont fait avec le DTG », analyse Nicolas Le Baron. Autre sujet d’incertitude pour les marques, la taille potentielle du marché. Le responsable commercial d’un fabricant de renom se montre perplexe : « La technologie est disruptive, mais cela reste un marché de niche, car de gros volumes sont nécessaires pour rentabiliser l’investissement. Aujourd’hui, la plupart de nos clients ne jurent que par la polyvalence et la multiplication des applications. Le DTF n’apporte pas cela. Mais certains ateliers aux volumes limités s’équiperont peut-être en DTF pour répondre à leurs besoins habituels et proposer de la sous-traitance en complément ». Néanmoins, un constructeur possède peut-être un coup d’avance dans la course. Epson intègre en effet dans sa gamme un modèle d’ores et déjà opérationnel pour réaliser du marquage en DTF, comme le confirme Vincent Aubert, responsable Produits Textile chez Epson France : « Il est aujourd’hui possible d’imprimer en DTF avec notre solution SC-F2100. Les encres Epson existantes sont compatibles et aucune modification technique n’est nécessaire sur la machine. Mais il faut savoir que l’on reste limité à des quantités de production artisanales. Sans parler de la problématique d’achat des films et de la colle adéquats ».
IC LE MAG / INDUSTRIES CRÉATIVES #19 JANVIER 2022
BIENTÔT UN FILM FRANÇAIS ?
Et si les systèmes d’impression viennent exclusivement d’Asie, les consommables nécessaires au DTF ne dépendent pas d’une source unique. Ceci s’explique par le fait que certains d’entre eux sont historiquement exploités dans le marquage textile : c’est le cas des poudres, qui sont utilisées en sérigraphie depuis une dizaine d’années et qui peuvent être sourcées en Europe. Des encres DTF certifiées Eco Passport by Oeko-Tex® sont par ailleurs déjà commercialisées. Mais la grande nouveauté de ce début d’année 2022, c’est l’apparition de films transfert développés sur le Vieux Continent. Après un long travail de R&D, le fabricant français Hexis intègre en effet des produits DTF dans son nouveau catalogue. Une première référence se pelant à froid, appelée DTF-C-PEEL, est dès à présent disponible. Un second film sera lancé plus tard dans l’année, sur un principe de pelage à chaud. « Nous ne voulions pas passer à côté de cette opportunité. C’est la technologie de demain. Elle va probablement prendre de l’ampleur et cela nous offre de nouvelles opportunités, auprès des professionnels du transfert sérigraphique par exemple, justifie Julien Garat, business development manager Textile chez Hexis. Historiquement, ce ne sont pas nos clients, mais ils pourraient le devenir avec nos films DTF. Notre clientèle actuelle devrait, elle aussi, se convertir petit à petit à cette technologie ». Tout va décidément très vite avec le DTF. Le marché est encore loin d’être mature et la réalité du moment ne sera certainement pas celle de la fin de l’année. L’arrivée probable de solutions issues des grands fabricants, potentiellement plus performantes et plus fiables que les machines actuelles, pourrait chambouler le marché et séduire de nouveaux clients. Et si le DTF ne cannibalise pas totalement les autres techniques de marquage, il devrait tout du moins s’affirmer dans la durée comme une solide option complémentaire dans l’arsenal technologique des professionnels du textile.