LA REVUE DU GAZ NATUREL, DU BIOMÉTHANE, DU BUTANE ET DU PROPANE ÉDITÉE PAR L’ASSOCIATION FRANÇAISE DU GAZ WWW.AFGAZ.FR
N°1 2018 / JANVIER-MARS
DOSSIER
À L’HEURE DE L’OPEN DATA ENTRETIEN
REPORTAGE
SÉBASTIEN LECORNU SECRÉTAIRE D’ÉTAT À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE
L’ÂGE D’OR DU GAZ NATUREL EST-IL DÉCLARÉ AU PÉROU ?
REVUE TRIMESTRIELLE DE L’AFG / ABONNEMENT ANNUEL : 120 EUROS TTC
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ÉDITO REVUE TRIMESTRIELLE ÉDITÉE PAR : AFG, Association française du gaz 8, rue de l’Hôtel de Ville - 92200 Neuilly-sur-Seine www.afgaz.fr Code Siret : 784854820 00023 Code APE/NAF : 9412Z
L’année 2017 qui vient de s’achever fut riche pour l’industrie gazière qui a su se montrer engagée et convaincante dans ses propositions pour la transition énergétique.
Président : ����������������������������������������� Patrick Corbin Vice-président : ����������������Fernando Herrera Castro Trésorier : ����������������������������������������� Joël Pedessac Délégué général : ��������������������������� Thierry Chapuis Directeur de la publication : ���������� Thierry Chapuis Rédactrice en chef : ��������������������� Madeleine Lafon Email : ����������������������������madeleine.lafon@afgaz.fr Rédactrice en chef adjointe : ����������������� Laura Icart Email : ������������������������������������� laura.icart@afgaz.fr
Proposer et convaincre Début 2017, l’industrie gazière, par la voix de l’AFG, a porté son livre blanc auprès des équipes des candidats à la présidentielle et des candidats aux législatives pour proposer et faire connaître les principales mesures à mettre en œuvre. L’engagement des hommes © AFG et des femmes qui constituent cette industrie s’est retrouvé dans les débats du Congrès du gaz de septembre qui ont éclairé sur les orientations et les innovations retenues pour aller vers une économie décarbonée telle que décrite dans le plan climat de Nicolas Hulot.
ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Création et maquette : Eric Leuliet pour Pension-complète. Relecture : Pomme Larmoyer. Rédaction : Laura Icart ; Gabrielle Desarnaud et Pierre Duchesne (Capgemini). Les opinions formulées dans les articles de Gaz d’aujourd’hui sont celles de leurs auteurs. Elles n’engagent en rien la responsabilité de l’AFG. © Couverture : Fotolia - Chombosan ADMINISTRATION DES ABONNEMENTS : AFG Tél. : +33 (0)1 80 21 08 00 Fax : +33 (0)1 80 21 07 96 E-mail : marisa.gomes@afgaz.fr Prix au numéro : 33 euros TTC Abonnement annuel France : 120 euros TTC Abonnement annuel étranger : 120 euros TTC Bulletin d’abonnement : p. 7 RÉGIE PUBLICITAIRE : FRANCE EDITION MULTIMÉDIA 70, avenue Alfred Kastler CS 90014 – 66028 Perpignan cedex sdachez@francedit.com IMPRIMÉE PAR : PURE IMPRESSION™ 451 rue de la Mourre - ZAC Fréjorgues Est 34130 Mauguio (France) Tél. : +33 (0)4 67 15 66 00 Impression et dépôt légal : Janvier 2018 - N° 1 - XXXXXXXX
LISTE DES ANNONCEURS SITL ������������������������������������������������ 2e de couverture AFG ����������������������������������������������������������������������p. 2 Certigaz ������������������������������������������ 3e de couverture GRTGAZ ������������������������������������������ 4e de couverture LE PROCHAIN NUMÉRO SORTIRA EN AVRIL 2018
Amorcer la transition énergétique L’année 2017 aura aussi été marquée par les propositions de l’industrie gazière pour réussir le plan climat. Elles expriment la volonté du secteur d’accélérer le développement de trois filières dites « d’excellence » : le biométhane, le gaz naturel véhicule et le gaz naturel carburant marin et fluvial. Notre satisfaction aujourd’hui est d’avoir été entendus et souvent soutenus par le gouvernement, ce qui nous permet de dire aujourd’hui que le gaz compte parmi les meilleurs des outils pour réussir la transition énergétique. Les propos de Sébastien Lecornu, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, illustre parfaitement cette dynamique et le rôle clé que joue les territoires. Fidèle à sa tradition, Gaz d’aujourd’hui propose également dans ce numéro des éclairages approfondis et des rencontres avec les acteurs de l’industrie gazière. Dans une première escale, la revue va au cœur des données à la rencontre des gaziers connectés, de processus qui petit à petit révolutionnent nos outils, nos équipements, notre manière de travailler, les habitudes de nos clients. Des projets des smart gas grids aux compteurs communicants, ces nouvelles technologies changeront demain notre rapport à l’énergie à l’échelle individuelle et collective. Pour sa seconde escale, Gaz d’aujourd’hui pose ses valises au Pérou, pour partir à la rencontre de la jeune industrie gazière péruvienne qui occupe une place de premier plan dans un pays où le gaz est autant une manne économique qu’une formidable perspective de développement. Un numéro riche, vous l’aurez compris, qui dresse quelques pistes de réflexion pour 2018 et vous invite au voyage. Je vous souhaite une bonne lecture et une belle année 2018. Thierry Chapuis Directeur de la publication
ISSN 00 16-5328 o
Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 1
L’association française du gaz Le syndicat professionnel du gaz en France
Pour fédérer nos énergies • Lien entre les acteurs de la chaine gazière, l‘AFG contribue à sa promotion et à son développement
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• Créateur de compétences, l‘AFG propose ses services dans les domaines de la normalisation, de la certification et de la formation
SOMMAIRE
Janvier - mars - n° 1/2018 La revue du gaz naturel, du biométhane, du butane et du propane
ENTRETIEN
DOSSIER
SÉBASTIEN LECORNU
Secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire
p. 4
SPÉCIAL PÉROU
À L’HEURE DE L’OPEN DATA p. 8
Vers un âge d’or du gaz naturel au Pérou
p. 25
Chilca Uno : la fée gaz
p. 30
Lima, la gazière
p. 28
Transports au gaz : c’est le Pérou !
p. 31
Le pays carbure au GNL
p. 29
INFRASTRUCTURES
ÉCONOMIE ET FOURNITURE
Brèves
p. 33
Brèves
p. 36
Le rêve glacé de Poutine
p. 34
L’« Opep du gaz » se cherche encore
p. 37
GRTgaz fait son #Bilangaz2017
p. 35
La nouvelle donne
p. 38
Le bel avenir du gaz selon l’AIE
p. 40
UTILISATIONS ET MARCHÉS
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT Brèves
p. 46
p. 43
Une nouvelle messe pour le climat
p. 47
p. 44
Un accord a minima pour le marché du carbone
p. 48
Biométhane : tous les signaux sont au vert !
p. 49
Brèves
p. 42
L’UE met le paquet Audi l’audacieuse
BUTANE ET PROPANE
VIE DE L’AFG
Brèves
p. 50
Brèves
p. 54
L’appétit des Marocains pour le GPL
p. 51
Relever le défi du plan climat
p. 55
Du propane à l’AOP
p. 52
Normalisation
p. 56
Les atouts du propane
p. 53
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Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 3
ENTRETIEN
SÉBASTIEN LECORNU Secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire
« La réussite de la transition écologique se jouera dans les territoires » La loi de transition énergétique pour la croissance verte fixe à 10 % la proportion de biométhane injecté dans le réseau à l’horizon de 2030. La filière biométhane se structure dans notre pays. Quel est avenir alloué au biométhane en France ? J’ai annoncé le 7 décembre dernier le lancement d’un groupe de travail national chargé de simplifier et de consolider les règles applicables à la méthanisation. La création de ce groupe va servir à nourrir les travaux de la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui tracera la feuille de route de la transition énergétique pour la période 20192023. Nous avons d’ores et déjà réduit de 40 % les coûts de raccordement à la plupart des réseaux de distribution de gaz, soit le taux maximum prévu par la loi. Avec cette nouvelle disposition, nous souhaitons accompagner le développement de la filière, notamment en milieu rural. En France, le potentiel technique de développement du biogaz est estimé par plusieurs études entre 14 et 24 Mtep1 par an à l’horizon 2040, avec une contribution dans le futur de la gazéification et du power to gas. Ces deux dernières technologies sont régulièrement mises en avant par les acteurs de la filière gazière pour leur potentiel renouvelable. Comment percevez-vous l’émergence de tous ces projets à forte connotation territoriale ? La lutte contre le réchauffement climatique a deux réponses : l’une au niveau internationale avec les négociations dans le
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4 • Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018
cadre des COP et dernièrement à l’occasion du One Planet Summit organisé par le président de la République à Paris. Et l’autre au niveau territorial à travers l’action des collectivités et des entreprises privées. Ma conviction est que la réussite de la transition écologique se jouera dans les territoires. La neutralité carbone ouvre de nouvelles perspectives pour le secteur privé et en particulier pour les acteurs de la filière gazière. La gazéification et le power to gas sont des innovations qui ouvrent de nouveaux champs d’activité au secteur gazier dans cette nouvelle économie décarbonée. Si le potentiel de la filière biométhane semble important, de nombreux obstacles existent. Un grand nombre de professionnels de la filière réclament des aides plus concrètes du type l’adaptation du coefficient S pour les sites n’ayant jamais valorisé de biogaz en contrat d’achat, et/ou le passage d’un calcul mensuel des capacités d’injection à un calcul annuel. Comment l’État envisage-t-il de répondre à ces demandes ? Dans le cadre des débats sur la programmation pluriannuelle de l’énergie, nous animons un groupe de travail consacré au développement de la méthanisation. Nous allons travailler avec les acteurs de la filière à lever les éventuels freins qui ralentissent le développement de la filière biométhane. Cela pourrait se traduire par exemple par une simplification des règles dans le domaine de la méthanisation. Dans le grand plan d’investissement du gouvernement annoncé le 25 septembre par Edouard Philippe, 20 milliards seront alloués à
ENTRETIEN
SÉBASTIEN LECORNU Né le 11 juin 1986, originaire de Courcellessur-Seine (Eure), fils d’une secrétaire médicale et d’un technicien de l’industrie aéronautique, Sébastien Lecornu a fait des études de droit à l’université Paris 2 PanthéonAssas. De 2008 à 2012, il est conseiller du secrétaire GPL d’État aux Affaires européennes puis du ministre de l’Agriculture. En 2014, il est élu maire de Vernon puis, en 2015, président du conseil départemental de l’Eure. Il est nommé le 21 juin 2017 secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire dans le gouvernement d’Édouard Philippe. Sébastien Lecornu est lieutenant de réserve dans la gendarmerie nationale.
© MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE
la transition écologique selon trois priorités : la rénovation thermique des bâtiments, les énergies renouvelables et la mobilité durable. Pouvez-vous nous donner plus d’éléments sur la répartition des fonds et les priorités pour les trois secteurs choisis ? La transition énergétique est la première priorité du grand plan d’investissement (GPI) et mobilisera plus d’un tiers des financements. C’est essentiel pour tenir nos engagements et notamment nous orienter vers la neutralité carbone à horizon 2050. Un premier axe porte sur la réduction des consommations énergétiques à travers la rénovation des bâtiments, qui représentent près de 45 % des consommations d’énergie finale. Ce seront 9 milliards d’euros du GPI qui seront investis pour améliorer l’efficacité énergétique des logements des ménages modestes et des bâtiments publics. Pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, nous devons adopter un nouveau modèle de production d’électricité. Les énergies fossiles ne sont pas notre avenir. Cette évolution se fera progressivement, dans le respect des différents acteurs et la plus grande transparence. Le Premier ministre nous a donné la directive claire de prévoir un accompagnement social, même sociétal, de cette transition énergétique. Nicolas Hulot prépare un plan d’accélération de la transition éner-
gétique, de l’efficacité énergétique, du développement des renouvelables et des nouvelles filières industrielles, qu’il présentera dans la première partie de 2018. La pollution de l’air occasionne 40 000 morts par an en France. Elle est principalement due au trafic routier. La mobilité gaz terrestre propose une offre alternative grâce au GNV, au GNL et bientôt au bioGNV. Quelles sont les mesures, notamment fiscales, que pourrait mettre en place le gouvernement pour inciter les entreprises et les collectivités à intégrer des véhicules GNV dans leurs flottes ? Le projet de loi de finances pour 2018 traduit pleinement les ambitions du gouvernement pour accélérer la transition écologique et solidaire. Ainsi, dès 2018, l’amortissement fiscal supplémentaire exceptionnel sur les poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant va être étendu aux véhicules de 3,5 tonnes. De même, cet amortissement pourra également bénéficier aux véhicules fonctionnant au carburant ED95. Cette mesure s’inscrit pleinement dans le cadre du plan climat de Nicolas Hulot et dans notre volonté d’atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050. De plus, le projet de loi de finances pour 2018 prolonge la fiscalité avantageuse accordée au GNV,
« La gazéification et le power to gas sont des innovations qui ouvrent de nouveaux champs d’activité au secteur gazier dans cette nouvelle économie décarbonée. » o
Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 5
ENTRETIEN
avec une taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) faible et gelée jusqu’en 2022. Dans le cadre du renouvellement des flottes de l’État, des collectivités territoriales et des taxis et loueurs de voitures, le décret « véhicules propres », paru le 11 janvier 2017, fixe une part minimale de véhicules dits « propres » (dont GNV). Sachez que le cadre d’action national pour le développement des carburants alternatifs fixe des objectifs de points de ravitaillement en GNC et GNL à l’horizon 2025 : 115 points GNC et 25 points GNL. En novembre, l’armateur marseillais CMA CGM a choisi d’équiper ses neuf nouveaux navires, capables de transporter chacun 22 000 conteneurs, de moteurs fonctionnant au gaz naturel liquéfié. Comment le gouvernement français envisage-t-il de soutenir cette nouvelle filière du GNL carburant ? Tout d’abord, je tiens à saluer la décision historique du groupe CMA CGM de choisir la motorisation au gaz liquéfié. Cela démontre l’ambition de l’industrie française au service de la transition écologique. Cette décision s’inscrit pleinement dans les suites de l’accord de Paris pour le climat et dans la règlementation adoptée par l’Organisation maritime internationale. Cette décision doit être un encouragement fort pour l’ensemble de la filière, qui doit en particulier permettre de développer rapidement ce type d’avitaillement dans nos grands ports. Dans le cadre d’un plan d’action national pour carburants alternatifs, la France s’est engagée sur un déploiement progressif d’une offre de ravitaillement avec des solutions adaptées à l’évolution de la demande à l’horizon 2025. Ce premier palier de développement vise la mise en place, a minima, sur un port de chaque façade maritime, des conditions réglementaires et opérationnelles nécessaires au soutage du GNL et, éventuellement, au développement d’une offre de ravitaillement de GNL au détail.
Quelle est l’ambition du gouvernement en matière d’open data liées à la maîtrise des consommations énergétiques ? Comment allezvous travailler avec les collectivités territoriales notamment ? Parce que les données d’énergie sont essentielles à l’élaboration des plans climat-air-énergie territoriaux, au diagnostic des consommations énergétiques dans les territoires ou encore à la planification des nouvelles orientations énergétiques comme les énergies renouvelables, nous avons annoncé trois axes prioritaires : premièrement la mise en place progressive d’un nouveau dispositif plus complet d’accès aux données énergie, intégré à la plateforme nationale data.gouv.fr. Deuxièmement, la création d’une boîte à outils « socle » pour les collectivités locales, afin de les accompagner dans la préparation de leur plan climat-air-énergie. Les start-up de la « greentech » verte sont invitées à la déployer, l’enrichir ou l’adapter pour le bénéfice des collectivités. Enfin, l’ouverture d’un « lab » sur les données énergie dans les incubateurs de la « greentech » verte pour échanger et partager la connaissance. Par ailleurs, le ministère de la Transition écologique et solidaire lancera dans les prochaines semaines un concours de data visualisation des données locales d’énergie. Propos recueillis par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui 1
Millions de tonnes équivalent pétrole.
« Dans le cadre d’un plan d’action national pour carburants alternatifs, la France s’est engagée sur un déploiement progressif d’une offre de ravitaillement avec des solutions adaptées à l’évolution de la demande à l’horizon 2025. »
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6 • Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018
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DOSSIER
À L’HEURE DE L’OPEN DATA
Au sommaire de ce dossier : Contexte | Le bal des données Dossier en image | Les gaziers connectés Rencontre | Yves Le Gélard, directeur général adjoint d’Engie en charge du digital et des systèmes d’information Infographie | Les sources de l’open data État des lieux | La data dans tous ses états Territoires | Les smart gas grids ont le smile ! Technologies | En aval compteur : les clés de la MDE Point de vue | Marie-Christine Zélem, sociologue État des lieux | Un guichet unique de la donnée Tribune libre | Digitaliser sans vulnérabiliser : les enjeux du secteur gazier
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8 • Gaz d’aujourd’hui • n 4-2018
DOSSIER
CONTEXTE
Le bal des données Le secteur de l’énergie vit une véritable révolution ! La question énergétique est désormais au centre des préoccupations sociétales. Entre enjeu politique, manne économique et développement territorial, elle occupe et anime les débats, notamment autour de la transition énergétique. Avec l’arrivée du big data, le secteur subit une profonde mutation technique et technologique, dont l’ouverture des données - appelées aussi « open data » -, pierre angulaire de la transformation de notre système énergétique.
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ous n’avons jamais été aussi connectés qu’aujourd’hui ! L’essor d’Internet a littéralement fait exploser le volume de données collectées et conservées. Une réalité s’impose à nous : nous sommes tous producteurs de données et fournisseurs, relayeurs, consommateurs au cœur de cette révolution numérique. Vers une transformation du système énergétique En France, l’ouverture des données énergétiques est un sujet relativement récent, né avec la loi relative à la transition énergétique qui prévoit la mise à disposition de données énergétiques sur les territoires, à différents maillons, afin de faciliter la mise en place de stratégies et de politiques d’efficacité énergétique et de déploiement d’énergies renouvelables. Dans le monde énergétique d’aujourd’hui et a fortiori de demain, les notions d’efficacité énergétique et de big data sont étroitement liées. Elles sont complémentaires, la gestion des données étant en mesure d’accompagner la réduction énergétique en proposant des technologies de collecte capables de fournir des systèmes plus intelligents, des installations plus performantes et optimisées pour aller vers davantage d’efficacité énergétique. C’est aussi en substance le message délivré en octobre dernier par Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de Nicolas Hulot, qui a réaffirmé l’ambition du gouvernement en matière de maîtrise de la consommation d’énergie dans les territoires à l’occasion d’une journée dédiée aux données énergétiques (« data session ») en octobre dernier. « Les données d’énergie sont essentielles à l’élaboration des plans climat-air-énergie territoriaux », pour diagnostiquer entre autres « les consommations énergétiques dans les territoires » ou planifier « de nouvelles orientations énergétiques, comme les énergies renouvelables » a-t-elle déclaré, en annonçant notamment la mise en place d’un nouveau dispositif, plus complet d’accès, aux données énergies, intégré à la plateforme nationale www.data.gouv.fr.
L’open data, fer de lance de la transition énergétique ? L’ouverture des données est aujourd’hui au centre de toutes les stratégies de développement des entreprises énergétiques. Le rapport du comité d’études relatif aux données dont disposent les gestionnaires de réseaux et d’infrastructures d’énergie publié par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) le 18 mai 2017, évoque ses proportions, toujours croissantes, dès les premières lignes : « Le volume global de données produit double tous les deux ans. » En France, les acteurs énergétiques ont donc entamé le virage de l’open data. Par exigence réglementaire mais aussi par nécessité, les opérateurs d’énergie repensent leurs métiers mais surtout leurs outils de travail. Il s’agit pour eux de créer des infrastructures plus intelligentes et des outils plus efficaces, avec des systèmes de mesure, de contrôle, de régulation pour à la fois maîtriser l’énergie mais aussi en décupler la possibilité. Proposer de nouveaux services d’optimisation énergétique basés sur des données de consommation et de production toujours plus précises,
L’OUVERTURE DES DONNÉES, KÉSAKO ? Une entité « ouvre ses données » lorsqu’elle met à disposition de tiers externes certaines données conservées auparavant en interne. Elles sont ensuite à libre disposition des tiers. Ils peuvent les manipuler, les agréger avec d’autres données mais aussi développer de nouvelles applications et de nouveaux usages. L’ouverture des données s’inscrit dans une chaîne d’au moins trois acteurs réunis au sein d’un écosystème : les émetteurs de données, ou entités qui ouvrent leurs données en les rendant accessibles à tous ; les réutilisateurs (tiers), qui développent de nouveaux usages à partir de ces données ouvertes ; les consommateurs, qui bénéficient de ces nouveaux usages.
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Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 9
DOSSIER
s’adapter aux besoins spécifiques d’un territoire, offrir de nouveaux débouchés pour répondre aux problématiques du secteur énergétique, c’est l’ambition des gaziers qui, s’ils ont toujours été des pourvoyeurs de données, en sont désormais des émetteurs qui rendent les données accessibles à tous. Avec des réseaux plus intelligents, les fameux smart gas grids, les gaziers seront en mesure demain d’optimiser l’intégration du gaz renouvelable dans les réseaux de transport et de distribution, de rendre le réseau bi-directionnel — comme c’est le gaz sur le projet West Grid Synergy — ou de démontrer l’apport d’une synergie gaz-électricité pour le stockage de l’électricité avec le démonstrateur de power to gas Jupiter 1000. La gestion des données Lorsque l’on fait référence à la gestion des données, on entend aussi bien la collecte, le filtrage, l’analyse, le stockage et bien évidemment la mise à disposition des données à d’autres acteurs. Cette gestion apporte de fait de précieuses réponses pour les acteurs du monde de l’énergie : de l’état de l’équipement des réseaux aux besoins et aux préférences de leurs clients. Collecter les données Collecter les données n’a jamais été plus facile. Les analyser et en déduire des services aux clients est un processus qui a ouvert et ouvrira de vastes perspectives dans le domaine de l’énergie. Aujourd’hui, de nombreux « objets énergétiques » sont connectés : du capteur aux chaudières en passant par les thermostats de nouvelle génération, les objets connectés ont littéralement envahi notre quotidien. Les compteurs intelligents sont sans doute les plus connus du grand public. En offrant une meilleure connaissance et un pilotage actif de sa consommation, Gazpar devrait en 2021 offrir aux 11 millions de clients GRDF une opportunité de consommer « mieux » et de réduire leur consommation énergétique. Cela permet également au producteur ou au distributeur d’énergie de pouvoir lisser sa consommation en fonction de la demande. Enfin, toutes ces données disponibles sont aussi une nouvelle source de revenu pour les réutilisateurs qui s’en serviront pour créer de nouveaux produits et de nouveaux services sur les territoires.
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Analyser les données Si ces diverses données apporteront de nouvelles opportunités aux acteurs du monde de l’énergie dans les domaines de la gestion de l’énergie, de l’exploitation des réseaux ou de l’évolution de la relation avec le client, il faudra être en mesure de les analyser pour les rendre utilisables et exploitables par les tiers. De nombreuses entreprises ont ouvert des plateformes open data soft (GRTgaz ou GRDF par exemple) ou multiénergies telle la plateforme Odre (Open data réseaux énergie). Toutes mettent à disposition des jeux de données. L’agence Opérateurs de réseaux énergie (ORE), créée par l’ensemble des acteurs gaziers français, rentrera en phase active en 2018, et devra s’assurer entre autres que l’ensemble des formats mis à disposition sont compatibles les uns avec les autres. À ce stade, plusieurs questions demeurent, notamment celle-ci : comment parvenir à ouvrir des données à une granularité suffisamment fine pour être exploitables directement et sans menacer la vie privée des particuliers ? L’utilisation des données : une question sensible pour les usagers L’open data est pour une majorité de Français une source d’inquiétude. Bien que la plupart use d’un smartphone quotidiennement, certains ne voient pas d’un très bon œil l’arrivée dans leur quotidien d’objets communicants intrusifs qui vont révéler des détails de leur vie. Et même s’ils peuvent refuser à leur fournisseur le droit de diffuser à des tiers leurs données, ils ressentent encore le besoin d’être rassurés sur le traitement et la confidentialité de leurs données. La menace du hacking pour les entreprises Avec une circulation des données grandissante et des volumes à traiter de plus en plus importants, une réelle menace réside dans la sécurisation des flux et du stockage de ces informations. En France, nos entreprises sont-elles prêtes à faire face au risque et aux conséquences d’une cyberattaque ? Si l’open data combiné à l’essor du gaz renouvelable et à la multitude d’objets connectés favorise déjà l’avènement d’un réseau gazier plus intelligent, nous ne sommes qu’au début de cette révolution numérique et énergétique. Une chose est certaine : le monde énergétique de demain sera connecté ou ne sera pas ! Laura Icart
DOSSIER
DOSSIER EN IMAGE : LES GAZIERS CONNECTÉS
© GUILLAUME MARC
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Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 11
DOSSIER
RENCONTRE YVES LE GÉLARD
« Le monde énergétique n’échappe pas à la révolution digitale » Le directeur des systèmes d’information d’Engie évoque pour nous la nouvelle place du digital et les enjeux liés à la collecte des données dans le domaine énergétique. Chez Engie, le digital se divise en trois domaines. Pouvez-vous nous en dire plus sur chacun d’entre eux ? La transformation digitale du groupe prend appui sur trois ruptures technologiques majeures : la mobilité, c’est-à-dire la capacité à proposer des services mobiles à nos clients et à nos collaborateurs, le big data ou la capacité à exploiter des grands volumes de données et l’Internet des objets avec la capacité à connecter des objets. Ces ruptures ont donné naissance à trois domaines majeurs pour l’application du digital chez Engie : la « customer experience » ou comment enrichir l’expérience client sur tous les segments, la « digital operations » ou développer l’excellence opérationnelle et diminuer les coûts d’exploitation des actifs industriels et l’« entreprise 4.0 » pour aider à la transformation du groupe et améliorer les modes de fonctionnement interne. Grâce à cela, le groupe va transformer la façon de produire l’énergie, la distribuer et accompagner ses clients dans son utilisation. Quelles sont pour vous les étapes clés de cette révolution digitale qui s’opère chez Engie mais aussi dans le monde énergétique en général ? On entend beaucoup parler d’objets connectés, de solutions de mobilité, de renouvelable, d’« ubérisation » de l’énergie, de « home energy management », de « data centric » ou encore de « smart grid ». Aujourd’hui, une chose est certaine : le monde énergétique n’échappe pas à cette révolution digitale et toute la chaîne de nos activités, tant côté clients que collaborateurs, est impactée. Mais il faut voir cette révolution comme une opportunité. Elle nous a permis de repenser nos modes de fonctionnement en profondeur, qu’il s’agisse de l’expérience client, du développement d’outils technologiques ou de la transformation RH du groupe. Ainsi, dès 2016, grâce à une méthodologie design-thinking conduite auprès de toutes nos business units, les parcours client Engie et les difficultés rencontrées ont pu être redéfinis. Cette approche nous a également permis d’identifier de nouveaux services potentiels : prévision de la consommation, flexibilité énergétique, comparateurs de coûts, omnicanalité, assistance virtuelle via des « chatbots »… La création d’Engie Digital, également en 2016, a permis de générer des plateformes technologiques pour construire ou développer des services liés aux cas d’usages
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identifiés. Nous travaillons à construire un écosystème conséquent grâce à des partenariats mondiaux réputés. En deux ans, nous avons réussi à insuffler une culture digitale dans chaque entité du groupe : chaque collaborateur prend peu à peu la mesure de la transformation qui est en cours et des changements que cela implique, quel que soit le pays dans lequel il travaille. Mais l’enjeu majeur réside au niveau de la transformation RH, managériale et culturelle du groupe. Ce mouvement s’inscrit dans la durée et Engie s’y est engagé avec détermination. Nous venons de finir le déploiement d’Office 365 dans le groupe. Pourquoi ? Les services cloud favorisent la collaboration, la transversalité, la rapidité et nous permettent d’être plus performant en tant que « one group ». C’est à la fois une histoire d’outils, de mise en place des infrastructures et organisations nécessaires au bon déroulement de ce déploiement, mais aussi d’état d’esprit interne face au changement. C’est aussi ça, la révolution digitale. Pourquoi, selon vous, les notions d’efficacité énergétique et de big data sont-elles étroitement liées ? Vous le savez, l’efficacité énergétique vise à réduire les dépenses énergétiques et limiter le dérèglement climatique, c’est pourquoi mesurer, réguler et gérer les consommations devient clé. Ces leviers ne peuvent être actionnés à grande échelle sans l’aide du big data. Il faut en effet savoir allier la richesse et la variété des données pour agir dans la gestion de la consommation. L’exemple des bâtiments est incontournable, quand on connaît leur niveau de consommation d’énergie. Aujourd’hui, la mesure précise de leurs consommations devient possible grâce à l’installation de compteurs communicants et de capteurs. L’analyse des données recueillies et la mesure d’éléments externes permettent ainsi de prendre les bonnes décisions pour réaliser des économies et gérer l’énergie du bâtiment grâce à des systèmes intelligents autonomes. L’intégration du big data dans nos activités est donc un enjeu clé de l’optimisation énergétique. Pouvez-vous donner des exemples concrets mis en place par Engie (ou ses filiales) pour, à partir des données collectées, construire des parcours plus adaptés aux besoins de ses clients ?
DOSSIER
Grâce à notre partenaire C3 IoT qui analyse des données issues des compteurs communicants et la plateforme d’Engie Digital, notre application Mastermind propose depuis début 2017 une expérience plus riche au client : une meilleure compréhension de sa facture, pourquoi elle évolue et comment ; une visibilité sur les factures à venir et la possibilité d’ajuster les mensualités ; des conseils sur les actions d’efficacité énergétique à réaliser ; ou encore une mesure d’impact de son comportement ou de travaux réalisés sur sa consommation d’énergie. Pour le B2B, nous avons lancé Clara Domus en Italie. Clara Domus est une solution de pilotage de la consommation d’énergie des immeubles de bureaux et donne une vue complète de la consommation d’énergie par bâtiment et pour tout type d’énergie et usage. Revenons à la collecte de données. Va-t-elle uniquement reposer sur le compteur ? Pas uniquement. Il existe d’autres sources de données comme l’IoT et les capteurs, par exemple. Pour optimiser la performance opérationnelle, maximiser la production et réduire les coûts, l’entité « énergies renouvelables » a mis en place la plateforme Darwin. Elle recueille, analyse et interprète en temps réel les informations communiquées par l’ensemble des capteurs des installations connectées (vitesse du vent, puissance active, température des principaux composants, vibrations, etc.), ainsi que des données externes comme les prévisions météorologiques, ou les informations sur le marché de l’électricité. Toutes ces données, stockées sur le cloud, sont analysées, comparées et restituées. Les fonctions développées sur l’outil permettent, à partir de ces données, d’inter-comparer les machines entre elles, de détecter des sous-performances ou anomalies, de rendre possible une maintenance prédictive des parcs et d’aider les exploitants dans leur pilotage et prise de décision. Un autre sujet sur la collecte des données dont le marché parle beaucoup actuellement concerne l’open data. Engie, dont l’ambition est de devenir une « data-driven company » d’ici 2020, se saisit progressivement du sujet. Nous croyons intimement que pour se développer et créer des opportunités de croissance, nous devons ouvrir et partager nos données – en interne dans un premier temps. Les données dans le groupe étant aujourd’hui cloisonnées et silotées, un travail est en cours pour faire de nos données un véritable bien commun. Avec toutes ces données disponibles, la question de la cybersécurité est primordiale et sensible. Comment le groupe Engie répond-il à cet enjeu ? La protection des données est effectivement une priorité pour Engie. De nombreuses solutions ont été déployées ou sont en cours d’étude pour améliorer en permanence la sécurité de cette valeur fondamentale pour le groupe : tout d’abord la sécurité de notre plateforme digitale, à travers l’intégration de jalons dans le processus projet, et la sécurisation des infrastructures, notamment notre plateforme big data ; ensuite en développant également la supervision sur l’ensemble de nos infrastructures, qu’elles soient internes ou
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dans le cloud, en mettant en place un centre de supervision opérationnelle des attaques cyber (« SOC global »). Nous étudions aussi la possibilité d’améliorer la sécurité de nos données en favorisant la culture de la classification au sein du groupe et en déployant les outils adaptés à ces niveaux de classifications (droits d’accès aux données, chiffrement…). Nous avons également inclus la protection des données personnelles dans nos actions de cybersécurité, en prenant en compte les spécificités dictées par les différentes règlementations internationales et notamment le règlement européen (RGPD)1. L’Union européenne a préconisé une meilleure communication des cyberattaques et incidents de cybersécurité entre les pays membres. Travaillezvous déjà avec vos homologues sur cette question de la sécurisation des données ? Engie travaille, comme tous ses homologues, à répondre au mieux aux nouvelles réglementations cybersécurité en cours de généralisation au sein de l’Union européenne (directive « NIS » en Europe, loi de programmation militaire en France, RGPD). Ces réglementations prévoient effectivement une communication des cyberattaques aux autorités compétentes. À ce titre, Engie a mis en place un programme de cybersécurité qui prend en charge ces contraintes, en particulier à travers la mise en place du « SOC global ». Nous travaillons pour cela avec l’aide de partenaires externes ou de nos propres centres de compétences cyber (Engie Lab, Engie Ineo, Engie IT) et nous échangeons régulièrement sur ces sujets avec les autorités ou d’autres sociétés confrontées aux mêmes problématiques. Propos recueillis par Laura Icart 1
Règlement général sur la protection des données.
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Décrets
Lois
Décret n° 2016-447 du 12 avril 2016 relatif à la mise à disposition de données de comptage d’énergie aux propriétaires ou gestionnaires d’immeubles par les gestionnaires de réseaux d’énergie. Il implique la mise à disposition par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité et de gaz naturel des données de consommation aux propriétaires et aux gestionnaires d’immeubles. Les données sont transmises de manière agrégée et anonyme, sur un historique pouvant aller jusqu’à trois ans.
La loi de transition énergétique pour la croissance verte publiée le 18 août 2015 L’article 28 impose pour les consommateurs domestiques bénéficiant du tarif de première nécessité en électricité ou du tarif spécial de solidarité en gaz, que la mise à disposition des données de comptage s’accompagne d’une offre, par les fournisseurs, de transmission des données de consommation, exprimées en euros au moyen d’un dispositif déporté d’affichage en temps réel, sans facturation. L’article 179 a pour ambition de rééquilibrer le rapport entre les gestionnaires de réseaux et les collectivités, notamment en organisant l’accès aux données de production et de consommation d’énergie ainsi qu’aux données économiques nécessaires à l’élaboration des dispositions réglementaires définissant les mécanismes de soutien à la production de certaines formes d’énergie et aux économies d’énergie.
Décret n° 2016-972 du 18 juillet 2016 relatif à la confidentialité des informations détenues par les opérateurs gaziers et par les gestionnaires des réseaux publics de transport ou de distribution (GRT et GRD) d’électricité. Il fixe les quantités annuelles de production et de consommation que les gestionnaires de réseaux doivent divulguer, afin de mettre à disposition des données aux personnes publiques au titre de l’article 179 de la LTECV, qui ne sont plus considérées comme des informations commercialement sensibles.
Décret n° 2016-973 du 18 juillet 2016 relatif à la mise à disposition des personnes publiques de données relatives au transport, à la distribution et à la production d’électricité, de gaz naturel et de biométhane, de produits pétroliers et de chaleur et de froid. Il entérine le principe de l’instauration d’un service de mise à disposition aux personnes publiques et au public de données de consommation et de production, service auquel les gestionnaires de réseaux publics d’énergie sont appelés à contribuer.
La loi pour une République numérique promulguée le 8 octobre 2016 L’article 10 impose l’ouverture par défaut des données dans les contrats de délégation de service public (DSP). Ces données, considérées comme des « données d’intérêt général » permettront « une meilleure information des citoyens et une transparence accrue. Ces données ont, de plus, une valeur importante pour la collectivité publique, car elles l’aident à faire évoluer l’organisation du service et à conduire ses politiques, sociale, sanitaire ou environnementale ». L’article 23 implique la mise à disposition d’informations fines de consommation d’énergie (données journalières, voire infra-journalières), mais nécessitant d’être agrégées de manière suffisamment importante, afin que les données à caractère personnel que sont les consommations des utilisateurs domestiques ne soient pas reconstituables.
epuis la promulgation de la loi de transition énergétique pour la croissance verte en août 2015, de nombreux textes législatifs et réglementaires ont progressivement fait entrer le secteur énergétique français dans l’ère de l’open data (ou données « ouvertes », partagées par les usagers). Un secteur où s’échangent quotidiennement un déluge de données qui relèvent aussi bien du domaine du public (collectivités, organismes publics…) que du privé (particuliers) et que les législateurs veulent rendre plus facile d’accès pour servir la transition énergétique.
Les sources de l’open data D
INFOGRAPHIE
DOSSIER
Arrêté du 14 juin 2017 relatif aux règles techniques et d’organisation de mise à disposition des données de référence prévues à l’article L. 321-4 du code des relations entre le public et l’administration. Il fixe notamment les règles de publication des informations relatives aux données de référence, celles relatives à l’information du public sur le processus de création et de mise à jour de ces données, mais aussi la fréquence de leur mise à jour, ou encore le délai d’information des usagers de « toute modification substantielle » de leurs caractéristiques, modalités de mise à disposition et structure de la base de données.
Arrêté du 18 juillet 2016 fixant les modalités de transmission des données de transport, distribution et production d’électricité, de gaz naturel et de biométhane, de produits pétroliers et de chaleur et de froid. Il précise la décomposition des données par grand secteur d’activité (résidentiel, tertiaire, industriel, agricole) et les dates de publication de ces données.
Arrêtés
Arrêté du 29 décembre 2017 pris en application de l’article D. 111-66 du code de l’énergie Il fixe les modalités d’application des dispositions relatives à la mise à disposition du public des données détaillées de comptage des gestionnaires des réseaux de transport et de distribution d’électricité et de gaz naturel.
Décret n° 2017-976 du 10 mai 2017 relatif aux modalités d’accès par les consommateurs aux données de consommation d’électricité ou de gaz naturel et à la mise à disposition de ces données par le fournisseur. Il fixe les modalités selon lesquelles les gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité et de gaz naturel mettent à la disposition des consommateurs leurs données de comptage, ainsi que des systèmes d’alerte liés au niveau de leur consommation et des éléments de comparaison issus de moyennes statistiques basées sur les données de consommation locales et nationales.
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) ; la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ; et la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada).
Les principaux acteurs dans le monde de l’open data énergétique
Décret n° 2017-948 du 10 mai 2017 relatif aux modalités de mise à disposition aux consommateurs des données de consommations d’électricité et de gaz. Il impose aux gestionnaires de réseaux de mettre en place un espace sécurisé par lequel le consommateur a notamment accès à ses données de consommation journalière et mensuelle, ainsi que, en électricité, à la puissance maximale soutirée quotidiennement et la courbe de charge. Cet espace doit permettre la mise à disposition de tout ou partie des données de consommation à tout tiers désigné par le client final, ou l’interruption de la mise à disposition des données.
Décret n° 2017-486 du 5 avril 2017 relatif au traitement et à la mise à disposition du public des données détaillées de comptage des GRD et GRT. Il dresse la liste des informations à mettre à disposition du public (désormais énumérées et définies aux articles D. 111-59 et suivants du code de l’énergie) et fixe leurs modalités de traitement et de diffusion permettant notamment de garantir leur anonymisation.
Décret n° 2016-1618 du 29 novembre 2016 relatif à l’offre, par les fournisseurs d’électricité et de gaz naturel, de transmission des données de consommation exprimées en euros au moyen d’un dispositif déporté. Les fournisseurs doivent proposer plusieurs offres de transmission des données de consommation (en kWh et en euros), dont une au moins doit utiliser un « écran dont dispose déjà le consommateur ».
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ÉTAT DES LIEUX
La data dans tous ses états ! La collecte des données, leur réutilisation et leur traitement sont devenus des enjeux de tout premier plan pour les professionnels du secteur de l’énergie. L’open data induit une nouvelle manière de penser l’énergie, dans sa globalité, en synergie et au plus près des clients. Ainsi, les gaziers repensent leurs outils et leurs métiers pour accompagner la transition énergétique sur les territoires.
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ujourd’hui, les acteurs de l’énergie sont au cœur d’une évolution déterminante qui les mènera à une prise de décision presque exclusivement déterminée par les données. Leur multiplication et le développement d’outils informatiques permettant de les analyser offrent de multiples possibilités et opportunités aux acteurs du monde de l’énergie. D’ailleurs tous les gaziers s’accordent sur une chose : les données permettront une meilleure optimisation de l’utilisation du gaz à travers les smart gas grids (réseaux de gaz dits « intelligents »), pensés pour améliorer à la fois la flexibilité et la performance des réseaux et qui, avec Gazpar notamment, contribueront également à une plus juste maîtrise de l’énergie des consommateurs finaux. Une exploitation multi-réseaux...… Aujourd’hui, conformément à une recommandation émise par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui a « demandé aux gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d’électricité et de gaz naturel de se coordonner, concernant en particulier la nature et le format des données qu’ils collectent, afin de faciliter leur croisement et leur exploitation par les utilisateurs finals et les personnes publiques », les principaux gestionnaires de réseaux français (GRTgaz, Enedis, GRDF, RTE) travaillent ensemble pour élaborer de nouveaux services à partir de l’analyse de données. En juin dernier, dans la cadre du programme « data énergies », ils ont identifié quatre défis communs : les données énergétiques territoriales, la donnée au service du développement économique des territoires, l’efficacité énergétique des bâtiments publics et la mobilité. Créée en avril, la plateforme Open data réseaux énergies (Odre) est le fruit de la collaboration entre GRTgaz et RTE. Elle met à disposition des parties prenantes des données autour des thématiques de production, de consommation multi-énergies, de stockage et des territoires et régions. Les quatre gestionnaires de réseaux ont été rejoints depuis par l’AFGNV, Weathernews France, Elengy, Storengy et Dunkerque LNG. Mais aussi par TIGF en septembre qui met désormais à disposition des données sur le stockage du gaz. Selon Pascale Guillo-Lohan, directrice du programme « smart grid » chez GRTgaz, la plateforme Odre,
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qui « va continuer à s’enrichir avec de nouvelles données multi-énergies, multi-opérateurs et multi-réseaux ces prochains mois » sera d’une « grande utilité pour aider les collectivités territoriales, notamment dans l’élaboration et l’évaluation des politiques énergétiques ». Autre évolution exigée par la réglementation : la contextualisation des données. La plateforme Odre est désormais dans l’obligation de publier les données météorologiques qui jouent sans conteste sur la demande et la consommation énergétique. Toujours en 2017, mais en juin cette fois, 170 distributeurs d’énergie ont lancé l’Agence ORE qui aura la charge de mutualiser et de formaliser toutes ces données pour les rendre exploitables par tous. ... pour favoriser la transition énergétique sur les territoires Toutes ces plateformes multi-canaux qui vont continuellement enrichir leurs jeux de données aussi bien quantitativement que qualitativement sont aussi un vivier de ressources pour les territoires. Avec cette mutualisation des données multi-énergies, nous assistons aussi à la création d’un nouveau système énergétique où l’intégration des énergies d’origine renouvelable sera facilitée par la meilleure capacité qu’auront les réseaux de les recevoir. Le partage de données à des mailles plus fines et à une échelle de temps réduite, avec l’ensemble des acteurs du réseau gaz, concourra à un meilleur usage global du réseau : meilleur équilibrage de portefeuille par les expéditeurs, meilleure maîtrise de leur injection par les producteurs de biométhane et pilotage renforcé de leurs procédés par les industriels. Sur les territoires où les projets de méthanisation fleurissent, l’open data ne fait même plus débat car elle est pour beaucoup de collectivités une opportunité d’optimiser leurs ressources énergétiques locales. Sans compter que cette multitude de données disponibles à croiser et à analyser permettra l’émergence de nouveaux débouchés, de nouveaux services favorisant ainsi un terreau d’emplois. Des réseaux plus flexibles et plus performants C’est tout l’objet des smart gas grids, qui seront capables de communiquer et d’interagir avec l’ensemble des mailles du système gazier du réseau, du producteur au consom-
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mateur en passant par le fournisseur. Ce réseau nouvelle génération est doté de technologies informatiques et d’outils performants permettant l’optimisation de la production, de la distribution et de la consommation de gaz. Tous les acteurs gaziers testent actuellement de nouvelles technologies et outils pour aller vers des réseaux plus intelligents. Le projet de démonstrateur Jupiter 1000, piloté par GRTgaz et qui vise à tester l’injection d’hydrogène et de méthane de synthèse dans un réseau gazier existant, sera opérationnel cette année. Autre outil au service de l’optimisation énergétique, la création de postes de « rebours ». Si d’autres acteurs gaziers étudient la question, pour le moment en France seul GRTgaz a installé deux sites pilotes dans le cadre de son projet West Grid Synergy. Ce nouveau type d’installation permettra de gérer les écarts entre la production et l’injection généralement constante de biométhane et la consommation locale variable en fonction des saisons, en faisant remonter les volumes excédentaires injectés dans le réseau de distribution. Dans ce même esprit de flexibilité des réseaux, GRDF participe au démonstrateur européen Interflex, piloté par Enedis, centré sur l’utilisation et la valorisation des flexibilités multi-énergies à l’échelle locale, dans le cadre du démonstrateur Nice Smart Valley et dont premiers tests vont se dérouler en 2018. De manière plus globale, la multiplication des capteurs tout au long du réseau et de ses ouvrages fournit une vision plus fine de l’état du réseau aux centres de dispatching pour un meilleur pilotage de flux. Moins « open » mais carrément « data » : toutes les données dites « fermées » qui sont transmises tous les jours par des capteurs, des drones ou autres technologies de pointe qui assurent une surveillance et une sécurité accrue des réseaux (le projet « Siam » chez TIGF, le programme de télé-exploitation chez GRDF…).
Vers plus d’efficacité énergétique Capteurs, drones, compteurs communicants, thermostats, chaudières… À tous les maillons de la chaîne énergétique, les objets connectés trouvent une place et ont leur importance. Que ce soit pour transporter l’énergie, pour la distribuer ou encore pour la fournir aux clients finaux. Pour les entreprises gazières, créer des outils capables de collecter et transmettre des données est une vraie opportunité d’optimiser le transport du gaz en étant de plus en plus réactif mais aussi de pouvoir accompagner les consommateurs d’énergie vers une meilleure maîtrise de leur facture énergétique. C’est le cas par exemple de Storengy, qui pour réduire sa consommation énergétique sur tous ses sites industriels en France, s’est associée à la start-up Blu.e. Grâce à une plateforme logicielle d’aide à la maîtrise énergétique, capable en temps réel de détailler les dépenses énergétiques sur le process de stockage du gaz, toutes deux ont détecté un potentiel d’économies de 250 000 euros. Convaincue, Storengy a décidé de poursuivre le projet sur les sites de Chémery (Loir-et-Cher) et Saint-Illiers-la-Ville (Yvelines) et d’équiper tous les autres sites de Storengy en 2018, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. D’ici 2021, les compteurs communicants gaz fourniront aux gestionnaires de réseaux les informations nécessaires à une meilleure exploitation des réseaux, et aux collectivités et aux consommateurs finals une information plus fréquente sur leur consommation afin d’en permettre une meilleure maîtrise. Ils sont ainsi au cœur de cette collecte des données. Cette complémentarité des réseaux permettra également le développement de nouveaux usages (pompes à chaleur gaz, micro-cogénérations, chaudières hybrides) et de nouveaux services. Laura Icart
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TERRITOIRES
Les smart gas grids ont le smile ! De l’aveu de beaucoup de spécialistes, les smart grids (réseaux intelligents) joueront un rôle central dans la mise en œuvre des politiques énergétiques locales. Après les réseaux électriques, c’est désormais au tour des réseaux gaziers de faire leur révolution « smart » ! La première expérimentation du smart gas grid, baptisée West Grid Synergy et située sur le territoire breton et ligérien, vise à maximiser la production de gaz vert et à faciliter son intégration dans le réseau. Retour sur un projet phare préfigurant ce que pourraient être les réseaux de gaz naturel de demain.
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RTgaz, GRDF, Soregies, Morbihan Énergies, le Sieml (syndicat intercommunal d’énergies du Maine-etLoire), le Sydev (syndicat départemental d’énergie et d’équipement de la Vendée) et les régions Bretagne et Pays de la Loire ont annoncé en juin dernier le lancement de deux démonstrateurs smart gas grids territoriaux articulés autour de l’intégration de projets biométhane dans le Morbihan et en Vendée. Le choix des régions Bretagne et Pays de la Loire comme terre d’accueil des premiers démonstrateurs est tout sauf le fruit du hasard ! Le Morbihan compte quatre projets de biométhane sur trois communes. Quant à la Vendée et au Maine-et-Loire, ils culminent à plus d’une dizaine. Cette quinzaine de projets d’injection de biométhane pourraient déjà dépasser de 50 % les besoins estimés de consommation des distributions publiques locales sur certaines périodes de l’année. Mieux gérer la production de gaz vert dans les territoires…... C’est une évidence : la méthanisation est de plus en plus en vogue dans notre pays, mais production et demande ne sont pas toujours sur la même longueur d’onde. Preuve en est : l’essentiel du biométhane est produit en zone rurale, alors que la consommation est plus importante en zone urbaine. La mission de West Grid Synergy est donc d’être en mesure de réinjecter une partie de la production au niveau
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du réseau de transport et de favoriser ainsi l’insertion des énergies renouvelables sur son territoire. C’est à Pontivy (Morbihan) et à Pouzauges (Vendée) qu’ont été créées les deux installations dite de « rebours », à l’interface entre le réseau de distribution et le réseau transport, pour favoriser l’émergence d’un réseau bi-directionnel capable d’apporter une réponse locale à une situation énergétique locale. Elles permettront de tester des configurations de réseaux inédites en organisant la gestion des flux et le stockage du biométhane produit localement lorsque l’offre est supérieure à la demande. Elles serviront également de zones de test pour déployer des outils de pilotage « intelligents » du réseau gaz et l’intégration du numérique. … ... et faciliter son essor Ces installations de rebours, qui apporteront davantage de flexibilité, permettront un essor des projets de méthanisation dans les territoires puisqu’elles devraient toujours être en mesure d’offrir un débouché au biométhane produit et de le rediriger selon la demande. « Le biométhane doit être intégré à moindre coût pour les collectivités », souligne Romain Verles, coordinateur du projet West Grid Synergy chez GRTgaz. « Nous serons en mesure d’informer les acteurs de la capacité de production en fonction de la spécificité de leurs territoires. Nous pourrons interagir pour leur offrir un service flexible au plus près de leurs besoins. Les démonstrateurs rentreront en service dès 2018 ! » D’après GRTgaz, « les dynamiques de ces deux projets vont permettre à divers industriels de bénéficier des atouts du gaz mais aussi à la mobilité gaz de se développer. Ainsi dans le Pays des Mauges (Maine-et-Loire), une trentaine de kilomètres de réseaux vont être créés pour accueillir la production de trois projets biométhane et permettre à un industriel de bénéficier du gaz naturel ». Vous l’aurez donc compris, nos futurs réseaux gaziers sont en mutation. Ils seront dans un avenir proche capables à la fois de faire des prédictions et d’optimiser leur fonctionnement pour accueillir toujours plus de gaz renouvelable produit localement. Comme nous serons peut-être nousmêmes amenés un jour à être tout à la fois producteur que consommateur d’énergie. L.I.
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TECHNOLOGIES
En aval compteur : les clés de la MDE Si les datas ouvre un nouveau champ des possibles pour les acteurs gaziers, elles changent également la donne pour les consommateurs finaux. Point d’orgue de ce changement, le compteur Gazpar, en cours de déploiement sur notre territoire et qui va engranger des millions de données devant permettre, pour les clients finaux, une meilleure maîtrise énergétique. Des données qui sont aussi depuis janvier 2018 disponibles pour les fournisseurs d’énergie et acteurs tiers qui en font la demande, à la recherche de nouveaux débouchés marchands et non marchands dans le secteur de l’énergie et plus généralement du numérique. Explications.
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Les compteurs communicants peuvent-ils changer les pratiques de consommation énergétique ? » C’est le titre d’une étude menée conjointement par GRDF et par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), lors de la phase pilote de déploiement de Gazpar. Rendue public en novembre dernier, elle revient sur onze expérimentations menées sur les quatre territoires pilotes pour exploiter le potentiel de la maîtrise de la demande en énergie (MDE) des données chez huit catégories d’acteurs : GRDF, les collectivités, les bailleurs sociaux, les fournisseurs de gaz, des acteurs spécialisés dans la MDE, les dispositifs du type « familles à énergies positives » (FAEP), les acteurs de la précarité énergétique et enfin les acteurs tiers marchands et non marchands souhaitant se positionner sur le marché des données. Plusieurs éléments importants en ressortent. Le potentiel des données transmises par Gazpar En premier lieu, si les consommateurs ont une perception différente de Gazpar, ils ont tous un objectif de réduction des consommations de gaz. Mais dans ce dédale de données, la plupart ont besoin d’être accompagnés, conseillés, guidés. « Ce constat montre l’importance que des acteurs tiers s’impliquent, se servent des données pour proposer des services adaptés aux besoins des ménages, concrétisant le potentiel de MDE de chacun », explique à Gaz d’aujourd’hui Isabelle Drochon, responsable du programme « données » chez GRDF. L’Ademe se montre particulièrement intéressée par des données détaillées qui lui permettront d’améliorer ses outils et dispositifs existants. Les gestionnaires de parcs y voient la possibilité d’être plus réactifs et d’optimiser leurs consommations. On parle même de 15 à 20 % d’efficacité énergétique pour les exploitants de chaufferie. Enfin, les acteurs du digital souhaitent aussi se positionner sur ce nouveau marché en proposant des outils, pas forcément spécifiques au secteur de l’énergie mais qui pourraient avoir un impact sur la MDE. Une culture de la donnée chez GRDF Si Gazpar est la première brique du smart gas grid, GRDF a développé cette culture de la donnée depuis 2014, lorsque le distributeur français a fait appel à la start-up OpenDataSoft
pour ouvrir sa plateforme d’open data. Cette collaboration s’est construite en plusieurs étapes : depuis 2010, GRDF met à disposition des autorités des données de consommation annuelle de gaz naturel par secteur d’activité. En 2014, le distributeur partage des premiers jeux de données en interne afin de « sensibiliser et de mobiliser l’ensemble de ses collaborateurs sur les enjeux de la valorisation de la donnée ». En 2016, l’entreprise publie les données de production de biométhane à la maille « Iris1 ». La même année, elle lance une démarche d’open data publique pour une mise à disposition des données d’intérêt général. Avec la généralisation du déploiement de Gazpar, des données à des mailles plus fines sont désormais disponibles et accessibles pour les fournisseurs et par des tiers sur consentement du client. Les données sont désormais open ! C’est la grande nouveauté de 2018 ! « Nous sommes dans une logique de service public de la donnée, nous souhaitons l’ouvrir au maximum et à tout le monde », souligne Isabelle Drochon. Pour cela, GRDF a mis en place un système de portails à destination de ses différentes cibles. En premier lieu le portail clients : pour suivre sa consommation quotidienne, chaque consommateur devra créer un espace sur Internet. Deuxième portail : celui des fournisseurs de gaz, qui auront accès s’ils le souhaitent aux données détaillées de consommation, et cela même s’ils ne sont pas fournisseurs titulaires. Bien qu’aujourd’hui seulement 2 % des clients aient donné leur accord, ces données en temps réel seront à terme une mine d’informations pour des fournisseurs afin d’adapter leurs offres aux besoins effectifs. Enfin, un troisième portail est celui des tiers, également opérationnel depuis janvier. Il est dédié aux acteurs tiers qui ont été présélectionnés par GRDF - comme Engie Cofely, Hello Watt ou Éco CO2, une quinzaine pour le moment - et qui ont vocation à proposer de nouveaux services dédiés à l’optimisation énergétique. « À l’été 2018, nous devrions avoir une centaine d’acteurs tous services confondus inscrits sur ce portail » précise Isabelle Drochon. L.I. 1
Iris pour « îlots regroupés pour l’information statistique » : il s’agit d’un niveau de collecte et de diffusion des données statistiques et démographiques en France, à l’échelle infra-communale, utilisé par l’Insee.
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POINT DE VUE
« Il n’y aura pas de smart city sans smart habitant ! » Quel est le ressenti d’un ménage français face à la notion d’efficacité énergétique ? Face à la nouvelle tendance des outils connectés nous invitant à « mieux » consommer ? Lorsqu’on sait qu’un Français sur deux ignore toujours qu’il a le droit de changer de fournisseur, est-il prêt et suffisamment averti pour s’approprier ces nouvelles technologies et le lot potentiel d’économies d’énergie qu’introduit progressivement l’ « ubérisation » du secteur de l’énergie ? La sociologue Marie-Christine Zélem, spécialiste des questions énergétiques, revient pour Gaz d’aujourd’hui sur les profils des consommateurs, sur les compteurs communicants et surtout sur les comportements énergétiques, impossibles à « enfermer » selon elle dans des modèles standardisés car pluriels, diverses et dépendants de facteurs socioéconomiques divers (emploi, niveau de vie, type de logement, appareils…).
Que représente l’efficacité énergétique pour le consommateur lambda ? Pour la plupart des gens, économiser l’énergie n’est pas un critère déterminant dans leur vie quotidienne. Même si son coût a beaucoup augmenté ces dernières années, il n’en reste pas moins que cette dépense est vécue comme une fatalité. En France, la question de l’efficacité énergétique est loin d’être centrale pour les ménages les plus modestes - parce qu’ils n’ont rien et qu’ils sont confrontés à une précarité de vie au quotidien. Pour les classes moyennes, avec un niveau de vie amélioré, l’efficacité énergétique a du sens mais dans notre société de consommation dans laquelle on tend à multiplier les équipements, même moins énergivores, les factures énergétiques continuent à grimper. Ce sont les fameux « effets rebonds » ! Si les équipements sont plus efficaces, nous en consommons aussi toujours plus ! Enfin, pour les catégories les plus aisées ayant donc un pouvoir d’achat leur permettant de dépenser cette énergie, l’économiser n’est pas non plus une préoccupation principale. En réalité, tant qu’économiser de l’énergie ne sera pas une norme sociale, tant que les institutions et les grandes entreprises ne montrent pas l’exemple, les ménages qui le peuvent ne sentiront pas et, à juste titre, l’obligation d’aller vers plus de sobriété énergétique.
nomies d’énergie dans le bâtiment. Il y a les « éco-sceptiques », des personnes en général avec un niveau de vie plutôt aisé mais pas nécessairement, peu ou pas convaincues des problèmes énergétiques et de la nécessité de réduire leurs consommations, a priori pas prêts à faire des efforts, sauf si on leur donne, par exemple, une rétribution financière. Il y a ceux qu’on pourrait nommer les « éco-essentiels », qui vivent dans une sobriété que je qualifierais de « contrainte » et qui de fait réalisent des économies d’énergie pour faire des économies financières. C’est une catégorie en général avertie, qui développe des auto-restrictions par nécessité et elle est loin de concerner uniquement les ménages en situation de précarité énergétique. Il y a ensuite les « éco-responsables », qui sont plutôt sensibilisés à la question de l’efficacité énergétique et plutôt réceptifs aux politiques publiques généralistes. Et enfin les « technophiles », les geeks très adeptes des technologies et de maisons connectées mais qui représentent une petite partie de la population. Ces profils de consommateurs sont indicatifs. Le rapport aux économies d’énergie varie aussi et beaucoup selon que l’on est propriétaire ou locataire, selon les modes de vie, les propriétés sociales, etc., mais aussi en fonction des cycles de vie (jeunes couples, sans puis avec enfants, retraités…).
Peut-on établir des profils types de consommateurs en fonction de leur connaissance et de leur intérêt pour l’énergie ? On ne peut pas raisonner en termes de consommateur car il est par définition pluriel. Il est nécessaire de segmenter le public de consommateur selon une série de facteurs aussi bien humains que matériels pour pouvoir établir des catégories. Je travaille actuellement sur un article [pour les Annales des Mines, NDLR] qui met en perspective des catégories de consommateurs sur leur rapport aux éco-
Les compteurs communicants peuvent-ils contribuer à changer les pratiques de consommation énergétique ? Ils le pourront peut-être un jour mais pour le moment je ne considère pas ces compteurs comme « communicants » pour le consommateur puisqu’ils communiquent à sens unique : vers le distributeur. De manière pratique, il n’y a pas plus d’informations qu’avant, il y en a même moins, si l’on tient compte du fait qu’aujourd’hui, avec ces compteurs, il est nécessaire d’utiliser un ordinateur pour créer un compte
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MARIE-CHRISTINE ZÉLEM Sociologue, spécialiste des questions énergétiques. Elle enseigne à l’université de Toulouse Jean Jaurès l’anthropologie des techniques et du développement, la sociologie de l’environnement et des risques, GPL la sociologie de l’énergie et la sociologie des controverses. Ses recherches portent sur les interfaces sociotechniques et les conditions du changement social. Elle interroge les modes de réception et de participation aux politiques publiques environnementales, en particulier dans le domaine des déchets et de l’énergie. Elle questionne par ailleurs les modalités de la transition écologique à l’échelle des territoires. Elle a entre autres publié en 2015, avec Christophe Beslay, La sociologie de l’énergie : gouvernance et pratiques sociales, aux éditions CNRS. © DR
utilisateur et avoir accès à ses données. La majorité des personnes n’y trouvent pas leur compte. Avec mon confrère Christophe Beslay, nous avons l’habitude de dire « pas de smart city sans smart habitant ». Tant que les consommateurs ne seront pas montés en compétence pour « manipuler » ces compteurs, ils ne pourront y trouver leur compte, d’où l’importance d’avoir une approche pédagogique. Il faut avoir conscience, et cela malgré les idées reçues, qu’il n’est pas à la portée de tout le monde d’utiliser une tablette ou un smartphone pour suivre sa consommation énergétique. De mon point de vue, les pouvoirs publics ont une vision quelque peu utopique de l’intérêt que les utilisateurs ont de l’énergie. Pour optimiser un outil comme le compteur communicant, il aurait fallu en amont accompagner l’usager pour qu’il développe suffisamment de compétences afin de pouvoir l’utiliser. Mais si, demain, les compteurs communicants sont plus conviviaux, capables en un ou deux clics de nous donner notre évolution de consommation sur un an, ou la consommation du réfrigérateur par rapport à la télévision, l’intérêt des utilisateurs ira croissant. Actuellement, la facture est globale. Le choix qualitatif n’existera que quand le compteur sera en mesure de proposer aux clients un accès direct à deux ou trois informations précises et faciles d’accès. Comment faire évoluer les habitudes de consommation pour économiser l’énergie dans les logements ? En ne raisonnant pas à une échelle sociétale. Si vous habitez dans une passoire énergétique, malgré votre bonne volonté, vous ne serez jamais en mesure d’économiser l’énergie. Pour évoluer, il faut avant tout améliorer le parc de logements. Les mécanismes qui existent ne sont pas forcément utilisés à bon escient. Par exemple, concernant le prêt à taux zéro : la cible a été clairement mal évaluée
car, en réalité, les ménages qui rentrent dans les critères ont des revenus bien trop modestes pour entreprendre des travaux de rénovation énergétique, alors que dans le même temps des classes moyennes qui seraient en capacité d’emprunter n’y ont pas accès. L’open data, cette accessibilité de données privées, fait-elle peur aux consommateurs ? En réalité, le big data n’est pas un problème ! C’est l’élément d’un système sociotechnique qui consiste à continuer à vendre de l’énergie en la comptabilisant ou en la contrôlant via des compteurs et ces compteurs visent à réguler ces consommations à l’échelle globale. De fait, ils ont besoin de véhiculer des datas. Ce sont ces données elles-mêmes qui peuvent poser problème. Il est vrai que beaucoup de consommateurs ont la crainte de voir leurs données confidentielles divulguées à tout-venant. On dit souvent que le bâtiment est le secteur clé de la transition énergétique car c’est celui qui offre le plus important potentiel de maîtrise de la demande en énergie (MDE). Quelle est votre opinion ? C’est effectivement un secteur clé avec celui des transports. Mais en réalité, pour faire de la MDE, l’approche doit être systémique et globale. Il faut repenser la morphologie des villes (leur organisation) et leur métabolisme (les flux) pour les penser de manière plus efficace. Propos recueillis par Laura Icart
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OUTIL DE LA TRANSITION
Un guichet unique de la donnée Le 19 mai 2017, près de 170 distributeurs d’électricité et de gaz ainsi ont annoncé la création d’une agence commune de services numériques. Baptisée Agence ORE (Opérateur de réseaux d’énergie), au cœur des nouveaux enjeux numériques, elle a pour principale mission d’accompagner la transition énergétique sur nos territoires.
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RDF, Enedis, Regaz Bordeaux, Réseaux GDS font partie des quelque 170 signataires à l’origine de la création de l’Agence ORE, destinée à tous les acteurs engagés dans la transition énergétique (producteurs d’électricité, de gaz, fournisseurs d’énergie, start-up, collectivités notamment). Si cette agence est une grande première en Europe, elle répond avant tout à plusieurs obligations légales et règlementaires de mise à disposition de données (consommation, production…) contenues essentiellement dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte et dans l’article 23 de la loi pour une République numérique. Une mission de service public La création de l’Agence s’inscrit dans la continuité des préconisations de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) concernant l’organisation et la gouvernance des données de l’énergie, décrites dans le rapport de son comité d’études des données du 15 juin 2017. Elle doit offrir une vision renforcée de la distribution d’énergie en France et servira de guichet unique aux acteurs de l’énergie. Composée actuellement d’une équipe de quatre personnes spécialisées en gestion de la donnée, trois personnes supplémentaires
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doivent venir renforcer les effectifs d’ici la fin de l’année 2018. L’Agence se donne pour ambition de faciliter les démarches des acteurs du système énergétique dans les nouveaux mécanismes de marché mais aussi des acteurs publics et privés, notamment dans l’accès aux données, maillon indispensable pour proposer des actions efficientes en termes d’efficacité énergétique. « Cette mutualisation de moyens numériques des gestionnaires de réseaux permettra à tous nos membres de répondre avec un haut niveau d’exigence aux différentes obligations légales et évolutions du secteur » explique Michel Sand, directeur des opérations de l’Agence ORE. Une feuille de route déjà bien remplie pour 2018 « Nous avons l’ADN d’une start-up » confie avec enthousiasme Michel Sand à Gaz d’aujourd’hui, soulignant « la forte implication des acteurs gaziers » dans l’Agence ORE qui se veut l’interlocuteur unique des acteurs du marché de l’énergie dans le traitement, le suivi et la fourniture des données. Ainsi, par exemple, elle devra être capable demain, grâce aux données récoltées, de donner la capacité de gaz vert pouvant être accueilli par le réseau de GRDF ou de GRTgaz. Elle devra aussi être en mesure d’accompagner les collectivités dans la construction et la mise en œuvre de leur plan climat-énergie territorial, en leur fournissant une série de données multi-énergies. Lancée en mai 2017, l’Agence ORE se prépare à la mise en place effective de ses actions. Au premier trimestre 2018, le portail open data des données énergétiques, consultable par tous les acteurs, sera disponible. Le guichet unique et les premiers outils de marché devraient voir le jour au cours du deuxième trimestre. « Nous souhaitons proposer une trentaine de services d’ici la fin de l’année » conclut Michel Sand. L.I.
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TRIBUNE LIBRE - GABRIELLE DESARNAUD ET PIERRE DUCHESNE CAPGEMINI
Digitaliser sans vulnérabiliser : les enjeux du secteur gazier La nécessaire digitalisation des infrastructures énergétiques Baisse des prix des matières premières, évolution des usages des particuliers, essor des énergies intermittentes, rupture des modèles d’affaires traditionnels par des acteurs rompus à l’usage du digital : les fondamentaux du secteur énergétique sont en plein bouleversement. Afin de répondre à ces nouveaux enjeux, les utilities repensent leur organisation, leurs offres, mais aussi la configuration de leurs infrastructures industrielles. C’est ainsi que l’on observe un vaste mouvement de digitalisation des infrastructures énergétiques, dans le but d’optimiser leur gestion et maximiser leur rendement. Le secteur gazier n’échappe pas à cette logique. De la modélisation des sols au contrôle distant d’actionneurs, la digitalisation permet d’optimiser la chaîne d’approvisionnement et d’adapter l’offre de service aux spécificités des clients. Les véritables bouleversements se situent sans doute dans l’adoption croissante de plateformes permettant de traiter et de partager les données de multiples points de production et de consommation, ainsi que de piloter les actifs à distance. Le DESC (centre de pilotage de performance énergétique) de Dalkia permet par exemple d’optimiser la performance énergétique de milliers de bâtiments en pilotant leur chaufferie en fonction d’informations remontées de capteurs. Ces plateformes se veulent interactives, flexibles et ouvertes, permettant à de nombreux acteurs de l’écosystème d’une grande entreprise d’accéder à ses données.
La digitalisation engendre aussi de nouvelles vulnérabilités Pourtant, si essentiel soit ce mouvement de digitalisation des actifs de production, de transport, de stockage et de distribution d’énergie, il ouvre également la porte au risque de cyberattaque. Selon le Ponemon Institute et Siemens, 70 % des entreprises du secteur pétrolier et gazier américain auraient subi au moins une cyberattaque en 2016. Les risques encourus sont multiples : espionnage industriel, rançonnage, interruption de service… La plupart des attaques réussies parviennent à exfiltrer des données clients ou des informations commerciales sensibles, pouvant offrir un avantage compétitif aux concurrents. Cependant, c’est le sabotage des infrastructures industrielles, plus difficiles à sécuriser que les données, qui est en augmentation. Ainsi, pour la première fois, une cyberattaque minutieusement planifiée provoquait en 2015 l’effondrement d’une partie du réseau électrique ukrainien, privant 200 000 personnes d’électricité et endommageant plusieurs postes électriques sur le long terme. Pour l’heure, aucun incident de ce type sur une infrastructure gazière ne semble tirer son origine dans une cyberattaque (si ce n’est une explosion peu documentée dans les années 80), cependant les autorités veillent particulièrement au risque d’attaques soutenues par des États, seuls acteurs qui à ce jour sont parvenus au sabotage poussé et maîtrisé d’infrastructures énergétiques. Certains événements soulèvent des inquiétudes. En 2012, la compagnie Telvent, spécialisée dans la production
Gabrielle Desarnaud est consultante Energy and Utilities chez Capgemini Consulting. Elle a auparavant travaillé deux ans au centre énergie de © CAPGEMINI l’Institut français des relations internationales (Ifri), notamment sur les enjeux de cybersécurité du secteur énergétique. Elle a également été en poste à Pékin au sein du think tank Asia Centre sur les politiques de soutien aux énergies renouvelables et la réforme du marché du gaz en Chine. Pierre Duchesne a fondé et dirigé pendant huit ans une start-up dédiée aux objets de l’énergie connectés, avec des clients comme EDF, Engie ou Total, avant de rejoindre GE comme © CAPGEMINI directeur innovation monde sur les smart grids. Il est maintenant chez Capgemini Consulting en tant que Principal Energy and Utilities afin d’accompagner les acteurs de l’énergie dans leur transformation vers un monde 3D : décentralisé, digitalisé, décarboné.
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DOSSIER
de Scada (systèmes d’acquisition et de contrôle des données) largement employés par l’industrie gazière, déclarait avoir subi une cyberattaque durant laquelle un groupe de hackers aurait eu accès aux fichiers de configuration de son produit phare OASyS DNA. Outre le vol de propriété intellectuelle que cette attaque constitue pour Telvent, l’accès à ces fichiers aurait pu permettre aux attaquants d’avoir accès aux systèmes de contrôle des clients. À la même époque, le gestionnaire de transport de gaz français GRTGaz utilisait justement OASyS DNA pour gérer l’acheminement du gaz sur son réseau. L’écosystème gravitant autour du secteur énergétique peut ainsi être utilisé comme un vecteur d’attaque. Deux tendances ont contribué à fragiliser la sécurité informatique des infrastructures énergétiques. Dans un premier temps, les unités centrales (PC ou serveur industriel) pilotant les systèmes d’acquisition et de contrôle de données1 ont été migrées sur des systèmes d’exploitation mieux connus du grand public, afin de faciliter l’essor d’une infrastructure informatique unique et standardisée. Par la suite, ces systèmes de télégestion ont été ouverts à des acteurs tiers et à Internet, les exposant potentiellement à une communauté de hackers transfrontalière maîtrisant les environnements Windows ou Linux et encline à tester les conséquences physiques d’une attaque informatique sur des installations industrielles. Cette ouverture relative leur a en retour permis d’enrichir leurs connaissances en matière de protocoles et d’automates industriels. Dans le même temps, ces infrastructures sont peu à peu modernisées par de nombreux composants digitaux qui, s’ils sont mal sécurisés, augmentent considérablement la surface d’attaque disponible. Du vol de données exploitables à des fins commerciales, l’intérêt s’est ainsi porté vers le sabotage. Si l’utilisation de logiciels grand public et l’ouverture des réseaux n’ont rien d’exceptionnel dans le monde de la bureautique, le monde industriel peine en revanche à se prémunir contre leurs dangers. En effet, les principes de base de la sécurité informatique y
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sont difficiles à mettre en œuvre car les équipements, conçus pour la plupart il y a plusieurs décennies, n’ont pas été pensés pour être digitalisés. Appliquer des correctifs de sécurité nécessite par exemple de mettre à l’arrêt une partie de la production pour effectuer les mises à jour et tester leurs conséquences, parfois sur plusieurs semaines. Certains estiment que 15 à 20 % des équipements cesseraient de fonctionner après certaines mises à jour. Les réflexes de sécurité informatique comme la double authentification ont tardé à être adoptés au sein d’un secteur où la culture est essentiellement tournée vers la sureté physique, et restent difficiles à appliquer. Protéger données et infrastructures sans entraver la transition énergétique La sécurisation des infrastructures et des données se met pourtant en place, soutenue par un cadre réglementaire exigeant. Engie a ainsi signé en 2016 un accord avec Thales, première entreprise à avoir reçu la certification Passi2 pour mener à bien les audits de cybersécurité requis par l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information (Anssi), afin de superviser en continu la sécurité de son système d’information. La transition énergétique rend ces mesures d’autant plus essentielles qu’elle motive une digitalisation rapide du secteur, indispensable à l’intégration des énergies intermittentes, au développement des services d’efficacité énergétique active et à l’optimisation des ressources. Elle engendre notamment un mouvement de décentralisation des moyens de production qui rend complexe la sécurisation de petites infrastructures gérées par des acteurs éloignés du monde de la sécurité industrielle ou informatique. GRDF vise par exemple 30 % de gaz d’origine renouvelable sur son réseau d’ici 2030. Cela implique de puiser dans des gisements existants de matière méthanisable et peu exploitée : 90 % du biogaz viendra d’installations graduellement déployées par des exploitants agricoles. La multiplication des sites de production et les besoins d’optimisation du réseau ont ainsi
imposé à GRDF de déployer un Scada en 2017 qui, à terme, pilotera les 7 000 contrôleurs déployés sur le terrain et plusieurs milliers de petites installations. Chacune deviendra alors un point d’entrée potentiel sur le réseau en cas de faille de sécurité. Et si les possibilités de stockage du gaz permettraient de mitiger l’impact d’une cyberattaque sur l’approvisionnement, les dommages financiers pour l’entreprise pourraient être considérables. À long terme et selon la part que le gaz tiendra dans la production d’électricité, une cyberattaque de grande ampleur pourrait également impliquer des délestages forcés sur le réseau électrique en période de pic de consommation. L’enjeu de cybersécurité ira donc croissant, pourtant la transition énergétique peut en parallèle être limitée par les exigences sécuritaires. GRDF a mis en place une ségrégation totale de ses réseaux informatiques, séparant son Scada gérant son réseau gazier du « Meter Data Management System » de son compteur communicant Gazpar. Cette mesure prévient les intrusions sur le Scada par le biais du réseau informatique des compteurs, mais implique une contrainte majeure : elle empêche le Scada de bénéficier en temps réel des données remontées du terrain pour équilibrer le réseau. Dans cette configuration, le déploiement d’un smart gas grid est donc impossible, et la valorisation de la donnée limitée. La cybersécurité devra ainsi se penser en parallèle de la transition énergétique, afin de l’accompagner sans mettre à mal la sécurité des infrastructures énergétiques et les données des consommateurs. Le secteur énergétique dans son ensemble, et particulièrement le secteur gazier en raison du rôle qu’il est amené à jouer dans la transition, doit ainsi approcher la problématique sous un angle holistique, prenant en compte les enjeux énergétiques, digitaux et sécuritaires. 1 Scada : système de télégestion à grande échelle permettant de traiter en temps réel un grand nombre de mesures et données, et de contrôler à distance des installations industrielles. 2 Passi qualifie les prestataires d’audit de la sécurité.
SPÉCIAL PÉROUU
PANORAMA
Vers un âge d’or du gaz naturel au Pérou Qui aurait imaginé il y a trente ans que le Pérou prendrait le virage du gaz naturel ? Certes, la découverte au milieu des années 80 de l’immense champ gazier de Camisea au milieu de la jungle amazonienne pouvait être un premier indicateur. Mais en raison de conflits politiques, financiers et environnementaux, il aura fallu attendre 2004 pour que son exploitation démarre. Treize ans après, le gaz naturel n’a jamais eu autant la cote au Pérou, sous forme de GNV pour les transports, de GNL pour l’exportation ou destiné à alimenter le marché intérieur. L’État péruvien l’installe progressivement comme l’énergie de référence et souhaite développer des infrastructures capables d’optimiser ses grandes réserves afin d’offrir à toute sa population un accès au gaz naturel. L’âge d’or du gaz naturel est-il arrivé au Pérou ? Reportage. Par Laura Icart, envoyée spéciale au Pérou
© PERÚ LNG
Usine de liquéfaction de Pampa Melchorita.
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roisième plus grand pays d’Amérique du Sud, situé entre la cordillère des Andes et la côte pacifique, le Pérou connait une économie florissante et affiche dix-huit années de croissance continue, avec un taux atteignant les 3,9 % en 2016. Contrepartie d’une économie en plein essor, la demande énergétique au Pérou est en constante augmentation et cette tendance devrait se poursuivre dans les années à venir. Ce sont les énergies fossiles qui dominent : elles constituent 80 % de la consommation énergétique en 2016. Une part qui a augmenté de près de 17 % depuis l’an 2000, portée principalement par l’augmentation de la production de gaz naturel.
El Seňor Gas Dans le panorama gazier sud-américain, le Pérou figure parmi les pays les plus dynamiques. Ses grandes réserves
prouvées, estimées à 0,3 TCM3, ses exportations de GNL (57 % des importations nets d’hydrocarbures en 2016), sa production (évaluée à 14 BCM3 en 2016) et ses consommations (7,9 BCM3) sont en constante augmentation. Si, au début des années 2000, le gaz naturel ne représentait que 5 % de la production d’énergie primaire, il est devenu, en 2015, le combustible le plus important - à hauteur de 53 %. Aujourd’hui, plus de 50 % de l’électricité produite au Pérou a pour source le gaz naturel, l’autre partie provenant des ressources hydrauliques. Le Pérou a développé ces dernières années un appétit sans limite pour le gaz naturel, persuadé que cette énergie sera un facteur de développement tout en leur permettant d’assurer leur sécurité énergétique. Un appétit né au fin fond de la jungle amazonienne, à quelques kilomètres de l’ancienne capitale inca Cuzco et du Machu Picchu.
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SPÉCIAL PÉROU TgP’s pipeline
4 800 m.a.s.l
Camisea Fields
City Gate Lurin
Coast 211 km
Highlands 310 km
Jungle 208 km
Source : TgP.
Camisea, le champ de la démesure La découverte d’importants gisements de gaz naturel en 1982 par Shell a placé le Pérou parmi les producteurs moyens d’hydrocarbures en Amérique latine. Si son potentiel fut réellement connu en 1987, pour entrer en exploitation, le projet énergétique Camisea aura attendu près de vingt ans. Deux difficultés majeures sont apparues à l’époque : un conflit d’ordre financier d’une part, qui opposa pendant près de quinze ans l’entreprise Shell et les gouvernements péruviens successifs d’alors ; des tensions sociales extrêmement importantes d’autre part, générées par l’impact du projet Camisea (exploration, construction de gazoducs…) sur les communautés autochtones et leur environnement. La prise en charge de l’exploitation Ce n’est finalement qu’au début de l’an 2000, après dix-huit ans de tractations, que le Pérou confia pour quarante ans les activités d’upstream des deux lots les plus importants (le block 88 et le block 56 du champs gazier) à un consortium privé d’entreprises mené par le troisième producteur de gaz argentin Pluspetrol (27 %), le groupe américain Hunt Oil (25 %), le raffineur sud-coréen SK Energy (18 %), le péruvien Tecpetrol (10 %), la société algérienne Sonatrach (10 %) et enfin l’espagnol Repsol (10 %). Deux autres lots de Camisea étant
L’ouverture aux investisseurs étrangers Depuis le début des années 90 le secteur des hydrocarbures a été ouvert aux investissements directs étrangers, notamment au travers de privatisations qui ont créé des conditions attractives pour la prise de participation de multinationales étrangères dans le capital des entreprises nationales. Une réalité qui s’est surtout accentuée depuis 2003, avec la multiplication des contrats privés pour l’exploration et l’exploitation de pétrole et de gaz naturel, d’une part, ainsi qu’avec le développement des investissements privés dans le traitement et le transport de gaz, d’autre part. Si les acteurs privés jouent un rôle stratégique dans le développement du secteur gazier au Pérou, leur participation sous forme d’investissements et de technologies est soumise à des contraintes transnationales et locales, qui ont des impacts significatifs dans la gestion et le développement de leurs projets. C’est Osinergmin, l’organisme étatique de surveillance de l’investissement dans l’énergie et l’exploitation minière, qui a la charge de s’assurer que les investissements privés sont faits dans le respect des règles et des outils de régulation assurant au pays sa sécurité énergétique.
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détenus par Repsol (le block 57, à 54 %) et la chinoise CNPC (à 46 %, celui-ci détenant également le block 58 qui n’est actuellement pas en phase d’exploitation). La même année, l’État confia pour trente-trois ans les activités de downstream, le transport du gaz naturel et des GPL entre Camisea et Lima à la société péruvienne Transportadora de Gas Peruana S.A., dit « TgP » et la distribution du gaz naturel à Lima et Callao à un consortium privé mené par cette même TgP. Après la signature de ces deux contrats, au début des années 2000, le Pérou a lancé une série de réformes indispensables pour être en mesure de financer des grands travaux d’exploration et pour construire des infrastructures de transport et de raffinage. Si le pays avait déjà ouvert les secteurs des hydrocarbures aux investissements directs étrangers dans les années 90 (voir encadré), ils ont considérablement augmenté avec l’entrée en exploitation de Camisea. « Il est difficile de minimiser l’importance de Camisea pour le profil énergétique du Pérou. Depuis son lancement en 2004, le développement du champ a généré plus de 13 milliards de dollars d’investissements et plus de 7 milliards de dollars de redevances pour le gouvernement national » déclarait Pedro Pablo Kuczynski, le président du Pérou, le 25 octobre dernier. Il est vrai qu’en une décennie, la production d’hydrocarbures du pays a augmenté d’environ 260 % et a vu se développer (notamment grâce au financement de multinationales étrangères) un réseau de transport et de distribution parfaitement opérationnel mais cantonné à une partie du pays seulement : les provinces de Lima, Callao et Ica. L’organisation de la chaîne gazière au Pérou ... upstream… TgP, société péruvienne détenue par un consortium des multinationales CCP Investment Board, Enagas et la Sonatrach, est responsable de la conception, la construction et l’exploitation d’un système de transport par gazoduc de gaz naturel et de GNL depuis le champ de Camisea, dans le département de Cuzco. TgP transporte, via ses deux gazoducs reliant la jungle à la côte, l’intégralité du gaz naturel et du gaz de pétrole liquéfié. En 2010, l’inauguration de l’usine de liquéfaction de Melchorita et la construction d’un nouveau gazoduc pour lui acheminer directement le gaz naturel par la société Perú LNG inaugurait aussi l’ère de l’exportation du GNL. La TgP possède une capacité totale de transport de plus de 43 millions de mètres cubes (m3) dont environ 26 millions de m3 est consacré au marché local, le reste à l’exportation de GNL. Actuellement, la société transporte l’équivalent de 34 millions de m3, soit 80 % de sa capacité journalière. En 2016, elle a livré environ 95 % de la production totale de gaz naturel et de GNL produit dans le pays. Elle dessert les quatre activités principales de l’économie péruvienne : la production d’électricité (44 % de l’énergie électrique au Pérou et jusqu’à 51 % en saison sèche), l’exportation de GNL à hauteur de 100 %, mais aussi la distribution du gaz (100 % du gaz naturel utilisé à Lima et à Ica, tous secteurs confondus). TgP gère enfin une usine de fractionnement à Pisco. À noter que 77 % du GPL produit au Pérou provient de Camisea.
SPÉCIAL PÉROUU
PÉROU Promigas
Export GNL LIMA
Gazoduc (2004) - TGP Gazoduc (2010) - Pérou LNG Gazoduc (2004) - TGP (GPL) GNL par voies terrestres (2017)
CAMISEA
Usine de liquéfaction de Melchorita
Gas Natural Fenosa Usine de fractionnement de GPL. Pisco Sources : TgP, Cálidda, Perú LNG.
…... et downstream La distribution du gaz naturel est un service public réglementé par le ministère de l’Énergie et des mines (MEM) et par Osinergmin. Si le MEM établit le cadre légal réglementaire dans lequel la distribution du gaz naturel doit être développée, Osinergmin s’assure qu’il soit respecté, s’occupe d’établir des normes techniques, commerciales et environnementales, et est également chargé de déterminer les tarifs. Actuellement, deux entreprises ont en charge la distribution du gaz en provenance de Camisea : Cálidda pour les provinces de Lima et de Callao et Contigas pour la province d’Ica. Depuis fin 2017, dans le cadre de la stratégie énergétique nationale visant à promouvoir l’utilisation massive du gaz naturel dans tout le pays, baptisée aussi plus communément « masificación del gas natural », deux nouveaux distributeurs de gaz opèrent dans le pays : Promigas dans le nord et Gas Natural Fenosa dans le sudouest (Arequipa, Moquegua et Tacna). Ils livrent du GNL par camion depuis l’usine de liquéfaction de Melchorita. « La masificación del gas natural » C’est sûrement le terme le plus répandu au Pérou lorsque l’on parle de développement de l’usage du gaz naturel sur le territoire. Ce grand projet né avec l’exploitation de Camisea a pour objectif de permettre à la population péruvienne, même la plus isolée, d’avoir accès au gaz naturel, une énergie sûre, abordable et respectueuse de l’environnement. En somme, de créer un système gazier capable de satisfaire la demande intérieure de manière fiable, continue et efficace. Si cela a été le cas pour les provinces de Lima, Callao et Ica, force est de constater que le reste du pays
peine pour le moment à accéder au gaz naturel. Pour augmenter sa sécurité énergétique et développer l’usage du gaz naturel qu’il possède en abondance, le pays n’a pas le choix : il va devoir construire des infrastructures pour transporter le gaz, pour le distribuer ainsi que des installations domestiques et industrielles pour le recevoir. Mais dans un pays où la géographie escarpée rend la construction compliquée, impliquant des coûts très importants, les projets de nouveaux gazoducs ont bien du mal à sortir de terre. Pour preuve : la mise en œuvre d’un ambitieux projet de gazoduc baptisé « Southern Gas Pipeline », qui devait transporter du gaz naturel de la province d’Anta (Cuzco) vers la côte sud du Pérou, a été suspendue par le gouvernement, faute de trouver des financements. À court et moyen terme, la solution viendra peut-être des routes, avec du transport de GNL par camion et la construction dans le pays d’unités de gazéfication. Outre les infrastructures, la « masificación » vise aussi à installer une culture gazière dans un pays qui consomme massivement du pétrole et ses produits dérivés dans les villes et du bois de chauffage dans les zones rurales. Ainsi, le gouvernement propose de nombreux programmes pour venir en aide notamment aux précaires énergétiques avec, par exemple, des bons de réduction pour l’achat de citernes de GPL ou lorsque les foyers sont connectés aux réseaux de distribution, le financement total ou partiel de leur installation. Si le déploiement du gaz naturel à Lima est un relatif succès dont le gouvernement veut s’inspirer dans les autres régions du pays, porté par une hausse de la prévision de demande nationale de gaz naturel (qui avoisinerait entre 54 millions de m3 par jour et 68 millions de m3 par jour d’ici 2025), la réussite de la « masificación » ne résidera pas seulement dans les volumes consommés mais bien dans le nombre de nouveaux clients raccordés au réseau de distribution de gaz naturel. Selon un rapport du réalisé par Quavii, filiale de Promigas1, « le nombre d’utilisateurs résidentiels et commerciaux ayant accès au gaz naturel au Pérou atteindrait, en 2024, près de 1,8 million, soit 24 % la population totale, grâce aux nouveaux projets de distribution et de commercialisation ». Construire un réseau énergétique viable pour tous En l’espace de treize ans, la construction d’une infrastructure amont et aval de la chaîne de gazière a permis au Pérou de devenir un exportateur net de GNL mais aussi de favoriser, via un prix du gaz subventionné, une industrie du gaz domestique dans les plus grosses provinces de son territoire. Pourtant le pays peine toujours à répondre à sa problématique majeure, lui qui compte beaucoup de ressources mais peu d’infrastructures de transport. Si la « masificación » est en marche, il faudra encore du temps et une forte volonté politique pour installer le gaz naturel dans la vie de tous les Péruviens. 1
Deuxième rapport sur le secteur gaz naturel au Pérou 2017, novembre 2017.
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SPÉCIAL PÉROU
DISTRIBUTION
Lima, la gazière Si avec Camisea le pays possède de vastes ressources en gaz naturel, la majeure partie de la population dépend toujours principalement des produits pétroliers pour subvenir à ses besoins énergétiques. Une réalité qui ne se vérifie pas dans les provinces de Lima et Callao, qui ont vu se construire en quelques années un réseau de distribution de gaz naturel des plus performants. Explications.
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our concevoir, construire et exploiter le système de distribution du gaz naturel dans la région de Lima et la province constitutionnelle Callao, deux régions qui regroupent plus d’un tiers de la population du pays, le ministère des l’Énergie et des mines (MEM) et Osinergmin ont mandaté la société Cálidda pour une période de trentetrois ans renouvelable. Cette société péruvienne, créée en 2004 et dont les principaux actionnaires sont le Grupo Energía de Bogotá et Promigas, deux sociétés colombiennes spécialisées dans le secteur énergétique et dans le développement des infrastructures gaz, a fortement contribué à l’essor du gaz naturel au Pérou. Cálidda l’ambitieuse Le système de distribution de Cálidda se compose d’un réseau de 515 km de tuyaux en acier (haute pression) pour desservir les stations de véhicules GNV et les clients industriels et d’un réseau de 7 393 km de tuyaux en polyéthylène (basse pression). Le réseau Cálidda, réparti entre Lima et Callao, opère sur environ 35 % du territoire péruvien et gère également une cinquantaine de stations de régulation et de comptage de la pression du gaz autour de la ville, chargées d’abaisser la pression du gaz pour entrer en toute sécurité dans les zones urbaines. Parmi ses clients, la société compte des centrales électriques, des industriels, des gestionnaires de stations-service GNV et des clients résidentiels et tertiaires.
Le système Cálidda en chiffres Nbr de clients 2011
Nbr de clients 2017
(2e trimestre)
Taux de croissance depuis 2011
Répartition des volumes de gaz en 2016
Producteurs d’électricité
13
19
46 %
75 %
Industrie
394
552
40 %
15 %
Stations GNV
172
251
46 %
8%
63 602
500 767
687,3 %
1%
Secteurs
Residentiel-tertiaire
Source : Cálidda.
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Un potentiel de croissance important « L’année 2017 a été une année record pour nous » a déclaré en décembre Jorge Olazábal, président de Cálidda, soulignant que son entreprise a atteint 120 000 raccordements résidentiels supplémentaires et près de 1 520 pour le secteur tertiaire, portant son portefeuille de clients résidentiels tertiaires à plus de 570 000 (fin 2017). Le développement de réseaux physiques de distribution de gaz naturel permettra selon Cálidda à ce que, d’ici cinq ans, près d’un demi million de foyers supplémentaires aient un approvisionnement continu en gaz naturel dans leurs maisons. Actuellement, la capacité du système Cálidda (environ 12 millions de m3 par jour) est suffisante pour répondre à la demande (plus de 8 millions de m3 par jour). La société a prolongé son contrat d’approvisionnement en gaz naturel avec le consortium Camisea jusqu’en 2021. Des programmes gouvernementaux incitatifs Au cœur de sa stratégie de « masificación », le gouvernement péruvien développe de nombreux programmes pour promouvoir l’usage du gaz naturel parmi sa population. Le plus connu d’entre eux se nomme BonoGas : son objectif est de permettre à davantage de familles péruviennes d’accéder au gaz naturel en finançant une installation domestique. L’Etat subventionne intégralement l’installation aux familles appartenant aux secteurs socio-économiques les plus défavorisés et jusqu’à 50 % pour des familles aux revenus moyens. Grâce à ce programme, le gouvernement espère équiper 500 000 foyers d’ici quatre ans. En quelques années, le Pérou s’est construit dans ses trois principales villes un système de distribution de gaz efficace et performant. Au cours de la période 2007-2016, rien qu’à Lima, l’usage du gaz naturel a généré des économies équivalant à 1,59 % du PIB annuel national. Si le pays vise plus d’un million de raccordements domestiques d’ici à la fin de la mandature du président Pedro Pablo Kuczynski en 2021, il reste quand même loin derrière son voisin colombien qui dessert plus de la moitié de sa population en gaz naturel alors que ses réserves prouvées représentent la moitié de celles du Pérou. Une situation qui peut s’expliquer selon certains experts par le choix du Pérou d’avoir privilégié une politique d’exportation plutôt que développer l’usage du gaz naturel sur son sol. Mais une situation qui change progressivement. L.I.
SPÉCIAL PÉROUU
INFRASTRUCTURES
Le pays carbure au GNL Lorsqu’en 2010, l’usine de liquéfaction de Pampa Melchorita est inaugurée sur la côte péruvienne à 163 km au sud de Lima, elle cumule déjà plusieurs records. En plus d’être la première usine sud-américaine dédiée à la production de gaz naturel liquéfié, elle exploite le plus haut gazoduc au monde construit dans un paysage escarpé depuis le champ gazier de Camisea. Si jusque-là elle exportait 100 % du GNL produit, elle fournit depuis peu du GNL par transport terrestre au nord et au sud du pays pour développer le marché domestique intérieur. État des lieux.
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omme souvent dans le secteur gazier au Pérou, l’entreprise Perù LNG qui exploite le site de Pampa Melchorita est une société péruvienne mais détenue exclusivement par de grandes firmes énergétiques étrangères. Créée en 2003, son principal actionnaire et opérateur est l’américain Hunt Oil (50 %), le sud-coréen SK Innovation ainsi que le hollandais Shell (20 % chacune) et enfin le japonais Marubeni (10 %). Ce projet, le plus grand investissement privé réalisé au Pérou, a coûté près de 3,87 milliards de dollars. Une usine dédiée à l’exportation L’usine de liquéfaction de Melchorita est composée d’un train de liquéfaction, de deux réservoirs de stockage d’une capacité de 130 000 m3 chacun (cinq jours de production suffisent à les remplir) et d’un terminal maritime de 1,3 km de longueur capable de réceptionner des navires avec une capacité entre 151 000 m3 et 173 000 m3. C’est un gazoduc de 408 km, traversant quatre régions entre jungle et côtes, construit à presque 5 000 mètres d’altitude qui est chargé d’alimenter l’usine située au kilomètre 170 de la Panamericana. La première livraison de GNL de l’usine a été faite le 22 juin 2010 au Mexique. Depuis, ce sont près de 417 livraisons de GNL qui ont été réalisées, principalement vers l’Espagne et le Mexique. « Il y en a eu près de 50 rien qu’en 2017 » précise à Gaz d’aujourd’hui David Lemor, directeur des affaires publiques de Perù LNG. En rachetant en 2013 les actifs de Repsol, la société Shell détient désormais 100 % des droits de commercialisation du GNL produit à Melchorita, mais aussi la charge de développer l’usage du gaz naturel pour le marché intérieur en appliquant une initiative baptisée « pipeline virtuelle » lancée en 2013 par le gouvernement dans le cadre de sa stratégie énergétique nationale visant à promouvoir l’utilisation massive du gaz naturel dans tout le pays. Un marché intérieur à satisfaire L’objectif de « pipeline virtuelle » est d’élargir la portée des ressources gazières du Pérou au-delà de la grande région de Lima. Et c’est chose faite, avec l’inauguration en septembre dernier du nouveau terminal de chargement de GNL pour camion sur le site de Melchorita. Désormais, une par-
© PERÚ LNG
tie du gaz naturel extrait à Camisea sera transportée par le gazoduc de Perù LNG jusqu’à l’usine pour être liquéfiée. Shell vend ensuite le gaz aux sociétés concessionnaires responsables du transport et de la distribution de l’approvisionnement à travers le pays. Gases del Pacífico, une filiale de la société gazière colombienne Promigas, est chargée de distribuer le gaz aux ménages du nord, tandis que Gas Natural Fenosa détient les droits de concession pour distribuer le gaz dans le sud. Ces deux sociétés transportent le GNL depuis Melchorita et procèdent à sa régazéification, via les nouvelles stations qu’elles ont installées, avant sa distribution aux foyers individuels. En novembre, ce sont quatorze camions qui ont quitté le terminal de chargement pour répondre à la demande intérieure. À terme, l’installation sera en mesure de charger 20 millions de Nm3 de gaz (normaux mètres cubes), soit l’équivalent de vingt camions quotidiens. Si les volumes transportés ne sont pas énormes, ils devraient permettre d’alimenter en énergie près de 200 000 ménages dans des régions isolées où le gaz naturel restait jusque-là inaccessible, et peut-être d’ouvrir de nouveaux marchés au-delà de Lima et d’Ica - située à 300 km au sud de la capitale.
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SPÉCIAL PÉROU
PRODUCTION D’ÉLECTRICITÉ
Chilca Uno : la fée gaz Dans le système électrique péruvien, le gaz naturel est aujourd‘hui devenu indispensable, lui qui représente plus de 50 % de la production d’électricité dans le pays, loin devant l’hydroélectricité (34 %), le charbon et le fuel (13 %). Avec une croissance galopante et des besoins énergétiques accrus, le Pérou a construit de nombreuses centrales à gaz naturel. Celle à cycle combiné gaz de Chilca Uno - la seule d’Amérique latine - est sans doute la plus représentative de la place du gaz naturel dans la production électrique du pays. Immersion.
Un potentiel croissant La centrale thermique de Chilca Uno est la première centrale construite au Pérou pour exploiter uniquement le gaz naturel en provenance de Camisea. Elle est composée à l’origine de trois turbines à gaz, représentant un potentiel effectif de 535,9 MW. La première a vu le jour en décembre 2006, la seconde en juillet 2007 et la troisième en août 2009. L’idée de convertir cette centrale en cycle combiné gaz a été émise par Engie en 2012. Le groupe français, qui exploite actuellement plusieurs centrales thermiques et hydroélectriques dans le pays, voulait avec ce projet de conversion augmenter l’efficacité énergétique de Chilca Uno. La convertir en cycle combiné signifiait pour l’entreprise être en mesure de satisfaire une plus grande part de la demande énergétique dans le système électrique interconnecté national.
© LAURA ICART
CCG Chilca Uno (site de Chilca), septembre 2017.
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63 km au sud de Lima, dans le district de Chilca, la centrale à cycle combiné gaz de Chilca Uno, avec une production annuelle de 5 617,22 GWh (2016), est un maillon incontournable de la production d’électricité au Pérou. Propriété du groupe français Engie, qui l’exploite au travers de sa filiale péruvienne EnerSur devenue aujourd’hui Engie Energía Perú, elle représente aujourd’hui à elle seule près de 45 % de la production nationale d’électricité produite à partir de gaz naturel (soit environ 25 % de la production totale d’électricité produite au Pérou toutes sources confondues).
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Une conversion réussie Les trois turbines à gaz naturel de Chilca Uno ont été converties en 2013 en cycle combiné au moyen d’une turbine de quatrième génération à base de vapeur. Entrée en fonctionnement au second trimestre 2013, Chilca Uno a désormais une capacité installée de 852 MW. En 2016, un nouveau projet d’extension de la centrale est décidé, avec la construction et l’exploitation d’une turbine à gaz en cycle ouvert et d’une turbine à vapeur en cycle combiné pour une capacité additionnelle de 113 MW. Entrée en fonction en mai et décembre 2016, elle a été baptisée Chilca Dos. En 2016, les centrales Chilca Uno et Chilca Dos ont produit 5 842,94 GWh d’énergie électrique. À titre de comparaison, la deuxième plus grande centrale exploitée par Engie Energía Perú, la centrale thermique Ilo21 (charbon), a produit la même année 779,79 GWh. En 2016, la société a fourni 8 182 GWh d’électricité au système interconnecté national, ce qui fait d’elle l’une des principales sociétés de production d’électricité du pays avec une part de 17 % dans la production d’énergie. En 2017, le groupe français affichait une capacité installée de 2 673 MW, auquel s’ajouteront bientôt 40 MW supplémentaires avec la construction de la centrale solaire Intipampa à Moquegua, au sud du pays.
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MOBILITÉ
Transports au gaz : c’est le Pérou ! Au début des années 2000, Lima était encore l’une des villes les plus polluées de l’Amérique latine. En cause : un abondant trafic routier qui asphyxiait littéralement la ville. Face à ce problème, l’État péruvien a décidé de prendre des mesures pour promouvoir des sources d’énergie ayant un facteur d’émission plus faible, tel que le gaz naturel. Depuis, la capitale péruvienne ne jure que par lui pour se déplacer.
Un constat alarmant La pollution de l’air à Lima a atteint son apogée au début des années 2000. La ville, littéralement saturée par le trafic routier et par un transport urbain hors d’âge, dépérissait sous la prolifération des particules fines et des polluants. Selon une étude publiée par le Consortium pour la recherche économique et sociale (Cies), près de 5 000 personnes seraient mortes à Lima entre 2007 et 2011 à cause de la pollution. Le Cies impute 80 % de ces décès aux transports en commun. En 2014, la capitale péruvienne faisait toujours partie des villes les plus polluées d’Amérique latine selon une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Lima affichait un taux de concentration moyen de particules de 38 microgrammes par m3 pour les PM (particules fines) 2,5 et de 63 microgrammes par m3 pour les PM 10. Des niveaux largement au-dessus des recommandations de l’OMS, à savoir 10 et 20 microgrammes par m3. Si les niveaux de pollution diminuent quelque peu ces dernières années, il n’en reste pas moins que le gouvernement péruvien et les autorités de Lima ont dû procéder à une refonte de leur système de transport collectif. L’arrivée du gaz naturel à Lima en 2004 a sûrement été l’une des clés pour promouvoir une mobilité plus propre. Point d’orgue de cet engouement pour le gaz naturel, le lancement en juillet 2010 de El Metropolitano, son système de transport en commun, le premier en Amérique latine à fonctionner avec du gaz naturel pour véhicules. El Metropolitano, le réseau 100 % GNV Ce système de transport unique en Amérique latine, financé par la Banque mondiale, est en fait un vaste réseau de BRT (Bus Rapid Transit), roulant au GNV et desservant sur 36 km du nord au sud de Lima près de 50 stations. Plus de 350 bus articulés circulent sur le tronçon principal (interurbain) et transportent en moyenne un million de passagers
© LAURA ICART
Depuis 2010, les bus de El Metropolitano roulent au GNV à Lima. par jour. Deux cent vingt bus desservent une vingtaine de lignes dites « de ravitaillement » (en périphérie de Lima) permettant à près de 600 000 passagers de rejoindre quotidiennement le centre ville. Trois compagnies se partagent le réseau, ce qui représente environ 700 000 trajets par jour. Depuis 2015, El Metropolitano est le service de transport le plus utilisé à Lima, très loin devant le métro. En six ans d’exploitation, la flotte a parcouru 228,9 millions de km et consommé 247,2 millions de m3 de gaz. Une consommation équivalente à 633,4 millions de litres de gazole pour une économie des coûts estimée à environ 37,8 millions de dollars américains. Un succès économique mais surtout un succès environnemental pour la ville la plus polluée du Pérou puisque grâce à l’utilisation du gaz naturel, El Metropolitano a cessé d’émettre 70 132 tonnes de CO2, ce qui équivaut au captage de 5 833 333 arbres par an.
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SPÉCIAL PÉROU
Gazel Perú : une vaste expérience dans la mobilité gaz Au Pérou, Gazel Perú fait figure de leader sur le marché du GNV. Cette société fut la première en 2005 à exploiter des stations de GNV dans le pays. Elle a de plus participé au développement technologique de l’industrie du GNV en mettant en place différents programmes de conversion au GNV à Lima. Elle dispose d’un réseau de 38 stations-service, dont 37 distribuent du GNV, 14 du gaz de pétrole liquéfié (GPL) - tous deux vendus sous la marque Gazel -, et 11 du diesel et de l’essence. En 2016, la société a vendu plus 166 millions de litres de combustibles. C’est également Gazel qui exploite les deux « méga-stations » chargées de fournir du GNV à la flotte du système Metropolitano. Si, dans le domaine des transports public, Lima a opté pour le gaz naturel, le secteur du transport privé n’est pas en reste et de plus en plus d’automobilistes se tournent vers ce carburant. © LAURA ICART
Un succès qui inspire les voisins Une initiative qui a inspiré la Colombie, et plus exactement la ville de Medellín qui a elle aussi décidé d’opter pour le GNV pour motoriser une flotte de près de 350 bus. Baptisé Metroplús, ce réseau de bus fait ses preuves et a créé de nombreux adeptes dans un pays ou la quasi-totalité des systèmes de transport en commun fonctionnent au diesel. Avec plus de 706 tonnes d’émissions de particules « économisées » l’année dernière grâce à Metroplús, Medellín et sa région (le Valle de Aburrá), qui comptent plus de 55 000 véhicules circulant au GNV (22 000 taxis et 33 000 voitures particulières) sont en train de réussir leur pari.
Un nombre croissant de véhicules GNV Selon Infogas, la plateforme statistique contrôlée par le Ministère de l’énergie et des mines, de la production, du transport et des communications du Pérou, le nombre de conversions de véhicules roulant au gaz naturel dans le pays a atteint 250 000 en 20171. Le Pérou compte également 305 stations-service de gaz naturel comprimé (GNC), contre 284 fin 2016. Sur les 250 000 véhicules GNV dans le pays, plus de 10 000 ont été convertis sur l’année 2017. Dans une étude récente, l’organisme public Osinergmin montre que les utilisateurs de GNC réalisent des économies substantielles par rapport à d’autres carburants : elles s’élèvent à 57 % par rapport à l’essence, à 50 % par rapport au diesel et à 35 % par rapport au GPL. Ce différentiel de coût ajouté à une meilleure crédibilité environnementale sont autant de raisons qui devraient contribuer à la croissance des véhicules GNV au Pérou en 2018 et au-delà. Un pari audacieux mais qui porte ses fruits puisqu’en seulement dix ans, selon le distributeur de gaz Cálidda, l’utilisation du gaz naturel a évité dans la seule ville de Lima la propagation de 1,4 million de tonnes de dioxyde de carbone. Dans un pays qui devrait bénéficier grâce au champ gazier Camisea d’un approvisionnement continu de gaz naturel au moins jusqu’à 2050, la mobilité gaz a de beaux jours devant elle. 1
© GAZEL
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Infogas, décembre 2017.
C’EST PARTI POUR LE RENFORCEMENT GASCOGNE-MIDI !
UN GAZODUC SOUS-MARIN POUR GAZPROM
Une nouvelle canalisation pour un prix unifié du gaz en France ! Les travaux du gazoduc « renforcement Gascogne-Midi (RGM) » de 61,8 km reliant Lussagnet (Landes) à Barran (Gers) ont débuté, pour une mise en service en octobre 2018. Avec lui, TIGF participe à un projet national de renforcement des infrastructures de transport de gaz naturel dont le montant s’élève à 800 millions d’euros, totalement investis en France.
Gazprom a déjà construit plus d’un tiers de son tronçon sous-marin ! La major russe a en effet posé 700 km des tubes sous-marins du gazoduc Turkish Stream, qui reliera la Russie à la partie européenne de la Turquie et à la frontière grecque par le fond de la mer Noire, a annoncé jeudi 9 janvier Alexeï Miller, PDG du groupe gazier russe. Les travaux avaient commencé le 7 mai dernier. Le 26 décembre, Alexeï Miller précisait que 650 km des tubes avaient déjà été posés. Le projet de gazoduc Turkish Stream prévoit la construction de deux conduites d’une capacité de 15,75 milliards de m3 chacune. Une conduite transportera le gaz en Turquie à partir de mars 2018, l’autre alimentera l’Europe du Sud et du Sud-Est dès 2019. La partie sous-marine du pipeline sera longue d’environ 910 km.
DU BIOMÉTHANE AGRICOLE SUR LE RÉSEAU DE TRANSPORT Situés à Noyen-sur-Seine (Seine-et-Marne) et Les Essarts-en-Bocage (Vendée), deux nouveaux sites d’injection de biométhane produiront dès cette année un total de 59 millions de kilowattheures par an de gaz renouvelable, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 4 800 logements chauffés au gaz ou 260 bus roulant au gaz. Premier site de biométhane d’origine agricole raccordé au réseau de transport en France, le projet « Bassée Biogaz » est porté par Nicolas Brunet, agriculteur à Noyen-surSeine et Jaulnes, et le bureau d’études Artaim Conseil. Il produira du biométhane à partir de cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) et de sous-produits végétaux (pulpes de betteraves issues de silos). Premier site de biométhane pour GRTgaz dans le Grand-Ouest de la France, le projet « Bioloie » réunit le producteur vendéen de canards Ernest Soulard et le développeur, constructeur et exploitant de méthaniseurs Fonroche Biogaz. Il produira du biométhane à partir d’environ 73 300 tonnes de déchets organiques agricoles et agroindustriels. Ces projets constituent les deuxième et troisième sites raccordés au réseau de transport de GRTgaz, après celui de Chagny en Saône-et-Loire. Ils illustrent le potentiel du biométhane et son impact positif pour le développement de l’économie circulaire dans les territoires et l’agriculture.
BRÈVES INFRASTRUCTURES
INFRASTRUCTURES
« RICE », LE NOUVEAU BÉBÉ R&D DE GRTGAZ GRTgaz a créé le 1er janvier 2018 son propre centre de recherche et d’innovation, appelé « Rice » (Research & Innovation Center for Energy). Il est organisé autour de quatre pôles : l’analyse et le comptage des gaz ; les canalisations ; la performance et la sécurité industrielles ; l’innovation et la valorisation. Le centre mènera entre autres des recherches sur les gaz renouvelables (biométhane et hydrogène). Les équipes de Rice devront déterminer des spécifications autour de la qualité du gaz injecté dans les réseaux. Elles vont aussi travailler sur le déploiement des premiers postes de rebours. Rice mènera des activités de R&D pour le compte de différents opérateurs d’infrastructures gazières mais aussi d’autres clients. Le centre poursuivra des travaux et des coopérations avec des organismes de recherche internationaux tels que le Pipeline Research Council International (PRCI) et le Groupe européen de recherches gazières (Gerg).
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Gaz d’aujourd’hui • n 1-2018 • 33
INFRASTRUCTURES
INAUGURATION
Le rêve glacé de Poutine Le président russe Vladimir Poutine a inauguré en décembre dernier le site gazier Yamal, en Sibérie arctique. Yamal, projet de toutes les démesures, devrait produire jusqu’à 16,5 millions de tonnes de GNL par an.
© TOTAL
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ongtemps qualifié de chantier hors norme et à juste titre, le site de Yamal LNG a donc été inauguré en grande pompe par le président russe dans la nuit polaire du 8 décembre. La première cargaison GNL issue de Yamal LNG - financé pour moitié par le français Total et les chinois CNPC et Silk Road Fund (fonds d’investissement) a quitté le port de Sabetta, en Arctique russe, à destination de l’Asie, à bord du méthanier brise-glace Christophe de Margerie. Un nom qui ne doit rien au hasard, puisque l’ancien PDG de Total, décédé dans un accident d’avion en Russie en 2014, était à l’origine de l’engagement de Total dans le projet.
Yamal en chiffres
30 000 salariés
23 millions d’euros (coût du projet)
15 méthaniers brise-glace
16,5 millions de tonnes de GNL produit par an
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Un vivier de ressources Située dans une région désertique à 600 km au nord du cercle polaire et à 2 500 km de Moscou, la péninsule de Yamal dispose de ressources considérables en gaz. Si la région, gelée sept à neuf mois par an, avec des températures descendant jusqu’à - 50 °C, propose les conditions de travail difficiles, ces températures extrêmes rendent le coût de liquéfaction du gaz près de 10 % inférieur à ce qu’il est dans le reste du monde. Actuellement, une seule ligne de production (de 5,5 millions de tonnes par an) est opérationnelle. Les deux autres doivent démarrer cette année et en 2019 et devraient porter la capacité du site à 16,5 millions de tonnes par an. Une production déjà vendue Quinze méthaniers brise-glace de 300 m de long et d’une capacité de 170 000 m2 chacun seront mis en service d’ici à 2019 pour assurer le transport d’une production qui est d’ores et déjà vendue à 95 % dans le cadre de contrats sur vingt à vingt-cinq ans. Les principaux acheteurs sont les partenaires du projet : le russe Novatek, le français Total et le chinois CNPC. La production de Yamal LNG ira pour plus de la moitié en Asie (54 %) et le reste (46 %) trouvera preneur en Europe. Yamal devrait permettre à la Russie de se renforcer sur le marché du GNL et de rejoindre le top 3 mondial des producteurs de GNL. Quand tous les trains de liquéfaction seront en route, il devrait également permettre à Total, dont les ambitions en matière de GNL ne font que croître, de prendre une belle longueur d’avance sur ses concurrents. Le projet sera alors le plus gros pourvoyeur de GNL du groupe français.
INFRASTRUCTURES
BILAN
GRTgaz fait son #Bilangaz2017 Le gestionnaire de réseau de transport français GRTgaz, par la voix de Thierry Trouvé, son directeur général, a fait mercredi 17 janvier le bilan de ses activités pour l’année écoulée. Une année marquée, comme la précédente d’ailleurs, par une hausse de la production d’électricité au gaz naturel et par des injections de biométhane qui ont doublé dans les réseaux de gaz. Analyse.
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’est le traditionnel exercice de début d’année pour GRTgaz : proposer un bilan chiffré et par secteur d’activités de l’entreprise, ainsi que les principaux faits marquants de l’année. Dans cette catégorie, deux retiennent particulièrement l’attention : le rattachement d’Elengy comme filiale de GRTgaz et la création du centre de recherche et développement de GRTgaz. En 2017, GRTgaz a enregistré une légère hausse, de 0,4 %, des consommations brutes de gaz sur son réseau de transport, qui atteignent 465 TWh. Le gaz, principal soutien de la production d’électricité Les consommations des clients industriels raccordés au réseau ont progressé de 5,5 %, (190TWh) principalement portées par la production d’électricité à partir du gaz. Une production d’électricité au gaz qui culmine à 82TWh en 2017. Les 14 tranches au gaz ont consommé 55 TWh en 2017, en hausse de 19 % par rapport à 2016, et les cogénérations environ 27 TWh. « Un niveau jamais atteint qui s’explique par la baisse de disponibilité du parc nucléaire et par le niveau de l’hydraulique historiquement bas », souligne Thierry Trouvé, qui précise aussi « que le gaz est indispensable pour pallier à l’intermittence des énergies renouvelables et du parc nucléaire ». Les quatorze cycles combinés gaz implantés dans notre pays ont donc cette année encore tourné à plein régime. Ils pourraient bientôt être quinze, puisque le projet de Landivisiau (Finistère), gelé depuis quelques années, pourrait selon le directeur de GRTgaz trouver une seconde jeunesse en 2018. La consommation des clients raccordés aux réseaux de distribution (résidentiel, tertiaire et industrie), estimée à 275 TWh, est quant à elle en baisse de 2,9 %, principalement à cause d’un hiver aux températures plus clémentes qu’en 2016. Coup double pour les injections de biométhane Les injections de gaz renouvelable ont doublé l’an dernier, pour atteindre 408 GWh de gaz injecté. Une part certes très modeste dans la consommation globale mais une dynamique qui se confirme puisque 44 sites injectent désormais du biométhane sur le territoire. Fort de ce succès, les opérateurs gaziers affichent une nouvelle ambition : celle de porter la part du gaz renouvelable à 90 TWh (20 TWh en gaz renouvelable et 70 TWh en méthanisation) en 2030, quand pour
rappel la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) en impose 8 en 2023. Pour y répondre, GRTgaz, qui compte 4 sites de biométhane raccordés à son réseau de transport, envisage d’en ouvrir 5 ou 6 supplémentaires en 2018 et donne une perspective à 28 sites en 2020. Favoriser les usages plus neutres en CO2 Pour lutter contre le changement climatique et la pollution de l’air, GRTgaz parie particulièrement sur la mobilité gaz, un secteur hautement porteur qui affiche une progression de 100 % sur le segment des poids lourds (1 300 véhicules). Sur l’ensemble du parc, si la progression est plus modeste (10 %), les 16 200 véhicules GNC recensés en 2017 ont permis d’éviter 88 000 tonnes de CO2 (par rapport aux émissions des véhicules diesel). Si les objecteurs sont clairement braqués sur la mobilité terrestre, la mobilité maritime, avec ses importantes annonces (CMA CGM, Brittany Ferries, Costa Croisières…), a clairement marqué de son empreinte 2017 et devrait prendre un bel élan en 2018. Enfin, dans l’industrie, près de 4,3 TWh de consommation de gaz sont imputables aux nouvelles conversions du fuel vers le gaz réalisées durant l’année écoulée. Depuis 2012, l’ensemble des installations converties a permis d’éviter le rejet dans l’atmosphère en 2017 de 1,8 million de tonnes de CO2. Une contribution équivalente, selon GRTgaz, à celle d’environ 10 000 éoliennes de 2 MW dans le mix électrique. L.I. la galerie des possibles présente
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BRÈVES ÉCONOMIE ET FOURNITURE
ÉCONOMIE ET FOURNITURE
ÉTATS-UNIS : UN FUTUR L’AVENIR S’ASSOMBRIT RADIEUX POUR LE GAZ POUR GRONINGUE Le ministre néerlandais de l’Économie, Eric Wiebes, NATUREL a estimé le 16 janvier lors d’une conférence de L’Energy Information Administration (EIA) a annoncé le 18 janvier dans ses Perspectives énergétiques à court terme (STEO) que la production totale de combustibles fossiles aux États-Unis atteindra près de 73 quadrillions d’unités thermiques britanniques (BTU) en 2018, soit le niveau de production le plus élevé jamais enregistré. L’EIA s’attend à ce que la production totale de combustibles fossiles atteigne un autre record en 2019, avec une production qui devrait atteindre 75 quadrillions de BTU. Les niveaux records de production sont en grande partie attribuables à l’augmentation de la production de gaz naturel et de pétrole brut grâce à l’utilisation de techniques de fracturation hydraulique. L’EIA s’attend à ce que les augmentations de la production de gaz naturel soient les locomotive de la croissance globale de la production de combustibles fossiles en 2018 et de la croissance de la production de pétrole brut en 2019. D’ici deux ans, la croissance prévue de la production du gaz naturel et du pétrole brut devraient compenser les baisses prévues de la production de charbon.
ZOHR PRODUIT ! Zohr a été officiellement mis en production le 16 décembre, à un débit de 350 millions de pieds cubes par jour (9,91 millions de mètres cubes). Il aura donc fallu plus de deux ans pour que le groupe italien Eni et la compagnie nationale égyptienne EGPC, les opérateurs, mettent en production cet énorme champ gazier offshore découvert au cours de l’été 2015.
presse que la production de Groningue devrait être réduite « autant que possible » d’ici à 2021. Cette prise de position fait écho à un séisme d’une magnitude de 3,4 sur l’échelle de Richter survenue le 8 janvier. Dans cette région du nord des Pays-Bas où les séismes se sont multipliés ces dernières années, l’extraction gazière n’y est probablement pas étrangère. Plusieurs décisions avaient déjà été prises pour limiter l’extraction (de 20,1 Gm3 par an contre 21,6 Gm3 auparavant) mais le ministre veut aller plus loin, jusqu’à arrêter totalement l’extraction. Une décision difficile à mettre en œuvre et un avenir gazier qui s’annonce compliqué aux Pays-Bas, alors que le pays avait extrait en 2013 près de 54 Gm3.
LA CHINE EST FRIANDE DE GAZ La consommation de gaz de la Chine devrait bondir de 10 % en 2018 par rapport à 2017 pour atteindre 258,7 milliards de mètres cubes, selon les estimations de China National Petroleum Corp (CNPC) rapportées par Reuters le 16 janvier. La CNPC prévoit également dans ses prévisions annuelles publiées par l’institut de recherche du géant pétrolier d’État que les importations totales de gaz naturel chinois augmenteront de 13,4 % par rapport aux volumes de 2017, pour s’élever à 105 milliards de mètres cubes cette année.
UN VOLUME D’APPROVISIONNEMENT RECORD POUR TOTAL Total et CMA CGM ont signé, le 4 décembre, un accord portant sur la fourniture annuelle d’environ 300 000 tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL) sur dix ans à partir de 2020. Ce volume, sans précédent dans l’histoire du GNL soute, couvrira l’approvisionnement de neuf futurs porte-conteneurs de CMA CGM dont la livraison est également prévue à partir de 2020. CMA CGM, premier transporteur maritime au monde à doter de la motorisation GNL ses porte-conteneurs géants (d’une capacité de 22 000 EVP ou « équivalent vingt pieds »), a ainsi retenu Total Marine Fuels Global Solutions, entité de Total en charge de la commercialisation des soutes au niveau mondial, pour ses futures opérations d’avitaillement. CMA CGM et Total s’étaient déjà engagés en février 2017 dans un accord de coopération pour étudier les solutions énergétiques les plus respectueuses de l’environnement dans le cadre des échéances réglementaires de 2020 fixées par l’Organisation maritime internationale.
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
SOMMET
L’« Opep du gaz » se cherche encore Le 4e sommet des chefs d’État et de gouvernement du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) s’est tenu le 24 novembre dernier à Santa Cruz de la Sierra, en Bolivie. Fondé en 2001 à Téhéran, le FPEG est une organisation intergouvernementale visant à défendre les intérêts nationaux des principaux pays exportateurs de gaz naturel. Une organisation qui peine à s’imposer sur la scène internationale bien que comptant dans ses rangs les principaux producteurs de gaz de la planète. Explications.
À
l’issue du sommet qui les rassemblait en novembre – et auquel participaient entre autres des représentants du russe Gazprom, de l’espagnol Repsol, du français Total, du britannique Shell et de l’argentin YP -, les pays exportateurs de gaz naturel ont demandé une « approche plus équitable » lors de la fixation des prix du gaz naturel, prenant en compte ses avantages en termes d’efficacité énergétique et de primes environnementales. Un sommet dominé par un contexte international compliqué alors que les tensions entre les pays membres sont importantes, notamment la crise diplomatique opposant le Qatar, principal exportateur de GNL, et les autres pays arabes. Mais aussi dans un contexte économique où la surabondance de l’offre - principalement américaine - pèse sur les prix du gaz. « Les exportateurs de gaz peuvent toujours compter sur une hausse de la demande mondiale de gaz » a déclaré en ouverture du sommet le secrétaire général du FPEG, l’Iranien Mohammad Hossein Adeli, affirmant que le marché du gaz était « sur le point de devenir concurrentiel » et reprenant à son compte un rapport sur les perspectives d’ici à 2040 de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) qui indiquait que la demande de gaz devrait croître de près de 34 MBEP1 par jour, passant de 59,2 MBEP par jour en 2015 à environ 93,2 MBEP par jour en 2040, soit un taux de croissance annuel moyen d’environ 1,8 %. Un contexte international chahuté Une déclaration résolument positive lorsque l’on sait que les douze pays membres de cette organisation doivent notamment faire face à une rude concurrence du gaz en provenance des États-Unis, pays qui selon les estimations de l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) pourrait devenir d’ici 2020 le troisième exportateur mondial de gaz naturel liquéfié (GNL) après le Qatar et l’Australie. Sans compter que dans son dernier World Energy Outlook, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a indiqué que le pays produira en 2022 plus d’un cinquième du gaz mondial, ce qui le placera alors au même niveau que la Russie et la Norvège, principaux exportateurs de gaz. Si les regards sont actuellement braqués sur les États-Unis, d’autres pays membres du FPEG pourraient venir bousculer l’ordre établi sur le marché mondial et faire pression sur les prix.
Les immenses ressources de l’Égypte pourraient donner des idées à l’Europe pour sécuriser son approvisionnement - c’est du moins le souhait du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. Et que dire du « petit émirat gazier » du Qatar qui, en pleine crise diplomatique avec ses voisins, a annoncé qu’il souhaitait augmenter de 30 % sa capacité de production de gaz… Des intérêts bien trop divergents...… Bref, si les membres du forum - qui représentent à eux seuls plus de 70 % des réserves gazières mondiales, 40 % de la production mondiale et 60 % des exportateurs de GNL - ont réaffirmé durant ce sommet leur rôle de producteurs fiables pour répondre aux besoins énergétiques de la planète, leur difficulté à parler d’une seule voix s’est clairement faite entendre. Et cela malgré la verve du président bolivien Evo Morales qui a appelé à « combattre ceux qui veulent s’approprier nos ressources à travers la manipulation abusive des prix » qui constitue selon lui « un outil de déstabilisation de nos États et de nos gouvernements démocratiquement élus ». Un discours somme toute très compréhensible lorsque l’on sait que le gaz, principal produit d’exportation de la Bolivie, rapporte au pays chaque année près de 4 milliards de dollars. .… .. pour aboutir à une position commune Qualifié souvent à tort d’« Opep du gaz », ses membres ne souhaitant ni imposer de quotas sur la production et la vente de gaz, ni imposer des règles sur le marché gazier, la FPEG a bien du mal à exister dans la pratique. Si elle a lancé un groupe de travail chargé de réfléchir à l’élaboration de nouvelles stratégies globales sur le développement à long terme du marché mondial du gaz, notamment par la révision des indicateurs de référence relatifs à la détermination des prix du gaz naturel, l’organisation est surtout composée de pays aux intérêts divergents. En effet, ses membres ont bien des difficultés à élaborer une stratégie commune permettant de faire remonter les prix du gaz ou encore de mettre en place une méthode pour déterminer les prix de vente du gaz dans les contrats gaziers leur garantissant de fait une plus grande stabilité face aux fluctuations du marché. L.I. 1
Millions de barils équivalent pétrole.
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
MARCHÉ DU GNL
La nouvelle donne Engie et Total ont signé un accord portant sur un projet d’acquisition du portefeuille d’actifs amont de gaz naturel liquéfié (GNL) d’Engie pour une valeur d’entreprise de 1,49 milliard de dollars.
énergéticiens français qui tous deux y trouvent leur compte. Engie a affiché clairement sa volonté de se concentrer sur des activités régulées et contractées tandis que Total estime que la volatilité des prix est depuis toujours son cœur de métier.
© TOTAL
Méthanier brise-glace Christophe de Margerie.
L
e groupe Engie a reçu une offre ferme et irrévocable de Total pour la vente de ses activités amont GNL, pour une valeur totale de 2,04 milliards de dollars, incluant un complément de prix pouvant aller jusqu’à 550 millions de dollars, qui sera versé par Total en cas d’amélioration des marchés pétroliers dans les prochaines années. Ce portefeuille comprend des participations dans des usines de liquéfaction et notamment la participation dans le projet Cameron LNG aux États-Unis, des contrats d’achat et de vente à long terme de GNL, une flotte de méthaniers ainsi que des droits de passage dans des terminaux de regazéification en Europe. « L’acquisition du business amont GNL d’Engie donne l’opportunité à Total d’accélérer le déploiement de sa stratégie intégrée sur la chaine gazière, sur un marché du GNL offrant une forte croissance de l’ordre de 5 à 6 % par an. La combinaison des deux portefeuilles est très complémentaire et va permettre au groupe de gérer un volume de GNL de près de 40 millions de tonnes (MT) dès 2020, faisant de Total le deuxième acteur mondial du secteur parmi les majors avec 10 % du marché mondial » a déclaré à l’occasion de cet accord Patrick Pouyanné, président directeur général de Total. Un accord gagnant-gagnant Du côté d’Engie, comme de chez Total d’ailleurs, même son de cloche : cet accord était idéal pour les deux plus grands
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Un portefeuille conséquent pour Total Avec cet accord, Total va récupérer une capacité de liquéfaction de 2,5 MT, venant renforcer sa capacité globale qui devrait atteindre les 23 MT par an en 2020, à travers une participation de 16,6 % dans l’usine de liquéfaction de Cameron LNG, dont trois trains de 4,5 MT par an sont actuellement en cours de construction en Louisiane, avec un potentiel d’expansion de deux trains supplémentaires. Pour le groupe français, déjà propriétaire de plusieurs gisements aux États-Unis, cette part supplémentaire va lui permettre de produire du gaz sur le sol américain. À noter également une participation de 5 % dans le premier train d’Idku GNL en Égypte. Il récupère aussi un portefeuille de contrats d’achat à long terme de GNL et de vente permettant de porter le portefeuille global du groupe à 28 MT par an en 2020 avec un approvisionnement diversifié entre Algérie, Nigéria, Norvège, Russie, Qatar et États-Unis et des débouchés équilibrés entre Europe et Asie, mais aussi un accès à des capacités de regazéification de 14 MT par an en Europe, qui, combinées aux 4 MT par an détenues par Total, doivent permettre au groupe d’équilibrer le portefeuille consolidé d’achat et de vente. Enfin l’accord prévoit la cession d’une flotte de dix méthaniers qui viendront s’ajouter aux trois déjà détenus par le groupe. Interrogé par Gaz d’aujourd’hui, Total précise que « la consolidation de [sa] flotte va [lui] permettre de gagner en autonomie et en flexibilité, avec la possibilité de rediriger les méthaniers à [leur] gré sur le marché ». Si l’accord prévoit également qu’Engie devienne le fournisseur prioritaire de Total pour le biogaz et l’hydrogène renouvelable, il semblerait que pour le moment aucun projet concret ne soit à l’ordre du jour. L.I.
ÉCONOMIE ET FOURNITURE
3 questions
à Pierre Chareyre © ENGIE / MINO / MEYSSONNIER ANTOINE
Pierre Chareyre travaille chez Engie où il est le directeur général adjoint en charge des business units « Global Energy Management, GNL, Exploration & Production » international et Amérique latine, et le président du comité des risques commodités (CRME). Pour Gaz d’aujourd’hui, il explique le choix d’Engie.
Engie a conclu le 8 novembre un accord de cession de son portefeuille amont GNL au groupe Total. Pourquoi avoir fait ce choix ? Est-ce une stratégie de transformation d’Engie ? Un choix motivé par un marché européen du gaz abondant ? Notre choix s’explique par la profonde mutation du marché mondial du GNL et par notre décision stratégique de nous recentrer sur des activités régulées ou contractées. Le marché du gaz gazeux aussi est de plus en plus « liquide », particulièrement en Europe où les pipelines se sont considérablement développées. La production de GNL au niveau mondial a augmenté de 60 % en cinq ans. L’arrivée de nouveaux producteurs comme le Qatar ou comme les ÉtatsUnis devrait créer une abondance sur le marché mondial à l’horizon des années 2020-2022. Pour nous, les enjeux ont clairement changé et notamment en termes de compétitivité. Avec cette vente nous avons fait le choix de nous concentrer sur le secteur aval, sur des activités régulées et contractées mais aussi sur les ventes aux clients finaux. Des activités qui nous permettent de rester un acteur gazier majeur à travers nos infrastructures de transport et de distribution et dans la fourniture de gaz à nos clients. De plus, et c’est une évolution logique, le marché amont du GNL devient de plus en plus la chasse gardée des producteurs pétroliers : ce sont eux qui investissent dans les explorations qui produisent du gaz et qui investissent du gaz dans les usines de liquéfaction pour produire du GNL. Pour Total cela correspond à une étape dans la chaîne de valeur qu’ils estiment nécessaire. Si ce secteur ne fait plus partie de nos priorités d’investissement, je le répète, cela ne remet pas en cause notre position très forte dans le secteur gazier. Vous avez choisi de conserver la partie aval de vos activités de GNL. En quoi sont-elles plus stratégiques pour vous que celles de l’amont ? Notre stratégie est d’aller vers l’aval, vers des activités qui permettent de servir au mieux nos clients, au plus près de leurs besoins, et de nous concentrer sur des activités régulées ou contractées. Nous avons choisi de concentrer toute notre compétence sur ce maillon de la chaîne. De manière concrète, Engie commence à intervenir au moment où le GNL entre sur le territoire, se charge de sa regazéifica-
tion et de le vendre comme énergie, à travers notre filiale LNGénération qui fournit des solutions d’approvisionnement à nos clients. Nous conservons l’ensemble de nos activités régulées et/ou contractées comme nos terminaux de regazéification en France, gérés par Elengy, mais aussi nos participations dans des terminaux à l’étranger [au Chili, à Porto Rico et aux États-Unis, NDLR]. Nous conservons également nos activités de soutage de bateaux. Signe de notre concentration sur l’aval, la vente de nos activités amont à Total s’accompagne de la constitution d’une alliance visant à développer l’usage du gaz vert dans la mobilité et faisant d’Engie le fournisseur prioritaire en biométhane, biogaz et hydrogène vert de Total.
« Engie reste un acteur gazier majeur à travers nos infrastructures de transports et de distribution et dans la fourniture de gaz à nos clients. » Dans certains pays comme l’Algérie, l’activité est essentiellement tournée autour du GNL. Estce que d’autres partenariats commerciaux sont imaginés ? Engie est toujours partie prenante dans le gisement de gaz de Touat, dont la première production est d’ailleurs attendue dans le courant de cette année. C’est de loin le projet le plus important qui lie Engie et la Sonatrach en Algérie. Nous allons également continuer à acheter du gaz gazeux livré par pipeline [contrat de long terme, NDLR]. En Algérie, nous sommes également présents dans les services à l’énergie et en discussion sur des projets d’énergie renouvelable. Propos recueillis par Laura Icart
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ÉCONOMIE ET FOURNITURE
PERSPECTIVES
Le bel avenir du gaz selon l’AIE L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié le 14 novembre son traditionnel World Energy Outlook (WEO). Dans un monde énergétique en profonde mutation, l’AIE indique que le gaz naturel deviendra « plus important que jamais dans le mix énergétique mondial ». Une affirmation qui n’a pas été sans réjouir la communauté gazière mondiale. Analyse.
«
Le WEO de cette année est extrêmement positif pour l’industrie du gaz naturel, soulignant le rôle absolument essentiel que nous devons jouer dans le mélange énergétique mondial en fournissant un carburant abordable, polyvalent et durable », a déclaré David Carroll, président de l’Union international du gaz (UIG), quelques heures après la publication du WEO 2017. Il faut dire que cette année, l’AIE a mis en avant dans son étude « la forte dimension environnementale » du gaz naturel et a loué « les multiples rôles du gaz naturel dans le système énergétique », même si elle tempère ses propos en expliquant que l’utilisation du gaz naturel en tant qu’outil de décarbonation dépend d’une « action crédible » de l’industrie gazière pour lutter contre les fuites de méthane dans le système. Une place de choix pour le gaz naturel ? Selon l’AIE, la consommation mondiale de gaz devrait croître à un taux moyen de 1,6 % par an jusqu’en 2040 - une projection de croissance bien plus élevée que le pétrole ou le charbon – et devrait représenter le quart de la demande énergétique mondiale. L’AIE souligne que les aspects environnementaux du gaz naturel et notamment sous sa forme carburant - qui libère 40 % de CO2 en moins que la combustion du charbon et 20 % de moins que la combustion du pétrole - sont un atout significatif et peuvent jouer un rôle important dans l’amélioration de la qualité de l’air urbain et la réduction de la pollution atmosphérique. Un atout de taille lorsque l’on sait que près de 9 millions de personnes décèdent dans le monde à cause de la pollution de l’air (directement ou indirectement), soit un sixième des morts dans le monde. Dans certaines villes comme New Delhi, les taux de particules sont quarante fois supérieurs aux recommandations de l’OMS. Si l’industrie gazière a pris conscience de la nécessité d’atténuer les émissions de méthane en menant ces derniers mois des actions pour les mesurer et tenter de les réduire, l’AIE insiste sur la nécessité d’aller plus loin sur cette question et d’apporter des réponses concrètes. Un scénario de référence profondément modifié Entre décarbonation et hausse de la demande énergétique, le scénario de référence de l’AIE connait de profonds bouleversements. Pour les comprendre, plusieurs
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changements importants sont à retenir. En premier lieu, les émissions mondiales de carbone liées à l’énergie augmenteront de 5 % d’ici 2040. La hausse est principalement attribuable à l’utilisation du pétrole et à une augmentation de 20 % des émissions industrielles susceptibles de compenser la baisse des émissions du secteur de l’électricité. Cette hausse, même si elle représente une économie de 600 millions de tonnes (d’ici à 2040) par rapport aux prévisions de l’AIE dans le WEO 2016, nous rappelle que la bataille pour décarbonner le secteur de l’énergie est loin d’être gagnée ! D’ici 2040, la demande énergétique mondiale sera supérieure de 30 % à ce qu’elle est aujourd’hui selon l’analyse de l’AIE, qui reconnait que sans une amélioration de l’efficacité énergétique l’augmentation serait deux fois plus élevée. Les énergies renouvelables et le gaz naturel devraient être les sources de production les plus populaires pour combler l’écart de demande, ce qui équivaut à ajouter une autre Chine et une autre Inde à la demande énergétique actuelle, selon l’AIE. Enfin, l’agence souligne également que les « années fastes » du charbon sont à présent terminées. Au cours des vingt-trois prochaines années, l’AIE prévoit que seulement 400 GW de nouvelles capacités au charbon seront ajoutées dans le monde – à comparer aux 900 GW de ces dix-sept dernières années. La Chine se verdit La Chine devrait être la cheville ouvrière de la transition énergétique mondiale autour de laquelle les marchés évoluent, déclare l’AIE dans son rapport. L’utilisation du charbon dans le pays devrait baisser de 15 % jusqu’en 2040, tandis que la demande de gaz naturel augmentera et jusqu’à un tiers des nouvelles énergies éoliennes et solaires du monde trouveront une place en Chine. La politique énergétique chinoise s’est carrément déplacé du charbon vers les énergies renouvelables, le gaz naturel et les technologies du « réseau intelligent » (smart grids). Les règles d’efficacité énergétique ont contribué à ralentir la croissance de la demande dans le pays au cours des dernières années et continueront de mordre dans la demande d’énergie, qui ne devrait augmenter que de 1 % par an d’ici 2040. « L’accent mis sur les technologies d’énergie propre, en grande partie pour remédier à la
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mauvaise qualité de l’air, propulse la Chine au rang de leader mondial des technologies éoliennes, solaires, nucléaires et électriques et est à l’origine de plus d’un quart de la croissance consommation de gaz », prédit l’AIE. Autrefois mauvais élève du climat, l’influence grandissante de la Chine pourrait, si elle s’engageait dans des politiques de décarbonisation encore plus importantes, être l’une des clés de l’accélération de la transition énergétique mondiale. Les États-Unis, maître des schistes Avec leur révolution des schistes, les États-Unis ont bouleversé et vont continuer à bouleverser durablement l’équilibre des forces sur le marché mondial de l’énergie. L’AIE souligne que la production nord-américaine d’hydrocarbures progresse à un rythme inédit, « supérieur de 50 % à celui jamais atteint par aucun autre pays ». Les États-Unis devraient devenir le premier exportateur mondial de gaz naturel GNL d’ici le milieu des années 2020 et un exportateur net de pétrole d’ici la fin de la prochaine décennie (2030). L’extraction de pétrole de schiste devrait ainsi augmenter de 8 Mb/j entre 2010 et 2025. Dans le gaz, ce sont 630 Gm3 supplémentaires qui seront ajoutés en 2023, par rapport à 2008. Une situation américaine qui contraste de manière frappante avec les ambitions vertes de la Chine, dans un pays où le boom du pétrole et du gaz entraînera des investissements majeurs dans la pétrochimie et d’autres industries énergivores. Et pour la première fois un scénario développement durable Malgré des modifications structurelles de premier plan, l’effort consenti par les pays ne permet pas en l’état de répondre aux objectifs fixés par l’ONU pour lutter contre le changement climatique, améliorer la qualité de l’air et de manière plus globale universaliser l’accès à l’énergie. C’est une des raisons qui poussent cette année l’AIE à nous proposer un scénario dit « de développement durable », un scénario collectif pour permettre de rester sous le seuil des 2 °C de réchauffement. Dans ce scénario, les sources à faible émission de carbone doublent leur part dans le mix énergétique à 40 % d’ici à 2040, tandis que les économies mondiales tendent à une amélioration maximale de l’efficacité énergétique avec plus de véhicules électriques et plus de photovoltaïque. Ce scénario implique également un recours plus massif au gaz avec une augmentation de 580 billion cubic meters de la demande, si bien que le gaz pourrait représenter près de 20 % de la consommation énergétique mondiale à l’horizon 2030. L’AIE précise que si toutes les mesures de son scénario étaient mises en œuvre, cela aurait « le même impact sur la réduction de la hausse moyenne des températures de surface en 2100 que la fermeture de toutes les centrales électriques au charbon en Chine ». C’est dire si le défi est important ! L.I.
1,6 %
Taux de croissance de la consommation de gaz naturel jusqu’en
2040.
20 % de gaz dans la consommation énergétique mondiale d’ici
2030.
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BRÈVES UTILISATIONS ET MARCHÉS
UTILISATIONS ET MARCHÉS
L’AFGNV DÉGAINE UN PLAN AMBITIEUX ! Suite aux assises nationales de la mobilité, l’Association française du GNV (AFGNV) propose un plan national de développement du GNV et bioGNV dans le secteur des transports routiers de marchandises et de personnes. Ce plan prévoit de porter à 30 % la part du gaz dans le parc des véhicules lourds à l’horizon 2030. L’AFGNV propose deux scénarios, avec des objectifs à 2022 et à 2030. L’association vise entre 39 000 et 55 000 véhicules lourds (camions, autocars, bus et bennes à ordures) en 2022 et entre 150 000 et 220 000 en 2030. Le parc des utilitaires au gaz pourrait passer à 25 000 ou 50 000 véhicules en 2022 et à 110 000 ou 250 000 en 2030. Quel que soit le scénario, la part du bioGNV passera à 20 % en 2022 et 40 % en 2030.
UNE PREMIÈRE MONDIALE EN ESPAGNE En Espagne, les tests du premier train de transport de passagers alimenté au GNL en Europe viennent d’être lancés par l’opérateur ferroviaire Renfe et Gas Natural Fenosa. Réalisés sur la ligne MieresFigaredo, ces tests grandeur nature doivent permettre d’évaluer les avantages environnementaux et économiques du gaz naturel pour équiper les lignes non électrifiées. À ce jour, les locomotives représentent plus de 30 % de la flotte nationale de Renfe. Pour les différentes parties prenantes du projet, il s’agit également d’étudier la faisabilité de la conversion des trains existants au GNL en analysant les implications techniques, juridiques et économiques d’un tel changement.
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LE GNV MIS À L’HONNEUR PAR LA MINISTRE DES TRANSPORTS Le 11 janvier, Iveco France a reçu Élisabeth Borne, la ministre des Transports, sur le site industriel Fiat Power Train de Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire) où sont fabriqués les moteurs gaz du groupe pour l’Europe. À cette occasion, la ministre a souhaité réunir les acteurs de la filière du GNV et du bioGNV en France pour faire le point. « Le GNV permet de fortes réductions d’émissions de particules fines et de NOx mais il ne permettra pas, sans biogaz, d’atteindre nos objectifs climatiques. Il est nécessaire d’aller plus loin, plus vite, pour développer la production du biogaz. Je crois beaucoup à la filière GNV et j’ai la certitude qu’ensemble, nous réussirons à atteindre nos objectifs de mobilité propre » a déclaré Élizabeth Borne à l’issue de la réunion.
UN FINANCEMENT VERT POUR LE GNL MARIN La Banque européenne d’investissement (BEI), Société générale et Brittany Ferries ont signé le 11 décembre avec succès le premier financement vert dans le secteur du transport maritime, dans le cadre du programme « Green Shipping Guarantee » (GSG). Le financement de 750 millions d’euros de la BEI a été mis en place l’année dernière, avec la Société générale. Le nouveau navire Honfleur sera le premier ferry alimenté au gaz naturel liquéfié (GNL) par Brittany Ferries. Sa mise en service est prévue pour avril 2019, sur les lignes reliant Caen-Ouistreham (France) à Portsmouth (RoyaumeUni).
UTILISATIONS ET MARCHÉS
LÉGISLATION
L’UE met le paquet Le 8 novembre dernier, la Commission européenne a annoncé, en marge de la COP23 à Bonn, ses nouveaux objectifs dans le secteur de la mobilité propre afin d’accélérer la transition vers des véhicules à faibles ou très faibles émissions. Décryptage.
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a Commission européenne a présenté le 8 novembre son paquet en faveur de la mobilité propre. Il s’agit de sa deuxième série de mesures dédiées à la mobilité cette année après celle de « l’Europe en mouvement » présentée en mai. Une troisième série est d’ores et déjà attendue au deuxième trimestre 2018. « La Commission prend des mesures sans précédent pour répondre à un défi toujours croissant : concilier les besoins de mobilité des Européens et la protection de leur santé et de la planète, promouvoir des véhicules plus propres, rendre l’énergie alternative plus accessible et améliorer l’organisation de notre système de transport, ce qui permettra à l’Europe et aux Européens de se déplacer plus facilement » a déclaré à l’issue de la réunion Violeta Bulc, commissaire européenne chargée des transports. Ce nouveau paquet comprend plusieurs propositions législatives et non législatives devant permettre la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans le secteur du transport routier. La mesure phare de ce dispositif est la définition de nouveaux seuils d’émissions de CO2 pour les voitures et utilitaires légers neufs entre 2021 et 2030. Réduire les émissions de CO2 des véhicules : un sacerdoce ! L’ensemble de la flotte européenne de voitures particulières et véhicules utilitaires légers devra désormais répondre à un objectif de réduction des émissions de CO2 de 15 % d’ici 2025 et de 30 % d’ici 2030 par rapport à 2021. Pour maintenir les parts de marché et accélérer la transition vers des véhicules à faibles émissions, la Commission a proposé cette première mesure législative. La Commission prévoit de garantir des conditions de concurrence équitables entre les acteurs du secteur qui exercent leurs activités en Europe et de faire en sorte que les voitures les plus propres et plus concurrentielles soient produites en Europe. Pour cela, elle tient à établir des règles « réalistes et applicables » dans un domaine responsable de près de 25 % des émissions de CO2. Ce deuxième paquet comprend également trois autres mesures législatives : une proposition de révision de la directive de 2009 sur les véhicules de transport routier propres et économes en énergie pour ouvrir les marchés publics aux solutions de mobilité propre et stimuler la demande. Mais aussi une proposition de révision de la directive de 1992
sur le transport combiné de marchandises dont l’objectif sera d’encourager la multi-modalité des transports de marchandises. Enfin, la révision du règlement sur les services de transport de passagers par autocars est la dernière mesure de nouveau paquet. Elle doit permettre d’encourager le développement de liaisons par autocars sur de longues distances pour offrir des solutions alternatives à l’utilisation des voitures particulières et ainsi à contribuer à réduire les émissions générées par les transports et la congestion des routes. Soutenir le déploiement des carburants alternatifs Le paquet mobilité propre inclut un plan d’action et des solutions d’investissement pour encourager une infrastructure de carburants alternatifs (électricité, gaz naturel et hydrogène) à travers l’UE, notamment grâce à de nouvelles sources de financement, afin de combler les lacunes sur le réseau de transport européen, s’agissant entre autres des points de ravitaillement en GNL dans les ports ou les infrastructures en faveur des carburants alternatifs dans les zones urbaines jugés par ailleurs « insuffisants ». La Commission souhaite relever le niveau des plans nationaux de carburants alternatifs dans chaque État membre. Pour ce faire, de nouveaux montages financiers seraient prévus, avec un budget estimé à 800 millions d’euros combinant subventions, prêts et instruments financiers, dans le cadre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe. Si l’ensemble de ces propositions doit encore être négocié par les États membres et le Parlement européen avant une adoption définitive, la Commission juge d’ores et déjà ce deuxième paquet comme « un pas décisif » dans la mise en œuvre des engagements pris par l’UE dans le cadre de l’accord de Paris, dont celui de réduire d’au moins 40 % les émissions de CO2 en Europe d’ici à 2030. L.I.
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UTILISATIONS ET MARCHÉS
INNOVATION
Audi l’audacieuse L’Allemagne a toujours été pionnière dans le développement du biométhane et la méthanisation. C’est donc tout sauf une surprise qu’Audi - et à travers elle le puissant groupe Volkswagen - se soit lancé il y a huit ans dans la mobilité gaz. Retour sur le parcours d’une marque qui produit, construit, commercialise et alimente ses voitures au GNV. Immersion.
À
l’heure de la transition énergétique et alors que Bruxelles a des exigences de plus en plus strictes en termes d’émissions de carbone, Audi s’est déjà engagée sur la voie de la « décarbonation ». Une initiative innovante mais surtout nécessaire pour Hermann Pengg, directeur du département des carburants renouvelables et analyse du cycle de vie chez Audi, qui pointe du doigt « la responsabilité qu’ont tous les constructeurs automobiles à trouver une solution pour décarboner le secteur des transports ». Décarboner le secteur des transports Le secteur des transports draine 25 % des gaz à effet de serre, dont 70 % sont directement imputables au transport routier. Et c’est de plus l’un des rares secteurs en Europe où les émissions de CO2 augmentent (+ 16 % entre 1990 et 2015). Son impact est donc considérable, sur la qualité de l’air notamment. Les industriels sont aujourd’hui dans une obligation de fournir aux clients des voitures performantes, capables de répondre aux enjeux écologiques mais aussi d’assurer une viabilité économique à une filière très loin d’être compétitive sur les segments des voitures particulières. Dans cette course que se font les constructeurs automobiles pour réduire les émissions de CO2 des véhicules particuliers, Volkswagen semble avoir déjà une longueur d’avance. En effet, le groupe allemand dispose déjà d’une gamme d’une dizaine de modèles au GNV répartis sur les différentes marques de son groupe. Si les moteurs gaz consomment 25 % de moins que les moteurs à essence, cela reste insuffisant, notamment pour les grosses cylindrées, pour descendre sous les 130 g/km, seuil au-dessus duquel chaque constructeur se verra imposer une amende de 475 euros par tonne de CO2 - un seuil qui va descendre à 95 g de CO2/km en 2021.
© GRTGAZ
Une idée pionnière et innovante Le groupe Audi expérimente une stratégie née il y a près de huit ans dans la tête de Reinhard Otten, expert stratégie transition énergétique chez Audi : son idée est alors de créer un site de power to gas capable entre autres choses de compenser les émissions de carbone de véhicules roulant au GNV. Si à l’époque la technologie était loin d’être mature, elle permet à Audi de présenter depuis 2013 la première
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UTILISATIONS ET MARCHÉS
unité industrielle de méthanation du nord de l’Allemagne, qui convertit l’électricité renouvelable en gaz renouvelable et qui est capable de produire 1 000 tonnes par an de méthane de synthèse destinées à alimenter les voitures de la marque. Comme aiment à le répéter Hermann Pengg et Reinhard Otten, Audi a misé sur trois technologies d’avenir : le biométhane, le power to gas et la mobilité gaz. Un pari risqué à l’époque mais qui s’avère plus que réussi aujourd’hui et qui suscite l’intérêt de nombreux énergéticiens, comme le gestionnaire de transport français GRTgaz. Avec ce projet novateur, Audi est le premier constructeur automobile dans le monde à avoir intégralement créé sa chaîne d’énergie durable. Un site unique en Europe Depuis 2013, Audi obtient un méthane de synthèse baptisé « e-gas » à partir de ses propres installations de conversion d’électricité en gaz situées à Werlte en Basse-Saxe, dans le nord de l’Allemagne. Une installation qui ne doit absolument rien au hasard, puisqu’Audi s’est installée à proximité de l’un des plus grands parcs d’éoliennes d’Allemagne et au cœur d’un important site de production de biogaz (issu de déchets agricoles) produisant l’équivalent de 40 à 44 gigawattheures d’énergie par an. Si la totalité du biométhane produit est directement réinjecté dans le réseau, le surplus de CO2 est quant à lui capté pour alimenter l’usine power to gas d’Audi. Comment est produit l’e-gas d’Audi ? Le site d’Audi produit son e-gas en deux étapes : celle de l’électrolyse d’abord puis celle de la méthanisation. Dans un premier temps, le site utilise de l’électricité générée de façon renouvelable pour décomposer l’eau en oxygène et en hydrogène. À moyen terme, ce dernier pourra également servir de carburant pour les véhicules à pile à combustible. Seconde étape, l’hydrogène est mélangé avec le CO2 issu du flux d’échappement de l’usine dans un réacteur de méthanation pour produire par catalyse du méthane synthétique appelé aussi l’Audi e-gas. Une empreinte carbone plus faible que l’électrique Chez Audi, les voitures au gaz naturel sont baptisées « g-tron ». Le premier modèle, l’A3 Sportback g-tron, a été lancé en 2014. Elle consomme 3,3 kg de GNV au 100 km et émet 89 g de CO2/km en mode GNV, ou 128 g/km en mode essence. L’autonomie au gaz dans des conditions de circulation standard sur les routes européennes est de plus de 400 km. Le réservoir de carburant de 50 litres permet de parcourir 900 kilomètres supplémentaires. Grâce à la production de près de 1 000 tonnes d’e-gas par an, Audi pourrait absorber jusqu’à 2 800 tonnes de CO2. Selon le constructeur, cette quantité permet « à environ 1 500 modèles d’Audi g-tron de parcourir 15 000 km tous les ans, en n’émettant pratiquement aucun CO2 ». Audi offre ce carburant pendant trois ans comme équipement standard aux clients qui commandent un modèle g-tron avant le 31 mai 2018. Les clients peuvent
© LAURA ICART
Unité de méthanisation du site d’Audi. faire le plein de leur modèle g-tron à n’importe quelle station de GNV au tarif habituel. En injectant le volume d’Audi e-gas consommé selon des conditions de circulation normales en Europe dans le réseau de gaz naturel européen, Audi garantit les avantages écologiques du programme, dont la réduction d’émissions de CO2 correspondante. Compenser les émissions des Audi g-tron Le premier modèle à gaz d’Audi, l’A3 Sportback g-tron, été lancé en 2014. Il consomme 3,3 kg de GNV au 100 km et émet 89 g de CO2/km en mode GNV, ou 128 g/km en mode essence. L’autonomie est de 400 km en mode GNV avec 900 km supplémentaires grâce au réservoir d’essence de 50 litres. Depuis l’été 2017, Audi a ouvert ses commandes, sur le marché allemand, pour ces nouveaux modèles, l’A4 g-tron et A5 g-tron. Sur le plan de l’autonomie, les deux modèles peuvent parcourir jusqu’à 950 km, dont 500 km avec leur seul réservoir GNC. En termes de performances, les deux modèles sont assez similaires avec une consommation moyenne située entre 3,8 et 4,4 kg/100 km pour l’A4 g-tron et 3,8 – 4,2 kg pour l’A5 g-tron. Idem du côté des émissions de CO2 avec une moyenne de 102 g/km. En constante augmentation, avec plus de 100 000 voitures GNV en Allemagne, près d’1 million en Italie, Audi espère que ses ventes vont décoller. Si le marché français, pour les véhicules particuliers, est jugé intéressant par les constructeurs allemands, il ne semble toutefois pas suffisamment porteur pour la commercialisation des Audi g-tron. Une combinaison plus que réussie pour Audi qui a choisi d’adapter l’expression « du champ à l’assiette » à « du champ à la voiture ». Elle qui exploite un site modèle d’une économie circulaire si précieuse à la réussite de la transition énergétique sur nos territoires. Laura Icart
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BRÈVES INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
CARNET Jean-Bernard Lévy, présidentdirecteur général du groupe EDF, a été élu président du Conseil français de l’énergie, comité français du Conseil mondial de l’énergie (World Energy Council), lors de la réunion du conseil d’administration du 4 janvier 2018. Il succède à Olivier Appert, ancien président d’IFP Énergies nouvelles, qui avait été élu en 2010. Clara Poletti est nommée vice-présidente du conseil des régulateurs de l’Agence pour la coopération des régulateurs de l’énergie de l’Union européenne (Acer) pour une durée renouvelable de deux ans et six mois. Bertrand de Singly, délégué stratégie de GRDF, a été nommé président du comité stratégique gaz de l’Association française de normalisation (Afnor) pour un mandat de trois ans à échéance au 31 décembre 2020. Il succède à Dominique Kaczmarek d’Engie. Julien Tognola a été nommé membre du conseil d’administration de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), en qualité de représentant du ministre de l’Industrie. Il remplace Benjamin Gallezot. Julien Tognola travaille désormais pour la direction générale des entreprises (DGE) du ministère de l’Industrie.
L’ACCÈS AU STOCKAGE RÉFORMÉ Le projet de loi relatif aux hydrocarbures adopté le 19 décembre 2017 précise le contenu de la réforme de l’accès au stockage de gaz. La commercialisation des capacités de stockage aura lieu via un système d’enchères. En cas d’insuffisance de souscription au regard des impératifs de la sécurité d’approvisionnement, le ministre de l’Énergie pourra imposer aux fournisseurs et/ou aux opérateurs de stockage de constituer des stocks complémentaires. Les coûts des opérateurs de stockage seront compensés par le tarif d’utilisation du réseau de transport (ATRT). La mise en œuvre de la réforme, à compter de l’hiver 20182019, fait l’objet d’une consultation publique de la Commission de régulation de l’énergie. Par ailleurs, le 20 décembre 2017, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu une décision préjudicielle au sujet de l’actuel cadre réglementaire du stockage de gaz, qui est contesté devant le conseil d’État. La Cour a considéré que : une législation nationale peut mettre à la charge des fournisseurs de gaz des obligations supplémentaires de stockage pour des clients qui ne sont pas inclus dans la catégorie des « clients protégés » au sens de la réglementation européenne, sous réserve de respecter certaines conditions ; que la législation française permet de tenir compte des autres instruments de modulation, ce qui est conforme au droit de l’UE dès lors qu’une législation nationale ne peut imposer aux fournisseurs de détenir des stocks de gaz suffisants « nécessairement et exclusivement » sur le territoire national.
DE NOUVEAUX OBJECTIFS CONTRAIGNANTS POUR L’UE Le Parlement européen a approuvé, le 17 janvier, une série d’objectifs contraignants à l’horizon 2030, en premier lieu desquels une amélioration de 35 % de l’efficacité énergétique. Le Parlement a globalement suivi les recommandations de la commission Itre qui avait fixé une part à 40 % alors que la Commission européenne, avait préconisé 30 %. Approuvées également : une part de 35 % de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie et une part de 12 % de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans les transports. Les négociations avec le Conseil ont commencé, puisque le Parlement a déjà approuvé son approche générale sur l’efficacité énergétique le 26 juin et sur les énergies renouvelables et la gouvernance de l’Union de l’énergie le 18 décembre.
UN PACTE POUR MONACO Marie-Pierre Gramaglia, conseiller de gouvernement pour l’Équipement, l’environnement et l’urbanisme, a annoncé le 21 janvier la création du pacte national pour la transition énergétique de la Principauté de Monaco. Ce nouvel outil composé d’une charte d’engagement et d’une série de plans d’actions a pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), agir pour la sobriété énergétique de la Principauté et augmenter la production locale d’énergie renouvelable.
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INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
SOMMET INTERNATIONAL
Une nouvelle messe pour le climat Le One Planet Summit, qui s’est tenu le 8 décembre dernier à Paris, deux ans après la COP21, avait pour ambition d’accélérer le déploiement international de l’accord de Paris, notamment sur les aspects économiques et financiers. Le pari est-il réussi ?
«
Nous sommes en train de perdre la bataille pour le climat. » C’est la première phrase prononcée par le président français Emmanuel Macron, devant un parterre de près de 127 chefs d’État et de gouvernement, lors de son One Planet Summit. Particulièrement représentés étaient les présidents africains et ceux des pays insulaires, principales victimes du réchauffement climatique et dont les discours alarmistes ne font que ressentir davantage l’urgence de prendre de mesures à la hauteur des enjeux. « Faire d’une ambition politique, une réalité économique » : c’était bien tout l’enjeu de ce sommet voulu par Emmanuel Macron. Pays, entreprises, investisseurs, organisations philanthropiques et ONG, nombreux ont répondu présents. Tous ont dégainé au cours de cette journée annonces et mesures. Gaz d’aujourd’hui revient sur les principales. Neutralité carbone Trente-trois nouveaux acteurs (régions, entreprises, pays) ont rejoint une coalition sur la neutralité carbone initiée durant la COP23 à Bonn. La France et l’Allemagne font partie des quatorze nouveaux pays de cette coalition. Tous s’engagent à élaborer des stratégies à long terme dès 2018 pour mettre en place une trajectoire neutralité carbone à l’horizon 2050. Un prix pour le carbone La Californie et l’État de Washington, le Chili, la Colombie, le Mexique et le Costa Rica ainsi que plusieurs provinces canadiennes ont lancé une initiative pour développer leurs marchés du carbone, dans une plus grande coordination. La fin des subventions aux énergies fossiles C’est incontestablement l’annonce phare de ce sommet : la Banque mondiale cessera de financer les projets pétroliers et gaziers en amont à partir de 2019, a annoncé son président Jim Yong Kim. Un changement qui vise à aider les pays à respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris. En 2016, ses financements dans le secteur pétrolier et gazier ont représenté environ 1,6 milliard de dollars, soit moins de 5 % des fonds accordés. Jim Yong Kim a également déclaré qu’il publierait davantage de données sur l’impact climatique de ses investissements, notamment dans des secteurs très émetteurs comme celui de l’énergie et qu’il tiendrait également compte d’un prix « interne » du carbone pour ses futurs investissements.
Promouvoir une mobilité propre La mobilité propre est plus que jamais au cœur des préoccupations climatiques. Le trafic routier et maritime est en grande partie responsable de la pollution de l’air qui fait chaque année plusieurs millions de morts dans le monde. Theresa May, Première ministre britannique, a annoncé que le Royaume-Uni organisera un sommet mondial sur les véhicules « zéro émission » à l’automne 2018. Le One Planet Summit a également abordé la question du transport maritime. Trente-cinq États ont appelé le secteur du transport maritime à respecter l’accord de Paris. Les bateaux sont responsables d’environ 3 % des émissions de gaz à effet de serre, soit l’équivalent des émissions d’un pays comme le Japon ou de l’ensemble des pays d’Amérique latine, indiquait une note du Conseil d’analyse économique en février 2017. De nombreuses mesures sont à l’étude concernant ce secteur. Parmi elles, les nouveaux carburants et notamment le GNL carburant qui pourrait être une alternative économique et environnementale plus que crédible face aux nouvelles directives de plus en plus strictes de l’UE et de l’Organisation maritime internationale. 9 milliards d’aides de l’UE pour la durabilité L’Union européenne, par la voix de Maros Šefcovic, vice-président de la Commission européenne et président de l’Union de l’énergie, a annoncé qu’elle facilitera les investissements d’ici 2020 à hauteur de 9 milliards d’euros d’investissements privés sur trois nouveaux domaines jugés prioritaires pour le climat : les énergies propres, les villes durables et l’agriculture durable. La fin du charbon chez Axa L’assureur français Axa a annoncé qu’il refuserait désormais d’assurer les sociétés de sables bitumineux et les entreprises engagées dans la construction de centrales à charbon. Il entérine également son désengagement du charbon en mettant en vente 2,5 milliards d’euros d’investissements dans ce secteur. L.I.
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INSTITUTIONS ET ENVIRONNEMENT
CLIMAT
Un accord a minima pour le marché du carbone Après des mois de négociations et de tractations tous azimuts, les parlementaires européens et les représentants des États ont réussi à trouver un accord trilogue sur la période 2021-2030 du marché européen du carbone (EU-ETS ou SCEQE). Décryptage.
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Le marché du carbone est la colonne vertébrale de la politique climat de l’UE et concerne maintenant 32 pays » a déclaré Jos Delbeke, directeur général à la direction générale « climat » de la Commission européenne, en novembre dernier à Bonn, lors de la COP23 où il a précisé que les Vingt-Huit étaient désormais accompagnés dans cette démarche par la Suisse, le Liechtenstein, la Norvège et l’Islande. Améliorer le fonctionnement du marché Quelques jours après cette déclaration, le 22 novembre, le Conseil (ambassadeurs de l’UE) a approuvé l’accord provisoire intervenu entre la présidence estonienne et le Parlement européen. Le texte a été soumis au mois de décembre au Parlement européen. Initié pour encadrer le système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (ETS) de plus de 11 000 installations du secteur de l’énergie et de l’industrie à forte intensité énergétique durant la prochaine décennie, ce texte, faisant office de réforme, doit permettre de répondre à l’ambition climatique européenne avec l’adoption de nouveaux indicateurs de compétitivité permettant au secteur de réduire leurs émissions de 45 % par rapport à 2005. Vers une réduction du surplus des quotas Fer de lance des négociations et principal objet de l’accord : la réduction annuelle du volume total de crédits carbone mis sur le marché, à l’origine de la dépréciation du prix. Conseil et Parlement se sont mis d’accord sur une réduction annuelle de l’allocation des quotas de 2,2 %, faisant écho à la proposition de la Commission européenne. Actuellement en phase 3, cette allocation baisse de 1,74 % par an. Cette évolution permet une réduction supplémentaire des émissions dans les secteurs couverts par l’ETS de quelque 556 millions de tonnes au cours de la décennie, soit l’équivalent des émissions annuelles du Royaume-Uni, estime la Commission européenne. « Ce qui est important, c’est que les émissions maximales autorisées à l’industrie reculent : on est parti de 2,2 milliards de tonnes de CO2 par an en 2005 et on vise 1,3 milliard de tonnes de CO2 en 2029. C’est ce recul qui est crucial, plus que le prix » précise
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Jos Delbeke. Un facteur de réduction qui fera l’objet d’un réexamen à partir de 2024 et pourrait faire l’objet d’une nouvelle (minime) augmentation. Les principaux éléments de la réforme Outre l’enjeu de réduction des quotas, plusieurs autres points ont été inscrits dans l’accord. Une réserve de stabilité sera créée en 2018 et sera opérationnelle à partir du 1er janvier 2019. Un ajustement des volumes annuels de quotas à mettre aux enchères sera déclenché lorsque le nombre total de quotas en circulation sort des limites d’une certaine fourchette prédéfinie. Les 900 millions de « quotas gelés » seront placés dans la réserve de stabilité du marché (plutôt que d’être mis aux enchères en 2019-2020). Les quotas non attribués seront transférés directement à la réserve de stabilité du marché en 2020. Des garanties supplémentaires pour assurer une protection renforcée à l’industrie européenne seront apportées. Les révisions du SEQE de l’UE et de la réserve de stabilité du marché tiendront compte des aspects liés à la fuite de carbone et à la compétitivité, ainsi que des questions relatives à l’emploi et au PIB. Enfin, plusieurs mécanismes de soutien pour aider l’industrie et les secteurs de l’électricité seront mis en place pour leur permettre de relever les défis d’innovation et d’investissement de la transition vers une économie sobre en carbone. Ce compromis est certes un succès pour la présidence estonienne, car il devrait améliorer le fonctionnement du marché en réduisant le surplus de quotas de CO2. Mais un succès en demi-teinte qui ne devrait pas permettre à l’UE de répondre à ses objectifs climatiques sans la mise en place de politiques additionnelles. L.I.
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FILIÈRE BIOMÉTHANE
Tous les signaux sont au vert ! Le secteur de l’énergie subit une profonde transformation et son avenir tend vers une plus faible teneur en carbone. Dans cette nouvelle configuration et afin d’accélérer la transition énergétique, tous les observateurs s’accordent sur ce constat : le biométhane est appelé à jouer un rôle majeur. Analyse.
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’après le cabinet américain Transparency Market Research (TMR) qui a publié, en juillet dernier, une étude intitulée « Biomethane market, Global Analysis, size, share, growth, trends and forecast 2017 – 2025 » le marché du gaz dit « vert » pourrait atteindre les 2,6 milliards de dollars d’ici à 2025, contre une estimation de 1,5 milliard de dollars en 2016. La filière du biométhane serait donc créditée d’un taux de croissance annuel moyen de 6,7 % entre 2017 et 2025. Un marché mondial porteur Son développement est porté par les usages dans le secteur de la mobilité mais aussi par la production d’électricité et par des technologies de plus en plus matures, capables de proposer des solutions alternatives, incluant des énergies renouvelables (EnR), indispensables dans la lutte contre le changement climatique. D’après l’étude de TMR, l’Europe et l’Amérique du Nord sont les principaux producteurs et consommateurs de biométhane. Certains pays européens comme la Suède, la Suisse, l’Allemagne et la France, sont considérés dans l’étude comme des marchés nationaux clés de production de la filière. La production pourrait aussi augmenter « de manière significative » dans les marchés d’Asie pacifique et d’Amérique latine, selon TMR, qui met en avant l’intérêt de voter des lois favorables et des programmes incitatifs financièrement pour développer de manière pérenne la filière. Où en est-on en France ? La France s’est fixé un objectif ambitieux de 10 % de biogaz dans la consommation totale de gaz à l’horizon 2050. Récemment, Engie a même évoqué la possibilité de 100 % de gaz vert à l’horizon 2050. Le gaz vert est selon l’Association française du gaz (AFG) l’une des trois filières d’excellence sur laquelle l’industrie gazière mise beaucoup : parce que les technologies sont matures, parce que de nouveaux usages autour se développent et que les réseaux sont prêts à le recevoir. Début janvier, les opérateurs gaziers se sont engagés à porter à 90 TWh la part renouvelable dans le mix gaz en 2030 quand la PPE fixe un objectfi de 8TWh en 2023. Les acteurs gaziers sont prêts En 2017, on recensait 44 sites d’injection de biométhane dans les réseaux de gaz, avec une capacité d’injection s’éle-
vant à 696 gigawattheures (GWh) par an pour une production avoisinant les 0,05 % de la consommation française de gaz. Cela peut semblait peu et pourtant cela représente déjà une augmentation de près de 40 % par rapport à la fin de l’année 2016. Les capacités installées ne cessent de progresser, 50 % du parc français est constitué La France vise l’objectif de 10 % de biogaz par des petites installadans sa consommation totale en 2050. tions de moins de 15 GWh par an et plus de 300 projets sont inscrits en fil d’attente pour une puissance estimée de près de 7 000 GWh par an. Un engagement des pouvoirs publics indispensable Si le potentiel est réel, il faudra un engagement fort de l’État pour espérer atteindre l’objectif de 8 térawattheures (TWh) de gaz vert injecté dans les réseaux en 2023. En effet, de nombreux freins à l’expansion de cette filière demeurent : la lenteur et la complexité des démarches administratives pour obtenir le droit d’injecter, le financement des projets de méthanisation par des investisseurs privés reste compliqué, de même que l’accès aux subventions. Plus de 90 % du potentiel « méthanisable » dans notre pays provient des exploitations agricoles. GRTgaz, la FNSEA (syndicat d’agriculteurs) et l’assemblée permanente des chambres d’agriculture (ACPA) ont défini, en décembre dernier, trois axes permettant d’accélérer le développement du biométhane dans nos territoires : en premier lieu, la possibilité d’offrir une formation aux agriculteurs souhaitant se lancer dans la méthanisation mais également un soutien plus accrue de l’État en faveur des nouvelles technologies et de la R&D, notamment les smart grids et les installations de rebours. Si le gouvernement d’Édouard Philippe a annoncé à la dernière rentrée la prise en charge de 40 % des coûts de raccordement des installations de méthanisation agricole au réseau, les acteurs de la filière souhaitent obtenir davantage et notamment un cadre de régulation plus incitatif. L.I.
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BRÈVES BUTANE ET PROPANE
BUTANE ET PROPANE
POURQUOI ROULER AU GPL EN 2018 ?
ENCORE DU GPL POUR UN PARC NATIONAL AMÉRICAIN
En ce début d’année, le Comité français du butane et du propane (CFBP) rappelle dans un communiqué les nombreux avantages de rouler au GPL pour les automobilistes et pour l’environnement. En premier lieu, les professionnels sont particulièrement concernés puisqu’ils sont exonérés de taxe sur les véhicules des sociétés (TVS) pendant douze trimestres depuis le 1er janvier 2018, à condition que leur véhicule émette moins de 100 g/km de CO2. La filière ajoute que la TVA est récupérable à 100 % sur les achats de GPL et que le prix à la pompe est de 0,73 euro le litre en moyenne. À cela s’ajoute la gratuité des cartes grises dans la plupart des régions et le fait que les véhicules GPL bénéficient de la pastille « Crit’Air » 1.
De plus en plus de parcs nationaux américains font le choix du GPL pour leur flotte automobile en raison de ses nombreux avantages. Le dernier en date est le parc national des Great Smoky Mountains, à cheval sur les États de Caroline du Nord et du Tennessee. Le parc compte désormais dans sa flotte six véhicules GPL. Il a également ouvert deux stations GPL pour alimenter sa flotte et sa collection de tondeuses !
LE GPL A LA COTE EN ESPAGNE En 2017, l’Espagne a enregistré près de 4 000 nouvelles immatriculations de voitures roulant au GPL et près 4 000 conversions. Selon l’association espagnole Autogas, « c’est une hausse historique pour le GPL dans le pays qui reflète l’intérêt des Espagnols pour ce carburant plus propre ». Selon la Direction générale des transports (DGT), les données provisoires estiment à 3 840 les nouveaux véhicules GPL en circulation, dont 41,84 % sont enregistrés dans la Communauté de Madrid et 18,67 % en Catalogne… qui viennent s’ajouter aux 50 000 véhicules GPL déjà en circulation en Espagne.
MADRID LANCE SON PREMIER BUS CONVERTI AU GPL Ce bus diesel équipé au GPL fait partie d’un projet R&D mené en Espagne. Celui-ci a pour objectif de réduire les émissions de particules fines, d’oxydes d’azote et de CO2 des flottes de bus diesel actuellement en circulation dans les grandes villes espagnoles en les équipant au GPL pour rouler de manière plus propre.
L’ALLEMAGNE PROLONGE L’AVANTAGE FISCAL JUSQU’EN 2022 La commission des finances du Parlement allemand a étendu l’application d’une fiscalité réduite à la solution de mobilité GPL jusqu’à la fin de 2022.
BAROMÈTRE DU GPL DÉCEMBRE 2017 Moyenne de décembre 2017 1,40 €
LE CARBURANT LE MOINS CHER À LA POMPE :
1,20 €
0,76
0,80 €
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/ LITRE
1,00 €
1,40 1,27 SP 95 Gazole
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0,60 € *Source du prix au litre des carburants en euros : MEDDE - www.developpement-durable.gouv.fr
© CFBP
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BUTANE ET PROPANE
INTERNATIONAL
L’appétit des Marocains pour le GPL L’industrie mondiale du GPL a tenu son colloque annuel en octobre dernier à Marrakech sous le haut patronage du roi Mohammed VI. Un choix de pays hôte qui ne doit rien au hasard puisque le Maroc est devenu ces dernières années le deuxième plus gros marché du GPL en Afrique. Explications.
Les chiffres du GPL au Maroc en 2015 Production : 15 millions de tonnes (MMt) + 20 % du volume de la consommation de GPL en 5 ans Consommation : 2,380 MMt
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tissement d’environ 55 millions d’euros. Prévus également, des nouveaux centres emplisseurs, avec une une capacité d’emplissage additionnelle d’environ 220 000 tonnes par an, pour un investissement avoisinant les 27 millions d’euros.
Une ambition renforcée En octobre, Aziz Rabbah, ministre de l’Énergie, des mines et du développement durable, a indiqué que « le marché du GPL au Maroc représente 23 % de la consommation nationale en produits pétroliers ». « Une consommation qui devrait croître d’environ 80 % à l’horizon 2030 » a-t-il également précisé. Et le Royaume se donne clairement les moyens de ses ambitions. Il a programmé le renforcement des capacités additionnelles de réception et de stockage des GPL totalisant 35 000 tonnes d’ici 2021 pour un inves-
Un régime incitatif pour le GPL Le Maroc s’est déjà engagé sur la voie de la transition énergétique pour porter la part des énergies renouvelables à 52 % à l’horizon 2030. Le pays a clairement identifié les avantages qu’offrent selon lui le GPL et il a choisi de lui donner une place incitative dans son futur mix énergétique avec la mise en place d’un cadre législatif et réglementaire attractif pour les GPL. De nombreux projets sont actuellement à l’étude dans le royaume. Rouler au GPL carburant est une pratique particulièrement répandue au Maroc : près des 40 % des véhicules de tourisme l’utilisent. Le pays a également mis en place des incitations tarifaires pour encourager la construction des capacités de stockage et de réception dans ses différents ports. Des réformes qui selon le ministre Rabbah devraient s’accentuer pour « instaurer un nouveau système de gouvernance de ce secteur, renforcer la sécurité d’approvisionnement et les mesures de sécurité et de protection de l’environnement ». L.I.
a production et la consommation mondiale de GPL sont en continuelles croissances ces dernières années. Elles devraient très probablement atteindre 300 millions de tonnes chacune en 2017. Cette croissance se vérifie également à l’échelle du continent africain, avec un volume de consommation qui a bondi de près de 30 % depuis 2015. Sur ce continent, le Maroc occupe les premières places en termes de consommation de GPL, loin derrière l’Égypte mais devant l’Algérie. En cinq ans, le royaume de « M6 » a connu, en volume, une croissance moyenne de 20 %, le butane tirant la consommation des GPL. Cette situation fait du Maroc le deuxième le plus gros marché du GPL en Afrique.
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BUTANE ET PROPANE
INSTALLATION
Du propane à l’AOP Le gaz propane alimente de nombreuses petites industries sur notre territoire. Au cœur du Puy-de-Dôme et au pied du massif du Sancy, la société laitière de Laqueuille a fait ce choix. Primagaz a accompagné cette démarche. Rencontre. « On a un meilleur rendement sur la chaudière. Aujourd’hui nous consommons 450 tonnes de fuels lourds, on va pouvoir passer en conso prévisionnelle à 300 tonnes de gaz propane » précise le directeur. Autre aspect non négligeable pour cette fromagerie : la sécurité d’approvisionnement. La disponibilité du gaz propane permet de ne pas craindre une rupture dans leur cycle de production quotidien.
© BENJAMIN BOCCAS-PRIMAGAZ
La fromagerie de Laqueuille, dans le Puy-de-Dôme.
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réée en 1949, la société laitière de Laqueuille fabrique et commercialise chaque année près de 3 300 tonnes de fromages pour un chiffre d’affaires avoisinant les 23 millions d’euros. Seize variétés de fromages sont affinées, dont trois sont classées en appellation d’origine protégées (AOP). Avec 9 000 m2 de surface, le choix de la source énergétique était donc une étape déterminante pour Philippe Lorrain, directeur de la société, qui s’est lancé l’année dernière dans un vaste programme de modernisation de sa laiterie. Le choix du propane Au-delà des principales qualités du gaz propane qui apporte, selon les propaniers, une simplicité d’usage et une plus grande souplesse en comparaison du fuel, Philipe Lorrain insiste sur la notion d’économie d’énergie : une donnée essentielle pour ces petites industries qui ont un grand besoin de chaleur pour fonctionner. Pour le directeur de la laiterie, ces économies « se situent sur deux niveaux » : « au niveau des investissements », d’abord. En effet, toutes les installations qui concernent la récupération d’énergie peuvent obtenir un financement via les certificats d’économies d’énergie (CEE). « Au niveau du fonctionnement » ensuite, puisque la consommation de gaz est moins énergivore que celle au fuel.
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Une démarche globale Pour la fromagerie de Laqueuille, Primagaz a mis en œuvre une démarche d’accompagnement complète de conversion du fuel vers le gaz. « Cette démarche a intégré des études préalables, sous-traitées à un bureau d’étude, un suivi complet du chantier de transformation de la chaufferie, le montage des financements (en intégrant les CEE) ainsi qu’un suivi de la performance énergétique pendant la durée du contrat de fourniture (cinq ans) », nous explique Vincent Chabrolle, directeur des marchés industriels chez Primagaz. Cet accompagnement du projet a été décisif pour Philippe Lorrain qui confie volontiers sa méconnaissance de l’énergie gaz propane avant que Primagaz ne vienne lui proposer cette solution clé en main. Les études réalisées en amont par le bureau d’étude spécialisé dans l’ingénierie en efficacité énergétique, Energie3 - Prowatt, ont mis en avant les usages principaux de la chaleur dans la laiterie : la stérilisation du lait et la fabrication de l’eau chaude destinée au nettoyage des matériels. Pour Christophe Watrigant, fondateur et directeur d’Energie 3 - Prowatt, « lorsque l’on évoque la notion d’efficacité énergétique, on commence par se poser la question des usages, ce qui nous a permis d’utiliser de la récupération d’énergie au lieu de la vapeur pour fabriquer de l’eau chaude ». Une mise en pratique qui a nécessité l’installation de compteurs « à tous les endroits stratégiques de consommation afin d’être capable de monitorer l’installation en continu, de vérifier que la récupération de la chateur attendue était bien atteinte et d’identifier les dérives pour pouvoir intervenir et les corriger », précise l’ingénieur en efficacité énergétique. Un exemple de conversion réussie pour Primagaz, qui alimente en GPL et en GNL une centaine de fromageries en France et qui espère sans doute, en offrant une solution tout en un, convaincre davantage d’industriels d’adopter le gaz propane. L.I.
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PUBLICATION
Les atouts du propane Butagaz a publié en septembre dernier un livre blanc à destination des professionnels. En France, 27 000 communes ne sont pas desservies pas le réseau de gaz naturel. Son analyse comparative de différentes sources d’énergie doit permettre selon Butagaz de « mieux consommer ». Analyse.
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hoisir son énergie est une question essentielle pour la plupart des industriels. Si la question du prix est toujours le facteur le plus important, la question environnementale est désormais un critère de décision. « Un constat s’imposait à nous. Beaucoup d’industriels avaient une connaissance très limitée des avantages liés à la conversion du fuel par le propane. Ce livre blanc met en exergue un certain nombre d’aspects techniques, environnementaux et économiques qui nous permettent de valoriser les atouts du propane par rapport au fuel » explique à Gaz d’aujourd’hui Ronan Scavennec, responsable du service marketing B2B et B2C chez Butagaz. Fuel vs propane Butagaz a donc fait le choix d’une approche globale des deux énergies domestiques les plus utilisées par les ménages français : le fuel et le propane. Une analyse comparative basée sur quatre critères : le prix, l’impact environnemental, l’approvisionnement et la maintenance. Sur le critère du prix, l’analyse met en exergue la hausse de la production mondiale de propane qui explique un prix nettement plus attractif pour les industriels que le fuel. Elle note cependant que « la comparaison avec le fuel ne doit pas être réduite au volet financier de la consommation de combustible (fuel, propane) mais tenir compte de l’ensemble de l’installation (ensemble coûts combustibles et coûts d’exploitation) ». Il apparait clairement que le propane est plus favorable à l’environnement : il ne contient ni azote, ni soufre, ni cendres et émet 20 % d’émissions de CO2 en moins que le fuel et 50 % de moins de particules fines. Des caractéristiques loin d’être négligeables lorsque l’on sait l’impact de la pollution de l’air sur la population. Butagaz mise également sur l’arrivée imminente du bio-GPL pour proposer à ses clients une énergie à très faible bilan carbone.
Le service et l’enjeu environnemental Les fournisseurs de propane et de fuel ont un maillage national particulièrement dense, la question de l’approvisionnement n’est donc pas un critère de décision pour les professionnels. Le dernier critère réunissant « maintenance, sécurité et service » en revanche pourrait tourner clairement à l’avantage des utilisateurs de propane puisque les fournisseurs de propane, contrairement à ceux du fuel, proposent une solution clé en main à leurs clients. « Chez Butagaz nous fournissons un audit technique complet, allant de la mise en place de l’installation jusqu’au stockage du combustible, avec une prise en charge des déclarations à la préfecture selon le volume stocké chez le client, la coordination des acteurs (génie civil, fournisseur d’installation de chauffage, procédé industriel, etc.), la maintenance curative et préventive... », explique Sylvia Hun, chef de marché industrie chez Butagaz. À l’heure de la transition énergétique, les collectivités sont de plus en plus sensibilisées aux enjeux environnementaux, les industriels tendent également vers énergie dont l’impact environnemental est moindre. Et à ce petit jeu-là le propane a, selon Butagaz, une bonne longueur d’avance sur le fuel. Une avance qui devrait croître avec l’arrivée du bio-GPL. L.I.
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BRÈVES VIE DE L’AFG
VIE DE L’AFG
AGENDA
CONSENSUS À L’UIG
La convention de l’AFG « Bilan et perspectives gazières » aura lieu mercredi 14 mars 2018 de 8h45 à 12h, à l’auditorium de la Sacem. Cette convention sera l’occasion de faire un point sur le logement : qu’il s’agisse d’innovations gaz dans l’habitat ou de mesures mises en place par l’État, l’année 2017 fut riche d’enseignements. Autre sujet phare : la réforme du stockage. Quelles sont les conditions qui contribueront à son succès ?
Le 5e Forum diplomatique sur le gaz de l’Union internationale du gaz (UIG) s’est tenu à Madrid, en Espagne, le 22 novembre. Les présentations et le débat ont souligné le rôle clé du gaz naturel dans l’amélioration de la qualité de l’air urbain et la lutte contre le changement climatique. Si l’industrie s’accorde sur le fait que demain le gaz sera l’énergie de référence, notamment dans sa capacité à venir compléter les énergies renouvelables, elle a également souligné l’importance de lutter contre les fuites de méthane.
DU GAZ NATUREL POUR ÉCLAIRER ET CHAUFFER NOS TOMATES !
#MASTEREGAZ #FUTURSGAZIERS #PÉROUGAZIER
© AFG OUEST
La présidente de l’AFG Ouest, Christelle Rougebief, a convié le 8 janvier l’ensemble des acteurs énergétiques du Pays de la Loire, à la présentation d’une nouvelle cogénération au gaz naturel chez Philippe Retière, producteur de tomates et président de la Fédération des maraîchers nantais. Une occasion de rappeler les atouts de la cogénération au gaz naturel, dans un secteur particulièrement avide d’économies d’énergie, puisqu’elle représente selon Philippe Retière, « le deuxième poste de dépenses, après la main-d’œuvre ». Dans une région où l’on dénombre 71 installations, représentant chacune environ 220 MW et 1,8 TWh de gaz acheminés (l’équivalent du besoin en électricité de la ville d’Angers), les bénéfices de la cogénération au gaz naturel qui restitue 85 à 90 % d’énergie contre 60 % pour les systèmes de production électrique et thermique classique semble déjà une évidence.
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© LAURA ICART
Pendant une semaine, du 3 au 10 septembre dernier, les étudiants du mastère spécialisé en ingénierie et gestion du gaz, formation organisée conjointement par les Mines Paris Tech et CFAFG, se sont rendus au Pérou pour leur séminaire d’étude. L’occasion pour eux de rencontrer de nombreux acteurs du monde de l’énergie péruvienne (Cálidda, Gazel, Osinergmin, Pluspérou, Repsol, Perú LNG…) et de découvrir la place du gaz naturel dans le pays.
VIE DE L’AFG
PLAIDOYER
Relever le défi du plan climat L’Association française du gaz (AFG) a publié le 6 décembre les propositions de la filière française gazière pour relever le défi du plan climat voulu par le gouvernement. Elle a notamment exprimé sa volonté d’accélérer le développement de trois filières dites d’excellence : le biométhane, le GNV et le gaz naturel carburant marin et fluvial.
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eux ans après l’accord de Paris, l’AFG s’est une nouvelle fois mobilisée à l’occasion de la sortie du plan climat pour faire entendre la voix de l’industrie gazière. « Nous considérons le plan climat comme une opportunité unique pour développer ces trois filières d’excellence : le gaz naturel véhicule, le gaz naturel liquéfié pour le transport maritime et fluvial et la production de biométhane. Celles-ci s’inscrivent dans une trajectoire de forte réduction des émissions de carbone en combinant économie d’énergie et production de gaz renouvelable » a déclaré à cette occasion Patrick Corbin, président de l’AFG. Dans sa publication, l’AFG met en avant des solutions industrielles proposées par la filière gaz répondant aux principaux axes du plan climat et permettant également d’avancer vers les objectifs fixés par le gouvernement. Développer le biométhane Le biométhane apparaît aujourd’hui comme un nouvel outil attractif au service des territoires. La filière a le vent en poupe chez les gaziers mais aussi et surtout dans le monde agricole qui y voit une source de revenus supplémentaires. L’industrie gazière s’engage à développer massivement le gaz renouvelable, à accompagner les projets et à soutenir la filière agricole ainsi que les agriculteurs. Elle appelle à faciliter l’accès au financement, simplifier le cadre administratif et améliorer l’acceptation des projets. Le développement en sera amplifié par une évaluation systématique des gisements de déchets « méthanisables » et l’intégration du volet « gaz renouvelable » dans les dispositifs d’investissement. Si un objectif de 10 % de gaz renouvelable dans la consommation totale de gaz en 2030 est déjà inscrit dans la loi sur la transition énergétique pour la croissante verte, la filière gazière travaille à la construction d’un plan permettant d’atteindre les 30 % en 2030. En proposant des solutions de mobilité gaz aussi bien terrestres que maritimes, l’industrie gazière entend répondre à une problématique majeure ces dernières années : la diminution de la pollution de l’air. Pérenniser l’usage du GNV De mieux en mieux implanté sur le territoire, le gaz naturel pour véhicules (GNV) connaît un engouement de plus en plus fort chez les véhicules lourds. L’industrie gazière accompagne les implantions de stations et s’assure de
la disponibilité du carburant. Elle demande à ce que soit garanti sur cinq ans l’écart fiscal entre le gaz et les carburants traditionnels, de permettre un sur-amortissement de 40 % pour les poids lourds et de ne pas soumettre les gaz renouvelables à la fiscalité carbone. Dynamiser les ports français Faire émerger une filière française du GNL carburant marin et fluvial est une nécessité pour l’industrie gazière qui demande que les investissements des parties prenantes soient facilités. « L’achat des navires, la construction d’infrastructures portuaires dédiées représentent un coût conséquent » souligne Alain Giacosa, directeur de la plateforme GNL carburant marin et fluvial, qui insiste sur la nécessité d’aider les fournisseurs et les distributeurs de GNL dans la première phase de leur projet afin de leur permettre d’être rentables par la suite. En complément du développement de ces trois filières et « pour rendre irréversible l’accord de Paris », la filière gaz s’engage également à travers les propositions de l’AFG à « rendre compte de ses actions et à évaluer sa contribution à la baisse des émissions de carbone par la publication d’un scénario annuel » et souhaite aussi s’inscrire dans une dynamique de « réduction de son empreinte carbone d’ici 2030 de l’ordre de 40 % par rapport à 2016 ». L.I.
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VIE DE L’AFG
Normalisation Normes récemment publiées NF D36-127 d’avril 2017 (publiée le 10 juillet 2017) : définit les spécifications et les techniques d’essais relatives à la construction, la sécurité et l’utilisation ainsi que le marquage des systèmes de raccordement des appareils et des canalisations utilisés dans les bâtiments d’élevage. NF EN 16905-3 et NF EN 16905-5 de juillet 2017 : spécifient les exigences, les méthodes d’essai et les conditions d’essai applicables aux calculs des caractéristiques et des performances des climatiseurs et pompes à chaleur alimentés au gaz. Partie 3 : conditions d’essai applicables à l’évaluation des paramètres énergétiques des appareils. Partie 5 : candidate au statut de norme européenne harmonisée (ENh) au titre du mandat éco-conception et étiquetage énergétique. NF EN 1359 de juillet 2017 : spécifie les exigences et les essais pour la fabrication, la performance, la sécurité et la production des compteurs de volume de gaz à parois déformables. Répond au mandat pour la directive instruments de mesure 2014/32/UE. NF EN 16723-2 d’août 2017 : spécifie les exigences et méthodes d’essai pour le gaz naturel, le biométhane et leurs mélanges comme carburants automobiles. Répond au mandat pour l’élaboration de spécifications de qualité pour le biométhane comme carburant et vient en appui de la directive 2009/28/ CE relative à la promotion des énergies renouvelables.
XP E 29-826 de novembre 2017 : s’applique aux kits de tuyaux onduleux pliables en acier inoxydable (PLT) pour la distribution des gaz de 2e et 3e famille à une pression de service jusqu’à 2 bars dans les secteurs résidentiel, commercial et industriel.
Fait marquant Un règlement délégué en complément de la directive 2014/94/UE sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs a rendu obligatoire en novembre la norme NF EN ISO 20519 sur le soutage des navires fonctionnant au GNL. Un règlement similaire est attendu en 2018 sur la mobilité gaz terrestre.
Dernière minute Le 26 décembre, le ministre de l’Économie et des finances Bruno Le Maire a signé la décision de renouvellement de l’agrément du Bureau de normalisation du gaz pour une durée de trois ans. Il confirme ainsi la capacité du BNG à exercer au nom d’Afnor le rôle d’opérateur du système français de normalisation pour l’ensemble des activités de la chaîne gazière.
NF EN 13203-4 de septembre 2017 : s’applique aux appareils de micro-cogénération pour produire de l’eau chaude sanitaire et de l’électricité ayant un débit calorifique de gaz inférieur ou égal à 70 kW, une puissance électrique inférieure ou égale à 50 kW et une capacité de stockage en eau chaude inférieure ou égale à 500 litres. NF D 36-134 et NF D 36-135 de décembre 2017 : définissent les exigences spécifiques applicables aux dispositifs indémontables constitués respectivement d’un robinet de sécurité à obturation automatique intégrée (ROAI) et d’une jonction tournante intégrée d’une part et d’un tuyau flexible d’autre part. Ces deux normes ont été élaborées à partir de cahiers des charges AFG qu’elles remplacent.
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L’équipe du BNG au complet.
leader français et référence européenne de la certification :
de matériel et appareils à gaz selon des référentiels gérés par CERTIGAZ (Marquage CE, Marques NF et Marques ATG) de système de management (offre commune de Certigaz et d’AFNOR Certification, pour la Certification Coordonnée Système & Produits qui comprend la certification sous marque AFAQ).
CERTIGAZ est l’organisme notifié (n°1312) pour le marquage CE des appareils à gaz en application des directives 2009/142/CE « appareils à gaz » et 92/42/CEE « rendement des chaudières ». Cela représente plus de 1000 certificats CE de type émis ou modifiés et plus de 220 sites de fabrication sous surveillance dont près de la moitié hors de France. Le marquage CE est la preuve de la conformité aux exigences des directives européennes applicables à un produit, il permet la libre circulation du produit au sein de l’Union Européenne. La directive 2009/142/CE « Appareils à gaz » concerne principalement : •Les appareils de cuisson (domestique et professionnelle), •Les appareils de chauffage (chaudières, tubes radiants, générateurs à air chaud), • Les appareils de production d’eau chaude, •Les appareils de réfrigération, •Les appareils de lavage, •L’éclairage.
CERTIGAZ gère également les marques ATG au nom de l'AFG dans le secteur du gaz : ATG Bras : alliages d'apport/flux destinés au brasage capillaire et au soudobrasage pour les canalisations gaz en acier ou en cuivre ; ATG Sert : raccords à sertir en cuivre ; ATG PLT : kits de tuyaux onduleux pliables en acier inoxydable ; ATG MH : installations de gaz GPL pour résidences mobiles et kits d’alimentation en GPL.
CERTIGAZ est l’organisme mandaté par AFNOR Certification pour assurer la gestion des dossiers ainsi que la surveillance des sites de fabrication des marques NF dans le secteur du gaz : NF GAZ : accessoires de raccordement des appareils à gaz et accessoires pour installations GPL ; NF ROB-GAZ : aux robinets de gaz pour réseaux de distribution situés en amont du compteur et aux robinets pour installations de gaz dans les bâtiments, ainsi qu’aux robinets à papillon pour installations de gros diamètres et aux joints plats d’étanchéité pour installations de gaz ; NF APE : accessoires pour réseaux en polyéthylène de distribution de gaz et d’eau ; NF REG-GAZ : régulateurs de pression de gaz pour réseau de distribution et branchements.
CERTIGAZ SAS est une société par action simplifiée détenue pour moitié par AFNOR Certification et par l’AFG. Certigaz est accréditée par le COFRAC (Comité Français d’Accréditation, portée disponible sur www.cofrac.fr). Contact : 8 rue de l’Hôtel de Ville 92200 Neuilly Tél : +33(0) 1 80 21 07 40 Fax : +33 (0)1 80 21 07 93 www.certigaz.fr infocertigaz@certigaz.fr