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Mai - Juin 2013 I N°9
PRATIQUES
Prévention d’escarres Ce qui EST EFFICACE, ce qui ne L’EST pas…
SE FORMER
Gestes et soins d’urgences :
Les soignants encore trop peu formés. A LA UNE
Conditions de travail, salaires…
2013, année de la mobilisation infirmière ?
PRATIQUES
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- AES : Travailler protégé…
12 VOS DROITS PORTRAIT
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- Serious Games : Jouer pour se former - AFGSU : Une formation indispensable
- La contestation infirmière 2013 sera-t-elle l’année de la révolte infirmière ?
-- Reconnaissance IDE France- Québec Encore du travail… - Les infirmières bretonnes à l’abordage
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SOIGNANTS D’AILLEURS - Infirmière en Tanzanie : Soigner les plus démunis
INITIATIVES
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- Z’entonnoirs : les patients sur les ondes - Étudiants infirmiers et pompiers main dans la main
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AGENDA 44
EDITO
LE TRISTE PARADOXE
Pour n’importe quel observateur attentif de la profession infirmière, la grogne est profonde. Elle s’exprime de plus en plus ces dernières années, et tente de s’organiser et de clarifier ses positions, avec plus ou moins de bonheur. Le rapport de force reste toutefois quasi inexistant. Dès lors qu’elle n’est pas portée par un mouvement structuré et qu’elle n’influe guère sur la continuité des soins, cette contestation est inaudible et n’inquiète personne, surtout pas le ministère de la santé. Il est troublant de retrouver peu ou prou les mêmes éléments de contexte que les mouvements infirmiers de la fin des années 80. A ceci près qu’aucune maladresse majeure de la part du gouvernement ne provoque la mobilisation globale tant attendue. En 1987, le projet de décret visant à remettre en cause l’obtention du baccalauréat comme condition d’entrée en IFSI avait été la provocation de trop. En 2013, les gouvernements successifs clament haut et fort leur amour pour la profession « préférée des français ». Comme le rappelle, un brin amère, la présidente de la coordination nationale infirmière dans nos colonnes, « C’est comme une grenouille que l’on plonge dans l’eau bouillante. Elle saute immédiatement hors de la marmite. Mais si on la cuit à petit feu…» n
Éditeur : ActuSoins SARL - 57 Rue de L’Ouest - 75014 Paris • Rédacteur en chef : Thomas Duvernoy (tduvernoy@actusoins.com) - R.C.S. PARIS 520180688 • Ont collaboré à ce numéro : Olivia Dujardin, Ariane Puccini, Directeur de la publication Kamel Boudjedra Laure Martin, Malika Surbled, Claire Dubois, Caroline Guignot, • Numéro de commission paritaire : 0613 W 90939 ISSN 2256- Amélie Cano, Laurent Klein, Nicolas Beaumont 6260 • Dépôt légal : à parution • Photo de couverture : © Juliette ROBERT • Illustrations : Nawak
ActuSoinS 3 Numéro 9 Mai - Juin 2013
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CONTESTATION
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VIE PROFESSIONNELLE
- Harold, du libéral au Show-Biz
SE FORMER
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A LA UNE
- Prévenir les escarres : Le rôle essentiel du dépistage
Thomas Duvernoy – Rédacteur en chef ActuSoins
• Grapisme : www.lacommunautedesgaphistes.com • Impression : Rotocayfo - Sta. Perpetua de Mogoda 08130 Barcelona • Routage : ARS • Contact publicité : 01 77 37 30 20 - annonceurs@actusoins.com • Contact annonces d’emploi : 09 54 53 45 45 - emploi@actusoins.com • Tirage : 100 000 exemplaires
Actusoins Actusoins • à• la à la une une
Les
mouvements infirmiers en mal d’unité
Sommes-nous à la veille d’un mouvement de grande ampleur comme en septembre 1988 ? Le ras-le bol infirmier est bien réel mais le manque d’unité grippe la dynamique et la résignation ne favorise guère la mobilisation.
L
es manifestations, encore sporadiques, de nouveaux mouvements comme les Ni bonnes, ni nonnes, ni pigeonnes (NB3NP), montrent que les infirmières sont en colère. Un certain nombre d’ingrédients sont rassemblés dans la cocotte-minute : burn-out, services surchargés, manque de reconnaissance, retraites amputées des primes,… Pourtant, celle-ci n’explose pas. « L’union fait la force. Aujourd’hui, les soignants sont dispersés entre différents mouvements », avance Marie-Hélène
Durieux, secrétaire nationale de SUD-santé sociaux. Cette dernière regrette ces divisions : « nous essayons régulièrement de prendre contact avec les « ni bonnes », mais elles refusent tout lien avec les syndicats. Nous ne désespérons pas ! Une critique malvenue pour les NB3NP : « lors de notre journée du 12 mai, nous avons appelé à la mutualisation des ressources, des énergies,…Seule la Coordination nationale infirmière a répondu présent et a déposé un préavis de grève. C’est comme en 1988. Les syndicats
ActuSoinS 4 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins Actusoins • à• la à la une une
n’ont pas soutenu le mouvement. Ils l’ont même grillé », affirme Alexandra Saulneron, présidente de cette association qui revendique sa spécificité asyndicale. Cette dernière rappelle que seules 4 % des infirmières de la fonction publique hospitalière sont syndiquées et qu’« elles ne se reconnaissent pas dans les syndicats ». « Elles connaissent leurs obligations sur le bout des doigts mais pas leurs droits. Il y a un déficit d’information », souligne Nathalie Depoire, présidente de la Coordination nationale infirmière (CNI). Entre la CNI et les NB3NP, le soutien mutuel est donc de mise. Les deux structures réunies ont demandé un rendez-vous à la ministre de la Santé. Les divisions sont aussi à leur comble entre syndicats : la CFDT et la CNI n’appellent pas à la manifestation du 15 juin pour le droit à la santé, lancée par la CGT, qui n’a plus d’unitaire que le nom.
Des infirmières sous-pression mais résignées ? Lancé sur Facebook, le collectif des NB3NP dépasse désormais le cap du virtuel comme l’a montré le petit succès de la manifestation du 12 mai dernier qui a regroupé environ 150 personnes. Le collectif qui a fixé un autre rendezvous les 26 juin prochain se professionnalise désormais pour mieux mobiliser.
Manifestation des NB3NP à Paris le 12 mai 2013 - © Juliette Robert
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Actusoins • à la une
« Nous comptons rassembler sur le terrain et créer des délégations régionales fortes », affirme Alexandra Saulneron qui ajoute que « le plus difficile, c’est de se battre contre la résignation des soignants ». « En 1988, la mayonnaise a pris en assemblée générale, sur le terrain, et la mobilisation a suivi, remarque MarieHélène Durieux. Aujourd’hui, les nouveaux mouvements utilisent facebook et les réseaux sociaux. Cela a été un moteur pour le printemps arabe mais cette façon de faire ne fonctionne pas nécessairement sur un mouvement professionnel », remarque cette représentante de Sud-santé. D’autres divisions établissent des lignes de partage au sein même de la profession comme celle entre les libéraux et les salariés et même entre les infirmières passées en catégorie A et les autres. « Cela crée des disparités », estime Marie-Hélène Durieux. « C’est incohérent. La pénibilité est identique pour toutes. Et toutes devraient également bénéficier de cette reconnaissance de la catégorie A », affirme Nathalie Depoire qui souligne que le contexte économique freine la mobilisation. « Il y a aussi une pression maximum.
“le plus difficile, c’est de se battre contre la résignation des soignants ” Les infirmières ont le nez dans le guidon et pas de recul suffisant pour dire stop », ajoute-telle. « C’est comme une grenouille que l’on plonge dans l’eau bouillante. Elle saute immédiatement hors de la marmite. Mais si on la cuit à petit feu…», explique de manière imagée Nathalie Depoire. La cocotte-minute est donc loin d’exploser, ce qui donne un peu de répit à la ministre de la Santé mais « quoiqu’elle puisse dire, il y a actuellement de véritables problèmes », souligne Marie-Hélène Durieux. n Claire Dubois
Manifestation des NB3NP à Paris le 12 mai 2013 - © Juliette Robert
ActuSoinS 6 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • pratique
Prévention
d’escarre, le rôle essentiel du dépistage Le thème de l’escarre semble suranné pourtant la prévalence en France sur le nombre d’escarres, quel que soit le stade, est estimée à 300 000 pour l’ensemble de la population.
L
’escarre est une plaie chronique lourde de conséquences pour le patient et le système de santé qu’impacte sa prise en charge pluridisciplinaire.
Les recommandations françaises (Société P.E.R.S.E 2012) et internationales (E.P.U.A.P 2009) nous guident dans la pratique clinique quotidienne. La prévention débute par l’identification des sujets à risque de développer une escarre.
Les échelles de dépistage Il existe de nombreuses échelles de cotation reconnues et validées. Les plus utilisées sont les échelles de NORTON, BRADEN et WATERLOO... Le risque élevé mis en évidence par ces échelles ne signifie pas que l’escarre va se constituer mais que les mesures préventives doivent-être renforcées lors de la prise en charge initiale. Les échelles doivent être impérativement réévaluées pendant la prise en charge du patient. Elles doivent être maitrisées par les utilisateurs.
“On peut tout mettre sur une escarre, sauf le malade ! ”
Raymond Vilain
Evaluation nutritionnelle et hydratation La dénutrition est un facteur de risque de développer ou d’aggraver une escarre. L’H.A.S établit des critères simples où la perturbation d’un de ces critères suffit pour diagnostiquer la dénutrition : - Perte de poids de plus de 5% en 1 mois ou 10% en 6 mois. - I.M.C inférieur à 21kg/m2 - Mini Nutritional Assessment inférieur à 17 - Un seul test sanguin est validé par consensus : l’albumine. La dépense énergétique totale d’un patient porteur d’escarre est évaluée entre 25 et 30 Kcal/Kg/J. La correction de la dénutrition est au-dessus de ce seuil. L’apport de compléments nutritionnels oraux joue donc un rôle important dans la diminution de l’incidence des escarres. Dans le cadre du Programme National pour l’Alimentation, un outil pédagogique et pratique est mis à disposition pour les professionnels de terrain : MobiQual (http:// www.mobiqual.org).
Choix du support et positionnement Toute évaluation du risque d’escarre conduit au choix du support adapté. L’avis de la commission H.A.S de 2009 nous oriente vers un choix du support de prévention en fonction de l’échelle
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Actusoins • pratique
de Norton, du temps d’alitement et de l’état clinique du patient. 3 catégories de support sont ainsi définies selon ces critères.
Mobiliser pour prévenir ! La mobilisation est considérée comme la mesure la plus importante et la plus efficace, quel que soit le support de prévention utilisé. L’association P.E.R.S.E en a résumé récemment les grands principes : - Consensus sur le changement de position par 4 heures. - Décubitus latéral à 30° uniquement. - Position allongée : Relever de 30 degrés la tête et 30° les membres inférieurs (semi-fowler à 30°) - Eviter la position assise au lit. - Attention aux troubles posturaux sur les fauteuils (glissement, jambes pendantes...). Respecter la réglé des 90°. Pieds, jambe dos à 90°.
L’hygiène La toilette reste un moment privilégié pour le dépistage visuel des points d’appui et des rougeurs installées. Une rougeur qui ne blanchit pas sous la pression du doigt est le signe du stade 1 de l’escarre. Cette étape est réversible ! L’incontinence peut être gérée par la pose de sonde urinaire chez les patients à risque. Les changes doivent-être réalisés au moins 3 fois par 24 heures et chaque fois que nécessaire. En pratique, L’utilisation de crème «barrière» (PROTACT
CONVEEN®, ALOPLASTINE®...) ou de film protecteur (CAVILON®, Brava®...) apporte un bénéfice sur la protection cutanée face à l’acidité des selles ou de l’urine.
Quels gestes pour une prévention ? Il faut bannir les cisaillements, les frictions toniques et l’utilisation de produits asséchants comme l’eau de Cologne ou l’éosine. Les méthodes archaïques «d’activation de la circulation» par l’utilisation de glaçons ou de sèche-cheveux sont à proscrire. Les massages sont à proscrire dès l’apparition d’une rougeur. Les recommandations actuelles sont en faveur de l’hydratation de la peau par une méthode douce d’effleurage. Des crèmes d’hydratation simple ou des huiles de soins sont recommandées. Des produits modernes à base de corpitolinol (Sany-
Les escarres en chiffres :
Une escarre se constitue pour une pression supérieure à 35 mmHg. Patient assis sur une chaise : pression de 500 mmHg sur le sacrum. Patient allongé : pression de 70 mmHg sur le sacrum, 50 mmHg sur chaque talon. n
ActuSoinS 9 Numéro 9 Mai - Juin 2013
© B BRAUN
Actusoins • pratique
rène® de URGO) ou d’acide Linoléique (Linovera® de BBRAUN)...peuvent être utilisés en prévention ou au stade 1 de l’escarre. Dès l’apparition de la rougeur, il faut éviter les massages. Les pansements hydrocolloïdes transparents ou les films de polyuréthane peuvent-être utilisés pour protéger les points d’appui, la peau lésée. La prévention des escarres repose sur une prise en charge multidisciplinaire du patient, de son hospitalisation jusqu’à son retour à domicile. Il est important de formaliser, de modéliser et de systématiser le dépistage et la prévention. L’utilisation des recommandations d’experts et la transmission des actes entrepris sont la clef de voute d’une prise en charge optimale et suivie. n LAURENT KLEIN, D.U. PLAIES ET CICATRISATION CRÉATEUR DE L’APPLICATION iPANSEMENT®
ERRATUM
Dans notre article du numéro 8 d’ActuSoins consacrée au biofilm des plaies chroniques, nous avons souligné l’intérèt des produits actifs sur le biofilm, tels que le Prontosan®.
Bibliographie 1- Recommandations PERSE 2012 http://buff.ly/14mi8Xa 2 - Complications de l’immobilité et du décubitus. Prévention et prise en charge : escarre Doi : 10.1016/j.annder.2011.12.014 3 - Rôle de la prise en charge nutritionelle dans le traitement préventif et curatif des escarres. Agathe-SIMON,Yves Passadori ,Guerin Olivier L’escarre. N°49. MArs 2011 4 - Mobiliser pour prévenir les escarres Tom defloor, Thérése Van Durme, Micheline Gobert L’escarre. N°37.MArs 2008 5 - Recommandations HAS http://buff.ly/16QDksd
Contrairement à ce que nous écrivons, le Prontosan® n’a pas encore été évalué par la Haute Autorité de Santé, qui n’a donc pas encore eu à se prononcer sur l’amélioration du service rendu par ce traitement.
ActuSoinS 10 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • pratique
Accidents
d’exposition au sang : Travailler protégé… Selon une récente étude, le nombre d’accidents d’expositions au sang diminue de 25 %. Le port des gants progresse, la prévention augmente mais il reste près de 8 % des établissements qui ne sécurisent pas les principaux dispositifs médicaux.
L
es accidents d’exposition au sang (AES) ont « été réduits d’un peu moins d’un quart » en huit ans, entre 2004 et 2010, selon les chiffres du Réseau d’alerte, d’investigation et de surveillance des infections nosocomiales (RAISIN). L’étude recense ainsi en 2010 17 039 AES, dont huit sur dix « sont des accidents percutanés, essentiellement par piqûre », précisent les auteurs du rapport publié par l’Institut de veille sanitaire (InVS). « Dans la majorité des cas, la piqûre survient après le geste, au retrait de l’aiguille, lors de son recapuchonnage, avec un matériel traînant ou déposé transitoirement », ajoutent-t-ils.
“en 2010, 7,9 % des établissements ne sécurisaient aucun des quatre dispositifs médicaux ciblés ” Le nombre d’accidents correspond à un taux de 6,7 accidents pour 100 lits (contre 8,9 en 2004). Pour 100 infirmières, ce taux recule de 6,4 % en 2006 à 5,6 % en 2010. Mais il reste élevé chez les IBODE (14,7 %). Le nombre d’AES dites « évitables », c’est à dire lors de la manipulation d’une aiguille, d’instruments souillés ou de collecteurs, recule de 52,5 % à 43,3 %.
pas à portée de main en 2010. Certes les établissements ont accru significativement leurs achats de matériels de sécurité. Mais il reste quelques canards boiteux : en 2010, 7,9 % des établissements ne sécurisaient aucun des quatre dispositifs médicaux ciblés (cathéters veineux périphériques, seringues à gaz du sang, aiguilles pour chambres implantables, aiguilles à ailettes) mais ils étaient 18 % en 2006. Trente pour cent des établissements commandent les quatre dispositifs sécurisés contre 17 % en 2006. Les établissements privés sont les moins bons élèves en la matière. Bonne nouvelle, le nombre d’accidents baisse plus « par unités commandées » ce qui veut dire que plus de précautions sont prises, « rançon d’une meilleure formation et information des soignants », estiment les auteurs du rapport. Mais il baisse encore plus « en cas d’utilisation de matériel de sécurité, ce qui confirme – s’il en était besoin – l’intérêt de ces matériels ». Une évidence bonne à rappeler. n
Plus de précautions pour les soignants Le message est passé sur le port des gants qui augmente de 67,1 % en 2006 à 71,5 % en 2010. Un geste à adopter plus souvent « lors de la réalisation d’injections et lors de manipulations d’une perfusion ». Respectivement 49 % et 38 % des accidentés n’en portaient pas. Le point noir reste celui des collecteurs : 29 % des professionnels n’en avaient
ActuSoinS 12 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Claire Dubois
Actusoins • pratique
Les enfants, parents pauvres
de la pharmacie ? Malgré une réglementation européenne incitative, les médicaments pédiatriques sont encore trop peu nombreux. Les prescriptions hors AMM restent donc incontournables, malgré les risques que peuvent courir les enfants...et les soignants.
L
e corps médical prend-il des risques pour traiter les enfants ? Les prescriptions hors Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) représenteraient dans cette population un médicament sur trois prescrits en ville, deux tiers de ceux à l’hôpital et plus de 9 molécules sur 10 en soins intensifs pédiatriques ou en néonatologie. En cause : le manque cruel de spécialités spécifiquement étudiés, développés et commercialisés pour cette population. Les prescripteurs sont donc contraints d’utiliser des produits qui ne sont pas indiqués pour la classe d’âge ou l’indication qu’ils ciblent, ou encore selon des posologies ou une forme galénique non prévues par l’AMM. Des conditions d’utilisation qui n’ont donc pas fait l’objet d’essais cliniques.
L’enfant n’est pas un adulte miniature : son organisme est en voie de maturation, et toutes les fonctions d’absorption, de distribution ou de métabolisme sont différentes. Quand il s’agit d’adapter un traitement adulte à un enfant, la règle de trois ne s’applique pas... Les chiffres sont d’ailleurs là pour le prouver : Une étude française a montré que le risque pour un enfant de développer des effets indésirables médicamenteux est 3,4 fois plus élevé lorsque le médicament est prescrit dans des conditions hors AMM.
Question de rentabilité Si le bilan n’est pas bon, c’est d’abord parce que l’industrie pharmaceutique ne s’est jamais sérieusement penchée sur le développement de formulations spécialement desti-
ActuSoinS 14 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • pratique
nées aux enfants. « Les firmes ont du mal à tirer une compensation financière suffisante de leurs investissements en recherche pédiatrique » reconnaît Vincent Grek, créateur d’O4CP (Only For Children Pharmaceuticals), un tout jeune laboratoire pharmaceutique dédié au développement de médicaments pédiatriques. Si l’Europe compte 100 millions d’enfants, ils sont fort heureusement en bonne santé pour la plupart, et le nombre des petits malades apparaît relativement modeste, par rapport au potentiel d’un blockbuster adulte. Consciente du problème, la Commission Européenne a adopté en 2005 un Règlement Pédiatrique Européen pour inciter les industriels à s’engouffrer sur ce marché. Les firmes doivent désormais systématiquement prévoir un volet de développement chez l’enfant – via un Plan d’Investigation Pédiatrique (PIP) – pour toute demande ou modification d’AMM d’un médicament adulte. En échange, la protection du brevet est prolongée de 6 mois. Pour les médicaments anciens déjà tombés dans le domaine public, la prolongation n’est plus possible, en revanche : le dispositif propose alors une autorisation de mise sur le marché baptisée PUMA (Paediatric Use Marketing Autorisation) et qui apporte à son titulaire une période d’exclusivité commerciale de 10 ans. Enfin, pour soutenir la recherche dans les domaines non attractifs pour les firmes, un programme européen de financement a été également mis en place.
Incitation insuffisante Malgré la volonté affichée, le bilan à cinq ans de ce dispositif est modeste : seule une cinquantaine de nouveautés à destination des enfants ont été développées dans le délai – qu’il s’agisse de nouvelles molécules, formulations ou indications. – « La réglementation européenne est très incitative mais ne règle pas un point essentiel : celui du prix, qui reste du ressort des Etats membres. Or il est difficile pour un industriel de conduire des essais, plus longs et plus coûteux que chez l’adulte, sans avoir l’assurance que le prix qui lui sera accordé couvrira son investissement » reconnaît Vincent Grek. Pour le Collectif Europe et médicament, qui représente une soixantaine d’associations de consommateurs, de patients, de professionnels de santé et des organismes payeurs, le problème est plus large. « Le système proposé est incitatif, mais il ne permet pas de favoriser des progrès dans les champs thérapeutiques qui en ont le plus besoin » explique Laure Lechertier, de la Mutualité Française, membre du Collectif. Les PIP – obligatoires – se sont effectivement multipliés en cinq ans (1600) mais les PUMA se comptent sur les doigts d’une main. «C’est pourtant dans le champ des médicaments essentiels, souvent anciens, que les besoins sont les plus forts. Il faudrait donc que le développement pédiatrique soit orienté selon les besoins des enfants et non par les développements thérapeutiques envisagés chez
l’adulte. Et donc recenser les prescriptions pédiatriques hors AMM les plus fréquentes pour établir des priorités selon les besoins non couverts ». En France, les nouvelles Recommandations Temporaires d’Utilisation destinés à sécuriser les prescriptions hors AMM les plus fréquentes devraient aider à dresser ce bilan. «Les obligations juridiques vis-à-vis des laboratoires mériteraient aussi d’être renforcées ».
Responsabilité juridique des professionnels engagée Vincent Grek, lui, reste optimiste : « les effets de règlement européen ne sont encore maximaux. Le développement clinique est plus long chez l’enfant. Mais pour améliorer ce bilan, il faudra probablement une évolution de la réglementation, qui au même titre que celle des médicaments orphelins englobe la question du prix, tout en préservant la notion de soins abordables ». Espérons-le. Car la responsabilité des professionnels est engagée en cas de prescriptions hors AMM. Ces dernières sont plus encadrées depuis la loi de renforcement sanitaire voté fin 2011 à la suite de l’affaire Médiator : elles ne sont désormais envisageables qu’en l’absence d’alternative thérapeutique et doivent être clairement précisées sur l’ordonnance et expliquées au patient. « En cas de manquement à ces obligations, le médecin peut voir sa responsabilité engagée », rappelle le professeur Anne Laude, Présidente
“Les firmes ont du mal à tirer une compensation financière suffisante de leurs investissements en recherche pédiatrique.
”
de l’Association Française de Droit de la Santé. « Et l’infirmière aussi ». La jurisprudence est là pour le rappeler : en 2008, une infirmière hospitalière a été condamnée pénalement après le décès d’un enfant pour ne pas avoir demandé des précisions manquantes mais nécessaires sur les modalités de perfusion d’un sérum glucosé à un enfant. Pour la Cour de Cassation, il s’agissait d’un manquement à l’article R.4312-29 du code de la santé publique précisant que « l’infirmier(e) doit demander au médecin-prescripteur un complément d’information chaque fois qu’il le juge utile ». S’il ne s’agissait pas d’une prescription hors AMM, il est probable que les conclusions de cette affaire auraient été identiques... n
ActuSoinS 15 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Caroline Guignot
Actusoins • vie libérale
Infirmière libérale enceinte : quelles indemnités ?
Comme pour toutes les professions libérales, lorsqu’une infirmière libérale attend un enfant, elle peut percevoir plusieurs types d’indemnités. Mais attention à ne pas oublier l’assurance privée.
D
epuis un décret du 1er juin 2006, la durée du congé de maternité des auxiliaires médicaux est alignée sur celui des salariés et passe de huit à seize semaines « sous réserve de cesser toute activité professionnelle ». Les infirmières libérales peuvent percevoir une allocation forfaitaire de repos maternel ainsi que des indemnités journalières forfaitaires si elles cessent leur activité en cas de grossesse. L’allocation forfaitaire de repos maternel est destinée à compenser partiellement la diminution de l’activité professionnelle. Elle est versée sans condition de cessation d’activité. Son montant est égal au montant du plafond mensuel de la sécurité sociale en vigueur qui est revalorisé chaque année soit 2 946 euros au 1er janvier 2011. Cette indemnité est versée en deux fois, à la fin du septième mois de grossesse et après l’accouchement. Elle peut l’être en une seule fois si l’accouchement a lieu avant la fin du septième mois de grossesse. Pour percevoir cette allocation, l’infirmière doit adresser un certificat d’accouchement à sa caisse d’assurance maladie. Les infirmières libérales peuvent également percevoir une
“ Il est fortement conseillé aux infirmières libérales d’avoir recours à une assurance privée. ”
indemnité journalière forfaitaire versée pendant le congé maternité à condition qu’elles cessent toute activité rémunérée pendant au moins huit semaines, dont deux avant l’accouchement. Son montant journalier est égal à 1/60ème du montant du plafond mensuel de la sécurité sociale en vigueur, soit 48,42 euros au 1er janvier 2011. Ces indemnités journalières sont versées durant toute la durée du congé maternité. Leur durée varie selon le nombre d’enfants attendu et le nombre d’enfants déjà à charge.
Assurance privée En cas d’état pathologique résultant de la grossesse, une période supplémentaire de congé, n’excédant pas deux semaines, peut être accordée au cours de la période prénatale dès que l’infirmière a effectué sa déclaration de grossesse. Le congé pathologique doit alors être prescrit par son médecin et ne peut être reporté sur la période postnatale. En cas d’accouchement prématuré de plus de six semaines, l’infirmière peut bénéficier d’une indemnisation supplémentaire si l’enfant est hospitalisé. Cette période d’indemnisation supplémentaire s’étend de la date réelle de l’accouchement jusqu’au début du congé maternité. Si l’enfant reste hospitalisé au-delà de la sixième semaine suivant sa naissance, l’infirmière a la possibilité de reprendre son travail et de reporter le reliquat de son congé postnatal à la date de fin de cette hospitalisation. Il est néanmoins fortement conseillé aux infirmières d’avoir recours à une assurance privée pour couvrir le manque à gagner de revenus qui n’est pas pris en charge par la sécurité sociale en cas de grossesses pathologiques, et même de manière générale. De plus, les infirmières ayant recours à des remplaçants pendant leur grossesse doivent penser à négocier avec eux la rétrocession pour couvrir les frais courants du cabinet ainsi que les charges. Habituellement, ce montant est fixé à 10 %. n Laure Martin
ActuSoinS 16 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • vie professionnelle
Cadre de santé infirmier :
vers la fin d’une inscription obligatoire à l’Ordre ?
Le Conseil d’Etat a approuvé, fin mars, la demande d’une cadre de santé masseur-kinésithérapeute qui ne souhaitait plus être inscrit au tableau de son ordre. Cette décision pourrait-elle s’étendre aux cadres infirmiers ?
D
ans une décision rendue le 20 mars 2013, le Conseil d’Etat a décidé que conformément à la demande d’une cadre de santé masseur-kinésithérapeute, celle-ci n’avait pas à être inscrit au tableau de son ordre car « si les masseurs-kinésithérapeutes peuvent être amenés à assurer des activités d’encadrement, de telles activités, contrairement à ce que soutient le conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, ne peuvent être regardées comme relevant par elles-mêmes de l’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute dès lors qu’elles ne comportent pas la pratique du massage ou de la gymnastique médicale notamment de manière habituelle. »
“Cette décision pourrait avoir un impact sur les cadres de santé infirmiers. ” Une telle décision pourrait avoir un impact sur les cadres de santé infirmiers, d’après Nicolas Gombault, directeur général du Sou Médical du groupe MACSF. « Il faut raisonner par analogie car les textes qui régissent les deux professions sont tout à fait comparables », estime-t-il. « D’après le Conseil d’Etat, que l’on soit infirmier ou masseur-kinésithérapeute, il y a une obligation d’être inscrit au tableau de l’Ordre dès lors que l’on pratique un acte qui relève de sa fonction. »
Comme, selon Nicolas Gombault, les activités d’encadrement ne relèvent pas de l’exercice de la profession chez les masseurs-kinésithérapeutes, tout comme chez les infirmiers, alors « le cadre de santé n’est pas tenu d’être inscrit au tableau de son Ordre dès lors qu’il n’est pas amené à pratiquer effectivement des actes dans le cadre de ses fonctions autrement que de manière purement occasionnelle », précise-t-il. Le caractère occasionnel ou habituel des actes devient le critère pour l’inscription au tableau de l’Ordre. « Jusqu’où l’occasionnel tend-il et quand cède-t-il la place à l’habituel, ce sont les magistrats qui décideront au cas par cas », souligne Nicolas Gombault. Néanmoins, les cadres restent libres de s’inscrire s’ils le souhaitent au tableau de leur Ordre.
Décision non transposable selon l’Ordre national des infirmiers Cette analyse n’est pas partagée par le secrétaire général de l’Ordre national des infirmiers, Karim Mameri. Ce dernier estime tout d’abord que la décision du Conseil d’Etat relève d’une situation individuelle qui ne peut pas être généralisée à l’ensemble des masseurs-kinésithérapeutes. Par ailleurs, cette décision « n’est pas transposable aux cadres infirmiers de par la définition même du métier d’infirmier dans le code de la santé publique », soutient-il. L’article L 4311-1 du code de la santé public considère « comme exerçant la profession d’infirmière ou d’infirmier
ActuSoinS 18 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • vie professionnelle
toute personne qui donne habituellement des soins infirmiers sur prescription ou conseil médical, ou en application du rôle propre qui lui est dévolu. L’infirmière ou l’infirmier participe à différentes actions, notamment en matière de prévention, d’éducation de la santé et de formation ou d’encadrement. » « Les infirmiers détiennent, de par la loi, un rôle propre qui est défini par sa profession, ce qui n’est pas le cas des masseurs-kinésithérapeutes, » considère le secrétaire général de l’Ordre infirmier. « C’est la notion de rôle propre qui fait la différence entre les deux professions et qui justifie le fait que la décision du Conseil d’Etat ne pourra pas s’étendre à la profession d’infirmier. » n Laure Martin
ActuSoinS 19 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • vie professionnelle
Les débuts très mitigés de l’ARM France-Québec Huit infirmières québécoises ont obtenu en 2012 l’autorisation d’exercer en France, à l’issue d’une longue procédure administrative. L’arrangement de reconnaissance mutuelle (ARM) de 2010 a enfin officialisé la quasi-équivalence du DE français et du BAC en sciences infirmières français. Une infirmière québécoise raconte.
ActuSoinS 20 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • vie professionnelle
A
peine huit infirmières québécoises ont obtenu jusqu’à présent le droit d’exercer en France dans le cadre de l’arrangement de reconnaissance mutuelle (ARM) conclu en 2010 par les ordres infirmiers de France et de la Belle province canadienne. Mais seulement six résident en France pour l’instant, précise Kine Veyer, conseillère nationale de l’Ordre national des infirmiers chargée de cette question. « Les deux autres ont du repartir car elles ne disposaient pas du visa adéquat », poursuit-elle. Elles doivent revenir prochainement travailler pour de bon en France. Deux autres devraient « obtenir » l’ARM « incessamment » et une douzaine d’autres un peu plus tard. C’est peu. Dans l’autre sens, plus de 200 infirmières françaises sont parties travailler au Québec en 2012... La conjoncture de l’emploi infirmier dans notre pays a peut-être joué, souligne la conseillère de l’ONI. De même que les démarches de recrutement très dynamiques et avantageuses du Québec. Ici, les infirmières québécoises doivent se débrouiller toutes seules. Pour obtenir leur visa. Pour trouver l’établissement de leur stage d’adaptation en milieu clinique de 75 jours (obligatoire pour les détenteurs du diplôme d’« infirmier bachelier », le seul reconnu). Et pour trouver celui où elles pourront ensuite travailler pour de bon.
8 contre 200 Maud Suissa, infirmière clinicienne au Québec est la première infirmière québécoise à avoir « obtenu » l’ARM, en mars 2012 après son stage dans une clinique privée. Avec son conjoint, d’origine française, elle a choisi de venir s’installer en France, deux ans après avoir obtenu son diplôme d’infirmière clinicienne. « Je suis arrivée en France en juin 2010 car l’ARM devait entrer en vigueur à ce moment-là mais j’ai du retourner au Québec travailler ». En effet, l’arrangement était valide mais ne pouvait être appliqué avant la publication d’un arrêté... paru en décembre 2011 ! « J’ai reçu mon autorisation de pratique fin mai 2012. C’est très long », souligne Maud. Depuis, elle travaille dans un hôpital psychiatrique, auprès d’adultes autistes non- communicants puis aux urgences. Une fois évacuée la question du nom des médicaments, les choses se passent plutôt bien pour elle, avec sa hiérarchie comme avec ses collègues. Maud découvre un environnement professionnel très différent.
“En France, les infirmières québécoises doivent se débrouiller toutes seules. ” Une différence majeure réside dans les transmissions : « en France, elles sont ciblées. On écrit dans le dossier quand il se passe quelque chose. Au Québec, on écrit tout le temps. C’est une façon de se protéger juridiquement, mais ça entraîne peut-être une plus grande vigilance. Si je n’écris pas, cela m’insécurise... Mais le fait que ce soit moins rigide ici sur ce point amène les infirmières à être plus dans la communication, plus spontanées. » Le poids de la hiérarchie est aussi plus lourd en France et elle a été surprise lors des journées d’études par le fait que peu d’intervenants étaient des infirmières... Autre différence majeure : le rayon d’action des infirmières. « Au Québec, compare-t-elle, les infirmières cliniciennes sont amenées à coordonner des équipes, assurer des formations. » Pas ici. « C’est plus compliqué pour trouver sa place ou un projet professionnel qui ait un sens » au regard de sa formation, poursuit Maud, qui souhaiterait voir l’ARM élargi aux infirmières dites « techniciennes ». Avec la mise en œuvre de cet accord, les différences de représentation de l’infirmière entre les deux pays s’affichent grandeur nature. n Olivia Dujardin
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Actusoins • vie professionnelle
Les infirmières
bretonnes à l’abordage !
A l’instar des corsaires malouins face aux navires anglais, les IDE bretonnes ont investi depuis longtemps les hôpitaux parisiens. Pourquoi un tel engouement ?
A
ucun chiffre n’existe sur cet étrange phénomène constaté par nombre d’infirmières de l’AP-HP : quel que soit le service, sous la blouse blanche se cache souvent une IDE bretonne. « J’ai effectué 14 stages dans 4 hôpitaux parisiens pendant mes études et ça s’est avéré vrai partout » admet Aurélie. Originaire de Roscoff dans le Finistère, cette infirmière travaille à Paris depuis cinq ans. Elle avait pourtant été admise en IFSI près de chez elle. « Mais j’ai préféré partir à Paris pour avoir plus d’expériences et d’opportunités de travail » explique la jeune femme. Un argument avancé par la plupart des infirmières originaires du pays des korrigans. Au 21e siècle, la capitale et ses nombreux hôpitaux font toujours figure d’eldorado.
“Certains se font titulariser à Angers, Tours
ou Paris et après quelques années, ils demandent leur mutation vers la Bretagne. Oubliez Bécassine
”
Le phénomène est ancien. En 1877, le fondateur de la première école d’infirmières parisienne fustigeait « les Bretonnes bretonnantes, illettrées, sachant à peine lire et
écrire » 1 qui composaient selon lui le personnel infirmier de l’assistance publique. N’en déplaise à ce M. Bourneville, la Bretagne possède désormais un des meilleurs taux de réussite au bac (90,2% en 2012). Mais l’exode des infirmières se poursuit. La passion des Bretons pour le voyage est une des explications. La précarité dans les hôpitaux publics régionaux en est une autre. Après sa formation à Rennes, Bérénice a travaillé au CHU de la capitale bretonne. « Tu ne signes que des CDD d’un mois ou deux. Ils t’imposent des coupures de quelques semaines entre tes contrats pour ne pas être obligés de te stagiairiser » témoigne-t-elle. De guerre lasse, elle s’est exilée à Paris. « Ils ont essayé de me retenir, mais sans jamais proposer de CDI. Ils me disaient: ‘tu n’as qu’à faire de l’intérim entre deux contrats’. Mais moi je veux de la stabilité ! ». Elle se dit aujourd’hui ravie de son travail au service de réanimation de l’hôpital Pompidou. « L’AP-HP me donne des moyens et des conditions de travail que je n’avais pas en Bretagne » assure-t-elle. Même son de cloche chez sa collègue Nadège, originaire de Saint-Malo. « A Nantes ou Rennes, il y a tellement de candidats que tu ne fais pas la fine bouche. Moi je voulais travailler en réanimation : à
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Actusoins • vie professionnelle
Paris, non seulement c’est possible, mais j’ai même le choix entre plusieurs services. C’est une terre bénite ! » s’exclamet-elle en riant.
Petit lexique de survie franco-breton Afin de converser au mieux avec vos collègues bretonnes ou pour préparer une éventuelle expatriation dans la contrée où la crêpe est reine, voici ce petit lexique bien utile en milieu hospitalier.
Précarité bretonne Pour les syndicats, la précarité dans les hôpitaux publics est une évidence. « Au CHU de Rennes, on a 172 contractuels sur un total de 1200 infirmiers. On voit que ce nombre ne diminue pas malgré les nombreux départs en retraite suite à la réforme de 2010 » constate Eugène Epaillard de Sud 35. Conséquence : les jeunes partent vers des hôpitaux en déficit de personnel. « Certains se font titulariser à Angers, Tours ou Paris et après quelques années, ils demandent leur mutation vers la Bretagne » explique-t-il.
Infirmier/ère : Infirmier/iour Hôpital : Ospital Médicament : Louzoù Médecin : Medisin Opération : Oberatadenn Pansement : Bandenn Pause : Paouez Pénibilité : Poanidigezh Injection : Pikurenn Soigner : Prederian Stress : Strihl Syndicat : Sindikad Thé / Café : Te / Kafe Veine : Gwazhi
Dans le Finistère, il faut compter 5 ans d’attente pour une stagiairisation. « Il y a plus d’étudiantes formées que de postes de titulaires disponibles dans le département » décrypte Christine Jacq, de la CFDT Santé-Sociaux 29. « Avec les contraintes budgétaires, les hôpitaux n’embauchent plus qu’à la marge. Mais s’il y a un fort turn-over chez les jeunes IDE, celles qui sont titularisées restent en poste ». Malgré tout, la Bretagne attire toujours autant, et pas que des Bretons. La région comptait 31.128 IDE en 2012, à 80% salariées 2. « Beaucoup de mes collègues à Rennes avaient travaillé à l’AP-HP. Elles sont venues pour la qualité de vie dans la région, même si les conditions de travail sont moins bonnes » raconte Bérénice. Et nos jeunes exilées ? « La question du retour en Bretagne est un grand sujet de
Source : Francis Favereau, « Dictionnaire usuel du breton contemporain bilingue », Editions Skol Vreizh, Morlaix, 1999.
débat avec mon compagnon » s’amuse Nadège. Aurélie et Bérénice, elles, sont unanimes : « le Sud-Ouest ! ». n Amélie Cano 1 2
Extrait de « Une Histoire de l’hôpital Lariboisière », J.P. Martineaud, L’Harmattan. Source : Agence régionale de santé.
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Actusoins • vie professionnelle
Salon de la Santé et de l’Autonomie nouvelle version Derrière le Salon de la santé et de l’autonomie se cachent en réalité 3 salons qui ont attiré décideurs, acheteurs et cadres hospitaliers du 28 au 30 mai à Paris. L’occasion de découvrir les technologies de demain, les coulisses de l’hôpital où la prise en charge des personnes du 3ème âge deviendra une problématique majeure.
C
ette année, la formule du 3 en 1 était d’actualité : le salon de la santé et de l’autonomie, organisé par la Fédération Hospitalière de France (FHF), regroupaient ainsi du 28 au 30 mai au Parc des Exposition de Paris, les éditions du salon Hôpital expo HIT Paris (Health Information Technologies) et GerontExpo-Handicap. Ainsi, et dans un même hall, s’organisait un salon regroupant des exposants venus présenter leurs produits et services en matière d’équipement des hôpitaux, en technologies et systèmes d’information appliqués à la santé, soit au total 580 exposants. Dans les allées du salon, les décideurs hospitaliers, cadres, acheteurs et utilisateurs professionnels de ces produits découvraient ce que pourrait être l’hôpital de demain, bouleversé par les nouvelles technologies. Les secteurs de la construction, de l’architecture, de la restauration, de la blanchisserie, de l’entretien, du confort de vie, des systèmes d’informations et nouvelles technologies dévoilent leurs dernières nouveautés.
“ Le salon qui ne se tenait jusqu’à présent que tous les deux ans est désormais annuel. ”
Silver economy : le grand âge s’invite au salon
diagnostiquer et soigner à distance les patients. La question du grand âge a également été une des problématiques majeures de ce salon. Ainsi, Michèle Delaunay, ministre déléguée aux personnes âgées et à l’autonomie, est venue promouvoir et soutenir la « Silver economy », ce marché florissant qui s’adresse aux personnes âgées. Elle a également lancé l’opération « 1 Ehpad = 1 emploi d’avenir », prévoyant la création de 7250 emplois dans les maisons de retraite médicalisées, et 5 250 dans le secteur de l’aide à domicile des personnes âgées. Les organisateurs du salon, UBM Live Health se sont déclarés « satisfaits de la mobilisation des professionnels du secteur ». Le salon qui ne se tenait jusqu’à présent que tous les deux ans est désormais annuel. « Nous allons continuer les efforts déployés cette année pour donner du contenu au salon en plus de l’exposition », annonce Aube Jeanbart, chargée d’événements chez UBM. « L’année prochaine, nous programmeront également des débats, des conférences, des ateliers, des prix de l’innovation. Un salon aujourd’hui sans cela ne sert à rien. » Rendez-vous du 20 au 22 mai 2014 pour la prochaine édition.n
Les quelque 15 445 visiteurs uniques (soit une fréquentation en hausse de 14,4% par rapport à 2012) ont pu découvrir ce qui pourra être l’hôpital du futur, équipé pour
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Ariane Puccini
Actusoins • vie professionnelle
Masters et pratiques avancées : quelles Salons Santé Autonomie 2013 © Faust Favart
formations pour les infirmières ?
Lors des Salons de la santé et de l’autonomie, Thomas Duvernoy, rédacteur en chef d’ActuSoins, a animé un plateau télévisé dont la problématique portait sur le rôle de l’infirmière de demain, polyvalence ou expertise ?
L
a formation au métier d’infirmier a subi de profondes mutations ces dernières années. Les premiers étudiants en soins infirmiers ayant bénéficié de la mastérisation du diplôme liée à la réforme de 2009 ont été diplômés en juin 2012. « Aujourd’hui, nous avons universitarisé la formation en l’adossant à un grade universitaire », rappelle Michèle Lenoir-Salfati, adjointe au sous-directeur des ressources humaines à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). L’année dernière, ce sont les infirmiers anesthésistes diplômés d’Etat (Iade) qui ont fait leur rentrée sur la base d’un programme réingéniéré. Quant aux infirmiers de blocs opératoires (Ibode) et aux infirmiers puériculteurs, les deux spécialités souhaitent une reconnaissance de leur diplôme au niveau Master. « Le problème qui se pose aujourd’hui est l’absence de continuité des études », souligne Eve Guillaume, présidente de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi). « Nous souhaiterions pouvoir être intégrés à l’université afin de permettre la recherche dans le domaine infirmier et ainsi développer le cœur du métier infirmier. » « Il va également falloir trouver un biais pour les infirmiers qui ne sont pas licenciés et qui souhaitent suivre un Master », ajoute Olivier Drigny, vice-président de l’Ordre national des infirmiers, en précisant que l’universitarisation des études pose la question du mode d’enseignement.
« Il y a une grande appétence aujourd’hui à l’acquisition de masters » estime Michèle Lenoir-Salfati. « Il s’agit d’une demande de reconnaissance des compétences. Néanmoins, il faut être clair sur la détermination des masters dont nous avons besoin. » Selon elle, il y a un intérêt à clarifier les concepts et notamment à correctement définir la notion de métier socle. « Nous ne sommes pas allés au bout de l’élargissement nécessaire du périmètre de ces métiers socles, affirme-t-elle. » De plus, l’ensemble des infirmières détentrices d’une licence ne va pas s’orienter vers un Master. « La plupart apprécient d’être aux côtés des patients », souligne Olivier Drigny. « J’imagine mal le Master comme étant la suite des études de toutes les infirmières. » De même qu’il considère qu’il ne faut pas autant de masters que de services. « Il est nécessaire de travailler avec les infirmières pour définir ceux à mettre en place », propose-t-il. Autre impératif : être clair sur la notion d’expertise et sur celle de pratiques avancées. « Ces dernières peuvent être une réponse à la désertification médicale et à la hausse des demandes en soins », conclut Eve Guillaume. n Laure Martin
“ Le problème qui se pose aujourd’hui est l’absence de continuité des études. ”
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Actusoins • vos droits
“
J’ai récemment injecté un médicament à une mauvaise posologie. J’ai respecté la prescription, qui était fausse, ce que le médecin a admis. Il n’y a eu aucune conséquence pour le patient, mais je me pose la question de ma responsabilité dans ce cas ? L’infirmier doit appliquer les prescriptions du médecin, conformément à l’article R. 4311-7 du code de la santé publique (CSP). Mais il ne doit pas le faire aveuglément. En effet, l’article R. 4312-29 CSP prévoit que « l’infirmier ou l’infirmière applique et respecte la prescription médicale écrite, datée et signée par le médecin prescripteur (…). Il doit demander au médecin prescripteur un complément d’information chaque fois qu’il le juge utile, notamment s’il estime être insuffisamment éclairé.(…)». Si l’infirmier n’est pas tenu d’exercer un contrôle technique sur la prescription médicale, il a toutefois le devoir de vérifier qu’elle ne présente
pas un danger pour le patient. En cas de doute, il doit interroger le médecin afin d’obtenir une confirmation soit de la prescription, soit de la modification et la porter au dossier. En établissement de soins, l’arrêté du 6 avril 2011 relatif au mangement de la qualité de la prise en charge médicamenteuse et aux médicaments dans les établissements de santé rappelle l’obligation pour l’infirmier de procéder à plusieurs vérifications au moment de la préparation des médicaments et, si la prescription lui parait inadaptée voire dangereuse, de prendre attache avec le médecin prescripteur.
”
En cas de complications pour un patient, la responsabilité civile et pénale du prescripteur serait à coup sûr engagée. Celle de l’infirmier pourrait également être retenue s’il s’avère qu’il était en mesure de détecter l’erreur de posologie. n
Stéphanie Tamburini, juriste MACSF
“
Je souhaite quitter le cabinet libéral dans lequel j’exerce pour cause de mésentente avec une collaboratrice. J’ai signé une clause de non concurrence m’empêchant de travailler à moins de 50 km de mon lieu d’exercice pendant 5 ans. Est-ce une clause abusive ? Que ce soit dans le cadre d’un remplacement ou d’une présentation à clientèle, ou bien encore en cas de départ d’une association, la jurisprudence admet la validité des clauses de non-concurrence insérées dans les contrats, même si ces clauses sont interprétées de manière restrictive. Comme toute clause restreignant la liberté d’installation des membres des professions libérales, elles ne sauraient porter atteinte, de manière excessive, à la liberté d’exercice ou d’installation. Elles doivent ainsi être équilibrées et justifiées par un intérêt légitime Selon un arrêt de principe de la Cour de Cassation du 11 mai 1999, pour être admise, une clause de non-concurrence doit être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, compte tenu de la durée du contrat et du lieu d’exercice de la profession.
Dans un autre arrêt du 4 janvier 1995, la Cour de Cassation a ainsi jugé que la clause par laquelle un médecin exerçant en association s’engage à ne pas se réinstaller dans le même département au cas où la rupture du contrat lui serait imputable est valable, car, limitée dans l’espace au territoire d’un département, elle ne rendait pas impossible pour le médecin l’exercice de son activité. Si l’espace (50km) et le temps (5ans) définis par cette clause de non concurrence peuvent vous sembler trop larges, vous avez accepté cette clause pour l’avoir signée. En cas de nonrespect de cette obligation, et si votre contrat ne prévoit pas le versement d’indemnités, votre confrère pourra demander au juge des référés votre condamnation sous astreinte à cesser d’exercer dans le secteur interdit. S’il existe une sérieuse contestation quant à la
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”
validité de cette clause, une procédure dite « au fond » devant le tribunal de grande instance pourra alors être engagée, pour tenter d’obtenir des dommages et intérêts, lesquels seront fonction du préjudice subi par votre confrère. Un mauvais arrangement valant mieux qu’un bon procès, il conviendra de privilégier la recherche d’une solution amiable, au besoin par l’intermédiaire de votre conseil départemental de l’Ordre, dans le cadre d’une conciliation préalable. n
Christine Bui-Quang, juriste MACSF
Actusoins • Portrait
Harold en 4 dates : 1998 : Obtient son DE, 1998/ 2002 : travaille dans des services d’urgences, de chirurgie maxillo-faciale et d’oncologie, 2002 : intègre un cabinet libéral, 2010 : travaille pour la société d’assistance « Médiamédic ».
CHAPO
Harold
du libéral au show-biz Infirmier, il soigne des stars internationales sur des tournages et s’occupe de l’assistance paramédicale pour les émissions de téléréalité. © Malika Surbled
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Actusoins • Portrait
V
oici un infirmier qui est amené à côtoyer régulièrement du beau monde. Secret médical oblige, il ne citera comme noms que ceux de films ou des séries télévisées. Certains acteurs de Gossip Girl, Red ou encore Hansel et Gretel font partie de son palmarès de soignant de stars. Les grosses entreprises de production font en effet régulièrement appel aux services de la société d’assistance pour laquelle il travaille quand les tournages se déroulent en France. « C’est souvent une question de responsabilité et d’assurance » explique Harold. « Nous avons un rôle principalement préventif. Et s’il se passe quelque chose, nous intervenons ». Songeur, Harold se remémore de bons moments. « Je crois que j’ai piqué les plus belles fesses du cinéma américain » ajoute-t-il en riant. « On voit et l’on côtoie les actrices les plus en vogue, c’est plutôt agréable. D’autant que contrairement aux idées reçues certaines sont vraiment très sympathiques, pas du tout hautaines ». Plus que compétent, Harold doit aussi être débrouillard, car il faut aussi pouvoir répondre aux diverses demandes des productions et des acteurs. « Un jour, j’ai dû trouver en urgence un ophtalmologue qui accepterait de recevoir une comédienne qui en avait formulé la demande. Avec des plannings surchargés pour les médecins spécialistes, ce n’est pas évident. Dans ce cas, il faut alors sortir son annuaire et téléphoner jusqu’à satisfaire ces petites exigences ».
Les infirmiers qui, comme Harold, sont recrutés pour ces missions ponctuelles doivent justifier d’une solide expérience aux urgences ou en réanimation. Non sans raison. Si les tournages de fictions sont en général « plutôt calmes », il n’en est pas de même pour les émissions de téléréalité, elles aussi dans le marché de la société d’assistance. « J’ai couvert une émission de danse*, diffusée sur W9. Les participants s’entraînaient parfois jusqu’à 10 heures par jour. Il y a eu beaucoup de problèmes musculaires et quelques entorses. J’étais seul et il a fallu que je gère les strappings et toute la bobologie. Les infirmiers, lorsqu’ils sont seuls sur place, sont toujours équipés d’un smartphone et ils peuvent au moindre doute et à tous moments, envoyer les photos des plaies et des blessures à nos médecins référents pour avoir un avis, notamment sur les émissions de cuisine ». Parfois, lorsque les budgets de production le permettent, Harold travaille en binôme avec un médecin. Parfois, c’est le médecin qui travaille sans infirmier.
monde. Les équipes ne se prennent pas la tête et chacun sait rester à sa place. Nous pouvons aussi nouer des relations amicales avec les candidats qui ont souvent besoin de nous. ». À 37 ans, Harold ne consacre pas pour autant sa vie à cette activité. Celle-ci représente pour lui une expérience annexe à son quotidien d’infirmier libéral. « J’interviens uniquement pour des missions ponctuelles. Cela correspond en totalité à une vingtaine de jours par an ». Alors, l’infirmier s’organise de façon à optimiser son emploi du temps. « C’est difficile. Il faut à la fois gérer le cabinet avec tout le travail administratif que ça implique, les 60 patients que je vois chaque journée travaillée, mes activités sportives et la famille. J’avoue avoir de grosses semaines. J’ai toujours été un peu hyperactif, j’aime ça ! », explique-t-il en souriant.
“On voit et on côtoie les actrices les plus en vogue, c’est plutôt agréable. D’autant que contrairement aux idées reçues certaines sont vraiment très sympathiques, pas du tout hautaines.
Partageant son activité libérale avec une collègue, il travaille 2 à 5 jours par semaine, dans des villages situés près de Montargis. « Le milieu rural, c’est super intéressant. Les gens sont accueillants, sympathiques. On en voit de tous les genres. La qualité de la relation soignant/soigné est authentique » Certains de ses patients, justement, sembleraient admiratifs. « Un jour, on m’a vu dans une émission de téléréalité. Quelques secondes seulement. L’un des candidats s’était blessé et mon intervention a été diffusée. Le lendemain, une de mes patientes me demandait un autographe » raconte Harold en guise d’anecdote. Admiration partagée par ses 3 fils qui sont fiers d’avoir un « papa qui rencontre les stars de la téléréalité ». Après tout, un peu de légèreté dans la vie mouvementée d’un infirmier ne peut pas faire de mal... n Malika Surbled * À la demande de l’infirmier, les noms des émissions ne sont pas mentionnés.
« Je passe de très bons moments dans le milieu audiovisuel que je trouve très accueillant et convivial. C’est un autre
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Actusoins • soignants d’ailleurs
Justina, infirmière tanzanienne © Nicolas Beaumont
ActuSoinS 30 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • soignants d’ailleurs
Infirmière en
Tanzanie :
soigner les plus démunis Si Tanzanie rime souvent avec Serengeti, Kilimandjaro ou Zanzibar, ce pays d’Afrique de l’Est est en proie à des problèmes de santé publique. Les professionnels de santé y jouent un rôle crucial. C’est le cas de Justina qui travaille, au cœur d’un quartier en difficulté de Dar-es-Salaam, avec les équipes de Médecins du Monde.
S
«
i tout était à refaire, je choisirai la même voie. Devenir infirmière c’est ce que je voulais faire et ce que je veux continuer à faire » lance Justina avec enthousiasme. Cette jeune femme de 31 ans n’a aucun doute sur son choix professionnel. Elle devenu infirmière il y a deux ans dans une école du nord du pays, à Moshe au pied du Kilimandjaro. Son cursus, comme celui de tous les infirmiers de Tanzanie, a duré quatre ans. Les trois premières années sont consacrées à un tronc commun de formation et la dernière année à une spécialisation. Elle a choisi de s’orienter vers les soins psychiatriques. Une manière pour elle « d’être au plus proche des patients et prendre soin d’eux complètement, pas juste d’une blessure ». Parmi les spécialités disponibles, ce n’est pas la plus fréquemment demandée. Ils ne sont que quatre dans la promotion de Justina, qui comptaient 39 étudiants, à l’avoir choisi. Les autres se sont orientés vers des discipline comme la pédiatrie, la maternité ou
encore l’ophtalmologie. Dans ce pays essentiellement rural, en manque d’infrastructure de santé publique ou privée, les soins infirmiers sont essentiels. Et les infirmières formées chaque année n’ont pas de difficulté à trouver du travail. Justina a choisi de quitter sa ville natale de Moshe et les paysages de steppes, pour venir travailler dans la tentaculaire Dar-es-Salaam. La plus grande ville du pays, capitale économique, abrite près de 4 millions de personnes et concentrent les problématiques médico-sociales du pays. Selon les Nations-Unies, près de 70% de la population vit dans un logement de fortune. On comprend mieux pourquoi, loin des safaris pour admirer les lions du Serengeti, Médecins du Monde (MdM) a implanté un centre de réduction des risques au cœur de Temeke. C’est l’une trois des municipalités de Dar-es-Salaam. Ici les indicateurs y sont alarmants ; 30 % de la population a accès à de l’eau de bonne qualité, des inondations
ActuSoinS 31 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • soignants d’ailleurs
“ J’ai toujours rêvé de devenir une bonne infirmière. ”
frappent les habitants chaque année, le taux de prévalence du VIH est reparti à la hausse, notamment à cause de la toxicomanie. Ce centre, le premier d’Afrique à proposer l’échange de seringues aux toxicomanes, fonctionne en collaboration avec les autorités locales et notamment celle du district de Temeke. Nous sommes dans l’une des salles de soin du centre de MdM, c’est là que Justina, salariée de la municipalité, est détachée depuis sept mois. « Ça n’a pas été facile au début de travailler ici, j’avais l’impression d’avoir plusieurs responsables qui se contredisaient parfois. Il a fallu clarifier tout cela » se rappelle-t-elle. Mais aujourd’hui l’organisation est bien rodée et elle a trouvé sa place dans une équipe multinationale et pluridisciplinaire. « Ce n’est pas plus compliqué de travailler avec des Européens qu’avec des Tanzaniens, il suffit de s’écouter et de se parler pour éviter les malentendus. » Les patients, des femmes et des hommes marginalisés, toxicomanes, sont souvent multi-infectés.
C’est l’une des principales difficultés du quotidien de la jeune femme. « Prendre soin de patients à risque est dangereux, il faut faire très attention à soi, mais aussi à eux. Parfois c’est un peu difficile à vivre. » Mais elle ne s’arrête pas à ces contraintes et souligne que « il faut s’occuper de ces personnes, leur apporter des soins physiques mais aussi un soutien psychosocial. » Justina aurait pourtant pu trouver facilement un travail moins pénible avec son diplôme en poche. Les hôpitaux privés et publics proposent de nombreux postes assortis de formation continue sous forme de séminaires ou de cours. Tous les deux ans le personnel infirmier peut demander un complément de formation ou une spécialisation. Ce dispositif vient s’ajouter aux masters en soins infirmiers qui enrichissent la formation initiale. Ainsi lorsque Justina évoque son avenir professionnel, elle envisage de suivre un master ; « évidemment en soins psychiatriques mais aussi en administration des soins dans un second temps ». n Nicolas Beaumont
Actusoins • sur les blogs
En
apesanteur
Si vous voulez vraiment savoir ce qu’est un hôpital, passez deux heures dans un de ses ascenseurs. 8h45, rez de chaussée. - Ding Dong: Ah, non, ça descend. - Ding Dong: Ah, celui-là il monte mais pas jusqu’au 11ème. - Ding Dong: Pas la place. - Ding Dong: OK, c’est parti. 1er étage : Un grand patron monte avec sa cour. Blagounette du Boss, la Cour fait « hu hu hu » puis regarde ses pompes. 2ème étage : Arrivée d’une dame entre deux âges, chignon, gilet mauve par dessus la tenue, bagues, bracelets et rouge à lèvre flashy: probablement une cadre sup. Coup d’œil au badge: gagné. On s’occupe comme on peut. 3ème étage : Le Boss descend avec ses poissons-ventouse. Une externe monte, elle porte à peu près son poids en enveloppes kraft mais elle reste digne.
10ème étage : Un petit garçon entre avec sa maman. Il a un bonnet péruvien et une perfusion. Lui, il sourit, le reste de l’ascenseur non. Personne n’aime cet étage. 11ème étage : il est 9h15, vous êtes à la bourre. En plus, la vieille dame a décidé que dans la mesure où elle ne savait ni où elle allait, ni ce qu’elle faisait là, il était plus sûr de vous suivre. Petit conseil : Si vous êtes bien urbain et habitués à utiliser allègrement le bouton <> pour retenir l’ascenseur, quand vous voyez des gens arriver, arrêtez, vous allez vous faire des ennemis. Oubliez toutes vos bonnes manières, laissezvous envahir par le côté obscur, et n’ayez pas peur d’utiliser le bouton-jumeau-maléfique: ><. Au début vous aurez honte, mais ça passe. Toutes les chroniques sur uninfirmier.actusoins.com.
4ème étage : Un anesthésiste et son café montent faire une péri à une femme qui a la mauvaise idée d’accoucher pile au moment de la retransmission des championnats du monde de Sudoku. 5ème étage : L’externe descend, elle vient de s’apercevoir qu’elle n’a pas d’étiquettes sur ses enveloppes. Mais elle reste toujours digne. 6ème étage : Le café et son anesthésiste se traînent vers la mater, une jeune femme en vient. Ce sera un garçon. 7ème étage : Un vieux couple vacillant demande à la cantonade où sont les admissions du secteur F2 porte 8. Personne ne sait, tout le monde attend la fermeture des portes. Eux, ils attendront le prochain passage de l’ascenseur pour poser la même question. 8ème étage : Une vieille dame monte. Elle ne sait pas vraiment pourquoi. D’ ailleurs, où est-elle? 9ème étage : La vieille dame vous demande si on-arrive-bientôt-jeune-homme. Vous, vous aimeriez bien que quelqu’un lui ferme les boutons de sa chemise d’hôpital, surtout en bas du dos.
ActuSoinS 34 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • initiative
Les
Z’entonnoirs : des patients sur les ondes...
Le jingle donne le ton. « Ils sont malades. Vraiment malades. Chaque lundi ils se regroupent dans leur quartier général à Roubaix et ils enregistrent une émission de radio. Dans le milieu, on les appelle... les Z’entonnoirs !».
P
as de concession, pas de pincettes. Depuis 2005, l’émission des Z’entonnoirs se veut espace de parole et de liberté : elle est conçue et animée par des patients atteints de troubles psychiques et des infirmiers de l’EPSM de l’agglomération lilloise. Dans le studio de La Condition Publique - fabrique culturelle- il y a Bruno, Yohann, Margot, Malika, Tahar, Brahim... L’un souffre de phobie sociale, l’autre de schizophrénie, de troubles bipolaires ou de dépression. Chaque lundi matin, ils préparent le rubriquage de l’émission : cinéma, musique, santé, météo, débats, interview, reportages. Tout y est discuté dans une ambiance parfois animée, qu’il faut cadrer. L’enregistrement de l’émission se déroule l’après-midi. Le tout est ensuite monté puis diffusé quelques jours après*.
Un temps thérapeutique Ici, il y a égalité de parole entre soignants et patients, égalité tout court. « C’est un espace où les patients trouvent enfin de la place pour s’exprimer et pour qu’on les écoute » assure Blandine Beugnet, une des infirmières animatrices. L’enregistrement est toujours suivi d’une réunion de débrief. Ce moment est important pour dire la façon dont chacun a vécu le déroulement de l’émission ou pour exprimer ce qui n’a pas pu être dit. « Le but est qu’ils ne gardent rien sur le cœur en repartant d’ici ».
“ Moins d’hospitalisation et d’isolement, plus d’autonomie, d’acquisition de compétences...
”
L’émission s’inscrit comme un atelier du Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps partiel. Tous les patients ‘stabilisés’ peuvent y participer. Erika Schröder, cadre de santé supérieur à l’origine du projet explique : « l’atelier n’est jamais
ActuSoinS 36 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • initiative
prescrit mais il peut être suggéré à certains par un infirmier ou un médecin. D’autres arrivent par bouche à oreille ou parce qu’ils ont déjà entendu l’émission ». Parfois, le format ne correspond pas aux attentes des patients. Parfois, certains ont des difficultés à s’adapter aux règles de fonctionnement du groupe. Mais autour des micros, on trouve beaucoup de patients fidèles. « C’est un lieu où l’on est en confiance » glisse Margot. « Cela m’a sauvé la vie » n’hésite pas à confier Yohann. Erika Schröder assure que les médecins et soignants qui suivent ces patients constatent les bénéfices qu’en tirent les participants : moins d’hospitalisation et d’isolement, plus d’autonomie, d’acquisition de compétences...
Le projet s’est initialement inspirée d’une radio argentine précurseure (la Colifata). Aujourd’hui, l’expérience commence à être répliquée ailleurs : Morlaix, Toulouse, Nantes… Nul doute que l’espace ouvert à travers cette prise de parole est inspirante pour soignants et soignés. Bruno, le poète révolutionnaire du groupe, le rappelle : « la folie est le seul espace de liberté qu’il nous reste ». n Caroline Guignot * Diffusée sur Radio Boomerang, Radio Campus et RCV.
Un documentaire a été réalisé sur les Z’entonnoirs par Marine Place (2012). Il peut être visionné ici : http://www.wikinorpa.com/medias/detail/TLNP/LES_Z_ENTONNOIRS/ les-z-entonnoirs
D’égal à égal Une chose est sûre, dans cet espace, on apprend la tolérance, l’écoute, on créé des amitiés. Et la relation entre les soignants et les patients du groupe s’en trouvent bouleversée. « On est ici d’égal à égal, il y a moins de barrière entre nous » reconnaît Marie-Agnès Barré, une autre infirmière animatrice.
© «les Z’entonnoirs - EPSM de l’agglomération lilloise»
ActuSoinS 37 Numéro 9 Mai - Juin 2013
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Magnitude 6.9 : Les étudiants de l’IFSI d’Annecy réalisateurs d’un exercice de simulation de masse Les 3 et 4 avril dernier, deux services publics unissaient leurs ressources lors de l’organisation, inédite sous cette forme, d’un exercice de catastrophe de grande ampleur : étudiants, formateurs de l’IFSI d’Annecy et sapeurs-pompiers du SDIS (Service Départemental d’Incendie et de Secours) de Haute-Savoie ont élaboré l’ensemble d’une simulation de masse suite à un séisme. Retour sur la genèse et le déroulement d’un projet long de plus de deux ans. Des étudiants pleinement intégrés au dispositif
La connaissance clinique des acteurs a permis de proposer une prise en charge au plus proche des conditions réelles. © Promotion Bahia IFSI Annecy
Porté à l’origine, depuis 2010, par deux collègues de promotion d’IFCS, l’un formateur à l’IFSI d’Annecy et l’autre Infirmier en Chef du SSSM du SDIS 74, le projet a d’abord du être approuvé par les hiérarchies respectives ; approbation soumise à des faisabilités matérielles, logistiques et financières. Si le SDIS 74 était fort de plusieurs expériences pédagogiques dans le cadre de l’ancien programme avec
un autre IFSI de la région, l’équipe pédagogique de l’IFSI ne souhaitait pas par contre que le rôle des étudiants se résume à celui de victimes fictives de la catastrophe. Il fut donc proposé à l’équipe pédagogique, puis, après l’accord unanime de celle-ci, aux étudiants d’intégrer cette simulation à l’unité optionnelle des semestres 5 et 6. Les deux principes prédominants ont été de prioriser d’une part la collaboration entre les deux entités publiques et de favoriser d’autre part l’intégration des ESI au processus. Pour ce faire, la règle de la parité a été de mise sur toute la durée du projet : tous les cours, magistraux en face à face ou dématérialisés en audio-vidéo cours, étaient conduits par un binôme pompier-cadre formateur. Chaque groupe fonctionnel du projet était coordonné par un étudiant, lequel devait avoir au préalable fait acte de candidature et avoir été « reçu » à l’issue d’un entretien avec un binôme pompier formateur qui le secondait. Deux étudiantes ont intégré le groupe DIREX (direction d’exercice) tandis que les cinq autres ont coordonné des groupes fonctionnels dans lesquels s’étaient répartis les autres membres de la promotion : - Ressources humaines : coordination des étudiants entre temps de travail dans les groupes, jeux de rôle et repos réglementaires et recensement des compétences de chacun et des phobies éventuelles (vide, enfermement, chiens) - Logistique : organisation des l’exercice (transport, repas,
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Actusoins • initiative
hygiène), prévision du matériel en fonction des besoins des groupes - Plastron : élaboration des fiches pathologie de chaque victime en fonction de leurs connaissances cliniques et du type d’évènement - Grimage : maquillage des victimes en fonction des plastrons - Communication : gestion de la communication autour de l’exercice (amont, pendant, aval : communiqué de presse, conférence de presse fictive, accueil des journalistes, rédaction d’articles, réalisation d’un film …) Ce sont ensuite les étudiants de chaque groupe qui ont défini leurs missions et besoins et leurs attentes auxquelles les binômes de professionnels ont répondu en construisant les 5 temps de travaux dirigées répartis entre les mois de mai 2012 et mars 2013. Pour ce faire, la rencontre de la culture hospitalière avec celle du secours, loin d’être un handicap, a été une force au travers la mutualisation des savoirs et expériences spécifiques de chacun.
Place à l’exercice ! L’objectif était de réussir pendant 36h à enchainer les chantiers en reproduisant des conditions proches du réel d’un séisme. Nous avons pu occuper un site sécurisé de l’armée suisse conçu spécifiquement pour ce type d’exercice avec les différents types d’effondrement possible. Si les sapeurspompiers furent toujours sur la brèche, ce fut aussi le cas des étudiants qui ont su faire preuve d’une réactivité remarquable et louée par tous quels que soient les aléas (nuit, froid …). La première matinée a été consacrée à une reconnaissance de grande envergure avec une quarantaine de victimes réparties sur les 8 hectares du site avant que ne s’enchainent jusqu’à 3h du matin les manœuvres dans
différents conditions, la conférence de presse multilingue (russe et wolof notamment), l’établissement d’un poste médical avancé, la gestion d’un afflux massif de victimes… Après en moyenne quelques dizaines de minutes de repos, une bonne partie des étudiants étaient déjà « d’attaque » dès 5h pour préparer le premier chantier d’une seconde journée qui sera toute aussi intense. Anticipation et coordination auront permis de mener à bien ce projet sans incident malgré le grand nombre de participants. La réussite, soulignée par les différents responsables
Une révision constante de l’organisation avec tous les acteurs - organisateurs. © Laurent THUEZ
“ L’objectif était de réussir pendant 36h
à enchainer les chantiers en reproduisant des conditions proches du réel d’un séisme. du SDIS 74, du CH d’Annecy ou de l’ARS Rhône Alpes, nous incite aussi à envisager pour le futur des partenariats de plus grande ampleur avec d’autres services publics ou bien d’autres thèmes de manœuvre qui permettraient de travailler par exemple plus spécifiquement le tri en situation de catastrophe ou encore l’approche de la psychiatrie en situation d’exception. n
”
Thomas BIELOKOPYTOFF Cadre de santé, formateur IFSI Annecy Laurent THUEZ, Cadre de santé, formateur IFSI Annecy Jean-Claude CORDEAU, Infirmier en chef SSSM SDIS 74 Commandant Marc SCHMIDLIN, Chef de Centre CSP Annecy
L’exercice en chiffres 36h d’exercice certes mais autour il aura fallu 33h de TD 6 Cours magistraux et 8 audio vidéo cours ainsi que 8 ouvrages acquis sur la thématique 36h sur place avec 96 étudiants infirmiers, 50 pompiers, 6 formateurs, 1 directeur et 1 psychologue, 200 cas cliniques à préparer
36h sur place et pour y arriver 25l de sang artificiel, 45 cas cliniques préparés en 1h pour le premier chantier, jusqu’à 7h d’attente sous un éboulis et des centaines d’heures de sommeil perdues au cumulé 36h sur place et pour s’en souvenir 1 article dans la PQR, 1 autre dans la presse nationale suisse, 2 reportages radios et 1 reportage TV ainsi que 16Go de matériel photos et vidéo récoltés
ActuSoinS 39 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • se former
Serious games : jouer pour se former Intégrer des protocoles de soins sensibles, évaluer la douleur, faciliter la rééducation, dédramatiser des situations... Voilà tous ce que les serious games santé peuvent faire. Mais leur développement coûte cher et les clients pas forcément riches. Certains s’adressent aux soignants.
L
es jeux vidéo sérieux, pédagogiques ou pratiques, doivent depuis plusieurs années se répandre dans le monde de la santé. Pourtant, à part quelques rares exceptions, ils ne sont pas légion. Et ceux qui s’adressent aux infirmières encore plus rares. Leur conception est gourmande en ressources et les clients pas encore convaincus de leur bien fondé.
et une convention de formation professionnelle est fournie, explique Florence Boom. La commercialisation du jeu, qui débute, devrait décoller avec les plans de formation 2014. Mais Audace planche déjà sur deux autres versions, sur le risque infectieux et sur le circuit du médicament pour la fin de l’année.
Pour Florence Boom, chargée de développement commercial à l’agence Audace, les établissements déjà sensibilisés au e-learning sont les plus susceptibles d’être intéressés. Le jeu Florence a été lancé à l’automne par l’agence sur les protocoles autour de la transfusion sanguine. Il vise à
A chaque fois, des professionnels de santé sont consultés aux différentes étapes de la conception. La société Genious a procédé ainsi pour mettre au point EHPAD Panic, un jeu qui vise à aider les aidants professionnels à gérer les situations de crise avec des patients Alzheimer. Il comprend 85 situations différentes autour du refus de soin ou de nourriture, la fugue, l’étouffement, etc. « Il ne s’agit pas de pratiquer des gestes mais d’acquérir les bons réflexes face à des patients déments », explique Laetitia Lacan, chargée de l’ingénierie pédagogique du jeu.
“Les pouvoirs publics perçoivent aussi,
peu à peu, l’intérêt des serious games et soutiennent des appels à projets annuels.
”
améliorer et évaluer le savoir-faire et le savoir-être des infirmières en mode « entraînement » puis « évaluation » : leur score dépend de la pertinence de leurs décisions. Le jeu est éligible aux plans de formation des établissements. La licence du jeu, beaucoup moins chère qu’une formation présentielle (25€ par joueur et par an), peut donc être imputée sur les fonds de la formation continue
Transfusion sanguine
Le score est présenté sous la forme d’une jauge de bien-être du patient, d’une jaune d’efficacité du soignant, d’étoiles bonus et d’un bilan pédagogique et ludique. Le jeu sera commercialisé « pas très cher » dans quelques mois, indique Pierre Foulon le directeur de Genious. L’agence CCCP, de son côté, éditeur pionnier de Ludomédic, commence en avril le développement du Secret de l’amarante, un jeu sur les maladies nosocomiales.
ActuSoinS 40 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • se former
Capture d’écran du Serious Game Florence édité par l’agence Audace
© Audace
Etoiles bonus Les autres jeux sur le marché visent plutôt les patients, avec ou sans soignants, dans les domaines de la rééducation fonctionnelle, de l’éducation thérapeutique, de l’entraînement cognitif et physique ou de la réduction de la douleur pendant les soins... L’interactivité et l’immersion favorise l’information, le sentiment de contrôle mais aussi la compliance des patients, souligne Didier Quentin, président de l’association Game in, qui regroupe les acteurs du jeu vidéo dans le NordPas-de-Calais. Des serious games se développent donc à l’initiative d’associations de patients, de médecins ou d’hô-
pitaux, ajoute-t-il, parfois avec le soutien de laboratoires pharmaceutiques. Les pouvoirs publics perçoivent aussi, peu à peu, l’intérêt des serious games et soutiennent des appels à projets annuels. Selon Florence Boom, « la HAS commence à s’intéresser à l’ingénierie pédagogique du serious game », notamment autour des protocoles au bloc opératoire. L’enjeu du futur proche consistera à convaincre de l’utilité des jeux et... à les rendre accessibles. n
ActuSoinS 41 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Olivia Dujardin
Actusoins • se former
Urgences
intra et extra-hospitalières :
de l’importance de la formation. (Ré)-apprendre les bases du secourisme, pratiquer des gestes simples mais tellement vitaux, préserver ou même sauver une vie grâce à quelques manœuvres classiques… Grâce à la formation continue, les soignants peuvent demander à se former à l’AFGSU de niveau 2, une formation de 21 heures, déjà rendue obligatoire pour les étudiants du nouveau cursus.
ActuSoinS 42 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • se former
Un niveau de connaissance hétérogène « Je sais poser une perfusion, effectuer une prise de sang ou encore aspirer mes patients. En revanche, si l’un d’entre eux devait faisait un arrêt cardiaque devant moi, j’avoue que je serais démunie, surtout si je suis seule à devoir gérer » regrette Carine, 33 ans, infirmière en EHPAD. En France, les gestes secouristes de base et les procédures d’urgence ne sont pas toujours maîtrisés des soignants. « C’est pourtant ce que l’on devrait apprendre en premier » estime Carine, qui s’apprête à suivre l’AFGSU. Pour Franck Paillard, cadre supérieur au CESU 75, la disparité des connaissances en termes d’urgence chez les soignants, viendrait en partie de l’ancienne formation initiale des infirmiers, trop hétérogène selon les instituts de formation. « Certains IFSI demandaient à leurs étudiants de suivre une formation en secourisme avant d’intégrer l’école. D’autres proposaient une formation intégrée en cours de cursus. Mais ce n’était pas généralisé et il était fréquent de
“Il n’y a malheureusement pas d’obligation légale de formation pour les infirmiers en poste. ” voir des étudiants sortir diplômés sans avoir jamais pratiqué ni vu un seul geste ». La faute à la formation initiale, mais aussi, selon Franck Paillard, au manque de remise à niveau et de recyclage régulier des connaissances.
Combler le manque Depuis 2006, les formations aux gestes et aux soins d’urgences (FGSU) peuvent être délivrées aux personnels travaillant dans les établissements sanitaires et médicauxsociaux. L’obtention de l’AFGSU de niveau 2 est même devenue obligatoire pour les étudiants, et ce, dès le deuxième semestre de la première année. « Il n’y a malheureusement pas d’obligation légale pour les infirmiers en poste » explique Franck Paillard. La certification des établissements et la mise en place du DPC incitent fortement les institutions à proposer des formations de ce type. « C’est un réel progrès, même si les encadrants n’ont pas toujours les moyens d’envoyer leurs agents se former pendant 3 jours ».
Au programme de l’AFGSU 2 Les soignants peuvent accéder directement au niveau 2 de l’AFGSU, sans passer par le niveau 1, destiné au personnel administratif. Le programme se compose de notions théoriques, mais surtout de gestes pratiques : gestion d’une hémorragie, identification et prise en charge l’inconscience, de l’obstruction des voies aériennes ou encore réanimation cardio-pulmonaire avec ou sans matériel (chariot, ballon, défibrillateur semi ou entièrement automatique). Les participants apprendront aussi à gérer un accouchement inopiné ou encore un malaise. Ils pourront identifier les signes de gravité d’un traumatisme et utiliser le matériel d’immobilisation adéquat (attelle, collier cervical, brancard…). Cette formation nécessite un recyclage tous les 4 ans, avec une possibilité de se spécialiser dans les risques NRBC (nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques). Certains établissements ne proposent pas systématiquement l’AFGSU dans leur plan de formation interne. Souvent ce sont des enseignements de prise en charge de l’urgence intra-hospitalière, plus courts et moins denses qui sont mis en place. À ce niveau, toute formation reste bonne à prendre. À voir avec les cadres ou sur les catalogues de formation. n Malika Surbled
ActuSoinS 43 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • agenda
CONGRÈS NATIONAL DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D’ÉTUDE ET DE TRAITEMENT DE LA DOULEUR
des douleurs iatrogènes pharmaco-induites, de la place de la kétamine dans les douleurs chroniques, ou de la dimension émotionnelle de la douleur.
DU 13 AU 16 NOVEMBRE 2013 Pour la 13ème édition de son congrès national, la société française d’étude et de traitement de la douleur traitera notamment
Lieu : Paris, CNIT La Défense Informations et inscriptions : http://www.congres-sfetd.fr
JOURNEES BIENTRAITANCE DU 26 AU 27 SEPTEMBRE 2013 Au programme de ces deux journées organisées par l’institut de formation Joël Savatofski, communications, réflexions, échanges d’expériences et ateliers pratiques permettront d’ouvrir de nouvelles perspectives, d’encourager sur d’autres manières de dire, de faire et d’être, sans oublier de prendre soin de soi….pour mieux prendre soin des autres. Lieu : Bordeaux Informations et inscriptions : http://www.ifjs.fr
Vous êtes organisateur et souhaitez voir apparaître votre prochain événement sur l’agenda ActuSoins ? Contactez-nous par mail : agenda@actusoins.com
CONGRÈS DE L’ASSOCIATION FRANÇAISE INFIRMIÈRE DE CHIRURGIE CARDIOVASCULAIRE ET THORACIQUE DU 12 AU 14 JUIN 2013
L’association, qui rassemble les infirmières et infirmiers exerçant une activité de soin et de recherche auprès des malades de chirurgie cardiaque ou thoracique organise son congrès à Marseille. Soins en réanimation post chirurgie cardiaque, prise en charge de la douleur en chirurgie cardio pédiatrique, la collaboration pluridisciplinaire et endoscopie interventionnelle… Des équipes de toutes la France feront partager leurs expériences. Lieu : Marseille, Parc Chanot Informations et inscriptions : www.aficct.org
JOURNÉES NATIONALES D’ÉTUDE ANPDE DU 19 au 21 JUIN 2012
L’association des infirmières puéricultrices organise son congrès annuel. Au programme de ces 38 èmes journées, la prise en charge de l’autisme, l’évolution des modes d’accueil, l’interculturalité dans les soins l’enfant et à sa famille, et un bilan de la réingénierie de la
formation menant au diplôme d’état de puéricultrice. En marge des conférences, plusieurs ateliers sont organisés par l’association. Ils portent notamment sur les responsabilités professionnelles, la place d’un statut libéral pour la spécialité, ou l’évaluation de la douleur de l’enfant en extra-hospitalier. Lieu : Lyon, Espace TÊTE D’OR Informations et inscriptions : www.anpde.asso.fr
ActuSoinS 44 Numéro 9 Mai - Juin 2013
Actusoins • à la une
ANNONCES CLASSÉES
ActuSoinS 46 Numéro 9 Mai - Juin 2013
OFFRES DE FORMATIONS
ActuSoinS 47 Numéro 9 Mai - Juin 2013
OFFRES DE FORMATIONS
ActuSoinS 48 Numéro 9 Mai - Juin 2013
OFFRES D’emploi
ActuSoinS 49 Numéro 9 Mai - Juin 2013
OFFRES D’emploi
ActuSoinS 50 Numéro 9 Mai - Juin 2013