La Sentinelle Septembre-Octobre 2021

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La Sentinelle

Septembre - Octobre 2021 - n° 05

Avant-Propos Périodique bimestriel de la Centrale Générale du Personnel Militaire. Éditeur responsable : Yves Huwart - Bureau de dépôt : Bruxelles X - P109013

Le pouvoir des charlatans le syndicat militaire


Avant-propos

Le pouvoir des charlatans AVANT-PROPOS PAR YVES HUWART | PRÉSIDENT

Quand les gens ont des ennuis, sont malades, n’aiment plus leur travail et doutent de tout, que veulent-ils alors ? S’évader. Oublier la réalité. Rêver de choses spéciales. Ou croire en des discours faciles... Il y a cent ans, Charles Ponzi, un maître escroc, proposait aux gens un investissement avec un rendement mensuel de 50% (système pyramidal). Tant que les gens versaient de l’argent, leurs prédécesseurs étaient généreusement payés. Par la suite, les personnes dupées déclaraient : « Nous voulions tellement y croire. » Plus récemment, dans les années nonante, de nombreux Belges ont acheté des actions de l’entreprise de technologies vocales Lernout & Hauspie jusqu’à ce qu’il s’avère que la merveilleuse histoire de cette société était basée sur du vent. Même aujourd’hui, les partisans de Trump disent encore souvent qu’ils ont voté pour lui parce qu’il racontait des contes de fées. Pourquoi ces gens ont-ils été escroqués ou ont-ils cru à ces belles paroles ? Parce qu’ils voulaient se faire arnaquer. Parce qu’ils voulaient croire aux belles histoires et aux déclarations creuses des charlatans. Charlatan vient de l’italien 'ciarlatano' : quelqu’un qui, dans la rue, vend des mélanges à base de plantes ou élixirs de jouvence, arrache des dents, pratique la prestidigitation ou l'art du passe-passe. Un charlatan est un filou dans un costume de bouffon qui exploite les plus crédules. Le pouvoir d’un charlatan se fonde donc sur la falsification et les déclarations trompeuses. Tel un pécheur, il dépouille la vérité de son authenticité, de ses faits et de son objectivité. Malheureusement, nous constatons que des charlatans sont maintenant aussi à l’œuvre sur le dossier de la revalorisation salariale des militaires. Tant du côté des politiciens que des hautes sphères de la Défense, ils affirment qu’à la suite de cette augmentation salariale, « les militaires seront plus souvent dans les casernes au lieu de partir en mission ». Ou qui pensent devoir avertir les militaires en déclarant : « Soldat, cette augmentation sort de votre propre poche ». Leur thèse est donc que l’argent pour la revalorisation

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des traitements hypothéquera les investissements dans de nouveaux matériels et la force de frappe de l’armée. Comme peuvent-ils se tromper à ce point ?! L’augmentation des revenus est en effet obtenue sans affecter les budgets pour le fonctionnement et les opérations militaires. Au contraire, tant les dépenses de personnel que les moyens financiers pour le fonctionnement, les investissements et la rénovation des infrastructures seront considérablement augmentés en 2022. Dans les années à venir, la Défense continuera de suivre sa trajectoire de croissance budgétaire, comme le prévoit l’accord de gouvernement. L’augmentation salariale n’est pas seulement – quasi – officielle, mais elle débutera dans le courant de 2022 et sera pleinement appliquée en 2024. En outre, il y a aussi l’augmentation, à partir de 2025, du montant de la pension de quelque 30.500 militaires déjà mis à la retraite et de ceux qui prendront leur retraite à l’avenir. Tout cela donc, sans toucher au fonctionnement, ni aux opérations et au matériel ; ce qui n’a pas du tout été le cas au cours des 15 dernières années sous les ministres qui se sont succédé à la Défense. Les allégations faites par certains relèvent par conséquent du charlatanisme. On peut même dire : « fake news et charlatanisme ». George Orwell, l’un des plus grands auteurs anglophones du 20ième siècle et connu pour les romans ‘La Ferme des animaux’ et ‘1984’, avait donc raison lorsqu’il parlait de pensée politique trompeuse : (certaines) « personnes [les politiciens] ne peuvent prédire l’avenir que lorsqu’il coïncide avec leurs propres souhaits et les faits les plus évidents sont ignorés lorsqu’ils ne sont pas les bienvenus » ... Malheureusement, ce phénomène semble maintenant s’insinuer de plus en plus dans le monde de la Défense. Ce qui illustre le pouvoir des charlatans. 


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Septembre - Octobre 2021 - n° 05 Photo : MP Group

Colophon

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Le pouvoir des charlatans

La Sentinelle est le bimestriel de la Centrale Générale du Personnel Militaire. La Sentinelle est envoyée à tous les membres. Tirage : 8.800 exemplaires

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Du beurre dans les épinards !

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Job Well Done !

Toutes les données sont traitées dans le respect de la Loi sur la vie privée (Loi du 8/12/1992 & GDPR).

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BDL : attention à l’arnaque !

Éditeur responsable : Yves Huwart Coordination : Concetto Bandinelli et Laurent Schmitz

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Droits restaurés pour les candidats en période de stage et/ou d’évaluation

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Pas de croquemitaines à la Police Militaire

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C'est en plantant un couteau dans le dos des gens que je les remercie pour les services rendus

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Pari tenu ?

Informations générales – CGPM : Romboutsstraat 1 – Bus 021 1932 Zaventem srt@acmp-cgpm.be www.acmp-cgpm.be Tél. : 02 245 72 14 Fax : 02 245 73 01

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Statut

Du beurre dans les épinards ! Le 12 octobre dernier, le gouvernement a annoncé le verdict du conclave budgétaire, avec une très bonne nouvelle : le salaire des militaires va bel et bien être augmenté. Ce sera même l’augmentation salariale la plus importante depuis 75 ans à la Défense ! Un soulagement pour l’ACMP-CGPM qui travaille depuis des mois pour défendre, auprès des partis de la majorité, les intérêts de tous nos collègues.

La décision présentée par le gouvernement réalise presque tous les points de l’augmentation de salaire négociée entre l’autorité et les syndicats au début de cette année. Ludivine Dedonder, Ministre de la Défense : « Avec cet accord historique, nous franchissons une étape importante dans la reconstruction de la Défense. Après 20 ans de statu quo, le personnel, moteur de notre organisation, obtient enfin la revalorisation nécessaire, comme promis au début de mon mandat. » Comme prévu, le pouvoir d’achat des militaires augmentera en régime de quelque 150 millions d’euros par an pour l’ensemble des effectifs. Les volontaires et les sous-officiers recevront une augmentation – répartie sur une carrière complète – de 15 % ; les officiers auront une augmentation comprise entre 7,5 % et 14,5 %.

Tout de même, il y a quelques modifications dans la déclaration du gouvernement par rapport au projet d’Arrêté royal négocié avec les syndicats. Si le montant de l’effort financier global reste le même, la façon de rémunérer le personnel est nouvelle. En effet, la revalorisation du salaire sera réalisée pour plus de 2/3 par une augmentation du traitement et pour moins de 1/3 par une allocation. Au final, la somme supplémentaire perçue chaque mois reste en principe inchangée par rapport à ce qui a été négocié. La ‘courbe kaki’ des salaires des militaires rejoindra donc la ‘courbe bleue’ des salaires des policiers, comme prévu initialement. Les montants annoncés à nos membres via le formulaire sur notre site restent d’actualité. Il est même possible qu’en procédant ainsi la somme effectivement versée soit légèrement plus élevée.

Photo : Vincent Bordignon

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‘Dommages collatéraux’ Alors, si en fin de compte on touche ce qui a été promis, tout va bien ? Certes, mais cette subtilité technique cause tout de même quelques petits ‘dommages collatéraux’… Effet sur les pensions Il faut savoir que c’est surtout le traitement qui compte pour le calcul de la pension. Celle-ci n’augmentera donc pas autant que si la revalorisation était réalisée à 100% en augmentant les salaires. Donc, si un militaire perçoit 300€ de plus par mois suite à la décision du gouvernement, seuls 200€ ‘compteront’ pour le calcul de sa future pension. Pour un militaire BDL, le manque à gagner sera négligeable mais pour un collègue qui a la chance d’être pensionné sous l’uniforme, le montant de la pension augmentera un peu moins qu’espéré. Effet sur la péréquation Cette façon de payer la revalorisation se fera aussi sentir sur le mécanisme de la péréquation (voir La Sentinelle de mai-juin, page 10). L’augmentation prise en compte pour le calcul de la péréquation représentera 2/3 de la somme supplémentaire perçue par le personnel. Les pensionnés verront donc 


Photo : Vincent Bordignon

 toujours bien une augmentation, mais un peu moins conséquente que prévue. Le poids très lourd de la péréquation sur le budget du SPF Pensions semble bien avoir dicté le choix du gouvernement, qui a trouvé cette ‘astuce’ pour préserver la revalorisation annoncée et pour allouer aux pensionnés la même enveloppe globale en régime, à savoir quelque 150 millions. Il est à ce stade trop tôt pour dire exactement de combien les pensions augmenteront. Dès que nous en saurons un peu plus à ce sujet, nous informerons nos membres retraités.

Photo : Vincent Bordignon

Effet sur les ‘extras’ La nouvelle façon de revaloriser le pouvoir d’achat des militaires aura une autre conséquence car seul le traitement entre en compte pour le calcul des primes de fin d’année, du pécule de vacances ou des prestations. Ceux-ci augmenteront donc un peu moins que prévu dans l’accord initial.

Renégociation Le gouvernement n’a pas retenu le projet d’Arrêté royal tel que négocié avec les syndicats. Or, l’accord donné par l’ACMP-CGPM le 7 mai dernier ne portait que sur ces textes-là. Il faudra donc que l’autorité présente un nouveau projet d’Arrêté royal au Comité de Négociation militaire, le ‘CONEGO’. Les travaux techniques et préparatoires ont été entamés en étroite collaboration avec l’autorité. Qu’en est-il des autres dossiers ? Chaque dossier est indépendant des autres. Par exemple, cette revalorisation salariale ne change rien, ni à l’âge de la mise à la retraite, ni au calcul de la pension pour les militaires. Est-ce à dire que cela restera 56 ans pour toujours ? Ludivine Dedonder a assuré qu’elle et son parti ne prendront aucune initiative pour toucher à l’âge de la mise à la retraite mais il est impossible de savoir ce que d’autre partis feront comme proposition dans ce dossier. Le syndicat militaire reste donc vigilant sur ce sujet et continuera à défendre les intérêts des militaires... Tout comme nous continuons à suivre le dossier des chèques-repas,

qui poursuit en coulisses son parcours administratif et financier. Que va-t-il se passer maintenant ? Dès que nous aurons conclu les négociations sur le nouveau projet d’Arrêté royal, l’ACMP-CGMP informera chacun de ses membres en détail et de façon transparente, comme nous l’avons toujours fait. Nous sommes notamment le seul syndicat à voir fourni à ses membres un calcul individuel de l’augmentation salariale nette proposée, car nous estimons indispensable que nos membres soient pleinement au courant des conséquences du texte négocié. On l’a vu, les décisions du gouvernement ont modifié le plan initial, mais force est de constater que, globalement, la revalorisation promise par Ludivine Dedonder est bel et bien au rendez-vous pour les militaires. Si les textes que nous recevons correspondent effectivement aux annonces des autorités, la renégociation devrait aller très vite. Dans ce cas, les premières mottes de beurre arriveront dans les épinards des militaires dès l’année prochaine, sauf catastrophe planétaire ou panne de HRM… 

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Info

Job Well Done ! « Mission accomplie ! » C’est ce que peuvent dire avec fierté les collègues qui ont contribué à l’évacuation de nos ressortissants de Kaboul. « Job Well Done ! », c’est ce que disent les personnes que le pont aérien a permis de sauver. Dans cette interview, La Sentinelle vous fait découvrir ‘Red Kite’ par les yeux de deux compatriotes extraits d’Afghanistan par nos militaires. Farahnaz(1) nous reçoit dans sa coquette maison à la Côte. La jeune Belge d’origine afghane a proposé spontanément de nous faire son récit. Pour donner le point de vue des civils mais aussi pour remercier à sa façon les militaires qui lui ont permis de fuir les Talibans. Cette maman de trois petites filles vit dans notre pays depuis 2009. Elle travaille pour une grande multinationale et, pour elle, l’Afghanistan est désormais bien loin. Son aînée a treize ans, elle nous explique avec l’accent chantant de Flandre occidentale qu’elle vient de rentrer à l’école, qu’elle a toujours d’excellentes notes et que plus tard elle sera avocate, qu’on se le dise ! Les parents de Farahnaz habitent dans un petit village à une trentaine de kilomètres de Kaboul. Peu avant l’été, sa maman tombe gravement malade. La jeune femme et son frère Faroogh(1) décident de prendre congé pour se rendre à son chevet. À ce moment, les Talibans commencent seulement leur offensive, rien ne présage encore leur avancée fulgurante. Mais alors que Farahnaz rejoint ses parents, les villes de province tombent l’une après l’autre. On recommande aux Belges de quitter immédiatement le pays mais Farahnaz et son frère (1)

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ont leur billet d’avion pour revenir bientôt et de toute façon, les vols pour quitter l’Afghanistan sont tous complets. Les experts estiment que la bataille de Kaboul se déclenchera à l’automne…

les appels à l’aide. Au moment où ils n’y croient plus, un email arrive : ils doivent se rendre à l’aéroport. Ils ne peuvent emporter qu’un petit sac avec leurs papiers, de l’eau et de la nourriture pour 24h.

« I cannot help you »

« Tu veux aller en Europe, estce que tu veux devenir chrétienne ? »

« D’un coup, ils étaient là. Nous avons été totalement surpris. Nous tentions depuis plusieurs jours de contacter l’ambassade belge à Islamabad mais sans succès : les lignes étaient prises d’assaut et c’était toujours occupé, ou alors nous n’avions pas de réponse. Finalement j’ai pu avoir quelqu’un au téléphone mais ça s’est très mal passé. Je lui parlais en néerlandais mais la personne ne parlait qu’anglais et on se comprenait mal. Finalement elle a dit "I cannot help you" et a raccroché. J’étais choquée ; après la joie d’avoir enfin pu contacter l’ambassade, la perspective de recevoir de l’aide s’effondrait. » Farahnaz et son frère ne perdent pas espoir. Heureusement, l’internet fonctionne encore. Ils envoient des emails à l’ambassade et aux Affaires étrangères en Belgique. Leurs connaissances au pays se mobilisent aussi pour tenter de les aider, en multipliant les contacts et

Pour des raisons de sécurité nous avons utilisé des noms d’emprunt.

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« C’était le chaos total. Il nous a fallu des heures pour approcher de l’aéroport. On n’osait pas sortir de la voiture, il y avait tellement de monde et on entendait régulièrement des tirs d’armes automatiques. Pendant une semaine, de l’aube à une heure du matin nous avons fait la navette entre la maison de mes parents et l’aéroport, pour essayer d’approcher des portes. C’était horrible, nous avions peur, il faisait très chaud et il n’y avait pas d’ombre, pas de toilettes, juste une foule de gens désespérés qui nous bousculaient et cherchaient par tous les moyens à approcher de l’enceinte. »  Scannez ce QR-code pour voir une courte vidéo prise en cachette par Farahnaz.


Abbey Gate Le dimanche 22 août, des amis leurs recommandent de se rendre à une autre porte d’accès à l’aéroport [ndlr : Abbey Gate]. Après une attente interminable et une longue marche, frère et sœur arrivent épuisés au bord d’une sorte de canal servant d’égout à ciel ouvert. De l’autre côté en haut du mur d’enceinte, des militaires occidentaux surveillent la foule. L’atmosphère est tendue, on parle d’attentats et les tirs sont incessants. Malgré le brouhaha, un soldat belge entend Farahnaz parler néerlandais. Il lui

fait signe de traverser. L’eau n’est pas trop profonde mais la puanteur est insupportable. Engoncée dans l’hijab qu’elle a revêtu pour franchir les contrôles des Talibans, la jeune femme avance dans l’eau fétide. Ils arrivent au pied du mur et montrent leur passeport à nos collègues. Ceux-ci les attrapent alors par les bras et les hissent par-dessus l’obstacle. Ils sont enfin sauvés ! Islamabad « On nous a conduits dans une zone plus calme, où il y avait de 

Image surréaliste tirée d’une vidéo ‘volée’ sur la route de l’aéroport : un taliban surveille le trafic bâton à la main alors qu’un homme en costume-cravate impeccable passe derrière lui le GSM à l’oreille, comme si de rien n’était.

 « Les Talibans étaient agressifs et nous criaient dessus. Ils avaient des bâtons et frappaient sans discernement. Malheur à celui qui sortait son GSM pour prendre une photo ou ne se comportait pas comme ils le voulaient. Nous avons expliqué que nous étions belges et que notre avion attendait de l’autre-côté du mur mais ils ne comprenaient pas ce que nous disions. Comme beaucoup de gens à Kaboul nous parlons le dari, mais les Talibans sont Pashtun. L’un d’entre eux m’insultait et se fâchait : « Tu veux aller en Europe, est-ce que tu veux devenir chrétienne ? »… J’étais terrorisée, je pensais à mes filles, qui se faisaient du souci en Belgique. Nous gardions le contact par téléphone mais j’avais peur de ne plus jamais les revoir. »

L’égout à ciel ouvert que bon nombre de nos ressortissants ont dû traverser pour accéder à l’aéroport.

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Photo : Special Forces Group

L’équipe mixte ‘Deep Development Capacity’ des Special Forces à l’œuvre à l’aéroport de Kaboul. Des femmes et des hommes qui ont montré leur professionnalisme dans une mission particulièrement délicate et dangereuse.  l’ombre et des cabines WC. Là, on a d’abord vérifié nos papiers et on nous a posé des questions pour vérifier notre identité, puis les soldats nous ont expliqué que l’avion était parti, qu’il reviendrait le lendemain. Nous avons dormi en plein air, couchés à même le sol dans nos vêtements sales mais nous étions soulagés et je me sentais enfin en sécurité, protégée par nos militaires. Malgré les circonstances, j’ai quand même pu dormir. Nos soldats étaient très gentils et faisaient ce qu’ils pouvaient pour nous aider au mieux. J’étais rassurée, ils étaient calmes et ne criaient pas, j’avais l’impression qu’ils savaient ce qu’ils faisaient et que la situation était sous contrôle. Nous avons encore passé une journée complète à l’aéroport, dans des circonstances pénibles. Enfin, notre C-130 est arrivé et nous avons embarqué calmement, deux par deux par la trappe arrière, pas par la porte comme dans les autres avions. C’était bizarre, ça faisait

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beaucoup de bruit, on ne voyait pas dehors comme dans un avion normal et on devait s’asseoir par terre. Ça me faisait un peu peur mais j’avais hâte de partir. On a roulé longtemps puis l’avion a décollé. Tout le monde était heureux de quitter Kaboul. Le vol n’était pas très confortable mais on a vite atterri à Islamabad. Là, les Pakistanais étaient méchants. Ils se fâchaient et nous insultaient. Je voyais bien que nos militaires n’aimaient pas ça, ils étaient tendus et énervés mais restaient très professionnels. À part les policiers pakistanais, il y avait aussi deux Belges en civil qui jetaient nos sacs et nous criaient dessus. Je ne sais pas pourquoi mais après tout ce qu’on avait vécu, c’était vraiment désagréable. Après d’autres contrôles d’identité, nous avons encore passé la nuit à Islamabad puis le lendemain, nous sommes montés dans un gros avion d’Air Belgium qui nous a ramenés en Belgique. J’ai dormi pendant tout le trajet tellement j’étais fatiguée. »

Après sept jours de terreur, Farahnaz et son frère sont enfin sous la protection des militaires belges. Depuis la zone d’attente des C-130, la jeune femme envoie un ‘selfie’ pour rassurer son mari et ses enfants. 


Photo : Jürgen Braekevelt

 « Arrivés mardi à l’aéroport militaire de Melsbroek, j’ai tout de suite téléphoné à mon mari et pu parler à mes filles. J’étais tellement heureuse ! On a été pris en charge par des militaires et des gens de la Croix-Rouge très gentils qui nous ont conduits en bus à la caserne de Peutie. Là, on a passé un test COVID puis le personnel des Affaires étrangères a vérifié nos papiers. Ils nous ont aussi à nouveau posé des questions de sécurité. Comme je suis belge, je pouvais partir tout de suite. Ils ont appelé un taxi pour nous ramener au plus vite à la maison. Je n’ai même pas dû payer ! » « Mon frère et moi nous tenons à remercier tous ceux qui nous ont aidés à quitter l’Afghanistan, en particulier les militaires qui ont risqué leur vie pour aller nous chercher. Je sais que c’est leur travail mais quand même, ce qu’ils ont fait là-bas est formidable. Merci ! » 

Operation ‘Red Kite’ L’opération ‘Red Kite’ s’est terminée brutalement le mercredi 25 août, le lendemain de l’arrivée de Farahnaz et de son frère à Melsbroek, car les autorités belges estimaient que le risque d’attentat était devenu trop élevé, tant pour nos collègues sur place que pour nos ressortissants et ayants droits aux portes de l’aéroport. Le jeudi 26, alors que notre dernier C-130 quittait Kaboul chargé de militaires et des derniers réfugiés, un terroriste d’IS se faisait exploser à Abbey Gate, tuant 182 personnes dont 13 militaires américains. Cette attaque montre bien à quels dangers nos collègues ont été confrontés à Kaboul. En tout, les militaires belges ont rapatrié 1.418 personnes, dont plus de 300 enfants, répartis sur 22 rotations de C-130 et 4 vols d’appareils néerlandais. Plusieurs centaines de personnes ont eu moins de chance que Farahnaz et son frère. Elles se trouvent toujours sur place. La Diplomatie belge espère pouvoir les évacuer par d’autres moyens dans les prochaines semaines. Depuis son retour, Farahnaz a pu contacter sa famille à plusieurs reprises. Les nouvelles ne sont pas bonnes. Elle craint des représailles envers ses proches si les Talibans découvrent son identité, raison pour laquelle nous n’avons pas dévoilé son vrai nom ni donné trop de détails la concernant. La situation dans son village est préoccupante car malgré les promesses des Talibans face aux médias occidentaux, loin des caméras la terreur reprend petit à petit ses droits. Déjà, la petite sœur de Farahnaz n’a plus le droit d’aller à l’école et la jeune femme n’a que peu d’espoir pour l’avenir de ceux qu’elle a laissés en Afghanistan.

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Statut

BDL : attention à l’arnaque ! Aujourd’hui, près de 80% des nouveaux militaires sont engagés sous le statut ‘BDL’. Malheureusement, nous constatons que trop souvent les candidats sont mal informés, voire victimes d’une désinformation manifeste de la part de la Défense ! Les brochures et sites de la Défense dressent un portrait alléchant de la carrière BDL. On peut ainsi lire que « Le militaire BDL s’engage pour une carrière initiale de 12 ans ». Cette phrase est trompeuse. En réalité, le militaire BDL signe un acte d’engagement limité à 8 ans. Celui-ci peut être prolongé annuellement jusqu’à 12 ans maximum. Mais cette prolongation n’est pas possible en cas de souci de santé compromettant la capacité opérationnelle. En d’autres termes : au moment de signer son engagement, le militaire BDL n’a aucune garantie qu’il pourra effectivement travailler 12 ans ! S’il se rend dans une banque pour obtenir un prêt hypothécaire par exemple, il ne peut faire valoir qu’un statut correspondant à un contrat à durée déterminée de 8 ans, avec la ‘promesse’ d’une prolongation ‘possible’, mais sans certitude ! Dans le civil cela s’appelle un ‘emploi précaire’. Passage… au compte-gouttes ! Parler d’une « carrière initiale » est tout aussi trompeur car cela sous-entend qu’il y aura une ‘suite’. Le candidat BDL peut aussi lire que « La DG HR a décidé d’ouvrir grand les vannes du recrutement interne » et « Notre objectif est de donner la possibilité aux militaires BDL de faire une carrière complète en tant que militaire grâce au recrutement interne ». Ces promesses relèvent de la désinformation, voire de l’arnaque ! En effet, pour 2020 le nombre de places ouvertes au recrutement interne pour des volontaires BDL était fixé à 140. Sachant que quelque 580 volontaires étaient dans les conditions pour y prendre part, cela signifie que seul un postulant sur quatre avait une chance de rester à la Défense. Pire encore : la majeure partie des places ouvertes, soit 90 sur 140, étaient destinées à un passage de volontaire à sous-officier. Donc pour l’ensemble de l’armée, en 2020 il n’y avait que 50 places pour passer ‘volontaire de carrière’, soit une seule place pour quasi douze candidats potentiels ! D’une part l’armée pro-

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met monts et merveilles aux jeunes BDL mais d’autre part, elle ferme la porte à la majorité d’entre eux. Éternel recommencement Le candidats recrutés avec ces belles promesses ne sont pas dupes. Quand ils se rendent compte qu’ils se sont fait avoir, les jeunes militaires se mettent euxmêmes activement à la recherche d’un autre emploi. Forts de l’expérience et de la maturité acquises pendant quelques années à la Défense, ils trouvent assez vite un job moins contraignant, plus durable et souvent mieux rémunéré, à la Police par exemple. C’est dommage pour le jeune, qui aurait peut-être préféré rester militaire et qui s’en va avant d’avoir pu toucher sa prime de reclassement. C’est dramatique pour la Défense, qui perd un bon élément pour lequel elle a investi énormément en formations, recrutement, infrastructures, etc. Ce jeune a coûté très cher et part prématurément, alors qu’il commence à peine à être ‘rentable’ pour son unité. Et pour les militaires de carrière, le va et vient des BDL pèse sur le moral car ils doivent investir du temps et de l’énergie à encadrer et former des collègues dont la majorité ne restera de toute façon pas. Dumping social Le départ des BDL après quelques années crée aussi un gros déficit d’expertise à la Défense. En effet, la 

Photo : Jürgen Braekevelt


Attention, ‘Fake News’ ! La carrière ‘initiale’ d’un BDL n’est pas de 12 ans. Le jeune candidat signe pour huit ans, prolongeables annuellement jusqu’à 12 ans maximum, mais sans certitude absolue !  majorité des fonctions d’une armée moderne nécessitent de nombreuses années d’ancienneté avant de vraiment connaître et assimiler toutes les ‘ficelles’ du métier. Les ‘anciens’ avaient derrière eux un impressionnant bagage acquis dans les circonstances les plus diverses. Du maintien de la paix dans les Balkans à l’engagement opérationnel en Afrique en passant par le combat arctique en Norvège, on pouvait tout leur demander. Si l’ancienneté moyenne du personnel ne dépasse désormais pas six ans, il est clair que l’efficacité tactique des unités diminue fortement. Finalement, à part le secteur privé qui bénit la Défense de payer la formation de ses futurs employés, les seuls qui se portent mieux avec le statut BDL, ce

sont les politiciens. Petit à petit, ils remplacent un personnel hautement qualifié et expérimenté par des jeunes ayant peu d’ancienneté, donc très bon marché. En remplaçant des adjudants par des sergents, la masse salariale de la Défense diminue sans devoir toucher aux effectifs. Ce n’est rien d’autre qu’une version bariolée du ‘dumping social’. Cerise sur le gâteau de nos dirigeants : de facto les militaires devront travailler jusqu’à 67 ans, puisque la grande majorité ne sera jamais pensionnée sous l’uniforme ! Et pour compléter la mascarade, sur le plan international la Belgique pourra entretenir l’illusion qu’elle dispose d’effectifs suffisants. Mais en cas d’engagement réel au combat, nos unités composées principalement de soldats peu expérimentés subiront forcément des pertes plus importantes. En français, on appelle ça de la ‘chair à canons’… 

Attention, ‘Fake News’ ! Non seulement il y a très peu d’offres pour un emploi à durée indéterminée à l’armée mais la personne sur la photo appartient à la catégorie des volontaires. Or désormais TOUS les volontaires sont recrutés dans le statut précaire BDL…

L’ACMP-CGPM revendique le libre choix Pour le syndicat militaire ACMP-CGPM, le statut BDL doit être modifié d’urgence. Il est aberrant de devoir licencier de jeunes militaires parfaitement compétents alors que l’armée manque cruellement de personnel. Tel qu’il est appliqué, le statut BDL est une tromperie envers les militaires, envers la population et envers nos alliés ; un tour de passe-passe qui sabote l’efficacité de notre Défense et compromet notre sécurité collective pour des raisons purement politiciennes. C’est pourquoi l’ACMP-CGPM revendique le libre choix pour les militaires BDL qui ont prouvé leur valeur au terme de leur carrière initiale : soit le départ en fin de contrat, soit le passage sur simple demande dans le cadre de carrière. La Défense possède déjà assez d’outils statutaires pour se défaire en temps utile des éléments ne convenant pas au métier des armes, il n’y a donc aucune raison valable pour conserver ce statut précaire.

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Statut

Droits restaurés pour les candidats en période de stage et/ou d’évaluation Le 20 février 2018, la DG HR publiait une procédure spécifique (SPS) relative à la coordination et au contrôle de la période de stage et d’évaluation des candidats militaires. A peine huit jours plus tard, notre syndicat, l’ACMP-CGPM, lançait une première intervention officielle afin de faire rectifier certains passages de cette SPS qui n’étaient pas en conformité avec la loi. Après plus de 1.250 jours d’attente et de nombreux problèmes dans les unités, la nouvelle DGHR-SPSFMNBAS-003 est parue le 3 août dernier, rendant à la loi une de ses plus belles locutions latines « Nemo legem ignorare censetur » (« Nul n'est censé ignorer la loi. ») Petit retour en arrière, plus exactement le 20 février 2018. La DG HR publie la DGHR-SPS-FMNBAS-003. Ce ‘manuel de l’utilisateur’ est censé vulgariser en mots simples ce que disent les textes légaux (loi(s) et arrêté(s)). Ce document permet, entre autres, aux gestionnaires d’unité de connaître les droits et les devoirs du candidat qui se trouve dans sa période de stage et/ou d’évaluation et de l’en informer. Comme vous pouvez le supposer, chaque nouvelle publication de la Défense fait l’objet d’une lecture approfondie au sein du syndicat militaire ACMP-CGPM. Si nous voulons aider efficacement nos membres, il va de soi que nous devons être bien informés de la moindre virgule qui émane de la Défense ou qui la concerne.

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Petite parenthèse pour préciser qu’un syndicat représentatif, comme le nôtre, est autour de la table des négociations avec l’autorité militaire et ministérielle lorsque des textes légaux ou réglementaires sont sujets à application ou à modification. Dans le cas présent, il s’agit d’une SPS qui n’a rien d’une loi ou d’un règlement. Ce n’est bien entendu par pour autant que ce type de publication, non négociée et sans présentation préalable aux syndicats, doit contraindre ses lecteurs à agir de manière illégale. Deux anomalies importantes de la version 2018 de cette SPS ont attiré rapidement notre regard critique. Mais pour rendre à César ce qui lui appartient, nous avions déjà reçu une alerte d’un gestionnaire d’unité qui était désemparé de devoir déjà appliquer les inepties de ce texte pour l’un de ses candidats (il se reconnaitra sans doute, nous le remercions). Il fallait alors réagir vite pour éviter plus de dérives dans la gestion des candidats en unité. Malgré une intervention huit jours à peine après la publication et de

nombreuses autres par la suite, il a fallu beaucoup trop de temps pour que les instances compétentes de la DG HR réagissent. Ces fautes, intentionnelles ou pas, et la lenteur de réaction ont été la source de nombreux problèmes dans les unités. Les conflits majeurs prenaient naissance lorsque le candidat recevait de notre part la version légale de ses droits, tandis que les gestionnaires locaux n’avaient pas trop le choix que d’appliquer les dispositions erronées de cette SPS émanant de leur autorité supérieure en termes de gestion du personnel. L’une des anomalies concernait le droit des candidats en période de stage/évaluation de bénéficier du régime des congés et des dispenses de la catégorie de personnel dans laquelle ils sont candidats. 

Photo : Pixabay


 En effet, ce droit est clairement notifié dans la loi (A16-G1). La SPS, qui pourtant reconnaissait ce droit, le limitait drastiquement dans la pratique. Elle renseignait qu’un candidat qui était absent plus de sept jours, consécutifs ou non pour des raisons de congé ou de santé, devait introduire une demande d’ajournement. Il est bien évident que cette limitation du nombre de jour de congé était hors la loi tout comme l’obligation de solliciter un ajournement. Cette notion d’ajournement était le second point critique de la SPS version 2018. La loi n’oblige jamais un candidat à solliciter un ajournement. Dans certains cas, l’ajournement est indispensable voire fortement recommandé. Mais il est important que chaque candidat soit bien informé des conséquences de cette procédure. Si demander un ajournement reste un droit lorsque le candidat est dans les conditions de la loi (Art 102 du G1), le recevoir reste une prérogative de l’autorité militaire et dans la plupart des cas, c’est la DG HR qui aura la décision finale entre ses mains. En cas de refus, le candidat aura seulement trois jours ouvrables pour établir un recours par écrit (mémoire) auprès du directeur HR. Si ce dernier reste sur sa position, le candidat perdra sa qualité de militaire de plein droit.

Photo : Vincent Bordignon

En d’autres termes, le candidat, qui à cause de l’application de cette SPS illégale, avait dû demander un ajournement en raison d’une semaine de congé et d’une grippe le clouant au lit pendant quelques jours, pouvait être rendu à la vie civile avec comme seul remerciement, un document que tout un chacun redoute, le fameux C4… Mais cette SPS version 2018 ne s’arrêtait pas en si bon chemin dans les anomalies. Ce qui suit à même fait l’objet d’une plainte pénale d’un candidat envers la hiérarchie militaire pour faux en écriture et usage de faux…C’est dire les dégâts que peuvent causer des textes qui ne respectent pas la loi. En effet, après l’obligation illégale qu’avait un candidat à solliciter un ajournement, la SPS ouvrait le droit

au Chef de Corps de solliciter luimême un ajournement pour le candidat. Vous comprendrez vite, avec la conséquence du refus d’ajournement évoqué avant, les dérives possibles d’un tel droit offert au Chef de Corps. Heureusement, tout ce qui précède fait désormais partie du passé car, le 3 août 2021, soit 1.252 jours après notre première intervention, la nouvelle version de la DGHRSPS-FMNBAS-003 a vu le jour. Si « action - réaction » est un adage du militaire, il faut constater qu’il a été oublié à certains étages de la hiérarchie militaire. Quoiqu’il en soit, les candidats en période de stage et d’évaluation peuvent désormais dormir tranquilles, nous veillons et veillerons toujours au grain. 

La patience est une vertu Fort heureusement, nos délégués n’en manquent pas, tout comme de la persévérance. Il est parfois curieux de voir la difficulté avec laquelle des autorités de la Défense ont du mal à admettre puis à rectifier une erreur, même si elle peut entraîner des conséquences désastreuses sur les individus. En plus du présent article et de notre Sentinelle n°3 de mai-juin 2020 qui traitait déjà de la candidature militaire, nous invitons tous les candidats et leurs gestionnaires à lire attentivement cette nouvelle SPS et à nous contacter pour toute question. Car il est bien connu que, même si le texte est limpide, l’application de ce dernier ne coule malheureusement pas toujours de source.

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Info

Pas de croquemitaines à la Police Militaire Les MP sont des militaires pas comme les autres. Derrière leur image de croquemitaines sévères et toujours prêts à vous coller un rapport se cachent des collègues avant tout au service des unités qu’ils appuient, comme en atteste leur devise : « Helpful and Resolute »… Pour en savoir plus, nous nous sommes rendus au MP Group, à Peutie. Nous avons à peine franchi la porte qu’on nous interpelle : « Ah, mon syndicat nous rend visite, bienvenue chez les MP ! » Une évidence s’impose : nous sommes bel et bien dans un ‘nid’ de membres de la CGPM. Impossible de faire un mètre sans serrer une main ou répondre à une question sur les chèques-repas ou l’augmentation des salaires. Heureusement que nous sommes en avance pour notre rendez-vous avec le major Koen Abts, Chef de Corps. Celui-ci nous reçoit dans une salle décorée de souvenirs du riche passé de la Police Militaire, mais aussi de cartes de théâtres d’opérations. « Chaque militaire qui a participé à une grande opération le sait : les MP accompagnent les troupes sur le terrain pour veiller à l’ordre et à la discipline mais aussi pour appuyer directement l’unité déployée. Nous participons également à nos propres missions, par exemple pour la formation des policiers militaires au Niger ou en Tunisie. Ce détachement est généralement engagé pour 4 à 5 semaines, deux fois par an. Ce sont des missions valorisantes qui sont très populaires parmi notre personnel et fort appréciées par les pays hôtes. » Outre les missions internationales, les tâches des MP concernent la sécurité militaire, la fonction de police, l’escorte lors de déplacements mais aussi le ‘WIT’. Comme cet acronyme nous échappe, le major Abts explique : « Notre ‘Weapon Intelligence Team’ est chargé d’examiner les bombes placées aux bords des routes afin de récolter des indices et des renseignements. Cette tâche effectuée en collaboration avec le SEDEE

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(ndlr : Service d’Enlèvement et de Destruction des Engins Explosifs) est très peu connue. Pour le citoyen belge, l’image des MP se limite souvent aux collègues en poste à la rue de la Loi ou au Parlement. Il s’agit cependant là d’un détachement distinct qui n’appartient pas au MP Group. Notre tâche la plus visible est probablement l’escorte à moto. On nous voit d’ailleurs faire la ‘flèche’ lors du défilé du 21 juillet. L’escorte de véhicules est un travail difficile et dangereux qui demande une formation longue et complexe en collaboration avec la Police fédérale. Je plaide d’ailleurs depuis longtemps pour l’octroi d’une prime spécifique pour ces missions risquées. Saviez-vous que la majorité du personnel du groupe MP est breveté moto, du caporal au major ? » Le MP Group compte actuellement 151 militaires. Ceux-ci sont répartis sur tout le territoire national. Outre l’état-major à Peutie, le gros des troupes se trouve à Marche-en-Famenne et à Bourg-Léopold, pour appuyer les grandes unités. Pour accomplir leurs missions, les MP déploient 63 motos BMW (identiques à celles de la Police fédérale) et 26 véhicules d’intervention commerciaux. Enfin, cinq blindés légers de type ‘Lynx’ servent aux missions d’appui au combat, car si 

Photo : Daniel Orban


Photo : MP Group

 le MP Group est présent lors des opérations internationales, en temps de guerre il a aussi la charge des réfugiés, des déserteurs et des prisonniers de guerre. À ce sujet, le major Abts souligne que ces cinq véhicules sont largement insuffisants : « Nous demandons le renforcement de cette capacité vitale par l’attribution d’une flotte déployable de 25 blindés légers. Ce renfort sera nécessaire, d’autant que le MP Group est appelé à grandir : notre futur ‘TO’ en cours de validation devrait compter un effectif de 216 MP, avec quelques nouveautés, comme les équipes ‘K9’. Vu le besoin essentiel en chiens policiers militaires, nous n’avons pas attendu pour développer cette capacité. Un embryon existe déjà, avec des résultats et une efficacité qui dépassent nos espérances. » Le MP Group est clairement une unité d’élite pas comme les autres, non seulement par ses missions mais aussi par son personnel : « Il n’y a pas de BDL au groupe MP car tous nos policiers sont issus du recrutement interne dans les autres unités. Pour devenir MP il faut donc un solide bagage militaire. Notre unité ne compte actuellement que trois femmes. Le travail ne leur est certainement pas incompatible mais je constate que trop peu de femmes postulent pour une fonction

Photo : MP Group

au sein du groupe. Peut-être aussi parce qu’elles ne connaissent pas nos missions ? Quoi qu’il en soit nous n’avons aucun mal à recruter puisque chaque année de nombreux candidats se présentent pour les places ouvertes. Nous sélectionnons soigneusement nos futurs collègues car ils doivent non seulement posséder les qualités morales requises mais aussi pouvoir réussir la difficile formation interne. Celle-ci commence par une période de quatre semaines en commun avec les futurs MP du Palais de la Nation, après quoi les candidats suivent cinq mois de formation intensive. Notez que nous sommes une unité ‘joint’, qui compte des grades de toutes les Composantes. Une fois formés,

Photo : MP Group

les MP sont fidèles à leur métier puisque l’attrition est très faible au sein du groupe.» Après cette visite, il est clair que l’image du croquemitaine a du plomb dans l’aile. Nos collègues MP sont avant tout des professionnels qui mettent leurs compétences au service des unités qu’ils appuient. Et s’ils ont aussi un rôle répressif, c’est plutôt dans un cadre préventif et proactif. Régulièrement, ils contrôlent les véhicules militaires pour voir si le chargement est correctement arrimé, pour la prévention de l’alcoolémie au volant, etc. Pas tant pour punir les chauffeurs mais bien pour les sensibiliser, éviter des accidents et aussi de gros soucis financiers. Il ne faut pas oublier qu’en cas d’amende par la police civile, par exemple parce que le véhicule n’est pas en ordre, c’est le chauffeur qui est responsable, pas la Défense ! Par ailleurs, nous avons pu constater que la diversité des tâches et missions au sein du MP Group rend le travail des policiers militaires très attractif. Cette année, 22 places (12 par promotion sociale et 10 par recrutement interne) étaient à pourvoir. Avec un peu de chance, il y en aura autant en 2022. Intéressé ? Gardez bien les appels HR à l’œil ! 

La Sentinelle 15


Opinion

C'est en plantant un couteau dans le dos des gens que je les remercie pour les services rendus (Jack l'Éventreur) « Je le fais à tout le monde. Homme et femme, jeune et vieux, officier et sous-officier, kaki et bleu, para et pilote, hétéro et LGBTQ ». Le responsable qui examine et évalue les propositions d'attribution de la Médaille du Mérite au sein de la DG HR explique à ses collègues des Ressources Humaines comment il travaille lorsqu’il reçoit une demande pour l'attribution de cette décoration. Il considère comme "tout à fait normal" et "approprié" de poignarder sans hésiter des militaires exemplaires qui ont servi de manière exceptionnelle pendant toute leur carrière.

"De nombreuses femmes à Londres se sont plaintes de mon habitude de les poignarder, ou l'auraient fait si elles étaient encore en vie. Mais j'ai aussi réalisé une série de croquis me montrant en train de poignarder des gens dans le dos dans d'autres circonstances, juste pour montrer à quel point je suis complètement innocent dans tout ça. Dans le sens où j'ai toujours poignardé les gens. Je suis une personne qui aime planter la lame. C'est ma nature, ce n'est pas personnel. Pour moi, poignarder les gens dans le dos est un signe de respect. C’est un comportement que j'ai appris de mes parents. Ils accueillaient souvent les gens en les poignardant avec un ou des couteaux qu'ils avaient cachés sur eux. Juste un petit coup de couteau poli dans le dos,

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comme si on testait l'épaisseur de la peau d'un porc. Pour moi, il s'agit autant d'une question de famille, de tradition, que d'autre chose, et c'est une pratique qui ne tolère aucun compromis. Je n'ai pas honte de ce que je suis : un poignardeur dans le dos descendant d'une longue lignée de poignardeurs dans le dos. Regardez, voici quelques photos de moi en train de planter une lame acérée entre les omoplates de collègues, juste pour souligner que je suis convaincu du bien-fondé de cette pratique. C'est ce qu'on essaie de démontrer ici : si je pense que mon comportement est approprié. Nous ne parlons pas de ce que les autres pensent de moi, ni de l'effet que j'ai sur les collègues, n’est-ce pas ? Eh bien, je pense que mon comportement est ho-

norable, et il m'arrive souvent de poignarder quelqu'un dans le dos, comme vous pouvez le voir sur toutes les photos de collègues que je connais pourtant à peine. J'espère que cela répond à vos questions. Quand je poignarde, je suis impartial. Je ne distingue pas de grade. Je ne vois aucune couleur d'uniforme. Le type d'unité dans laquelle le collègue sert m’est égal. En fait, je poignarde souvent dans le noir et je ne vois donc rien. Je me contente d'agiter mon couteau et de terroriser mes collègues de l'armée belge. Tout d'abord, nous devrions arrêter de dire que mon approche est mauvaise. Ce n'est pas le cas - c'est une affaire de traditions, comme je l'ai déjà dit. En outre, j'économise de l'argent à la Défense : il n'est pas nécessaire d'acheter 


 des médailles et d'organiser des défilés et des réceptions. Puis-je simplement dire que je ne comprends pas d'où vient toute cette hostilité envers moi ? Brutus, généralement considéré comme un héros, aimait poignarder les gens. César a été poignardé par tous ses amis. Il savait pourtant qu’ils le respectaient. C’est vrai, je ne me sens pas bien dans ma peau et je ne tire aucune satisfaction de mon travail à moins d'avoir poignardé dans le dos au moins deux ou trois militaires. J'ai vu les plaintes : "En poignardant et en trahissant des collègues comme ça, vous vous sentez peut-être mieux, Jack, mais les autres ne se sentent pas bien. Ils ont beaucoup investi dans leur travail et travaillé dur pour la Défense et puis vous leur plantez un couteau dans le dos". À cela je réponds que je suis vraiment désolé pour ces gens. Non pas parce qu'ils sont poignardés, blessés mentalement et déçus par leur employeur, mais parce qu'ils ont un petit esprit. J'aime à penser que si quelqu'un me poignardait, je le verrais comme un signe de respect. Parce que c'est ce que c'est. Mais que dis-je ? Personne n’oserait s’en prendre à moi ! Prenons le cas spécifique de cet adjudant qui a travaillé pendant des années pour l'équipe de gestion du projet du nouveau quartier général de l'OTAN (PMT HQ OTAN). Je sais qu'il a rendu des services d'une nature exceptionnelle. Je sais que pendant plus de 13 ans, cette personne a travaillé de très longues heures chaque

Photo : Pixabay

jour et de nombreux week-ends pour contribuer à la réalisation en temps voulu du nouveau siège de l’organisation. Je sais que pendant une période interminable, il a eu deux emplois à temps plein, car en tant que fonctionnaire dirigeant pour la gestion des contrats à Evere, il a également continué à travailler pour le QG PMT de l'OTAN. Je sais que l'adjudant concerné a continué à travailler même après un accident et malgré de graves blessures. J'ai également eu l'occasion d'examiner les demandes détaillées de deux de ses Chefs de Corps, qui l'ont tous deux proposé pour la Médaille du Mérite. J'ai pu y lire que cet adjudant a été extrêmement méritant pour la Défense, que la qualité de son travail a toujours été exceptionnelle et que sa conduite et sa manière de servir ont été exemplaires. J'ai pu constater que l’intéressé a toujours montré l'exemple et qu'il est maintenant tout près de la retraite. Alors pourquoi ai-je rejeté la double motivation positive de ses Chefs de Corps ? Parce que je suis Jack l'Éventreur, parce que je

poignarde les gens dans le dos ! C'est ma nature, ce n'est pas personnel. Et maintenant, vous voulez probablement savoir comment l'officier chef de projet de HRM@ Defence aurait pu recevoir la Médaille du Mérite, comme le prétendent les mauvaises langues ? Parce que, comme vous le savez, ce projet est un désastre complet et presque tous les membres du personnel font l'expérience quotidienne de la misère de HRM@ Defence. Et pourtant, la rumeur veut que cet individu reçoive cette médaille pour son excellent travail et ses contributions au fonctionnement "parfait" de HRM ! Si cette rumeur s’avère fondée, je peux comprendre que la logique de tout cela vous échappe. Il y a pourtant une explication très simple. Non seulement j'aime poignarder les gens dans le dos, mais j'aime aussi replanter le couteau bien profond dans la même blessure et le tourner lentement dans la plaie. De cette façon je peux faire enrager toute la communauté militaire. Mission accomplie ! C'est ma nature, ce n'est pas personnel." 

La Sentinelle 17


Opinion

Pari tenu ? Chaque candidat militaire reçoit juste après son incorporation un court briefing sur le syndicalisme à la Défense. Celui-ci permet aux syndicats de se présenter brièvement. Contre toute attente, il semble qu’en 2021 la CGPM aura rencontré près de 3.000 jeunes. Depuis le début de cette année, nos délégués permanents se sont déjà rendus à une quarantaine de présentations. En comptant les briefings à venir, la Défense aura organisé plus de cinquante cours en 2021, pour à chaque fois entre 25 et 150 candidats. Ces sessions sont importantes pour l’ACMP-CGPM car elles nous permettent de présenter notre organisation et nos délégués locaux à ces futurs collègues. En une dizaine de minutes, nous essayons de dresser un portrait fidèle du syndicat militaire, avec ses spécificités et ses atouts. Suite à ce briefing, de nombreux candidats choisissent de s’affilier à la CGPM. De cette façon, ils débutent leur carrière avec la garantie d’une aide solide dès le début de leur formation. 3.000 candidats en 2021 ? Il nous semblait évident que la crise COVID, le manque d’instructeurs, de moyens académiques et de logements limiteraient fortement le nombre potentiel de nouveaux militaires. Sans parler du tarissement du vivier dans lequel la Défense puise pour alimenter le recrutement. Quand la ministre de la Défense Ludivine Dedonder a annoncé fin 2020 son ambition de recruter 10.000 nouveaux militaires en un peu moins de quatre ans, nous avons d’ailleurs exprimé notre

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Photo : C. Bandinelli

scepticisme. Aujourd’hui, force est de constater qu’elle est en voie de gagner son pari. C’est un vrai tour de force qu’ont accompli les organismes de recrutement et de formation puisque si on compte l’ensemble des candidats qui devaient être présents aux cours syndicaux, nous arrivons à 2.915 jeunes. Bien sûr, nous constatons souvent que quand 40 candidats sont prévus, seulement 35 sont effectivement présents au briefing. Mais l’année n’est pas finie et de nouveaux cours vont encore s’ajouter. Au moment d’écrire cet article, l’ERM par exemple n’a pas encore fourni son planning. Il est donc possible que le cap incroyable des 3.000 candidats soit atteint en 2021 ! Est-ce à dire que le pari de la MOD est gagné ? Oui en ce qui concerne les statistiques d’incorporations mais il est encore trop

tôt pour savoir si ce bon résultat se traduira en une augmentation durable des effectifs. En effet, le nombre d’abandons et d’échecs reste très élevé. Car si on a pu accueillir plus de nouveaux, cela s’est fait au prix d’une dégradation supplémentaire de leurs circonstances de vie et de formation : logements et sanitaires insuffisants, salles de cours étriquées, matériel obsolète, pénurie d’équipements individuels, manque de personnel d’encadrement, … L’abaissement des critères de sélection signifie aussi que de nombreux candidats ont un niveau académique et moral médiocre, ce qui les conduit à l’échec malgré tous les efforts de leurs instructeurs. Même si la tendance est encourageante, les progrès dans ces domaines sont donc à ce jour encore insuffisants pour garantir la qualité en plus de la quantité. 


NAISSANCES

ANNA-SOPHIE – 06/11/2020 Dans la famille de Jonathan SKOCZEK (Bruxelles) SAMAËL – 18/05/2021 Dans la famille de Kevin LOUAGE (Jette) LÉANDRE – 19/05/2021 Dans la famille de Tanguy COLIN (Hornu)

MARIAGES

09/02/2021 LATESTE Timothy et GYKIERE Bo Nadia (Ostende) (Par cohabitation légale)

DEMESSEMAEKERS FRANÇOIS (Louvain) 1936 - 11/06/2021

17/03/2021 PÉHARPRÉ Christelle et DETILLEUL Antonio (Villers-le-Bouillet) (Par cohabitation légale)

DE SWAEF LEO (Alost) 1929 - 13/07/2021

HANNAH – 27/05/2021 Dans la famille de Robin BORREMANS (Bruxelles)

22/03/2021 VERBEKE Maurits et ELLIOTT Enya-Hannah (Bruges) (Par cohabitation légale)

JINTHE – 27/05/2021 Dans la famille de Kevin BALUWÉ (Lier)

17/04/2021 SAMYN Jerry et CROMBOIS Catherine (Beauvechain)

DRÉ – 28/05/2021 Dans la famille de Rinnie PLOUVIER (Ypres)

30/04/2021 PROVOST Pascal et VAN DEN DRIES Marina (Steenokkerzeel)

ROMÉO – 05/06/2021 Dans la famille d’Adrien MATHIEU (Malmedy)

06/05/2021 MONICO Eric et JACOBS Julie (Bassenge)

HECTOR – 13/06/2021 Dans la famille de Margot SMETZ (Namur)

15/05/2021 MOLLET Sam et DE ROOIJ Sara (Anvers)

CASPER – 03/07/2021 Dans la famille de Marco VAN HOUTVEN (Bonheiden)

25/05/2021 LAHOU Rogatien et THIRY Jennifer (Jemeppe-sur-Sambre) (Par cohabitation légale)

ELISE – 07/07/2021 Dans la famille de Frédéric FLORENCE (Liège) EZRA – 12/07/2021 Dans la famille de David WALUGA (Charleroi) CHARLY – 26/07/2021 Dans la famille de François MENNUNI (Liège)

NECROLOGIE

02/06/2021 MEUNIER Matthieu et SCHMITT Mathilde (Marche-en-Famenne) (Par cohabitation légale) 15/06/2021 PAUWELS Ilja et BAERT Hanne (Tirlemont) (Par cohabitation légale)

SCHRYERS PIERRE (Renaix) 1929 - 14/07/2021

Indice des prix à la consommation - Juillet : 112,25 points - Août : 112,83 points - Septembre : 112,55 points

Indice santé - Juillet : 112,18 points - Août : 112,74 points - Septembre : 112,29 points L’indice santé s’est replié en septembre de 0,45 point et s’élève à 112,29 points, contre 112,74 points en août. L’indice santé lissé s'établissait, quant à lui, à 109,89 points en septembre. Le dernier dépassement de l'indice-pivot remonte à août 2021. Le prochain indice pivot pour la Fonction publique et les allocations sociales est fixé à 111,53 points.

Source : Statbel

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