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BUSINESS

Lacina Koné

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’ALLIANCE SMART AFRICA

« Nous devons davantage investir en nous-mêmes » Le continent a encore de nombreux défis à relever avant de pouvoir pleinement profiter de l’opportunité technologique et digitale. Si l’Afrique a connu de récents progrès en matière de développement, elle doit faire attention à une « nouvelle forme de colonisation ». Rencontre avec l’Ivoirien Lacina Koné, patron de Smart Africa.

par Oscar Pemba 96

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n tant que directeur général de l’alliance Smart Africa, une institution réunissant des acteurs privés et publics de l’économie africaine, Lacina Koné passe la plupart de son temps sur la route. Avant Barcelone, où il a assisté fin février au Mobile World Congress, le plus grand rassemblement au monde pour l’industrie du mobile, il s’est rendu en Estonie, pays leader en matière d’administration électronique et de numérisation. Ces déplacements lui permettent d’appréhender de nouvelles solutions digitales pour le continent et de tirer profit du partage de connaissance : « En Estonie, je ne voulais pas seulement comprendre comment les Estoniens faisaient ce qu’ils faisaient, mais ce qu’ils faisaient différemment. » Cet entrepreneur acharné essaye tant bien que mal de responsabiliser les professionnels qui l’entourent. Malgré les progrès réalisés en matière d’investissements, particulièrement dans le secteur technologique, Lacina Koné déplore la part toujours faible portée par le continent : « L’Afrique est le troisième plus grand continent du monde et ne représente pourtant que 1 % des investissements mondiaux dans la technologie. Nous avons une population de 1,3 milliard d’habitants, mais ne comptons que sept licornes. » Plus tôt dans l’année, Lacina Koné a rencontré

Davit Sahakyan, vice-ministre arménien de l’Industrie de haute technologie : « L’Arménie compte 2,5 millions d’habitants, et elle a pourtant constitué un fonds national de capital-risque et ambitionne de créer 10 licornes dans les cinq ans ! » s’exclame le directeur de Smart Africa. Il s’inquiète en outre du fait qu’une grande partie des investissements actuels sont des capitaux étrangers. « Nous devons promouvoir l’idée du capital-risque sur notre propre terrain. C’est ainsi que la Silicon Valley a été créée, avec des capitaux locaux. Pour l’instant, seul l’opérationnel est en Afrique. L’argent est étranger. Les sociétés sont enregistrées en dehors du continent et, par conséquent, la valeur ira ailleurs. À long terme, ce n’est pas dans notre intérêt. » La question de la souveraineté revient régulièrement sur le tapis. Lacina Koné est persuadé que l’Afrique a le talent et le savoir-faire pour tirer parti de toutes ses opportunités, mais reste néanmoins réaliste. Deux types de partenariat définissent les relations entre les acteurs étrangers et africains, selon lui : « un partenariat dur » en matière d’apport de matériel de l’étranger, et « un partenariat doux et intelligent », où les Africains fournissent les idées et l’expertise pour appliquer la technologie sur le continent. Lacina Koné porte aussi beaucoup d’intérêt à la question du stockage

AFRIQUE MAGAZINE

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429 – JUIN 2022


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