La Feuille Volante

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LA

F EU I L LE

VOLANTE

Bulletin de l’Aéro-Club de Genève - Association régionale genevoise de l’AéCS www.aeroclub-geneve.com

Nouvelle ère...

Numéro 105

15 août 2008


A en perdre le nord! Stockholm 7 x par semaine

Copenhague 14 x par semaine

SAS

SAS

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Oslo 4 x par semaine

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Helsinki 7 x par semaine Finnair

norwegian.no

Plus de 100 destinations au dÊpart de Genève gva.ch


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©Pascal Challande

EDITORIAL

LA COUPE EST PLEINE... Une fois de plus il faut crier pour être peut-être ! - entendu, voire. A toutes les augmentations de taxes diverses infligées aux téméraires qui entendent encore pratiquer l’aviation dans ce pays, il faut ajouter la curieuse saga de l’été à propos du prix de l’essence d’avion. Vous le savez sans doute, il y a un peu plus d’une trentaine d’années, nous faisions tourner nos moteurs avec de l’essence sans plomb d’un indice d’octane 100. Pour des raisons de coût de fabrication, les compagnies pétrolières nous ont infligé l’usage de la 100 LL (low lead), conséquence, il a fallu faire quelques modifications sur nos moteurs, principalement au niveau des soupapes. Curieusement nous n’avons jamais bénéficié du prix favorable qui aurait dû en résulter. L’essence d’avion était toujours environ 50 centimes plus cher que celle de Monsieur tout le monde. A l’avËnement de la sans-plomb pour les voitures, ces mêmes pétroliers ont justifié cet écart par le fait que le volume de l’essence-avion était insuffisant pour couvrir le coût de production. Crise du pétrole, les marchés s’emballent, les prix montent. Curieusement l’écart entre le prix du carburant auto et avion ne reste pas le même, aujourd’hui il est à Genève de 1,34 franc. Un litre d’essence avion : 3,3083 ; un litre d’essence voiture 1,97 (Valeur 30.07.08). (A la Blécherette le prix à la pompe est à 2,90 et ce pour tout le mois de juillet !)

Cherchons l’erreur, nos autorités fédérales plus empressées de faire porter les coûts sur les usagers que d’exercer leur devoir fondamental de surveillance des ententes de toutes sortes entravant la liberté de choix du consommateur, n’ont pas compris ou pas voulu comprendre que cette situation péjore gravement et le développement et la sécurité de l’aviation générale dans notre pays. Faudra-t-il que les aviateurs adoptent les mêmes méthodes que celles des transporteurs routiers voisins, ‡ savoir organiser le blocus des aéroports internationaux du pays, comme le préconisent certains camarades suisse-alémaniques? Chers (I) Responsables, sortez de votre tour d’ivoire, le monde bouge, seule votre paperasse est inerte, elle n’a jamais contribué à résoudre un quelconque problème, seuls les hommes engagés ont fait progresser le schmilblick! Pour une fois, essayez d’écouter les praticiens et donnez un peu de réalité aux discours formulés chaque année à l’occasion de la célébration du 1er Août. Rappelons fermement, une fois de plus, que c’est l’administration qui est au service du citoyen et non l’inverse, puissent ces propos animer vos réflexions estivales ! Michel Favre Président Aéro-club de Genève

Photo de couverture ©Jean-Claude Cailliez: le CAP10 HB-SAW à Prangins, printemps 2008

S O M M A I R E pp.4-5

Une ère nouvelle: clin de photo à la

nouvelle flotte du GVM, Jean-Claude Cailliez pp.6-7 pp. 8-11

Marc Dugerdil 1912, François Dufour effectue le Ier vol au Guatemala et San-Salvador,

Jean-Claude Cailliez pp. 12-14

le saut en parachute féminin, grand succès des années vingt,

Jean-Claude Cailliez


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UNE ÈRE NOUVELLE POUR

©Jean-Claude Cailliez

L’AÉRO-CLUB

©Jean-Claude Cailliez

Une nouvelle génération d’appareils entre en service à l’Aéro-Club de Genève depuis la mi avril 2008 dont deux quadriplaces Diamond DA-40TDI produits en Autriche (HB-SDH, HB-SDX). Exit les tôle rivetées et cadrans à aiguilles, nous passons aux coques en composite et à l'affichage digital. Ils précèdent également deux avions d'écolage biplaces Tecnam P-2002 qui remplaceront des appareils de type "Bravo" conçus il y a 40 ans et qui ont formé des centaines d’élèves pilotes. Les DA-40 et P-2002 seront autant appréciés par les aviateurs que par les riverains de l’aéroport, étant donné qu’ils produisent quelques décibels de moins que leurs prédécesseurs. Vous découvrirez la nouvelle flotte du Groupe de Vol à moteur plus en détail dans la prochaine Feuille volante... Jean-Claude Cailliez

Le HB-SDH à son arrivée, devant "Goldorak", le 16 avril 2008.


©Jean-Claude Cailliez

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©Jean-Claude Cailliez

HB-SDH: cockpit et affichage...

Le HB-SDX à son arrivée le 18 juin qui semble séduire même les rampants alors qu'un Bravo s'éloigne, signe des temps !


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MARC DUGERDIL ©Lauren Egli & Pascal Challande

ensuite pratiqué le vol à voile dès juin 17 mai 2008 Marc Dugerdil, 1936 et jusqu’à un âge avancé au sein du membre de notre Association depuis 1980, groupe de Genève. Par son livre, “Vol silenest décédé dans sa 99ème année. Avec cieux”, dans lequel il nous raconte l’Histoire Marc, un grand pionnier du vol à voile du vol à voile genevois de 1909 à 1980 et les suisse nous a quittés. Président d’honneur, 50 ans de ses souvenirs personnels de 1930 à ancien instructeur de vol et ancien prési1980, il nous a légué une œuvre riche de dent du Groupe de vol à voile de Genève, documents, de souvenirs et d’expériences ancien membre du Conseil de l’Aéro-Club vécues en pratiquant ce beau et exigeant de Genève, initiateur avec d’autres, sport qu’est le vol à voile. Mais écoutons membre fondateur et premier président de l’hommage que Guido Meisser, président de la Fondation de Montricher, Centre de vol Marc Dugerdil lors de la 1ère la Fondation de Montricher, lui a rendu aux à voile, il était, pendant des décennies, Fête de l’amitié à Montricher, en noms de la Fondation et du Groupe Genevois l’une des personnalités les plus en vue septembre 2002 de Vol à Voile par son discours lors des funéparmi les dirigeants des vélivoles genevois railles le 28 mai à Satigny. et a beaucoup marqué le vol à voile en Romandie. Nous lui Manfred R. Kueng devons beaucoup. Marc avait débuté sur “Hängegleiter” au Président Association des vétérans du vol à voile groupe de vol à voile “Les moineaux” de l’EPFZ en 1930 et a

Chère famille, chers Mesdames, Messieurs,

amis,

Au nom du Groupe de vol à voile de Genève et de la Fondation du terrain de vol à voile de Montricher j’aimerais rendre hommage à notre ami Marc, passionné du vol silencieux, qui vient de nous quitter. Habité par la même passion, j’ai fait sa connaissance en l965 lorsque, jeune pilote, j’ai rejoint le groupe de vol à voile de Genève. Déjà à cette époque, toi, Marc tu étais une des figures marquantes de notre club ayant à ton actif de nombreuses années de pratique durant l’époque héroîque de notre sport. Tu avais assumé la présidence du groupe de 1942 à 1958 et pratiqué le monitorat durant plusieurs années. Pouvoir disposer d’un terrain pour pratiquer notre sport était durant de longues années le souci le plus épi-

neux pour les vélivoles de notre région. Dès l’avènement de l’aviation commerciale moderne après la fin de la guerre, l’aéroport de Cointrin ne pouvait plus nous héberger. Au début des années 60, après bien des pérégrinations, notre activité se déroulait à Prangins, terrain que nous devions quitter à son tour en 1965 pour nous exiler à Sion. Cette solution, vu l’éloignement, ne pouvait pas durer ; trouver un endroit plus près de Genève devenait une question de vie ou de mort pour notre groupe. En l964 quelques membres du club découvrirent sur la commune de Montricher cette petite plaine entre deux ruisseaux qui devait devenir plus tard notre centre de vol à voile romand. Le projet était prometteur, mais comme toujours, l’argent manquait. Le 11 septembre 1967, à l’occasion d’une séance traitant de l’avenir de

l’aviation légère à Genève, convoquée par les autorités cantonales et fédérales, toi Marc, redevenu président de notre groupe une année auparavant, tu profitas de l’occasion pour présenter ce projet de Montricher; projet qui fut accueilli d’entrée avec intérêt et bienveillance par ses interlocuteurs. C’était le point de départ d’un long et difficile travail jusqu’à l’aboutissement de notre rêve. Nos amis vélivoles de Lausanne également à la recherche d’un nouveau terrain nous rejoignirent pour mener ce projet en commun. Secondé par quelques membres dévoués des deux clubs, tu as mis toute ton énergie et toute ta ténacité dans la réalisation de cette entreprise. Ton sens de la diplomatie, ta connaissance approfondie du monde rural, ton entregent dans les relations avec les multiples autorités impliquées firent merveille. Avec ton ami vélivole vaudois de longue date, Gontran


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Gourdou, qui s’occupait avec brio des délicates questions financières, vous formiez un duo très efficace. Pour faciliter la création et la gestion future de l’entreprise, les deux groupements constituèrent la “Fondation de Montricher” dont tu assumas par la suite la présidence jusqu’en 1982. Après la réalisation du terrain de Montricher, tu quittas la présidence du groupe mais continuas de profiter, en tant que pilote actif, des nouvelles installations et restas un membre actif. Tu profitas de la quiétude retrouvée pour écrire un livre remarquable portant le titre “Vol silencieux “ dont la lecture trahit toute la passion que tu as éprouvée ta vie durant pour

notre magnifique sport. Très souvent tu mettais ton savoir vélivole à disposition de ton fils Yves, également pilote de planeur émérite, héritier de ta passion, en l’accompagnant lors de concours, de camps de vol à voile ou tout simplement comme copilote. Pour terminer, j’aimerais citer une réponse de ton livre sur la question: Le vol silencieux, pourquoi? “Pour nous, vélivoles, le rêve a toujours été d’imiter les oiseaux que l’on peut admirer sans se lasser, lorsqu’il planent des heures sans effort apparent. Il est beau d’observer les choucas s’amuser follement sur les crêtes de nos montagnes; les rapaces qui tournent inlassablement dans les thermiques;

comme aussi, hôtes royaux, ceux qui hantent les grandes espaces alpins ou de la plaine.“ Cher Marc, tu as profondément marqué la vie aéronautique genevoise par la force de tes engagements et tu laisses un souvenir ému à tous ceux qui ont eu le privilège de te côtoyer et de t’apprécier. C’est avec une grande émotion et un profond sentiment de reconnaissance que nous prenons congé de toi. A toute la famille, nous présentons nos sincères condoléances. 28 mai 2008, ks/gm Guido Meisser, Président de la Fondation de Montricher

AVIS DE RECHERCHE En vue de compléter le site de l’aéro-club, on recherche d’anciens numéros de la

Feuille Volante, soit les numéros 2, 7, 9, 23 et 25, parus entre 1971 et 1978, et les numéros parus entre 1954 et 1971 Contacter Mr Pascal Challande pchallande@bluewin.ch 079 676 39 00


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I ER VOL AU GUATEMALA ET SAN-SALVADOR

FRANÇOIS DURAFOUR

Toute l’équipe de la tournée en Amérique centrale: imprésarios, mécaniciens et François Durafour, assis (mars 1192).

Les Genevois François Durafour et Paul Wyss partent en tournée en Amérique centrale au début de 1912. Là-bas, Wyss casse rapidement son Blériot alors que le succès abreuve Durafour. Il est le 1er pilote à voler au Guatemala et au SanSalvador. Il relie encore les deux nations par la voie des airs. Les Indiens le prennent pour “l’envoyé du diable”. Parti brièvement vers New-York pour trouver des pièces détachées, Durafour y apprend la faillite de la tournée et reste sans un sou!


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Des Milanais enrôlent Durafour pour une tournée en Amérique centrale... François Durafour a passé une année 1911 très intéressante, volant sur l’appareil Dufaux-5 dont il fait la promotion dans les divers meetings de Suisse. Il a engrangé pas moins de Fr 11.000 de prix en cette année (Fr 110.000 actuels). Le dernier meeting de la saison se déroule à Bellinzona, au Tessin, le 11 décembre. Le 22, il fait encore un dernier vol au-dessus de la place militaire de la ville. Remarqué par quelques personnages, il est convoqué à Milan (I) où on lui propose de participer à une tournée aérienne en Amérique centrale. Il y a quelques nobles italiens parmi ces impresarios. Durafour n’est pas insensible à l’idée car le Genevois Edmond Audemars participa avec satisfaction à une tournée similaire dans l’hiver 19101911. Un autre pilote genevois serait du voyage: Paul Wyss (1885-1958). En Suisse on ne revolera pas avant les beaux jours, en avril-mai. L’hiver est là, sans activité aérienneÖ Pour Durafour, ce sera son 1er voyage hors d’Europe, avec traversée de l’Atlantique. Avec quel empressement j’acceptais ce projet, vous pouvez le deviner. Aviateur âgé de 23 ans, un bon bagage derrière moi, je ne pouvais envisager que sous un jour heureux le départ pour le pays des dollars. A Milan, j’essaye l’avion qui m’est confié, un vieux canasson de Deperdussin avec lequel je survole la ville, puis nous embarquons avion, pilote, mécanicien et, naturellement, une bande d’impresarios qui n’avaient jamais posé leur derrière dans une carlingue. On embarque à Anvers (B) en janvier 1912. Le monoplan est emballé dans des caisses avec le Blériot de Wyss. Après 30 jours de mer, le navire accoste à Porto-

Affiches guatémaltèques.

Barios, sur la côte caraibe de la République du Guatemala.

ord ur à b Durafo

ssin. perdu du De

C’est la découverte d’un monde très différent: Le débarquement est retardé par des tas d’ennuis administratifs, nos managers n’ayant pas réglé toutes les factures de la traversée. Ça commen-

ce bien! Durafour, Wyss et leurs volumineux bagages prennent le petit train qui les conduit à 250km de là, à Guatemala City. La capitale est située sur un haut plateau à 2.000m et la voie ferrée repose sur un terrain très accidenté. Soudain, alors que le tortillard parvient au sommet d’une colline, je vois une nuée d’Indiens se précipiter à sa rencontre. Cette invasion me rend un peu inquiet et je crois un instant à une attaque du train! Or, ces indigènes sont en réalité chargés de serrer les freins du convoi pour la descente! Et au bas de la pente, ils disparaissent comme par enchantement. La scène se reproduit plus loin, avec une autre tribu! Le 1er à voler au Guatemala et “l’envoyé du diable” des autochtones A la capitale, Durafour et Wyss installent un camp de toile pour les avions audessus de Campo de Marte (Champ de mars): ìJe suis reçu là-bas très chaleureusement. Un hangar de fortune, sur lequel flotte le fanion du Club Suisse d’Aviation, abrite le Deperdussin. Le drapeau guatémaltèque tient compagnie à celui de l’AéroClub genevois. Les mesures de sécurité sont draconiennes en prévision des vols à venir: La place de président de ce pays doit être particulièrement intéressante quand on pense à l’acharnement que mettent quelquesuns à l’obtenir! A ce point que la méfiance générale règne partout. Vous auriez dû voir comment on fouille notre caisse contenant les hélices de rechange: elle est vidée jusqu’au fond, inspectée, passée au crible. Et pourquoi tant de précautions? Pour voir si quelque bombe n’y est pas cachée! Et n’oubliez pas, défense de survoler la ville et le palais présidentiel principalement!î Le bombardement aérien n’a pourtant pas


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Durafour et le Deperdussin au San-Salvador

encore été inventé, mais une chute de l’appareil est toujours possible. L’affiche de ce 1er vol d’un aéroplane au Guatemala annonce l’événement pour bientôt: Vuelos en aeroplanos, Primer dia de Aviacion, Domingo 24 de Marzo de 1912, Dos exhibiciones, la prima vez Colosal Acontecimiento! Cientifico, Sensacional ”. Une autre cite encore les auspicios del illustre Presidente de la Republica Don Manuel Estrada Cabrera F. Durafour y Paul Wyss Precie de entrada a la Exhibicion $5 billetes. Precio entrada, 18 Pesos Billetes.

Sans aucun problème, Durafour exécute ce jour-là un vol sans histoire dont la seule difficulté tient à l’altitude de la ville. Pour les indigènes guatémaltèques, l’événement est tout autre. Ils scrutent le ciel avec une intense curiosité teintée d’effroi. A l’horizon du Champ de Mars, suspendu dans le vide, un gros point noir vient d’apparaître. Une longue clameur s’échappe de la foule: Aqui esta! la plancha que vuela con una mariposa en la punta! (c’est la planche qui vole avec un papillon au bout!). Pour la 1ère fois un avion traverse le ciel du pays avec un bruit alors inconnu. Du coup, les Indiens impressionnés baptisent

Affiches du San-Salvador

Durafour “L’envoyé du diable”! Suite à ce vol, Durafour reçoit médailles, prix, diplômes et coupes. Paul Wyss n’a pas le même bonheur car il casse son Blériot sous-motorisé au 1er décollage. La foule aura vu les 2 aspects de l’aviation d’alors le même jour. Quant à Wyss, sans appareil de rechange, sa tournée prend fin et il doit retourner en Europe! D’autres vols auront lieu sur la ville, durant lesquels Durafour fait fi des prescriptions. Ebahis, un beau matin, gardes et employés voient le Deperdussin accomplir de magnifiques virages au-dessus du palais de leur président. Vous allez être emprisonné, jugé et puni. Vous avez commis un crime… , disent les personnalités accueillant Durafour à l’atterrissage. Chacun se demande comment le tout puissant président prendra la chose. Or, l’après-midi du 13 avril, alors que Durafour se repose, on frappe à la porte. Un garçon apparaît, donnant le passage à un personnage extraordinairement chamarré, un grand sourire aux lèvres et tenant une enveloppe à la main. Pour vous Senõr, dit l’officier en tendant l’enveloppe. Inutile de préciser que devant ce personnage Durafour ne fait qu’un bond hors du lit, prêt à se défendre, car il pense bien que cette visite a trait à son survol présidentiel.

Durafour à bord du Deperdussin


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Or la lettre mentionne: Très honoré ami. Je tiens à vous saluer ici avec un immense plaisir et à joindre cette petite récompense pour tous vos exploits d’aviateur, en souvenir de ce pays, de tous vos triomphes, de votre prodigieuse carrière, et en marque d’estime de votre serviteur fidèle et attentif, Estrada Cabrera. La modique récompense consiste en 1.000 dollars, et en 1912 c’est une petite fortune (Fr 50.000 actuels). Le lendemain, Durafour se hâte de remercier le président qui le reçoit les bras ouverts. Mais ô surprise, tandis qu’ils échangent leurs impressions, quelque chose intrigue Durafour: une sorte de camisole semble dépasser du col, de couleur gris fer. Le président porte une cotte de mailles!

Le 1er à rejoindre les deux nations par les airs et à voler au San-Salvador La tournée de Durafour au Guatemala a été triomphale, d’autant plus acclamé qu’il est le 1er homme qui se soit risqué dans les cieux de cette République. Il remporte la reconnaissance et l’admiration de tous dont celle du président. Les impresarios ont donc organisé la prochaine étape avec leur seul pilote rescapé et son unique appareil: rejoindre le SanSalvador voisin, au sud, puis démonstrations dans la capitale. C’est le 2 mai que Durafour quitte Guatemala-City pour un vol de 185km à destination de San-Salvador, la capitale du San-Salvador, tracté par son moteur rotatif Gnôme de 50cv. C’est à nouveau une première sur ces contrées. La 1ère démonstration de vol officiel se tient le 5 mai sur un second Campo de Marte, aujourd’hui un parc pour enfants. On cite un autre vol le 21 du mois et il y en a peut-être eu d’autres entre deux. L’expérience de ces vols en pays tropicaux est fort intéressante aux yeux de Durafour. Il étudie le comportement de l’avion sous ce climat, tire des conséquences de ses essais, expérimente le matériel traditionnel, toutes observations qu’il consigne et qui seront très utiles pour des constructeurs. Pour l’instant il constate que le matériel souffre du climat extrêmement chaud. Il faut songer à des pièces de rechange mais il n’a en a pas en Amérique centrale. C’est alors qu’on envoie Durafour les acheter à New-York.

Fin de la tournée, mais de façon inattendue! Je m’embarque sur un bâtiment destiné au transport de bananes! Après avoir traversé le Golfe du Mexique, remonté le Mississippi, visité la Nouvelle Orléans, j’arrive à New-York où j’attrape le torticolis à force de lever la tête pour admirer les gratte-ciel! Là un incident. Un matin, le portier m’apporte un télégramme. Bon, me dis-je, un ordre d’acheter une nouvelle pièce. Je l’ouvre: “Entreprise ruinée par manager - stop - rentrez en Europe par propres moyens – stop. Salutations.” Et il ne me restait pas un sou!

Mais Durafour n’est pas homme à se lamenter, il va trouver divers boulots de pilote, parfois dangereux, pour se payer le bateau vers l’Europe. Les journaux new-yorkais ont flatté en grand ses exploits précédents et, fort de sa célébrité, il se présente à une usine d’aviation où on l’engage immédiatement. Il sera de retour à Genève à la fin août. On n’oubliera pas Durafour au Guatemala et 50 ans plus tard, il y est de retour, fêté et décoré en tant que 1er aviateur à avoir volé en Amérique centrale. Jean-Claude Cailliez


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LE SAUT EN PARA CHUTE FEMININ

GRAND SUCCES DES ANNEES VINGT Bien que le parachute ait été pratiqué depuis 1797 par Garnerin en France, l’introduction dans les armées (aérostiers), puis dans le monde civil (voltige aérienne) est relativement tardive. En Suisse, le parachute est à la mode dès 1920, les premiers sauts de femmes attirent le public lors de meetings aériens. A Genève, c’est en 1921 que l’on voit les premières corolles s’ouvrir sur Cointrin, elles sont bien sûr aussi étonnamment féminines!

Une attraction foraine qui finira par sauver des vies

En Suisse, il nous reste une 1ère trace anecdotique, celle du célèbre Genevois J.D.Colladon (1802-1893)

qui, déjà en 1844, s’amusait à faire monter un panier de fleurs et de fruits via la corde de retenue de son cerfvolant. Muni d’un parachute, le panier se détachait pour atterrir doucement dans le voisinage, à l’intention de celle qu’il voulait épater du côté de Cologny. Plus tard en 1911, le Fribourgeois Wullième de Salavaux expérimenta un parachute de sa construction sur le lac de Pérolles, dont on ignore le devenir.

La parachutiste britannique Sylvia Boyden va s’embarquer sur un Avro 504 pour sauter au-dessus Cointrin devant des milliers de spectateurs lors d’un meeting du printemps 1921.

Longtemps une attraction de spectacle forain, le parachute est d’abord imposé aux aérostiers militaires en 1917, durant la 1ère Guerre mondiale, pour l’évacuation rapide des ballons captifs d’observation baptisés ìsaucissesî. En juillet 1920, le tout nouvel Office Fédéral de l’Air l’impose lors de vols acrobatiques en avion. Il n’y a que 5 avions dits de sport immatriculés alors! Le parachute pénètre ainsi le


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monde privé de l’air et les expériences se multiplient. Le modèle Puppe de M. Pochon (Suisse) est ainsi testé durant l’été avec satisfaction. Le 10 avril 1921, le pilote Marcel Nappez (né en 1896) réalise à Genève son 1er saut en parachute, sautant de 400m. La corolle ne s’ouvre qu’à 100m de haut et il finit sa course dans un arbre! Quelques jours plus tard un saut avec un Puppe se déroule avec satisfaction. Est-ce la trace du premier saut genevois? A la fin de l’année 1921, les parachutistes suisses, futurs célébrités de meetings, sont très actifs: Plinio Romaneschi (1890-1950), B. Garavaglia; puis plus tard Ernst B¸ser (1895-1928) ou Rudolf Boehlen (1898-1953). Mais en ce printemps de 1921, ce sont deux Britanniques qui vont attirer et étonner les Genevois à Cointrin. Les meetings Cointrin en 1921

aériens

de

Un Britannique va sauter sur Genève en avril 1921, le major Thomas H. Orde-Lees (1877-1958). Avant cela, il fit partie, comme ingénieur-

mécanicien, de la fameuse expédition transarctique de Shackleton et, pendant la guerre, s’est spécialisé dans les essais de parachutes. Son appareil, en soie japonaise, possède une corolle formée de bandes bleues, rouges et blanches et pèse 14kg. Il l’a baptisé son ìAnge gardienî. Cet appareil fut inventé par un ingénieur des chemins de fer anglais, E.R.Galthrop. Son 1er essai, il l’a réalisé en septembre 1917 dans la région d’Arras. Son saut le plus haut a été réalisé de 1.500m et le plus bas de 47m du haut du Tower Bridge à Londres: Plus on part de haut et

moins on court de risques! dit-il. Ainsi, avec son plongeon à GenèveCointrin le dimanche 17 avril et à Lausanne (devant 15 à 20.000 personnes) le même mois, Orde-Lees réalisera ses 69ème et 70ème sauts. Comment saute t-on alors? Parvenu en avion à l’altitude voulue, on en sort en se précipitant la tête la première vers la terre, car lorsque l’on se laisse tomber debout, on éprouve régulièrement la désagréable sensation du mal de mer. Le parachute est attaché à l’avion par une sangle,


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sol, les Genevois observent avec étonnement le major Orde-Lees aidant la jeune Miss Sylvia Boyden à s’équiper d’un parachute. Leur avion s’apprête à décoller mais subit alors une grave panne de moteur (soupapes) et doit rentrer au hangar. Un troisième appareil, doit être préparé (bougies, essence, huile), un Avro-504 de 80cv (CH39), puis Miss Boyden y transfère son équipement. Pour faire patienter le public, qui est déjà monté trois fois à Cointrin cette année-là et qui en veut, Johner reprend l’air avec le Hanriot-Nieuport et refait une belle démonstration d’acrobatie aérienne très applaudie. De retour au sol il passe rapidement dans l’avion où l’attend la parachutiste et ils décollent enfin!

s’ouvre et se déploie pendant les premières secondes de chute; dès lors il descend à la vitesse de 5 mètres par seconde; portant son parachutiste à 15 m au-dessous de lui, il vient le poser doucement sur le sol: Le parachute est le canot de sauvetage des navigateurs de l’air. Pendant la guerre, plus de 200 aviateurs ont perdu la vie en sautant ou tombant de leur appareil en feu ou désemparé. Combien auraient été sauvés par ce moyen! Lors du meeting de Cointrin le dimanche 17 avril 1921, Orde-Lees sautera au milieu d’une giboulée de neige! Parmi les autres événements du meeting, Emile Johner (1895-1922), chef-pilote de l’Ecole Aéro de Lausanne ne peut effectuer des acrobaties sur son Avro 504K à moteur Le Rhône 110cv (immatriculé CH10) à cause de cette neige. Quant à l’Anglais Piercey, parti peu avant, il effectue les siennes sur un Martynside F.4 (GEAWE). Le public genevois devra être encore patient pour voir sauter une femme.

Miss Boyden M.Pethoud

entre

sa

fille

La Britannique Sylvia Boyden va faire une tournée d’été en Suisse. Elle possède déjà une ìgrandeî expérience avec une vingtaine de sauts à son actif. Lorsqu’un second meeting similaire de remplacement, toujours organisé par l’Ecole Aéro de Lausanne, est prévu le dimanche 24 avril à Cointrin, il doit être hélas reporté à cause des mauvaises conditions atmosphériques qui règnent tôt le matin. Les deux parachutistes Orde-Lees et Sylvia Boyden rentrent donc en Angleterre. Ils apprennent dans l’après-midi qu’il fait finalement un temps radieux à Genève et que 12.000 personnes sont présentes, malgré l’annonce de l’annulation du meeting! Cette manifestation va donc être à nouveau reportée au 5 mai, avec la participation des mêmes parachutistes anglais. Les Genevois verront-ils enfin le saut de Miss Sylvia Boyden s’élançant d’un avion?

Arrivé à 400m d’altitude, l’intrépide sportive enjambe le fuselage et se lance dans le vide. En quelques mètres son parachute rouge se déploie et en planant s’approche lentement du sol. Les Genevois sont ébahis devant ce trop court saut de Miss Boyden qui en a moins de 25 à son actif! Les honneurs à l’arrivée sont à la mesure de l’exploit! Puis vient aussitôt le tour du major Orde Lees qui s’équipe et s’attache à l’Avro. Le ciel se charge de nuages et quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Ce saut aura-til lieu? Orde-Lees va malgré tout réaliser là un magnifique saut depuis une altitude de 500m. Quelque 35 secondes après, se balançant au-dessus de Cointrin, il rejoint le sol sans difficultés et le meeting se termine ainsi sous les gouttes. Dans un monde de l’air réservé aux hommes, souvent anciens militaires ou pilotes de réserve, la présence d’une femme est alors rare et en fait une sorte de gracieuse ìbête curieuseî en pantalons. Il faut bien un début à tout. Dans les jours qui suivront Miss Boyden fera une tournée dans la région. Elle effectuera des sauts à Lausanne (15 mai), Berne (le 22), Planeyse (le 29), Dübendorf (26 juin), Bex (14 août), Annecy (21 août) où elle réalisera son 32ème saut. Les Genevois n’auront pas regretté leurs trois déplacements vers Cointrin en 1921; ils ont enfin vu l’impensable: une femme sautant d’un avion en vol!

Une femme anglaise sous une corolle rouge épate les Genevois Ce jeudi, la foule est moins importante que le 17 avril à cause d’un temps toujours incertain. Johner démontre enfin ses capacités de voltige aérienne sur un petit biplan Hanriot-Nieuport de 110cv (CH11). Au

et

Orde Lees préparant sa démonstration de saut.

Jean-Claude Cailliez


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Parachutisme Christine Simon le Malpas, F-74270 Chaumont; 033 450 44 78 93

L’AÉRO-CLUB

Correspondance Aéro-Club de Genève Section genevoise de l’AéCS Case Postale 94, 1215 Genève 15

Président Michel Favre téléphone: (022) 819 08 00

Secrétaire Sylvia Roseren sylvia.roseren@bluewin.ch

w wL w’ .A a e Ér o Rc l O u b - -g C e n eLv U e . cBo m LA FEUILLE VOLANTE Bulletin de l’Aéro-Club de Genève (association régionale genevoise de l’Aéro-Club de Suisse) Paraît 4 fois par an, les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre

Rédaction et mise en page: Juliane Bourgeois; tél. : 079 634 49 68 j.bourgeois@aeroclub-geneve.com

Ligne graphique : Céline Mahler

Impression :Imprimerie Appi Tirage 1000 exemplaires


PERFORMANCES. PRESTIGE. PASSION D’INNOVER. Un bel avion, c’est un avion qui vole bien. Chez BREITLING, nous partageons la même philosophie. Notre vocation: construire des montres-instruments ultraperformantes pour les professionnels les plus exigeants. Nos chronographes répondent aux plus hauts critères de robustesse et de fonctionnalité, et nous soumettons tous nos mouvements aux tests impitoyables du Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres. On ne devient pas le fournisseur attitré de l’aviation par hasard. www.breitling.com

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