Lettre de l'observatoire N°24

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la lettre de

l’Observatoire E d i t o

n°24 - 2 e semestre 2008

L e 10 janvier dernier, François Hurel* remettait un rapport en faveur des auto-entrepreneurs, ceux qui créent leur activité “pour répondre à un besoin immédiat”. Et ce, à la demande d'Hervé Novelli, alors secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.

Selon ce rapport, 3/4 des sociétés américaines

et anglaises et 70 % des entreprises espagnoles sont des travailleurs indépendants contre seulement 50 % en France. D'où un ensemble de propositions pour assouplir les législations qui encadrent l'exercice d'une activité indépendante chez nous. Il s'agit notamment de créer les conditions pour qu'il soit aisé de créer et de cesser une telle activité, de simplifier le paiement des prélèvements obligatoires et de sécuriser le patrimoine personnel de l'auto-entrepreneur.

L’actualité juridique, économique et sociale des Travailleurs Indépendants et des petites entreprises leur ressemble : elle bouge tout le temps. Cette lettre s’en fait l’écho

L'INDÉPENDANCE entre renouveau et métamorphose Stéphane Rapelli – Chargé d'études et de recherches

Dans son volet “encouragement de l'entrepreneuriat”, le projet de loi de modernisation de l'économie s'inspire d'ailleurs largement des préconisations de ce rapport. Adopté par l'Assemblée Nationale en juin, le texte doit être voté définitivement par le Parlement en juillet. Lors du salon des entrepreneurs de Lyon des 18 et 19 juin dernier, François Hurel confiait espérer une pleine application pour début janvier 2009.

En tous les cas, avec cette nouvelle Lettre de l'Observatoire Alptis de la Protection Sociale, nous comptons bien alimenter la réflexion sur les conditions souhaitables d'exercice de l'indépendance. Chantal Benoist Directeur de la rédaction * Avocat, délégué général de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et ancien délégué général de l'Agence Pour la Création d'Entreprise (APCE). En 2002, François Hurel avait déjà remis un rapport au Premier ministre sur le développement de l'initiative économique et de la création d'entreprise.

S o m m a i re Introduction générale

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I- Assiste-t-on à un renouveau de l'indépendance ?

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I- 1 - Une évolution séculaire défavorable... . . . . . . . . . . . . .

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I- 2 - ...mais un retournement de tendance durable . . . . . . .

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II- Le renouveau de l'indépendance en question II- 1 - Un impact notable des mesures... . . . . . . . . . . . . . . . .

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II- 2 - ... qui conduit à une reformulation des fondements de l'indépendance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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III- Les mutations de l'indépendance et leur intégration dans les politiques de l'emploi

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Conclusion

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Bibliographie

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I n t r o d u c t i o n

g é n é r a l e

“Nombreux sont ceux de nos concitoyens, salariés, étudiants, chômeurs, ou jeunes qui aspirent à exercer une activité indépendante, signe pour eux de liberté, de promotion sociale et d’opportunité d’enrichissement par le travail”. Cette constatation formulée par Hervé Novelli a l'occasion de la remise du rapport Hurel sur l'auto-entrepreneur (Rapport remis le 10 janvier 2008 au Secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur), semble validée par les faits. La création d'entreprise connaît une évolution remarquable depuis plus de cinq ans entraînant une croissance sans précédent du nombre d'indépendants.

C

e phénomène, dont l'Observatoire propose une analyse dans son dernier ouvrage “Les travailleurs indépendants de l'industrie, du bâtiment et des services : portraits et perspectives” paraît robuste et durable. Toutefois, si cet engouement puissant pour l'indépendance est susceptible de redonner à la France un tissu entrepreneurial relativement dense, il convient de s'interroger sur ses fondements. La nature de ce nouvel entrepreneuriat présente quelques particularités qui doivent mobiliser l'attention afin de garantir à l'indépendance un développement socialement équilibré et économiquement durable.

L'émergence d'une réflexion profonde sur les formes à venir de l'indépendance est d'autant plus impérative que les politiques de l'emploi tendent à lui conférer un rôle très délicat. En effet, à l'heure où la flexibilité du travail, l'atomisation des activités et l'optimisation des coûts de production mobilisent les énergies stratégiques au sein des entreprises de toutes tailles, le non-salariat est susceptible d'être assimilé à une simple variable d'ajustement conjoncturel du volume global d'emploi. Si des améliorations notables au niveau fiscal ou administratif peuvent être attendues du récent projet de loi de modernisation de l'économie – qui devrait être soumis au vote durant le mois de juillet – la vigilance reste de mise en ce qui concerne les conditions d'exercice des activités indépendantes traditionnelles. ■

Différentes facettes de l'indépendance L'indépendance reste une notion très large et les confusions restent fréquentes.

• Généralement, le travailleur indépendant est assimilé à une personne physique pratiquant son activité en toute indépendance. En d'autres termes, cela concerne les entreprises – unipersonnelles ou non – enregistrées en nom propre. Il s'agit d'une généralisation de la définition qui est fondée sur le principe de non-subordination et qui est retenue par les organismes fiscaux (URSSAF, RSI, MSA...). • Dans une acception plus restrictive, l'indépendant est compris comme un non-salarié exerçant son activité sans recourir à de la main d'œuvre salariée. Cette définition, issue des nomenclatures de l'INSEE, permet notamment de distinguer au sein des travailleurs non-salariés les employeurs et les indépendants au sens strict.

- Figure 1 Part des non-salariés dans la population active (%) Sources : Observatoire Alptis – Rapelli et Piatecki (2008) 100

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Population active totale

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Population active non-agricole


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I- Assiste-t-on à un renouveau de l'indépendance ? L'esprit entrepreneurial souffle sur le tissu productif français. Selon les données collectées par l'INSEE (2008), plus de 321 000 entreprises ont été créées en 2007. Cette progression confirme la tendance amorcée en 2002. Sur les six dernières années, près de 267 000 entreprises en moyenne ont ainsi été créées chaque année. Le dynamisme des créations semble d'autant plus vivace que les défaillances se situent à un niveau relativement bas (environ 40 000 par an). En outre, 87 % des nouvelles entreprises ne comptent aucun salarié*. Au-delà de la simple création d'entreprise, il faut donc voir dans ces chiffres l'expression d'un redéploiement sans précédent du non-salariat.

Une évolution séculaire défavorable...

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A u début de notre décennie, l'idée d'un redressement

membre non-salarié de la famille sans percevoir de salaire – ont vu leur nombre fortement diminuer. Entre 1990 et 2001, leurs effectifs se sont ainsi réduits de plus de 7,5 % en moyenne annuelle, alors que cette décroissance se portait à 2,6 % pour les indépendants. En revanche, le nombre d'employeurs a bénéficié d'une certaine stabilité. Sur cette période, l'attrait de la sécurité statutaire, des avantages sociaux et de la régularité des revenus qu'offrent traditionnellement le salariat explique la désaffection rencontrée par le statut d'aide familial. Mais c'est aussi cet arbitrage entre salariat et indépendance qui, in fine, a fortement influé sur le recul irrésistible du non-salariat.

marqué de l'indépendance face au salariat semblait encore utopique. De fait, tout au long du siècle passé, les effectifs non-salariés ont connu un déclin presque ininterrompu (Fig. 1). Seules les périodes d'après-guerre ont vu la population des non-salariés croître temporairement. Si près de la moitié des actifs occupés exerçait une activité indépendante en 1900, seuls 11 % d'entre eux font le choix du non-salariat en 2000. Les raisons de cette évolution, qui sont analysées par Rapelli et Piatecki (2008), sont multiples. Les plus évidentes restent : • l'industrialisation consécutive à la seconde révolution industrielle. Celle-ci marque l'avènement de l'électricité, du moteur à explosion et de la chimie dans les processus de production, • la tertiarisation accompagnant la croissance économique à partir des années cinquante, • la féminisation de la population active qui profite essentiellement aux activités salariées.

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outefois, les professions indépendantes n'ont pas toutes connu la même évolution. La population des agriculteurs est celle qui a le plus diminuée. Si l'industrialisation de la première moitié du XXe siècle a concouru à son déclin progressif, la rationalisation des productions, l'accroissement de la taille des exploitations et, très certainement, les fortes contraintes que génèrent les activités agricoles ont accéléré ce phénomène à partir des années cinquante. Ainsi, le nombre d'indépendants et d'employeurs agricoles a été réduit de près de moitié entre 1982 et 2005 (Fig. 2).

Ces facteurs exogènes se sont accompagnés d'une modification notable de la structure socio-professionnelle des non-salariés. Les aides familiaux – les personnes aidant un

Les données, issues des enquêtes emploi de l'INSEE, ont été redressées afin de corriger les discontinuités apparaissant dans les séries suite aux différents changements de nomenclatures intervenus entre 1981 et 2003. Cette opération reste difficilement réalisable sur les données non-agrégées antérieures à 1982. D'autre part, 2005 est la dernière année pour laquelle les données sont disponibles.

- Figure 2 Évolution du nombre d'indépendants et d'employeurs Source : Observatoire Alptis 2 000 000

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1 000 000

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Professions libérales

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Commerçants

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Artisans

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Chefs d’entreprise de 10 salariés et plus

* Tellier (2008) dresse un panorama global des créations d'entreprises en 2007.

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L'évolution générale de la population

Dans le commerce, ce sont surtout socio-professionnelles connaissent des artisans et des commerçants les petits détaillants qui ont disparus. une progression tout aussi remarquable. En 2005, ce groupe comptait (hors aides familiaux) est elle aussi C'est notamment le cas des épiciers, deux fois plus d'employeurs et orientée à la baisse, mais dans des des quincailliers, des droguistes, d'indépendants qu'en 1982. Ce proportions moindres. Entre 1982 et des droguistes ou des maroquiniers. dynamisme est à rapprocher de celui 2005, leurs effectifs respectifs ont qui anime les professions libérales, décru de 0,71 % et 0,47 % en moyenMais le phénomène touche aussi puisque les deux catégories sont très ne par an pour atteindre un minimum les secteurs du luxe proches. En effet, les professionnels en 2002. Comme le constate Beffy et des équipements sportifs. concernés exercent principalement (2006) pour ces deux classes d'indédes activités de service (conseil, pendants, les évolutions restent très expertise...) sous statut fiscal non-salarié libéral, mais se variées au sein des différents secteurs professionnels. déclarent au cours des enquêtes comme cadres ou professions intermédiaires. ans le commerce, la baisse des effectifs a été très marquée pour les petits détaillants en alimentation générale, en es évolutions relevées au sein des grandes familles produits de luxe, en quincaillerie ou en équipements de professionnelles ont eu une influence directe sur la sports. Il faut voir dans ces évolutions l'expression de la répartition sectorielle des non-salariés. En 1955, 60 % d'entre pression concurrentielle des réseaux de grande distribution eux travaillaient dans le secteur agricole, alors qu'ils étaient qui est particulièrement forte sur les marchés concernés. Pour un peu plus de 25 % à exercer une activité dans le tertiaire. leur part, les artisans se spécialisent dans les activités peu Rappelons que ce secteur regroupe, entre autres activités, propices à la concentration salariale de la main-d'œuvre le commerce, les transports, la santé, les services aux ou réclamant un savoir-faire particulier. Les métiers entreprises et aux particuliers. artisanaux de la peinture, de la finition de bâtiment, de la Le secteur de la construction et de l'industrie ne concentrait menuiserie, de l'électricité, de la plomberie, mais aussi la qu'une part réduite (environ 4 et 8 % environ). En 2005, la coiffure, l'esthétique, la boulangerie et la mécanique répartition est littéralement renversée. permettent de maintenir les effectifs. Près de 60 % des non-salariés exercent dans le tertiaire contre 23 % dans le n revanche, si la tendance globale L'artisanat se maintient grâce à un est à la diminution, la catégorie des double mouvement de spécialisation. secteur agricole. La part de l'industrie s'est réduite alors que celle de la chefs d'entreprises de 10 salariés et Les activités très dépendantes construction est proche de 10 %. À plus connaît une certaine stabilité de la personnalité du professionnel l'image du salariat, les activités numérique. Cette configuration peut et/ou réclamant un haut niveau de être expliquée par une plus grande indépendantes se sont donc massipérennité des entreprises bénéficiant vement réorientées vers les services. compétences sont ainsi privilégiées. d'une masse salariale relativement La tertiarisation des activités indéimportante face aux évolutions sociopendantes est toutefois intervenue économiques. De plus, contredisant la tendance générale, un demi-siècle après celle des activité salariées. certaines catégories de non-salariés voient leurs effectifs e tertiaire est d'ailleurs au cœur du renouveau de croître depuis une trentaine d'année. En effet, ils étaient l'indépendance qui tend à se confirmer depuis quelques environ 190 000 à exercer une profession libérale en 1982 années. Alors même que l'indépendance semblait vouée à contre 309 000 en 2005. Sur cette période, les métiers de ne subsister que de manière résiduelle, en constituant une la santé, du médicosocial, du droit et de la comptabilité forme d'emploi atypique réservée à ont généré un volume important de rares niches économiques, nous d'emplois. Les évolutions relevées au sein assistons aujourd'hui à un retourBeffy (2006) rapporte qu'entre 1990 des grandes familles professionnelles nement de tendance prononcé. De et 2005, le nombre d'avocats a triplé ont eu une influence directe fait, depuis 2002, les effectifs totaux et que la population des infirmiers sur la répartition sectorielle des non-salariés sont orientés à la libéraux a presque doublé. De hausse. Certes, la population agricole manière plus générale, le dévelopdes non-salariés. pement des secteurs des services aux Le tertiaire est au cœur du renouveau semble avoir atteint un équilibre relativement stable et le secteur entreprises comme aux particuliers de l'indépendance qui tend à se industriel n'offre que peu d'opporfavorise très largement l'accroisconfirmer depuis quelques années. tunités de développement aux sement du nombre de professionnels indépendants. Mais, entre 2002 et libéraux. 2005, les effectifs des artisans, des commerçants et des our leur part, les effectifs des non-salariés (hors aides professionnels libéraux ont connu des taux de croissance familiaux) répertoriés dans le groupe des autres catégories positifs compris entre 5 et 10 %. ■

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...mais un retournement de tendance durable

De récents travaux menés par l'Observatoire Altpis* montrent que le non-salariat devrait être promis à un avenir prometteur. Fondée sur une approche de nature sectorielle et démographique, cette étude cherche à évaluer les potentialités d'évolution de la population des non-salariés à l'horizon 2030. À cette fin, des projections statistiques ont été entreprises. Entre autres variables déterminantes, le taux de chômage joue un rôle important sur le taux sectoriel de travailleurs non-salariés. Dès lors, trois principaux scénarios ont été retenus afin de rendre compte : • d'une hypothèse optimiste, pour laquelle le taux de chômage tend à décroître jusqu'au seuil de 5 % considéré comme incompressible, • d'une hypothèse tendancielle avec le maintien du taux de chômage à des valeurs proches de 8 %, • d'une hypothèse pessimiste qui suppose une croissance graduelle du taux de chômage le portant à 12 % en 2030.

Les projections obtenues (Fig. 3) font émerger quelques enseignements remarquables. Tout d'abord, au niveau de la population non-salariée dans son ensemble, le retournement de tendance repéré à partir de 2002 devrait se confirmer. L'importance du nombre des créations d'entreprises relevé depuis 2003 semble valider ce premier résultat. En outre – quel que soit le scénario privilégié – les potentialités de croissance du nombre de non-salariés s'avèrent conséquentes.

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choses étant égales par ailleurs, le scénario tendanciel laisse à penser qu'en 2030, le volume d'emploi indépendant pourrait être proche de celui qui prévalait au début des années 80 avec près de quatre millions de nonsalariés. Un taux de chômage réduit (scénario optimiste) jouerait négativement sur les potentialités de l'indépendance. La principale explication réside dans le fait qu'une diminution prononcée du chômage serait susceptible

d'entraîner des tensions sur le marché du travail. La maind'œuvre se raréfiant, les conditions salariales pourraient s'améliorer tout en détournant les actifs de l'indépendance. Un taux de chômage élevé (scénario pessimiste) aurait un effet opposé, l'indépendance représentant alors une position statutaire mais aussi sociale et économique plus confortable que le chômage.

M

algré le nombre important de créations d'entreprises et l'accroissement du nombre d'indépendants qui lui est corrélé, les projections font état d'une régression des effectifs qui s'étend entre trois et cinq années selon le scénario envisagé. Ce phénomène doit être analysé au regard de l'évolution de la structure par âge de la population des non-salariés. En effet, la majorité de ces derniers est âgée de plus de 40 ans et les départs à la retraite devraient être nombreux aux cours des dix prochaines années, notamment pour les professionnels libéraux et les commerçants. Dans cette optique, les niveaux calculés jusqu'en 2015 impliquent que les cessations d'activité pour cause de retraite ne seront pas immédiatement suppléées par de nouvelles générations d'indépendants. Ces prévisions sont d'ailleurs cohérentes avec les estimations de départs en fin de carrière réalisées par Chardon et Estrade (2007) dans le cadre d'un rapport de Centre d'analyse stratégique.

Toutefois, les potentialités d'évolution demeurent et le retournement de tendance observé depuis 2002 porte en lui les germes d'une non-salarisation de la main-d'œuvre. Cette constatation n'est pas neutre puisqu'elle implique un arrêt de la salarisation massive de l'économie. Comme le remarquaient déjà quelques précurseurs à l'image de Marchand (1998), ce phénomène pourrait bien s'avérer durable et puissant. Cette hypothèse est d'autant plus crédible que des évolutions similaires peuvent être observées chez nos voisins européens depuis une dizaine d'années. D'un point de vue purement numérique, l'indépendance est sans conteste placée sur une trajectoire d'avenir. ■

- Figure 3 Trois scénarios d'évolution du nombre de non-salariés Sources : Observatoire Alptis – Rapelli et Lespagnol (2007) 5 000 000

Observé 4 000 000

Pessimiste Tendanciel Optimiste

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* Rapelli et Lespagnol (2007).

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P R I N C I PA L E S Intitulé

A I D E S

À

L A

C R É AT I O N

Bénéficiaires

Nature de l'aide

ACCRE

• les demandeurs d'emploi,

Aide aux Chômeurs Créateurs d'emploi ou Repreneurs d’Entreprise

• les bénéficiaires de diverses allocations (de solidarité spécifique, parent isolé...),

Exonération de charges sociales pendant un an sur les revenus inférieurs à 120 % du SMIC (18 433 €).

A I D E S

S O C I A L E S

• les bénéficiaires du RMI ou leur conjoint, • les détenteurs d'un contrat “nouveaux services/emplois-jeunes”, • les salariés repreneurs de leur entreprise en difficulté,

Concerne les cotisations à l'Assurance Maladie, maternité, invalidité, décès, aux prestations familiales et à l'assurance (de base) vieillesse et veuvage.

• les titulaires d'un contrat d'appui au projet d'entreprise, • les créateurs s'installant dans une Zone Urbaine Sensible (ZUS). Aide aux salariés créateurs

• les salariés, • les bénéficiaires de l'allocation parentale d'éducation.

Aide à la création dans les zones sensibles

A I D E S

Exonération de la cotisation sociale d'Assurance Maladie-maternité pendant 5 ans limitée à un plafond de revenu annuel équivalent à 3 042 fois le montant horaire du SMIC (25 674 €).

F I N A N C I È R E S

EDEN Encouragement pour le Développement d'Entreprises Nouvelles

Même caractéristique que pour l'ACCRE.

Prêt sans intérêt d'une durée maximale de 5 ans et d'un montant de 6 098 € au plus, attribué après expertise du projet de création ou de reprise.

PCE Prêt à la Création d'Entreprise

Les entreprises individuelles et les sociétés de moins de 10 salariés en phase de création ou créées depuis moins de 3 ans (à l'exclusion des entreprises agricoles, des intermédiaires financiers et des activités immobilières).

Prêt garanti compris entre 2 000 et 7 000 € pour une durée de 5 ans venant accompagner un financement bancaire au moins égal au double du montant du PCE.

Subvention du FISAC Fonds d'Intervention pour les Services, l'Artisanat et le Commerce

Tous les créateurs à l'exclusion des pharmaciens, des professions libérales et de ceux voulant pratiquer une activité liée au tourisme.

Subvention pour l'investissement dans le capital productif d'un minimum de 10 000 € et limitée à 50 000 €

Exonération d'impôt sur les bénéfices

Les entreprises nouvelles soumises à un régime réel d'imposition ayant vocation à réaliser des bénéfices et s'installant dans une zone géographique prioritaire.

Exonération totale sur les bénéfices durant les deux premières années, puis exonération dégressive au cours des 3 années suivantes. Plafonnée à 200 000 € sur trois années consécutives.

Exonération d'impôts locaux

Les entreprises nouvelles ou les entreprises en difficulté reprises et remplissant les conditions d'exonération d'impôts sur les entreprises nouvelles.

Exonération octroyée par les collectivités locales et les organismes consulaires d'une durée de deux ans de la taxe professionnelle, foncière et/ou pour frais de CCI ou CMA.

A I D E S

6

Les travailleurs non-salariés s'installant (ou déjà installés) dans une Zone Urbaine Sensible (ZRU) ou une Zone Franche Urbaine (ZFU).

Exonération de charges sociales pendant un an sur les revenus inférieurs à 120 % du SMIC (18 433 €).

F I S C A L E S


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II- Le renouveau de l'indépendance en question La forte croissance du nombre d'indépendants et des créations d'entreprises qui l'accompagnent depuis les dernières années conduisent à s'interroger sur les raisons de ce mouvement de fond. L'influence de l'arsenal législatif déployé au cours des cinq dernières années en faveur de la création d'entreprise semble avérée. Mais, au regard des objectifs poursuivis par les nouveaux indépendants, il apparaît que l'indépendance remplisse aujourd'hui le simple rôle d'outil de régulation dans les politiques de l'emploi. Cette orientation fait peser des risques sur les nouveaux entrepreneurs qui choisissent parfois la voie du non-salariat par contrainte. 1

Un impact notable des mesures...

D e toute évidence, le rebond des effectifs non-salariés coïncide avec le déploiement des mesures promues par Renaud Dutreil* à partir Notons que la stimulation de 2003. La loi pour l'inide l'esprit entrepreneurial tiative économique du 1er août 2003, puis la loi en s'inscrit dans une faveur des PME du 2 août démarche inspirée 2005 (lois Dutreil 1 et 2) par l'Union Européenne ont permis de renforcer et formalisée dès 1997 les dispositifs préexistants par la stratégie (ACCRE, EDEN, PCE...) et européenne de l'emploi. d'en développer de nouLa Lettre de l'Observatoire veaux. Pour stimuler l'enn° 22 rappelle trepreneuriat – et par ce les fondements de cette biais favoriser une créastratégie au niveau tion d'emplois massive – européen. ces mesures visent quatre objectifs principaux : • favoriser le financement des projets de création, • sécuriser le parcours des créateurs, • alléger les coûts liés à la création, • limiter les démarches administratives.

C

e sont finalement cinquante mesures qui ont été déployées de 2002 à 2005. Elles concernent, en plus des domaines traditionnels de la création, des champs très variés comme

la formation des entrepreneurs, le soutien de gestion, l'amélioration du statut du conjoint collaborateur, l'aide à l'embauche...

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r, dès 2003, le nombre de créations, qui tendait à stagner, s'oriente à la hausse (Fig. 4). Fort de ces résultats, le Législateur s'est attaché à conforter les appuis à la création et au développement d'entreprises à partir de 2007. Entre autres mesures, il faut noter : • la “réduction Fillon” qui renforce les allègements de cotisations patronales et de Sécurité sociale sur les bas salaires dans les très petites entreprises, • les réductions d'impôts sur le revenu en faveur des investissements dans le capital des PME, • la formalisation de l'accompagnement bénévole qui ouvre droit à une réduction d'impôts au titre de l'aide apportée à la création par un demandeur d'emploi, un bénéficiaire du RMI ou d'allocations spécifiques, • les modifications de procédure d'obtention de l'ACCRE.

L es

effets directs des différents dispositifs restent difficilement mesurables et ne peuvent être jugés que sur le court terme. Néanmoins, il est fort probable qu'ils aient joué un effet d'entraînement conséquent sur la création et la reprise d'entreprises. Cette probabilité est d'autant plus grande que d'importantes campagnes médiatiques

- Figure 4 Croissance de l'emploi, de la part des non-salariés et du taux de chômage (base 100 en 2001) Sources : Prévisions d'emploi INSEE, Observatoire Alptis 120

Taux de chômage

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Part des TNS dans l’emploi total

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2003

2004

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2006

* Secrétaire d'État aux PME, au Commerce, à l'Artisanat, aux Professions libérales et à la Consommation de 2002 à 2004 et Ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales de 2005 à 2007. 7


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ont été menées tant au niveau local que national. La croissance moyenne annuelle du nombre de créations est d'ailleurs passée de 0,95 % entre 1998 et 2002 à 6,04 % entre 2003 et 2008. De plus, les évolutions de la croissance du taux de chômage et de l'emploi tendent à conforter la légitimité des politiques engagées. Leur croissance

respective apparaît relativement favorable (Fig. 5), tout en s'accompagnant d'un enrichissement de l'emploi total en emploi non-salarié. Finalement, la stratégie des Pouvoirs publics visant à promouvoir l'emploi par le développement entrepreneurial semble porter ses fruits.

- Figure 5 Croissance de l'emploi, de la part des non-salariés et du taux de chômage (base 100 en 2001) Sources : Prévisions d'emploi INSEE, Observatoire Alptis 350 000 300 000 250 000 200 000 150 000 100 000 50 000 0

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2007

... qui conduit à une reformulation des fondements de l'indépendance

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Parallèlement, si la recherche d'indépendance et l'envie

- Tableau 1 Situation initiale des créateurs d'entreprises

d'entreprendre – motivations traditionnellement mises en lumière par les enquêtes – constituent encore deux moteurs de création essentiels pour les nouveaux indépendants, la mise à son compte vise essentiellement à générer son propre emploi. Cet objectif, qui est partagé par 64 % des créateurs, prend une importance croissante : en 2002, il était énoncé par 54 % des créateurs. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant de constater que 87 % des entreprises nouvellement créées n'emploient pas de salariés.

es résultats obtenus en termes de créations d'entreprises et d'emplois appellent toutefois quelques commentaires. Tout d'abord, la structure socio-démographique des créateurs connaît depuis 2002 une évolution remarquable. La part des créateurs qui se trouvaient initialement au chômage n'a cessé de croître (Tab. 1), passant de 34 % en 2002 à 40 % en 2006.

Source : Kerjosse (2007)

S

2002

2006

112 500

146 400

Chômeurs

73 000

112 300

Sans activité professionnelle

29 500

26 300

215 000

286 000

Actifs occupés

Ensemble

Plus encore, si la moitié des chômeurs créateurs ont bénéficié de l'ACCRE en 2002, 70 % d'entre eux étaient concernés par ce dispositif en 2006. Selon Tellier (2007), le nombre des bénéficiaires a augmenté de 42 % entre 2006 et 2007 consécutivement à l'assouplissement des conditions d'octroi de cette aide. En d'autres termes, un tiers des créations a été stimulé par les allègements de cotisations offerts par l'ACCRE en 2007.

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ous l'éclairage de l'évolution socio-démographique des créateurs, la révélation de leurs objectifs conduit à questionner les fondements de cet engouement pour l'indépendance. Traditionnellement, le choix de l'entrepreneuriat reposait sur une vocation largement influencée par le milieu familial, une opportunité entrepreneuriale – comme l'émergence d'un marché inexploité – et/ou le désir d'acquérir une pleine autonomie dans la vie professionnelle. Voir notamment l'approche de Laferrère (1998) qui met en lumière l'importance du contexte familial. Dès lors, la rupture observée dans les motivations par rapport à 2002 conduit à interpréter la mise à son compte comme une recherche d'alternative face au chômage.

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e nombreuses analyses théoriques et empiriques étrangères ont déjà montré la tangibilité de ce phénomène, notamment aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Espagne.


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En effet, 66 % des bénéficiaires de l'ACCRE ont choisi la Cet effet de stimulation de l'indépendance par le chômage forme juridique d'entreprise individuelle. Celle-ci reste (recession-push) a été mis en lumière relativement tôt dans particulièrement sensible aux effets de seuils fiscaux la littérature étrangère comme le rappelle Storey (1991). intervenant au terme de la troisième année d'exploitation. Naturellement, il peut être avancé que la hausse du nombre Une telle démarche semble d'autant plus nécessaire que d'indépendants observée relève plutôt d'une conjoncture les principaux motifs de cessations économique favorable caractérisée relevés par la DARES sont la faiblesse par un faible taux de chômage. Mais, Peut-on avancer que la hausse des gains retirés, d'importants prodans cette configuration, les noudu nombre d'indépendants observée blèmes de trésorerie et la faiblesse de veaux indépendants devraient être principalement motivés par le relève d'une conjoncture économique l'activité. développement de nouveaux marchés favorable caractérisée par un faible es éléments rappellent que le choix ou, tout au moins, par une espérance taux de chômage ? d'une activité indépendante doit de gains supérieurs par rapport à leur participer d'une stratégie individuelle situation professionnelle précédente. d'emploi mûrement réfléchie. Ce principe prend une En outre, la croissance économique française reste importance croissante à l'heure où certains indicateurs relativement atone. laissent entrevoir l'émergence d'un certain degré de es faits économiques ne parviennent donc pas à entériner précarisation au sein du non-salariat. Ainsi, dans son bulletin l'existence d'un effet d'entraînement par la croissance. statistique de décembre 2007, l'ACOSS (Agence Centrale De plus, ce type d'analyse se prête des Organismes de Sécurité Sociale) plus aisément à une approche de long souligne que l'accroissement du nomL'accroissement du nombre terme mettant en relation des variabre d'indépendants s'accompagne d'indépendants s'accompagne bles économiques agrégées plutôt d'un ralentissement notable de leurs d'un ralentissement notable qu'à une approche de court terme revenus. Ce phénomène est partifondée sur des trajectoires profesculièrement sensible dans les secteurs de leurs revenus. sionnelles individuelles. des métiers de bouche et de l'hôFinalement, tout porte à croire que tellerie. Il faut rappeler que ce sont nous sommes bien en présence d'un “effet refuge” face au ces secteurs qui connaissent le plus fort taux de créations chômage. Kerjosse (2006) avance d'ailleurs que l'accroismais aussi de défaillances d'entreprises. L'incertitude sur sement du nombre de chômeurs créateurs – particulièrement la rentabilité et donc sur la pérennité des activités entraîne de chômeurs de longue durée – peut être expliqué par le nécessairement une instabilité certaine de l'emploi repérable durcissement des conditions d'indemnisation du risque au travers de ces dynamiques. chômage qui est intervenu en 2004. n outre, il faut noter que les investissements initialement injectés dans les entreprises sont très faibles. Ainsi, 35 % ès lors, plus qu'un outil de génération et de développement d'emploi, les activités non-salariées sont en partie des créations ont mobilisé moins de 4 000 €. Même si cette proportion est moindre dans les secteurs faisant appel à assimilables à un simple levier de régulation du chômage. Évidemment, les objectifs de réduction du taux de chômage un capital productif important comme l'agroalimentaire, restent louables. En revanche, la la modestie des apports initiaux laisse présager une plus grande fragilité des méthodologie retenue dans ce L'indépendance subie contexte présente quelques risques entreprises face aux aléas éconopeut représenter un risque miques. Selon l'INSEE, une entreprise non négligeables au niveau de de dégradation du statut social. la qualité du non-salariat ainsi constituée avec un capital initial engendrée. Si, pour certains, les aides inférieur à 2 000 € a quatre chances sur dix de disparaître au bout de trois années d’exploitation, à la création d'entreprise constituent sans conteste une formidable opportunité entrepreneuriale, l'indépendance alors que le taux de survie à trois ans s'élève à 83 % pour subie peut représenter un risque de dégradation du statut un investissement initial de plus de 80 000 €. Cette tendance à la sous-capitalisation est particulièrement prégnante social pour d'autres. depuis 2003, année de la promulgation de la loi pour ertes, une enquête récente de la DARES* montre que l'initiative économique qui a assoupli les conditions seuls 18 % des créateurs ayant bénéficié de l'ACCRE en financières pour la création de certaines formes sociales 2004 ne sont plus à la tête de leur entreprise deux ans et comme les SARL. demi après la création ou la reprise. Plus de la moitié de ces derniers s'était réorientée vers le salariat au moment de nfin, il faut rappeler que les nouveaux indépendants l'enquête. Toutefois, une enquête postérieure serait encourent de plus en plus fréquemment des risques souhaitable afin de réellement rendre compte des statutaires élevés. Ce phénomène, déjà analysé dans les probabilités de survie des entreprises créées par ce biais. pages de la Lettre de l'Observatoire n° 21**, est inhérent

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* Daniel (2008). ** Lettre de l'Observatoire n° 21, disponible sur www.alptis.org. 9


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On assiste à un resserrement peut certes générer des emplois mais, à la perte d'autonomie dans la s'il est mal maîtrisé, peut aussi conpratique d'une activité indépendante. du périmètre de la clientèle duire à une certaine précarisation des Cette dégradation possible du statut des nouveaux indépendants : activités indépendantes. Parallède non-salarié se rencontre princi38 % des nouvelles entreprises lement, une attention soutenue doit palement dans les situations d'essais'adressent à moins de dix clients. être portée à la pérennité des activités mage, de soustraitance, mais aussi de créées. Si quelques aides fiscales et location-gérance ou de franchise. Les financières peuvent s'étendre sur cinq ans, les procédures statistiques de l'INSEE (voir Kerjosse 2007) montrent d'ailleurs d'accompagnement des créateurs aidés sont généralement un resserrement du périmètre de la clientèle des nouveaux limitées à la première année. Les nouveaux indépendants indépendants, puisque 38 % des nouvelles entreprises peuvent alors se trouver dépourvus face à la conduite d'une s'adressent à moins de dix clients. Les risques de dépendance activité qui requière une entière autonomie, une grande vis-à-vis d'un nombre limité de demandeurs sont donc flexibilité et un esprit d'initiative prégnant. Autant de particulièrement sensibles pour les nouveaux installés, caractéristiques personnelles qui risquent de faire défaut notamment dans les secteurs des services à la personne et lors d'une orientation contrainte vers l'indépendance. Les aux entreprises. stratégies développées au sein des es risques susceptibles d'émerger lors Si certaines aides fiscales et financières politiques économiques doivent donc objectivement intégrer ces paramètres de la création d'entreprise – et en peuvent s'étendre sur cinq ans, afin de parer à une dégradation rapide particulier de la création aidée – sont les procédures d'accompagnement et durable des conditions d'exercice donc nombreux. Dans ce contexte, le déploiement d'une politique de des créateurs aidés sont généralement des activités indépendantes, notamment dans les secteurs des services. ■ stimulation de l'esprit d'entreprise limitées à la première année.

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III- Les mutations de l’indépendance et leur intégration dans les politiques de l’emploi C

omme pour les entrepreneurs en général, il est traditionnellement admis que les travailleurs indépendants cherchent à garantir la pérennité et, dans la plupart des cas, l'accroissement du périmètre de leur activité. Fortes de l'observation des évolutions structurelles de la démographie professionnelle, certaines analyses prennent le contre-pied de ce type d'approche. Le passage à l'indépendance est alors perçu comme la réponse la plus efficiente à une demande de travail atomisée et ponctuelle ne pouvant trouver satisfaction dans les solutions statutairement trop rigides que propose le salariat. Dans ce cas de figure, le choix du non-salariat est avant tout gouverné par une opportunité économique, quand bien même celle-ci serait éphémère.

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non-salariés des dernières années repose pour une partie non négligeable sur une logique d'opportunité temporaire – au moins dans les secteurs des services – ce rapport propose de favoriser le développement d'un auto-entrepreneuriat.

L'appellation est forgée en référence au “self-employment”

anglosaxon, mais sa portée est beaucoup moins étendue. De fait, elle ne recouvre que “ceux qui ont créé une activité pour répondre à un besoin immédiat et pas une entreprise au sens où on l'entend le plus souvent, c'est-à-dire dans la perspective du long terme”. Il est encore précisé qu'il s'agit de créateurs d'activité plutôt que de créateurs d'entreprise. Cette description fait donc apparaître un indépendant L'indépendance est un puissant facteur intermittent qui peut cumuler ou faire de régulation du marché du travail alterner diverses activités salariées et dans un environnement économique non-salariées.

n d'autres termes, l'indépendance devient un puissant facteur de régulation du marché du travail dans où flexibilité et réduction des coûts un environnement économique ans plaider pour la création à sont sans cesse croissants. marqué par des besoins de flexibilité proprement parler d'un nouveau et de réduction des coûts sans cesse statut, le rapport met en avant des croissants. C'est sur cette base que le rapport élaboré par propositions qui devraient rendre attractif l'engagement Hurel (2008) développe un ensemble de propositions visant dans l'auto-entrepreneuriat. Tout repose donc encore sur à promouvoir un non-salariat alternatif tant dans la forme le non-salariat tel qu'il est défini par les articles L120-3 du que dans le fond. Gageant que l'accroissement des effectifs code du travail et L311-11 du code de la Sécurité sociale.

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- Tableau 2 Les propositions du rapport Hurel Source : d'après Hurel (2008)

Cadre

Propositions

Statutaire

• Rétablir une présomption de travail indépendant, • Reconnaître juridiquement le patrimoine de l'entreprise individuelle, • Faciliter l'exercice de l'activité indépendante à domicile.

Social

• Simplifier le calcul et les modes de recouvrement des prestations sociales, • Permettre le cumul des cotisations dues au titre d'une activité (principale) salariée et non-salariée.

Fiscal

• Proposer une option de prélèvement fiscal à la source pour les travailleurs indépendants, • Associer fiscalement les revenus non-salariés accessoires aux revenus salariés ou agricoles, • Relever les plafonds du régime de la micro-entreprise et l'inclure dans le champ de la TVA.

Règlementaire

• Réviser les exigences en termes de qualifications nécessaires à l'exercice d'un métier afin d'en ouvrir l'accès au plus grand nombre, • Rendre socialement acceptable l'échec professionnel et favoriser le rebond de carrière par le travail indépendant, • Améliorer le partage des risques et des responsabilités entre les particuliers employeurs et leurs salariés (dans le cadre du CESU).

Administratif

• Assouplir les contraintes administratives afin de fluidifier les flux d'entrée et de sortie de l'indépendance tout en offrant un accompagnement robuste des entrepreneurs.

À ce niveau, seul un changement d'appréciation de la part visant à stimuler l'esprit d'entreprise. L'orientation des des administrations est appelé. Dans ce sens, et afin de politiques économiques en faveur des travailleurs reproduire l'esprit qui animait la loi indépendants et des très petites du 11 février 1994 relative à l'en- Toutes les mesures destinées à rendre entreprises a déjà été analysée dans treprise individuelle – Loi Madelin qui plus lisibles les prélèvements sociaux la Lettre de l’Observatoire précédente*. instituait la présomption de nonToutes les mesures destinées à rendre et fiscaux sont des applications salariat – François Hurel souhaite que plus lisibles les prélèvements sociaux directes des recommandations la présomption de non-salariat soit et fiscaux sont des applications considérée sous le jour d'une prédirectes des recommandations du du Conseil européen. somption de travail indépendant. Conseil européen. Les efforts souhaiCette proposition, qui suit l'évolution des jurisprudences, tés dans le domaine administratif sont de la même veine. vise à redonner aux choix de l'indépendant toute leur Des études menées au niveau européen ont d'ailleurs importance, notamment lorsqu'il ne travaille qu'avec un montré le bienfondé de ces améliorations. Naturellement, seul et unique client. En effet, les administrations fiscales une simplification profonde des procédures administratives et sociales ont tendance à systématiquement considérer à l'occasion du démarrage ou de la cessation d'activité est dans cette configuration la dissimulation d'une subordienvisagée, conformément au caractère éphémère de nation de fait. Au regard des éléments présentés plus haut, l'activité d'un auto-entrepreneur. une attention particulière doit cependant être prêtée quant à la nature des subordinations éventuelles qui peuvent l faut souligner l'attention particulière qui est accordée émerger. aux effets de seuil que génère l'imposition du régime de la micro-entreprise. Si le chiffre d'affaires est inférieur à 76 300 € pour les activités commerciales et à 27 000 € a plupart des autres propositions ne sont pas sans rappeler dans le cas des prestations de services, l'entrepreneur les fondements de la stratégie européenne de l'emploi

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* Lettre de l'Observatoire n° 23, disponible sur www.alptis.org.

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B i b l i o g r a p h i e ■ Baudry, B. et Charnet, L. (2003), “Pratiques d'extériorisation du peronnel : rationalité économique et enjeux juridiques”, La métamorphose des organisations, L'Harmattant, Paris, 157 - 176 ■ Beffy, M. (2006), “Moins d'artisans, des professions libérales en plein essor”, France : portrait social, INSEE, 139 - 157 ■ Chardon, O. et Estrade, M.A. (2007), “Les métiers en 2015 : rapport du groupe prospective des métiers et qualifications”, Centre d'analyse stratégique, La Documentation française, Paris, 179 p. ■ Daniel, C. (2008), “Enquête auprès des chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise ayant bénéficié de l'ACCRE en 2004”, Document d'études de la DARES, 136, 50 p. ■ Hurel, F. (2008), “Rapport en faveur d'une meilleure reconnaissance du travail indépendant”, La Documentation française, Paris, 51 p. ■ NSEE (2008), “Créations d'entreprises – Janvier 2008”, lnformations rapides, 51, 5 p. ■ Kerjosse, R. (2007), “Créer son entreprise : assurer d'abord son propre emploi”, INSEE première, 1167, 4 p. ■ Laferrère, A. (1998), “Devenir travailleur indépendant”, Économie et statistique, 319 - 320,13 - 28.

peut opter pour le régime fiscal de la micro-entreprise. Il bénéficie d'obligations comptables allégées et son activité peut être placée hors du champ de la TVA. Au cours des trois premières années, l'indépendant cotise en fonction d'un forfait. Son montant peut parfois être fatal à la poursuite de l'activité en cas de fluctuations importantes des revenus annuels. La possibilité de calculer directement les cotisations au regard du chiffre d'affaires effectif apparait comme une innovation administrative importante. Toutefois, la volonté affichée d'adosser ces mesures à un relèvement des plafonds fiscaux permettant de bénéficier du régime de la micro-entreprise risque d'être dissuasive. En effet, les activités pourraient dès lors être assujetties à la TVA.

D'autre part, la volonté de cloisonner le patrimoine de l'entreprise de celui du ménage de l'indépendant est porteuse de complications. La finalité de cette proposition est certes louable dans l'optique de la pratique temporaire d'une activité indépendante, puisqu'il s'agit de protéger les capitaux personnels des risques financiers. En d'autres termes, il s'agit de réduire un des risques juridiques majeurs de l'entreprise individuelle. Mais, selon le rapport, cette distinction s'accompagnerait d'une obligation d'enregistrement annuel et d'un maintien du patrimoine d'exploitation. Ces contraintes administratives potentielles – et très certainement fiscales – semblent bien pesantes au regard des secteurs d'activité que cible le rapport (services et conseils aux entreprises et aux particuliers). Dans ces derniers, les encours financiers sont en moyenne peu élevés et les capitaux engagés souvent immatériels. Il convient donc de mettre en balance les coûts induits et l'efficacité réelle de la protection patrimoniale attendue.

■ Marchand, O. (1998), “Salariat et nonsalariat dans une perspective historique”, Économie et statistique, 319 - 320, 3 - 11

La tendance est plutôt orientée vers une exigence croissante de qualifications et de certifications tant de la part du grand public que des entreprises consommatrices de biens et services.

■ Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi (2008a), “Projet de loi de modernisation de l'économie : exposé des motifs”, NOR : ECEX0808477L/Bleue-1, 20 p. ■ Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi (2008b), “Projet de loi de modernisation de l'économie”, NOR : ECEX0808477L/Bleue-1, 70 p. ■ Rapelli, S. et Lespagnol, C. (2007), “La population des travailleurs non-salariés à l'horizon 2030”, Colloque francophone “Prospective et entreprise”, IAE de Caen, DMSP, Université de Paris Dauphine, 6 décembre, 15 p. ■ Rapelli, S. et Lespagnol, C. (2008), “Les travailleurs indépendants de l'industrie, du bâtiment et des services : Portraits et perspectives”, Pharmathèmes, 144 p. ■ Storey, D. J. (1991), “The birth of new firms – does unemployement matter ? A review of the evidence”, Small Business Economics, 3, 167 - 178 ■ Tellier, S. (2008), “Un rythme des créations d'entreprises très élevé en 2007”, INSEE première, 1172, 4 p.

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ans un autre domaine, la révision générale des niveaux de qualification exigés pour la pratique des professions indépendantes concernées appelle quelques commentaires. À travers cette réflexion, c'est une plus grande libéralisation de l'offre d'activité qui est souhaitée. Mais les effets escomptés pourraient se révéler pour le moins hasardeux. Sans même recourir aux arguments qui ont motivé l'établissement d'un niveau minimal de qualification pour certaines professions au nombre desquelles il faut compter la sauvegarde de la qualité des produits et des prestations ou la protection des consommateurs, il convient de s'interroger de la pertinence de cette proposition. En effet, la tendance est plutôt orientée vers une exigence croissante de qualifications et de certifications tant de la part du grand


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temporaires. Il est ainsi prévu d'étendre le régime microsocial (voir cadre ci-dessous) à toutes les professions indépendantes, de limiter les contraintes administratives inhérentes à la pratique de l'activité dans des locaux d'habitation et de renforcer la protection du patrimoine n outre, une partie importante de la demande en activités personnel de l'entrepreneur individuel. Sous cet éclairage, il indépendantes temporaires émane d'entreprises externas'agit bien de stimuler l'esprit d'entreprise – l'entrepreneuriat lisantes. Or, Baudry et Charnet (2003) rappellent que ces au sens traditionnel du terme – plutôt entreprises sont demandeuses que chercher à générer de l'activité d'activités peu qualifiées, comme Il faut stimuler l'esprit d'entreprise intermittente par le biais d'un dérivé de l'entretien courant, ou très qualifiées en limitant les contraintes l'indépendance. à l'image du conseil en informatique. administratives inhérentes Dans un cas comme dans l'autre, la à la pratique de l'activité mesure serait vraisemblablement sans éanmoins, le projet de loi ne ferme conséquences. Toutefois, la volonté pas la porte à toutes les évolutions des dans des locaux d'habitation de faciliter l'accès à la formation fondements du non-salariat. L'article 3 et en renforçant la protection professionnelle, qui n'est envisagée favorise le cumul d'une activité salariée du patrimoine personnel que dans le cadre d'une démarche principale ou de la retraite avec une de l'entrepreneur individuel. complémentaire, pourrait être très activité non-salariée “accessoire”. Dans profitable aux auto-entrepreneurs cette optique, une dispense d'enrepotentiels. L'enjeu serait alors de fournir une formation gistrement aux registres de publicité est réclamée “dès lors qualifiante rapide tout en permettant à l'indépendant que l'activité concernée engendre un faible montant de d'accroître ses compétences et/ou de les diversifier. chiffre d'affaires”**. Or, pour bon nombre de professions artisanales, l'enregistrement au répertoire des métiers est inalement, l'ensemble des recommandations avancées par subordonnée à un niveau de qualification. La concordance le rapport Hurel semblent moins participer de l'établissement de cette dispense avec le caractère accessoire de l'activité d'une nouvelle position professionnelle que d'un assouplisconduit à s'interroger sur la structuration de l'offre nonsement des législations encadrant l'indépendance. Le projet salariale. En effet, ne risque-t-on pas de voir émerger “une” de loi de modernisation de l'économie* conforte cette segmentation conduisant à distinguer des indépendants orientation tout en escamotant l'idée de création d'activités “professionnels” et des indépendants ”amateurs” ? ■

public que des entreprises consommatrices de biens et services. Une telle mesure pourrait finalement jouer à contre-emploi.

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Le régime micro-social : une innovation perfectible ? Le régime micro-social concerne les indépendants bénéficiant du régime fiscal de la micro-entreprise pour les revenus industriels et commerciaux. Depuis décembre 2007, ils peuvent opter pour un plafonnement de leurs cotisations sociales, qui sont indexées sur le chiffre d'affaires, et un régime de déclaration trimestriel simplifié. Le déploiement de ce dispositif est emprunt de pragmatisme, puisqu'il permet d'effacer les effets des régularisations qui existent dans un système fondé sur le prélèvement forfaitaire. Toutefois, ce régime pourrait connaître quelques améliorations sensibles, comme le rappelle Bruno Chrétien – dirigeant de Factorielles – dans les pages de La Revue du Courtage de février 2008. « Le régime micro social, a priori séduisant, pose en effet un réel problème en termes de retraite. Les indépendants, n'étant plus contraints de s'acquitter d'un forfait de base correspondant à la somme nécessaire pour valider 4 trimestres d'activité, détériorent fortement leurs droits futurs à la retraite. Le problème réside dans l'assiette minimale des cotisations dues au titre de l'assurance-maladie, qui est beaucoup trop élevée (l'assiette minimale est établie à 40 % du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit un revenu de 13 310 €) alors même qu'aucune prestation contributive n'y est liée. L'assiette minimale pour la retraite par contre permet de cotiser moins, mais avec des pénalités pour les retraités de demain (qui dans certains cas peut aller jusqu'à faire perdre un quart des droits à la retraite). Cette assiette minimale de cotisation s'avère une fausse bonne idée : avec un minimum santé trop élevé et un minimum retraite trop bas, qui ne correspond qu'à un seul trimestre de cotisation ». Dans ce contexte, un rééquilibrage des cotisations minimales est appelé. Dans cette optique, Bruno Chrétien met en avant une modération drastique du minimum santé au profit d'un accroissement raisonnable des cotisations retraites. Des mesures visant à favoriser le rachat de trimestres sont, elles aussi, à envisager.

* Projet qui s'inspire directement du rapport pour ce qui concerne l'encouragement de l'entrepreneuriat. ** Ministère de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi (2008a). 13


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C o n c l u s i o n Les travaux de l'Observatoire laissent présager un avenir des plus prometteurs pour la population des indépendants. L'essor des secteurs des services à la personne et aux entreprises porte en eux les germes d'un rééquilibrage statutaire de la main-d'œuvre en faveur de l'indépendance. La salarisation presque intégrale du tissu productif qui était encore âprement défendue au début des années 90 n'aura sans doute pas lieu.

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outefois, ce phénomène naturel est porteur de risques importants tant pour la sauvegarde des qualités sociales de l'indépendance que pour la stabilité des activités envisagées. Dans ce cadre, les politiques visant à développer l'emploi par le biais des activités indépendantes pourraient rapidement conduire à des effets indésirables. Les aides et les accompagnements visant les populations privées d'emploi sont, à l'heure actuelle, les plus plébiscitées. Mais leur développement est susceptible de générer toute une génération d'indépendants qui auront fait le choix du non-salariat afin d'échapper au chômage, faute d'alternatives viables.

Ce risque d'”effet refuge” doit être systématiquement intégré lors de la définition des politiques de l'emploi fondées sur l'entrepreneuriat. Naturellement, la progression remarquable des créations d'entreprises au cours de ces dernières années ne peut pas être entièrement imputée à ce seul effet. Les créations aidées ne représentent qu'un tiers de l'ensemble et plus de la moitié des nouveaux entrepreneurs occupaient un emploi auparavant. Mais la progression de ces proportions doit engager à une certaine prudence notamment lorsque des mesures visant à atténuer les barrières à l'entrée sont envisagées.

D'autre part, les politiques économiques et sociales visant à assouplir les contraintes fiscales, sociales et administratives qui pèsent sur le non-salariat sont porteuses, à n'en pas douter, d'effets positifs. Mais à trop vouloir rechercher la flexibilité et l'adaptabilité du non-salariat dans l'espoir d'accroitre le volume de travail, ne risque-t-on pas d'en dénaturer les fondements ? Les besoins d'une autonomisation professionnelle des travailleurs sont chaque jour plus prégnants. La question est de savoir si l'autonomie est directement assimilable au non-salariat. Certaines expériences, à l'image du portage salarial, montrent que cette assimilation peut manquer de robustesse. ■

Le rapport Hurel relance le débat sur la protection sociale des indépendants Source : Bruno Chrétien in La Revue du Courtage n°833, février 2008, p.19

« Le rapport Hurel ouvre la voie : allons vers des mesures plus audacieuses sur le plan social. Le rapport Hurel est à marquer d’une pierre blanche et représente une belle étape. Toutefois il doit être l’occasion de lancer une véritable réflexion sur les finalités de la protection sociale des non-salariés. Pour renforcer l’efficacité du régime des indépendants, plusieurs pistes pourraient être préconisées : • Une “déduction sociale” des cotisations retraite et prévoyance versées au titre des contrats Madelin, pour les aligner sur les caractéristiques des contrats dits article 83 réservés aux seuls salariés. Actuellement, l’article 83 permet au salarié de déduire les cotisations versées pour une retraite ou une prévoyance complémentaire ; ce qui va à la fois baisser le montant de son impôt sur le revenu mais aussi ses charges sociales. Cet article 83 est l’équivalent de la Loi Madelin pour le non-salarié, à la différence près que le non-salarié ne peut pas déduire ses cotisations facultatives au titre de ses charges sociales obligatoires. • La faculté de bénéficier d’un régime de retraite à prestations définies dits article 39. Actuellement, le régime de retraite à prestations définies n'est pas autorisé pour le non-salarié. Sur ces deux propositions pouvant paraître particulièrement novatrices, notre idée est de s’inspirer de l’évolution de l’épargne salariale. Depuis l’extension du Plan d’Épargne Entreprise aux chefs d’entreprise, le principe a été élargi au PERCO ainsi qu’à l’intéressement. Dans un souci d’équité, il serait donc logique de faire de même avec les contrats de retraite et de prévoyance, en étendant la déduction des cotisations aux charges sociales et non pas seulement à l’impôt sur le revenu. • Enfin, le régime des indépendants pourrait être précurseur en liquidant les droits à retraite “à la carte”. On pourrait imaginer, comme cela se pratique au sein des régimes facultatifs, de laisser le choix à l’assuré de définir la quotepart des droits dont il veut demander la liquidation pour lui-même et celle qu’il voudrait voir attribuer pour son conjoint survivant, et cela sans appliquer de conditions de ressources au régime complémentaire ; comme c’est le cas désormais pour les commerçants et prochainement pour les artisans. Comme on le voit, les possibilités ne manquent pas et les différents régimes sociaux des indépendants pourraient constituer un espace d’innovation pour la protection sociale française. Le rapport Hurel aurait alors des conséquences considérables au bénéfice des entrepreneurs et de leur protection sociale ».

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La lettre de l’Observatoire -

n°24

R é t r o s p e c t i v e Thèmes significatifs explorés par La Lettre depuis 10 ans ■ La Prestation Spécifique Dépendance (PSD) (avril 1997) Les indépendants sont-ils plus spécifiquement dépendants ? ■ Numéro spécial commerce (février 2000) Définitions du commerce de gros et de détail, d’hypermarché, de magasin d’usine... et décryptage du poids économique du commerce, de ses acteurs, des entreprises... ■ Le statut du conjoint du Travailleur Indépendant (décembre 2000) Collaborateur, salarié ou associé ? Le choix n’est pas neutre puisqu’il conditionne la protection sociale. ■ Les contrats Madelin : quel bilan ? (février 2002) Succès des contrats prévoyance santé mais bilan contrasté pour les contrats retraite... ■ Numéro spécial sur les fonds de pension (juin 2002) Qu’est-ce que les fonds de pension ? Comment fonctionnent les systèmes de retraite de nos voisins ? ■ Le statut social du gérant de SARL (août 2003) Statut majoritaire ou minoritaire ? Le créateur doit prendre le temps de bien mesurer les implications de son choix. En effet, de la position du gérant dépend la nature de sa protection sociale.

■ La retraite... en réforme (novembre 2004) La loi du 21 août 2003 : quels impacts ? Décryptage d’une loi au pragmatisme certain. ■ Le Compagnonnage : une voie d’avenir (novembre 2005) Pourquoi le Compagnonnage jouit-il, contrairement aux autres filières d’apprentissage, d’une excellente réputation ? ■ Les indépendants aux frontières de l’indépendance (1er semestre 2006) Les statuts existants (entrepreneur individuel, gérant de SARL, salarié...) sont-ils adaptés à l’organisation actuelle du travail ? Existe-t-il une “troisième voie” entre indépendance totale et salariat ? ■ Les travailleurs indépendants européens : bilans et conjectures (2e semestre 2006) Quelle place l’entrepreunariat occupe-t-il dans le champs économique européen ? Les TPE/PME sont-elles au cœur de la politique européenne pour l’emploi ? Quelles sont les principales orientations de cette politique ?

N’hésitez pas à consulter ces études sur le site

, rubrique L’Observatoire, onglet Publications.

L’Observatoire Alptis de la Protection Sociale réunit les Associations de Prévoyance du Groupe Alptis, des universitaires, des chercheurs et des personnalités représentant le monde des Travailleurs Indépendants et des petites entreprises qui composent son Conseil d’Administration.

■ Son comité scientifique est constitué d’un directeur scientifique, Cyrille Piatecki, et de chercheurs dans des disciplines variées : Jacques Bichot, Gérard Duru, Olivier Ferrier, Alain Lofi, Nicolas Moizard et Jean Riondet.

■ Son premier objectif est d’appréhender le problème de la Protection Sociale des Travailleurs Indépendants, des très petites entreprises et de leurs salariés.

■ Son rôle est de recueillir et traiter des informations dans ces domaines, et de les diffuser au moyen d’ouvrages et d’une lettre semestrielle.

la lettre de

l’Observatoire est une publication semestrielle éditée par l’Observatoire Alptis de la Protection Sociale 12, rue Clapeyron - 75379 PARIS CEDEX 08 Tél. : 01 44 70 75 64 - Fax : 01 44 70 75 64 E-mail : observatoire@alptis.fr Direction de publication : Georges Coudert. Direction de la rédaction : Chantal Benoist. Rédaction : Cyrille Piatecki, Stéphane Rapelli. Coordination : Pascaline Delgutte. ISSN : 1621-97-83 Dépôt légal en cours

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lettre Obs 24

11/07/08

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Les indépendants forment une population plurielle, quant à la diversité des formes d’entreprise (entrepreneur individuel, gérant majoritaire de société, associé unique d’une EURL…) et des secteurs concernés.

Animés par un goût immodéré pour ce que d’aucuns qualifieraient de “prise de risques”, ils sont, avec leurs petites entreprises, de véritables moteurs économiques dans la construction, le commerce, les services, l’éducation et la santé. Les principaux traits sociologiques distinguant les indépendants du reste de la population active ? Pourquoi sont-ils des acteurs économiques et sociaux incontournables ? Les conditions d’exercice de la profession sontelles amenées à évoluer ? Autant de questions auxquelles les auteurs

s’attachent à résoudre de manière claire, statistiques à l’appui en 140 pages.

Cyrille Piatecki - professeur agrégé des universités en économie (Université d’Orléans) et directeur scientifi que de l’Observatoire Alptis. Stéphane Rapelli - économiste indépendant et chargé d’études auprès de l’Observatoire Alptis. Prix : 39,00 €


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