6 minute read

Le retail à l'épreuve de la concentration

« De plus en plus de constructeurs ne veulent plus être importateurs »

Les Néerlandais sont très actifs dans le paysage de la distribution autombile. Le rachat de Fidenco et d'Autopolis (au Luxembourg) par le groupe Van Mossel en est un exemple. Nos voisins du nord semblent être à l’affût de toute bonne affaire. Nous avons eu une conversation avec Clem Dickmann, expert automobile chez Aumacon sur les changements d'échelle des distributeurs en Belgique.

Philip De Paepe – philip.depaepe@effectivemedia.be

Il est financièrement plus facile de répartir l’investissement exigé par l’importateur sur plus de 1.000 voitures vendues par an que sur 300.

Aumacon est un centre de connaissances indépendant pour le secteur de la mobilité. Leur spécialisation se concentre sur la prestation de services, l'organisation et la recherche sectorielle. Depuis l'année dernière, ils examinent également de près le marché du Belux, qui comprend un top cinquante des plus grands groupes de concessionnaires. Si vous voulez vous le procurez, sachez que ce rapport n'est pas gratuit. Mais nous avons quand même pu poser quelques questions qui donnent un aperçu des tendances récentes.

En août dernier, FLEET.be publiait les dix plus grands groupes de concessionnaires en Belgique en 2019. Mais entre-temps, celui-ci est déjà dépassé...

Clem Dickmann : Il est vrai que le Van Mossel Groep se hisse désormais à la deuxième place en Belgique grâce aux acquisitions précitées. Quelques autres acquisitions lui permettraient de se rapprocher de D'Ieteren. Les dix premiers concessionnaires belges en termes de volume de ventes de voitures et de véhicules utilitaires légers représentaient environ 16,7% du nombre total de véhicules vendus en 2019. En 2018, il représentait 15,5%. Si l'on étend ce chiffre aux 50 premiers, le taux de pénétration est de 36,3% en 2019 (contre 34,4% un an plus tôt). Toutefois, on est encore loin des 70% du top 50 néerlandais.

Quels sont les paramètres les plus importants pour ce classement ?

CD : Il s'agit avant tout du volume des ventes de voitures particulières et de véhicules utilitaires légers neufs jusqu'à 3,5 tonnes. Les autres paramètres sont le chiffre d'affaires, le bénéfice net, la rentabilité. Dans notre rapport, nous montrons tous les sites et les marques qu'ils représentent. Aux Pays-Bas, nous indiquons même si les locaux commerciaux sont détenus ou loués, qui est le directeur de la succursale, etc. En Belgique, nous voulons également fournir autant d'informations à l'avenir.

EN BREF :

• Van Mossel bondit à la deuxième place du top 10 des groupes de concessionnaires • L'importance des investissements, la réduction des marges sur les VE et l'absence de succession sont les principales raisons des acquisitions • La vente en ligne ne fera pas disparaître les concessionnaires

Aux Pays-Bas, cette augmentation d'échelle a démarré bien plus tôt. Pourquoi ?

CD : Cela est dû à un certain nombre de facteurs. Les ventes de voitures neuves aux Pays-Bas ont toujours été beaucoup plus faibles qu'en Belgique. Les prix étant plus élevés aux Pays-Bas, les clients choisissent un véhicule d'une valeur moyenne inférieure ou une voiture d'occasion. Cela se remarque également sur le marché des voitures d'occasion, qui est mieux développé aux Pays-Bas. Ces facteurs combinés font que les marges sur les ventes de véhicules neufs sont plus faibles chez les concessionnaires automobiles néerlandais. Il n'est donc possible de rester rentable qu'à grande échelle.

Cependant, nous constatons maintenant - avec un certain retard - la même tendance en Belgique. Pourquoi y a-t-il eu tant de rachats ces dernières années ?

CD : Le fait que cela prenne un peu plus de temps est lié à la fragmentation du paysage. Il y a toujours eu une tradition du "dealer au coin de la rue". Des entreprises accessibles, souvent familiales. Mais il leur est de plus en plus diffi cile de rivaliser avec les plus grandes concessions. Les ventes de voitures neuves seront également sous pression en Belgique, que ce soit à cause du coronavirus ou pas. L'électrifi cation aura également un impact. Les marges sur les ventes de voitures électriques sont faibles. Elles le sont encore plus sur l'entretien. En outre, les importateurs ont des exigences de plus en plus élevées en termes d'investissement pour pouvoir représenter leur marque. Il est fi nancièrement plus facile de répartir cet investissement sur plus de 1.000 voitures vendues par an que sur 300. Dans de nombreuses entreprises familiales, il n'y a pas non plus de succession. Ce sont toutes ces choses qui font que de plus en plus de concessionnaires sont aujourd'hui ouverts à une reprise de leur activité. Si de grands groupes ont les ressources nécessaires pour eff ectuer ces rachats, tout peut aller très vite.

Certains importateurs sont des fi liales du constructeur. Cela va-t-il changer ?

CD : Dans le passé, les constructeurs automobiles voulaient tous prendre le contrôle de la vente au détail. C'est ce qui explique la mainmise de certains sur leurs importateurs. Mais vous voyez que de plus en plus de fabricants se retirent du rôle d'importateur. Ils doivent se concentrer sur leur rôle de constructeur automobile. Les émissions de CO2 doivent être réduites, l'électrifi cation des gammes bat son plein. En plus, les sociétés de distribution détenues par les constructeurs ne sont pas les plus rentables. Elles ne l'ont jamais été. On voit donc une tendance claire à se défaire de cette activité, souvent parce qu'elle est simplement défi citaire.

En Belgique, les 50 premiers concessionnaires belges représentent 36,3% du volume de ventes. Aux Pays-Bas, ils « pèsent » 70% !

La vente de voitures en ligne est une tendance relativement nouvelle, avec Tesla et Polestar. La vente classique de voitures en concessions est-elle menacée ?

CD : Vous citez maintenant deux marques qui peuvent off rir à leurs clients d'importants avantages fi scaux. Ce type de client a donc tendance à colorier en dehors des lignes et à prendre une voiture dans une tente exposée au vent dans le port. Cela va-t-il continuer ? Je ne pense pas. Plus les voitures électriques seront répandues, plus l'avantage fi scal sera faible. Les ventes numériques vont faire disparaître une partie des ventes classiques de voitures. Mais il ne faut pas oublier que le concessionnaire reste très important pour le contact avec le client : essai, entretien, garantie, réparations, etc. L'évolution numérique amène de plus en plus de groupes à réduire le nombre de concessionnaires et à évoluer vers des succursales plus importantes. Les voitures modernes doivent encore être entretenues une fois par an. Pour le client, cela ne fait pas une grande diff érence qu'il doive parcourir 22 ou 33 km.

Pas de Salon de l'Auto cette année à Bruxelles. S'agira-t-il d'un « Salon en concession » ?

CD : En fait, Bruxelles est déjà unique en Europe parce que c'est un salon commercial, avec des prospects redirigés vers le réseau. Les concessionnaires ont donc tout intérêt à profi ter de cette dynamique car la période des salons a toujours été une incitation importante à l'achat dans le passé. La sagesse voudrait que ce Salon soit déplacé vers le réseau, où les mêmes rabais seront accordés que lors d'un Salon normal. Il est également possible que - si les chiff res de vente ne sont pas trop mauvais - l'avenir du Salon de Bruxelles soit hypothéqué. En ce qui concerne la communication marketing, elle n'est en fait plus d'actualité. Les consommateurs sont de moins en moins intéressés par l'aspect 'exposition', mais ils restent intéressés par ce bénéfi ce fi nancier.

TOP 10 DES PLUS GRANDS GROUPES DE CONCESSIONNAIRES EN 2019 (*)

RANKING 2019 2019 2018

1 D’Ieteren – Sopadis 2 A&M Invest

26.760 25.680 12250 9.990 3 Fidenco 10.195 10.136 4 Van Mossel Automotive Groep 10.099 6.650 5 Mercedes-Benz Retail 8.730 8.120 6 Autosphere 8.510 8.170 7 Groupe Schyns 8.220 8.120 8 Hedin Automotive 8.190 7.520 9 Groupe Maurin 6.810 7.350 10 PSA Retail 5.770 5.500

(*) Un nouveau classement ne sera établi que l'année prochaine. Mais lorsque vous fusionnez Fidenco et Van Mossel Groep, ils sont déjà les deuxièmes plus grands en Belgique cette année.

This article is from: