Propagation du Covid19
Pr. M’hamed Hmimina
Implication des mouches domestiques et des blattes dans la propagation de la maladie à coronavirus (COVID-19)
Naturellement liés à l’homme, les bactéries et les virus ont depuis toujours suivi et marqué la civilisation humaine. Aujourd’hui, confrontée à un nouvel « ennemi », pour reprendre les termes martiaux utilisés, l’humanité parait encore une fois abasourdie par la gageure du COVID-19. Toutefois, en remontant le temps, ce fut, semble-t-il, toujours le cas. Plus proche de nous, La Peste romancée par Albert Camus n’est pas un phénomène d’un autre âge ; toutes sortes de pestes peuvent exister encore à notre époque, et existeront toujours. Tout comme ceux qui disent aujourd’hui qu’il n’y a pas de Corona ou c’est plutôt une affection gériatrique, les habitants d’Oran du roman de Camus associaient la peste à un phénomène d’un autre âge, qui aurait dû avoir disparu depuis longtemps. À leurs propres yeux, ils étaient des gens “modernes”, avec des médecins et des hôpitaux, des téléphones, des tramways, des voitures, des avions, des radios, des journaux (aujourd’hui, TGV, Télévision, Internet, smartphones en plus) ! Dans notre pays, prospère en épidémies, Al Bazzaz M révèle la morphologie des grandes pandémies des 18 et 19 eme siècles : comment elles naissaient, croissaient, vivaient, mourraient et disparaissaient. On serait tenté de dire : rien de nouveau sous le soleil. Le Covid 19, dont les effets ne sont pas rassurants, s’ajoutera surement à ce portrait où la réalité dépasse la fiction et dont la lecture nous laisse absolument abasourdis.
L
a pandémie du Covid-19 a neuf mois aujourd’hui et ses pourtours demeurent encore incertains. Les mêmes questions se posent : le virus partira ou pas ; y’a-t-il une deuxième vague ou pas, mutera-t-il ou pas, un vaccin pour quand ?…. Entre temps la présumée banale gripette, ainsi grommelée comme s’il s’agissait d’une chose évidente, banale, poursuit et accroit ses ravages partout sauf dans une dizaine d’îles microscopiques, naturellement confinées, situées dans le Pacifique. Provisoirement, plus de 950.000 victimes - ce qui fait sourire lorsqu’on feuillette l’histoire des grandes épidémies aux issues humaines autrement plus dramatiques- déjà et à chaque bilan quotidien, une image poignante, auparavant exprimée par Albert Camus dans La Peste, surgit dans mon esprit et que je reproduis in extenso : « Mais à midi, la fièvre était montée d’un seul coup à quarante degrés, le malade délirait sans arrêt et les vomissements avaient repris. Les ganglions du cou étaient douloureux au toucher et le concierge semblait vouloir tenir sa tête le plus possible éloignée du corps. Sa femme était assise au pied du lit, les mains sur la couverture, tenant doucement les pieds du malade. Elle regardait Rieux. - Écoutez, dit celui-ci, il faut l’isoler et tenter un traitement d’exception. Je téléphone à l’hôpital et nous le transporterons en ambulance. Deux heures après, dans l’ambulance, le docteur et
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Agriculture du Maghreb N° 130 - Septembre/octobre 2020
la femme se penchaient sur le malade. De sa bouche tapissée de fongosités, des bribes de mots sortaient : « Les rats ! » disait-il. Verdâtre, les lèvres cireuses, les paupières plombées, le souffle saccadé et court, écartelé par les ganglions, tassé au fond de sa couchette comme s’il eût voulu la refermer sur lui ou comme si quelque chose, venu du fond de la terre, l’appelait sans répit, le concierge étouffait sous une pesée invisible. La femme pleurait. - N’y a-t-il donc plus d’espoir, docteur ? - Il est mort, dit Rieux. » Cela fut il y a 75 ans ! En plus actuel, nous avons tous vu avec stupéfaction en avril 2020, à New York, une tranchée de quelques dizaines de mètres de long creusée au bulldozer. Cette immense fosse commune est devenue le symbole du martyr de cette ville face au Covid-19. Les services funéraires de cette mégapole paraissaient débordés, les morgues pleines et des camions frigorifiques d’appui stationnaient sur les parkings des hôpitaux. Les crématoriums ne pouvaient plus répondre à la demande. L’image des fosses communes associée à la ville phare de la globalisation, de l’opulence et de la modernité, la ville « qui ne dort jamais », fut un choc dramatique pour les téléspectateurs. Dans l’imaginaire collectif, de telles cavités communes sont associées au tiers monde, au dénuement, à la misère. Dans le même pays, le 3 mai, des dizaines de corps en décomposition ont été trouvés dans un
salon funéraire de Brooklyn (New York). Les responsables expliquaient l’entassement par les camions destinés à l’entreposage des corps, car la chapelle était pleine à craquer. « Les cadavres pleuvaient de partout », justifiaient-ils cette faillite. Si la première puissance du monde gérait l’épidémie d’une si épouvantable manière que peuvent faire d’autres pays ? Et c’était à ce moment qu’il y eut une conversation méprisable en direct entre un chef de service à l’hôpital Cochin (Paris) où il suggère à un chercheur de l’Inserm, de faire de l’Afrique, où il n’y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation, un bon cobaye pour les tests de vaccins contre le Covid-19, un peu comme c’était fait d’ailleurs auparavant dans certaines études sur le sida, ou sur les prostituées. De manière générale, les systèmes de santé de tous les pays ont été dépassés. Le monde entier parait vivre dans une même forêt en feu. Le monde entier a peur de la même chose en même temps. Le virus effraie autant les chefs d’Etat, les riches que les mendiants et les sans domiciles fixes. Les dirigeants des pays qui avaient l’habitude de se faire soigner à l’étranger, manifestant leur inconfiance dans leur propre système de santé, ne peuvent plus le faire. Au sein de certains hôpitaux européens, nous avons pu observer des scènes de malades entassés, le personnel médical ne pouvant, faute de moyens, faire face, malgré son dévouement extraordinaire et ses compétences qui suscitent le respect. Ce t article est la plongée d’un éco-entomologiste dans le virus - qui, à l’instant où je le compose, continue ses ravages - pour mettre en lumière dans une poignée de lignes quelques éléments de son écologie au bénéfice des lecteurs d’Agriculture du Maghreb. Les infections arbovirales émergentes, le plus triste
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