LA REVUE DU GAZ NATUREL, DU BIOMÉTHANE, DU BUTANE ET DU PROPANE ÉDITÉE PAR L’ASSOCIATION FRANÇAISE DU GAZ WWW.AFGAZ.FR
N°4 2016 / OCTOBRE-DÉCEMBRE
DOSSIER
LES NOUVEAUX MARCHÉS GAZIERS ENTRETIEN
PUBLICATION
MAROŠ ŠEFČOVIČ VICE-PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE EN CHARGE DE L’UNION DE L’ÉNERGIE
LE LIVRE BLANC DE L’AFG
REVUE TRIMESTRIELLE DE L’AFG / ABONNEMENT ANNUEL : 120 EUROS TTC
ÉDITO REVUE TRIMESTRIELLE ÉDITÉE PAR : AFG, Association française du gaz 8, rue de l’Hôtel de Ville - 92200 Neuilly-sur-Seine www.afgaz.fr Code Siret : 784854820 00023 Code APE/NAF : 9412Z Président : ����������������������������������������Jérôme Ferrier Vice-présidents : ��������������Fernando Herrera Castro ����������������������������������������������������������� Patrick Corbin Trésorier : ����������������������������������������� Joël Pedessac Délégué général : �����������������������Georges Bouchard Directeur de la publication : ������Georges Bouchard Rédactrice en chef : ��������������������� Madeleine Lafon Email : ����������������������������madeleine.lafon@afgaz.fr Rédactrice en chef adjointe : ����������������� Laura Icart Email : ������������������������������������� laura.icart@afgaz.fr ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Création et maquette : Eric Leuliet pour Pension-complète. Relecture : Pomme Larmoyer. Rédaction : Laura Icart ; Emmanuel Grand (FTI Consulting) et Jean Terrier (GRDF). Les opinions formulées dans les articles de Gaz d’aujourd’hui sont celles de leurs auteurs. Elles n’engagent en rien la responsabilité de l’AFG. © Couverture : Engie ADMINISTRATION DES ABONNEMENTS : AFG Tél. : +33 (0)1 80 21 08 00 Fax : +33 (0)1 80 21 07 96 E-mail : lorene.concordia@afgaz.fr Prix au numéro : 33 euros TTC Abonnement annuel France : 120 euros TTC Abonnement annuel étranger : 120 euros TTC Bulletin d’abonnement : p. 25 RÉGIE PUBLICITAIRE : FRANCE EDITION MULTIMÉDIA 70, avenue Alfred Kastler CS 90014 – 66028 Perpignan cedex sdachez@francedit.com IMPRIMÉE PAR : PURE IMPRESSION™ 451 rue de la Mourre - ZAC Fréjorgues Est 34130 Mauguio (France) Tél. : +33 (0)4 67 15 66 00 Impression et dépôt légal : Octobre 2016 - N° 4 - XXXXXXXX LISTE DES ANNONCEURS FSTT ����������������������������������������������� 2e de couverture AFG ������������������������������������������������� 3e de couverture Congrès du gaz ������������������������������� 4e de couverture Gazomat ��������������������������������������������������������������p. 2 Diehl Metering ����������������������������������������������������p. 2 WLPG Forum & AEGPL Congress ����������������������p. 49
Nous avions commencé l’année 2016 en Afrique, nous la terminons avec les autres continents, ces nouveaux pays, ces nouveaux marchés où le gaz est une ressource abondante et où de nouvelles perspectives s’ouvrent : exploration, production, exportation… Maroš Šefcovic, vice-président de la Commission européenne responsable de l’Union de l’énergie nous a accordé un entretien dans lequel il revient sur les grands enjeux gaziers au sein de l’Union européenne : de l’Union de l’énergie à la stratégie de la Commission sur le GNL, de la ratification © AFG de l’accord de Paris aux prémices d’une diplomatie européenne de l’énergie, nombreux sont les sujets stratégiques évoqués par le commissaire européen. Notre dossier est consacré, vous l’aurez compris, aux nouveaux marchés gaziers. À ces pays, ces régions du monde qui, en quelques années, ont vu leur potentiel gazier croître de manière exponentielle : nouveaux gisements, nouveaux gaz, nouvelles techniques et un marché du GNL en augmentation constante qui laissent présager de belles perspectives de développement dans les années à venir. Gaz d’aujourd’hui revient sur le boom gazier que connaissent actuellement les États-Unis et l’Australie, portés par une hausse de leur production et par l’avènement du GNL mais aussi sur le potentiel gazier en Amérique du Sud qui ne demande qu’à être développé, sans oublier celui de la Méditerranée où demain de grands gisements seront découverts. Ce tour du monde équilibre bien l’intense activité nationale de notre association en cet automne, avec la diffusion de notre livre blanc, l’élaboration de notre scénario 2030 et la publication de notre rapport sur les perspectives du GNL carburant maritime et fluviale. Je vous souhaite une bonne lecture et de belles fêtes de fin d’année.
Georges Bouchard Directeur de la publication
LE PROCHAIN NUMÉRO SORTIRA EN JANVIER 2017
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Gaz d’aujourd’hui • n 4-2016 • 1
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SOMMAIRE
Octobre - décembre - n° 4/2016 La revue du gaz naturel, du biométhane, du butane et du propane
ENTRETIEN
DOSSIER
MAROŠ ŠEFČOVIČ
Vice-président de la Commission européenne en charge de l’Union de l’énergie p. 4
INFRASTRUCTURES Brèves
p. 22
Dunkerque, ça c’est fait !
p. 23
Interconnexions : la France au cœur du réseau européen p. 24 Brèves de chantier
ÉCONOMIE ET FOURNITURE
p. 26
Brèves
p. 28
Tribune libre ⎥ Jeremy Bentham, Shell
p. 29
UTILISATIONS ET MARCHÉS Brèves
p. 32
2016 : cette année-là !
p. 33
Le rooftop adiabatique : une solution innovante pour chauffer et rafraîchir les locaux de grand volume p. 34 Plein gaz pour le GNL carburant
p. 36
Les nouveaux marchés gaziers
p. 10
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT Brèves
p. 38
Haro sur les fuites de méthane
p. 39
Quel sera l’impact du Brexit sur le secteur gazier ?
p. 40
Accord global, réponse mondiale !
p. 42
En route pour la COP22
p. 43
BUTANE ET PROPANE Brèves
p. 44
Les food trucks carburent au gaz
p. 45
Interview : Steven Sels, Primagaz
p. 46
VIE DE L’AFG Brèves
p. 48
Plein phare sur la mobilité gaz
p. 50
Un livre blanc pour un futur plus vert
p. 53
Former des générations de gaziers
p. 55
Normalisation
p. 56
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ENTRETIEN
MAROŠ ŠEFČOVIČ Vice-président de la Commission européenne en charge de l’Union de l’énergie
« Améliorer la coordination régionale dans l’UE est absolument crucial, non seulement pour gérer les crises, mais aussi pour l’équilibre général de nos différentes régions » L’accord de Paris a été adopté lors de la COP21. L’Union européenne, troisième émetteur de gaz à effet de serre (GES) au monde, a pris des engagements très forts : réduire de 40 % ses émissions d’ici à 2030, atteindre un niveau de 27 % d’économies d’énergie et une part d’énergies renouvelables à 27 %. Comment comptez-vous y parvenir ? Comment allez-vous gérer le risque de délocalisation d’industries qui sont de grosses émettrices de GES ainsi que les objectifs qui ne sont pas répartis quantitativement par pays ? L’accord de Paris comprend des règles solides sur la transparence et la responsabilité des États à veiller à ce que leurs engagements soient respectés ainsi que sur la possibilité de pouvoir quantifier la réduction de leurs émissions. J’insiste sur le fait qu’une réduction absolue des émissions mondiales est nécessaire pour atteindre l’objectif des 2 degrés et prétendre à aller au-delà. L’UE a pris des engagements forts et elle
Quid du Brexit ? Interrogé sur les conséquences du Brexit, Maroš Šefcovic n’a pas souhaité s’exprimer sur ce sujet, se référant à l’article 50 du traité sur l’Union européenne définissant la procédure à suivre si un État membre décide de quitter l’Union. Il a tout de même précisé que si « l’UE était prête à lancer les négociations rapidement avec le Royaume-Uni en ce qui concerne les termes et conditions de son retrait, tant que ce processus n’est pas terminé le Royaume-Uni reste un membre de l’Union européenne, avec tous les droits et obligations qui en découlent. »
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est sur la bonne voie pour réaliser l’ensemble de ses objectifs climatiques d’ici à 20201. Nous avons également convenu d’un plan ambitieux visant à réduire nos émissions d’au moins 40 % d’ici à 2030. Il me semble important de souligner que les réductions d’émissions actuelles enregistrées n’ont pas été atteintes au détriment de la croissance économique. À titre d’exemple, en 2010, nos estimations avaient suggéré que les émissions de l’UE-15 seraient de 10,7 % en dessous du niveau de 1990. La même année, les émissions de l’UE27 étaient d’environ 15,5 % en dessous du niveau de 1990, alors que dans la période allant de 1990 à 2010 le PIB a progressé de + 39 % au sein de l’UE-15 et de + 41 % au sein de l’UE-27. Cela montre que l’UE, tout en étant un leader ambitieux dans la lutte mondiale contre le changement climatique, a connu tout de même une croissance importante depuis 1990. Concernant le risque de délocalisation des grandes industries émettrices, c’est un facteur important que nous avons certainement pris en considération. C’est une des raisons pour lesquelles il était si important d’avoir l’accord de Paris. Celui-ci est sensiblement différent de son prédécesseur l’accord de Kyoto parce qu’il représente un véritable accord mondial. En décembre 2015, 195 pays ont signé cet accord qui fixe une ambition forte pour l’ensemble des signataires et fournit un cadre transparent pour la mise en œuvre et l’évaluation de l’inventaire, tout en gérant les impacts du changement climatique dans les pays où ils sont déjà clairement visibles. L’accord de Paris signifie à nos yeux qu’une grande majorité des États de ce monde ont pris conscience de l’enjeu et de la nécessité de travailler ensemble. C’est pour cela que nous sommes convaincus que chaque pays agira pour préserver notre planète.
ENTRETIEN
MAROŠ ŠEFČOVIČ Maroš Šefcovicč est un diplomate slovaque. Depuis le 1er novembre 2014, il est vice-président de la Commission européenne en charge de l’Union de l’énergie. À ce titre, il dirige l’équipe du projet « Union de l’énergie » au sein de la Commission, composée de 14 commissaires. GPLil a été élu en 2014 membre du Auparavant, Parlement européen. De 2010 à 2014, viceprésident de la Commission européenne en charge des relations interinstitutionnelles et de l’administration, il était précédemment entre 2009 et 2010 commissaire européen à l’éducation, la formation, la culture et la jeunesse. De 2004 à 2009, il était enfin le représentant permanent de la République slovaque auprès l’Union européenne.
© CE
Le 22 avril, à la tribune de l’ONU, François Hollande a incité l’Union européenne à « donner l’exemple » en ratifiant le texte avant la fin de l’année. Quel est le processus que doit mener l’UE pour la mise en œuvre de l’accord de Paris ? Des bruits courent que des États membres pourraient s’y opposer. Qu’en est-il ? Comme le président français l’a justement souligné, l’UE et ses États membres doivent donner l’exemple, surtout que nous avons été les premiers à présenter nos engagements ambitieux pour la COP21. Notre intention et notre volonté c’est que l’UE et ses États membres ratifient l’accord de Paris. En ce qui concerne l’Union européenne, le processus de ratification impliquera un vote à la majorité qualifiée au Conseil de l’UE et un vote positif du Parlement européen. Pour ce qui est des États membres, les processus de ratification sont différents d’un pays à l’autre, ce qui signifie qu’il faudra un certain temps pour qu’ils ratifient tous l’accord de Paris. Néanmoins, en mars dernier, les chefs d’États et de gouvernements ont convenu de tout mettre en œuvre pour le ratifier le plus tôt possible. La Commission poursuit son agenda et nous prévoyons de proposer une révision de la décision partage des efforts [législation européenne fixant des objectifs de réduction d’émissions de GES à chaque État membre en fonction de son poids économique, NDLR] d’ici l’été 2016. La révision est un processus nécessaire qui prendra en compte les
résultats de la réunion du Conseil européen d’octobre 2014, où les dirigeants européens ont exprimé leur souhait de poursuivre l’approche choisie dans le cadre de la décision relative à l’effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions pour la période 2021-2030, dans le but de réduire les émissions dans les secteurs non-ETS d’ici 2030 de 30 % par rapport à 2005 et de répondre à l’objectif global de réduction de 40 % en 2030 par rapport à 1990. La Commission a déjà procédé à une consultation sur la révision de la décision. Nous sommes actuellement en train de mener une étude d’impact sur le sujet. [Un an après le sommet de la COP21, le Parlement européen a approuvé, mardi 4 octobre, l’accord de Paris. Celui-ci a approuvé la ratification du texte à une très large majorité (610 voix pour, 38 contre), NDLR.] Quelle forme, notamment juridique, peut prendre l’Union de l’énergie quand il s’agit d’harmoniser les politiques énergétiques des États membres qui, d’après les traités, sont libres de choisir leur mix énergétique ? L’Union de l’énergie est un cadre qui permet à l’UE d’utiliser à la fois les mesures législatives et non législatives pour s’assurer que l’Union européenne a un marché de l’énergie sûr, abordable et respectueux des enjeux climatiques. Ses cinq piliers - la sécurité d’approvisionnement, l’intégration complète du marché intérieur de l’énergie,
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ENTRETIEN
« Nous avons montré notre capacité à parler d’une seule voix avec l’accord de Paris et nous allons continuer sur cette voie pour poursuivre les négociations sur le climat. » l’efficacité énergétique, l’action climatique et le soutien de la recherche et de l’innovation - sont conçus pour soutenir mutuellement les domaines d’action qui peuvent être mis en œuvre au travers de mesures législatives et réglementaires. En outre, l’Union de l’énergie ne vise pas à restreindre le droit des États membres à choisir leur mix énergétique mais plutôt à mettre à disposition des États un marché européen plus efficace et compétitif, leur permettant d’obtenir une plus grande diversification des approvisionnements en gaz et en électricité, tout en favorisant grandement les sources alternatives d’énergie provenant des énergies renouvelables. Le choix des mesures est déterminé par la priorité des enjeux poursuivis. Ainsi, alors que dans le paquet énergétique présenté en février dernier, nous avions seulement proposé la révision d’un règlement et la décision des accords intergouvernementaux, la Commission a cherché à fournir des réponses globales à des problèmes et à des dysfonctionnements du marché intérieur de l’énergie en proposant des stratégies avec des instruments non contraignants (stratégie pour la chaleur et le froid ou encore celle pour le GNL). La Commission estime que ces stratégies, en dépit de leur caractère non législatif, sont de bons outils pour débuter les discussions sur ces enjeux. En mai 2015, la Commission européenne avait présenté « une stratégie européenne pour la sécurité énergétique ». En février 2016, elle a dévoilé une série de propositions pour renforcer la sécurité énergétique de l’UE. Or les simulations de l’Entsog [association réunissant les opérateurs de transport de gaz européens, NDLR] montrent que les États membres sont dans des situations très différentes en matière de sécurité d’approvisionnement en gaz : certains sont dans une situation assez confortable, d’autres, plus fragile. Comment gérer cette grande diversité de situations par une politique unique ? Depuis les crises de gaz des hivers 2006 et 2009, des progrès significatifs ont été accomplis sur de nombreux fronts pour atténuer le risque d’éventuelles futures crises d’approvisionnement en gaz. Aujourd’hui, les États membres sont beaucoup mieux équipés pour y faire face. Les sys-
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tèmes énergétiques sont très interconnectés et le meilleur fonctionnement du marché intérieur de l’énergie a permis l’établissement de règles pour renforcer la coopération régionale et éviter les congestions transfrontalières ; de nouvelles options d’inversion des flux ont ainsi été créées. En outre, grâce au règlement sur la sécurité d’approvisionnement en gaz, tous les États membres ont maintenant des plans d’action préventive et des plans d’urgence pour faire face aux crises. Tous les États membres ont également fait en sorte que l’approvisionnement en gaz soit garanti aux ménages et aux autres clients protégés pendant une certaine période de temps, même dans le cas de dysfonctionnements de la principale infrastructure de gaz dans le pays. Néanmoins, l’expérience acquise avec la mise en œuvre de ces mesures a prouvé que la situation actuelle est encore insuffisante. Comme le démontrent les stress tests réalisés par l’Entsog en 2014, les politiques nationales ne prennent pas suffisamment en compte les situations observées dans les pays voisins. Il y a aussi de graves lacunes dans la prise en compte des risques externes qui comprend le manque d’accès à l’information sur les contrats d’approvisionnement en gaz commerciaux. Par conséquent, il est parfois difficile de procéder à une évaluation des risques et à des mesures de prévention efficaces afin de permettre une réaction rapide des acteurs du marché et des organismes publics pour répondre à l’éventualité d’une crise. C’est la principale raison qui a conduit la Commission à proposer une nouvelle réglementation en matière de sécurité d’approvisionnement lors de la présentation du paquet énergétique en février dernier. Ce projet de règlement introduirait un principe de solidarité selon lequel, en dernier recours, les États membres voisins contribueront à assurer l’approvisionnement en gaz des ménages et des services de première nécessité (services en charge de la santé et de la sécurité), dans le cas d’une crise grave. Nous souhaitons également que ce règlement impose à tous les États membres un modèle standardisé et obligatoire lorsqu’ils procèdent à l’évaluation des risques ou dans l’élaboration des plans d’urgence. Il nous semble nécessaire d’assurer une meilleure coordination entre les États membres - y compris en procédant à une évaluation plus précise des risques communs et des possibles simultanéités entre les crises - et de pouvoir quantifier les ressources disponibles afin de proposer des réponses adap-
ENTRETIEN
tées si une telle situation se produisait. L’amélioration de la coopération avec nos voisins, et particulièrement les pays qui composent la Communauté de l’énergie2, devrait être intégrée pour assurer une prévention et une gestion des crises gazières plus efficaces à nos frontières. Nous souhaitons également des mesures de transparence additionnelles telles que l’obligation de notifier à la Commission la conclusion ou la modification de certains contrats d’approvisionnement auprès de pays tiers. Le projet de règlement de la Commission européenne propose la mise en place d’une coordination régionale entre les États, notamment pour gérer les crises. Quelles sont les mesures concrètes proposées par la Commission et comment cette coordination régionale peut-elle s’articuler avec les politiques nationales existantes ? L’Europe du Sud et les zones centrales et orientales sont probablement les régions les plus vulnérables en Europe dans leur capacité à assurer leur sécurité énergétique comme l’ont démontré les stress tests de 2014. Ceci s’explique à la fois par la domination de fournisseurs uniques et par une géopolitique régionale complexe qui fait peser une menace constante sur notre approvisionnement. Améliorer la coordination régionale dans l’UE est absolument crucial, non seulement pour gérer les crises, mais aussi pour l’équilibre général de nos différentes régions. Heureusement, nous avons vu d’énormes progrès dans la volonté des États de mettre en œuvre une plus grande coopération régionale, particulièrement dans les zones plus vulnérables. Afin d’accélérer l’intégration des marchés européens du gaz et de diversifier l’approvisionnement en gaz, certains pays3 ont mis en place en février 2015 avec l’UE un groupe de travail de haut niveau baptisé « Central and South Eastern Europe Gas Connectivity », également connu sous le nom de CESEC. Leur objectif est très ambitieux et simple à la fois : s’assurer que chaque pays de la région ait accès à au moins trois sources de gaz. La création du CESEC n’est pas fait que de sommets et de déclarations. Très vite, nous avons vu des actions concrètes émerger.
Si le plan d’actions proposé par le CESEC en juillet 2015 est appliqué avec rigueur, cette région pourrait être le plus rapide et le plus ambitieux exemple d’une coopération régionale réussie dans le domaine de l’énergie. Ce plan d’action contient, entre autres, sept projets d’infrastructures prioritaires - qui ont également été sélectionnés dans la deuxième liste des projets d’intérêt commun, adoptée à la fin de l’année dernière. La Commission s’est par ailleurs penchée sur le rôle du GNL et des sites de stockage pour répondre aux enjeux de l’approvisionnement en gaz de l’UE. Quelles mesures proposez-vous pour valoriser le GNL et le stockage de gaz ? La capacité à importer du GNL fournira une autre source de gaz pour le continent européen, ce qui augmentera considérablement la diversité de l’approvisionnement en gaz et donc améliorera grandement la sécurité énergétique. Aujourd’hui, les pays d’Europe occidentale qui ont accès à des terminaux d’importation de GNL et aux marchés de gaz liquides sont beaucoup plus résistants aux possibles interruptions d’approvisionnement que celles qui dépendent d’un seul fournisseur de gaz. Alors qu’à l’ouest, les États membres de l’UE ont une importante capacité d’importation, permettant de répondre à environ 43 % de la demande de gaz totale actuelle (2015), de nombreux États membres du sud-est de l’Europe, d’Europe centrale et orientale et de la Baltique, n’ont pas accès au GNL et/ou sont fortement dépendants d’un seul fournisseur de gaz. Ainsi, développer des sources d’approvisionnement alternatives pour ces pays, notamment par l’intermédiaire de terminaux méthaniers, serait très bénéfique pour leur propre sécurité d’approvisionnement et pour celle de l’Europe en général. Dans le cadre du paquet sur la sécurité énergétique, publié le 10 février dernier, concernant la sécurité d’approvisionnement, la Commission européenne a proposé une stratégie européenne pour le gaz naturel liquéfié et le stockage souterrain du gaz, qui décrit un certain nombre de points permettant d’améliorer l’accès de tous les États membres au GNL et au stockage souterrain. Le premier point serait l’achèvement du marché intérieur de
« La capacité à importer du GNL fournira une autre source de gaz pour le continent européen, ce qui augmentera considérablement la diversité de l’approvisionnement en gaz et donc améliorera grandement la sécurité énergétique. » o
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ENTRETIEN
l’énergie, ceci en construisant des infrastructures nécessaires qui faciliteraient l’accès de tous les États membres aux marchés internationaux de GNL, soit directement, soit par l’intermédiaire d’autres États membres, ce qui augmenterait également la compétitivité des régions mentionnées dans les précédentes de l’UE. Deuxièmement, faire en sorte que le marché du gaz envoie les bons signaux de prix devrait faciliter les investissements d’infrastructures GNL nécessaires. En outre, la Commission souhaite rendre les installations et l’utilisation des stockages souterrains plus efficaces, en améliorant notamment les règles opérationnelles sur l’utilisation transfrontalière de stockage, pour que les États membres optimisent l’utilisation des stockages en créant des plans d’action et d’urgence régionaux préventifs. Enfin, en travaillant en étroite collaboration avec les partenaires internationaux, nous cherchons à promouvoir un marché mondial du GNL libre, liquide et transparent. Nous ferons en sorte que le GNL continue d’être échangé librement sur les marchés mondiaux, à la fois lorsque les conditions sont normales et en cas de chocs externes. Sur le volet relations extérieures, on parle souvent de « diplomatie énergétique européenne ». Pouvez-vous nous éclairer sur ce terme ? Comment cela s’articule avec la maîtrise par les États membres de leur mix énergétique et la liberté d’entreprendre des entreprises ? Le projet énergétique européen comporte une double dimension : interne et externe. Le volet intérieur, bien sûr, concerne directement les États membres de l’UE, alors que le volet externe consiste à parler d’une seule voix à
ceux d’Europe de l’Est. Dans l’ensemble, avec l’Union de l’énergie nous aspirons à aller au-delà des frontières et à veiller à ce que les États membres ne vivent pas dans un isolement énergétique reposant sur un nombre limité de fournisseurs. Nous voulons nous assurer de la diversification aussi bien en termes de routes, de fournisseurs que de sources d’énergie. De plus, nos objectifs en matière de diplomatie énergétique doivent se renforcer et être en synergie avec les actions menées par l’UE dans la lutte contre le changement climatique. C’est à ce prix que nous inscrirons nos actions dans la durée. Nous avons montré notre capacité à parler d’une seule voix avec l’accord de Paris et nous allons continuer sur cette voie pour poursuivre les négociations sur le climat. La Commission européenne a l’intention d’analyser la demande en gaz dans certains pays membres et a demandé un droit de regard sur les contrats gaziers conclus entre les États membres et les pays tiers. Quel est le but recherché ? La Commission européenne ne cherche pas à contrôler les contrats gaziers. Toutefois, étant donné que les négociations avec les fournisseurs d’énergie nécessitent souvent un soutien politique et juridique, pour offrir notamment une meilleure garantie aux investisseurs sur la construction des infrastructures énergétiques, des accords intergouvernementaux sur l’énergie entre les États membres et les pays tiers sont souvent à la base de contrats commerciaux plus détaillés. À l’heure actuelle, si les accords intergouvernementaux sont utiles pour recevoir des informations sur les accords existants et pour identifier s’ils sont conformes ou non à la législation européenne, ils ne sont
« La Commission européenne ne cherche pas à contrôler les contrats gaziers. » nos partenaires et de poursuivre les politiques énergétiques et climatiques de l’UE. Le plan d’action « diplomatie européenne de l’énergie » a été présenté et approuvé par le Conseil en juillet 2015. Cette dimension extérieure exige notre coopération avec le service européen d’action extérieure dans le cadre de la diplomatie de l’UE, étant donné que les objectifs des politiques envisagées par l’Union de l’énergie doivent être soutenus par une politique étrangère européenne cohérente où l’UE dans son ensemble parle d’une seule voix. La diplomatie énergétique consiste à établir et à maintenir le dialogue avec nos partenaires dans des pays et des régions potentiellement stratégiques pour nous. Notre objectif principal porte sur les pays concernés par le corridor gaz sud, les pays euro-méditerranéens et
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cependant pas suffisants pour lutter contre les dérives. Aujourd’hui la loi exige que les États membres notifient à la Commission les accords énergétiques qu’ils passent avec des pays tiers seulement après leur conclusion. Or ce que nous souhaitons avec cette révision c’est de pouvoir être prévenu en amont afin de garantir une transparence dans les accords intergouvernementaux et de faire en sorte que le droit communautaire soit respecté. Cela permettrait d’éviter aux États membres et aux entreprises de se retrouver dans des situations contractuelles qui pourraient poser un risque pour leur sécurité énergétique.
ENTRETIEN
« La Commission défend tous les consommateurs en veillant à ce qu’ils aient un meilleur accès à l’information sur leur consommation d’énergie mais également sur leurs dépenses. » Autre sujet : plus de 100 millions d’Européens souffrent de précarité énergétique et à travers le monde la fracture énergétique augmente. Quelles sont les réponses que peut apporter l’UE ? La précarité énergétique est une préoccupation croissante pour l’UE et un sujet de discussion important pour nos institutions. À titre d’exemple, le rapport Griffin4 largement adopté le 26 mai par les eurodéputés a fait un certain nombre de propositions pour lutter contre la précarité énergétique, telles que l’édition de factures plus claires, la mise à disposition d’outils de comparaison de prix plus fiables, la suppression des pénalités associées aux changements de fournisseurs, une motivation à des réponses aux clients plus rapides grâce aux nouvelles technologies et le soutien à l’autoproduction et à l’autoconsommation en créant des cadres juridiques spécifiques. Le rapport a également formulé des recommandations sur la promotion de tarifs sociaux, l’introduction de la taxation progressive de l’énergie et il a proposé un plan d’action sur la précarité énergétique. Mais la compétence de l’UE dans ce domaine est extrêmement limitée, dans la mesure où les États membres conservent la capacité à légiférer sur ces sujets. Néanmoins, la Commission examinera attentivement les recommandations de lutte contre la précarité énergétique, tant dans le rapport sur le nouveau pacte pour les consommateurs d’énergie (« The new deal for energy consumers ») de 2015 que dans celui adopté récemment, en février 2016 sur le respect de l’objectif de lutte contre la pauvreté (« On meeting the antipoverty target in the light of increasing household costs ») élaboré par la commission emploi et affaires sociales du Parlement. Les services de la Commission travaillent actuellement, via le dossier « Electricity market design », à l’élaboration de mesures qui permettront aux consommateurs de faire des économies et de réduire leurs factures d’énergie. En outre, la Commission défend tous les consommateurs en veillant à ce qu’ils aient un meilleur accès à l’information sur leur consommation d’énergie mais également sur leurs dépenses. Nous
avons aussi souhaité que les consommateurs puissent changer de fournisseurs plus facilement et qu’ils puissent bénéficier d’outils de comparaison de prix plus fiables et d’un marché de détails plus compétitif. Il devrait en résulter notamment que cette flexibilité accordée aux consommateurs amène les fournisseurs à revoir leurs contrats et à offrir des prix plus bas. La Commission travaille également pour permettre au plus grand nombre de consommateurs d’adapter leur consommation d’énergie en fonction de la fluctuation des prix tout au long de la journée. Cela devrait les aider à économiser, en consommant plus d’énergie en période creuse et moins dans la période haute. Enfin, la Commission cherche à créer un cadre spécifique permettant aux consommateurs de produire leur propre électricité à partir de technologies renouvelables décentralisées pour lesquelles les coûts diminuent continuellement. Propos recueillis par Laura Icart Soit la réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990.
1
2 Le traité instituant la Communauté de l’énergie a été signé en octobre 2005 à Athènes. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2006. La Communauté de l’énergie vise à créer un marché intégré de l’énergie et regroupe l’Union européenne et les États voisins, à savoir l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine, le Monténégro, la Serbie et la Mission d’administration intérimaire des Nations unies au Kosovo, la Moldavie et l’Ukraine.
Autriche, Bulgarie, Croatie, Grèce, Hongrie, Italie, Roumanie, Slovaquie et Slovénie.
3
4 Cette résolution portée par la députée britannique Theresa Griffin apporte des avancées sur trois points : les modalités de gestion, la transparence des prix et la priorisation des fonds alloués par l’UE en matière d’efficacité énergétique.
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DOSSIER
LES NOUVEAUX MARCHÉS GAZIERS
Au sommaire de ce dossier : Contexte ⎪⎟| Nouveaux gaz, nouveaux gaziers Le dossier en image ⎪⎟| Nouveaux marchés, nouvelles perspectives Australie ⎪⎟| La ruée gazière États-Unis ⎪⎟| Jackpot gazier au pays de l’oncle Sam Interview ⎪⎟| Philip Hagyard, Senior Vice President Gas chez Technip Amérique du Sud ⎪⎟| El señor gas Interview ⎪⎟| Houda Allal, directrice de l’Observatoire méditerranéen de l’énergie (OME)
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CONTEXTE
Nouveaux gaz, nouveaux gaziers Le marché mondial du gaz entre dans une nouvelle ère : l’avènement du gaz naturel liquéfié (GNL), la découverte de nouveaux gisements et l’essor des gaz non conventionnels ont révélé un potentiel gazier indéniable. Un potentiel présent en grande quantité sur la planète et dont l’exploitation, sujette à des enjeux économiques, techniques et environnementaux, soulève bien des questions et aiguise bien des appétits. Enquête.
© ENGIE
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n quelques années seulement, le secteur gazier a connu une profonde mutation : les avancées technologiques ont considérablement amélioré les conditions de production, de transport et aussi d’utilisation du gaz naturel. Elles ont permis en moins de deux décennies de découvrir les champs de Zohr en Égypte, le « pré-sel » au Brésil ou encore Léviathan en Israël et de faire du gaz une source d’énergie extrêmement disponible. Une disponibilité renforcée par les ressources de gaz non conventionnel à propos desquelles nombre de pays affichent un potentiel important : aux États-Unis bien sûr, en Australie mais aussi en Argentine et au Brésil. Par ailleurs, le GNL contribue fortement à la diffusion du gaz naturel et au renforcement de sa disponibilité et de son accessibilité. Il offre une grande flexibilité géographique. Les progrès réalisés récemment avec l’émergence de nouvelles technologies telles que le gaz naturel liquéfié flottant (FLNG) développé entre autre par le groupe français Technip, offrent de nouvelles opportunités et de nouveaux marchés pour les différents acteurs de l’industrie gazière. Le GNL est un vecteur important de la transformation des marchés gaziers.
Le GNL moteur dans la mondialisation des échanges Si la Russie et le Qatar sont encore aujourd’hui les leaders sur le marché mondial de la vente de gaz naturel, les ÉtatsUnis et l’Australie se sont invités sur le devant de la scène. Les cartes de l’offre mondiale vont être profondément redistribuées par ces deux grands pays producteurs, avec un impact à la fois sur les prix mais aussi sur la dépendance européenne vis-à-vis du gaz russe. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les capacités totales de liquéfaction augmenteront de 45 % d’ici à 2021. Au total, 188 milliards de mètres cubes de nouvelles capacités viendront ainsi s’ajouter aux 415 milliards en fonctionnement fin 2015. De l’Australie au Brésil, des États-Unis à l’Égypte, tous ces pays ont révélé ces dernières années un potentiel gazier important. Si l’Australie et les États-Unis sont en passe de devenir des géants gaziers, l’Amérique du Sud, malgré un sous-sol riche, est encore au début de son histoire gazière et souffre d’un manque d’infrastructures. L’Égypte quant à elle pourrait redevenir exportatrice dans les prochaines années et les ressources à peine connues de la Méditerranée orientale laissent présager un avenir gazier radieux dans cette région. Laura Icart
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LE DOSSIER EN IMAGE
Nouveaux marchés, nouvelles perspectives
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ÉTATS-UNIS
Jackpot gazier au pays de l’oncle Sam Le développement du gaz et du pétrole de schiste aux États-Unis a complètement bouleversé la donne. En janvier 2016, la mise en service de l’usine de liquéfaction de Sabine Pass, un site flambant neuf destiné à expédier vers l’étranger les excédents américains de gaz, a été le symbole du spectaculaire virage de la stratégie énergétique américaine. D’une situation de dépendance énergétique croissante et inquiétante, le pays va redevenir exportateur, redistribuant ainsi les cartes sur le marché mondial de l’énergie.
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epuis 2010, les États-Unis sont, grâce au gaz de schiste (53 % de la production américaine de gaz commercialisée en 2015), le premier producteur mondial de gaz. Le pays verra sa production plus que doubler en 2040, atteignant 79 milliards de pieds cubes de gaz par jour, contre 37 milliards en 2015, soit 70 % de la production totale de gaz naturel du pays, selon certaines estimations. La révolution du gaz de schiste Le spectaculaire bond de la production nationale en quelques années a convaincu les producteurs américains, faute de demande domestique suffisante, de se tourner vers les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL). Entre 2010 et 2011, le pays a connu une ruée vers les projets de terminaux méthaniers. Sept ont été approuvés, cinq sont toujours en construction : Jordan Cove et Oregon LNG dans l’Oregon, Southern Union et Sempra en Louisiane, Freeport LNG Development au Texas et Dominion dans le Maryland. Cheniere a été visionnaire en la matière : avec la mise en service de Sabine Pass LNG en janvier dernier et de Cheniere Energy au Texas, le groupe américain devrait disposer d’un quasi-monopole sur les exportations jusqu’à la fin 2017 et pourrait devenir l’un des vendeurs de gaz les plus importants des États-Unis. Dans son étude publiée par le centre Énergie de l’Ifri1, Sylvie Cornot-Gandolphe évoque les perspectives en matière d’exportations de GNL. Selon elle, les exportations américaines de gaz naturel vont révolutionner le marché du GNL bien que les conséquences de la première vague de terminaux d’exportation américains se feront véritablement sentir à partir de 2018. D’ici à 2020, les États-Unis pourraient exporter jusqu’à 84 giga mètres cubes par an et devenir le troisième exportateur mondial de GNL, derrière l’Australie et le Qatar. Le pays a effectué fin février ses premières livraisons de GNL à partir de l’unité Sabine Pass LNG, à destination de l’Amérique du Sud et de l’Europe. Un marché européen bousculé ? Avec des prix du gaz actuellement très bas sur le marché mondial et une demande en baisse, l’Asie ne fait plus figure de favori pour recevoir le GNL américain. L’Europe peut constituer
un débouché pour ce GNL du fait de sa proximité et ayant la capacité de le recevoir. Après la Norvège, le Portugal et l’Espagne au printemps, du GNL américain est arrivé fin septembre en Ecosse. En France, Engie a signé un contrat avec Cheniere pour douze livraisons par an, pendant cinq ans, qui seront faites au terminal de Montoir-de-Bretagne. EDF a de son côté établi un contrat de vingt ans avec la même entreprise pour des livraisons au terminal de Dunkerque. Bien qu’il soit susceptible de contribuer à la sécurité d’approvisionnement de l’Europe, le GNL américain ne devrait pas inonder le marché, mais il a pourtant déjà changé bien des choses. En effet, pour faire face à la concurrence américaine, Gazprom, premier exportateur mondial, doit s’ajuster pour préserver ses ventes vers l’Europe. Avec l’objectif affiché de conserver une part d’au moins 30 % sur le marché européen à moyen et long terme, le fournisseur russe a revu sa stratégie gazière : baisse des prix, vente aux enchères d’une partie de son gaz et investissements dans des unités de stockage ; il espère également toujours la doublement des capacités de Nord Stream. L.I. 1 Étude de l’Institut français des relations internationales : « Les exportations américaines de gaz naturel : de nouvelles règles du jeu sur l’échiquier européen », Sylvie Cornot-Gandolphe, juin 2016.
Paroles de candidats Les divergences entre Donald Trump et Hillary Clinton sont nombreuses et leur discours en matière de politique énergétique radicalement différent. Le premier a promis de démanteler les accords de Paris et a présenté un plan consistant à déréguler le secteur de l’énergie afin de doper la production des énergies fossiles. La seconde veut durcir la réglementation sur la fracturation hydraulique et se tourner vers les énergies renouvelables. Quoi qu’il en soit, dans un pays devenu le plus gros producteur mondial de pétrole et de gaz et qui possède les réserves de charbon les plus abondantes de la planète, leurs décisions seront lourdes de conséquences pour l’industrie américaine - et la politique environnementale mondiale.
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AUSTRALIE
La ruée gazière L’île-continent est devenue en quelques années le septième exportateur mondial de gaz naturel liquéfié. Mais ses ambitions se confrontent aussi à l’une de ses principales autres richesses : son patrimoine naturel. Saura-t-elle composer avec pour devenir cet eldorado gazier que tous les spécialistes semblent prédire ?
© CHEVRON AUSTRALIE
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’Australie pourra-t-elle détrôner un jour le Qatar en
termes de production de gaz naturel liquéfié (GNL) ? Elle en prend clairement le chemin, si l’on en croit les chiffres : plus de la moitié des projets de centrales de liquéfaction actuellement en cours dans le monde sont australiens. Avec des réserves de gaz naturel prouvées de 3 500 milliards de mètres cubes, le pays des kangourous prévoit d’atteindre dès 2018 une capacité de production de GNL de 86 millions de tonnes contre 77 millions de tonnes pour le Qatar. Le champ Gorgon LNG, au large de Karratha (dans l’ouest du pays) et mené par l’américain Chevron, en dit long sur la confiance des investisseurs mondiaux. Alors que le premier cargo rempli de son gaz a pris la mer en mars 2016, sa production devrait atteindre à terme quelque 2,6 milliards de pieds cubes par an, selon le groupe américain. Depuis 2009, Chevron a investi 1 milliard de dollars australiens (environ 677 millions d’euros) dans la recherche et le développement. L’Australie lui paraît clairement un continent d’avenir. Logique : en dix ans, le septième exportateur mondial (avec près de 40 milliards de mètres cubes produit en 2015) a augmenté sa production de 28 milliards de mètres cubes, soit environ d’un tiers… rien de moins.
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Canberra a choisi son camp : celui du gaz plutôt que celui du charbon, matière première abondamment exploitée dont ses sous-sols regorgent mais largement décriée par les ONG et les partis politiques écologiques. Engie même, présente dans le pays de longue date, tente petit à petit d’en sortir. La centrale d’Hazelwood, située dans l’État de Victoria, a récemment défrayé la chronique : vieille de plus de soixante ans, ses infrastructures vétustes suscitent les critiques alors que son permis d’exploitation court jusqu’en 2033. Last but not least : la production de GNL permettra au pays d’augmenter ses exportations vers l’Asie, le Japon, la Chine et la Corée du Sud principalement. Si les prix exceptionnellement bas du pétrole depuis un an et demi auraient pu dissuader les investisseurs et mettre à mal les ambitions du pays, le récent accord de l’Opep à Alger (qui devra être confirmé en novembre) sur une baisse de la production mondiale afin de soutenir les prix du brent devrait rassurer. Certes soucieuse de son environnement, mais soumise aux pressions économiques par ailleurs, l’Australie devra aussi composer avec une législation stricte et une société civile extrêmement vigilante. De nombreux projets de fracturation hydraulique ont ainsi été montrés du doigt. D’autres, au large de ses côtes, sont scrutés à la loupe par les autorités : fin septembre, le britannique BP s’est vu demander un supplément d’informations environnementales sur son projet de forage dans la réserve marine de la Grande Baie australienne. L’eldorado a un prix. Laura Icart
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INTERVIEW DE PHILIP HAGYARD, TECHNIP
« Parmi les nouveaux marchés gaziers figure notamment celui du gaz en eau profonde » Philip Hagyard travaille chez Technip depuis trente-quatre ans. Senior Vice President Gas Monetization au sein du groupe, il est un fin connaisseur du marché gazier. Quels sont les principaux marchés pour Technip dans le monde ? Quels pays qualifieriez-vous de nouveaux marchés gaziers ? Technip est une entreprise internationale, capable de répondre à des © TECHNIP appels d’offres relatifs principalement à l’industrie de l’énergie, quel que soit le pays et ce sur l’ensemble de la chaîne de valeur, c’est à dire dans l’amont et l’aval pétrolier. Dans la pratique, en ce qui concerne le gaz, nous travaillons plutôt dans les pays où se trouvent de grands champs de gaz naturel, condition nécessaire à des projets importants, liés à l’export et parfois à la pétrochimie dans le pays. Historiquement, nous avons surtout travaillé en Afrique du Nord, en ex-URSS et au Moyen-Orient – le Qatar et les Émirats arabes unis. Aujourd’hui nous sommes présents en Amérique du Nord où la croissance considérable de la production de gaz de schiste a créé d’importantes opportunités pour Technip dans le domaine de la pétrochimie, dans le grand nord russe avec le projet Yamal, ainsi qu’en Asie-Pacifique et en Australie - principalement pour le FLNG [gaz naturel liquéfié flottant, NDLR]. En regardant devant nous, parmi les nouveaux marchés gaziers figure notamment celui du gaz en eau profonde. Depuis quelques années, des réserves importantes de gaz de bonne qualité ont été découvertes dans plusieurs nouveaux territoires : l’Afrique de l’Est (Mozambique, Tanzanie) en premier lieu, suivie par la Méditerranée orientale et plus récemment l’Afrique de l’Ouest (Sénégal et Mauritanie).
Quelles sont les technologies pour lesquelles on fait le plus appel à vous dans le secteur gazier ? Sans vouloir généraliser, nos clients font appel à nous lorsqu’ils font face à un niveau de complexité élevé. Bien souvent, cette complexité s’explique par une combinaison de facteurs liés à la technologie, à l’environnement et à la taille du projet. Cela ne nous empêche pas d’être impliqués sur des projets plus traditionnels, au travers de certaines de nos filiales. Sur le plan technologique, le nom de Technip est associé à la liquéfaction de gaz naturel depuis toujours. Aujourd’hui, nous sommes l’un des principaux contracteurs sur la technologie Air Products, mais il nous arrive aussi de travailler sur d’autres technologies choisies par le client. Notre particularité en GNL relève de la grande diversité de taille des projets, des technologies employées et des lieux de réalisation. Le FLNG est un domaine dans lequel Technip détient une position unique parmi ses pairs, avec la réalisation de deux des trois premières applications de cette technologie. Dans le domaine du GTL (gaz to liquids), nous avons des liens étroits avec le procédé vedette, le SSPD (« Sasol Slurry Phase Distillate Process »™). Notre division « Process Technologies » est à l’origine des réacteurs FT en suspension de Sasol, qui constituent la pièce maîtresse de cette technologie. Par ailleurs, nous réalisons de façon exclusive les avant-projets détaillés de ces unités pour Sasol. Grâce aux efforts de développement menés conjointement avec Sasol sur des concepts d’usine et d’intensification de la production par réacteur, nous offrons via cette technologie des solutions très intéressantes en matière de monétisation du gaz, soit pour des investisseurs disposant de ressources gazières mais pas pétrolières, soit lorsque le prix du pétrole est élevé par rapport à celui du gaz. Enfin, dans le cadre de notre activité de licensing, nous proposons depuis quelques années une famille de procédés pour le fractionnement des gaz naturels, sous le nom de marque Cryomax.
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Parlez-nous plus précisément de la technologie Cryomax développée par votre société ? Le gaz naturel contient souvent des quantités intéressantes d’éthane, de propane, de butane et condensats. L’extraction de ces constituants souvent groupés sous l’acronyme LGN [liquides de gaz naturel, NDLR] est souhaitable afin de mieux valoriser la ressource. Les procédés Cryomax permettent une récupération élevée d’éthane et de propane - jusqu’à 99 % - grâce à un fractionnement à basse température et à pression réduite. Conçus autour d’équipements disponibles chez plusieurs fabricants, permettant ainsi de rester très compétitifs, les procédés sont caractérisés par l’utilisation de turbo-expandeurs couplés à une colonne de distillation munie d’un ou de plusieurs reflux. GE Oil & Gas et Technip ont signé en juin dernier un protocole d’accord portant sur un projet conjoint visant à élaborer des solutions digitales pour l’industrie du GNL. En quoi cela consistet-il ? Une unité de liquéfaction de gaz naturel est candidate à la digitalisation pour plusieurs raisons. On demande une grande régularité de production, les usines sont complexes et elles se situent souvent dans des endroits isolés. GE dispose de sa plateforme Predix et Technip, maître d’œuvre de projets de GNL importants, connaît ces aspects mieux que quiconque aux yeux de GE. Nous explorons ensemble des solutions digitales axées sur l’ingénierie, la construction, la mise en service et les phases opérationnelles des installations de GNL ayant pour objectif d’améliorer la productivité et la maintenance de ces installations. Arnaud Pieton, président de Technip en AsiePacifique, a évoqué récemment la position de leader de Technip et sa présence historique en Australie et en Asie-Pacifique. Pouvez-vous revenir sur les points clés de cette histoire ? Combien de contrats cela représente-t-il ? Présent en Asie-Pacifique depuis 1982 - année au cours de laquelle le groupe s’est établi en Malaisie, Technip est aujourd’hui l’un des plus grands contracteurs pétrole et gaz présents dans ce pays. Le siège du groupe dans cette région appelée également « Apac » est d’ailleurs basé à Kuala Lumpur. Nos investissements y ont été significatifs avec notamment la création d’Asiaflex, la seule unité de fabrication de conduites flexible en Asie du Sud-Est. Elle sert les marchés des mers profondes à peu profondes, ainsi que les marchés de surface. Nous avons réalisé de très nombreux projets - des complexes pétrochimiques aux raffineries, en passant par les développements sous-marins. Nous sommes présents en Australie depuis plus de vingt ans. À travers nos centres opérationnels et d’ingénierie, nous sommes également basés en Chine, en Thaïlande, au Vietnam et en Indonésie. Nous avons participé directement à l’intégralité des développements en eaux profondes en Asie du Sud-Est et en Océanie ainsi qu’aux deux projets
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de GNL flottants - Petronas FLNG Satu & Shell Prelude. Technip a également été impliqué dans l’amont de projets gaziers importants tels que Gorgon et Wheatstone pour Chevron en Australie, Ichthys pour Inpex en Australie ou encore Jangkrik pour ENI en Indonésie. Technip a remporté le 26 juillet un contrat cadre de services auprès de SCT & E LNG, Inc. pour son terminal d’exportation de gaz naturel liquéfié. Quelle place occupez-vous sur le marché américain ? Sur le territoire américain, ce sont historiquement les activités subsea qui ont été dominantes. Aujourd’hui, nous y avons une activité dans la plupart des domaines de Technip, y compris en gaz. Dans le domaine du GNL nous avons notamment réalisé le FEED [contrat d’ingénierie d’avant-projet détaillé, NDLR] pour le « Lake Charles Liquefaction Project » de BG (désormais Shell). Ce nouveau contrat s’inscrit dans notre offre de diversification et de services, nous permettant d’être plus proches de nos clients aux États-Unis. Quels sont les projets importants que vous menez actuellement en Amérique du Sud ? Nos références en gaz en Amérique du Sud sont surtout situées au Venezuela, mais aujourd’hui les investissements dans ce pays sont faibles. Nous sommes très actifs sur le continent avec Libra au Brésil (pétrole offshore) et nous venons de terminer « Etileno XXI », un vapocraqueur important au Mexique. Et sur le continent africain ? Le marché africain est promis à une forte progression. Nous suivons très activement plusieurs projets en Afrique de l’Est et nous nous intéressons aux récentes découvertes de gaz au large du Sénégal et de la Mauritanie. Technip va fusionner dans les prochains mois avec l’américain FMC Technologies pour former un géant mondial de l’industrie du pétrole et du gaz. Avec cette fusion, quelles sont vos ambitions et vos spécificités dans le secteur industriel et énergétique mondial ? Notre ambition est de créer un leader des segments subsea, surface et onshore/offshore qui s’appuie sur des technologies et innovations de pointe. Ensemble, nous allons développer une offre étendue et modulable sur nos marchés, de la conception à la livraison du projet et au-delà. Notre portefeuille élargi de solutions permettra de favoriser l’innovation, d’améliorer la réalisation, de réduire les coûts et de contribuer au succès des clients. TechnipFMC réunit deux leaders complémentaires et leurs talents, et capitalise sur le succès avéré de l’alliance existante et de la co-entreprise Forsys Subsea, permettant ainsi une intégration rapide. Propos recueillis par Laura Icart
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AMÉRIQUE DU SUD
El señor gas Depuis le début des années 1990, le gaz est au cœur de l’échiquier politique et économique en Amérique du Sud. Vital pour le développement des économies nationales, il est aussi un instrument incontournable d’une entente énergétique régionale. Avec un potentiel gazier indéniable, des ressources énergétiques présentes en grande quantité, les enjeux autour des infrastructures gazières, de la place du GNL, mais aussi de l’exploitation des gaz non conventionnels sont autant d’éléments qui façonneront la carte énergétique du continent sud-américain de demain. Tour d’horizon.
© NOURALLAH MELLITI
Terminal à double jetée du site GNL Mejillones, une joint-venture entre le groupe Engie et l’opérateur minier Codelco, au Chili.
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’Amérique du Sud est riche en matières premières. Elle est riche en combustibles fossiles et ses possibilités pour développer les énergies renouvelables sont très importantes. Elle possède 4 % des réserves de gaz naturel mondiales et si le gaz est une énergie relativement répandue sur le continent, il est en fait principalement concentré au Venezuela, qui possède à lui seul les troisquarts (77 %) des réserves du continent, suivi par le Brésil et le Pérou (6 %) puis par l’Argentine et la Bolivie (4 %). Dans son étude « South American Gas Markets & the role of LNG » publiée le 24 octobre dernier, Anouk Honoré, chercheure à l’Oxford Institute for Energy Studies, note que la production commercialisée de gaz naturel a atteint 138 milliards de mètres cubes en 2015, soit quatre fois plus qu’en 1980 et deux fois plus qu’en 2000, même s’il existe des disparités d’un pays à l’autre. Cette production ne représentant qu’une part limitée de la production totale (60 % en 2012) et alors que les réserves de gaz naturel se trouvent dans le nord du continent, l’essentiel de la production commercia-
lisée provient des pays du sud (Argentine, Brésil, Bolivie et Venezuela) illustrant le paradoxe sud-américain : beaucoup de possibilités, des réserves estimées suffisantes pour satisfaire ses besoins, mais des infrastructures manquantes, des incertitudes géopolitiques et des questions environnementales et sociétales qui ont considérablement freiné l’essor du gaz. Et pourtant, les perspectives de développement existent et les grands pays du continent veulent chacun leur part du gâteau gazier. Des ressources importantes Les grandes puissances régionales que sont l’Argentine, le Venezuela et le Brésil sont aussi des pays gaziers. L’Argentine est le plus grand producteur en 2015 avec 36,5 milliards de mètres cubes et ce même si le pays a vu son volume de production baisser depuis la crise du gaz en 2004. Le gaz naturel y constitue la principale source d’énergie : elle a satisfait près de 52 % de la consommation d’énergie primaire argentine en 2014. Malgré ses importantes ressources, le pays reste
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De nombreux projets gaziers sont en cours dans le pays, particulièrement dans le développement de ses réserves offshore. PdVSA, principal producteur Venezuela et distributeur de gaz naturel du pays, 5,6 a attribué des blocs d’exploration à 32,4 Colombie des compagnies étrangères parmi les34,5 0,1 quelles ENI, Repsol, Total, Statoil et 11 Gazprom. Le Venezuela, plongé actuel10,5 lement dans une grave crise économique et politique, souhaite diversifier son mix énergétique. Si des investissePérou ments sont nécessaires dans le secteur, 0,3 Brésil le gaz pourrait être une solution intéres12,5 0,4 sante pour obtenir des revenus supplé7,5 22,9 Bolivie mentaires (GNV, GPL…). 40,9 0,3 Le Brésil complète le podium avec 20,9 très faible 22,9 milliards de mètres cubes produits en 2015 et si le plus grand pays d’Amérique du Sud a des besoins énergétiques croissants, le développement du secteur gazier brésilien reste à l’heure Argentine actuelle très limité. Le pays dispose 0,3 pourtant des secondes réserves de gaz 36,5 47,5 naturel d’Amérique du Sud (500 milRéserves prouvées (TCM3) Production (GM3) liards de mètres cubes fin 2014, soit Consommation (GM3) près de 0,3 % des réserves mondiales), mais des problèmes de gouvernance et de corruption ainsi qu’un déficit d’inSource : BP Statistical 2016 – Cedigaz vestissement n’ont jamais permis au un importateur net de gaz à l’heure actuelle, ses principaux secteur gazier de se développer malgré ses potentialités. La fournisseurs étant la Bolivie et Trinité-et-Tobago (GNL). En fabuleuse découverte des gisements baptisés « pré-sel » il y a outre, l’Argentine possède selon l’EIA (US Energy Information une dizaine d’années et dont l’exploration commence à peine Administration) les deuxièmes plus grandes réserves mon- permettra peut-être de changer la donne avec un potentiel diales potentielles de gaz non conventionnels : on estime que très certainement revu à la hausse. Depuis 2013, le pays a le gaz de schiste pourrait représenter 75 % de la production fait face à une sécheresse extrêmement prononcée : d’imtotale de gaz naturel du pays en 2040. Si la production semble portants volumes de GNL ont donc été importés pour pouvoir aujourd’hui se stabiliser et que les infrastructures existantes satisfaire sa consommation électrique. sont suffisantes, de nouveaux investissements en amont de La Bolivie, quatrième producteur de gaz avec 20,9 milliards la chaîne gazière, notamment dans le développement de ses de mètres cubes produits en 2015, affiche une progression ressources de gaz non conventionnels, permettront probable- spectaculaire depuis le début des années 2000 et ce même si ment de répondre à l’ambition du gouvernement argentin de la production stagne depuis trois ans. Dans ce pays où le gaz redevenir autosuffisant, mais cela prendra probablement plus est religion et affaire d’État, les ressources gazières sont très de temps que prévu, note Anouk Honoré. importantes et encore sous-exploitées. Le gaz bolivien a trois Le Venezuela quant à lui est le deuxième plus grand pays principaux débouchés : son marché intérieur et ses deux prinproducteur avec 32,4 milliards de mètres cubes produits en cipaux importateurs que sont le Brésil, qui importe jusqu’à 30 2015. Les réserves prouvées de gaz naturel du Venezuela millions de mètres cubes par jour, et l’Argentine qui importe étaient estimées par BP à 5 600 milliards de mètres cubes entre 18 et 19 millions de mètres cubes par jour. De nomfin 2015. Huitièmes réserves prouvées de gaz naturel au breux gisements ont été découverts ces dernières années, monde, malgré la proclamation en 2009 par Hugo Chavez exploités en majorité par des compagnies étrangères - Total de la « révolution socialiste du gaz » et son plan pour ac- est d’ailleurs l’un des principaux producteurs de gaz dans croître la production de gaz naturel et devenir exportateur, le pays - et le potentiel gazier de la Bolivie s’est considéla production du pays est toujours restée assez limitée et rablement accru. Il y a quelques semaines, l’exploitation du est principalement utilisée pour améliorer la récupération champ d’Incahuasi, situé dans le sud-est de la Bolivie et geré de pétrole dans les champs matures. En 2015, sa produc- par un consortium composé de la française Total, de la russe tion de gaz restait inférieure à sa consommation intérieure. Gazprom, de l’italo-argentine Tecpetrol et de la bolivienne
Panorama gazier sud-américain
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YPFB, devrait permettre au pays d’augmenter sa production de 12 % et ainsi de garantir sa position sur les marchés argentins et brésiliens. Selon le ministre des Hydrocarbures, le nouveau champ de gaz générera un total de 5 578 millions de dollars de revenus pour l’État bolivien durant le temps de la production, entre 2016 et 2040. Le Pérou, avec 13,2 milliards (12,5 selon BP) et la Colombie avec 12,7 milliards produits (11 selon BP) complètent le top 6 des grands pays de la région producteurs de gaz. Si la Colombie lutte pour maintenir ses niveaux de production, le Pérou figure parmi les pays les plus dynamiques d’Amérique latine dans le secteur gazier. La production a doublé en l’espace de quelques années (7,2 giga mètres cubes en 2010), des résultats principalement dus à l’augmentation de la demande du secteur électrique mais aussi à la mise en service en 2010 de la première centrale de liquéfaction de gaz naturel Melchorita, d’un gazoduc et d’un terminal maritime. Cette première usine a lancé le pays dans l’exportation de gaz vers l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Asie. Si le potentiel est bien là, dans son étude Anouk Honoré identifie plusieurs facteurs compliquant la hausse de la production de gaz en Amérique du Sud : la physionomie du continent, des forêts amazoniennes aux régions andines, son accès compliqué et la haute valeur environnementale des sites rendent problématique une production de gaz nécessitant de coûteux moyens de transport. Le manque d’infrastructures au niveau national et régional en Amérique du Sud limite clairement le développement du gaz naturel. Réglementer pour pérenniser À la difficulté géographique s’ajoute l’environnement réglementaire. C’est peut-être le principal défi à relever pour les pays sud-américains précise Anouk Honoré, eux qui ont vu la réglementation et les politiques appliquées aux investissements en amont de la chaîne gazière changer plusieurs fois au cours des deux dernières décennies. Cette instabilité réglementaire, malgré l’attractivité que représente le secteur gazier, a dissuadé beaucoup d’investisseurs. Aujourd’hui, les gouvernements nationaux souhaitent attirer les capitaux et les technologies étrangères tout en conservant un certain contrôle de leurs ressources. C’est un bon début pour les investisseurs note l’auteure mais il faut à présent « transformer l’essai ». Des prix bas Enfin, la faiblesse des prix du pétrole depuis 2014 fait régner une pression constante sur les budgets des pays exportateurs de pétrole et si le Venezuela est le pays le plus impacté, l’Équateur et la Colombie sont également touchés, mais pas uniquement. Les compagnies revoient leurs programmes d’investissements à la baisse, particulièrement pour les projets les plus coûteux, comme par exemple les gisements en mer. Par conséquence, malgré le potentiel, la future production de gaz sera de fait retardée et peut-être aussi plus faible que prévue. La production existante, liée à l’exploration pétrolière, laisse également planer un doute sur les volumes de gaz qui seront produits dans les prochaines années dans
cette région. En résumé, si le potentiel est là, le contexte actuel avec des prix du gaz et du pétrole bas, des coûts de production très élevés et une incertitude sur la demande, ne permettront probablement pas un développement rapide de ces nouveaux gaziers. Le GNL ouvre-t-il de nouvelles perspectives ? Le GNL offre du moins une flexibilité essentielle pour un continent soumis à de fortes variations de la demande en gaz d’une année à l’autre, avec une production de gaz associé non adaptable à la demande et des infrastructures manquantes. Selon le scénario (à l’horizon 2030) développé par l’économiste, le GNL continuera d’avoir sa place dans le mix du continent afin notamment de répondre aux besoins saisonniers de la région. Il pourra également fournir des volumes supplémentaires en cas de forte demande et contribuer à la sécurité d’approvisionnement en diversifiant les fournisseurs. Les mêmes acteurs… et des petits nouveaux L’Argentine, le Brésil et le Chili continueront d’importer du GNL. Pour les deux premiers pays tributaires du gaz bolivien, le GNL constitue une source d’approvisionnement supplémentaire et une diversification nécessaire. Le Chili restera également importateur. En 2017, la Colombie commencera à importer du GNL afin de répondre à une demande intérieure croissante. L’Uruguay devrait également passer le cap d’ici à 2020 pour diversifier son approvisionnement gaz mais aussi pour exporter éventuellement son GNL en Argentine pendant les mois d’hiver ou au Brésil en cas de pic de la demande. Enfin l’Équateur a prévu la construction d’un terminal méthanier pour dynamiser son secteur énergétique mais la réalisation et le calendrier sont pour le moment incertains. Le Pérou devrait rester le seul exportateur à l’horizon 2030, même si d’autres pays ont envisagé la possibilité de le devenir (ce qui reste une possibilité, mais probablement à une date ultérieure). Les exportations de GNL devraient rester stables, au moins jusqu’à la fin du contrat entre le Pérou et le Mexique. À l’heure actuelle, il convient de rester prudent sur la quantité de GNL importé dans la région. Dans l’étude d’Anouk Honoré, plusieurs scénarios sont possibles. Ils dépendent principalement du renouvellement des contrats gaziers entre la Bolivie, l’Argentine et le Brésil mais aussi de la capacité de la Bolivie à tenir ses engagements et bien sûr des conditions météorologiques dans une région où l’hydroélectricité apporte près de 70 % de l’électricité, mais qui doit drastiquement augmenter le rôle des centrales à gaz en période de sécheresse. Laura Icart
Pour en savoir plus “South American Gas Markets & the role of LNG”, Anouk Honoré, octobre 2016. www.oxfordenergy.org
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DOSSIER
INTERVIEW DE HOUDA ALLAL Directrice de l’Observatoire méditérranéen de l’énergie
« Il est absolument essentiel d’accélérer la transition énergétique en Méditerranée ! » La Méditerranée orientale dispose peut-être du plus grand potentiel gazier découvert ces dernières années. Peut-on qualifier le gaz naturel offshore de véritable chance pour cette région ? Les ressources en hydrocarbures sont effectivement très importantes sur cette zone. À l’exception de l’Égypte, productrice de gaz, c’est une région nouvelle bien qu’on ait toujours su son potentiel. C’est au début des années 2000, avec les découvertes en eaux profondes au large d’Israël et de Gaza, que les explorations se sont accélérées. La découverte de Tamar en 2009 et de Léviathan en 2010, puis d’Aphrodite à Chypre en 2011, ont déclenché une série d’explorations en eaux profondes dans l’est méditerranéen. La découverte de Zohr en août 2015 en Égypte et ses immenses réserves sont la preuve de la richesse extraordinaire de cette région. Si l’on estime le potentiel gazier sur le bassin du levantin à 1 265 milliards de mètres cubes, cette région reste encore sous-explorée. On s’attend à de nouvelles découvertes. Dans ce contexte, le gaz peut être une chance, parce qu’il y a un marché très important, il peut l’être également pour l’Europe pour sécuriser ses approvisionnements. Mais en réalité, deux éléments sont fondamentaux pour parler du gaz comme d’une chance en Méditerranée : convertir les réserves en production et faire bénéficier à toutes les parties prenantes de la manne gazière, dans une région où les tensions géopolitiques sont nombreuses. Pouvez-vous revenir plus spécifiquement sur la découverte de Zohr, en 2015 : d’importatrice, l’Égypte deviendra probablement exportatrice ? Cela aura-t-il un impact sur la carte énergétique de la région ? Zohr est une découverte fantastique pour le groupe ENI et pour l’Égypte qui possède un marché considérable en termes de demande intérieure et qui a le potentiel de redevenir exportateur. Zohr, c’est 850 milliards de mètres cubes de gaz qu’il est possible d’extraire. Pour nous à l’OME, cette découverte n’est pas une surprise. En 2011,
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nous avions publié une étude approfondie sur l’Égypte et sur son potentiel gazier dans les eaux profondes. Nous pensons que le pays sera exportateur entre 2021 et 2022. Avec cette découverte, la carte énergétique de la région est forcément impactée, en particulier dans la nature de ses échanges avec les pays voisins puisque l’Égypte, client potentiel à court terme d’Israël et de Chypre, deviendra à long terme un compétiteur. Et pour ce qui est des gisements gaziers de Tamar et de Léviathan au large des côtes d’Israël ? Quel est leur potentiel ? Quels peuvent être leurs débouchés ? Actuellement, Tamar (300 milliards de mètres cubes) produit plus de 12 milliards de mètres cubes de gaz par an et couvre l’ensemble des besoins en ressources gazières internes à Israël. Il existe des plans pour accroître sa capacité. Pour Léviathan (plus de 620 milliards de mètres cubes), c’est plus complexe. Compte tenu de sa taille, son exploitation et production ne peuvent se justifier que s’il y a un marché pour exporter. On s’attend à ce que les décisions d’investissement final soient prises avant la fin de l’année, avec un objectif de produire avant 2020. Mais cette décision dépend des accords qui seront signés pour sécuriser l’écoulement du gaz. Aujourd’hui, seul l’accord signé le 26 septembre entre la Jordanie et Israël est officiel1, mais il ne représente pas un volume suffisamment élevé pour justifier à lui seul l’exploitation du champ gazier. Israël œuvre pour trouver d’autres débouchés. L’Union européenne, l’Afrique du Nord et de l’Est méditerranéen ont créé en 2015 une plateforme euro-méditerranéenne sur le gaz. Cette nouvelle instance bénéficie du soutien de l’OME. Pouvezvous nous expliquer ses objectifs et les grands dossiers en cours ? L’idée est née en juillet 2014 à Malte, lors d’une conférence euro-med sur le gaz qui s’est conclue avec un appel pour créer une plateforme euro-méditerranéenne sur le gaz avec deux objectifs principaux : la sécurité de l’approvisionne-
DOSSIER
Houda Allal, directrice générale de l’Observatoire méditerranéen de l’énergie (OME), revient pour Gaz d’aujourd’hui sur les très grandes ressources de la Méditerranée orientale et sur ses GPL perspectives de développement dans un futur pas si lointain. © OME
ment en gaz et le développement du gaz (perspectives et marché) dans la région. La plateforme a été lancée en novembre 2014 sous la présidence italienne de l’UE et s’inscrit dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée. L’OME assure le rôle de secrétariat de la plateforme. L’organisation, au même titre que l’ensemble des membres de la plateforme, travaille à établir un dialogue structuré au niveau régional pour développer un marché progressif du gaz, assurer la sécurité énergétique et créer une véritable coopération énergétique. La semaine dernière a été présenté à Barcelone2 le programme de travail de la plateforme pour ces deux prochaines années. Deux volets sont prévus : une série d’études prioritaires sera effectuée sur les perspectives gazières notamment ainsi que l’organisation d’événements autour de thématiques comme par exemple le gaz dans la région est-Méditerranée et les hubs gaziers. Une réunion ministérielle est également prévue à Rome le 1er décembre 2016 pour valider ce programme. En 2017, nous allons donc entrer dans une phase bien plus active.
cité énergétique. Ce que je peux dire à ce stade c’est qu’il est absolument essentiel d’accélérer la transition énergétique en Méditerranée et cela pour plusieurs raisons : aujourd’hui, les énergies se trouvent majoritairement au sud de la Méditerranée, tant du point de vue de l’offre que de la demande ; les pays producteurs doivent trouver un équilibre entre les besoins de leur marché interne et le souci de nourrir leurs économies. C’est essentiel à leur développement. Assurer la sécurité énergétique et préserver l’environnement, tout en favorisant le développement pour l’ensemble des pays de la région sont des enjeux cruciaux. Propos recueillis par Laura Icart Il prévoit de fournir dès 2019 plus de 8 millions de mètres cubes de gaz par jour sur une période de quinze ans. Le montant de la transaction s’élève à 10 milliards de dollars. 2 Deuxième réunion de la plateforme gaz de l’Union pour la Méditerranée, qui s’est tenue le 27 septembre 2016 à Barcelone. 1
L’OME travaille actuellement à la révision de son étude sur les perspectives de l’énergie dans la Méditerranée à l’horizon 2040. Quels sont les premiers résultats obtenus ? Les résultats finaux de cet exercice de prospective seront publiés au début de l’année prochaine. Cependant, à l’occasion de la COP22, à Marrakech, nous allons présenter les premiers résultats ainsi que les scénarios de transition énergétique pour la région à l’horizon 2040 que nous développons avec l’association méditerranéenne des agences nationales de maîtrise de l’énergie (Medener) et avec le soutien de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie en France, (Ademe), dont un scénario optimiste s’appuie sur un fort développement des énergies renouvelables et des mesures accrues dans le domaine de l’effica-
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BRÈVES INFRASTRUCTURES
INFRASTRUCTURES
DU GNL FLOTTANT Le 27 septembre, du GNL a été produit lors d’un test sur l’unité de liquéfaction (FLNG) Caribbean FLNG construite par Wison offshore & marine pour le belge Exmar et basée en Chine. C’est la première fois au monde que du gaz est liquéfié sur une installation flottante.
« GAZEMENT VÔTRE » Thierry Trouvé, directeur général de GRTgaz et Philippe Richert, président de l’Association des régions de France (ARF), ont signé le 14 septembre dernier un accord de coopération pour une première période de deux années comprise entre 2016 et 2018. Le but de cette entente est pour l’ARF de bénéficier des conseils et de l’expertise de GRTgaz afin de promouvoir et de développer l’usage du gaz naturel sous de nombreuses formes : énergie pour le chauffage, stockage et transformation du surplus d’énergies renouvelables, biogaz, gaz carburant…
UN PROJET GNL EN CÔTE D’IVOIRE Le groupe français Total a signé le 4 octobre des accords avec la Côte d’Ivoire en vue de créer un consortium dont il assurerait le pilotage afin de construire un terminal d’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) qui serait opérationnel mi 2018. Le projet porte sur la création d’une unité de stockage et de regazéification flottante (FPSU) dont la capacité initiale afficherait 100 millions de mètres cubes.
GRTGAZ SE MODERNISE GRTgaz renouvelle son identité visuelle dans le cadre de son nouveau projet d’entreprise « GRTgaz 2020 » structuré autour de deux ambitions stratégiques pour l’entreprise : devenir un opérateur résolument engagé dans la transition énergétique et être reconnu comme un leader des infrastructures gazières en Europe. « Cette identité visuelle incarne notre nouveau projet d’entreprise et nos réponses aux défis énergétiques actuels et futurs, comme l’essor des gaz renouvelables et des nouveaux usages du gaz, la convergence accrue des systèmes électriques et gaziers, ou encore le développement du digital » a déclaré Thierry Trouvé, directeur général de GRTgaz, à l’occasion du lancement de « GRTgaz 2020 ».
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© GRTGAZ
Thierrry Trouvé (à gauche) et Philippe Richert.
COOPÉRATION ET TENSIONS AU SEIN DE L’UE De grands groupes énergétiques européens ont renouvelé mardi leur soutien au gazoduc Nord Stream 2, appelant à coopérer avec la Russie avec qui Bruxelles connaît les pires tensions depuis la fin de la Guerre froide. Le géant anglo-néerlandais Shell, l’autrichien OMV, le français Engie et d’autres groupes ont uni leurs voix à Saint-Pétersbourg (au nord-ouest de la Russie) à l’occasion d’un forum gazier pour soutenir le projet de gazoduc Nord Stream 2. Bien que le soutien de ces grands énergéticiens constitue un argument de poids, le gazoduc continue de diviser les Européens. L’Allemagne soutient le projet alors qu’un front de l’est, mené par la Pologne, s’y oppose fermement. S’il est construit, Nord Stream 2 doit doubler le gazoduc existant Nord Stream et relier comme lui la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique. Cette nouvelle conduite sousmarine aurait une capacité de 55 milliards de mètres cubes, pour un coût estimé à 8 milliards d’euros.
INFRASTRUCTURES
ÉVÉNEMENT
Dunkerque, ça c’est fait ! Le 8 juillet dernier, devant un parterre de 350 personnes réunies pour l’occasion et issues pour la plupart du monde maritime, un premier méthanier battant pavillon espagnol a accosté au terminal de Dunkerque, venant couronner près de cinq ans d’un chantier hors normes et le début de la mise en œuvre industrielle du site.
© DUNKERQUE LNG HAPPY DAY
Arrivée du premier méthanier à Dunkerque.
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remier méthanier à accoster au port de Dunkerque, le Madrid Spirit, 280 mètres de longueur et quelque 130 000 mètres cubes de gaz naturel liquéfié à son bord, en provenance de l’usine de liquéfaction de Bonny, au Nigéria, a été accueilli avec beaucoup d’émotion et de fierté par l’ensemble de personnes présentes. « L’arrivée de ce premier navire est une étape fondamentale, fruit d’une mobilisation de toutes les équipes du projet, qui marque la fin de la construction et le démarrage industriel du terminal », a notamment déclaré Marc Girard, président de Dunkerque LNG, filiale à 65 % d’EDF chargée de mener le projet du terminal méthanier, en précisant que le GNL était désormais « vivant » dans le terminal. Un enthousiasme collectif qui vient clôturer la fin du deuxième plus grand chantier industriel français qui a nécessité notamment plus de 12 millions d’heures de travail, a rassemblé 800 entreprises sous-traitantes et près de 8 500 travailleurs.
Pour regazéifier ce gaz liquéfié à - 162 °C par élévation de la température, Dunkerque LNG a utilisé les eaux tièdes issues du refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire de Gravelines toute proche. Le GNL a été stocké dans le réservoir 3 du site qui peut contenir jusqu’à 190 000 mètres cubes (comme les deux autres). Un second bateau est arrivé le 7 août afin de finaliser les essais. Durant tout l’été, le terminal a été testé en condition normale de fonctionnement. Un incident, survenu fin juillet, lié à un dysfonctionnement matériel a prolongé d’un mois environ la phase d’essai. Le 15 septembre dernier, le terminal méthanier de Dunkerque accueillait sur sa jetée son 2e navire de GNL, l’Hispania Spirit. En provenance du Pérou et armé par un équipage espagnol de la société Teekay, le méthanier a déchargé environ 130 000 m3 de GNL. Le démarrage du service commercial est prévu dans les semaines à venir par le gestionnaire du terminal.
Une mise en service industrielle Après l’opération inaugurale de déchargement du Madrid Spirit, le terminal a procédé le 20 juillet à une nouvelle étape : sa première émission de gaz sur le réseau de GRTgaz à partir des 135 653 mètres cubes de gaz naturel liquéfié livrés.
Laura Icart
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ANALYSE
Interconnexions : la France au cœur du réseau européen La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a publié le 14 juin dernier un rapport sur les interconnexions électriques et gazières françaises. Dans son état des lieux, le régulateur fait ressortir deux points principaux : les réseaux français sont bien interconnectés avec les réseaux des États voisins et leur utilisation est de plus en plus efficiente. Explications.
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rès bien intégrée au marché européen du gaz, la France est un pays particulièrement connecté, comme le souligne la CRE dans son rapport.
Une progression constante, un bilan positif Les gestionnaires de réseaux de transport français ont investi environ 3 milliards d’euros ces dix dernières années. Le régulateur a activement poussé en ce sens si bien que les capacités fermes d’entrée et de sortie de la France ont été portées en 2015 à respectivement 3 585 giga wattheures par jour (GWh/j) et 658 GWh/j, contre 2 345 GWh/j et 304 GWh/j en 2005, soit une hausse constatée de plus de 50 % en entrée et de presque 120 % en sortie sur une décennie. Cette hausse s’explique notamment par la mise en service en 2015 de nouvelles interconnexions avec l’Espagne et la Belgique. À Pirineos, les capacités fermes sont passées de 165 GWh/j à 225 GWh/j dans le sens de l’Espagne vers la France, le seul qui vaille pour le moment. La nouvelle connexion d’Alveringem (270 GWh/j) permet depuis la fin de l’année dernière d’exporter vers la Belgique du gaz non odorisé importé depuis le terminal de GNL de Dunkerque notamment. En outre, la France dispose de quatre terminaux méthaniers - Fos-Tonkin, Fos-Cavaou, Montoir-deBretagne et Dunkerque LNG (mis en service en juillet dernier) - pour réceptionner du GNL. Le régulateur souligne également que le niveau des capacités d’interconnexions de la France avec ses voisins frontaliers permet à notre pays de répondre pleinement à l’objectif de l’intégration des marchés européens fixé dans le troisième paquet1. Si le bilan des capacités d’entrée et de sortie de gaz en France est positif, dû notamment à d’importants investissements dans le secteur, l’épineuse question de la création de nouvelles interconnexions dont les projets s’avèrent complexes et coûteux est au cœur des préoccupations du régulateur. La commission précise dans son rapport qu’elle « veillera à éviter que les consommateurs de gaz et d’électricité ne soient exposés à des coûts considérables pour construire
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des infrastructures dont l’utilité pour la construction du marché européen et la sécurité d’approvisionnement n’aurait pas été démontrée ». Dans le secteur gazier, c’est le projet Midcat en particulier qui est pointé du doigt par le régulateur qui estime que son utilité reste à l’heure actuelle à démontrer. Midcat : l’imbroglio gazier Cette nouvelle interconnexion gazière, qui doit doubler la capacité de transport de gaz de l’Espagne vers la France, grâce à 224 kilomètres de nouveaux tuyaux à travers les Pyrénées, a déjà fait couler beaucoup d’encre. Défendu par le transporteur français TIGF, par l’italien Snam et par l’espagnol Enagas, et soutenu par Bruxelles, ce projet, évalué à près de 3 milliards d’euros dont plus de 2 milliards imputés à la partie française « pour créer des capacités représentant jusqu’à 15 % environ des consommations de gaz en France et en Espagne », ne recueille pas les faveurs du régulateur et de la plupart des acteurs français. Ils l’estiment non seulement trop coûteux mais également en totale inadéquation avec les besoins actuels sur le marché du gaz. Si Midcat ne recueille pas tous les suffrages, la CRE n’est cependant pas réfractaire aux nouveaux projets si elle estime qu’il existe un besoin sur le marché et des sources de financement. L.I. 1 Le troisième paquet énergie, adopté le 13 juillet 2009, est composé de cinq textes, dont la troisième directive gaz.
Infrastructures. DOSSIER LA REVUE DU GAZ NATUREL, DU BIOMÉTHANE, DU BUTANE ET DU PROPANE ÉDITÉE PAR L’ASSOCIATION FRANÇAISE DU GAZ WWW.AFGAZ.FR
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N°2014-1 / JANVIER - MARS
ENTRETIEN
DOSSIER
2017
E FORMULIELLE R TRIMEST
ENTRETIEN
GERTJAN LANKHORST, président d’Eurogas et président-directeur général de la société néerlandaise GasTerra
« Je suis fermement convaincu que l’achèvement du marché européen de l’énergie permettra de mettre en avant les nombreux avantages que présente le gaz en tant que source d’énergie » Vous avez été élu président d’Eurogas en juin nisseurs et des gestionnaires des réseaux de distribution, dernier à Venise. Quelles sont les priorités de nous devrions donc avoir beaucoup de choses à apporter à votre mandat ? ce débat. Enfin, nous devons continuer à mettre en avant les Je pense que dans l’immédiat, nous devons nous concentrer aspects positifs du gaz, qui peuvent souvent être négligés sur le développement du paquet énergie-climat 2030. Il est ou même tenus pour acquis. Les préoccupations actuelles impératif que l’Europe prenne la bonne voie et tire les leçons sur le gaz ne doivent rien enlever au fait que le gaz demeure du paquet énergie-climat de 2020. L’une des composantes une énergie propre, sûre et compétitive. De grands progrès essentielles sera de faire en sorte que le système compeuvent être accomplis dans le secteur du chauffage par munautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE) joue exemple, où la pénétration future de technologies plus effipleinement son rôle, qui consiste à réduire les émissions de caces et l’introduction du gaz renouvelable permettront de carbone et à servir de signal pour l’investissement dans des nous assurer que le gaz reste une énergie de choix pour le technologies à faible émission de carbone. Eurogas contichauffage. Nous devons également nous tourner vers les nuera également à consacrer son expertise et son temps, opportunités qui se présentent dans des domaines tels que en coopération avec d’autres parties prenantes et organes le transport et saisir ces opportunités. institutionnels, à la mise en œuvre du marché intérieur de l’énergie. Bien que de grands progrès aient été réalisés, La politique énergétique européenne est d’autres efforts restent à accomplir et nous devons nous critiquée par les PDG des principales entreprises assurer de finir le travail, car il s’agit d’un point essentiel du secteur de l’énergie. À la mi-mars 2014, pour garantir des sources d’approvisionnement en gaz sûres, Eurogas a envoyé une lettre aux chefs d’État ou diversifiées et économiquement viables. Je suis fermement de gouvernement des États membres de l’UE CONTEXTE convaincu que l’achèvement d’un tel marché permettra de afin de souligner le besoin urgent de signaux mettre en avant les nombreux avantages que présente le politiques clairs pour stimuler l’investissement gaz en tant que source d’énergie. L’une des autres priorités dans les infrastructures énergétiques à sera d’étudier avec la Commission et les organes institutionfaible intensité carbonique. Avez-vous vu des nels des questions plus générales quant à la façon dont le évolutions depuis ? rôle des clients en tant qu’acteurs du marché de l’énergie se En fait, dans la lettre d’Eurogas, nous visions un certain développera et quelle devrait être la future conception du nombre de choses, notamment un objectif européen contraidétail. Nous devons l’accent sur des solu- sera gnant réduction Lors de la rentrée parlementaire, le texte demarché loi de de programmation pourmettre la transition énergétique audecœur des d’au moins 40 % des gaz à effet de serre, tions plus efficaces et durables basées sur le marché. Heuun principe sous-jacent d’utilisation d’approches basées débats. Présenté une première fois au Conseil des ministres le 18 juin dernier, le projet de loi a été soumis pour avis reusement, l’expertise d’Eurogas provient à la fois des foursur le marché et des mesures structurelles précoces pour à plusieurs instances pendant l’été.
DOSSIER
DOSSIER
Le gaz dans le nouveau modèle énergétique français À l’automne 2014 commence le travail parlementaire sur le texte de loi de programmation pour la transition énergétique qui fait suite au débat souhaité par le président François Hollande lors de la conférence environnementale de septembre 2012. Cette loi, dont le projet a été présenté par la ministre chargée de l’Énergie en juin dernier, a pour objectif de fixer la politique énergétique du pays pour les décennies à venir. Le présent dossier est l’occasion de revenir sur le texte du projet de loi de programmation pour la transition énergétique de Mme Royal, « un nouveau modèle énergétique français », et de présenter les avis de différentes instances concernées soumis avant le travail parlementaire. La contribution de l’AFG à la réflexion sur la transition énergétique y est publiée, elle apporte des compléments d’information sur les atouts du gaz pour répondre aux enjeux. Dans le cadre de ce dossier, MM. Michel Guilbaud, directeur général du Medef, Julien Aubert, député de Vaucluse, et Roland Courteau, sénateur de l’Aude, se sont exprimés sur le déroulement du débat national, les enjeux et les défis à relever par la France, ou encore la place du gaz dans le futur mix énergétique français. Le dossier met également en lumière le modèle énergétique mis en œuvre par notre voisin allemand.
Sommaire :
• Gestation de la loi pour la transition énergétique • Contribution de l’Association française du gaz à la réflexion sur la transition énergétique • Interview de Michel Guilbaud, directeur général du Medef • Interview de Julien Aubert, député de Vaucluse • Interview de Roland Courteau, sénateur de l’Aude • L’Energiewende : où en sont les Allemands ?
Gestation de la loi pour la transition énergétique
© EUROGAS
réviser le système communautaire d’échange de quotas d’émission. Je pense qu’il est juste de dire que sur ce point nous avons vu des résultats positifs, mais il reste encore beaucoup à faire. Les nouvelles lignes directrices relatives aux aides d’État sont bienvenues, en particulier l’approche globale qui consiste à intégrer l’énergie renouvelable au sein du marché, cela étant essentiel pour garantir un marché intérieur de l’énergie sûr et économiquement viable sans compromettre le développement futur des énergies renouvelables. La Commission européenne propose également un objectif de réduction des gaz à effet de serre comme pierre angulaire du cadre politique de 2030. Il s’agit là d’un point positif, mais reste à voir si l’objectif de réduction des gaz à effet de serre constituera ou non la pierre angulaire du paquet final. La proposition de réserve de stabilité du marché de la Commission constitue également un développement positif et devrait permettre de corriger le système communautaire d’échange de quotas d’émission. Néanmoins, en l’état actuel, la proposition ne permettra pas d’obtenir suffisamment tôt les résultats dont nous avons besoin ; il sera donc nécessaire de trouver plus rapidement une solution au problème de l’offre excédentaire des quotas du SCEQE. Nous craignons cependant que le débat sur la sécurité d’approvisionnement ne conduise pas l’Europe à s’éloigner des approches basées sur le marché, ce qui constituerait un élément clé pour garantir la sécurité de notre énergie. Bien sûr, la réunion du Conseil d’octobre constituera une étape très importante. Il est impératif que les décisions soient prises en octobre afin de ramener de la clarté au sein du marché.
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À
Transformer le possible en réel
Au mois de juin, le Conseil européen a dressé le bilan des progrès réalisés en vue d’une décision finale en octobre sur la politique énergieclimat à l’horizon 2030, et a soutenu la mise en œuvre immédiate de mesures d’urgence pour renforcer la sécurité énergétique européenne. Il a également été demandé au Conseil d’analyser plus en détail d’autres mesures à moyen et long
15/01/2015 16:49
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Gaz d’aujourd’hui • n 2014-3 • 37
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Les deux axes prioritaires Le projet de loi pour la transition énergétique repose sur les deux grands axes que sont la maîtrise de la consommation d’énergie et le développement des énergies renouvelables. Le texte donne la priorité aux économies d’énergie dans le bâtiment, qui reste le premier consommateur d’énergie devant les transports et l’industrie, et fort émetteur de gaz à effet de serre. Ce secteur représente un gisement prioritaire d’économies d’énergie, dont l’ampleur justifie, selon le projet de loi, « un puissant effort d’incitation et d’accompagnement des ménages et des professionnels ». C’est pourquoi celui-ci mobilise les outils techniques, juridiques et financiers nécessaires à une accélération rapide et une amplification massive de ce chantier qui doit notamment permettre de rénover 500 000 logements par an d’ici 2017. Il s’agit de stimuler conjointement, la demande et l’offre de travaux, en accompagnant les ménages, les collectivités territoriales, les entreprises et les professionnels du bâtiment. Le secteur des transports est, lui aussi, visé. L’objectif est de développer des transports moins émetteurs afin de réduire significativement la pollution de l’air. Il promeut par exemple les navires utilisant le gaz naturel liquéfié, en particulier au travers d’opérations pilotes. Le projet de loi pose également les bases du développement de l’économie circulaire et encourage la valorisation énergétique des déchets. Le second pilier du projet de loi pour la transition énergétique est le développement des énergies renouvelables « pour mieux diversifier nos sources d’alimentation, équilibrer notre production et renforcer notre indépendance énergétique ». Les énergies renouvelables, qui représentaient en 2012 14 % de la consommation d’énergie, doivent atteindre 23 % en 2020 et 32 % en 2030. Rien que dans le secteur des transports individuels et collectifs, les biocarburants, l’hydrogène et les biogaz devront couvrir 10,5 % puis 15 % des besoins. Le texte tente de simplifier les procédures et de stabiliser les règles afin d’accélérer l’émergence de filières industrielles. M.L.G.
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ENTRETIEN
ARNAUD MONTEBOURG Ministre du Redressement productif
L’année 2014 représente une année charnière pour le marché intérieur de l’énergie car le Conseil européen a fixé l’achèvement du marché intérieur pour cette année. Où en sommes-nous ? Que reste-t-il à faire ? En effet, cette année est importante pour le marché intérieur de l’énergie et bien que nous n’aurons certainement pas totalement atteint notre objectif cette année, de nombreuses pièces du puzzle sont en place et nous devons désormais porter nos efforts sur le travail restant à accomplir. Bien entendu, dans un premier temps, cela signifie qu’ilREVUE TRIMESTRIELLE / ABONNEMENT ANNUEL : 150 EUROS H.T. faut nous assurer de la mise en œuvre effective de la législation actuelle ainsi que la mise en œuvre de bon nombre de codes de réseau pour le gaz qui représentent des étapes esCouv_GA_2014_Vol1.indd 2 sentielles à l’achèvement du marché intérieur. Par ailleurs, un certain nombre de liaisons importantes ont été achevées ces dernières années mais d’autres investissements sur le réseau gazier européen sont encore nécessaires pour renforcer son interconnexion. L’achèvement des liaisons manquantes, ainsi que l’inversion du flux physique, devront donc être poursuivis en priorité.
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l’automne 2014 débutera le débat parlementaire sur la loi de programmation pour la transition énergétique, « un Int_GA_2014_Vol4.indd nouveau modèle énergétique fran4-5 çais ». Le texte tant attendu a été présenté par la ministre chargée de l’Énergie, Ségolène Royal, le 18 juin lors d’une communication au conseil des ministres. Le texte définitif du projet de loi sera présenté en conseil des ministres fin juillet, en vue d’une adoption dont la ministre assure qu’elle aura lieu – si le Parlement s’en saisit à l’automne – avant la fin de l’année. Matignon, lui, avait annoncé comme échéance le printemps 2015. D’ici là le texte a été soumis pour avis à plusieurs instances. Le Conseil national de la transition énergétique (CNTE) a adopté à la quasi-unanimité cette première mouture du projet de loi tout en apportant quelques propositions d’ajouts au texte. S’agissant des transports, le CNTE souhaite élargir le cadre du projet de loi, qui fait la part belle aux véhicules électriques. Il estime que « l’ensemble des motorisations alternatives doivent être soutenu et développé », ce qui inclut les véhicules alimentés au biogaz ou à l’hydrogène. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a également adopté à une très large majorité un avis. Toutefois, il appelle à intégrer un « objectif national d’efficacité énergétique à l’horizon 2030 » également prôné par le CNTE. Le Conseil national de l’industrie (CNI) a remis un avis unanime à la ministre tout en relevant « quatre enjeux qui paraissent devoir être complétés dans le projet de loi ». Le CNI propose d’intégrer la compétitivité du prix de l’énergie aux objectifs ciblés de la politique énergétique et aux critères de la programmation pluriannuelle. Il demande que les efforts d’efficacité énergétique de l’industrie soient encouragés et regrette que le projet de loi n’intègre pas une stratégie gaz pour soutenir les gazo-intensifs. Le conseil recommande l’identification des moyens nécessaires pour accompagner la transition énergétique (comme la formation, le financement) et souhaite que l’industrie soit associée à la gouvernance du dispositif en étant consultée sur les programmations pluriannuelles de l’énergie et sur les budgets carbone.
LE DEVENIR DE L’EUROPE DE L’ÉNERGIE
GERTJAN J. LANKHORST Gertjan Lankhorst est né à Amsterdam le 22 décembre 1957. Il a étudié l’économie générale à l’université libre d’Amsterdam de 1982 à 1986. En 1986, il entre au département de la politique économique générale au GPL néerlandais des Affaires économiques. sein du ministère Il a occupé différentes fonctions au ministère dont celle de directeur pétrole et gaz (1996–1999), directeur à la concurrence (1999–2003) et directeur général à l’énergie (2004–2005). Gertjan Lankhorst a été nommé président-directeur général de GasTerra le 1er septembre 2006 et a été élu président de l’Association européenne des fournisseurs de gaz, Eurogas, le 20 juin 2014.
15/01/2015 16:46
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INFRASTRUCTURES
REPORTAGE
Brèves de chantier Le projet « artère du Santerre » visant à renforcer les capacités de transport de gaz naturel entre la Picardie et le nord de la France par le doublement partiel de la canalisation existante dans la région des Hauts-deFrance entre dans sa dernière ligne droite. Sa mise en service est prévue courant novembre.
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’est en avril 2013 que GRTgaz a présenté pour la première fois le tracé de sa nouvelle canalisation baptisée « artère du Santerre ». Après une phase d’études et une enquête publique, c’est en juin 2015 que l’entreprise obtient le précieux sésame du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie de construire et d’exploiter l’artère du Santerre. Les travaux de construction du gazoduc ont débuté le 1er mars et doivent s’achever dans quelques jours. Un projet dans les tablettes depuis 2011 Le gazoduc artère du Santerre relie les communes de Chilly (Somme) à Res© AFG/LI sons-sur-Matz (Oise). Selon Daniel Dufour, directeur du projet chez GRTgaz, il permettra de Franchissement « sécuriser l’alimentation en gaz dans les Hauts-de-France, de la route notamment en période hivernale quand le réseau est fordépartementale. tement sollicité », dans une région où la quantité de gaz nécessaire au moment des pics de froid n’a fait que croître ces dernières années. La canalisation, d’une longueur de 33 km, est composée de tubes en acier soudés bout à bout d’environ 900 mm de diamètre. L’artère du Santerre transportera du gaz via une forte pression (entre 67 et 80 bars). À l’entrée des villes, un prestataire se chargera de distribuer ce gaz dans les foyers et les industries, mais avec une pression redescendue à 4 bars. La canalisation sera équipée de dispositifs d’interruption de transit appelés « postes de sectionnement » et postes de « demi-coupure » : un poste de sectionnement à Grivillers, un poste de demi-coupure à Ressons-sur-Matz et à Chilly. Ces postes permettent d’effectuer la maintenance et d’assurer la sécurité de l’ouvrage en interrompant la circulation du gaz si nécessaire puis en décomprimant un tronçon de canalisation. Des nécropoles gauloises, une occupation romaine et plus d’une tonne de munitions découvertes entre mars et décembre 2015 Le démarrage des travaux sur les postes d’extrémités (Chilly et Ressons-sur-Matz) a eu lieu en juillet 2015 - un
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calendrier de travaux adapté en partie avec les fouilles archéologiques menées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) qui a déterminé trois zones de fouilles sur le tracé du gazoduc. Réalisées pendant le dernier trimestre 2015, les fouilles ont mis à jour une nécropole gauloise et de nombreux vestiges préhistoriques à Dancourt-Popincourt et à La Chavatte où 12 sépultures et 14 tombes ont été découvertes. À Bus-la-Mésière, ce sont des vestiges de bâtiments, les enduits peints d’une villa gallo-romaine qui ont été repérés, attestant de la présence romaine dans ce village. Quelques mois auparavant, en mars, plus de 1,5 tonne d’obus datant de la Première Guerre mondiale avaient été découverts à Chilly. Parmi ces munitions, on dénombrait 61 bombes de tranchées (ou « crapouillots ») de 16 tonnes, une de 18 tonnes, 13 de 40 tonnes, 17 obus et 43 grenades françaises, allemandes et britanniques. Une entente avec les agriculteurs locaux en février 2016 Le 23 février, après plusieurs mois concertation, les représentants de GRTgaz ont signé une convention locale d’application spécifique avec les chambres d’agriculture de la Somme et de © AFG/LI l’Oise. Outre la réparation financière des préjudices occasionnés lors du chantier de pose, elle Le bardage traite des conditions de remise en état (positionnement des des sols occupés durant le chantier. tubes avant soudure. Avant les travaux, chaque agriculteur dont au moins l’une des parcelles est concernée par le chantier a signé une convention avec GRTgaz. « Les indemnités prennent en compte le type de récoltes effectuées sur la parcelle, la surface de terre mise en indisponibilité le temps des travaux ou encore l’accès au champ durant cette période. Si l’artère traverse le champ, l’exploitant sera davantage indemnisé que si c’est sur un bord de parcelle », précise Daniel Dufour.
INFRASTRUCTURES
© Antonin Borgeaud
Vue du boccage
Le démarrage des travaux de construction en mars 2016 Les premiers travaux d’enfouissement de cette nouvelle canalisation ont débuté en mars. En quelques © AFG/LI mois, ce sont quelque 1 800 tubes de 17 mètres qui Soudure automatique ont été disposés pour parcourir les des tuyaux. 33 km nécessaires à la traversée de 20 communes du sud-est de la Somme et quelques communes de l’Oise. Si le chantier n’a pas représenté de difficultés techniques particulières, le franchissement de routes départementales très fréquentées ou encore la traversée de l’Avre a tout de même nécessité des forages selon une technique particulière et relativement coûteuse environ 2 millions d’euros sur un coût total estimé à près de 50 millions d’euros. À la reconquête de la biodiversité depuis février 2015 Dans la conduite de ses projets, GRTgaz ambitionne de limiter l’impact de ses activités sur l’environnement. Différentes mesures ont été mises en place durant ce chantier, en partenariat avec les institutions et les associations locales : de l’éco-pâturage pour l’entretien des espaces verts, l’installation de ruches à proximité de la station d’interconnexion de Cuvilly et également des plantations d’arbres têtards dans le parc naturel régional de l’Avesnois. La véritable nouveauté de ce chantier réside dans le fait d’avoir regroupé toutes les mesures compensatrices sur un
seul site, choisi par le centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) vallée de Somme pour son intérêt environnemental : le marais de Villers-lès-Roye, une zone humide située sur la commune de Villers-lès-Roye à quelques kilomètres du chantier. « La © CPIE forêt avait presque entièrement envahi le marais, entraînant avec elle la disparition de toute une faune et une flore spécifiques » Le marais de explique Coralie Morel, chargée de mission biodi- Villers-lès- Roye. versité au CPIE. « Grâce à ce partenariat, nous avons entamé des travaux de restauration notamment par l’intermédiaire de chantiers natures. C’est un site où nous avons observé plus de 190 espèces animales et végétales » souligne-t-elle. La signature d’une convention entre le CPIE, la commune et GRTgaz il y a presque deux ans a permis de mener de nombreuses actions sur le site. Le CPIE en charge de la restauration et de la gestion écologique du marais a déjà réalisé plusieurs inventaires floristiques et faunistique qui ont d’ailleurs donné lieu début 2016 à la rédaction d’un plan de gestion quinquennal et à des chantiers nature pendant la saison estivale. GRTgaz s’est engagé à assurer le financement du site sur les vingt prochaines années. À l’été 2018, le marais deviendra un lieu accessible à tous. Laura Icart
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BRÈVES ÉCONOMIE ET FOURNITURE
ÉCONOMIE ET FOURNITURE
GAZ DE BORDEAUX A LE VENT EN POUPE !
ENI ET BP S’ACCORDENT
Gaz de Bordeaux a remporté mi-septembre un contrat de plus de 60 millions d’euros. Le groupe bordelais a été retenu par le syndicat de l’énergie de la Gironde associé aux quatre autres départements de la région (Dordogne, Landes, Pyrénées-Atlantiques et Lot-et-Garonne) pour fournir au cours des trois prochaines années 1,35 térawattheure (TWh) de gaz naturel à plus de 500 communes telles que Bergerac, Périgueux, Mont-de-Marsan mais également des collèges, des maisons de retraite ou encore des centres communaux. Ce seront en tout et pour tout 3 600 points de consommation qui seront alimentés par le gaz naturel de la société. « En près de quatre ans, Gaz de Bordeaux a doublé le volume fourni partout en France et envisage d’atteindre les 12 TWh d’ici à 2017 », indique le fournisseur.
L’italien ENI vient de trouver un acquéreur pour le gaz naturel liquéfié qu’il entend exploiter au Mozambique, dans le champ en développement de Coral. En effet, le groupe britannique BP a signé le 4 octobre un contrat avec le consortium en charge du projet pour l’achat de gaz naturel liquéfié (GNL) qui sera produit par l’unité flottante de liquéfaction Coral South Floating LNG. Cette dernière sera installée au large des côtes du Mozambique. Le contrat porte sur la vente, pour une période de plus de vingt ans, de l’ensemble des volumes de GNL qui seront produits depuis l’unité Coral South Floating LNG, dont la capacité est estimée à près de 3,3 millions de tonnes par an de GNL.
ÇA GAZE À ALGER ! Le 28 septembre, la déclaration finale du 15e Forum international de l’énergie d’Alger (IEF15) a relevé l’importance du gaz naturel dans le pays. En effet, l’Algérie devrait produire plus de 9 milliards de mètres cubes supplémentaires de gaz dès 2017, lorsque trois projets en attente dans le sud-ouest seront mis en service. Le projet « Touat gaz » prévoit une production de 12,8 millions de mètres cubes par jour dès février 2017, tandis que celui de Timimoun prévoit 4,6 millions de mètres cubes par jour dès mars et celui de Reggane 8 millions de mètres cubes à partir de juin. La Sonatrach affirme que d’autres sources de gaz ont été trouvées plus au sud, à Akabli et Tidikelt, en plus d’Alrar à l’est, qui devraient produire du pétrole et du gaz.
QUELLES ÉNERGIES, DEMAIN ? À l’occasion du Congrès mondial de l’énergie, le Conseil mondial de l’énergie a révélé le 10 octobre à Istanbul trois scénarios énergétiques distincts. Parmi eux, ces observations : la demande énergétique par habitant atteindra son pic avant 2030, la demande d’électricité va doubler d’ici 2060, le solaire et l’éolien atteindront respectivement 20 et 39 % de la production électrique d’ici 2060 et le pétrole continuera à jouer un rôle considérable dans le secteur des transports, représentant plus de 60 % du mix énergétique jusqu’en 2060.
LUTTER CONTRE LA PRÉCARITÉ ÉNERGÉTIQUE ! Ségolène Royal a annoncé, le 6 octobre, le nom des douze programmes lauréats de l’appel à projets pour lutter contre la précarité énergétique dans l’habitat et les transports, lancé en mai dernier dans le cadre du dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE). Neuf programmes sélectionnés visent à lutter contre la précarité énergétique dans l’habitat. Les lauréats sont l’Agence nationale de l’habitat (Anah, 600 à 700 copropriétés fragiles bénéficiaires), le groupe Engie (11 500 ménages suivis), le groupe Engie Home Services (278 000 ménages suivis), le bailleur social Habitat 29 (7 000 ménages bénéficiaires), le groupe La Poste et la société Inventage (200 000 ménages concernés), le fonds de dotation Solinergy (12 000 ménages soutenus), la société Sonergia (4 000 à 16 000 ménages bénéficiaires), la société de conseil Urbanis (40 copropriétés accompagnées) et le projet « Cleo » (130 000 ménages bénéficiaires). À noter que trois lauréats ont également été nommés dans le secteur des transports.
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
TRIBUNE LIBRE JEREMY BENTHAM
Vers le zéro émission nette :
la perspective d’un monde prospère Qu’est-ce qu’un scénario prospectif selon Shell ? Shell utilise les scénarios depuis le début des années 1970 pour permettre aux leaders de prendre de meilleures décisions pour l’entreprise. Ils les aident à mieux comprendre comment le monde pourrait évoluer, en posant la question « que se passerait-il si ? » afin d’explorer diverses perspectives d’avenir et créer des scénarios plausibles autour d’elles. Ils envisagent les tendances à long terme de l’économie, de l’offre et de la demande énergétique, des changements géopolitiques ainsi que les facteurs de motivation qui encouragent le changement. Ces scénarios ne constituent pas des prédictions d’événements ou de résultats probables, et les investisseurs ne doivent pas s’en remettre à eux lorsqu’ils décident d’investir dans des actions de Royal Dutch Shell PLC. Parvenir à un monde avec zéro émission nette de carbone dans lequel 10 milliards de gens prospèrent dans le courant du siècle à venir est faisable, mais ce ne sera pas chose facile. Jeter un coup d’œil sur ce que sera l’avenir vers la fin du siècle peut nous aider à choisir le chemin à emprunter. © SHELL
Jeremy Bentham est vice-président environnement économique mondial et responsable du service des scénarios chez Shell. Il est également membre de l’équipe dirigeante de la stratégie de la société après plus de trente ans d’expérience au sein de Shell et des études à Oxford, à l’Institut de technologie de Californie et au MIT.
Planter le décor Il est clair que notre système énergétique entre dans une GPL période de transition majeure. Il y a déjà eu des transitions par le passé. Au cours des XIXe et XXe siècles, nous avons connu une utilisation croissante du charbon, puis du pétrole et du gaz. La prospérité a augmenté et s’est répandue. Mais depuis les années 1970, la répartition des combustibles est restée relativement statique. Récemment en revanche, avec des préoccupations supplémentaires relatives aux émissions locales et dans l’atmosphère, nous avons aussi constaté des rythmes de croissance impressionnants des nouvelles technologies telles que l’éolien et le solaire. Nous voyons ainsi émerger une nouvelle ère de transition. La demande énergétique future Pour commencer, quantifions l’ampleur de la demande énergétique à venir. Nous savons qu’au fur et à mesure que les revenus augmentent, la consommation énergétique augmente proportionnellement au PIB jusqu’au niveau d’environ 20 000 dollars par habitant par an, à mesure que se développent les infrastruc-
tures de base, les industries, les logements et les équipements qui donnent une qualité de vie décente. Au-delà de ce point, la saturation commence à s’installer. En Amérique du Nord, le niveau de saturation de l’usage d’énergie primaire est d’environ 300 gigajoules par habitant et par an, tandis qu’en Europe et au Japon, où le rendement énergétique est plus élevé, ce niveau est d’environ 150 gigajoules par habitant par an. À l’avenir, si les pays en voie de développement utilisent de meilleures technologies et créent une efficacité structurelle grâce à des villes compactes intégrées qui possèdent de bons réseaux de transports en commun, il pourrait être possible d’obtenir une qualité de vie décente avec une consommation énergétique primaire d’environ 100 gigajoules par habitant. Si l’on considère une population future d’environ 10 milliards d’habitants d’ici la fin du siècle et que l’on multiplie ce chiffre par 100 gigajoules par habitant, on obtient environ 1 000 exajoules, ce qui représente environ deux fois le système énergétique actuel.
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
Les hydrocarbures et les énergies renouvelables (EnR) côte à côte Pour stopper la dangereuse accumulation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, nous devrons in fine ramener les émissions mondiales à zéro net. Mais divers degrés de décarbonation et de rendement énergétique seront atteints à des rythmes, en des endroits et dans des secteurs de l’économie différents. Les EnR ont un rôle indispensable à jouer, mais elles ne sont pas à elles seules une panacée en raison de leur faible densité énergétique ainsi que de leur disponibilité et leur intermittence variables. De plus, elles produisent surtout de l’électricité, or celle-ci est actuellement le vecteur de moins d’un cinquième de l’utilisation totale d’énergie primaire. Même si nous repoussons les limites de la technologie, la production de produits chimiques et de matières plastiques continuera à reposer sur les hydrocarbures, de même que les processus industriels à températures élevées (sidérurgie, cimenterie), le stockage d’énergie à haute densité ou encore le transport aérien. Les biocarburants ne peuvent satisfaire qu’une petite part de ce besoin. Il y aura donc une coévolution des hydrocarbures et des énergies renouvelables dans le système énergétique et il est inévitable qu’un certain niveau d’émissions subsiste au sein de certains secteurs et dans certaines régions dans un proche avenir. Zéro émission nette Il importe de reconnaître toutefois qu’un monde « net zéro » n’est pas forcément un monde sans aucune émission, mais dans lequel les émissions qui restent sont compensées ailleurs dans le système. Ceci veut dire que le monde aura besoin d’émissions « négatives » dans certains secteurs. Par exemple avec les pratiques agricoles augmentant la teneur du sol en carbone, le reboisement, la gazéification durable de la biomasse alliée au captage et stockage du carbone (CSC) pour la production d’électricité. Et pour compenser les émissions restantes et créer des opportunités d’émissions négatives ailleurs, nous aurons besoin de déployer le CSC à large échelle.
Des vecteurs énergétiques sans carbone Pour approcher du zéro net, nous avons besoin de faire appel à un ensemble de vecteurs sans carbone et en premier lieu l’électricité - car les technologies renouvelables vont être de plus en plus rentables. On devra assister à une croissance de l’électricité, qui fournit actuellement un cinquième de l’énergie consommée, pour que cette part représente au moins la moitié. Ceci sera notable pour les ménages et le secteur des services, mais devra englober aussi d’autres secteurs tels que l’industrie alimentaire et légère, ou encore les transports via les véhicules électriques. Enfin, le monde utilisera sans doute beaucoup plus d’hydrogène : comme carburant pour les véhicules électriques, pour stocker et transporter l’énergie et comme combustible thermique pour les fours. La promesse du rendement Limiter la demande énergétique mondiale à 100 gigajoules par personne et par an, tout en lui permettant une qualité de vie décente, ne sera possible qu’avec des efforts considérables en matière de rendement énergétique : véhicules plus légers, moteurs à plus haut rendement, pompes à chaleur, LED, processus industriels améliorés. Nous devrons améliorer le rendement énergétique des infrastructures urbaines, via des réseaux de transports en commun efficaces et des services publics intégrés. Des nouvelles pratiques Parvenir rapidement à un monde à zéro émission nette nécessitera d’importants développements en matière de technologie, de pratiques industrielles, agricoles et d’urbanisme, de comportement du consommateur et d’orientations politiques qui forment, favorisent ou obligent à ces transitions. Pour avancer dans ce sens, il faudra des niveaux de collaboration élevés entre les décideurs politiques, les entreprises et la collectivité au sens large. Les gouvernements doivent concentrer les incitations financières sur le carbone en général, en mettant en place des
Il importe de reconnaître toutefois qu’un monde « net zéro » n’est pas forcément un monde sans aucune émission, mais dans lequel les émissions qui restent sont compensées ailleurs dans le système. o
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
systèmes qui accordent de la valeur au fait d’éviter les émissions et en supprimant les subventions énergétiques qui faussent la donne là où elles existent encore. Des mesures sensées pour progresser vers un monde à zéro émission nette • Une tarification du carbone ou des mesures incitatives équivalentes, pour motiver les investissements dans la réduction des émissions et le rendement énergétique. Ceci encouragera aussi le déploiement des énergies renouvelables, le CSC, le nucléaire et les efforts pour diminuer le recours au charbon. • Des aides financières pour la R&D et le déploiement précoce des technologies prometteuses. • Des mesures incitatives pour passer de la biomasse classique à des sources d’énergie commerciales. • Des pratiques plus intelligentes et des réglementations plus strictes pour un développement urbain compact, des infrastructures intégrées et des immeubles à rendement énergétique élevé. • Des règlements ou des mesures incitatives pour investir dans les transports à faibles émissions.
• La suppression des subventions énergétiques là où elles existent encore et des mesures fiscales visant à maintenir des prix suffisamment élevés de l’énergie pour le consommateur final pour encourager le rendement énergétique et l’investissement dans le développement de technologies, sans étouffer l’activité économique. • Des normes de rendement énergétique exigeantes, pour une vaste gamme d’applications au niveau de l’usager final. • Des programmes d’occupation des sols, de reboisement et de régénération des sols. • Des mesures pour empêcher les fuites de carbone à travers les frontières par des échanges commerciaux entre les diverses juridictions. Les points de vue exprimés dans cette publication sont ceux de l’auteur et ne représentent pas nécessairement celui de Royal Dutch Shell PLC, ni d’aucune de ses filiales (Shell).
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BRÈVES UTILISATIONS ET MARCHÉS
UTILISATIONS ET MARCHÉS
UN NOUVEAU SOUTIEN POUR LE GNV L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a lancé le 19 juillet un appel à projets « solutions intégrées de mobilité GNV », ayant pour objectif « de cofinancer des projets innovants et à fort potentiel pour l’économie française, de déploiement simultanément sur plusieurs territoires de stations GNV et de flottes de véhicules s’y avitaillant ». Les projets présentés devront intégrer les caractéristiques suivantes : comporter au moins cinq stations d’avitaillement ; les stations ne devront pas être réservées à l’usage exclusif des porteurs du projet mais au contraire être d’accès public et permettre à tout véhicule GNV de s’avitailler ; elles devront également comporter un nombre de véhicules acquis et mis en circulation au moins vingt fois supérieur au nombre de stations implantées. Une clôture intermédiaire du dépôt des dossiers est fixée au 30 novembre 2016. La clôture finale du dépôt est fixée au 30 mars 2017.
LA RÉGION PACA RÊVE DE MOBILITÉ PROPRE GRDF et la Fédération nationale des transports de voyageurs de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ont signé à Marseille le 6 octobre une convention pour promouvoir une mobilité durable basée sur le gaz naturel pour véhicules (GNV).
© GRDF
CARNIVAL A TROUVÉ SON GNL Pour assurer son approvisionnement en GNL marin, la compagnie maritime américaine Carnival a signé le 3 octobre un accord-cadre avec Shell Western LNG. La filiale de l’anglo-néerlandais Royal Dutch Shell va ainsi fournir du GNL aux deux filiales de Carnival, Aida Cruises et Costa Cruises, qui doivent mettre en service chacune leurs deux navires propulsés au GNL en 2019.
DIRECT ÉNERGIE S’OFFRE UNE CCCG DE 400 MW Le groupe français Direct Énergie a annoncé le 28 septembre la signature d’un accord avec l’italien Enel pour le rachat de la centrale thermique à cycle combiné gaz (CCCG) de Charleroi, en Belgique. L’accord porte sur un montant de 36,5 millions d’euros. Direct Énergie, qui avait déjà acheté la CCCG à Alpiq Bayet en France en novembre dernier, cumule désormais une capacité de 800 mégawatts. © DIRECT ENERGIE
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UTILISATIONS ET MARCHÉS
FOCUS CNPG
2016 : cette année-là ! Inauguré en janvier 2012, le Centre national d’expertise des professionnels de l’énergie gaz (CNPG) ne cesse de prendre de l’importance. Si son principal objectif reste l’amélioration du niveau de sécurité des installations intérieures de gaz et la prise en compte des nouvelles solutions, il accompagne, grâce à l’élaboration de ses prochains guides réglementaires, la filière gaz dans une politique innovante et réactive en diapason avec l’innovation industrielle. Retour sur une année 2016 pleine de promesses.
Les temps forts de l’année Si l’établissement de la feuille de route adaptée au contraintes de publication du nouvel arrêté du 2 août 1977 a été l’objet de nombreuses réunions et concertations, les travaux menés par les groupes de travail du CNPG sont entrés dans leur phase finale. Ainsi, celui chargé des lieux de production d’énergie (LPE) a axé son travail sur les définitions des différents lieux et sur leurs conditions d’alimentation en gaz. Le groupe consacré aux contrôles et vérifications présentera d’ici la fin de l’année de nouveaux modèles pour les certificats de conformités. Tandis que celui consacré aux appareils de remplissage des véhicules fonctionnant au gaz naturel comprimé (GNC) prépare désormais les règles d’installation pour les guides réglementaires, conformément aux dispositions du futur arrêté. Le CNPG a signé une convention avec le ministère de l’Environnement, de l’énergie et de la mer (MEEM) qui lui permettra d’être soutenu financièrement, notamment dans ses actions de communication et d’information auprès de la filière. La refonte de l’arrêté du 2 août 1977 Le MEEM a chargé le CNPG de travailler sur la refonte de l’arrêté du 2 août relatif aux règles techniques et de sécurité applicables aux installations de gaz combustibles ou d’hydrocarbures liquéfiés situés à l’intérieur des bâtiments d’habitions ou de leurs dépendances. Les différents travaux menés par les groupes de travail vont permettre d’aboutir à un projet d’arrêté qui sera validé par le conseil d’administration du CNPG et remis au MEEM au cours du quatrième trimestre de cette année.
Le droit quantique made in CNPG Le CNPG a dévoilé en juin dernier son nouveau concept, baptisé « droit quantique ». Philippe Schönberg, président du CNPG, nous explique cette petite révolution sémantique : « Comme pour le chat de Schrödinger, pris en exemple dans la théorie de la mécanique quantique et qui a la particularité d’être mort et vivant à la fois, le droit quantique du CNPG est un droit dur et souple à la fois. Il est composé d’un texte réglementaire, rédigé de manière exigentielle, et des guides réglementaires du CNPG, reconnus préalablement par les pouvoirs publics comme modes de preuve. Cette combinaison offre ainsi la sécurité juridique du droit dur, en proposant un référentiel reconnu par tous, avec les avantages du ʺdroit soupleʺ en permettant une adaptation immédiate en cas d’innovation et de mise sur le marché de nouveaux produits. Ici le guide CNPG reste d’application volontaire mais permet lorsqu’il est choisi d’apporter la preuve de la conformité requise par l’exigence réglementaire. » L.I.
Une com’ animée Le CNPG dévoilera prochainement une campagne de communication inédite. À travers des films d’animation, le public aura l’occasion de découvrir d’une manière ludique les missions du CNPG, la notion de droit quantique ou encore les quinze points forts du futur arrêté. © CNPG
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UTILISATIONS ET MARCHÉS
PETIT ENCYCLOPÉDIE GAZIÈRE
Le rooftop adiabatique : une solution innovante pour chauffer et rafraîchir les locaux de grand volume
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lliance d’une unité de toiture au gaz naturel et d’une unité de rafraîchissement adiabatique, le rooftop à rafraîchissement adiabatique assure chauffage et rafraîchissement de locaux de grand volume neufs et existants (concessions automobiles, bâtiments industriels, commerces). Conçu et fabriqué par la société française Australair, il est distribué par cette même société, France Air, Exeltec et Gaz Industrie. De par ses performances, mesurées sur site par GRDF et l’Ademe, cet équipement constitue une alternative économique à la climatisation réversible, grâce notamment à des consommations électriques très réduites. Assurer de bonnes conditions de confort en toute saison pour les occupants d’un bâtiment de grand volume peut être très énergivore et coûteux et nécessite la mise en place de solutions adaptées. Un brassage de l’air suffisant pour éviter la stratification, sans pour autant « décoiffer » l’occupant, une puissance et un débit d’air suffisants pour assurer rapidement le confort et une régulation maîtrisée sont autant de caractéristiques nécessaires dont dispose le rooftop adiabatique, pour le chauffage comme le rafraîchissement. Un principe de fonctionnement simple et éprouvé L’innovation d’Australair a consisté à implanter une unité de rafraîchissement adiabatique au sein d’un rooftop gaz, mutualisant ainsi le ventilateur utilisé. En mode chauffage, le fonctionnement est celui d’un rooftop gaz. L’appareil fonctionne principalement en recyclage d’air. L’air repris passe au travers d’un échangeur tubulaire, chauffé par
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une rampe de brûleurs. Les produits de combustion sont rejetés à l’extérieur par une ventouse. Equipé d’une batterie gaz de 35 ou 55 kW, le rooftop dispose de plusieurs vitesses de soufflage d’air pour moduler sa puissance en fonction des besoins. Les débits d’air importants (jusqu’à 10 000 mètres cubes par heure) au regard de la puissance de l’équipement apportent un taux de brassage qui garantit confort et efficacité, sans ajout de déstratificateurs. Le rendement sur PCI (pouvoir calorifique inférieur) de la batterie gaz atteint 92 %. En mode rafraîchissement, l’appareil travaille en tout air neuf. L’air est aspiré par le ventilateur centrifuge et traverse un média en cellulose maintenu constamment humide. Au contact de l’air chaud, l’eau s’évapore et absorbe la chaleur. L’air humidifié et refroidi est soufflé dans le local. Afin de limiter la consommation d’eau, celle-ci est recyclée via un réservoir intégré au rooftop et régulièrement vidangé. En première approche, Australair préconise un apport d’air rafraîchi de huit à dix volumes par heure, à moduler selon les apports internes. Le débit de soufflage met le bâtiment en légère surpression, évacuant l’air chaud vers l’extérieur. Contrairement à une climatisation classique, la présence d’ouvertures vers l’extérieur, voire d’une extraction d’air, est bienvenue afin d’évacuer l’air chaud et de garantir des conditions hygrométriques confortables. La régulation mise en place garantit une hygrométrie inférieure à 70 % dans la pièce. Confort et économies d’énergie, été comme hiver En mode chauffage, le rooftop adiabatique présente les avantages des solutions gaz : la puissance disponible garantit l’atteinte rapide de la consigne. Le maintien de la puissance et des performances délivrées quelle que soit la température extérieure et sans appoint (résistance électrique par exemple) permet d’assurer un confort tout l’hiver sans voir la facture énergétique s’envoler. En mode rafraîchissement, le rooftop adiabatique permet de réduire fortement la facture énergétique, la consommation d’électricité étant limitée au ventilateur et à la pompe à eau. Aucun compresseur ne doit être alimenté comme dans une pompe à chaleur. Sur la saison de rafraîchissement, une efficacité de 29 EER (coefficient d’efficacité
UTILISATIONS ET MARCHÉS
frigorifique, ou rapport de l’énergie délivrée sur l’énergie consommée) a été mesurée lors d’une instrumentation réalisée par GRDF et l’Ademe sur une concession BMW à Chenôve (Côte-d’Or), près de Dijon (voir encadré). En termes de confort d’été dans un bâtiment, les bonnes pratiques préconisent un delta de température maximum de 5 °C avec l’air extérieur (voir le mémento technique du bâtiment sur le confort thermique, Certu, juillet 2013). En rafraîchissement, la puissance délivrée par le rooftop adiabatique varie suivant les conditions extérieures (température et hygrométrie) et l’atteinte d’une température de consigne ne peut être garantie. La technologie permet cependant d’atteindre aisément un delta de température de 6 °C à 7 °C entre l’air extérieur et l’ambiance dans le local, dans des conditions climatiques « courantes » (conditions de référence de la RT 2012). Les mesures réalisées par GRDF et l’Ademe sur la concession BMW ont confirmé ces calculs, un delta de température de 11 °C ayant même été observé lors des journées les plus chaudes (plus de 38 °C à l’extérieur).
Un équipement innovant simple à mettre en œuvre et à maintenir Moins lourd qu’une toiture-terrasse électrique intégrant une pompe à chaleur, le rooftop adiabatique s’installe en toiture comme un rooftop gaz classique. La maintenance se limite au nettoyage annuel de la rampe de brûleurs, des médias (au jet d’eau) et du réservoir d’eau (à la brosse). Ainsi, l’installation et la maintenance du rooftop adiabatique ne nécessite aucune compétence particulière. La technologie du rooftop adiabatique est simple, efficace et vertueuse. Mise en place sur une cinquantaine de bâtiments tertiaires et industriels en France, elle semble promise à un bel avenir. Jean Terrier, GRDF, responsable produits tertiaire et industrie pour la commission utilisations et marchés de l’AFG
Des performances validées lors d’une instrumentation GRDF-Ademe
© AUSTRALAIR
Les deux rooftops adiabatiques mis en place en toiture.
Rendement de chauffage d’un rooftop selon la température extérieure.
En 2014, GRDF et l’Ademe ont instrumenté deux rooftops adiabatiques mis en place par Australair pour chauffer et rafraîchir le hall moto et une partie du hall voiture de la concession BMW de Chenôve, en Bourgogne-FrancheComté, soit un espace de 300 mètres carrés, comptant 4 mètres de hauteur sous plafond. Performances, confort, fiabilité, consommation d’énergie et d’eau ont été mesurées tout au long de l’année. En chauffage, l’instrumentation a validé le rendement annoncé par le fabricant et le maintien des performances et de la puissance délivrée. La consigne de température demandée par l’utilisateur a été atteinte 100 % du temps.
En rafraîchissement, l’instrumentation a démontré la fiabilité des rooftops. En termes de confort, l’installation s’est montrée très satisfaisante : 96 % du temps, la température intérieure est restée inférieure à 26 °C, ou un delta de température supérieur à 5 °C entre l’extérieur et le bâtiment a été mesuré. En termes de performances, une efficacité moyenne de 29 EER sur la saison de rafraîchissement a été mesurée, avec une consommation d’électricité de 327 kWh pour les deux rooftops. L’installation a consommé en moyenne 110 litres d’eau par jour.
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UTILISATIONS ET MARCHÉS
GNL CARBURANT MARITIME
Plein gaz pour le GNL carburant L’Association française du gaz a publié le 1er septembre un dernier état des lieux de la filière GNL comme carburant maritime et fluvial ainsi qu’une série de mesures destinées à accompagner le développement d’une filière en pleine croissance. Décryptage.
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n ce début de XXIe siècle, l’empreinte environnementale du transport maritime et fluvial est une préoccupation majeure, partagée au niveau planétaire. Ainsi, sous l’égide de l’Organisation maritime internationale (OMI), la réglementation sur les émissions atmosphériques devient de plus en plus exigeante. Son intérêt pour le GNL s’explique notamment par ses qualités environnementales, lui qui permet d’éliminer la quasi-totalité des oxydes de soufre (SOx) et des particules fines, de réduire de 85 à 90 % les oxydes d’azote (NOx) et de réduire jusqu’à 25 % les émissions de CO2. L’Union européenne (UE) est également très engagée sur le sujet et a en particulier adopté une directive qui vise à faciliter le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs, dont le GNL. Cette directive demande notamment aux États membres d’élaborer d’ici le 18 novembre 2016 un cadre d’action national pour le déploiement des infrastructures pour carburant alternatif (dit « Canca ») qui devra désigner, pour le volet maritime et fluvial, un nombre approprié de points de ravitaillement en GNL dans les ports maritimes et intérieurs. Pourquoi une directive sur les carburants alternatifs ? Pour chaque carburant, les États membres ont l’obligation d’établir un cadre national qu’ils doivent transmettre à la Commission européenne avant le 18 novembre 2016. Le cadre d’action national doit contenir l’évaluation de la situation actuelle et des perspectives de développement du marché ainsi que du développement des infrastructures, les objectifs chiffrés et objectifs nationaux en ce qui concerne le déploiement d’infrastructures pour les carburants alternatifs ainsi que les mesures requises pour les atteindre. Dans ce contexte, l’AFG a mené avec l’ensemble des acteurs concernés et intéressés une réflexion sur le rôle du GNL carburant marin et fluvial dans l’esprit de la transition énergétique pour la croissance verte, afin d’apporter sa contribution à l’élaboration du Canca au niveau français. Cette directive offre-t-elle une place de choix au GNL carburant marin ? C’est en tout cas la conviction de l’AFG, qui a souhaité concentrer ses travaux sur le GNL carburant marin. L’objectif était de fournir à l’administration des éléments pour proposer des points et des types de ravitaillements GNL pour les
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ports maritimes pour 2025 et pour les ports fluviaux en 2030, d’établir des projections de volumes de GNL carburant à usage maritime et fluvial en portant en priorité les réflexions sur le réseau central puis sur les ports de plus petite taille du réseau global. Plusieurs réunions ont été organisées pendant de nombreux mois, avec l’ensemble des acteurs de la filière maritime et fluvial, afin d’établir une liste de mesures la plus consensuelle possible. Focus sur les spécificités françaises En France métropolitaine, les ports du réseau RTE-T pour le réseau central sont les grands ports de Marseille-Fos, du Havre-Rouen, de Nantes-Saint-Nazaire, de DunkerqueCalais et de Bordeaux, ainsi que sept ports intérieurs1 (les autres constituant le réseau global). Au printemps 2016, on comptait plus d’une dizaine de projets GNL maritime et fluvial en France. Le port multimodal entre Dunkerque et Calais, Haropa, le premier système portuaire français créé en 2012 réunissant Le Havre-Rouen-Paris ou encore le LNG Master Plan-Rhône fluvial (départ de Fos avec une station le long du fleuve pour l’alimentation en GNL fluvial et routier en iso-conteneurs), pour ne citer qu’eux, sont autant d’exemples de la grande attractivité du GNL sur notre territoire. À noter que des projets fluviaux sont en cours d’expérimentation à Lille et Lyon. Quel potentiel de soutage au GNL ? Le marché du soutage GNL en France est encore au tout début de son histoire. Le premier avitaillement en GNL a eu lieu au mois de mai dernier, au Havre. Pour le moment les volumes concernés sont encore très modestes - les ports de soute français2 consomment en moyenne 2 millions de tonnes de soute par an -, au regard des 45 millions de tonnes consommées dans le plus grand port de soutage du monde à Singapour et des 10,5 millions de tonnes du port de Rotterdam. Deux scénarios et plusieurs possibilités Pour évaluer les perspectives du marché du soutage GNL en France et du déploiement des infrastructures correspondantes, l’AFG a mené une approche par scenario avec une vision utilisateur. L’étude produite s’est concentrée sur les types de navires les plus susceptibles d’utiliser du GNL et a examiné leurs activités dans les principaux ports français
UTILISATIONS ET MARCHÉS
Perspectives de développement et Points de Ravitaillement GNL Scénario Optimiste à 2030. Le rapport est disponible sur le site de l’AFG : www.afgaz.fr
© AFG
métropolitains, ainsi que les prévisions de trafic à partir des plans stratégiques de ces ports. Pour la quantité totale de soute au GNL en France, deux scénarios ont été examinés, à plusieurs horizons de temps : un socle raisonnablement ambitieux (douze points de ravitaillement) qui donnerait une consommation de 0,3 million de tonnes de GNL par an et une variante optimiste (vingt points de ravitaillement) qui aboutirait à 1 million de tonnes de GNL par an avec des mesures incitatives fortes. Ces quantités sont conséquentes puis qu’elles représentent entre 20 % et 70 % des soutes actuelles en France mais restent largement accessibles aux terminaux méthaniers français car elles correspondent à bien moins de 10 % de la capacité de ces terminaux cumulée. Les scénarios conduisent à un déploiement progressif du GNL carburant dans les ports français, sur les trois façades maritimes ainsi que sur les cinq couloirs fluviaux. Ils font apparaître des besoins en GNL carburant dans tous les ports de réseau central RTE-T, dès 2020 pour les ports maritimes et dès 2025 pour les ports intérieurs. Quelles sont les solutions techniques pour le soutage au GNL ? La France dispose de quatre terminaux GNL, répartis sur ses différentes façades maritimes : Fos-Cavaou et Fos-Tonkin au port de Marseille-Fos, Montoir-de-Bretagne et Port de Nantes Saint-Nazaire et enfin Dunkerque dont le premier de chargement de GNL a eu lieu le 8 juillet 2016. Selon les types de navires à souter, les solutions sont plus ou moins appropriées : dans un premier temps et dans de nombreux cas, le soutage par camion-citerne (truck to ship) permettra de répondre à la demande même si elle reste limitée en volume. Pour les navires de croisière et les grands porte-conteneurs deep sea, l’avitaillement ne peut se faire qu’avec un navire ou une barge de soutage (solution ship
to ship), en raison de l’importance des quantités soutées à chaque opération. Les container to ship et les bunkering station to ship sont également envisagés. Dans la pratique, les solutions seront adoptées au cas par cas, éventuellement avec des variantes et/ou des étapes intermédiaires si besoin. Accompagner la filière Si le GNL carburant semble aujourd’hui constituer une véritable opportunité pour le marché des soutes en France de par son attractivité et ses multiples perspectives de développement, sa réussite dans un contexte ultra concurrentiel nécessite un engagement fort des acteurs de la filière. Dans son rapport, l’AFG préconise une série de mesures destinées à accompagner et favoriser son essor : adapter sans tarder la réglementation aux spécificités du GNL dans les ports français est une première étape. Former les acteurs à la manipulation et à l’utilisation du GNL carburant est également une étape incontournable au développement du marché en toute sécurité. Un soutien à l’investissement notamment pour les infrastructures de soutage comme pour les bateaux utilisant le GNL s’avère indispensable pour donner un véritable élan à la filière. Enfin, le rapport suggère la mise en place d’une « plateforme nationale GNL » permettant de fédérer l’ensemble des professionnels de la filière autour d’actions concrètes. Des actions de communication pour favoriser l’usage du GNL carburant alternatif destiné aussi bien aux professionnels qu’au grand public font également partie des pistes évoquées. La rédaction de Gaz d’aujourd’hui 2
1 Dont Paris, Lyon, Lille et Strasbourg. Marseille, Le Havre, Nantes-Saint-Nazaire.
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BRÈVES INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
CARNET Jean-Louis Bal a été réélu pour trois ans à la présidence du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Par ailleurs, l’assemblée générale du SER a élu les quinze membres de son conseil d’administration, dont font partie Elisabeth Ayrault (CNR), Antoine Cahuzac (EDF EN), Nicolas Couderc (EDF EN), Anne Pénalba (FHE) et Jean-Baptiste Séjourné (Engie). Michel Barnier a été nommé le 27 juillet par Jean-Claude Juncker négociateur en chef chargé de la préparation et de la conduite des négociations avec le Royaume-Uni au titre de l’article 50 du traité sur l’Union européenne. Michel Barnier, en qualité de négociateur en chef, aura le rang d’un directeur général. Il entrera en fonction le 1er octobre 2016. Brigitte Gady a été nommée le 18 août membre suppléante de la commission supérieure nationale du personnel des industries électriques et gazières, en remplacement de Daniel-Jean Veniat, sur la proposition de l’Union nationale des employeurs des industries gazières (Unemig). Dominique Mockly a été nommé le 13 juillet directeur général de TIGF SA. Il succède à Monique Delamare. Anne Provost-Debar est renouvelée dans les fonctions de sous-directrice des transports routiers au sein de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, au ministère de l’Environnement, de l’énergie et de la mer (MEEM). Le renouvellement a pris effet au 24 juin, pour une dernière période de trois ans.
LES TERRITOIRES, MAÎTRES DE LEUR CONSOMMATION Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, de l’énergie et de la mer, en charge des relations internationales sur le climat, a publié le 20 juillet deux décrets et un arrêté, pris en application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, permettant aux collectivités territoriales de mieux piloter et mettre en œuvre la transition énergétique locale en leur donnant accès gratuitement à des données précises sur la production et la consommation d’énergie sur leur territoire. Ces textes organisent une transmission simple, rapide et complète de données de consommation et de production d’électricité, de gaz, de chaleur et de froid, par les gestionnaires de réseaux à destination des personnes publiques en charge de conduire des projets dans les territoires ou d’y planifier, coordonner ou animer la transition énergétique.
LE GAZ A LA COTE AU G20 Lors du G20 qui a eu lieu à Hangzhou (Chine) les 4 et 5 septembre, les chefs d’État et de gouvernement ont adopté un communiqué final. Celui-ci reconnaît que le gaz naturel est l’énergie fossile « à plus faible intensité d’émissions » et plaide pour renforcer « la coopération sur des solutions qui favorisent des méthodes d’extraction, de transport et de traitement » réduisant « au maximum les conséquences environnementales ».
LE BIOMÉTHANE S’INVITE DANS LA PPE Ségolène Royal a présenté mercredi 28 septembre au conseil des ministres un projet de loi ratifiant l’ordonnance du 7 avril visant à favoriser le développement du biométhane. Désormais, les pouvoirs publics pourront organiser des appels d’offres dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
10 DOLLARS CANADIENS POUR UNE TONNE DE CO2 ET PLUS SI AFFINITÉS Justin Trudeau, Premier ministre canadien, a annoncé le 3 octobre la fixation d’un prix plancher pour les émissions de CO2, applicable à l’ensemble du pays à partir de 2018. Ce prix sera fixé à 10 dollars canadiens (6,8 euros) par tonne en 2018 et il augmentera chaque année pour atteindre 50 dollars canadiens en 2022, soit 34 euros, date à laquelle le programme fera l’objet d’une révision.
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INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
ENVIRONNEMENT
Haro sur les fuites de méthane Il y a un an, la Californie connaissait la plus grande fuite de méthane de son histoire. Pendant plusieurs mois, plus de 80 000 tonnes de méthane ont été libérées dans l’atmosphère, soit presque 7 millions de tonnes de CO2. Sur ce sujet, les enjeux sanitaires et environnementaux sont gigantesques. Suite à cette catastrophe, l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a publié le 12 mai une série de mesures fédérales destinées à réglementer les émissions de méthane. Une première aux États-Unis.
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ans le cadre du plan d’action climat du président Obama, l’administration américaine a pris un certain nombre de mesures pour lutter contre le changement climatique et protéger la santé publique. L’annonce par l’EPA de mesures visant à réduire entre 2012 et 2025 de 40 à 45 % les émissions de méthane (deuxième gaz à effet de serre le plus couramment émis aux États-Unis par les activités humaines, notamment par l’exploitation du pétrole et du gaz) est toujours atteignable. « Aujourd’hui, nous sommes sur la bonne voie pour trouver des moyens de bon sens pour réduire le méthane, un gaz à effet de serre alimentant le changement climatique et d’autres polluants nocifs du secteur du pétrole et du gaz », a déclaré l’administratrice de l’EPA Gina McCarthy. Les événements de Californie ont permis de franchir une étape supplémentaire. Avec l’annonce de l’EPA début mai, on assiste à la mise en place progressive d’une nouvelle réglementation qui permettra de réduire la diffusion de méthane et de composés organiques volatils (COV). Un ensemble de normes Ces nouvelles normes s’appliqueront aussi bien aux nouvelles installations qu’à celles qui seront modernisées. Elles imposeront des limites d’émissions aux opérateurs qui devront mettre en place des mécanismes capables de capturer le méthane provenant des fuites. Les entreprises seront tenues de fournir à l’EPA les taux d’émissions enregistrés provenant de l’exploitation pétrolière et gazière. Elles devront également mener des actions d’observation, de détection et si nécessaire de réparation sur leurs puits tous les six mois. À noter que des actions similaires sur les stations de compression de gaz seront à effectuer tous les trimestres.
© AFP/EPA-MaxPPP
Des estimations optimistes L’EPA estime que ces nouvelles normes permettront de réduire le volume d’émissions de méthane de 510 000 tonnes d’ici 2025, ce qui équivaut à 11 millions de tonnes métriques de dioxyde de carbone (CO2). Leur application coûterait au secteur près 530 millions de dollars d’ici 2025 mais l’agence américaine évalue les « avantages climatiques » à près de 690 millions de dollars en 2025, soit une économie conséquente. L.I.
Pour en savoir plus En janvier 2016, l’EPA avait lancé le programme « Défi méthane », dont l’objectif est d’inciter les compagnies pétrolières et gazières américaines à une série d’actions visant à réduire leurs émissions de méthane. Les premiers résultats seront dévoilés en décembre mais l’EPA constate déjà des progrès chez certains de ses partenaires.
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INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
POINT DE VUE
Quel sera l’impact du Brexit sur le secteur gazier ? FTI Consulting est un cabinet international de conseil aux entreprises regroupant plus de 4 600 collaborateurs dans 28 pays. Dans le secteur de l’énergie, FTI Consulting intervient principalement dans le cadre de revues de stratégies d’entreprises, d’analyses et de prévisions de marchés, de définitions et d’évaluations de régulations, de contentieux et d’arbitrages, ainsi que sur des questions de droit de la concurrence et de communication stratégique (www.fticonsulting.com).
Quel impact le Brexit aura-t-il à terme sur l’industrie gazière européenne ? Tout dépend du scénario politique de séparation retenu : depuis des impacts mineurs si le Royaume-Uni restait (comme la Norvège) totalement intégré au marché commun de l’énergie, à des changements plus profonds si Londres adoptait une régulation autonome du secteur sur le modèle de la Suisse ou de la Turquie. En octobre 2016, alors que les négociations entre Bruxelles et Londres n’ont pas encore débuté, l’ensemble de ces scenarios restent plausibles et méritent d’être anticipés. S’appuyant sur certains travaux en cours1, FTI Consulting analyse ici les impacts d’une rupture franche entre le Royaume-Uni et le marché commun, suivant délibérément un « scénario du pire » ou « hard Brexit », permettant de faire ressortir les impacts à venir de la séparation britannique sur l’industrie gazière européenne. Une désintégration progressive La sortie effective du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) aura, dans un premier temps, pour effet de limiter les échanges entre le continent et la Grande-Bretagne, puis progressivement de voir les régulations et structures industrielles britanniques et européennes diverger. En anticipant une sortie véritable du Royaume-Uni de l’UE et de son marché commun, qui sera accompagnée de la fin du soutien à l’intégration des marchés britanniques et européens2, il est naturel d’envisager l’apparition de barrières régulatoires aux échanges de gaz et des produits financiers liés, ainsi qu’un renchérissement du coût des interconnexions physiques (via l’apparition de taxes, quotas ou simplement la fin des facilités réglementaires).
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Dans ce cadre, les marchés de gros de la Grande-Bretagne et du continent devraient en partie se découpler, entraînant une fragmentation des places de marché. À l’amont gazier, le corpus législatif communautaire étant relativement léger, la divergence des régulations britanniques et européennes devraient avoir peu d’impacts opérationnels, hormis une concurrence fiscale accrue et potentiellement débridée en Grande-Bretagne (possibilité d’aides d’État sectorielles notamment). Pour les opérateurs d’infrastructures régulées, la divergence ne devrait apparaître qu’à plus long terme. L’influence du Royaume-Uni sur la régulation européenne a été déterminante et il est donc peu probable que le consensus national britannique évolue rapidement vers un modèle en rupture avec le corpus réglementaire existant. À terme, cependant, des modèles de régulations ad hoc, spécifiques à tel ou tel actif pourraient apparaître – par exemple sur le modèle de ce qui a déjà pu être construit pour réguler le principal stockage gazier britannique (mise en œuvre d’undertakings spécifiques pour Centrica Storage). À l’aval, l’industrie gazière est aujourd’hui dominée par six grands fournisseurs (les « Big 6 ») dont quatre sont contrôlés par des énergéticiens continentaux : EDF Energy, E.ON UK, RWE power et Scottish Power (par Iberdrola). Avec la divergence croissante des marchés de gros et des régulations entre le Royaume-Uni et l’UE, la valeur d’intégration entre ces groupes et leurs filiales britanniques devrait progressivement se réduire, conduisant certains énergéticiens à vendre leurs filiales peu synergétiques. Les reconfigurations issues de ces désengagements probables conduiront à une industrie gazière plus nationale, aux liens internationaux réduits, comme peut l’être la Suisse dans le secteur électrique. Un renchérissement des marchés de gros et de la sécurité d’approvisionnement dans le nord-ouest de l’Europe Les barrières aux échanges de gaz entre le Royaume-Uni et le continent aura des impacts forts sur les marchés de gros et la sécurité d’approvisionnement.
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
Un « hard Brexit » conduira à une chute importante du trading de gaz sur le hub britannique (NBP), désormais isolé, qui sera partiellement compensée par un développement des échanges sur le hub européen dominant (TTF). Une partie des desks londoniens seront relocalisés en Union européenne, mais le trading de gaz continental ne disposera pas avant longtemps de l’infrastructure et des effets d’intégration apportés par Londres, jusqu’ici première place financière mondiale : ceci aboutira à un affaiblissement de la liquidité globale des échanges sur les indices gaziers européens. La séparation de la Grande-Bretagne du reste de l’UE enlèvera au marché directeur nord-ouest européen 45 % de ses capacités d’importation GNL et près de 30 % de ses consommations de gaz. Cette disparation de volumes couplée à une perte d’influence du GNL devrait limiter la liquidité globale des indices gaziers européens et renforcer le pouvoir de marché des fournisseurs extra-européens, qui conduira à une augmentation limitée des prix à la fois sur le continent et au Royaume-Uni. La fin des facilités d’import-export en provenance du Royaume-Uni s’accompagnera de l’extinction des clauses de solidarité prévues dans les règlements européens en cas de crise d’approvisionnement (dont le renforcement est d’ailleurs en cours de discussion au Conseil et au Parlement européen). Cet affaiblissement des solidarités gazières, dans les faits et dans les textes, conduira à une revalorisation des actifs flexibles apporteurs de sécurité d’approvisionnement là où elle sera remise en cause par la rupture des liens britanniques. Cela sera premièrement le cas en Irlande, aujourd’hui dépendante à plus de 90 % de la Grande-Bretagne. Cela sera bien sûr le cas au RoyaumeUni où la faiblesse des capacités de stockage3 et le déclin des productions nationales va renforcer la valeur des actifs stockages et GNL. L’impact devrait en revanche être modéré en Europe continentale du fait de surcapacités et d’un développement toujours en cours d’interconnexions (telle la fusion des PEGs en France prévue en 2018). Une révision des politiques gazières au Royaume-Uni et en Irlande Post-Brexit, la régulation britannique devrait encourager le développement d’infrastructures et de nouvelles consommations gazières. Le maintien d’une sécurité d’approvisionnement élevée est un objectif affiché du gouvernement qui devrait se traduire par des soutiens aux infrastructures gazières. Côté consommation, le Royaume-Uni a été le seul pays européen à imposer un prix plancher du carbone pour soutenir le basculement des productions électriques du charbon vers le gaz et ce consensus ne devrait pas évoluer avec la sortie de l’UE. De plus, la fusion en juillet 2016 du ministère de l’Énergie (Department for Energy & Climate Change) dans un grand ministère de l’Industrie et de l’énergie (Department for Business, Energy & Industrial Strategy) illustre la nouvelle orientation du gouvernement vers la compétitivité de la transition énergétique, qui
devrait soutenir le rôle du gaz dans le mix électrique, en relaxant certains objectifs de décarbonisation. En Irlande, si la sécurité d’approvisionnement est assurée à court terme par la mise en exploitation récente d’un champ significatif4, elle ne l’est pas post-2020, date à laquelle il est prévu que la consommation nationale redevienne quasi-totalement dépendante des importations en provenance du marché britannique, qui évoluera alors sans contrôle communautaire et sans clause de solidarité transnationale. Partant d’une situation où les industries énergétiques irlandaises sont aujourd’hui largement intégrées à celles de la Grande-Bretagne – le gazier historique Bord Gáis est contrôlé à 100 % par British Gas (Centrica) –, l’Irlande est face à un choix difficile à moyen terme, entre l’acceptation d’une mono-dépendance extra-communautaire, le développement coûteux de nouvelles infrastructures, ou l’abandon progressif du gaz naturel. Une préparation qui débute Alors que le gouvernement britannique a prévu de lancer le processus formel de sortie de l’UE début 2017, certains acteurs gaziers ont déjà commencé à évaluer les options d’adaptation de leur modèle économique aux ruptures attendues sur les marchés de gros nord-ouest européens, à l’évolution des politiques gazières nationales et à la disparition progressive des synergies entre les deux blocs. Si l’hypothèse d’un « hard Brexit » reste aujourd’hui extrême, elle fait néanmoins partie des scénarios plausibles qui peuvent créer des opportunités et des risques forts, et qui doivent être anticipés. Emmanuel Grand est Senior Director, spécialiste du secteur énergétique chez FTI Consulting. 1 Voir notamment une analyse globale de l’impact du Brexit sur les secteurs de l’énergie (juillet 2016) : http://fticommunications.com/2016/07/brexits-impact-energy-sector/ 2
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Le Royaume-Uni est de loin le premier bénéficiaire des prêts et subventions de la Banque européenne d’Investissement dans l’énergie, ayant reçu sur la période 2014-2016 27 % de l’ensemble des fonds destinés au secteur. Les capacités de stockage britanniques ne couvrent que 7 % de la demande nationale annuelle, contre plus de 25 à 30 % en Allemagne et en France.
4 Le champ de Corrib est exploité depuis décembre 2015 par Shell. Ses productions devraient couvrir les trois-quarts des besoins nationaux pendant les deux premières années de pleine exploitation, avant de décliner rapidement.
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INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
CLIMAT
Accord global, réponse mondiale ! Le 22 juin dernier, six mois après la signature des accords de Paris, la Convention des maires de l’UE et le Pacte des maires ont lancé la plus grande coalition internationale de villes engagées dans la lutte contre le changement climatique. Baptisée « la nouvelle Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie », elle affiche la volonté de promouvoir et de soutenir toutes les actions visant à lutter contre le changement climatique et à instaurer une économie à faible intensité de carbone. À quelques semaines du début de la COP22 à Marrakech, les villes ont plus que jamais la volonté de s’unir pour parler d’une seule voix.
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n décembre dernier à Paris, lors de la COP21, le rôle des villes a été décisif dans la conception et la réussite de l’accord. Conscientes de l’importance et des enjeux qu’elles portent - en 2050, les deux tiers de la population mondiale vivront en zone urbaine -, les villes du monde ont choisi de s’allier pour lutter contre le changement climatique. Proclamée « plus grande initiative urbaine pour le climat et l’énergie au monde » par le commissaire Miguel Arias Cañete, la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie, qui verra le jour officiellement le 1er janvier 2017, rassemblera alors plus de 7 100 villes représentant 119 pays, répartis sur les six continents et représentant plus de 600 millions d’habitants, soit près de 8 % de la population mondiale. La genèse du projet La Convention des maires avait été lancée en 2008 par l’Union européenne après l’adoption du paquet de l’Union européenne sur le climat et l’énergie à l’horizon 2020. Le Pacte des maires date quant à lui de septembre 2014,
© NATHALIE NIZETTE
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à l’initiative de Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, et porté par l’ancien maire de New York Michael Bloomberg aujourd’hui envoyé spécial des Nations unies pour les villes et le changement climatique, ainsi que par des maires appartenant à des réseaux de villes au niveau mondial. Ces deux initiatives travaillaient avec les autorités locales, participant à fixer des objectifs ambitieux de lutte contre le changement climatique, à adopter des mesures ambitieuses pour les atteindre et à évaluer leurs progrès publiquement et de manière transparente. Parler d’une seule voix En harmonisant les efforts consentis par les villes, la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie permettra une collaboration accrue entre les villes du monde entier, en rationalisant et en consolidant les efforts visant à accroître et saisir les retombées collectives des mesures adoptées par les villes et de donner davantage d’élan aux actions locales de lutte contre le changement climatique. Cette initiative unique permettra également à toutes les villes de concentrer leurs efforts sur des engagements pertinents au niveau local tout en parlant d’une seule voix au niveau mondial. Très optimiste quant à la réussite de ce projet, Michael Bloomberg déclarait en septembre dernier : « L’union fait la force et cette nouvelle Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie contribuera à accélérer les progrès accomplis par les villes, de même qu’elle accroîtra leur influence au niveau mondial. C’est un pas de géant vers la réalisation des objectifs que les nations ont fixés à Paris. » Enfin, elle donnera lieu à la création d’une plateforme commune qui regroupera les données pertinentes sur les mesures prises par les villes dans les domaines de l’énergie et du climat qui ont été signalées à l’actuelle plateforme de la Convention de l’UE et aux plateformes soutenant le Pacte des maires « CDP Cities et carbonn Climate Registry ». Cela permettra ainsi de comparer les réalisations des villes de par le monde et de les mettre à la disposition du public par l’intermédiaire du nouveau site web de la Convention mondiale des maires au niveau mondial, dont le lancement est prévu pour janvier 2017. L.I.
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
ÉVÉNEMENT
En route pour la COP22 La 22e Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP22), prévue du 7 au 18 novembre prochain à Marrakech, permettra-t-elle de poursuivre la dynamique enclenchée à Paris ? Beaucoup d’observateurs semblent en tout cas le penser. Le dynamisme semble bien le mot clé de cette future COP, comme l’avait déjà confié à Gaz d’aujourd’hui Hakima El Haite, ministre déléguée chargée de l’Environnement et envoyée spéciale du Maroc pour la mobilisation de la COP22 : « Le dynamisme et l’engouement présents à Paris sont un exemple à suivre », disait-elle à l’issue de la COP21 en décembre dernier.
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omme à Paris, la COP22 ambitionne d’être une COP d’actions. Depuis plusieurs mois, Hakima el Haite, qui collabore activement avec les autorités françaises, parcourt la planète pour poursuivre la mise en œuvre de l’accord de Paris : la ratification des pays signataires, les engagements pris en matière de financement aussi bien du secteur public que privé et enfin le lancement d’une série de projets inscrits dans la feuille de route de la présidence marocaine de la COP22. Une feuille de route ambitieuse Il y a quelques semaines, en marge de la 71e Assemblée générale des Nations unies, Hakima El Haite et Laurence Tubiana, championne de haut niveau de la France pour le climat (photo), ont lancé conjointement à New York une initiative mondiale pour l’investissement intitulée « Accélérer les partenariats en faveur de l’action pour l’adaptation : dialogue avec les fondations et les investisseurs d’impact » qui réunit un grand nombre d’investisseurs parmi les plus influents de la planète. La finance climatique et la mise en place de mécanismes de financements innovants, notamment au profit des populations les plus vulnérables, seront l’une des priorités des négociations de la COP22. Un sommet mondial d’actions dédié à la finance climatique est d’ailleurs prévu le 12 et 13 novembre. La ministre marocaine a également rappelé dans le cadre d’un forum organisé par l’OCDE, en septembre dernier à Paris et consacré au développement des villes africaines, l’importance de mettre en place des politiques durables et résilientes dans les villes du continent pour faire face aux effets du changement climatique. L’accès à l’énergie, l’agriculture et l’éducation seront également des sujets largement abordés tout au long de cette COP. Un dernier passage de témoin Si l’accord de Paris a été adopté à l’unanimité lors de la COP21 en décembre dernier en France, pour devenir applicable le traité devait être ratifié par cinquante-cinq pays, représentant au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre. Après les ratifications de la Chine et des ÉtatsUnis à l’issue du sommet du G20 à Hangzhou, en sep-
© MEED BONN
Hakima El Haite (à gauche) et Laurence Tubiana, ambassadrice française chargée des négociations climatiques. tembre et celle de l’Inde (environ 4,1 % des émissions) le 2 octobre, jour de la naissance du Mahatma Gandhi, c’est bien la ratification de l’Union européenne le 4 octobre qui a permis d’atteindre le pourcentage fatidique. Sous l’impulsion de Ségolène Royal, présidente française de la COP21, l’Union a accéléré le processus de ratification lors d’un Conseil des ministres extraordinaire qui lui a permis la ratification du traité sans attendre que chacun des Vingt-Huit l’ait ratifié dans son propre pays. Si cette procédure n’a pas été vue d’un très bon œil par certains pays membres, l’UE pourra participer aux décisions prises à Marrakech. L’entrée en vigueur deviendra effective le 8 novembre, le jour de l’ouverture de la COP 22, achevant ainsi le succès français des négociations sur le climat. Les yeux du monde sont désormais tournés vers la Ville rouge. Laura Icart
Record absolu ! L’accord de Paris est entré en vigueur le 14 octobre. Il n’aura fallu que dix mois pour que le texte adopté lors de la COP21 à Paris le 12 décembre 2015 entre en application. Pour mémoire, la communauté internationale a attendu sept ans pour adopter le protocole de Kyoto en 1997.
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BRÈVES BUTANE ET PROPANE
BUTANE ET PROPANE
L’AGRICULTURE FAIT SALON, FINAGAZ AUSSI
BUTAGAZ INITIE LES ENFANTS AUX ÉCO-GESTES
Finagaz, fournisseur historique des professionnels du monde agricole, était présent du 13 au 16 septembre au Salon international des productions animales (Space) à Rennes et sera également présent au Sommet de l’élevage et à Tech’Élevage entre le 16 et le 18 novembre. Le fournisseur, qui accompagne les agriculteurs en leur proposant des solutions alliant performance énergétique et tarifs compétitifs, souhaite s’inscrire comme un partenaire incontournable du secteur agricole français.
À Paris, le 16 septembre dernier, Butagaz, acteur majeur du secteur de l’énergie, s’est associé à Pistache, une application dont l’ambition est de motiver les enfants dans leurs tâches quotidiennes, pour créer un mini-jeu autour de l’apprentissage des gestes éco-responsables. À travers cette collaboration, Butagaz et Pistache espèrent contribuer à sensibiliser familles et enfants à mieux maîtriser leur consommation d’eau et d’énergie. Ce partenariat prend la forme d’un nouveau jeu disponible sur l’application Pistache. Baptisé « Super Bob », il est accessible depuis l’application Pistache qui peut être téléchargée sur l’AppleStore et GooglePlay.
LE DISQUE VERT DÉBARQUE À ÉPERNAY La ville d’Épernay (Marne) est la 24e ville à adopter le disque vert, faisant désormais partie du « réseau pilote des villes disque vert » et encourageant ainsi mobilité durable et amélioration de la qualité de l’air. Depuis début septembre, les Sparnaciens utilisateurs de véhicules à énergie alternative dont le GPL ou en auto-partage peuvent bénéficier de 2 heures de stationnement gratuit dans leur ville. À noter que le disque vert est désormais disponible en version électronique.
LE BIOGPL C’EST POUR BIENTÔT ! Primagaz a dévoilé le 6 juillet sa future offre de bioGPL et le début de la commercialisation du bioGPL en France à partir de mars 2017 sur les marchés de la carburation, de l’habitat neuf et de la rénovation d’habitat social.
BAROMÈTRE DU GPL DE SEPTEMBRE 2016
Moyenne de septembre 2016 1,40 € 1,29
LE CARBURANT LE MOINS CHER À LA POMPE :
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SOCIÉTÉ
Les food trucks carburent au gaz Depuis quelques années, les food trucks ont débarqué dans nos rues. Dans de nombreux pays, la street food est devenue un véritable phénomène de société. Des premiers camions à pizzas dans le panier à Marseille aux chariots à hot dogs stationnés dans les allées de Central Park, tous ces véhicules ambulants ont un point commun : ils cuisinent au GPL. Rencontre à Marseille.
© ©FNAPCM
Marseille, 1977…
… Marseille, 2016.
L
sa flexibilité et surtout son prix les ont convaincus. Les professionnels de ce secteur bénéficient de tarifs préférentiels dans l’achat de leurs bouteilles de gaz (17 euros TTC pour une bouteille de 13 kg), mais Luc Gaston Garcia souligne que c’est l’amélioration du matériel de cuisson qui leur a permis de réaliser de véritables économies sur leur consommation de gaz. « Les fours d’aujourd’hui, avec une gestion électronique de la chaleur, consomment jusqu’à deux fois moins de bouteilles qu’à l’époque. » Depuis le début des années 2000, c’est surtout sur la sécurité et les règles d’installation que la FNAPCM a centré son action. « Nous travaillons avec Qualigaz et le Comité français du butane et du propane (CFBP), nos partenaires. Ensemble, nous veillons à la conformité et à la validation des installations, notamment au niveau de la sécurité et à l’harmonisation de l’ensemble des camions pizzas de notre organisation. » Des examens réglementaires sont d’ailleurs régulièrement pratiqués sur les véhicules. En effet, les installations ambulantes utilisant les GPL à usage professionnel et/ou commercial, qui mettent en œuvre des appareils de cuisson, de préparations culinaires, de chauffage et autres matériels associés, font l’objet de normes. Dans une logique de renforcement de la sécurité des espaces publics, la norme expérimentale sur les installations de cuisson ambulantes fonctionnant au butane et au propane vient tout juste d’être révisée (octobre 2016). Transformée en norme homologuée, elle a profité du retour d’expérience de la version précédente et intègre notamment l’utilisation de réservoirs GPL dédiés aux installations de cuisson. L.I.
a street food a pris d’assaut notre territoire et nos modes de consommation ont changé. Le GPL, de par sa flexibilité, est la principale source d’énergie utilisée par ces cuisiniers ambulants : que ce soit pour cuisiner, pour se chauffer ou pour s’éclairer, le GPL est au cœur de ce dispositif. Le camion à pizzas : une institution à Marseille « Nous sommes des très grands consommateurs de gaz, nous sommes des gaziers » déclare, un brin amusé, Luc Gaston Garcia, président de la Fédération nationale représentative des artisans pizza en camion magasin (FNAPCM). Son organisation professionnelle, qui représente une dizaine de milliers de camions sur le territoire et un peu moins de soixante à Marseille, est très impliquée dans la vie de la cité phocéenne, berceau historique de l’organisation. Une histoire française……... C’est en 1962 que les Marseillais découvrent, surpris, un nouvel engin circulant dans leur ville : un four à bois embarqué sur une remorque, le tout tracté par une camionnette. Cette drôle d’invention est l’œuvre de Jean Meritan, le premier à avoir eu l’idée de fabriquer des pizzas à la demande sur la voie publique. En quelques décennies, la restauration itinérante a pris de l’ampleur au point de révolutionner peu à peu les habitudes de consommation des Français. …... et gazière En quelques années, la cuisine au gaz est devenue incontournable pour ces cuisiniers nomades : sa facilité d’usage,
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BUTANE ET PROPANE
INTERVIEW
« Primagaz a pour ambition de devenir un acteur de la transition énergétique, local et innovant » Steven Sels a été nommé en avril 2016 directeur général de Primagaz, acteur historique de la distribution de gaz de pétrole liquéfié (GPL) en France. Il remplace Massih Niazi qui occupe désormais la fonction de directeur général de SuperGasBras au Brésil. Transition énergétique, identité et stratégie du groupe : il répond à nos questions.
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Vous avez comme objectif de réduire d’un tiers Comment développer une relation de proximité collaborateurs avec ses clients aujourd’hui, à l’heure de la mondialvotre impact carbone d’ici à 2020. Comment surune dans le monde numérisation de l’économie ? pays continents de la distribution de GPL y parvenir ? comptez-vous Est-ce priorité Nous sommes en première ligne pour observer à quel point il pour Primagaz ? est vital de préserver les ressources naturelles et diminuer le Les clients sont le patrimoine principal d’une marque. gaspillage pour faire face aux changements climatiques. PrimaDepuis cent cinquante ans, Primagaz a développé une relagaz a pris des engagements pour réduire son impact carbone tion de confiance avec ses clients sur plusieurs générations. d’un tiers.deNous offrons aussi du conseil à nos clients pour de Le monde change et Primagaz évolue restant fidèle Création l’entreprise Naissance Entréetout de en SHV optimiser leur consommation d’énergie et misons surla l’innovaà son identité : un groupe familial plus quedecentenaire, Liotard marque Primagaz au capital Primagazqui tion avec la distribution du bioGPL à partir de 2017. D’autre part, a inscrit la performance dans le temps comme l’une de ses en convertissant des clients actuels du fuel vers le gaz, nous valeurs essentielles. Chacune de nos actions est tournée participons à la réduction de l’empreinte carbone des Français. vers un objectif de satisfaction client. Avec la numérisaFRANCE tion de l’économie, seul le moyen change, l’objectif reste le Le bioGPL sera disponible en France à partir de même. Nous développons des offres et un service de plus collabora mars 2017. Qu’est-ce exactement en plus personnalisé et des points de contacts digitaux qui mondial dans le monde de la distribution de GPL et quelle est la stratégie de votre permettent une prise en compte des besoins clients plus entreprise pour le développer ? rapidement. Le bioGPL est un gaz de synthèse qui provient du recyclage de déchets industriels L’innovation semble au cœur de la politique et d’huiles végétales. Ces deux éléments commerciale de Primagaz. Quelles sont les sont disponibles immédiatement et leur solutionsCréation énergétiques apportées par votre de l’entreprise Naissance transformation s’inscrit dans un procesgroupe aux particuliers ? Et aux professionnels ? la marque Liotard est une notion clé pour Primagaz. Elle est ancrée collaborateurs sus d’optimisation activitésdes ressources natu- L’innovation d’utilisateurs relles La porteur d’avenir. Notre bioGPL est dans notre ADN. Nos équipes sont à l’écoute des clients en 2015 Bouteille et l’Energie produit par la société Neste, à Rotterdam. pour répondre au mieux à leurs besoins et être flexibles F RParAexemple, NCE Le bioGPL permet une réduction des émissions de CO2 dans la mise en œuvre de propositions. jusqu’à 80 % (vs le GPL). C’est une énergie résolument plus Primagaz propose à ses clients, propre. En France, nous nous adresserons aux marchés de particuliers et professionnels, de l’habitat neuf, de la rénovation de l’habitat social et à terme la cogénération. Nous nous poside la carburation. Cette nouvelle énergie, immédiatement tionnons dès lors sur ce marché disponible et complètement miscible avec le GPL, répond à naissant et prometteur très peu centres terminaux relaiset sur lequel la nécessaire réduction des émissions de CO2 dans les anrépandu en France emplisseurs maritimes vracs nées qui viennent. Primagaz sera le premier opérateur de ce nous entendons nous imposer. marché porteur qui représente des perspectives nouvelles Pas seulement comme fourpour nos clients professionnels, constructeurs de maisons nisseur d’énergie mais aussi Produits et services individuelles, organisations d’habitat social, collectivités et comme partenaire en capacité activités collaborateurs clients particuliers. d’accompagner la transition La Bouteille et l’Energie en 2015
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Titulaire d’un master en marketing et business communication et ancien élève de la Harvard Business School de Boston, Steven Sels a été collaborateurs mondial nommé, le 7 avril 2016, directeur général de Primagaz, succédant à Massih dans le monde de la distribution de GPL Niazi. En 2015, il rejoignait l’opérationnel staff de la holding SHV. De 2013 à 2014, ilGPL exerçait la fonction de directeur régional Europe de l’Est et Europe centrale chez Eriks. Il était également membre du comité de pilotage du groupe et PDG des holdings suisse et allemande. Auparavant, en 2009, il rejoignait le groupe SHV, maison-mère de Primagaz, où il occupait le poste de l’entreprise de de directeurCréation général des divisions belge, luxembourgeoise etNaissance française de collaborateurs mondial Liotard la marque Primagaz sa filialedeEriks, e-business, dans le mondejusqu’en 2012. de la distribution GPLtout en supervisant les activités
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Création de l’entreprise Naissance de Entrée de SHV énergétique. Quels sont les Liotard À titre d’exemple, nous avons récemment la marque Primagaz au capital de Primagaz signé un contrat d’énergie pour alimenter une cogénération grands axes de avec du GNL chez un serriste, ce qui traduit notre volondéveloppement té de diversification et notre capacité à nous adapter aux de votre besoins des clients. Nous continuonsF également entreprise dans R A NàCproposer E des solutions énergétiques clé en main en couplant fourniles prochains ture d’énergie et équipement de chauffage ou de production mois ? d’eau chaude instantanée avec le matériel de la marque La transition énerRinnai.collaborateurs D’autre part, nous avons pleinementactivités conscience que gétique et environ- d’utilisateurs en 2015 La Bouteille et l’Energie la politique énergétique est au cœur des enjeux portés par nementale impose les collectivités locales qui cherchent à réduire leur bilan à l’ensemble des carbone tout en maîtrisant leur budget. C’est pourquoi, dans acteurs sociétaux ce contexte particulier, Primagaz souhaite les accompagner une utilisation au plus juste de l’énergie. L’optimisation en leur proposant une offre qui leur est exclusivement déde notre capital énergétique impose une consommation diée : l’offre « Crescendo collectivités ». L’objectif est de raisonnable, une efficacité constante et le développement collaborateurs activités d’utilisateurs mutualiser les coûts d’approvisionnement en gaz propane. des énergies renouvelables. Primagaz a pour ambition de en 2015 La Bouteille et l’Energie Enfin, le bioGPL sera à lui seul une solution simple et écoun acteur de cette transition énergétique, local et centres devenir terminaux relais nomique pour les clients du innovant, offrant des solutions et des services permettant emplisseurs maritimes secteur de l’habitat soumis aux une consommation rationnelle vracset éco responsable. La mise règlementations environnemensur le marché du bioGPL en 2017 et notre prise de position toujours plus restrictives. sur le marché du transport routier avec le GNV en sont les Produits et tales services En effet, le bioGPL permettra de parfaits exemples. respecter les nouvelles normes environnementales centressans remplaterminaux relais cer les équipements existants. emplisseurs maritimes vracs
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Pour terminer, nous avons envie d’évoquer un sujet dans l’air du temps : celui du digital. Pouvez-vous nous centres parler de la stratégie digitale terminaux relais mise en place par Primagaz ? vracs emplisseurs maritimes centres terminaux relaisLe consommateur devient de plus en Vous allez plus en plus exigeant en termes de réactivité, de qualité de emplisseurs Produits maritimes vracs et services accompagner le service et d’accès à l’information. Les clients achètent de groupe Casino dans plus en plus en ligne (au deuxième trimestre, le marché a Produits et services son projet de déploiement d’une nouvelle flotte enregistré une augmentation de 15 % des ventes en ligne de poids lourds au GNV. Est-ce une piste de pour s’établir à 17,4 milliards d’euros), gèrent chaque jour développement pour votre entreprise ? plus d’interactions avec la marque via le canal digital et En effet, Primagaz en partenariat avec AVIA, a été retenue à basent leur choix de fournisseur sur la recommandation de l’issu d’un appel d’offres, pour installer et ravitailler quatre pairs. Les points de contacts se multiplient et les paren (GNV) au bénéfice GPLdeen leurs Gazsouhaite naturel stations de gaz naturel Gaz pour véhicules cours d’achat GPL deviennent multicanaux. Primagaz citerne exploiter ce canal carburant liquéfié la flotte de camions dubouteille groupe Casino. Les deux premières avec un objectif prioritaire : toujours Gaz en GPLentreront en en fonctionnement GPLau printemps 2017 à Limoges Gaz naturel Le gaz mieux satisfaire nos clients grâce une meilleure connaisbouteille citerne carburant en deréseau et Montélimar. Ce contrat nous permet de prendre liquéfié position sance de leur profil, leurs attentes et de leurs habitudes sur le marché européen du transport routier au gaz naturel. de consommation. Le digital permet une relation privilégiée Nous nous fixons comme objectif de fournir minimum dix et de plus en plus personnalisée entre les clients et la stations de GNV à horizon 2019 et de peser 30 % du marché marque. Notre objectif est de simplifier au maximum les Volum Appliances Caloon en France. échanges et démarches de nos clients. Toutes nos initiatives digitales sont engagées dans ce but. Volumes
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Tonnes pour la Bouteille
November 2016!
www.worldlpgforum-aegpl2016.com
BRÈVES VIE DE L’AFG
VIE DE L’AFG
AGENDA 8 novembre La 12e édition des Assises de l’économie de la mer aura lieu les 8 et 9 novembre à la Rochelle, Espace Encan. Le président de l’AFG, Jérôme Ferrier, prendra la parole lors d’une table ronde. 23 mars 2017 La prochaine convention « Bilan et perspectives » de l’AFG aura lieu le 23 mars. 19 et 20 septembre 2017 Le Congrès du gaz organisé par l’AFG se tiendra au Palais des congrès de Paris. Il sera associé à Expobiogaz.
WASHINGTON SE PRÉPARE ! La task force « ressources humaines » de l’UIG s’est réunie les 10 et 11 octobre à Berlin dans les locaux de Gazprom Germania. Cette troisième réunion dans le cadre de la présidence nord-américaine de l’UIG avait pour objectif de progresser sur ses deux axes de travail : la définition des emplois critiques dans le secteur gazier et l’élaboration d’un rapport sur le développement et le maintien des équipes. La task force a également défini ses sujets pour l’appel à papier en vue du Congrès mondial du gaz 2018 qui aura lieu à Washington.
L’ACTUALITÉ DE L’AFG L’AFG a répondu le 11 juillet à la consultation publique de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) du 9 juin relative aux règles de commercialisation des capacités de stockage dans le cadre de la réforme de l’accès des tiers aux stockages. Les sénateurs Jérôme Bignon et René Vandierendonck ont remis le 19 juillet au Premier ministre et au secrétaire d’État chargé des Transports, de la mer et de la pêche, le rapport intitulé « Comment rendre attractive et compétitive la porte nord de la France ? ». L’AFG, qui avait été auditionnée dans le cadre de l’élaboration, est citée plusieurs fois. L’AFG a répondu, le 16 août, à la consultation publique de la CRE du 30 juin relative aux règles d’équilibrage sur les réseaux de transport de gaz au 1er octobre 2016. L’AFG a appelé le 7 septembre à une reprise rapide des discussions sur la réforme de l’accès au stockage de gaz naturel. La publication de l’ordonnance de réforme de l’accès au stockage de gaz naturel en France, prévue par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, n’a pas pu être réalisée comme prévue en août dernier. Cette ordonnance devait mettre en place une régulation du stockage pour le 1er janvier 2017. L’absence de publication du texte place tous les acteurs en situation de forte incertitude, notamment à court terme pour la commercialisation des capacités de stockage 2017-2018... L’AFG a répondu le 16 septembre à la consultation publique de la CRE du 27 juillet 2016 sur le prochain tarif d’utilisation des réseaux de transport de gaz naturel de GRTgaz et TIGF. L’AFG a apporté ses commentaires le 22 septembre sur le projet de stratégie nationale pour la mer et le littoral. La stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML), présentée par la ministre Ségolène Royal, est un projet ouvert à commentaires pour une durée de deux mois à compter du 2 août 2016 jusqu’au 2 octobre 2016. Jérôme Ferrier, président de l’AFG était l’invité le 5 octobre de l’émission « L’invité des Échos » pour évoquer les actualités de l’AFG ces dernières semaines : sa pré© LESECHOS sence au Mondial de l’automobile, le livre blanc et ses 10 propositions et son « scénario à l’horizon 2030 » notamment.
DÉMÉNAGEMENT POUR L’UIG Le 1er novembre le secréterait de l’UIG déménagera à Barcelone. Luis Bertran a été nommé secrétaire général et une nouvelle équipe sera nommée. © ©AFG/MLA
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VIE DE L’AFG
SALON DE L’AUTOMOBILE 2016
Plein phare sur la mobilité gaz Du 1er au 16 octobre, près d’un million de visiteurs ont foulé les allées du Mondial de l’automobile à Paris. L’Association française du gaz (AFG), en partenariat avec l’Association française du GNV, le Comité français du butane et du propane, GRDF, GRTgaz et TIGF, s’est installée porte de Versailles durant cette quinzaine pour faire découvrir au grand public les avantages de la mobilité gaz. Retour sur l’événement.
© GRTGAZ/EG
© LACOMBE
© AFG/MLA
Parmi les visiteurs sur le stand de l’AFG et de ses partenaires, Ségolène Royal (photo de gauche) et Christophe Sirugue, secrétaire d’État chargé de l’Industrie (photo en bas à droite) aux cotés de Jérôme Ferrier.
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Non » : c’est la réponse de 75 % des Français à la question « Pourriez-vous vous passer de votre automobile ? » dans un sondage Opinion Way publié en juin 2016. Ce chiffre illustre bien le rapport des Français à l’automobile. Cette année, les constructeurs ont misé sur la mobilité propre et le gaz carburant notamment, qui émet 20 % de CO2 en moins que l’essence, qui permet de réduire de 80 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à l’essence et au gazole et qui n’émet pratiquement pas de particules ni de NOx (polluants atmosphériques). Autrement dit : une énergie comme un véritable atout pour répondre aux enjeux d’une mobilité plus propre et accessible au plus grand nombre. Une filière aux multiples atouts Sur le stand de l’AFG et de ses partenaires, les visiteurs ainsi que de nombreuses personnalités politiques ont eu
l’occasion de découvrir la filière du GNV et du bioGNV, du biométhane mais aussi du GPL et du bioGPL, une Fiat 500 roulant au GPL, une pompe de distribution de GNC (gaz naturel comprimé) et une maquette présentant les différentes étapes de la méthanisation des déchets pour les transformer en carburant. Point d’orgue du stand, qui a attiré de nombreux curieux : la monocoque carbone d’un véhicule de course roulant au biométhane et conçu par l’écurie Welter Racing. Ce prototype est inscrit au 56e stand des 24 heures du Mans, réservé aux technologies de demain et aux véhicules innovants. Le grand public a également eu l’occasion de tester les véhicules roulant au gaz naturel. En effet, pendant quinze jours GRTgaz a organisé des essais de trois véhicules : une Fiat Panda, un Caddy Volkswagen et une Audi A3, qui ont convaincu un public nombreux. L.I.
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Gaz d’aujourd’hui • n 4-2016 • 51
VIE DE L’AFG
PUBLICATION
Un livre blanc pour un futur plus vert La promulgation de la loi sur la transition énergétique en août 2015 et l’accord de Paris en décembre dernier ont marqué la nécessité de construire un mix énergétique au sein duquel les énergies renouvelables auront une place grandissante. L’Association française du gaz et l’industrie gazière en général se sont pleinement mobilisées pour promouvoir les atouts du gaz et mettre en avant cette énergie comme celle apte à accompagner le développement des énergies renouvelables. La publication de son livre blanc le 27 septembre en est une nouvelle illustration.
L
’AFG a lancé depuis 2015 un groupe de travail ayant pour objectif d’élaborer des propositions concrètes et pratiques répondant à des problématiques précises. Ce livre blanc doit permettre à l’ensemble des acteurs du monde de l’énergie mais aussi et surtout aux pouvoirs publics et aux responsables politiques d’être sensibilisés aux différents enjeux inhérents au secteur gazier ainsi qu’aux ambitions véhiculées par cette industrie dans les années à venir.
marchés européens, la France est l’un des plus prometteurs au vu du gisement disponible de biogaz non valorisé et de la nouvelle réglementation qui ouvre la voie à une alternative pour la valorisation du biogaz en bio GPL et en biométhane de première génération (1 G), de deuxième génération (2 G) et troisième génération (3 G).
Vers un futur moins carboné L’année 2017 sera marquée par les élections présidentielles. Le livre blanc élaboré par l’AFG fait état de dix propositions « accessibles » qu’elle soumettra durant ces prochains mois aux candidats à la présidence de la République avec une volonté affichée : montrer que le gaz est une énergie capable d’accompagner la transition énergétique et la croissance verte.
2 Réussir la transition énergétique
Tour d’horizon des 10 propositions
1 Promouvoir toutes les énergies renouvelables
La France se veut exemplaire en matière d’énergie renouvelable. Les énergies renouvelables n’engendrent pas ou peu de déchets ou d’émissions polluantes. Elles participent à la lutte contre le changement climatique, facilitent la gestion raisonnée des ressources locales et génèrent des emplois. La promotion du gaz est donc d’autant plus souhaitable que le biogaz est considéré comme une énergie renouvelable à part entière, qu’il est important de valoriser de la façon la plus efficace possible. Parmi les
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Proposition 1 : création d’un fonds de garantie à l’investissement en matière de gaz renouvelables.
dans les territoires Au cœur de la loi, les territoires et les collectivités locales rebaptisés « territoires à énergie positive » ont notamment pour objectif le développement des énergies renouvelables locales. Le gaz offre aux territoires la possibilité de développer des projets locaux et durables. Les projets de méthanisation disposent d’une triple dimension (environnementale, économique et locale) et permettent un meilleur recyclage des déchets, de faire vivre et prospérer un territoire en créant des emplois et de générer une synergie entre les différent acteurs. Dans le domaine de la mobilité, le gaz carburant offre des solutions diversifiées pour les particuliers, les flottes de véhicules ou le transport de marchandises. Enfin, la question de l’efficacité énergétique des solutions gaz dans les bâtiments est un enjeu de premier plan pour les territoires lorsque l’on sait que la France dispose d’un parc de 9 millions de chaudières gaz. Proposition 2 : aider à la mise en place des projets d’économie circulaire dans les territoires (mobilité au biogaz, méthaniseurs…).
VIE DE L’AFG
3 Améliorer la qualité de l’air
par la mobilité propre Le transport routier contribue de manière importante à la pollution de l’air. Dans ce cadre, les solutions gaz doivent jouer un rôle majeur pour développer une mobilité durable au profit des particuliers, du transport maritime, des marchandises et des flottes (bus, flottes d’entreprises). Et cela sous toutes leurs formes : via le gaz naturel véhicule dit « GNV », le gaz de pétrole liquéfié dit « GPL » et le gaz naturel liquéfié dit « GNL ». Si la filière est présente dans le transport routier (66 % des villes de plus de 200 000 habitants disposent de flottes au gaz carburant) et que l’offre gazière devient progressivement plus durables (bioGPL et bioGNV), elle souffre toujours d’un défaut d’information et de communication sur les solutions qu’elle propose, sur le niveau de la fiscalité du gaz carburant et le faible différentiel par rapport à celle du diesel. Proposition 3 : mettre en place un comité de pilotage regroupant les acteurs publics et privés dédié à la mobilité aux gaz terrestre et maritime.
4 Réduire les émissions de gaz à effet de serre
L’objectif de contenir l’augmentation moyenne de la température de la planète en-dessous de 2 degrés concrétisé par l’accord de Paris signé en décembre dernier est ambitieux. L’énergie gaz présente de nombreux atouts pour réduire les émissions de CO2 et la pollution locale tout en réduisant la facture énergétique de la France. À titre d’exemple en 2015, en France, les conversions de sites industriels ou tertiaires du fuel vers le gaz (4,4 TWh consommés) ont permis d’éviter l’émission de 380 000 tonnes de CO2 ; l’utilisation du gaz plutôt que du gazole comme carburant pour la mobilité (275 000 véhicules) a permis d’éviter l’émission de 200 000 tonnes de CO2 ; enfin, les usages du gaz renouvelable ont permis d’éviter l’émission de 34 000 tonnes de CO2. Dans l’habitat, le gaz permet de réduire jusqu’à 20 % les émissions de CO2, en remplacement de solutions plus carbonées et émettrices de particules comme le fuel. En résumé, la filière gaz a le potentiel et la volonté d’aller vers plus de sobriété énergétique et de faciliter le développement des énergies renouvelables. Proposition 4 : stimuler l’usage du gaz en remplacement du charbon et du fuel par la fixation d’un prix plancher européen du carbone avec une visibilité sur son évolution dans le temps.
5 Réduire les consommations
d’énergie des logements La réduction de la consommation énergétique des bâtiments résidentiels et tertiaires est un enjeu majeur tant dans le bâti neuf qu’existant. Elle suppose l’optimisation des méthodes de construction ou de rénovation, qui nécessite une bonne visibilité des acteurs sur les règles en vigueur. En France, les bâtiments résidentiels et tertiaires représentent 44 % de la consommation finale d’énergie (soit 68 millions de tonnes équivalent pétrole) : 30 millions de logements (dont 15,7 millions de maisons individuelles et 12 millions de logements collectifs parmi lesquels 4,9 millions bénéficient d’un système de chauffage collectif) et 850 millions de mètres carrés dans le secteur tertiaire dont 480 mètres carrés pour le secteur privé et 370 mètres carrés pour le secteur public. Les travaux à réaliser pour rendre un bâtiment performant énergétiquement dépendent de sa date de construction, de sa localisation, de son état initial et de toute une série de facteurs qui rendent l’approche au cas par cas la plus cohérente. Que ce soit pour la construction ou pour la réhabilitation, les gisements de progrès immédiats en matière d’efficacité énergétique se situent à deux niveaux : les systèmes de chauffage et l’enveloppe du bâtiment. Proposition 5 : favoriser la rénovation des systèmes de chauffage dans un cadre fiscal et réglementaire stable, simple et pérenne.
6 Contribuer à la lutte contre
la précarité énergétique Parce que près de 20 % des Français éprouvent des difficultés à se chauffer et s’éclairer, le gaz, utilisé dans 1 million de foyers, peut être une solution pour lutter contre la précarité énergétique. Plusieurs mesures, comme le chèque énergie, l’affichage déporté des consommations d’énergie, les certificats d’économie d’énergie dédiés à la précarité énergétique ont déjà été mise en place. Mais beaucoup reste encore à faire, notamment au niveau de l’identification des ménages précaires, afin de donner à ces ménages la possibilité de rénover d’anciennes chaudières. Proposition 6 : mettre en place une « prime à la casse » pour le remplacement de chaudières anciennes par des chaudières à gaz récentes dans les logements occupés par des personnes en situation de précarité.
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VIE DE L’AFG
7 9 Contribuer à la sécurité énergétique de la France Stocker l’énergie, en accompagnant Le gaz est une source d’énergie fiable et bon marché, à l’approvisionnement très diversifié et largement stockable sur le territoire national. La pérennité de sa présence dans le bouquet énergétique français est donc un gage de sécurité d’approvisionnement national. En France, les stockages souterrains de gaz ont un rôle technico-économique important puisqu’ils fournissent 30 à 40 % de la consommation française en hiver (forte saisonnalité de la demande liée aux besoins de chauffage des particuliers). Ils permettent également d’absorber l’excès d’offre en été, qu’il s’agisse de gaz importé ou demain de biométhane produit dans nos régions. Actuellement, la totalité du territoire, y compris insulaire, peut avoir accès aux différentes formes de gaz grâce à la combinaison des réseaux de gaz (naturel ou propane), aux citernes ou bouteilles de GPL, voire au GNL porté pour certains industriels. À noter également que la présence des terminaux français, répartis sur l’ensemble des façades maritimes de notre pays, contribuent également à la sécurité d’approvisionnement hexagonale. L’enjeu pour l’État est de pérenniser la place du gaz dans son bouquet énergétique. Proposition 7 : favoriser la pérennité et inciter l’utilisation des infrastructures françaises déjà existantes pour un mix énergétique efficient.
8 Rendre la fiscalité énergétique plus efficace
Le gaz est aujourd’hui largement taxé en France, avec notamment la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel dont le tarif est en forte augmentation via la contribution climat énergie (CCE). Si la fiscalité des énergies doit contribuer à l’atteinte des objectifs de la politique énergétique et de la loi de transition énergétique pour la croissance verte, elle ne doit pas pour autant être un frein à l’investissement. Pour être efficace, la fiscalité doit tenir compte de l’ensemble des principaux impacts environnementaux des énergies, au-delà des émissions de CO2, de la compétitivité de l’économie française, donc être cohérente avec celle des autres pays, en particulier européens et du « temps long » du secteur de l’énergie. Les modifications récurrentes apportées à la taxation de l’essence par rapport au diesel pour créer un avantage incitatif peuvent se faire au détriment de certains carburants alternatifs, dont le gaz carburant. Proposition 8 : garantir pour une période de dix ans le maintien de l’écart fiscal entre le gaz carburant et les carburants traditionnels et la non-soumission à la taxe carbone des gaz d’origine renouvelable.
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l’essor des énergies renouvelables L’intermittence de la production électrique d’origine renouvelable et le décalage entre les périodes de production et de consommation nécessitent de trouver des solutions de stockage afin d’optimiser la gestion du système électrique. Le gaz, aisément stockable, est une voie à privilégier. Compte tenu du degré encore faible de maturité des technologies de stockage massif d’électricité, seuls les moyens de production électrique au gaz sont à même dans un premier temps d’être une solution de secours face à cette intermittence. Plusieurs projets sont actuellement en cours en France, tel le projet « GRHYD » (communauté urbaine de Dunkerque), une première en France pour le développement de l’hydrogène et du power to gas, ou encore « Jupiter 1000 », premier démonstrateur implanté en France qui vise à valoriser les surplus d’électricité renouvelable et recycler le CO2, sans compter les possibilités qu’offrent dans les usages domestiques le couplage gaz + énergie renouvelable. Proposition 9 : donner une impulsion forte au développement du power to gas pour la valorisation des surplus d’électricité d’origine renouvelable.
10 Promouvoir l’innovation
La filière gaz est à l’origine de nombreuses innovations qui offrent de réelles perspectives et participent activement au rayonnement de la France à l’international. La technologie des drones est en train de révolutionner la surveillance des réseaux sur notre territoire, tout comme le recours à la réalité augmentée qui change également la manière de travailler des gaziers. En matière d’innovation, l’industrie GPL est loin d’être à la traîne puisqu’elle consacre une partie de son chiffre d’affaire à la recherche et au développement avec une volonté d’allier développement durable et performance. Le développement du bioGPL et les différents procédés de méthanisation ainsi que le power to gas sont autant de filières d’avenir dites « renouvelables ». Les innovations dans le secteur gazier sont nombreuses et elles ont toute vocation à réduire les polluants atmosphériques et les consommations énergétiques. L’AFG pense que cette volonté d’innovation pourrait être encouragée par une politique fiscale appropriée. Proposition 10 : soutenir l’innovation en doublant la part du budget de l’État en matière de recherche et développement dédiée au gaz. La rédaction de Gaz d’aujourd’hui
VIE DE L’AFG
HAPPY BIRTHDAY !
Former des générations de gaziers C’est la rentrée ! Assurément une rentrée pas comme les autres puisque le centre de formation de l’Association française du gaz (CFAFG) accueille cette année la trentième promotion de son mastère spécialisé en ingénierie et gestion du gaz, en partenariat avec les Mines Paris Tech. Retour en images et en chiffres sur trente ans de formation gazière.
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e mastère, créé en 1987, fut l’un des premiers développés en France par un établissement de l’enseignement supérieur et un syndicat professionnel,
© CFAFG
avec le soutien d’une entreprise (Gaz de France à l’époque). Il souffle aujourd’hui sa trentième bougie.
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CHIFFRES CLÉS
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30 promotions 15 nationalités représentées 29 % de femmes 71 % d’hommes 342 diplômés 255 diplômés financés par Engie 25 ans de moyenne d’âge
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Normalisation Normes récemment publiées : ISO 20088-1 - Détermination de la résistance des matériaux d’isolation thermique suite à un refroidissement cryogénique. Cette norme a été rédigée sur la base d’une proposition française et élaborée au sein d’un sous-comité technique de l’ISO sur les équipements pour GNL dont le BNG assure le secrétariat. Elle décrit une méthode pour déterminer la résistance à une fuite cryogénique liquide sur les systèmes de protection contre les fuites cryogéniques (CSP). Elle s’applique quand des systèmes CSP sont installés sur de l’acier au carbone et sont en contact avec des fluides cryogéniques.
Réunion plénière annuelle du Bureau de normalisation du gaz La « RPA » du BNG a eu lieu le 22 septembre 2016 et a rassemblé plus de 50 experts et représentants des parties intéressées par les travaux de normalisation de la chaîne © AFG/AH gazière. L’objectif de cette journée était de faire le point sur les travaux effectués dans l’année et sur les perspectives des années futures. Elle a permis aussi de valider formellement les programmes de travail tant au niveau français, européen qu’international et d’en définir les priorités. C’était également l’occasion d’aborder des sujets de normalisation plus généraux. La représentante de
la déléguée interministérielle aux normes a présenté l’articulation entre réglementation et normalisation. Sujet important pour le gaz puisque sur les 30 000 normes « volontaires » de la collection française environ 300 sont rendues d’application obligatoire, dont une quarantaine dans le domaine du gaz. Cette réunion a aussi été l’occasion de présenter les nouvelles procédures d’élaboration des normes et de rappeler l’intérêt stratégique pour les parties prenantes de s’investir dans les travaux. Enfin, le prix de la normalisation gazière 2016 a été remis à Frédéric Vulovic de GRTgaz. Ce prix récompense un expert du comptage du gaz, président de la commission « compteurs de gaz » et animateur du groupe de travail européen sur les dispositifs de conversion associés aux compteurs. Frédéric Vulovic s’investit aussi au niveau international en défendant les intérêts français, des États-Unis à la Malaisie.
De la rationalisation des normes sur les tubes et panneaux radiants et les générateurs d’air chaud Le catalogue Afnor actuel ne compte pas moins de 15 normes couvrant les équipements de chauffage suivants : tubes, panneaux radiants et générateurs d’air chaud à usage domestique et non domestique. Le comité de normalisation européen CEN/TC180 a entamé un chantier de rationalisation et de fusion de ces normes européennes. Ce travail portera ses fruits à l’horizon fin 2017 début 2018, avec 5 nouvelles normes (au lieu des 15 existantes) couvrant à la
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fois les questions de sécurité et d’efficacité énergétique des appareils de chauffage destinés aux grands locaux (ateliers, gymnases, entrepôts, grandes surfaces commerciales). Le BNG présentera sous forme de poster un panorama des normes sur les carburants GNC, GNL et biométhane aux journées techniques des 16 et 17 novembre 2016.
gas conference 19-20 septembre 2017 Paris - Palais des congrès
organisĂŠ par
www.congresdugaz.fr
L’association française du gaz Le syndicat professionnel du gaz en France
Pour fédérer nos énergies • Lien entre les acteurs de la chaine gazière, l‘AFG contribue à sa promotion et à son développement
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• Créateur de compétences, l‘AFG propose ses services dans les domaines de la normalisation, de la certification et de la formation